Notes
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[1]
Charles Baudelaire, « Le public moderne et la photographie », Études photographiques, n° 6, mai 1999, p. 22-23.
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[2]
Citons essentiellement François Brunet, La Naissance de l’idée de photographie, Paris, PUF, 2000, 361 p. ; Emmanuel Hermange, « La Lumière et l’invention de la critique photographique (1851-1860) », Études photographiques, n° 1, novembre 1996, p. 89-108 ; Anne McCauley, « Arago, l’invention de la photographie et le politique », Études photographiques, n° 2, mai 1997, p. 6-43 ; nous pourrons ajouter l’ouvrage d’Aaron Scharf, Art and Photography, Londres, Penguin Books, 1990, 400 p., dont la première publication, en 1968, inaugurait cette analyse des rapports entre art et photographie sous l’angle de la critique d’art.
-
[3]
Voir Jean-Pierre Leduc-Adine, « Des règles d’un genre : la critique d’art », Romantisme, n° 71, 1991, p. 93-100.
-
[4]
Walter Benjamin, Paris Capitale du XIX e siècle. Le livre des passages, Paris, Cerf, 1993, p. 696.
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[5]
Cet article reprend dans les grandes lignes notre analyse du phénomène dans L’Image sans qualités. Les beaux-arts et la critique à l’épreuve de la photographie 1839-1859, Paris, Monum, 2006, 174 p.
-
[6]
Voir Maurice Crosland, Sciences Under Control. The French Academy of Sciences. 1795-1914, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, 454 p.
-
[7]
Isid. B., « Invention de M. Daguerre ou Daguerrotype [sic] », Le Constitutionnel, 29 janvier 1839, p. 3.
-
[8]
Idem.
-
[9]
Ph. B., « Optique. Révolution des arts du dessin », Le Siècle, 17 janvier 1839, p. 1.
-
[10]
Roulin, « Physique appliquée. Fixation des images de la chambre noire par la seule action de la lumière », Le Temps, 9 janvier 1839, p. 1.
-
[11]
Isid. B., « Variété », Le Constitutionnel, 19 janvier 1839, p. 4.
-
[12]
Voir, par exemple, Jules Pelletan, « Le Daguerréotype », La Presse, 24 août 1839, p. 4.
-
[13]
« Les deux nouveaux partis politiques, les daguerrotypohiles et les daguerrotypohobes », Le Charivari, 10 septembre 1839, p. 1.
-
[14]
Dr. Alfred Donné, « Académie des sciences. Séance du 9 septembre », Journal des Débats, 11 septembre 1839, p. 2.
-
[15]
Voir Paul-Louis Roubert, « Les caprices de la norme », Études photographiques, n° 10, novembre 2001, p. 128-143.
-
[16]
« Nouveaux procédés scientifiques appliqués aux arts », L’Artiste, 7 février 1841.
-
[17]
Raoul de Croy, « Le daguerrotype [sic]. À propos du projet de loi de la Chambre des députés », Journal des Artistes, n° 26, 30 juin 1839, p. 409.
-
[18]
« Le prix d’un daguerréotype », Le Figaro, 26 septembre 1839, p. 3.
-
[19]
Jürgen Habermas, L’Espace public. Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1993, p. 50-51.
-
[20]
Sur l’évolution de la situation de la critique d’art au XIXe siècle, voir notamment Dario Gambonni, « The Relative Autonomy of Art Criticism », dans Michael R. Orwicz (dir.), Art Criticism and its Institutions in Nineteenth-Century France, Manchester, Manchester University Press, 1994.
-
[21]
Louis Peisse, « Salon de 1841 », Revue des deux mondes, 4e série, t. XXVI, p. 11.
-
[22]
Le dépouillement de 45 titres de la presse politique et d’intérêt général, scientifique, artistique et satirique a permis de dénombrer, entre janvier et novembre 1839, 220 articles sur l’actualité photographique, dont plus de 80 % sont consacrés à l’invention de Daguerre proprement dite. À partir de décembre 1839, les chiffres s’effondrent pour égaler quelques unités en janvier 1840.
-
[23]
Voir Journal des beaux-arts et de la littérature, 20 septembre 1840 ; Journal des artistes, 10 janvier 1841, 14 novembre 1841 ; L’Artiste, 7 février 1841, 18 avril 1841.
-
[24]
Pour un témoignage sur les toutes premières images que les Parisiens ont pu contempler, voir Beaumont Newhall, « A Chronicle of the Birth of Photography », Harvard Library Bulletin, vol. VII, n° 2, printemps 1953, p. 208-220.
-
[25]
Voir Daniel Roche, Histoire des choses banales. Naissance de la consommation, XVII e -XIX e siècle, Paris, Fayard, 1997, 329 p.
-
[26]
Pour une étude détaillée de la naissance de l’industrie du portrait au daguerréotype, voir Quentin Bajac, « “Une branche d’industrie assez importante”. L’économie du daguerréotype à Paris, 1839-1850 », dans Le Daguerréotype français. Un objet photographique, Paris, Réunion des musées nationaux, 2003, p. 41-54.
-
[27]
Étienne-Jean Delécluze, « Salon de 1842 », Journal des Débats, 25 mars 1842, p. 1.
-
[28]
Ibid.
-
[29]
Ibid.
-
[30]
Étienne-Jean Delécluze, « Salon de 1842 », Journal des Débats, 28-29 mars 1842, p. 1.
-
[31]
Wilhelm Tenint, Album du Salon de 1841. Collection des principaux ouvrages exposés au Louvre, Paris, Challamel, 1841, p. 32.
-
[32]
[Anon.], « Salon de 1842 », L’Artiste, 3e série, t. I, p. 245.
-
[33]
Georges Dupré [Théophile Thoré], « Salon de 1842 », Revue du progrès politique, social et littéraire, t. VII, 4e série, 1842, p. 230.
-
[34]
Théophile Gautier, « Salon de 1850-1851 », La Presse, 5 février 1851, p. 1.
-
[35]
Alphonse de Calonne, « Exposition de 1850-1851 », L’Opinion publique, 21 février 1851, p. 2.
-
[36]
Étienne-Jean Delécluze, Exposition des artistes vivants 1850, Paris, Au comptoir des imprimeurs, Comon éditeur, 1851, p. 28.
-
[37]
Idem, p. 32.
-
[38]
H. Robert, « Beaux-arts – Salon de 1842 », Le National, 8 mars 1842, p. 2.
-
[39]
Eugène Loudun, Le Salon de 1857, Paris, Jules Tardieu, 1857, p. 42.
-
[40]
Voir Antoine Compagnon, Baudelaire l’irréductible, Paris, Flammarion, 2014 et Paul-Louis Roubert, « Baudelaire et la photographie : paradoxes et allégories », Revue de l’art, n° 175, 2012, p. 11-15.
-
[41]
Voir Sylvie Aubenas et Paul-Louis Roubert (dir.), Primitifs de la photographie. Le calotype en France (1843-1860), Paris, Gallimard/BNF, 2010, 324 p.
-
[42]
Gustave Le Gray, Traité de photographie sur papier et sur verre, Paris, Baillière, 1850, p. 1.
-
[43]
Voir Paul-Louis Roubert, « Le daguerréotype en procès. Le déclin de la pratique du daguerréotype en France », Le Daguerréotype français. Un objet photographique, op. cit., p. 119-131.
-
[44]
Henri Le Secq y expose régulièrement ses peintures dès 1842, Charles Nègre en 1848, 1849 et 1850, et Gustave Le Gray en 1848.
-
[45]
Voir André Gunthert, « L’institution du photographique. Le roman de la Société héliographique », Études photographiques, n° 12, novembre 2002, p. 37-63.
-
[46]
Afin de parfaire cet espace critique de dialogue entre peinture et photographie, La Lumière accordera également une grande place à la critique de peinture et en particulier de Salon ; voir à ce sujet : Ève Lepaon, « “L’art ne ferait pas mieux”. Corrélations entre photographie et peinture dans La Lumière », Études photographiques, n° 31, printemps 2014 : http://etudesphotographiques.revues.org/3403, consulté le 28 octobre 2014.
-
[47]
Francis Wey, « Album photographique de M. Blanquart-Évrard », La Lumière, n° 33, 21 septembre 1851, p. 131.
-
[48]
Francis Wey, « Album de la Société héliographique », La Lumière, n° 15, 18 mai 1851, p. 58.
-
[49]
Voir Paul-Louis Roubert, « “UnphotographicPaint” : Sadakichi Hartmann face à Marsden Hartley (1909) », dans Jay Bochner, Jean-Pierre Montier (dir.), Carrefour Stieglitz, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 249-256.
-
[50]
Voir François Brunet, La Naissance de l’idée de photographie, Paris, PUF, 2000, 361 p.
1Si l’historiographie de la photographie a toujours intégré un chapitre sur la critique, force est de constater qu’il a souvent été échafaudé à partir de la seule figure de Charles Baudelaire qui fait paraître dans son Salon de 1859, un chapitre intitulé « Le public moderne et la photographie [1] » dans lequel, pour le dire rapidement, le poète et critique dénie à la photographie toute prétention possible au statut d’art. Cette position, célèbre, ne dit pourtant pas tout du rapport complexe que la photographie entretient avec l’idée d’art au XIXe siècle. Essentiellement, ce rapport est un rapport critique qui s’attache autant à l’évolution de la photographie qu’à la lente conceptualisation de l’idée qui la sous-tend. Découverte par le grand public en 1839 sous les auspices du daguerréotype, technique photographique qui empêche la production de multiples – le daguerréotype étant non-reproductible –, la photographie sera pour quelques années essentiellement une image dont on lit davantage la description dans les pages des journaux et des revues plutôt que de la tenir réellement entre les mains, conditionnant sa réception critique dans les premières décennies de son existence. Cette donnée, paradoxale pour une technique qui représente pour nous aujourd’hui le modèle de la reproductibilité, est à la base de nombreuses études sur les premières analyses critiques de la photographie [2]. Rapport complexe s’il en fut, les liens qu’entretient la photographie au discours critique ont pourtant rarement fait l’objet d’une archéologie ou d’une analyse approfondie des origines. Or, il existe bien un rapport étroit de la photographie à la critique d’art et qui outrepasse le jugement qu’en donne Baudelaire en 1859.
2 On ne peut qu’être frappé par le fait que la photographie est précisément née au cœur d’un siècle qui voit le développement formidable de la critique d’art. L’ouverture de nouveaux territoires, pour l’art notamment, avec le succès renouvelé du Salon permet l’émergence d’un marché de l’art, transforme radicalement les images à voir en images à vendre et nécessite l’intervention de la critique d’art qui se constitue de fait comme un nouveau genre journalistique [3]. Comment imaginer que ce discours sur l’art dictant les règles du bon goût et donnant les clés de lecture du contemporain puisse ignorer l’arrivée tonitruante avant le milieu du siècle d’un nouvel acteur qui bouleverse bien des certitudes du domaine esthétique. Il est ainsi riche d’enseignements d’observer, avant Baudelaire, la manière dont la critique d’art a pu découvrir et sous quelles conditions il lui a été donné de considérer et d’accompagner plus qu’une nouvelle technique, un phénomène que nous pourrions résumer par l’idée du « fait photographique », c’est-à-dire non pas seulement une technique, mais aussi une pratique, une production, un public, tout un ensemble de données qui en conditionnent la réception. Car avant même l’analyse des conditions d’émergence d’un discours de spécialiste, qui permettrait de déterminer la naissance d’une critique photographique, ce qui doit être observé ce sont les conditions qui poussent la critique d’art à produire une critique de la photographie. C’est approfondir cette remarque qui apparaît parmi les notes de Walter Benjamin pour Paris Capitale du XIX e siècle et qui pose parfaitement les éléments du problème : « Selon toute apparence, le symptôme d’un bouleversement profond : la peinture doit accepter d’être jugée à l’aune de la photographie [4] ».
3 À cet égard, si la critique d’art comme exercice est la source fondamentale pour comprendre les enjeux du phénomène, il convient pourtant d’en analyser chronologiquement et en détail la genèse en nous posant précisément la question des conditions d’appropriation de la question photographique par la critique d’art [5] : quels sont les mécanismes qui permettent de passer d’un discours scientifique à un discours esthétique ouvrant la voie à une instrumentalisation critique de la photographie ? Nous devrons ainsi observer, en premier lieu, les différents aspects de l’accueil de la photographie en 1839 par le prisme de la presse qui se fait alors le relais entre la puissance institutionnelle et le public. À partir de cette cartographie et de l’analyse des tensions entre les champs scientifiques et esthétiques, nous verrons comment la photographie devient rapidement pour la critique d’art un outil critique de référence. Enfin, nous verrons comment cette situation pousse le champ photographique lui-même à se déterminer au niveau critique.
Les inventions du discours photographique
4La photographie est apparue publiquement sous le double sceau de la science et de la loi en laissant peu de place dans un premier temps aux questions esthétiques. La photographie fut rendue publique au cours d’une opération institutionnelle et politique patronnée par le secrétaire perpétuel de l’Académie des sciences et député des Pyrénées-Orientales François Arago. Entre les mois de janvier et août 1839, Arago est à la manœuvre afin, en premier lieu, de valoriser sous le sceau de l’innovation la technique dite du daguerréotype, première technique photographique rendue publique. En se servant de l’Académie des sciences, Arago met en place le cadre de réception de l’invention qui sera en priorité présentée comme étant un instrument scientifique. Encore utopique dans ses prolongements en 1839, cette présentation n’en reste pas moins habile car elle déplace sciemment le champ d’analyse de l’instrument vers la science en coupant court a priori aux craintes pouvant émaner du champ artistique, d’autant plus que le concepteur du daguerréotype n’est autre que le décorateur et directeur du diorama de Paris, Louis Daguerre. Daguerre, en possession d’un procédé encore archaïque en 1837, cherche depuis lors un moyen de publier son invention sans en perdre les bénéfices potentiels tant en termes de gloire que de revenus. La solution que lui offrira Arago remplira une partie de ses espoirs puisqu’à la suite de la renommée scientifique délivrée par l’Académie, Arago fera voter par l’Assemblée nationale une loi Daguerre, délivrant à l’inventeur une rente viagère et précipitant de fait la découverte dans le domaine public en en révélant le secret à partir de l’été 1839. Cette longue histoire de la divulgation du secret du daguerréotype anime bien évidemment la chronique d’une presse dans l’ensemble férue de découvertes scientifiques surtout depuis que, sous l’impulsion du jeune François Arago, les séances publiques de l’Académie se sont ouvertes aux journalistes scientifiques chargés de médiatiser hebdomadairement dans la presse les travaux de la science française [6]. C’est ainsi qu’en priorité les informations sur le daguerréotype seront en majorité diffusées par le biais des chroniques scientifiques de journaux généralistes et au rayonnement national comme le Journal des débats, Le Constitutionnel, Le National ou Le Moniteur universel.
5L’idée essentielle qui sera mise en scène par Arago sera l’origine a-technique ou naturelle de la photographie, une image directement issue de la nature dans laquelle la main de l’homme n’est que l’orchestrateur et non le compositeur. Cette origine naturelle de l’image est censée en garantir la vérité et donc l’exactitude, exactitude qui sera, dès 1839, le maître mot de la photographie : « Ce sera toujours la vérité, puisque c’est la nature [7] » clame avec le chroniqueur scientifique du Constitutionnel toute la presse généraliste. Mais cette perspective nouvelle d’une image issue d’une mécanique infaillible et enregistrée sur des sels d’argent grâce à l’énergie lumineuse du soleil pousse les chroniqueurs à sortir du périmètre de leur rubrique en s’aventurant sur le terrain de l’esthétique, domaine réservé d’une critique d’art dans l’ensemble jalouse de ses prérogatives et de son érudition : « Le dessin est d’une fidélité inconcevable ; les formes, les ombres, les décroissements de lumière, les teintes les plus délicates, les jours les plus indiscernables, tout est vrai comme la nature, puisque c’est la nature elle-même, dessinée et reproduite par la lumière, sans caprice d’imagination, sans système d’école, sans enjolivement, sans parure [8]. » Le daguerréotype devient donc l’artiste le plus parfait, sans style, objectif et infaillible car « la radieuse, la céleste lumière, qui ne sait agir que dans les sphères des immuables lois de ce monde, substitue ici ses rayons divins au crayon hésitant de l’artiste, et dessine elle-même [9] ». Par la lumière, le daguerréotype dessine « comme pourrait le faire le dessinateur le plus habile, ou plutôt avec une perfection dont aucun dessinateur n’approcherait, et avec un fini de détails qui surpasse la croyance [10] ». Quand les images, encore pour bien longtemps non reproductibles sur quelque page imprimée que ce soit, seront contemplées directement, l’examen impartial de la loupe révélera la puissance inégalée du daguerréotype : en termes de quantité, jamais une image aussi rapide et aussi proche de la réalité n’avait été capable de dispenser autant d’informations. En termes de qualité et de fidélité, le daguerréotype est ainsi susceptible de devenir un modèle pour tous les arts d’imitation gouvernés jusque-là par la convention. C’est, en effet, une rupture qu’inaugure cette nouvelle image dont la puissance réside dans sa qualité d’enregistrement.
6 Portée par une presse généraliste mais également scientifique et de tous bords en grande majorité enthousiaste de janvier à août 1839 – peu ou pas de clivages idéologiques ou politiques sur la question du daguerréotype très tôt présenté comme une gloire scientifique nationale –, l’opinion publique se forme alors sur la photographie à partir des qualités du daguerréotype décrites dans les pages des journaux, les images n’étant pas visibles, secret de l’invention oblige, avant la fin du mois d’août. Or, compte tenu du choix de l’Académie des sciences comme plate-forme de publication, les principales voix donnant écho à cette nouvelle dans la presse ne sont pas spécialisées dans les questions esthétiques. Les jugements faisant autorité sur la valeur artistique du daguerréotype à la fin du processus institutionnel et législatif sont forts rares et tiennent de l’exception alors que l’ensemble de la presse ne fait que reprendre les paroles d’Arago mais sans expliquer en quoi « l’invention de M. Daguerre ne causera […] aucun préjudice à la gravure, ni même au dessin ou à la sculpture [11] ». À la suite de la révélation du secret de l’invention le 19 août 1839, si une grande partie de la presse commence à s’émouvoir de la difficulté opératoire du procédé, peu s’en rassurent pour prévenir une trop grande diffusion de l’invention et de son principe [12]. Un débat repris par la presse satirique qui ne manque pas de railler, dès le mois de septembre, les adorateurs de la nouvelle image et d’en attaquer les implications théoriques :
[…] quand vous aurez, non pas dessiné, mais calqué les pavillons des Tuileries, les buttes Montmartre ou la plaine de Montfaucon avec une fidélité infinitésimale, croyez-vous que vous aurez fait un chef-d’œuvre parce qu’il ne manquera ni une girouette aux Tuileries, pas un âne aux buttes Montmartre, pas une carcasse à Montfaucon ? Croyez-vous que ce soit ainsi que procèdent les véritables artistes [13] ?
8 Mis à part ces caricatures qui résument sans doute très bien l’ambiance de l’époque ainsi que les arguments que l’on peut entendre çà et là contre le daguerréotype et la confusion qu’il établit entre la copie et l’œuvre, seuls quelques chroniqueurs de haut vol s’aventurent dans l’exposition de théories esthétiques, certes sommaires, mais qui posent d’ores et déjà la question de l’outil daguerrien pour l’art, comme par Alfred Donné, chroniqueur scientifique du Journal des débats :
L’art, en peinture, comme en poésie, comme en musique, n’existe encore une fois qu’à la condition d’idéaliser l’objet qu’il peint et qu’il représente. Aussi les tableaux du daguerréotype ne sont-ils pas un objet d’art. Rien, au contraire, ne pose mieux la limite entre ce qui appartient à l’art et ce qui n’en dépend pas. Ces tableaux sont l’image exacte de la nature et non le produit de l’homme [14].
10 Précisément parce qu’il ne serait qu’exactitude, le daguerréotype permettrait de matérialiser une frontière entre ce qui est de l’art et ce qui n’en est pas. Présenté par Arago comme instrument scientifique de mesure du réel visible, le daguerréotype apparaît malgré lui comme un instrument critique de mesure des limites de l’art. Mais cette possibilité encore théorique révélée par Alfred Donné reste pour l’instant lettre morte d’autant plus que les périodiques traitant en priorité des questions d’art consacrent peu d’articles à la photographie en 1839. La tribune de l’Académie des sciences semble décourager les chroniqueurs artistiques de traiter du sujet en s’appuyant sur les analyses des chroniqueurs scientifiques de la presse généraliste. Pourtant inféodée à la tutelle académique, les titres de la presse artistique comme L’Artiste ou le Journal des Artistes, qui louent l’esprit d’entreprise régnant à l’Académie des sciences, critiquent sévèrement l’absence de l’Académie des beaux-arts dans le débat. En effet, mis à part un rapport commandé au peintre Paul Delaroche par Arago sur la question [15], toutes les opérations institutionnelles au sein de l’Institut se sont déroulées hors du contrôle de l’Académie des beaux-arts. Ainsi, sur la question de l’art et du daguerréotype, l’avantage est à la science. Une situation que la presse artistique déplore sans toutefois tenter de l’inverser et qui résonne encore en 1841, comme le révèle un article anonyme de la revue L’Artiste : « Certes il était permis à des physiciens, à des astronomes, à des naturalistes, à des géographes, de s’exagérer l’importance d’une invention qui, après tout, devait faciliter certaines découvertes scientifiques ; mais l’Académie des beaux-arts est-elle excusable de ne s’être pas exprimée en termes clairs au sujet du Daguerréotype, et d’avoir semblé consacrer, en se taisant, une grave erreur [16] ? ». En n’apportant aucun commentaire aux déclarations des uns et des autres en 1839, l’Académie des beaux-arts a semblé donner raison aux jugements de valeurs proférés sur le daguerréotype confortant ainsi l’opinion se formant alors sur la supériorité du procédé sur l’art. Quelques voix s’élèvent ainsi pour en appeler à la responsabilité des institutions, comme ici dans le Journal des Artistes qui défend la corporation : « que le gouvernement ne lance dans le domaine public cette nouvelle branche d’industrie, que lorsqu’il sera bien assuré des avantages qu’on pourra en tirer ; sans cela ce serait une pierre détachée du temple des arts, pour achever d’écraser ceux qui y travaillent encore [17] ». Le champ ressent fortement l’attaque que l’instrument fait peser non pas tant sur l’institution que directement sur les artistes car l’enjeu est ici de savoir qui gagnera les faveurs des amateurs d’art auxquels Le Figaro s’adresse directement fin septembre 1839 :
[…] quand vous aurez rencontré la feuille qui parlera le mieux à vos prédilections, à votre fantaisie, informez-vous du nom de l’auteur, allez directement à lui […] et pour le prix d’un instrument prosaïque, inutile entre vos mains, coupable de dégradation envers l’art, mot exclusif qui signifie âme, passion et vitalité, vous emporterez avec vous une œuvre d’art véritable et précieuse, et la satisfaction d’avoir sauvé peut-être d’un découragement fatal un artiste méconnu qui vous sera redevable de son premier pas vers la renommée et la fortune [18].
12 De l’appel à l’autorité du Journal des Artistes, jusqu’à l’adresse aux amateurs d’art du Figaro, il semble que le manque de position claire de la part de l’Académie des beaux-arts sur la question du daguerréotype ainsi que l’absence de réel discours de la part de la presse artistique soient les deux symptômes d’un rendez-vous manqué du daguerréotype avec la critique d’art en 1839. Le constat de la confusion régnant dans l’esprit du public, et qui semble jouer au détriment de l’artiste, est un aveu d’impuissance de la part de la critique et de l’autorité à dispenser un discours fort face aux informations diffusées par la presse généraliste. Deux implications pour l’établissement du discours critique sur la photographie : en premier lieu l’importance discussive du processus de 1839 qui sacre l’inventeur Daguerre et son daguerréotype en l’absence presque totale d’un véritable contre-point théorique et esthétique sur la question de la part de la critique d’art qui reste absente du processus. En second lieu, en l’absence d’espaces et d’institutions dédiés en propres à la photographie, et alors que la presse généraliste se désintéresse de la photographie, par défaut la critique de salon des beaux-arts deviendra le premier territoire de formulation du seul véritable discours critique et théorique sur la photographie.
L’invention du contre-modèle photographique par la critique d’art : les conditions d’une transition
13Exclu a priori du territoire de l’art par la généalogie de la mécanique, le daguerréotype fait l’objet d’un silence presque général de la part de la critique d’art qui l’évince du débat. Cette absence semble d’autant plus évidente que personne, en 1839, ne réclame scandaleusement un quelconque statut d’art pour la photographie. Ainsi, par défaut et logiquement, la question, non pas du statut artistique du daguerréotype, mais simplement de son intervention dans le débat semblait devoir ne pas évoluer et rester à l’état de curiosité. Or, il faut pourtant analyser les facteurs qui, au final, ont permis à la photographie de devenir un élément essentiel du discours critique des années 1840-1850. Issu de la discussion du processus scientifique et législatif dans la presse durant l’année 1839, le discours photographique, sous l’influence de la visibilité toujours plus grande des images photographiques, glisse en peu d’années vers la critique d’art et plus particulièrement vers cet exercice particulier qu’est la critique des expositions annuelles ou bisannuelles des beaux-arts, ou Salons, liant dans un même mouvement influence des images photographiques et actualité de l’art contemporain.
14 Jürgen Habermas, dans sa thèse sur L’Espace public, soutient que l’opinion publique naît très exactement dans ces espaces dans lesquels la culture rencontre le concept de la publicité, le Salon des beaux-arts étant ici un événement pilote pour la constitution du public comme instance critique autonome et de poids :
L’art, dégagé de ses fonctions de représentation sociale, devint l’objet d’un choix libre et l’affaire d’un goût qui évoluait. Le « goût » d’après lequel désormais l’art s’oriente, s’exprime à travers le jugement de profanes sans compétences particulières, car, au sein du public, chacun est en droit de revendiquer une certaine compétence. La lutte la plus dure pour faire droit au jugement du profane et pour faire admettre le public comme une instance critique a eu lieu là où jusqu’alors un cercle de connaisseurs avait rendu la compétence spécialisée solidaire d’un privilège social : à savoir dans le domaine de la peinture qui n’avait jamais été que destinée aux collectionneurs avertis de la noblesse, jusqu’au moment où les artistes se virent eux aussi contraints de travailler pour un marché [19].
16 Ainsi, par le salon, l’art prend-il place dans l’espace public et l’événement lui-même devient une scène de validation populaire de l’art. Mais si le salon, année après année, dessine le goût général, reste à savoir qui, de l’artiste ou du public, donne l’impulsion, la critique, dans cette relation tripartite, ayant au mieux un rôle d’observateur, d’analyste ou de révélateur mais encore rarement d’influence [20].
Il faut absolument au salon attirer les yeux distraits de la foule, et leur faire violence. C’est là la préoccupation première de la plupart des peintres qui sacrifient tout à ce but. Or, ce but n’est pas le meilleur ; il engendre l’habitude de pratiques paresseuses, factices, superficielles, il pousse à la recherche des singularités, des effets imprévus, des exagérations systématiques, des extrêmes dans tous les genres. La popularité fait ici, comme ailleurs, bien des victimes [21].
18 Cette assertion du critique Louis Peisse en introduction à son « Salon de 1841 » démontre que le premier effet de ce constat sera la méfiance, voire le mépris, avec lesquels la critique considérera le goût du public dès qu’il se manifestera. Même si l’on reconnaît plusieurs publics (l’amateur, le collectionneur, le néophyte etc.), la critique pense que le goût imposé par la foule à l’artiste est, au même titre que l’imitation littérale de la nature, un modèle que l’artiste véritable ne saurait suivre aveuglément car il l’éloigne de l’art. C’est au centre de ces préoccupations critiques préexistantes qu’il faut envisager l’intervention du modèle photographique sous la forme du daguerréotype dans la critique d’art. C’est dans ce contexte critique de discussions sur l’état de l’école, la théorie de l’imitation et le goût du public que l’on trouvera les causes de l’irruption du daguerréotype dans le discours.
19 L’énorme masse des écrits engendrés par l’annonce de l’invention du daguerréotype est à peu près circonscrite à l’année 1839 [22]. Au tohu-bohu de 1839 succède un silence presque total de la part de la presse généraliste. La presse artistique, après avoir repris majoritairement des articles émanant de la presse généraliste relatant la découverte, se fait l’écho, de loin en loin, des quelques améliorations apportées à l’invention de Daguerre, mais dans l’ensemble, les mentions restent très rares [23]. Pourtant à mesure que le daguerréotype disparaît de l’actualité, les images elles-mêmes apparaissent dans l’espace public et très tôt, dès août 1839, au milieu des appareils dans les vitrines des opticiens qui deviennent alors les premiers vendeurs de matériel photographique [24]. Et à mesure que ces images fortifient leur ancrage dans la société, elles semblent perdre de leur caractère exceptionnel pour se diluer dans le quotidien, se fondre dans le décor et rejoindre l’univers des « choses banales [25] ». Toutes les histoires de la photographie confirment une modification de la situation à partir de 1842, quand non seulement le prix des équipements de daguerréotype commence à baisser de manière significative, mais surtout quand, tirant parti des améliorations techniques réduisant les temps de pose, les premiers studios commerciaux de portrait au daguerréotype apparaissent. À Paris, les studios de Susse frères, passage des Panoramas, Lerebours au Pont Neuf, Bissons frères à Saint-Germain-l’Auxerrois, Sabatier-Blot au Palais-Royal, tous ouverts au cours de l’année 1841 confirment par leur pratique quotidienne que cette technique n’est pas l’apanage de Daguerre mais qu’elle est accessible à une population relativement éclectique allant du peintre en miniatures au commerçant en articles de Paris, en passant par le chimiste ou l’apprenti architecte se faisant du jour au lendemain daguerréotypistes. À partir de 1842, si le daguerréotype n’est que très rarement pratiqué « en amateur », le succès de ces studios commerciaux démontre que, contrairement à ce qu’on pouvait croire, le daguerréotype ne sera pas une mode passagère, un engouement sans lendemain, mais que, bien au contraire, il est en bonne voie pour s’implanter durablement [26]. Il semble, en effet, que l’on assiste, en 1842, à une seconde naissance de la photographie, une naissance « pratique » et non plus seulement théorique ou utopique, à ceci près qu’à l’utopie scientifique se substitue, par l’intermédiaire des ateliers de portraits, un petit commerce florissant, d’abord à Paris puis en province et dans toute l’Europe.
20 Simultanément, alors que les images fortifient leur présence dans l’espace public, non plus seulement aux vitrines des opticiens mais également dans les cadres faisant la publicité des ateliers de portraits sur les grands boulevards, le daguerréotype fait son irruption dans la critique d’art et plus particulièrement dans la critique régulière des salons que diffusent la presse d’intérêt général et les revues spécialisées. Si l’exercice de la critique de salons peut être un indicateur de tendance, un témoin privilégié, c’est justement dans cette attention aux signes du temps, dans l’importance qu’elle accorde aux attentions de la foule année après année. Le discours critique sur la photographie naît ici, et conditionne sans doute les prises de position suivantes, pour ou contre la photographie. Car, si l’on tient compte des dénégations, réfutations et autres disqualifications par la théorie de l’imitation, il faut bien admettre que le discours sur la photographie dans la critique d’art n’allait pas de soi. Pour que la critique d’art prenne en compte le daguerréotype, il fallait qu’à partir de l’apparition des portraits il devienne une référence et conséquemment que les articles concernant la photographie en 1839 passent a posteriori pour l’expression d’une opinion publique ; pour que la critique d’art prenne acte de l’importance du phénomène et qu’elle intègre le daguerréotype à son exercice, il fallait que la production des studios de portraits, même modeste, traduise l’adhésion du public à cette nouvelle image que la critique désapprouvait pourtant de tous ses actes et de toute sa théorie. Il fallait concrètement que la critique d’art puisse constater une modification potentielle mais surtout inédite des conditions d’appréciation des qualités de l’art.
21C’est ainsi, par le public, que la question du daguerréotype fera son apparition dans la critique des salons. Plus généralement, à travers cet exercice qui consiste à envisager, nous le verrons, l’influence de la photographie sur le goût du public, ce qui est visé ici est non moins qu’un phénomène accompagnant généralement le constat d’une dégénérescence de l’art dénoncée par de nombreux critiques et notamment de la génération née à la fin du XVIIIe siècle, tel, par exemple, Étienne-Jean Delécluze (1781-1863). Contemporain de Jean-Dominique Ingres, Delécluze est un ancien élève de David, partisan d’une pratique élitaire de l’art et d’une exposition parcimonieuse des œuvres. Dénonçant la dispersion des ressources de l’art, Delécluze y voit trois causes : la diffusion de la lithographie, « qui a mis le crayon à la main de tout le monde en France » ; les panoramas, qui ont rendu « l’œil plus exigeant que jamais sur l’illusion matérielle » ; et enfin le daguerréotype « qui a mis dernièrement tout le monde à même de comparer les représentations copiées à vue d’œil, avec celles qui viennent s’exprimer sur le métal, [et qui] a porté tout à coup l’appréciation que le public peut avoir de la copie d’un objet ou d’un être à un degré beaucoup plus élevé qu’on ne le pense [27] ». La photographie produit bien une profonde modification des conditions d’appréhension d’un art qui lui est maintenant contemporain. La photographie, de ce fait, ne sera pas ignorée par le critique conscient du rôle majeur qu’elle sera amenée à jouer : « Je n’ai jamais fait métier de prophète, mais je serais bien étonné si le perfectionnement de cette invention n’amenait pas assez prochainement la ruine complète de plusieurs modes de l’art ; tels que le portrait, les vues de monuments et de pays, en particulier, toutes les représentations où l’on cherche particulièrement la reproduction identique de l’apparence des objets [28]. » Sous ses airs flatteurs, ce prophétisme n’en reste pas moins perfide, car si Delécluze reconnaît clairement une qualité au daguerréotype, comme Alfred Donné en 1839, il lui permet d’établir clairement les territoires de l’art :
À ce compte, le daguerréotype aurait l’immense avantage de devenir un instrument, au moyen duquel on pourrait distinguer nettement les ouvrages dans lesquels l’homme se constitue volontairement machine afin de recevoir l’impression matérielle des objets, de ceux où l’artiste imprègne au contraire les objets qu’il voit des rayons de son âme [29].
23 Sous la plume de Delécluze en 1842, le daguerréotype devient un instrument de mesure, non pas de la qualité mais de la quantité d’imitation sans transformation servant à évaluer le degré d’asservissement de l’artiste à l’imitation matérielle des corps et des objets. Cet instrument permet à Delécluze de toucher là « une des questions les plus importantes et les plus ardues de l’esthétique » : « que l’imitation est un moyen et non un but » [30]. Faite image, l’exactitude du daguerréotype ne peut pas être ignorée prévient Delécluze et elle s’impose comme standard de référence de la représentation de la forme dans l’imitation. Terme de comparaison pour le critique ainsi que pour le public, le daguerréotype ne peut pourtant pas apparaître comme le modèle du but de l’art et Delécluze prévient : qu’un artiste prenne la photographie comme modèle, c’est-à-dire qu’un artiste reproduise telle une machine une scène de la nature, qu’il considère l’exactitude du daguerréotype reproduisant la nature sans choix comme un idéal de création, et qu’il valide auprès du public cette idée de l’art, et il sera immédiatement désigné et disqualifié. Ce que le daguerréotype va ainsi matérialiser de manière inédite dans la tentative d’analyser les tendances naturalistes de l’école contemporaine, c’est la crainte d’un réel abandon de l’idée dans l’imitation. Reste à trouver ou à attendre que n’apparaisse l’artiste dont le style révèle un excès d’exactitude, c’est-à-dire une fidélité trop grande à la nature individuelle. En d’autres termes, être attentif aux signes du photographique dans l’art contemporain. Même si le point de vue critique de Delécluze sur la photographie est alors relativement exceptionnel, pour ne pas dire rare, dans le paysage de la critique d’art, il permet pourtant d’observer ce processus qui fait de la photographie, malgré elle, un outil critique de la création contemporaine.
24 La discussion du modèle photographique va devenir, au fil des années, un des leitmotive de la critique d’art alors qu’elle assiste à la montée en puissance d’une école naturaliste puis à la dénomination du mouvement réaliste à partir de 1849. Non circonscrite au seul réalisme, la référence photographique touche au contraire des artistes aux styles et aux aspirations forts différents, et si de très nombreux artistes échappent totalement à cette référence, d’autres l’appellent plus généralement, même s’il est peu de cas où l’on trouve une véritable unanimité de la critique sur la nature « photographique » de tel ou tel travail, c’est-à-dire des toiles, voire des sculptures, dans lesquelles l’influence de la photographie se ferait clairement sentir.
25 De même, la nature du photographique lui-même est multiple, non univoque et non assujettie à un genre en particulier ; il faut ainsi faire la distinction entre plusieurs types d’interventions du modèle photographique dans la critique d’art. En premier lieu est incriminée l’utilisation du daguerréotype par l’artiste dans son atelier à l’instar d’un peintre comme Ernest Meissonier. Remarqué par la critique en 1840, Meissonier peint sur de petits panneaux de bois des scènes de genre parfois proches du portrait, majoritairement inspirées de la vie quotidienne du XVIIIe siècle. Remplies de détails pittoresques, ces pièces incitent à la vision rapprochée et apparaissent comme autant de tours de force techniques dépassant les limites de ce que permet généralement l’utilisation du pinceau par un artiste. La science minutieuse de Meissonier s’exerçant sur de petites surfaces comparables aux dimensions des premières plaques daguerriennes, la critique formulera très tôt l’analogie : « On a beaucoup dit de ce tableau qu’il rappelait les reproductions du daguerréotype ; ce sera vrai quand le daguerréotype aura de l’esprit, de la couleur et du sentiment [31]. » Cette analogie, dans un premier temps toute formelle, glissera assez rapidement de l’insinuation – Meissonier « rappelle » le daguerréotype – à la supputation – « On dirait que M. Meissonier se sert du daguerréotype pour la reproduction de ses modèles [32] » – à l’accusation enfin prononcée par le critique Théophile Thoré : « Nous soupçonnons M. Meissonier de se servir des images produites par le daguerréotype [33]. » C’est dans ce rapport entre le peintre et le daguerréotype comme modèle que s’établit hiérarchiquement le premier appel, si ce n’est à la déconsidération du modèle photographique, à tout le moins à son maintien dans un rôle d’« humble servante » au risque de passer pour un « maître inavoué » [34]. Que l’image photographique puisse servir de modèle doit rester un secret d’atelier mais en aucun cas devenir une méthode de création : « Ce secret d’atelier, nous le livrons pour ce qu’il vaut. Quelques artistes en renom en font usage, et leurs œuvres, par malheur, en rendent un témoignage éclatant. Quant à nous, il nous était impossible de ne pas en signaler l’abus ; nous voyons dans l’emploi du daguerréotype appliqué à la peinture un germe de mort pour l’art véritable [35]. » En d’autres termes, en copiant des daguerréotypes, des peintres comme Meissonier prennent le risque d’imiter le daguerréotype lui-même dans sa manière de reproduire la réalité. Un art comme celui de Meissonier deviendrait le Cheval de Troie par lequel le photographique ferait son entrée dans le pictural : non plus seulement copier les images, mais copier comme la photographie.
26 Rejoignant la crainte de Delécluze, ceci mène irrémédiablement au second point : l’association d’un artiste, semblant reconnaître l’exactitude photographique comme modèle de création, avec l’esprit du daguerréotype. C’est autour de cette question que la relation entre réalisme et photographie s’impose, mais à laquelle elle n’est pas circonscrite. Le photographique ne donne pas une définition du réalisme mais le réalisme est le mouvement par lequel le modèle photographique impose sa véritable originalité, sa véritable spécificité face au modèle naturel. Plus que tout autre, Gustave Courbet sera celui qui, soudainement, par l’arrogance de son style – la transposition de scènes de genre au format de la peinture d’histoire –, cristallisera cette association entre peinture et photographie. Contrairement à l’œuvre de Meissonier par exemple, formellement, au sens strict du terme, il n’existe aucune logique d’association entre L’Enterrement à Ornans (1850, musée d’Orsay) de Gustave Courbet et le daguerréotype. Les causes de cette association entre Courbet et le daguerréotype sont multiples, mais il apparaît, en résumé, qu’elles sont inhérentes au traitement de la toile qui passe pour le meilleur indice d’une exactitude excessive, brutale, dans la retranscription du sujet. Étienne-Jean Delécluze, qui reconnaît ici en Courbet la prophétie prononcée en 1842, attaque l’artiste franc-comtois de front dans sa recension du Salon de 1850-1851 :
Jamais peut-être le culte de la laideur n’a été exercé avec plus franchise que cette fois par M. Courbet, dans son tableau L’Enterrement de campagne (à Ornus [sic]). […] Dans cette scène, qui pourrait passer pour le résultat d’une impression de daguerréotype mal venue, il y a le naturel brut que l’on obtient toujours en prenant la nature sur le fait, et en la reproduisant telle qu’on la saisie. […] C’est un parti pris, je dirais presque une gageure de l’auteur avec lui-même de se transformer, comme je le disais, en daguerréotype et de faire abnégation de son intelligence pour replacer sur la toile ce qui lui a sauté aux yeux [36].
28 Ici se trouve toute la différence, pour la critique, entre les artistes tirant les leçons formelles du daguerréotype et ceux qui « regardant l’imitation comme le but de l’art, prétendent que tout, jusqu’au laid et à l’ignoble, peut et doit être représenté, sous la condition seulement que l’imitation sera fidèle [37] ». Reconnaître les signes d’une fidèle imitation « toute sèche d’un modèle inimitable », c’est constater que le peintre lui-même a réduit volontairement son rôle à celui « de l’écho qui répète un son ou du miroir qui répète une vue », et qu’il a pour seule ambition de « rivaliser avec le daguerréotype », réduisant ainsi la part de l’artiste « à l’état passif d’une machine à copier » [38]. Le daguerréotype, système de production mécanique, automatisée de l’image, permet de faire la critique du faire nature, qui voit la soumission de l’artiste au modèle naturel. Du risque d’une production industrielle, normée, de l’art à la disparition de l’artiste au profit de la seule technique, le daguerréotype fournit un modèle critique inédit afin de fustiger ce qui apparaît comme la disparition de l’idée dans l’art :
Avec les réalistes, l’art tend à devenir un métier ; plus de combinaison, plus de choix, plus de comparaison ; le peintre ne pense pas ; on ne trouve plus dans ses tableaux ces qualités de pensée qui attachent et qui passionnent, ces qualités que l’homme recherche avant tout dans les œuvres de l’intelligence, parce que sous l’œuvre il découvre un esprit, une âme : avec un tel système, pour reproduire un site, bientôt le daguerréotype suffirait [39].
30 En retour, le daguerréotype permettra à la critique de justifier dans le naturalisme, au-delà de son inutilité et de sa bêtise, nombre d’éléments ressortant de cette apparente reconnaissance par l’artiste de la norme daguerrienne de figuration. Seront ainsi repérés, comme étant autant d’effets directs de l’influence de la photographie sur les artistes, le laid de l’exactitude, l’attention délibérée aux détails triviaux, l’absence d’harmonie dans la composition ; tout effet dont la cause sera irrémédiablement imputable au daguerréotype qui plus que jamais prend la forme du Bouc émissaire cher à René Girard : la photographie est désignée comme responsable d’un fléau dont elle n’est pas responsable mais qui existe bel et bien, c’est-à-dire l’évolution logique d’un art confronté au grand public depuis la fin du XVIIIe siècle.
Pour une défense de la photographie
31On comprendra ici la portée du texte de Baudelaire : au-delà des circonstances de la formulation de l’esthétique du poète, « Le public moderne et la photographie », chapitre du Salon de 1859, résume à lui seul vingt ans d’histoire des rapports tendus entre photographie et peinture révélés par la critique d’art. On se reportera aux analyses les plus récentes sur la question [40] pour constater qu’en la photographie réside, pour Baudelaire, toute l’étendue de ce qui menace une certaine idée de l’art : les pouvoirs de la foule sur l’artiste, la fin de l’imagination « reine des facultés », la beauté sacrifiée au profit de l’étonnement, etc. Baudelaire n’inaugure donc pas, tant s’en faut, ce débat, mais il le synthétise en le reliant précisément à la question du public alors que, simultanément, ce discours disparaît presque totalement de la critique d’art. Pourtant, ce débat n’a pas été sans conséquences sur la pratique photographique elle-même et en particulier sur les praticiens, les photographes sur lesquels pèse concrètement le poids de la mauvaise image de la photographie. Ainsi, quand, à la fin des années 1840, en France, émergent de nouvelles possibilités offertes à la photographie, notamment avec le développement libre d’une photographie sur papier – c’est-à-dire une photographie reproductible contrairement au daguerréotype –, une nouvelle génération de praticiens, issus de l’enseignement académique des beaux-arts, s’engage-t-elle dans une lutte pour la reconnaissance d’une pratique différente de la photographie, entendons une pratique différente de celle du daguerréotype tel qu’adopté depuis le début des années 1840 par les ateliers commerciaux de portraits. Des photographes comme Gustave Le Gray, Charles Nègre ou Henri Le Secq, découvrant avec quelques autres amateurs dispersés les techniques sur papier dévoilées en 1847 par Désiré Blanquart-Évrard ou Amélie Guillot-Saguez, entrevoient la nécessité de regrouper leurs efforts afin, non seulement de concourir aux améliorations de procédés encore imparfaits, mais également de faire progresser une autre idée de la photographie [41]. Une autre idée de la photographie que Gustave Le Gray, l’un des protagonistes les plus actifs de cette réforme, exprime dans une formule célèbre en introduction de son Traité pratique de photographie sur papier et sur verre publié en 1850 : « L’avenir de la photographie est tout entier dans le papier [42]. » Sentence que l’on pourrait poursuivre en résumant la doctrine de cette minorité de praticiens aux prétentions élitaires tant pour leurs images que pour le développement d’un public de connaisseurs en termes de photographie : « la photographie n’est pas le daguerréotype [43] ».
32 Cette doctrine s’exprime au nom d’une pratique esthétique du médium qui trouve dans les défauts du papier face à la perfection daguerrienne les armes de son expression. Celle-ci s’oppose à la laideur, à la vulgarité, à la trivialité, au commerce et à la norme, associés au daguerréotype. Cette opinion s’exprime avec plus de force encore avec la dénomination du réalisme à partir de 1849, dans les critiques de Salons. Et s’il faut un contre-modèle à ces photographes d’un autre genre qui sont pour la plupart des artistes qui exposent au Salon [44], c’est bien celui du daguerréotype dessiné par la critique d’art. L’enjeu n’est pas une redéfinition du daguerréotype par la photographie sur papier, mais une redéfinition de la photographie à partir du contre-modèle du daguerréotype. Le regroupement de ces photographes autour de la photographie sur papier prend forme dans la Société héliographique [45] emmenée par des personnalités comme Hippolyte Bayard, le peintre Jules Ziegler, le photographe Gustave Le Gray, le comte Olympe Aguado ou le chimiste et professeur au Collège de France, Victor Regnault. Et c’est à un critique d’art ayant déjà exercé, Francis Wey, que l’on confie le soin de rédiger le programme esthétique de cette avant-garde dans les colonnes de La Lumière, premier périodique français consacré à la photographie paraissant à partir de février 1851, organe de diffusion indispensable à la stratégie de la Société héliographique [46]. La mission assignée à Francis Wey, converti aux vertus de la photographie sur papier, est celle de fondre la photographie dans le débat critique, non pas tant pour en révéler les spécificités que pour mettre en évidence ses proximités avec l’art : « Le problème à résoudre, pour les œuvres héliographiques [i.e. non daguerriennes] est donc celui-ci : passer de l’état de curiosité à la hauteur des objets d’art [47]. » Sont ainsi mobilisées les notions de choix, d’interprétation, on favorisera l’ensemble au profit du détail qui sera sacrifié afin de développer une vision plus “artistique” de la photographie. En abandonnant le photographique du daguerréotype et par là même la photographie elle-même pourrions-nous dire, Francis Wey et les acteurs de la Société héliographique, s’appuyant sur le contre-modèle daguerrien défini par la critique du réalisme, procèdent à une redéfinition de la photographie sur le modèle de l’art et disent : la photographie n’est pas le daguerréotype mais l’art. À propos d’une photographie de Charles Nègre, Le Petit chiffonnier, Wey écrit en 1851 :
Le Petit chiffonnier de M. Nègre n’est plus une photographie ; c’est une composition pensée et voulue, exécutée avec toutes les qualités étrangères au daguerréotype, et ne revendiquant que celles-là. Rien de plus imprévu, de plus intéressant que ces épreuves où le mécanisme [photographique] disparaît, où la nature, non contente de se peindre dans sa réalité matérielle, semble s’interpréter elle-même, recourir aux coquetteries de l’art, et choisir les beaux côtés qu’il lui convient de montrer [48].
34 Si leurs évolutions restent encore à explorer dans le détail, ce programme esthétique et ce point de vue critique sur la photographie resteront globalement en vigueur jusqu’au tournant du siècle. Jusqu’alors, la technique photographique est constamment en mouvement et il faudra qu’elle entre dans son ère moderne avec l’acquisition de l’instantané et la démocratisation de la pratique photographique, grâce au Kodak, pour que les premiers discours sur les spécificités du médium apparaissent [49]. Car un nouveau combat s’ouvre alors pour les photographes, celui de la « dévulgarisation [50] » : la nécessité de se distinguer, encore, mais cette fois de la horde des photographes amateurs qui se passionnent pour ce nouveau loisir.
35 Dès 1839, le champ photographique s’est trouvé confronté à un espace discursif et critique fort qui a eu un rôle structurant dans l’accompagnement de ses incessantes mutations techniques et esthétiques. Le développement de cet espace critique est à considérer, nous l’avons vu, dans une histoire non pas parallèle mais simultanée à celle de l’art contemporain dont il nourrit les problématiques telle celle du rapport au public. On pourrait y ajouter la disparition de l’artiste, la production en série, l’accessibilité des images, autant de débats que la photographie par la transition qu’elle opère pousse sur le devant de la scène jusqu’à se transformer elle-même parfois en contre modèle, comme un refoulé théorique de l’art contemporain. Pourtant, une frontière n’est pas encore réellement franchie tant il semble que ces premières années sont encore celles de la critique de la photographie et non pas tant encore celles d’une réelle critique photographique, véritablement indépendante des présupposés qui pèsent sur sa pratique.
Notes
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[1]
Charles Baudelaire, « Le public moderne et la photographie », Études photographiques, n° 6, mai 1999, p. 22-23.
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[2]
Citons essentiellement François Brunet, La Naissance de l’idée de photographie, Paris, PUF, 2000, 361 p. ; Emmanuel Hermange, « La Lumière et l’invention de la critique photographique (1851-1860) », Études photographiques, n° 1, novembre 1996, p. 89-108 ; Anne McCauley, « Arago, l’invention de la photographie et le politique », Études photographiques, n° 2, mai 1997, p. 6-43 ; nous pourrons ajouter l’ouvrage d’Aaron Scharf, Art and Photography, Londres, Penguin Books, 1990, 400 p., dont la première publication, en 1968, inaugurait cette analyse des rapports entre art et photographie sous l’angle de la critique d’art.
-
[3]
Voir Jean-Pierre Leduc-Adine, « Des règles d’un genre : la critique d’art », Romantisme, n° 71, 1991, p. 93-100.
-
[4]
Walter Benjamin, Paris Capitale du XIX e siècle. Le livre des passages, Paris, Cerf, 1993, p. 696.
-
[5]
Cet article reprend dans les grandes lignes notre analyse du phénomène dans L’Image sans qualités. Les beaux-arts et la critique à l’épreuve de la photographie 1839-1859, Paris, Monum, 2006, 174 p.
-
[6]
Voir Maurice Crosland, Sciences Under Control. The French Academy of Sciences. 1795-1914, Cambridge, Cambridge University Press, 1992, 454 p.
-
[7]
Isid. B., « Invention de M. Daguerre ou Daguerrotype [sic] », Le Constitutionnel, 29 janvier 1839, p. 3.
-
[8]
Idem.
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[9]
Ph. B., « Optique. Révolution des arts du dessin », Le Siècle, 17 janvier 1839, p. 1.
-
[10]
Roulin, « Physique appliquée. Fixation des images de la chambre noire par la seule action de la lumière », Le Temps, 9 janvier 1839, p. 1.
-
[11]
Isid. B., « Variété », Le Constitutionnel, 19 janvier 1839, p. 4.
-
[12]
Voir, par exemple, Jules Pelletan, « Le Daguerréotype », La Presse, 24 août 1839, p. 4.
-
[13]
« Les deux nouveaux partis politiques, les daguerrotypohiles et les daguerrotypohobes », Le Charivari, 10 septembre 1839, p. 1.
-
[14]
Dr. Alfred Donné, « Académie des sciences. Séance du 9 septembre », Journal des Débats, 11 septembre 1839, p. 2.
-
[15]
Voir Paul-Louis Roubert, « Les caprices de la norme », Études photographiques, n° 10, novembre 2001, p. 128-143.
-
[16]
« Nouveaux procédés scientifiques appliqués aux arts », L’Artiste, 7 février 1841.
-
[17]
Raoul de Croy, « Le daguerrotype [sic]. À propos du projet de loi de la Chambre des députés », Journal des Artistes, n° 26, 30 juin 1839, p. 409.
-
[18]
« Le prix d’un daguerréotype », Le Figaro, 26 septembre 1839, p. 3.
-
[19]
Jürgen Habermas, L’Espace public. Archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Paris, Payot, 1993, p. 50-51.
-
[20]
Sur l’évolution de la situation de la critique d’art au XIXe siècle, voir notamment Dario Gambonni, « The Relative Autonomy of Art Criticism », dans Michael R. Orwicz (dir.), Art Criticism and its Institutions in Nineteenth-Century France, Manchester, Manchester University Press, 1994.
-
[21]
Louis Peisse, « Salon de 1841 », Revue des deux mondes, 4e série, t. XXVI, p. 11.
-
[22]
Le dépouillement de 45 titres de la presse politique et d’intérêt général, scientifique, artistique et satirique a permis de dénombrer, entre janvier et novembre 1839, 220 articles sur l’actualité photographique, dont plus de 80 % sont consacrés à l’invention de Daguerre proprement dite. À partir de décembre 1839, les chiffres s’effondrent pour égaler quelques unités en janvier 1840.
-
[23]
Voir Journal des beaux-arts et de la littérature, 20 septembre 1840 ; Journal des artistes, 10 janvier 1841, 14 novembre 1841 ; L’Artiste, 7 février 1841, 18 avril 1841.
-
[24]
Pour un témoignage sur les toutes premières images que les Parisiens ont pu contempler, voir Beaumont Newhall, « A Chronicle of the Birth of Photography », Harvard Library Bulletin, vol. VII, n° 2, printemps 1953, p. 208-220.
-
[25]
Voir Daniel Roche, Histoire des choses banales. Naissance de la consommation, XVII e -XIX e siècle, Paris, Fayard, 1997, 329 p.
-
[26]
Pour une étude détaillée de la naissance de l’industrie du portrait au daguerréotype, voir Quentin Bajac, « “Une branche d’industrie assez importante”. L’économie du daguerréotype à Paris, 1839-1850 », dans Le Daguerréotype français. Un objet photographique, Paris, Réunion des musées nationaux, 2003, p. 41-54.
-
[27]
Étienne-Jean Delécluze, « Salon de 1842 », Journal des Débats, 25 mars 1842, p. 1.
-
[28]
Ibid.
-
[29]
Ibid.
-
[30]
Étienne-Jean Delécluze, « Salon de 1842 », Journal des Débats, 28-29 mars 1842, p. 1.
-
[31]
Wilhelm Tenint, Album du Salon de 1841. Collection des principaux ouvrages exposés au Louvre, Paris, Challamel, 1841, p. 32.
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[32]
[Anon.], « Salon de 1842 », L’Artiste, 3e série, t. I, p. 245.
-
[33]
Georges Dupré [Théophile Thoré], « Salon de 1842 », Revue du progrès politique, social et littéraire, t. VII, 4e série, 1842, p. 230.
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[34]
Théophile Gautier, « Salon de 1850-1851 », La Presse, 5 février 1851, p. 1.
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[35]
Alphonse de Calonne, « Exposition de 1850-1851 », L’Opinion publique, 21 février 1851, p. 2.
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[36]
Étienne-Jean Delécluze, Exposition des artistes vivants 1850, Paris, Au comptoir des imprimeurs, Comon éditeur, 1851, p. 28.
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[37]
Idem, p. 32.
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[38]
H. Robert, « Beaux-arts – Salon de 1842 », Le National, 8 mars 1842, p. 2.
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[39]
Eugène Loudun, Le Salon de 1857, Paris, Jules Tardieu, 1857, p. 42.
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[40]
Voir Antoine Compagnon, Baudelaire l’irréductible, Paris, Flammarion, 2014 et Paul-Louis Roubert, « Baudelaire et la photographie : paradoxes et allégories », Revue de l’art, n° 175, 2012, p. 11-15.
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[41]
Voir Sylvie Aubenas et Paul-Louis Roubert (dir.), Primitifs de la photographie. Le calotype en France (1843-1860), Paris, Gallimard/BNF, 2010, 324 p.
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[42]
Gustave Le Gray, Traité de photographie sur papier et sur verre, Paris, Baillière, 1850, p. 1.
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[43]
Voir Paul-Louis Roubert, « Le daguerréotype en procès. Le déclin de la pratique du daguerréotype en France », Le Daguerréotype français. Un objet photographique, op. cit., p. 119-131.
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[44]
Henri Le Secq y expose régulièrement ses peintures dès 1842, Charles Nègre en 1848, 1849 et 1850, et Gustave Le Gray en 1848.
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[45]
Voir André Gunthert, « L’institution du photographique. Le roman de la Société héliographique », Études photographiques, n° 12, novembre 2002, p. 37-63.
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[46]
Afin de parfaire cet espace critique de dialogue entre peinture et photographie, La Lumière accordera également une grande place à la critique de peinture et en particulier de Salon ; voir à ce sujet : Ève Lepaon, « “L’art ne ferait pas mieux”. Corrélations entre photographie et peinture dans La Lumière », Études photographiques, n° 31, printemps 2014 : http://etudesphotographiques.revues.org/3403, consulté le 28 octobre 2014.
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[47]
Francis Wey, « Album photographique de M. Blanquart-Évrard », La Lumière, n° 33, 21 septembre 1851, p. 131.
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[48]
Francis Wey, « Album de la Société héliographique », La Lumière, n° 15, 18 mai 1851, p. 58.
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[49]
Voir Paul-Louis Roubert, « “UnphotographicPaint” : Sadakichi Hartmann face à Marsden Hartley (1909) », dans Jay Bochner, Jean-Pierre Montier (dir.), Carrefour Stieglitz, Rennes, Presses universitaires de Rennes, 2012, p. 249-256.
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[50]
Voir François Brunet, La Naissance de l’idée de photographie, Paris, PUF, 2000, 361 p.