Couverture de SSS_342

Article de revue

La fabrication d’un contrat local de santé « expérimental ». Négociations et compromis sous tensions

Pages 81 à 105

Notes

  • [*]
    Nadine Haschar-Noé, sociologue, Laboratoire creSco (EA 7419), Institut fédératif d’études et de recherches interdisciplinaires Santé-Société (Ifériss), Université Toulouse III, France ; hascharnoe@orange.fr
  • [**]
    Émilie Salaméro, sociologue, Laboratoire Cerege (EA 1722), Université de Poitiers, France ; emilie.salamero@gmail.com
  • [***]
    Cette recherche a bénéficié d’un contrat financé par l’Agence nationale de la recherche (2012-2015) intitulé Evaliss (Recherche sur les méthodologies d’évaluation des politiques publiques correctrices des inégalités sociales de santé, dir. T. Lang), l’INCA, la ligue contre le cancer et du soutien de l’ARS Midi-Pyrénées.
  • [1]
    Art. L. 1434-17 du Code de la Santé publique.
  • [2]
    Le domaine de compétences de l’ARS recouvre l’organisation des soins, la prévention et la promotion de la santé, la veille et la sécurité sanitaire dans les secteurs sanitaire et médico-social.
  • [3]
    À partir des mots-clés suivants : Ariège, ARS, contrat local de santé, hôpitaux, santé, politique sanitaire, politique sociale, personnes âgées, handicapées, inégalités de santé.
  • [4]
    Nous tenons à remercier l’ARS Midi-Pyrénées et la DT09 pour leurs invitations aux réunions des comités et la transmission des documents de travail et comptes-rendus qui nous ont permis de « suivre les acteurs » lors des phases préparatoires à la signature du contrat.
  • [5]
    Tous les passages entre guillemets et en italiques sont des extraits soit d’entretiens (l’acteur est systématiquement caractérisé) soit du carnet de terrain ethnographique (dans quelques cas, il n’a pas été possible de caractériser l’acteur qui s’exprimait).
  • [6]
    Dossier de presse, Construire le projet régional de santé : une conférence de territoire pour favoriser la concertation avec les acteurs de santé de l’Ariège, ARS MIP, octobre 2010.
  • [7]
    La Dépêche du Midi, 22 octobre 2010.
  • [8]
    « Un budget délicat pour l’hôpital du pays d’Olmes. Les rumeurs de fermeture courent à Lavelanet » 16 juillet 2009 ; http://gazette-ariegeoise.fr
  • [9]
    .Dossier de presse, ARS MIP, octobre 2010.
  • [10]
    Elle ne le sera qu’en avril 2010.
  • [11]
    Il est composé de 9 personnes : le délégué territorial de l’ARS, 5 élus (1 conseiller régional et président du Pays des Pyrénées Cathares, 1 vice-président du Conseil général en charge de l’autonomie et président de la Maison départementale des personnes handicapées, 1 conseiller général, président de la Conférence de territoire, le maire de Lavelanet et président de la communauté de communes du Pays d’Olmes, le maire de Mirepoix), le secrétaire général de la préfecture, le directeur de la CPAM 09 et le directeur général de la Mutualité sociale agricole Midi-Pyrénées sud.
  • [12]
    Kit méthodologique CLS, document de travail, ARS Île-de-France, avril 2011 http://www.ars.iledefrance.sante.fr/Le-kit-methodologique.116167.0.html.
  • [13]
    Cette responsable de la DT09 est en charge du pilotage du comité opérationnel du CLS. Après une formation en droit à l’université de Bordeaux et à l’institut régional d’administration de Bastia (1981-1982), elle prépare le concours d’inspecteur de l’action sanitaire et sociale (IASS). Elle est recrutée en 1982 par la DDASS de l’Ariège en tant qu’inspectrice et ce jusqu’en avril 2010 où elle devient adjointe au délégué territorial de ce même département. Elle a une très bonne connaissance du terrain et des différents acteurs et professionnels de santé locaux.
  • [14]
    Inspectrice de l’action sanitaire et sociale à la DT09 depuis avril 2010, elle est titulaire d’une maîtrise d’anglais de l’université de Bordeaux (1995) et obtient le Certificat d’aptitude professionnelle d’enseignement en lycée professionnel en 1997. En 2007, elle obtient une licence d’administration publique à l’institut de préparation à l’administration de Rennes et s’engage dans une formation d’IASS à l’EHESP. Elle travaille à la DT09 jusqu’en 2012 comme responsable du pôle animation territoriale puis devient auditrice à la Commission nationale de contrôle de Rennes.
  • [15]
    Mis à la consultation publique de juillet à septembre 2012, le PSRS n’est adopté qu’en décembre 2012 après des premiers avis défavorables ou réservés des conseils généraux et du Conseil régional.
  • [16]
    Les signataires proposés sont : l’ARS Midi-Pyrénées, le préfet de l’Ariège, les communes de Lavelanet et de Mirepoix, la Communauté de communes du pays de Mirepoix et celle du pays d’Olmes, le Conseil général, la Caisse d’allocations familiales, la Caisse primaire d’assurance maladie et la Mutualité sociale agricole (comité de pilotage du 19 janvier 2012). Lors de la signature en juillet 2013, les communautés de communes ne sont plus signataires et la direction des services départementaux de l’éducation nationale est rajoutée.

1Considérant l’action publique comme une construction collective d’acteurs publics et privés en interaction (Hassenteufel, 2007), la recherche présentée ici se focalise sur la fabrication d’un Contrat local de santé (CLS) entre l’Agence régionale de santé (ARS) et ses « partenaires » publics et privés : collectivités territoriales, professionnels et réseaux de santé, associations d’usagers, établissements hospitaliers, etc. Dans un contexte de brouillage des compétences entre collectivités territoriales et État (Clavier, 2009) et d’affirmation de ce dernier comme chef de file en matière de santé (Loncle, 2009), l’examen des modalités de coproduction d’une action publique de réduction des inégalités sociales de santé (ISS) vise à alimenter les réflexions sur une « nouvelle » gouvernance des territoires de santé promue par les ARS et leur capacité à réguler des coopérations inter niveaux et intersectorielles (Honta et al., 2011).

2Un CLS est un contrat d’action publique, démarche de partenariat expérimentée puis généralisée le plus souvent de manière empirique qui recouvre trois caractéristiques : un temps de discussion explicite sur les objectifs recherchés et les moyens correspondants ; des engagements réciproques sur un calendrier d’action à moyen terme ; des clés de contributions (financières ou autres) conjointes à la réalisation des objectifs (Gaudin, 1999). Cette procéduralisation de l’action publique requiert d’importantes coordinations entre acteurs et échelles territoriales pour négocier les objectifs, les moyens et les modalités de suivi et d’évaluation (Gaudin et Novarina, 1997 ; Monnier et Duran, 1992). Si la démarche contractuelle vise à mobiliser les acteurs locaux placés en situation de coopération obligée et de concurrence (Mabileau, 1991), elle n’est pas exempte de critiques sur son instabilité, son opacité ou son irresponsabilité (Gaudin, 2006). Elle s’apparente à une entreprise de l’ARS pour enrôler des acteurs locaux autour d’un objectif de santé publique relativement consensuel — la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé (Lang, 2009) — mais qui se prête à une importante « flexibilité interprétative » (Trompette et Vinck, 2009) quant à sa mise en œuvre.

3Les CLS se situent dans une relative continuité vis-à-vis des contrats locaux de santé publique (CLSP) du plan espoir banlieues de juin 2008. La circulaire du 20 janvier 2009 annonce la mise en place de CLS visant à soutenir et amplifier les initiatives sanitaires locales au sein des Contrats urbains de cohésion sociale. Ceci est confirmé par la loi Hôpital patients santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009 qui prévoit que « la mise en œuvre du Projet régional de santé (PRS) peut faire l’objet de contrats locaux de santé conclus par l’ARS, notamment avec les collectivités territoriales et leurs groupements, portant sur la promotion de la santé, la prévention, les politiques de soins et l’accompagnement médico-social » [1].

4Cependant, la loi n’a pas davantage encadré la définition des CLS qui peuvent recouvrir tout ou partie des compétences des ARS [2] et, éventuellement, celles des conseils généraux dans le secteur médico-social. En 2009-2010, le CLS donne lieu à de nombreuses interrogations sur sa place dans les politiques régionales de santé (CR-DSU Rhône-Alpes, 2010 ; Institut Renaudot, 2009, 2010) et fait l’objet d’inquiétudes d’autant plus fortes qu’il se situe à un moment de mise en place des ARS « au forceps institutionnel » (Pierru, 2012) et d’élaboration des Plans stratégiques régionaux de santé (PSRS). L’un des enjeux majeurs de ces premiers débats porte sur la contribution des CLS à la mise en cohérence des politiques locales et régionales de santé. Au-delà de ces interrogations, le caractère « faible » (Trépos, 2003) de ce dispositif contractuel et peu cadré a priori par la loi HPST, laisse une marge de manœuvre et de négociation importante aux acteurs qui s’y engagent.

5Dans ce contexte, cette procédure contractuelle est engagée par l’ARS Midi-Pyrénées dès octobre 2010 sur deux sites qu’elle nomme « expérimentaux », l’un qualifié de « rural » et l’autre d’« urbain », avant sa future généralisation sur d’autres sites en région. Analysé comme un instrument d’action publique (Lascoumes et Le Galès, 2004) et de gouvernance territoriale (Pasquier et al., 2007), le CLS « rural » étudié est celui du Pays des Pyrénées Cathares situé en Ariège. À partir d’une socio-ethnographie de l’action publique en train de se faire (Dubois, 2012), nous proposons d’analyser les jeux d’acteurs, tensions et modalités de négociation entre niveaux d’action publique qui rythment chemin faisant — de son lancement en octobre 2010 à sa signature en juillet 2013 — la construction des accords et compromis (Nay et Smith, 2002) entre les « partenaires » de ce CLS, tant sur le diagnostic sanitaire du territoire et la pertinence du périmètre choisi (Offner, 2006) que sur ses contenus et ses modalités de gouvernance. Sa fabrication donne lieu à un jeu d’instrumentalisations réciproques (Lacuisse et Mayaux, 2010) entre l’ARS, les collectivités territoriales et acteurs locaux engagés dans la démarche. Pour les élus, le CLS apparaît comme une opportunité de faire valoir la légitimité politique de leurs interventions en santé, et pour les acteurs locaux, leurs expertises professionnelles autour d’un enjeu commun : pérenniser des emplois, maintenir des structures sanitaires de proximité et, in fine, imposer à l’ARS un « dialogue social territorial » (Garnier, 2012) pour fabriquer un CLS ajusté aux « spécificités » de leurs territoires d’élection et d’action. Pour l’ARS, le CLS constitue un instrument de « territorialisation » du PSRS de type top down lui permettant d’affirmer son leadership sur les questions sanitaires et médico-sociales et de mettre en œuvre, en contexte budgétaire contraint, ses objectifs prioritaires et schémas régionaux.

L’enquête de terrain

Les deux chercheuses engagées dans cette recherche ont combiné différents recueils de données empiriques entre octobre 2010 et juillet 2013 :
  • une analyse documentaire du diagnostic sanitaire du territoire (ARS, 2010), des 20 comptes-rendus des comités (de pilotage [5], opérationnel [10] et de rédaction [5]) et des versions successives des documents contractuels (fiches-actions, contrat), complétée d’une consultation des sites Internet des institutions participantes et d’une revue de la presse locale (La Dépêche du Midi, Ariège news.com, Gazette Ariégeoise, Le Turbulent) [3] ;
  • la réalisation de 16 entretiens semi-directifs (35 heures enregistrées) auprès des membres des comités de pilotage et opérationnel du CLS : agents de l’ARS et de la délégation territoriale de l’Ariège (DT09), élus locaux (maires, adjoints et conseillers généraux), professionnels de santé libéraux et hospitaliers, associations, techniciens territoriaux communaux et départementaux. Ces entretiens ont porté sur l’avant CLS et sa genèse, les raisons du choix du territoire et ses « spécificités », le travail des instances de pilotage et les apports et limites d’un CLS ;
  • des observations ethnographiques (d’une durée de 45 heures) menées entre janvier 2011 et juin 2012 lors des réunions des comités. Elles ont porté sur leur déroulement, les thèmes abordés, les débats et les interactions entre acteurs présents et ont été assorties d’un relevé précis de leurs propos respectifs. Elles ont été complétées par des discussions informelles avec les participants avant et après les réunions jusqu’à la signature du CLS, le 8 juillet 2013 [4].

L’avant CLS : le choix stratégique du Pays des Pyrénées Cathares

6Choisi par l’ARS en 2010, le périmètre du CLS correspond à une partie d’un des 33 « bassins de santé » ariégeois définis par l’instance régionale, celui de Lavelanet (Figure 1), et au territoire du Pays des Pyrénées Cathares. Ce territoire rural de 26 943 habitants regroupe 56 communes et 3 intercommunalités s’inscrivant dans les limites des cantons de Mirepoix et de Lavelanet.

Figure 1

L’enchevêtrement des territoires

Figure 1

L’enchevêtrement des territoires

Cartographe : Sylvain Salaméro (2015)
Le périmètre du CLS du Pays des Pyrénées Cathares correspond strictement aux deux cantons de Lavelanet et de Mirepoix (2014).
Le « bassin de santé » (ARS Midi-Pyrénées, 2012) couvre trois cantons : ceux de Lavelanet, Mirepoix et Quérigut (2014). Celui-ci fait partie du « bassin de vie » de Quillan (Aude, Région Languedoc-Roussillon)
Les « bassins de vie » (Insee, 2012) de Lavelanet et de Mirepoix s’étendent au-delà des limites cantonales, départementales et régionales (avant Loi sur les régions du 17 janvier 2015).
(Sources : IGN 2014, INSEE 2012)

7Pour l’une des responsables du suivi à l’ARS, ce CLS, qualifié d’« expérimental » voire de « laboratoire », constitue un choix stratégique pour avancer « prudemment » (Chambaud, 2011) en ne prévoyant que deux CLS en Midi-Pyrénées jusqu’en 2013. Cette prudence se double d’une volonté de la direction de cadrer très précisément cette procédure : « Les textes n’ont pas du tout cadré effectivement les CLS, mais c’était une volonté politique de nous laisser libres. Par exemple, en Île-de-France, ils ont 70 CLS en 2011 et avec des villes importantes ! Mais ils ont décliné des orientations stratégiques très larges… Nous, notre directeur général veut signer des choses précises, sinon il a l’impression de signer du vent ! En Midi-Pyrénées, c’est comme ça ! … donc ça prend un temps fou : le frein, il faut passer la phase des objectifs stratégiques par territoire puis décliner en plan d’actions… » (responsable du suivi, ARS) [5].

Le maintien de centres hospitaliers comme enjeu central

8Entre mai et août 2010, l’Orsmip (Observatoire régional de la santé en Midi-Pyrénées) et l’ARS réalisent le diagnostic épidémiologique du département de l’Ariège, première étape de construction du PSRS. Réalisés dans chacun des huit départements de Midi-Pyrénées, ces diagnostics visaient aussi, via l’organisation de conférences de territoires, à faciliter « …la mobilisation de nombreux acteurs… pour la mise en œuvre de CLS », selon une démarche « participative » et « prospective » [6]. Ainsi, la réalisation de ces diagnostics constitue l’une des modalités du processus de transcodage (Lascoumes, 1996) permettant à l’ARS d’agréger des informations et des pratiques éparses autour d’un projet territorialisé de santé.

9En Ariège, la première conférence de territoire a lieu le 21 octobre 2010 et rassemble 47 membres. Son président, un conseiller général, médecin pneumologue hospitalier à la retraite énonce d’emblée les enjeux à prendre en compte par l’ARS : « Ce plan (PSRS) aura des conséquences très concrètes en Ariège : avenir de la chirurgie à Lavelanet, mise en réseau des hôpitaux de proximité, création ou suppression de postes de spécialistes… travailler dans la concertation et faire avancer les choses » [7]. Ces préoccupations concernent essentiellement l’offre de soins et la densité médicale, dans un contexte de relations tendues entre le Centre hospitalier du Pays d’Olmes (CHPO) de Lavelanet, dont la fermeture du plateau chirurgical est annoncée depuis 2009 [8], et le Centre hospitalier du Val d’Ariège (CHIVA), situé dans le bassin de santé voisin de Foix. Les revendications pour le maintien de médecins spécialistes dans le bassin de Lavelanet et d’une offre de soins de proximité sont largement diffusées dans la presse locale et font l’objet de nombreuses manifestations publiques et de tensions entre la nouvelle ARS et les élus locaux.

10La direction de l’ARS lance la démarche de CLS lors de cette première Conférence de territoire selon les arguments suivants : dans des « territoires identifiés comme prioritaires… le double constat d’une situation épidémiologique défavorable et de la restructuration nécessaire du centre hospitalier de santé » [9] justifie l’élaboration d’un projet global de santé avec les acteurs locaux. C’est donc, paradoxalement, une forme de « gouvernance » participative que propose l’ARS, le CLS devant être un instrument de mobilisation censé agréger des demandes et intérêts divers autour d’un projet commun, mais assorti d’une « gouvernance » (re)centralisée visant la restructuration de l’offre de soins locale.

Le périmètre du CLS : le social avant le sanitaire et les premières négociations

11Les raisons ayant joué en faveur du choix de ce territoire apparaissent cependant plus complexes que ces deux seuls arguments avancés par l’ARS. En effet, le diagnostic réalisé sur le Pays des Pyrénées Cathares, permet de justifier ce choix essentiellement à partir d’indicateurs sociaux plutôt que sanitaires.

Un diagnostic de santé justifiant le choix du territoire

Le diagnostic fait état de caractéristiques sociales peu favorables concernant le Pays des Pyrénées Cathares : un solde naturel négatif, une population marquée par un vieillissement supérieur aux moyennes départementale, régionale et nationale ; un taux de chômage important ; un niveau d’études faible et des situations de précarité et de fragilité familiale. Sur le plan des indicateurs sanitaires, le taux des affections de longue durée est supérieur à la moyenne départementale, en particulier pour le diabète, les insuffisances respiratoires, les affections psychiatriques, les maladies d’Alzheimer et cardiovasculaires. On dénote également un déficit de prévention secondaire et de prise en charge médicalisée des personnes âgées. Ces indicateurs se combinent avec des densités d’infirmiers, de dentistes et de kinésithérapeutes inférieures aux moyennes régionale et départementale, un vieillissement des médecins généralistes et un déficit d’équipements d’accueil pour les personnes âgées dépendantes.

12Comparés à d’autres bassins de santé ariégeois, les indicateurs de santé du territoire retenu pour le CLS ne paraissent pas « si catastrophiques que ça » (chargée de mission ISS, ARS). Les indicateurs de précarité sociale et économique ont été davantage déterminants dans le choix de ce territoire, comme le confirme un agent de la DT09 : « C’est sûr que si on avait regardé uniquement les indicateurs de santé publique, c’est pas là qu’on serait allé… Ah oui, oui, parce que quand même, Lavelanet et Mirepoix, ils ne sont pas en si mauvaise santé que ça, quoi voilà (rires) mais ils sont pauvres, la précarité est prégnante… »

13La forte déprise du tissu industriel dans les cantons de Lavelanet et de Mirepoix et ses conséquences sociales (chômage, précarité, départ des populations les plus jeunes etc.) constituent une toile de fond propice à la prise en compte des ISS et du volet social des politiques sanitaires.

14Cet élément de contexte joue également d’une autre façon en faveur du choix de ce territoire et fait l’objet d’une première négociation avec les élus locaux. En effet, en janvier 2010, un contrat de revitalisation du Pays d’Olmes (2010-2013) est signé entre le maire de Lavelanet, les présidents des conseils régional et général et le préfet de département. Son volet santé et médico-social « ne convient pas à l’ARS » (chargée de mission ISS, ARS) pour deux raisons. Son directeur général souhaite étendre le futur CLS au canton voisin de Mirepoix et ne pas s’en tenir seulement à celui de Lavelanet, afin de mieux « coller au périmètre du bassin de santé » (chargée de mission ISS, ARS) et couvrir une population plus importante. Enfin, pas encore officiellement installée [10], l’ARS refuse de s’engager financièrement sur la restructuration de l’hôpital de Lavelanet réclamée par les élus et qu’elle juge trop coûteuse. Afin de « calmer le jeu avec les élus locaux » (agent DT09), la direction de l’ARS leur propose de retirer ce volet santé du contrat de revitalisation en échange d’un « contrat moral gagnant-gagnant » en s’engageant à ce que ce volet fasse l’objet d’un futur CLS. Cette proposition permet à l’ARS d’installer son leadership territorial (Smith et Sorbets, 2003) sur les questions sanitaires et médico-sociales et son rôle d’interlocuteur privilégié des communes et du département. Pour le vice-président du Conseil général, malgré ses réticences initiales à devenir « un terrain d’expérimentation de l’ARS », cette proposition offre l’opportunité d’ouvrir des négociations pour « consolider les schémas départementaux de ses filières médico-sociales et leur gouvernance » et affirmer le statut de « chef de file » du département dans ce secteur. Pour le maire de Lavelanet, c’est « un moyen pour réclamer des moyens », renforcer l’attractivité de sa commune, montrer « qu’il y fait bon vivre » et développer des emplois et de nouveaux services à la population.

L’installation des instances de gouvernance : définir le cadre des négociations

15Pour mener à bien les négociations nécessaires à la construction d’un CLS, l’ARS met en place deux instances de concertation : l’une dite « stratégique et politique », le comité de pilotage, et l’autre plus « technique », le comité opérationnel. Leur composition diffère fortement : hormis l’ARS et la préfecture, le comité de pilotage est majoritairement composé d’élus locaux et de représentants de l’assurance maladie ; le comité opérationnel, essentiellement de techniciens territoriaux et professionnels de santé, libéraux ou hospitaliers, et d’associations ou d’entreprises médico-sociales intervenant auprès des publics en difficulté.

Le comité de pilotage : un diagnostic peu partagé

16Le comité de pilotage se réunit pour la première fois le 16 décembre [11] avec à l’ordre du jour : la présentation du CLS et de sa méthodologie, le diagnostic territorial, l’organisation du travail et la composition du comité opérationnel.

17Les élus locaux font remarquer d’emblée que ce premier diagnostic quantitatif mériterait « d’être affiné » pour les populations dites « spécifiques » (personnes âgées et en situation de handicap). Le représentant du Conseil général propose de réaliser « une étude des besoins » et l’ensemble des élus demandent que l’étape suivante du travail débute par « l’identification des problèmes majeurs » via la consultation du comité opérationnel.

18Ces critiques tiennent au mode de fabrication du diagnostic : essentiellement quantitatif et réalisé à partir des données disponibles auprès de l’Orsmip et de l’ARS, il apparaît, à l’inverse des « bonnes pratiques » du kit méthodologique CLS [12], comme très peu « partagé », aucun des membres du comité de pilotage n’ayant été consulté comme, par exemple, les services sociaux du Conseil général ou de l’Assurance maladie. Le comité de pilotage charge alors le comité opérationnel de poursuivre ce diagnostic sur un mode plus qualitatif. Cette épreuve est qualifiée de « difficile » par la responsable du suivi du CLS de la DT09 qui reconnaît être « … partie au charbon avec les partenaires locaux… il aurait fallu travailler davantage avec les services sociaux du Conseil général oui, parce qu’eux, ils ont connaissance du terrain et oui, avec la Protection maternelle infantile, avec les services sociaux, les contrats en insertion, tout ça, ils ont ces outils… ». Par ailleurs, une ingénieur de la DT09 confirme une forme de précipitation dans la réalisation d’un diagnostic « à marche forcée car l’ARS souhaitait signer rapidement ce CLS, en juin-septembre 2011. Le recueil de données était très incomplet, car un certain nombre d’opérateurs ou de services publics n’ont pas été associés… or c’est eux qui avaient les données ».

19En fait, ce diagnostic semble davantage relever d’une stratégie de justification du choix du territoire par l’ARS, plutôt que d’un premier outil de réflexion collective susceptible d’engager un travail partenarial et concerté avec les acteurs locaux (Haschar-Noé et Salaméro, 2014).

Travailler au « bon » niveau pour négocier le CLS : le choix du périmètre géographique « pertinent » et des « partenaires » de travail

20Au-delà des chefs-lieux des cantons de Mirepoix et de Lavelanet, le directeur de l’ARS fait de la signature du président du Conseil général un préalable stratégique obligatoire. Ce préalable pose un certain nombre de problèmes aux agents de la DT09, même s’ils reconnaissent que le conseil général est « indispensable » compte tenu de sa connaissance des populations en difficulté, de ses « outils et travailleurs sociaux… » et de ses compétences règlementaires dans le secteur médico-social. En effet, la question du niveau pertinent de l’action sanitaire locale se pose (Offner, 2006), du fait que le découpage des « bassins de santé » de l’ARS fondé uniquement sur l’offre de soins de premier recours, ne recouvre que très partiellement celui des cantons et « bassins de vie » et accentue la superposition des territoires d’intervention (Figure 1). Ainsi, pour la responsable du suivi du CLS à la DT09 [13], la notion « d’infra bassin de santé » est plus commode pour agir car « le bassin de santé… voilà, ça ne correspond pas aux bassins de vie, ça ne correspond pas à des découpages d’articulation médico-sociale ». De son côté, une chargée de mission de l’ARS exprime le scepticisme des agents de l’ARS à l’égard du découpage en « bassins de santé » : « Pour nous, ça nous met un carcan (les bassins de santé) dont parfois on a du mal à tirer du sens quoi… Pour moi c’est bloquant, moi j’ai une pierre d’achoppement avec la direction. Mais les délégations territoriales aussi sont vent debout sur cette affaire, parce que nous, il y a certains départements où il y a deux territoires de santé, vraiment, voilà, nous on essaie de faire de l’infra bassin et… je dois dire que ça ne marche pas toujours… alors plus grand, c’est plus complexe et surtout, c’est plus de partenaires » (chargée de mission ISS, ARS).

21Selon les agents de la DT09, le travail de mobilisation des « acteurs du territoire » devrait plutôt s’effectuer auprès des maires et éventuellement, des présidents des communautés de communes, selon l’argument que ces derniers agissent dans de nombreux domaines sociaux et médico-sociaux et que la signature avec le Conseil général ne constitue donc pas une obligation. Le « bon niveau » serait plutôt celui de la proximité qui facilite le traitement au cas par cas des contenus du contrat et les négociations avec un nombre plus restreint d’interlocuteurs. Ces agents avancent enfin un autre argument : les deux cantons choisis par l’ARS n’ont pas de « cohérence », leurs problématiques sociales et sanitaires sont hétérogènes et le faible niveau d’interconnaissance entre acteurs locaux même proches géographiquement, apparaît comme un frein aux négociations et à la construction des accords. La correspondance entre périmètres du « bassin de santé ARS », des « bassins de vie » et du CLS est donc vécue comme « artificielle », voire imposée par le siège de l’ARS, et souffre d’un usage institutionnel de la notion de territoire ignorant ce qui pourrait constituer sa cohérence spatiale, identitaire, sociale et politique ou même fonctionnelle (Di Méo, 1998).

La fabrication des fiches-actions sous une triple tension, entre cadrage et débordement

22Le comité opérationnel est chargé de la poursuite du diagnostic territorial et de la fabrication des fiches-actions du CLS. Nos observations de terrain permettent de repérer trois tensions majeures qui traversent ce processus.

Le comité opérationnel : diversité des acteurs et définition du périmètre d’action du CLS

23Proposée par l’ARS lors du premier comité de pilotage, la composition du comité opérationnel est largement amendée par les élus locaux qui demandent son élargissement à huit structures d’action sociale ou représentant des professionnels de santé. Après débats, ce comité est composé in fine de 32 personnes issues d’univers professionnels très variés.

24Réuni pour la première fois le 24 janvier 2011, ce comité est animé par deux inspectrices de la DT09, l’une responsable du suivi du CLS (cf note 13), l’autre du Pôle animation territoriale [14]. Après une présentation du CLS et de sa méthodologie, elles organisent un « sondage » auprès des personnes présentes : chacune doit noter par écrit « les trois principaux problèmes de santé qu’elle identifie sur le territoire » (carnet de terrain). Des travaux de cette première réunion, ressort un consensus entre participants sur les « problèmes spécifiques » au territoire : faible accessibilité aux soins pour les personnes les plus fragiles, déficit de professionnels de santé spécialisés et faible coordination de ces derniers, manque d’articulation entre services sociaux et services de santé.

25Lors de la deuxième réunion, les animatrices de la DT présentent les résultats bruts de ce « sondage », « réorganisés » en deux pôles : l’offre de structures et les attentes des « usagers » selon un schéma de type offre-demande (carnet de terrain du 17 février 2011). Cette (re)formulation, permet à la DT de cadrer le périmètre d’action du CLS afin qu’il recouvre l’ensemble des champs de compétences de l’ARS et donc de rendre les « problèmes » traitables (Lascoumes, 1996). La DT09 opère un second cadrage lors de cette même réunion en définissant les modalités d’organisation du comité opérationnel via un cahier des charges visant à fabriquer 12 fiches-actions « précises ». Quatre groupes de travail sont organisés selon quatre thématiques choisies par l’ARS, chacune devant donner lieu à trois fiches-actions : « personnes âgées » ; « accès aux soins des personnes les plus fragiles » ; « réponses aux problèmes de santé mentale » ; « prévention-éducation-promotion de la santé ». Entre mars et mai 2011, six réunions de travail sont programmées, chacune regroupant en parallèle deux thématiques. À chacune de ces réunions, entre 30 et 35 personnes sont présentes, mais leur turn-over est relativement important selon les séances et thèmes de travail. Au total, 56 personnes participent à l’élaboration des fiches-actions parmi lesquelles beaucoup ne sont pas désignées « officiellement » comme membres du comité opérationnel.

Un cadrage temporel et institutionnel contraint : une « navigation à vue » et des interrogations sans réponse

26Pour chaque thématique, les groupes de travail sont tenus d’avancer selon un programme fixé par la DT : « identification des forces et des faiblesses » (séances 1-2), « détermination d’un plan d’action, propositions et priorisation des actions » (séances 3-4), « déclinaison et finalisation des actions » (séances 5-6). L’objectif des réunions est de compléter le diagnostic initial et de rédiger des fiches-actions décrivant précisément le contenu des actions, leur mode de financement, les porteurs, les partenaires associés, le calendrier et les indicateurs d’évaluation. Pour l’ARS, tout doit être terminé pour validation par le comité de pilotage en juin 2011 et signature du CLS en septembre 2011. Ce planning « idéal » sera perturbé et la fabrication des fiches ralentie suite aux nombreuses interrogations et débats soulevés lors des réunions.

27Une première catégorie d’interrogations porte sur le choix du territoire et le sens de la signature d’un CLS. Par exemple, lors de la réunion du 5 avril 2011, plusieurs participants interpellent les animatrices de la DT09 sur les objectifs du CLS au regard de l’offre de soins et sur le choix du territoire : « Est-ce que l’objectif du CLS va permettre de pérenniser des structures ou d’appuyer des structures mobiles, surtout en Ariège pour faire entrer dans les soins ? La première fiche-action devrait être de pérenniser… » (chef de service de la Direction départementale de la cohésion sociale et de la protection des populations, DDCSPP) ; « Si on passe par le CLS pour pérenniser… on peut s’inquiéter pour les autres départements !! » (directeur du service Aide pour le développement social, ADS, du conseil général) ; « Rien n’est sûr et si on ne fait que pérenniser… pourquoi faire un CLS alors ? Et le financement ? Mais si c’est pour assurer l’existant… ! Et puis pourquoi le choix de l’Ariège ? Parce qu’il y a de la précarité vu les indicateurs socioéconomiques et puis le problème des centres hospitaliers ? » (médecin généraliste libéral, carnet de terrain du 5 avril 2011).

28Afin de mettre fin au débat engagé, l’animatrice de la DT propose de focaliser le travail du groupe sur la définition des publics fragiles sans toutefois répondre aux questions posées.

29Une deuxième catégorie d’interrogations a trait aux difficultés de mobilisation et coordination des professionnels de santé pour lesquelles les quelques professionnels libéraux présents aux réunions avancent plusieurs arguments : la faible densité de médecins, leur manque de disponibilité, l’absence d’incitations financières associées à ce travail de coordination et, pour certains, leur faible intérêt pour la question des inégalités sociales de santé (ISS) : « … que veut dire formaliser un réseau dans un territoire comme l’Ariège ? Il y a peu de médecins libéraux et plein de paperasses. Moi, je suis bénévole et militant mais quels moyens avons-nous pour élargir le groupe ? Il faut trouver un budget-temps donc un financement pour les professions libérales… Pour un médecin, les situations de précarité soit ça prend beaucoup de temps, soit très peu et à ce moment-là, il se tourne toujours vers les urgences. Donc il faut donner envie aux médecins de tirer la pelote de loin au niveau des ISS… » (médecin généraliste, élu de l’Union régionale des professionnels de santé, carnet de terrain du 5 avril 2011).

30Enfin, une troisième catégorie d’interrogations récurrentes concerne les modalités de pilotage et surtout de financement du CLS. Par exemple, lors de la réunion du 11 mai 2011 portant sur l’accès aux soins des publics fragiles, le projet de maison de santé pluri-professionnelle de Mirepoix, qualifié « d’embryonnaire » par un participant, fait l’objet de doutes, non sur le principe de sa création qui fait consensus, mais sur ses porteurs, son financement et son futur mode de gouvernance. Pour toute réponse, l’une des animatrices de la DT avoue « qu’elle ne sait pas grand-chose de cela et que toutes les fiches qui sont là ne sont pas issues des acteurs qui viennent en réunion » (carnet de terrain). Les participants remettent alors en question deux modes d’action jugés incompatibles « un qui part du terrain et l’autre d’en haut » (médecin pédiatre hospitalier), estimant que ces procédures descendantes sont un « vrai problème » (infirmier, centre psycho-médico-social) et « que cela ne tient pas compte de la réalité du terrain » (infirmier hospitalier).

31Si les modalités centralisées du pilotage régional apparaissent comme un frein à l’engagement des acteurs professionnels, elles rendent également complexe le travail des agents de la DT en charge d’animer et de négocier localement le CLS. Ces agents ont le sentiment de travailler dans l’urgence et de ne pouvoir répondre précisément aux interrogations des participants au comité. L’impression générale qui se dégage de nos observations, confirmée par ces agents, est qu’ils « naviguent à vue » au fil des réunions avec un « … manque de visibilité, un mode de gouvernance imposé par le haut, dans le flou le plus total et sans avoir les informations » (infirmière DT09, carnet de terrain du 11 mai 2011). La mission d’animation territoriale confiée par le siège aux délégations apparaît en effet comme un nouveau métier aux contours troubles et flous, les agents de la DT étant pris entre deux feux : respecter les orientations prises par le siège de l’ARS et composer avec les pressions des élus, professionnels ou responsables d’établissements locaux (Pierru et Rolland, 2015).

« L’inflation » des fiches-actions : un double débordement par le bas et par le haut

32Le cadrage initial du travail de fabrication des fiches par l’ARS prévoyait 12 fiches-actions au total afin, « qu’elles aient une chance d’être financées » (animatrice de la DT). À l’issue des 6 réunions des groupes de travail, 31 fiches-actions sont proposées par le comité opérationnel et font l’objet d’un classement a posteriori, remanié plusieurs fois par la DT et l’ARS. Cette production qualifiée « d’inflationniste » par l’ARS tient à une forme de précipitation pour tenir les délais prévus par le siège pour la signature du CLS mais aussi à un défaut de « pragmatisme et d’efficacité » dû à une démarche engagée « tous azimuts… dans laquelle on ne s’est pas donné d’interdit… et c’est parti dans tous les sens !!! » (chargée de mission ISS, ARS).

33Cependant, deux autres interprétations de cette « inflation » peuvent être avancées. La première est la présence en nombre lors de réunions d’acteurs engagés dans des actions sanitaires locales souvent auprès de publics « fragilisés », qui trouvent dans la démarche du CLS une opportunité pour faire reconnaître, financer ou assurer la pérennisation de leurs programmes voire de leur poste de travail : « C’est une des limites du projet. En effet, les groupes de travail ne comportent que des personnes du terrain qui sont là aussi pour exposer leurs requêtes, éventuellement pour faire un étayage de leur modèle d’innovation » (responsable du suivi, DT09) ; « Ce qui me gêne dans le groupe de travail… (c’est que) chacun essaie de préserver ses acquis et (a) une attitude de méfiance vis-à-vis des autres dispositifs » (médecin, carnet de terrain du 11 avril 2011).

34Cette mise en concurrence implicite des opérateurs est aussi l’un des effets de la demande de l’ARS de limiter a priori les fiches-actions dans le même temps que sa capacité à les financer diminue. En effet, la responsable du pôle animation territoriale de la DT, précise que les contraintes budgétaires entraînent « l’obligation de diminuer les thématiques… mais certains associations se demandent où elles vont rentrer ?… En disant CLS, c’est le mot magique pour être financé par l’ARS, alors… » (carnet de terrain du 24 mai 2011).

35Une seconde interprétation tient à l’inclusion relativement tardive dans la démarche de fiches-actions « venues d’en haut », rédigées soit par le siège de l’ARS, soit par d’autres directions ou opérateurs régionaux, procédé vivement critiqué par certains acteurs locaux. Le programme national nutrition santé (PNNS), promu par sa référente régionale à l’ARS, est particulièrement représentatif de cette démarche top down. Présente à une seule réunion, elle y mène un triple travail d’information, d’enrôlement et de mobilisation des acteurs sur l’importance de la prévention nutritionnelle. Elle insiste longuement sur la nécessité que les communes signent la charte « Villes actives » du PNNS pour s’inscrire dans le cadre des programmes préventifs nationaux et régionaux et obtenir ainsi des financements. In fine, cinq fiches-actions en référence au PNNS et au Plan obésité sont intégrées dans l’axe promotion de la santé du CLS, sans que, lors des réunions, cette thématique n’ait émergé des demandes des acteurs locaux ou ne se fonde sur des indicateurs sanitaires précis.

36D’autres fiches-actions sont fabriquées ainsi : le diagnostic des maladies chroniques, la maison de la prévention de Lavelanet, la maison de santé pluriprofessionnelle de Mirepoix, les actions santé du rectorat de Toulouse, etc. Interrogées à plusieurs reprises sur l’état d’avancement de ces fiches-actions par les membres du comité opérationnel, les animatrices de la DT répondent le plus souvent, « nous n’avons pas d’information, c’est le siège de l’ARS qui a pris en charge cette fiche » comme c’est le cas pour d’autres fiches-actions adressées directement « … aux promoteurs des projets pour qu’ils les remplissent eux-mêmes » (carnet de terrain du 24 mai 2011). Assurant ainsi un rôle de « tampon » entre les injonctions du siège et les porteurs de projets locaux, le travail de ces intermédiaires (Nay et Smith, 2002) est marqué par une grande incertitude et une forte tension entre règles de contrôle imposées par l’ARS et délégation aux agents de la DT d’une animation territoriale aux contours mouvants. Certains d’entre eux expriment un sentiment de perte d’efficacité et de souffrance au travail leur demandant de « prendre sur eux » afin de résoudre des contradictions inhérentes aux décisions du siège (Dujarier, 2008).

Négocier un CLS : jeux d’acteurs, usages et résistances en contexte incertain

37Les tensions repérées au cours du processus de fabrication du CLS tiennent en partie aux jeux de pouvoir entre acteurs qui s’opposent à ce CLS ou se l’approprient, selon l’état du rapport de force entre trois niveaux d’action publique : régional, départemental et communal-intercommunal.

38Pour l’ARS et ses agents, ce CLS étant le premier signé en Midi-Pyrénées, il « en paye un peu les pots cassés », ce qu’ils attribuent au manque d’expérience et d’habitudes de négociation au sein d’une « jeune » agence, peu coutumière d’une démarche de projet concerté et qui « tâtonne » (chargée de mission ISS, ARS). Ensuite, le diagnostic territorial initial étant jugé incomplet par les acteurs locaux, ceux-ci ont remis en cause les quatre axes stratégiques du CLS choisis a priori par l’ARS et n’ont eu de cesse d’élargir les champs d’intervention pour y intégrer, en les recyclant, les politiques sanitaires locales « déjà là ». Cette forme de surenchère a singulièrement complexifié le travail de construction collective des accords. En outre, selon les élus et agents du Conseil général, une trop grande « emprise régionale sur le choix de ces objectifs stratégiques » et surtout « la non prise en compte des spécificités ariégeoises en termes d’inégalités territoriales… et des schémas sanitaires votés par le département » les ont conduit à adopter diverses stratégies de résistances, allant de sa contestation frontale à son contournement puis à son appropriation conditionnelle (Halpern et al., 2014). Enfin, les incertitudes et fluctuations du cadrage institutionnel, un manque d’appui méthodologique des agents de la DT et leur déficit d’informations sur les dossiers gérés en direct par l’ARS, ont donné l’impression d’un « pilotage incohérent » du processus. Quand débute la démarche de contractualisation en 2010, la volonté de l’ARS de faire coïncider les contenus du CLS avec les axes stratégiques du PSRS se heurte à sa construction largement inachevée [15]. Ainsi, c’est chemin faisant que les agents de la DT ont dû (re)mobiliser les acteurs locaux et les convaincre d’intégrer leurs fiches-actions dans les objectifs du PSRS. Ces fiches-actions longuement négociées avec les membres du comité opérationnel en 2011 n’ont fait l’objet d’un « traitement » par l’ARS et la DT qu’a posteriori, plus d’un an après en 2012-2013 afin de les encastrer dans le plan régional. L’opération a alors consisté, sans pour autant donner l’impression que les fiches-actions étaient « plaquées » et venaient « d’en haut », à « élaguer » (agent DT09) les propositions jugées trop nombreuses et éloignées des axes stratégiques du PSRS.

39Dans cet environnement incertain, se sont rajoutés les doutes, les inquiétudes et les questions des acteurs infrarégionaux qui ont longuement hésité à s’engager dans un processus dont ils saisissaient mal les finalités et les bénéfices potentiels. L’entreprise de mobilisation de l’ARS s’est heurtée ici au « flou » de la démarche initiale, à sa centralisation et à des modalités de relations partenariales à inventer, plus particulièrement dans le secteur médico-social atomisé entre de multiples organisations et dans un champ de compétence partagé avec le Conseil général. Cette faiblesse du dispositif s’est doublée d’un problème récurrent de financement, dans un contexte national de rigueur budgétaire et de manque d’autonomie des ARS (Rolland et Pierru, 2013). La pluri annualité du contrat (3 à 5 ans) a rendu pour le moins réticents les financeurs locaux, les budgets des collectivités ou organismes locaux étant annualisés. Certains d’entre eux ont mis l’accent sur la « logique comptable » de l’État qui prévaudrait dans ces politiques contractuelles afin de faire financer un certain nombre d’actions par les collectivités territoriales. Par exemple, un directeur de service du Conseil général avance en réunion : « Ce CLS au mieux des cas, vise à redistribuer les billets de l’État, voire à en rajouter. Au pire à en enlever ; le président du Conseil général ne va pas valider les fiches-actions, parce que pour lui, c’est l’État » (carnet de terrain du 11 mai 2011).

40Enfin, la préparation du CLS a réactivé les conflits entre l’ARS et les collectivités territoriales à propos de la fermeture du plateau chirurgical de l’hôpital de Lavelanet, survenue en 2010. Les élus locaux ont mené « un front commun avec les associations et les techniciens territoriaux » (maire signataire du CLS) pour faire accepter à l’ARS sa réouverture comme « préalable non négociable » (conseiller général) à leur engagement dans le CLS. Les négociations entre ARS et collectivités territoriales ont connu d’autres points de blocage tels : le « diktat de l’ARS pour habiller Pierre en déshabillant Paul » (directeur de service du Conseil général) qui proposait de redistribuer les places d’EHPAD entre différents « bassins de santé » ariégeois ; l’« ignorance » des schémas départementaux votés par le Conseil général et de « leurs modalités de territorialisation basées sur quatre Pays… porteurs d’emplois et de développement économique » (conseiller général) ; l’aide financière au développement de géronto-technologies pour réduire les ISS (chef d’entreprise), etc.

41Ces tensions entre l’ARS et ses « partenaires » locaux se sont cristallisées lors de la présentation des propositions des groupes de travail au dernier comité opérationnel du 14 juin 2011. Un classement de 10 fiches-actions prioritaires sur les 31 proposées est réalisé par « sondage ». Suite à cet avis consultatif, le comité de pilotage du 23 juin 2011 est chargé de valider ces propositions pour signature du contrat en septembre 2011. Ce comité n’a jamais eu lieu pour cause d’absence des élus locaux qui auraient, selon les propos de la DT, « boycotté publiquement (le comité) sous prétexte qu’ils n’avaient pas été suffisamment associés à la démarche ou peu tenus au courant de l’avancée des travaux » (carnet de terrain du 13 mars 2012). Qualifié plutôt de « mésentente » sur les contenus du CLS par les élus locaux, cet épisode se traduit par un arrêt total des négociations durant 7 mois. Suite à une rencontre à huis clos entre le directeur général de l’ARS et le président du Conseil général, elles reprennent en janvier 2012 par la réunion d’un comité de pilotage élargi auquel sont conviés pour la première fois les conseillers généraux des deux cantons concernés par le CLS. Ce comité retient trois axes stratégiques « partagés qui constitueront le support de contractualisation », fixe la liste définitive des signataires du CLS [16] et relance les négociations via la constitution d’un comité de rédaction restreint composé de la DT, d’un représentant pour chacune des deux communes signataires et de deux représentants du Conseil général (mars-juin 2012). Ses travaux conduiront à la signature du premier CLS en Midi-Pyrénées, le 8 juillet 2013, soit 33 mois après son lancement en octobre 2010.

Conclusion

42L’analyse des étapes de la fabrication de ce CLS « expérimental » est d’abord une contribution à la sociologie des instruments d’action publique, en mettant en avant leur caractère instable et leur efficacité incertaine au regard de leurs objectifs, en l’occurrence une contractualisation négociée, visant l’articulation des politiques régionales et locales de santé, le décloisonnement du système sanitaire français et la réduction des inégalités sociales et territoriales de santé. Marquée par des tensions souvent vives et la construction de compromis « au forceps » (Pierru, 2012), la fabrication de ce CLS se déroule selon une temporalité heurtée, entre des avancées rapides, voire précipitées, et des arrêts brutaux et parfois longs des négociations jusqu’à la signature officielle. Ces conflits et négociations sont au cœur d’activités de transcodage par lesquelles finissent par se stabiliser des significations communes et des modalités renouvelées d’action publique. Les débats sur l’intérêt même du lancement d’un CLS, sur les diagnostics territoriaux ou sur le périmètre géographique du CLS, comme la constitution d’un cercle élargi d’alliés sont autant d’activités conduisant à rendre ces contrats recevables et « gouvernables » (Lascoumes, 1996).

43Cette enquête montre également combien, les élus locaux (du Conseil général, des communes ou des intercommunalités) sont en mesure de contrer les initiatives de l’État (Le Lidec, 2007) et de faire valoir leurs intérêts et leurs représentations de la santé publique. On a vu ainsi comment, en critiquant la pertinence des « bassins de santé » comme périmètre du CLS, les élus locaux ont renvoyé l’ARS et l’État à leurs responsabilités et capacités à réduire les inégalités de santé. Alors que la procéduralisation de l’action publique (Gaudin, 2006) requiert des coordinations importantes entre acteurs des niveaux régionaux et infrarégionaux afin que se négocient conjointement les objectifs et la répartition des ressources, le mode de gouvernance centralisée de l’ARS et les résistances des acteurs locaux révèlent une alternance entre engagements prudents, rapports de force et jeu du compromis entre ARS et collectivités territoriales. Régionalisation et contractualisation de la santé sont aussi marquées par le « flou » du dispositif et les incertitudes du financement des actions, dont les procédures se durcissent via des instruments de type économique comme les appels à projet mettant en concurrence les territoires dans un contexte de restriction budgétaire (Honta et Haschar-Noé, 2011). Permettant de consolider la légitimité politique des élus à agir en santé et des expertises professionnelles, mais aussi de pérenniser des emplois et d’améliorer l’attractivité des structures hospitalières et ambulatoires locales, cette instrumentation apparaît comme un risque de mise en concurrence des opérateurs locaux et d’accroissement des tensions entre acteurs de santé, hospitaliers ou libéraux, œuvrant dans le médical ou le médicosocial, au nom des principes d’efficience, de réduction des coûts et de mutualisation des moyens humains portés par les réformes en cours.

44Le choix d’analyser le CLS comme un instrument d’action publique et les résistances ou adhésions qu’il génère, loin de dépolitiser ou de techniciser les processus étudiés, rend compte d’une (re)politisation de la santé locale qu’il s’agit d’ériger en bien commun territorial et des dynamiques sociales à l’œuvre (Basson et al., 2013). Comparé à d’autres CLS signés dans cette même région mais selon un registre plus consensuel, cet instrument apparaît comme le levier d’un gouvernement des compromis (Nay et Smith, 2002) exigeant de fabriquer du « sur mesure » fait d’ajustements aux configurations d’acteurs, à leurs interdépendances et relations de pouvoir et aux territoires « vécus », autrement dit un apprentissage de l’action collective en santé publique (Haschar-Noé et Salaméro, 2014).

45 Liens d’intérêts : les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt en rapport avec cet article.

Bibliographie

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Mots-clés éditeurs : instrumentation, gouvernance, action publique, inégalités sociales et territoriales de santé

Date de mise en ligne : 20/06/2016.

https://doi.org/10.1684/sss.2011.0205

Notes

  • [*]
    Nadine Haschar-Noé, sociologue, Laboratoire creSco (EA 7419), Institut fédératif d’études et de recherches interdisciplinaires Santé-Société (Ifériss), Université Toulouse III, France ; hascharnoe@orange.fr
  • [**]
    Émilie Salaméro, sociologue, Laboratoire Cerege (EA 1722), Université de Poitiers, France ; emilie.salamero@gmail.com
  • [***]
    Cette recherche a bénéficié d’un contrat financé par l’Agence nationale de la recherche (2012-2015) intitulé Evaliss (Recherche sur les méthodologies d’évaluation des politiques publiques correctrices des inégalités sociales de santé, dir. T. Lang), l’INCA, la ligue contre le cancer et du soutien de l’ARS Midi-Pyrénées.
  • [1]
    Art. L. 1434-17 du Code de la Santé publique.
  • [2]
    Le domaine de compétences de l’ARS recouvre l’organisation des soins, la prévention et la promotion de la santé, la veille et la sécurité sanitaire dans les secteurs sanitaire et médico-social.
  • [3]
    À partir des mots-clés suivants : Ariège, ARS, contrat local de santé, hôpitaux, santé, politique sanitaire, politique sociale, personnes âgées, handicapées, inégalités de santé.
  • [4]
    Nous tenons à remercier l’ARS Midi-Pyrénées et la DT09 pour leurs invitations aux réunions des comités et la transmission des documents de travail et comptes-rendus qui nous ont permis de « suivre les acteurs » lors des phases préparatoires à la signature du contrat.
  • [5]
    Tous les passages entre guillemets et en italiques sont des extraits soit d’entretiens (l’acteur est systématiquement caractérisé) soit du carnet de terrain ethnographique (dans quelques cas, il n’a pas été possible de caractériser l’acteur qui s’exprimait).
  • [6]
    Dossier de presse, Construire le projet régional de santé : une conférence de territoire pour favoriser la concertation avec les acteurs de santé de l’Ariège, ARS MIP, octobre 2010.
  • [7]
    La Dépêche du Midi, 22 octobre 2010.
  • [8]
    « Un budget délicat pour l’hôpital du pays d’Olmes. Les rumeurs de fermeture courent à Lavelanet » 16 juillet 2009 ; http://gazette-ariegeoise.fr
  • [9]
    .Dossier de presse, ARS MIP, octobre 2010.
  • [10]
    Elle ne le sera qu’en avril 2010.
  • [11]
    Il est composé de 9 personnes : le délégué territorial de l’ARS, 5 élus (1 conseiller régional et président du Pays des Pyrénées Cathares, 1 vice-président du Conseil général en charge de l’autonomie et président de la Maison départementale des personnes handicapées, 1 conseiller général, président de la Conférence de territoire, le maire de Lavelanet et président de la communauté de communes du Pays d’Olmes, le maire de Mirepoix), le secrétaire général de la préfecture, le directeur de la CPAM 09 et le directeur général de la Mutualité sociale agricole Midi-Pyrénées sud.
  • [12]
    Kit méthodologique CLS, document de travail, ARS Île-de-France, avril 2011 http://www.ars.iledefrance.sante.fr/Le-kit-methodologique.116167.0.html.
  • [13]
    Cette responsable de la DT09 est en charge du pilotage du comité opérationnel du CLS. Après une formation en droit à l’université de Bordeaux et à l’institut régional d’administration de Bastia (1981-1982), elle prépare le concours d’inspecteur de l’action sanitaire et sociale (IASS). Elle est recrutée en 1982 par la DDASS de l’Ariège en tant qu’inspectrice et ce jusqu’en avril 2010 où elle devient adjointe au délégué territorial de ce même département. Elle a une très bonne connaissance du terrain et des différents acteurs et professionnels de santé locaux.
  • [14]
    Inspectrice de l’action sanitaire et sociale à la DT09 depuis avril 2010, elle est titulaire d’une maîtrise d’anglais de l’université de Bordeaux (1995) et obtient le Certificat d’aptitude professionnelle d’enseignement en lycée professionnel en 1997. En 2007, elle obtient une licence d’administration publique à l’institut de préparation à l’administration de Rennes et s’engage dans une formation d’IASS à l’EHESP. Elle travaille à la DT09 jusqu’en 2012 comme responsable du pôle animation territoriale puis devient auditrice à la Commission nationale de contrôle de Rennes.
  • [15]
    Mis à la consultation publique de juillet à septembre 2012, le PSRS n’est adopté qu’en décembre 2012 après des premiers avis défavorables ou réservés des conseils généraux et du Conseil régional.
  • [16]
    Les signataires proposés sont : l’ARS Midi-Pyrénées, le préfet de l’Ariège, les communes de Lavelanet et de Mirepoix, la Communauté de communes du pays de Mirepoix et celle du pays d’Olmes, le Conseil général, la Caisse d’allocations familiales, la Caisse primaire d’assurance maladie et la Mutualité sociale agricole (comité de pilotage du 19 janvier 2012). Lors de la signature en juillet 2013, les communautés de communes ne sont plus signataires et la direction des services départementaux de l’éducation nationale est rajoutée.
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