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Article de revue

Analyses de livres

Pages 113 à 120

Publicité et obésité : naissance d’une controverse, C. Bouba, Collection Études et controverses, Bry sur Marne : Ina éditions ; mai 2011. 100 p.

1Ce petit ouvrage d’une centaine de pages est le fruit d’un travail de Master 2 réalisé à l’École des Hautes Études en Sciences Sociales. Il retrace le débat sur la réglementation de la publicité alimentaire télévisée aux heures des programmes de la jeunesse pour mieux lutter contre l’obésité qui a eu lieu dans les années 2000. Il fait état des travaux sur l’influence de la publicité sur la consommation alimentaire, des questions de protection de l’enfance en France et en Europe, de la médiatisation croissante des questions d’obésité infantile et de son entrée dans le débat politique, et enfin de la place des associations notamment de l’UFC Que choisir qualifié « d’entrepreneur de cause ».

2Les mesures d’actions publiques télévisuelles des années 2000 sont bien décrites : des messages d’information sanitaire jusqu’à la signature de la charte d’autorégulation de 2009 allant avec l’abandon de l’interdiction de la publicité pour les aliments particulièrement gras et sucrés aux heures de grande écoute des enfants. Le bilan a un an de l’application de cette charte est controversé. Dommage que l’auteur ne souligne pas le fait que l’évaluation était une autoévaluation (qui frise d’ailleurs l’autosatisfaction) qui n’est en rien indépendante.

3Ce livre est bien documenté. On peut regretter que l’auteur ne décrive pas plus les arguments scientifiques de l’AFSSA, de l’Inserm, du CNRS et que tout soit mis sur le même plan que le positionnement de l’industrie agroalimentaire et des médias. Il prend même d’une certaine façon partie en intitulant son dernier chapitre : « Sources profanes et scientifiques : l’usage de la Science comme idéologie ».

4François Bourdillon

Peste et choléra, roman, P. Deville, Paris : Éditions du Seuil ; 2012. 220 p.

5Un roman dans cette rubrique ? Et pas inconnu du grand public, puisqu’il s’agit du Prix Femina 2012… L’auteur n’est pas historien, mais, sur la base d’archives et d’une abondante correspondance mises à sa disposition par l’Institut Pasteur, il nous livre un passionnant récit sur la vie d’Alexandre Yersin (1863-1943), découvreur du bacille de la peste en 1894.

6À travers le parcours hors du commun de ce médecin suisse, devenu français, c’est toute l’épopée pastorienne qui est ici relatée : la personnalité et le tempérament de Louis Pasteur, le premier laboratoire de celui-ci à l’École normale supérieure, où Emile Roux (qui restera son ami le plus proche) le fait entrer, la vaccination contre la rage, la construction de l’Institut Pasteur qui ouvre en 1888, le premier cours de microbiologie dont il est le préparateur en 1889, l’équipe que Pasteur réunit autour de lui : Roux, Simond, Calmette, Borrel, Duclaux, Chamberland… Puis ce sont les nombreux voyages de Yersin en Extrême-Orient, d’abord comme médecin des Messageries Maritimes, puis comme explorateur de l’Indochine, anthropologue, et à nouveau microbiologiste envoyé par Pasteur en Chine où il mettra en évidence le bacille qui porte aujourd’hui son nom, son installation à Nha Trang où il crée un petit laboratoire qui deviendra Institut Pasteur, sa venue à Saïgon où Calmette a créé le premier Institut Pasteur hors de France métropolitaine, son séjour à Hanoï où, avec son ami Paul Doumer il crée l’hôpital et l’École de médecine, plusieurs missions médicales là où sévissent peste et choléra, à Madagascar, en Inde…

7Deville décrit les rivalités entre les équipes de microbiologie à la fin du 19e siècle, Pasteur à Paris, Koch (chez qui Yersin a fait un bref séjour en 1888) à Berlin, Kitasato au Japon… Il dépeint en Yersin le scientifique curieux de tout, s’intéressant autant à la mécanique automobile qu’à l’implantation de l’hévéa à Nha Trang, à l’astronomie, au développement agricole, arboricole et pastoral, à l’acclimatation du quiquina pour soigner le paludisme, à l’ouverture de routes, à l’éducation des jeunes indochinois de Nha Trang… Et Yersin toujours médecin, qui dans une lettre à sa mère déclare : « Je ne fais pas payer ces gens, la médecine c’est mon pastorat. Demander de l’argent pour soigner un de ces malades, c’est un peu lui dire la bourse ou la vie. »

8Plusieurs biographies de Yersin ont été publiées, le roman de Deville ne les remplace pas, il s’agit d’une œuvre littéraire qui offre un panorama unique sur un grand moment de l’histoire de la santé publique.

9Jean-Pierre Deschamps

L’automédication ou les mirages de l’autonomie, S. Fainzang, Paris : Presses universitaires de France ; 2012. 181 p.

10Plusieurs ouvrages de Sylvie Fainzang ont été analysés dans cette rubrique, entre autres en 2001 « Médicaments et société, le patient, le médecin et l’ordonnance » et en 2006 « La relation médecin-malade : information et mensonges ». Anthropologue de la santé bien connue des lecteurs de la Revue, Sylvie Fainzang explore ici une problématique voisine des deux précédentes. Ici encore la santé publique est concernée car parler d’autonomie amène à parler de la place des patients dans la prise en charge de leur propre santé, mais plus largement de l’autonomie en tant que premier principe de la bioéthique selon Childress et Beauchamp, ou comme objectif de la promotion de la santé et de l’ « empowerment » des personnes qu’elle implique, « accroissement du contrôle des patients sur les choix politiques et sur l’exercice de leurs droits par leur participation active ». L’éducation thérapeutique du patient est clairement interpellée, mais bien plus profondément aussi la place relative des acteurs du système de soins.

11L’enquête menée par Sylvie Fainzang s’intéresse aux politiques, à l’industrie pharmaceutique, aux médecins et aux pharmaciens et… aux usagers. Elle met en évidence un étrange (pas si étrange en fait…) paradoxe : l’automédication est acceptée, encouragée même, mais elle est encadrée de façon telle que l’autonomie invoquée reste limitée. « Bien que la préconisation de l’automédication soit articulée à un discours sur l’individu adulte et compétent, le traitement social de cette notion vise à faire des patients des consommateurs assumant financièrement leurs dépenses de santé, mais sans pour autant les reconnaître aptes à savoir choisir. […] Dès lors l’autonomie du sujet, exaltée à travers la promotion de l’automédication, semble être une chimère. » Sans doute parce que « l’automédication, comme acte thérapeutique, n’est […] pas qu’un choix pratique ou technique ; il est aussi un acte politique à travers lequel le sujet s’affirme comme autonome, et doté d’une compétence, au-delà même de celle qui lui est concédée par les institutions, politiques et professionnelles ».

12S. Fainzang nous montre que la démocratie sanitaire n’est pas encore à l’ordre du jour…

13Jean-Pierre Deschamps

Collection ECN Med Santé publique, Thérapeutique, Médecine légale, Médecine du travail, LCA-Maladies rares, Rueil-Malmaison : Éditions Pradel Wolters Kluwer France ; 2012. 202 p. ISBN : 978-2-36110-054-4, Cas cliniques pour l’ECN Médecine générale Médecine légale Médecine du travail Santé publique, Rueil-Malmaison : Éditions Pradel Wolters Kluwer France ; 2012. 240 p.

14Ces deux ouvrages font partie de l’abondante littérature de préparation des étudiants du second cycle de médecine à l’Examen classant national - ou Épreuves classantes nationales – (ECN) qui leur permettra d’entrer dans le troisième cycle et de choisir leurs postes d’internat. Cet examen, selon un principe bien français de centralisation, est organisé au plan national, avec un jury de plus de 300 universitaires… Il est censé sanctionner le second cycle dans sa totalité, soit onze modules pluridisciplinaires totalisant 219 « items » auxquels s’ajoutent 125 « items » sur les maladies, les grands syndromes et la « conduite à tenir devant… ». La santé publique est représentée, apparemment, par huit items empruntés au module 1 (Apprentissage de l’exercice médical) et 3 items empruntés au module 7 (Santé et environnement - Maladies transmissibles). Elle est donc a priori non concernée par des modules comme « De la conception à la naissance », « Handicap - Incapacité – Dépendance », « Vieillissement », ni par « Épidémiologie et prévention des maladies transmissibles : méthodes de surveillance », « Risques sanitaires liés aux irradiations - radioprotection », « Vaccinations - infections nosocomiales », etc.

15L’ouvrage ECN Med présente donc, en 3 à 5 pages schématiques, les 8 items de la santé publique. On peut se demander ce que vient faire ici « Indications et stratégies d’utilisation des principaux examens d’imagerie » mais on est rassuré de trouver « Organisation des systèmes de soins, filières et réseaux », « Protection sociale, consommation médicale et économie de la santé », « Mesure de l’état de santé de la population », « Interprétation d’une enquête épidémiologique ». On aurait aimé que soient évoqués le rôle du médecin en éducation à la santé, en éducation du patient, sa participation à des enquêtes épidémiologiques, à la veille sanitaire, les liens qu’il a à établir avec (ou simplement la connaissance de l’existence de) la santé scolaire, la protection maternelle et infantile, la médecine du travail, les services sociaux, les services d’aide aux personnes âgées, les associations de patients, les services de lutte contre les dépendances, la psychiatrie de secteur…

16Le second ouvrage, « Cas cliniques pour l’ECN », est destiné à entraîner les étudiants aux trois dossiers de cas cliniques sur lesquels ils doivent, lors de l’examen, plancher à raison d’une heure par dossier. Sur les quinze cas présentés dans l’ouvrage onze concernent l’infectiologie et la médecine tropicale… Les quatre autres évoquent la situation (totalement irréaliste) d’un médecin d’ARS devant faire le diagnostic de santé d’un département, les enjeux économiques de la santé, les systèmes de protection sociale, le saturnisme professionnel. C’est tout.

17On aura compris que ce ne sont pas les auteurs de ces ouvrages qui sont en cause ; ils s’adaptent tant bien que mal à des arrêtés ministériels invraisemblables, où la médecine est pulvérisée en des centaines d’items indépendants les uns des autres, où la santé publique est abordée de façon indigente et parfois erronée. Quelle vue globale de la médecine, de la santé publique, de son futur métier, du système de santé dont il sera acteur, l’étudiant, âgé déjà d’au moins 24 ans lors de l’examen, peut-il avoir ? C’est tragique. On objectera que le second cycle est destiné à l’apport de connaissances, la synthèse étant l’affaire des années d’internat qui vont suivre. Non, ce n’est pas après six années d’ingurgitation scolaire de notions biologiques qu’on peut devenir soudain, par les stages réalisés quasi-exclusivement à l’hôpital, médecin, donc écoutant, communiquant, soignant, prescripteur, éducateur, accompagnant, membre d’une équipe, acteur d’un système médico-social, agissant de façon responsable dans les aspects médicaux, sociaux, économiques, éthiques et de santé publique. Ou plus simplement, selon les propositions du Collège royal des médecins du Canada en 2000, un expert en décision clinique médicale, un communicateur, un collaborateur, un gestionnaire, un promoteur de la santé, un scientifique, un professionnel.

18SI l’analyse ci-dessus vous déprime, lisez la suivante…

19Jean-Pierre Deschamps

Juste après dresseuse d’ours ; les histoires brutes et non romancées d’une jeune généraliste, Jaddo, Fleuve Noir Documents ; 2011. 292 p. (disponible en version numérique www.fleuvenoir.fr)

20D’accord, le titre ne commence pas vraiment comme une publication de santé publique, et l’éditeur est plus connu pour ses romans policiers que pour son investissement dans notre discipline. Mais si un soir vous déprimez parce que vous avez lu (ou pas envie de lire) l’analyse précédente, n’hésitez pas, courrez acheter ce livre ou allez sur le blog de Jaddo (www.jaddo.fr). Humour, fraîcheur, pertinence, impertinence bienvenue, sensibilité… « Depuis douze ans (entre la fac, l’hôpital et le cabinet) j’ai eu le temps de voir un paquet de choses absurdes, terrifiantes, émouvantes, révoltantes, rigolotes. J’ai eu le temps de dire un paquet de conneries, et d’en faire quelques-unes. J’ai eu le temps de mettre de côté un paquet d’histoires à raconter. » Paroles touchantes de patients, paroles étranges de confrères et de maîtres, dénonciations des stupidités de la formation médicale, des horreurs administratives, des anomalies du fonctionnement hospitalier… Un vrai cocktail de bonne humeur et d’indignation, mais au final une observation sérieuse, et agréablement formulée, de notre système de santé et de ses dérives.

21Jaddo n’est pas la seule ; plusieurs dizaines de médecins généralistes, aujourd’hui en France utilisent le blog comme moyen d’expression de leurs satisfactions, de leurs déboires, de leurs critiques et de leurs propositions. Parmi ces dernières il faut lire : « Médecine générale 2.0, Les propositions des médecins généralistes blogueurs pour faire renaître la médecine générale ». Avec cette belle déclaration liminaire : « Notre ambition est de délivrer à nos patients des soins primaires de qualité, dans le respect de l’éthique qui doit guider notre exercice, et au meilleur coût pour les budgets sociaux. Nous souhaitons faire du bon travail, continuer à aimer notre métier, et surtout le faire aimer aux générations futures de médecins pour lui permettre de perdurer. » (Ça correspond à quels items de l’examen classant national, ça ?).

22Suivent de vraies propositions, pour un modèle de système de soins non centré exclusivement sur l’hôpital, pour la création de mille maisons de santé pluridisciplinaires, dont certaines deviendraient des maisons universitaires de santé (les MUSt…) avec des internes et des chefs de clinique en médecine générale, pour une vraie formation des généralistes au même titre que la formation en CHU pour les spécialistes, des propositions originales sur les rémunérations, ou encore… le recyclage des visiteurs médicaux…

23À lire d’urgence, et à faire connaître…

24Jean-Pierre Deschamps

Les maux et les mots. De la précarité et de l’exclusion en France au xxe siècle, Sous la direction d’A. Gueslin et H.-J. Stiker, Paris : L’Harmattan ; 2012. 212 p.

25« Il s’agit de revisiter la thématique de l’exclusion à l’aune du 20e siècle dans sa totalité » annonce l’ouvrage, fruit de journées d’études et d’un séminaire « Exclusion et pauvreté » organisés par les historiens du Laboratoire Identités-Cultures-Territoires de Paris7. L’étude des exclusions et de la grande pauvreté est croisée avec celle de l’augmentation du rôle de l’État social (ou providence) qui caractérise le 20e siècle : l’État est-il apte à résoudre les grandes questions liées à la précarité et à l’exclusion ?

26Exclusion et pauvreté, une réalité multiforme. Un premier chapitre concerne la santé des jeunes et s’appuie essentiellement sur les travaux réalisés au Centre de médecine préventive de Nancy, un autre aborde la sexualité des personnes handicapées, un autre les immigrés issus du logement. Une large seconde partie aborde le sujet suggéré par le titre : « précarité et exclusion en mots », sémantique et stigmatisation… ou comment les mots ont changé, mots de compassion (clochard, naufragé), mots évoquant la route (chemineau, vagabond, routard, gitan), l’absence de logement (SDF, sans-abri, zonard) ou le mépris (racaille) : la dénomination fait partie du « processus de mise-à-part ». Face à la nécessité de protéger les exclus, évoquée dans la troisième partie, l’État agit au nom de normes universelles inscrites dans la Constitution, au nom des droits de l’Homme, au nom de la non-discrimination. Non seulement « [il] ne peut décréter la fin de la stigmatisation et donc de l’exclusion » mais il limite les budgets concernant les mesures de protection, il échoue à développer une discrimination positive… Finalement, « si l’État ne saurait disparaître, il doit muter et laisser place à la parole des citoyens. Ce qui est loin d’être le cas quand ces citoyens sont ceux que l’on ne met jamais en position de prendre la parole et d’exercer leurs pleins droits ». La tonalité générale est pessimiste, et laisse penser que la lutte contre l’exclusion et les associations qui s’y vouent s’inscriront encore longtemps dans le 21e siècle…

27Jean-Pierre Deschamps

Politiques sociales et de santé. Comprendre et agir, Y. Rayssiguier, J. Jégu, M. Laforcade, Rennes (France) : Les presses de l’EHESP, Nouvelle édition entièrement revue & augmentée ; 2012. 672 p.

28Dans le secteur du sanitaire et dans celui du social, l’explosion normative et réglementaire a créé un enchevêtrement de politiques et d’acteurs d’une grande complexité. L’objet de cet ouvrage, d’une grande ambition, est de présenter l’ensemble des politiques publiques de la France de ces deux champs de manière thématique.

29Il comprend trois parties.

30La première traite des politiques publiques dans le champ sanitaire et social. Après un rappel historique sur le fondement des politiques sociales, les politiques sociales catégorielles sont décrites concernant la famille et l’enfant, les personnes handicapées et les personnes âgées. Puis les politiques transversales sont présentées, d’insertion, de la ville, d’accès aux droits sociaux et d’accueil et d’intégration ainsi que les prestations sociales. Un important chapitre est consacré aux politiques de santé.

31La deuxième partie traite des acteurs et des institutions, l’État, l’administration sanitaire et sociale, les collectivités territoriales, la sécurité sociale, puis présente les établissements sanitaires, sociaux et médico-sociaux, les professionnels de santé et les associations d’usagers.

32La troisième partie concerne le pilotage des politiques sociales et de santé en deux chapitres consacrés aux démarches et méthodes d’intervention et aux outils.

33Au total, cet imposant ouvrage s’impose par son ambition et par la rigueur de sa présentation. Il dresse un panorama de l’ensemble des politiques sociales et de santé et permet au lecteur pressé de trouver l’information qu’il recherche. La bibliographie thématique est pertinente et abondante. En plus de cela, la force de l’ouvrage tient à la présentation solide du cadre réglementaire et des institutions. Il montre la grande complexité des deux secteurs en construction permanente. Cependant, la partie consacrée à la régulation souffre de quelques lacunes, en particulier concernant l’échec de la politique de maîtrise des dépenses de santé réduite à une évocation générale des lois la concernant. De même, la quasi-absence de régulation de la médecine ambulatoire n’est pas évoquée alors qu’elle constitue un important sujet.

34Malgré ces réserves, cet ouvrage est un outil de travail extrêmement utile à toute personne, étudiant, chercheur, membre d’administration désirant une information de base et comprendre la complexité du secteur sanitaire et du secteur social.

35Jean Ducos

Des restructurations hospitalières et des hommes, Préface d’É. Caniard, D. Haas, D. Lebrun, J.-E. Sécher, Rennes (France) : Les presses de l’EHESP ; 2012. 128 p.

36L’ouvrage retrace trois restructurations hospitalières menées l’une à Nantes, l’autre à Vénissieux et la troisième à Grenoble, avec des capacités de 232 à 430 lits et places. Dans les trois cas il s’agissait de cliniques hospitalières classiques et de PSPH (devenus depuis ESPIC), la restructuration grenobloise comportant trois établissements, les deux autres deux. Le livret comporte huit forums consacrés au choc des cultures, au pilotage, aux projets médicaux, à l’architecture, au montage financier, au projet social, à la communication et aux enseignements pour le futur. Chacun des forums est animé par la même personne – un journaliste – et comprend différents intervenants, en général les trois chefs des trois projets et d’autres personnes représentant les architectes, directeurs d’établissements et les agences régionales d’hospitalisation (ARH) concernés. L’ouvrage se termine par la présentation des chefs de projet et le point de vue d’un « grand témoin », ex directeur d’ARH. Mais il est complété par trois annexes, présentations de projets d’établissements correspondant aux trois projets de restructuration évoqués, et qui représentent ensemble les 2/5 de la totalité de l’ouvrage.

37Il ne faut, en aucun cas, voir dans ce travail une réflexion de base sur les restructurations interhospitalières, leurs difficultés et leurs limites. Tout d’abord il s’agit d’un ensemble de trois restructurations privées : le sujet des restructurations de l’hôpital public n’est pas abordé. Ensuite on ignore la raison de ce choix : sont-elles les seuls cas de restructuration en France ? Les seules abouties ? Les seules « montrables » ? Et dans ce cas qu’en est-il des échecs ? Surtout la présentation de l’ouvrage est nettement hagiographique ; en fait seules les équipes de direction et leurs avis sont présentées, à aucun moment les équipes de terrain, médicales ou soignantes. La présentation des établissements nouvellement créés, basée avant tout sur l’architecture, prend même parfois un aspect publicitaire à force d’optimisme. Au total, il ne faut donc pas prendre cet ouvrage pour une étude de fond sur les restructurations hospitalières, même en se cantonnant au secteur privé, mais pour une étude limitée, ne prenant en compte qu’un aspect de la restructuration.

38Pascale Jeunehomme

Qualité de vie au travail et management participatif, Sous la direction de P. Colombat, Rueil-Malmaison (France) : Éditions Lamarre-Wolters Kluwer ; 2012. 240 p.

39Les auteurs sont pour la plupart, des médecins, psychologues et cadres de santé travaillant dans des services d’hématologie et d’oncologie. À partir de leur expérience, issue de la mise en place de « la démarche participative dans les soins palliatifs » instaurée par la circulaire ministérielle du 22/2/2002, ils proposent aux dirigeants un modèle de management participatif qui vise à améliorer la qualité de vie au travail des soignants et ainsi la qualité de la prise en charge des patients.

40Les deux premières parties du livre : « les constats » et « les concepts », analysent les difficultés des soignants liés au travail en service de cancérologie, dans leur relation à l’équipe de soins, aux patients et à leurs proches. Elles peuvent entraîner un burn-out ou épuisement professionnel. Différentes échelles d’évaluation de qualité de vie au travail permettent d’étudier les facteurs qui influent sur l’organisation du travail.

41Dans la troisième partie, les auteurs décrivent la méthode de management participatif dans les soins d’hémato-cancérologie qui repose sur la création d’espaces d’échanges et la « démarche projet ».

42Les espaces d’échanges créent de la communication autour des besoins du patient : tous les membres de l’équipe s’expriment à tour de rôle dans le but de décider d’un projet commun autour du malade. Ils permettent une reconnaissance et une responsabilisation de chaque soignant et favorisent la collaboration dans l’équipe de soins. Ces réunions doivent être hebdomadaires, durer 1h environ, et ne concerner que peu de patients à chaque séance.

43La démarche projet consiste à mettre en place, à partir d’un dysfonctionnement constaté, un groupe de travail pluriprofessionnel qui va définir le problème, rechercher les causes et les solutions, proposer la solution retenue, puis élaborer sa mise en œuvre si elle est acceptée.

44Cette méthode est un élément majeur pour fédérer une équipe car chacun se sent impliqué et valorisé ; toutes les catégories socio-professionnelles concernées doivent être représentées et respectées. La démarche peut être ciblée sur un problème de fonctionnement (conflit, organisation) ou s’inscrire dans un projet global de service (accompagnement du patient et des proches, développement de nouvelles technologies).

45Dans la partie suivante, l’application à l’entreprise de ce modèle de management est abordée ; elle n’est possible qu’à trois conditions : cohésion de l’équipe dirigeante, adhésion de l’encadrement de proximité au projet et efficacité de la communication interne pour diffuser les informations.

46La dernière partie de l’ouvrage donne des exemples de mise en place de cette méthode dans un service d’hématologie-cancérologie et dans un centre de transfusion sanguine.

47Ce livre décrit un mode de management particulier où la démarche participative, en tenant compte des facteurs humains, peut servir de modèle en milieu hospitalier pour prévenir la souffrance des soignants au travail et ainsi améliorer la qualité des soins aux patients.

48Anne Fehr Ferrié

Comment la dépression est devenue une épidémie, P. Pignarre, Paris : Éditions La Découverte ; 2012. 175 p.

49L’auteur part d’un constat : l’explosion du nombre de personnes souffrant de dépression depuis une quarantaine d’années. Ainsi, en France, le nombre en aurait été multiplié par 7 entre 1970 et 1996 pour atteindre 1 million de personnes. Ce spécialiste de l’histoire et de l’industrie du médicament, ancien chargé de la communication dans l’industrie pharmaceutique, s’interroge sur cette évolution et sur ses fondements.

50On peut tenter de résumer, très schématiquement, sa thèse de la façon suivante :

  • une mondialisation de la maladie. La psychiatrie occidentale, par l’intermédiaire d’une vision prétendument transculturelle, s’attacherait à rechercher, jusque dans les cultures non occidentales, voire non anglo-saxonnes, des symptômes pouvant correspondre au diagnostic clinique de l’état dépressif. Elle aurait ainsi fait de la maladie dépressive une véritable épidémie mondiale ;
  • une uniformisation de la causalité des dépressions. La psychiatrie présupposerait que les émotions, contrairement aux pensées, renvoient à la subjectivité, à l’intériorité de l’individu, tant psychologique que biologique, lieu de développement des affections psychiatriques. Cette vision des choses écarterait toute autre explication, comme, par exemple, les traumatismes psychiques exogènes tels que le harcèlement moral ;
  • l’absence de « témoin fiable ». La validité d’une étude clinique est fondée, notamment, sur la solidité d’un diagnostic qui permet d’identifier un paramètre reproductible. C’est le cas dans les maladies infectieuses où l’isolement d’un germe responsable constitue un « témoin fiable » pour faire le diagnostic et pour mesurer l’action des thérapeutiques. Or « il n’existe pas de témoin fiable en psychiatrie ». Le diagnostic, en l’absence de traceur biologique, est fondé sur l’interrogatoire et la clinique. Dès lors, les chercheurs devraient faire varier les critères d’inclusion des groupes de patients étudiés jusqu’à ce qu’ils répondent de façon adéquate aux molécules candidates. « Le médicament lui-même devient son propre témoin fiable » et « les psychotropes ont le pouvoir de saisir des patients de plus en plus nombreux parce que le trouble se définit par ce sur quoi ils agissent ». La mise au point des psychotropes irait jusqu’à être à l’origine des nouveaux outils de mesure, qualifiés de « mentalomètres », sur lesquels se fonde le diagnostic de dépression et de sa sévérité ;
  • la « petite biologie », par opposition à une « grande biologie » qui concernerait l’étude des causes des maladies, l’auteur évoque une « petite biologie » en usage en psychiatrie. Un exemple illustratif, pris en dehors de la dépression, en serait l’hypothèse dopaminergique de la schizophrénie : « elle associe un déficit d’un neurotransmetteur dans le cerveau, la dopamine, avec la schizophrénie, au motif que les neuroleptiques agissent sur lui ».
Cet ouvrage, qui n’omet pas le rôle de l’industrie pharmaceutique dans cette évolution des concepts de la psychiatrie, au-delà d’ailleurs de la seule dépression, n’est pas seulement un plaidoyer à charge. Il ne remet pas en cause l’utilité des antidépresseurs dans des indications raisonnées. Il constitue surtout un appel à ne pas oublier certains fondamentaux de la clinique, comme l’écoute, patiente, de la plainte du malade, dans ses différentes dimensions. Il nous invite à conserver une attitude critique sur notre façon d’envisager « les métamorphoses de l’âme ».

51Jean-Claude Lafon

Diabète du sujet âgé. 33 histoires vraies, Sous la direction d’I. Bourdel-Marchasson, C. Verny, B. Bauduceau, Paris : Éditions Frison-Roche ; 2012. 183 p.

52La prévalence du diabète est estimée à plus de 14 % des sujets de 65 à 79 ans, ce qui légitime l’intérêt porté par le groupe francophone de diabéto-gériatrie issu de la société française de gériatrie et gérontologie (SFGG) et de la société francophone du diabète (SFD) à la rédaction d’histoires cliniques sur le diabète du sujet âgé. Cette prévalence augmente depuis de nombreuses années, elle résulte de l’augmentation de l’espérance de vie mais aussi de la majoration de la prévalence de l’obésité.

53Les études ENTRED (échantillon représentatif français des diabétiques) de 2001 et 2007 ont mesuré l’état de santé et prise en charge des soins des diabétiques notamment de plus de 65 ans.

54Certains de leurs constats certes déjà anciens, méritent d’être mis en exergue comme dans cet ouvrage didactique construit à partir d’histoires vraies. Ces 33 histoires permettent d’illustrer de nombreuses problématiques, liées à l’âge (problèmes cognitifs, difficultés de nutrition, entourage intermittent) ; aux risques iatrogènes des polymédications ; à l’équilibre à trouver dans le traitement (ni trop, ni pas assez) pour éviter les conséquences souvent graves d’hypoglycémies ; à la vigilance à accorder aux tableaux bruyants de défaillances aiguës d’organes (myocarde, cerveau) qui font passer au second plan les symptômes de l’hypoglycémie responsable.

55Primum non nocere est le titre d’une de ces histoires. Dans l’étude ENTRED, 10 % des diabétiques âgés avaient rapporté au moins une hypoglycémie sévère dans l’année, pourcentage minoré par rapport à ce que serait un recueil exhaustif fait par les équipes soignantes. Ces histoires montrent que les effets indésirables des traitements sont davantage liés au mésusage des produits qu’aux produits eux-mêmes.

56Ce livre détaille des situations fréquemment rencontrées et susceptibles d’être mal évaluées, c’est une véritable formation médicale continue comme on la vivrait en suivant la « visite » au lit du malade, ou lors d’un stage étudiant auprès d’un médecin libéral.

57Jean-Pierre Francès

La sécurité du système d’information des établissements de santé, C. Cartau, Rennes (France) : Les presses de l’EHESP ; 2012. 224 p.

58Les systèmes d’information (SI) ouvrent de nombreuses possibilités qui suscitent un grand intérêt pour le public : dossier médical personnel (DMP), réduction des risques liés à la prescription médicamenteuse, essor de la télémédecine

59Mais cette évolution suscite aussi des inquiétudes alimentées par des crises qui ont eu lieu ou par des scénarios catastrophes : la sécurisation du système d’information est donc devenue cruciale dans le domaine de la santé.

60En utilisant un langage dépourvu du jargon informatique, l’auteur décrypte cet univers ultra spécialisé et nous fait comprendre les enjeux, les règles à respecter et les limites de tout processus de sécurisation. Tous les aspects de la sécurité – techniques, organisationnels, juridiques et financiers – sont mis en perspective pour offrir une compréhension systémique de ce domaine hautement sensible.

61Que ce soit le risque de perte d’intégrité de la donnée, de perte de disponibilité ou de non prise en compte de la pénétration de l’outil informatique dans tous les processus métier, c’est-à-dire les principales menaces, toutes sont abordées en gardant à l’esprit que la sécurité des systèmes d’information, c’est de la qualité dans le domaine du SI.

62Christian Deshours

Vive la protection sociale !, B. Fragonard, Paris : Odile Jacob ; 2012. 302 p.

63Voici un ouvrage technique, efficace, documenté, facilement abordable pour son contenu mais pas toujours facile à lire en raison d’un style d’écriture parfois trop répétitif. Il n’en demeure pas moins qu’en un nombre de pages relativement restreint l’auteur propose à la fois un diagnostic sur l’état actuel de la protection sociale « à la française », ainsi qu’un certain nombre de moyens pour en améliorer l’efficacité, voire pérenniser son existence même. Car, contrairement à ce qui est couramment admis dans la population, la sécurité sociale dans sa composante assurances sociales, ne fournit pas à elle seule la couverture en ce domaine qu’elle partagera avec ses branches famille et vieillesse, le dispositif d’indemnisation du chômage, la politique du logement, celle des personnes âgées, etc.

64Une force de cet ouvrage est aussi de faire le point sur un certain nombre d’idées reçues et éventuellement de les détruire au moyen de statistiques et d’analyses « fortes » de données économiques que tout lecteur est à même de comprendre, surtout enrichies de comparaison avec d’autres pays européens ou les États-Unis. L’enjeu est donc de faire la part entre deux attitudes, exposées dans le texte de présentation figurant au dos de la reliure : « Dans un contexte de nécessaire maîtrise des dépenses publiques, elle encouragerait- la sécurité sociale - l’assistanat, favoriserait les vieux au détriment des jeunes, gaspillerait des ressources précieuses, etc.

65Pourtant, généreuse et universelle elle contribue largement à amortir les chocs liés aux crises et aux risques d’accroissement des inégalités. Mais elle doit aussi être réformée, car à l’abri des grands principes, se dissimulent des situations de sous productivité, des dépenses inefficaces, mais aussi des lacunes criantes. »

66Le décor étant planté la « pièce » se joue en 11 chapitres d’intérêt très inégal de l’un à l’autre, mais ce jugement peut ne refléter que les préoccupations de l’auteur de la note de lecture : Fondements et évolution de la protection sociale ; Une protection équitable pour tous ? ; La politique familiale : toujours moins ? Toujours mieux ? ; Protection sociale et condition féminine. La Sécurité Sociale est-elle sexiste ? ; Les jeunes adultes : le difficile chemin de l’autonomie ; L’Assurance maladie : l’indispensable maîtrise ; Protéger les actifs : concilier soutien au revenu et incitation au travail ; Poursuivre la réforme des retraites ; La dépendance : une protection encore insuffisante ; Complexité et progrès de la gouvernance et de la gestion ; Réformer encore le système des recettes ?

67La conclusion propose deux hypothèses, l’une conservatrice celle du moment et que beaucoup voudraient voir perdurer et l’autre réformiste qui est celle que l’auteur du livre privilégie, mais qui suppose une part de sacrifices et donc politiquement plus difficile que le statu quo.

68L’intitulé de certains des chapitres laisse augurer d’un contenu dès maintenant polémique, et bien plus dans un avenir proche, les problèmes qu’ils abordent ne pouvant être négligés ou évacués, comme par exemple la situation des retraites, la gestion du chômage et l’insertion dans le monde du travail, la dépendance. Ce sont des raisons supplémentaires pour lire cet ouvrage.

69Michel Deysson

À la recherche du maillon faible. Initiation aux facteurs humains, Préface de J. Rosay, F. Renouard, J.-G. Charrier, Châtillon (France) : Ewenn Éditions ; 2012. 221 p.

70En France, on estime à plus de 10 000 le nombre d’évènements médicaux indésirables graves survenant chaque année dans les hôpitaux. Cinquante pour cent d’entre eux pourraient être évités en appliquant et en respectant des protocoles appropriés. Du fait des similitudes existant entre le pilotage d’un avion et l’exercice de la chirurgie, cet ouvrage cherche à faire bénéficier la chirurgie dentaire des notions de facteurs humains introduits en aviation, afin d’améliorer et de sécuriser l’activité des professionnels au quotidien. En effet, l’être humain est parfois le maillon faible de la chaîne qui conduit à l’échec, quel que soit son niveau de compétence, et malgré toutes les protections techniques et règlementaires dont il peut s’entourer. L’avancée technologique n’est pas la solution à tous les problèmes : il est prouvé que replacer l’humain au centre des préoccupations peut diminuer la dangerosité d’une procédure aussi efficacement que l’utilisation de matériels toujours plus sophistiqués et coûteux. Les facteurs humains sont le résultat de l’étude des interactions entre un individu et son milieu de travail, qui comprend les autres personnes, la technologie, la documentation et l’environnement. Les difficultés se produisent lors de la mise en relation de ces différents groupes. Au travers des chapitres consacrés au stress, au risque et au danger, aux erreurs, les auteurs s’appuient sur des faits vécus pour montrer le cheminement conduisant aux accidents et analyser les causes et conséquences des facteurs humains. Ils plaident pour l’adoption et l’enseignement de l’approche cognitive en vue de sécuriser les pratiques professionnelles.

71Bérengère Davin

Risques du travail, la santé négociée, Sous la direction de C. Courtet, M. Gollac, Paris : Éditions La Découverte, Collection Recherches ; 2012. 324 p.

72Cette somme de travaux de recherche est présentée sous la coordination de la responsable à l’ANR (Agence nationale de la recherche) du programme « Santé Environnement – Santé travail » mis en place entre 2005 et 2007 dans le cadre du plan national Santé et Environnement-1 (PNSE1) et du plan Santé Travail-1 (PST1) qui les a financés ainsi que cette édition soutenue aussi par la DGT du ministère du Travail.

73S’agissant de recherche, la lecture de ces travaux mérite du temps et de l’attention. L’entrée en matière est facilitée par le regroupement en trois grands chapitres : « Connaissance et reconnaissance des troubles de santé au travail » « Comprendre, mesurer, intervenir » et « Organiser et mettre en discussion le travail ».

74Le premier chapitre permet une approche indispensable des contextes des accidents et maladies professionnelles : dans le champ de la santé publique et en fonction des changements sociétaux et environnementaux induits par l’industrialisation, l’urbanisation, l’organisation du travail. C’est une partie historique qui précise en quoi les facteurs sociaux, politiques, économiques et culturels ont déterminé jusqu’à aujourd’hui la perception des problèmes et les actions de prise en charge depuis le compromis assurantiel du domaine individuel jusqu’à l’obligation de sécurité et de prévention forcément collective. À partir du récit de victimes du travail deux articles tentent d’analyser les freins et les entraves à la mobilisation pour les droits à la santé et à la réparation. Ils permettent en particulier d’objectiver les injonctions paradoxales et l’impossibilité de relier pour la victime l’expérience de l’injustice et la mobilisation positive.

75Dans le deuxième chapitre, plus court, le lecteur entre dans les aspects méthodologiques des différents modèles scientifiques proposés pour mesurer l’effet des conditions psychosociales nouvelles sur la santé du travailleur. Le cas des troubles musculo-squelettiques sert d’exemple pour le modèle bio-psycho-social. Pour la mesure de la charge de travail objet de nombreuses controverses, deux outils sont proposés, construits à partir d’études conjuguant les apports de la psychologie cognitive et de la psychologie sociale d’une part, et ceux de la chronobiologie et de l’ergonomie d’autre part.

76Enfin, le troisième chapitre ouvre la discussion sur la pénibilité du travail ressentie dans de nombreuses situations professionnelles, chez le travailleur posté, par le management, par les professionnels du soin au bord du burn out, par les artisans et commerçants. Les derniers contributeurs s’interrogent enfin sur les chiffres produits sur la santé au travail et l’usage qui en est fait par les différents acteurs et intervenants dans ce domaine. Les rôles de chacun sont expliqués. Comme le titre « la santé négociée » le rappelle, les questions de santé rendues visibles rentrent dans les négociations de l’environnement travail.

77À ce titre, ce livre intéressera non seulement les professionnels de santé au travail mais aussi tous les participants à cette négociation, du côté employeur comme du côté des représentants des salariés et de leurs instances, sans oublier les institutions de protection sociale et les assureurs de la santé.

78Michel Banvillet

Santé. Que faire pour sauver notre système ? C. Prieur, Paris : L’Harmattan ; 2012. 199 p.

79L’ouvrage de Christian Prieur est à visée pédagogique, il se propose d’expliquer la problématique des dépenses de santé qui est très complexe et comprend plusieurs dimensions, politique, éthique, économique, sociale et technique. L’approche retenue est économique.

80Après avoir constaté que les dépenses de santé augmentent plus vite que la richesse nationale, ce qui en fait des biens supérieurs, l’auteur décrit le contenu de ces dépenses analysées sous l’angle de la consommation et de la production. L’ouvrage analyse ensuite la régulation qui est nécessaire dans la mesure où les besoins sont par nature illimités alors que le financement est pour l’essentiel socialisé. Se pose alors la limite de la capacité collective à payer les soins de santé. La spécificité de la France est de ne pas avoir choisi entre les deux polarités, l’État et le marché, ce qui explique, au moins en partie, l’échec de la régulation.

81Ensuite l’auteur analyse les différents financements de la santé, l’assurance maladie obligatoire et complémentaire et le reste à charge des ménages. L’ouvrage s’achève sur ce qu’il conviendrait de faire pour que notre système de santé soit pérenne. Les recettes proposées sont de deux ordres, la rationalisation des dépenses de santé (prévention, régulation des soins) et l’adaptation des financements.

82Au total, cet ouvrage est un classique du genre écrit par un grand spécialiste de la question. Il fait le point sur une question essentielle et nous ne pouvons que recommander sa lecture aux chercheurs, aux professionnels de santé et à tout citoyen désirant la comprendre.

83Jean Ducos

Comprendre le système de santé pour mieux le gérer, R. Pineault, Montréal : les Presses de l’Université de Montréal ; 2012. 194 p.

84L’auteur est un des leaders les plus engagés dans le développement de la santé publique et des services de santé au Canada. Ses ouvrages sur l’épidémiologie ou sur la planification restent des références incontournables. Le but de ce livre est de mieux appréhender la complexité des systèmes de santé en réduisant le degré d’incertitude des données dont nous disposons, afin d’en faciliter la gestion.

85Il s’agit d’une synthèse d’une grande expérience d’enseignement sur l’organisation des services de santé. Son originalité réside dans son interdisciplinarité et donc dans son approche globale. Il fait particulièrement appel à des connaissances épidémiologiques, économiques, sociologiques. Les cadres théoriques et les modèles relatifs à l’organisation des systèmes de santé sont clairement expliqués. Pour mieux gérer la complexité des systèmes de santé, l’auteur apporte avec une grande rigueur les définitions des concepts utilisés et permet ainsi de donner un sens universel au vocabulaire employé. L’appel à de nombreuses références bibliographiques majeures permet une mise en perspective de la pensée de l’auteur.

86C’est aussi un ouvrage didactique qui s’adresse non seulement aux gestionnaires qui veulent comprendre le système de santé pour mieux le réguler mais aussi aux étudiants et professeurs qui s’intéressent à ce domaine. Chaque chapitre propose des exercices avec leur corrigé. Ces exercices sont applicables à tout système de santé. On relève quelques exercices positionnés sur le système français et notamment sur l’activité des agences régionales de santé.

87La finesse des analyses ne nuit pas à l’accessibilité de ce livre. Il sera utile à tous ceux qui veulent analyser le fonctionnement des systèmes de santé et contribuer à leur régulation.

88Georges Borgès Da Silva


Date de mise en ligne : 04/04/2013

https://doi.org/10.3917/spub.131.0113

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