1La prochaine loi de santé publique devra répondre à un certain nombre d’enjeux sanitaires. En ce sens, de façon globale et systématique, le Haut conseil de la santé publique (HCSP) a proposé en 2010, à partir de l’évaluation des objectifs précédents et d’une analyse de situation, les objectifs pour la future loi de santé publique, relatifs aux déterminants de santé, aux pathologies ou aux groupes de population [1].
2Le but de cet article est de développer un argumentaire sur les mesures structurelles nécessaires à l’atteinte de ces objectifs thématiques, ces dernières portant principalement sur l’architecture et la gouvernance de la politique de santé. Cet article, qui n’a pas d’ambition d’exhaustivité, se veut complémentaire des rapports et autres analyses sur la question [1-10]. Plus particulièrement centré sur les problématiques de santé publique, il n’aborde pas les questions – majeures – liées au système de soin (régulation, financement, problématiques d’accès) et à l’articulation entre politique de santé publique et politique d’assurance maladie [3].
Les résultats contrastés du système de santé français
3Au cours de la dernière décennie, pas moins de trois lois ont posé des jalons pour préciser le périmètre et les modes de gouvernance de la politique de santé publique. Pour ne décrire que les mesures principales qui concernent notre objet : la Loi du 4 mars 2002, relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé, a inscrit la participation des usagers à la gouvernance des politiques de santé ; la Loi n° 2004-806 du 9 août 2004 relative à la politique de santé publique comprenait dans une annexe, une liste de 100 objectifs sanitaires, associés à des indicateurs quantifiés ; enfin, la Loi du 21 juillet 2009, portant réforme de l’hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, a défini la gouvernance régionale de santé en rassemblant au sein d’une seule agence la prévention, le soin et le médico-social. Or, force est de constater que malgré un arsenal législatif important, les résultats ne sont pas au rendez-vous.
4En effet, en matière de santé, si la France présente une situation favorable, tant pour l’état de santé de ses concitoyens que pour la qualité de son système de soins, ses faiblesses n’en sont que plus apparentes : une mortalité prématurée élevée, notamment chez les hommes ; une espérance de vie sans incapacité plutôt basse par rapport aux pays européens les mieux classés ; et surtout de fortes inégalités sociales et territoriales de mortalité, de morbidité et de qualité de vie [2, 11, 12].
5Il convient en outre de prendre en compte l’évolution des risques sanitaires liée aux modifications des modes et conditions de vie [13]. L’augmentation de la prévalence de l’obésité – et des maladies qui en découlent – en est un exemple. Le vieillissement de la population en est un autre. Enfin, la prégnance croissante de l’enjeu d’efficience – entendu ici comme le rapport entre moyens engagés et résultats en termes de santé – est une réalité aujourd’hui incontournable et conditionne la pérennité du dispositif de protection sociale. Ainsi, la rationalisation de la prise en charge et de l’accompagnement des patients, le développement d’une offre de prévention et de soins accessible, l’optimisation des compétences des professionnels de santé et des intervenants sociaux et médico-sociaux, la rémunération équitable des professionnels, le financement solidaire des dépenses de santé, ne peuvent plus être dissociés des objectifs sanitaires de la politique menée [3].
6Par ailleurs, l’organisation nationale en matière de santé est déficiente, comme le montre un rapport récent de l’IGAS sur la gouvernance en santé [14]. Il pointe notamment le fait, qu’aujourd’hui il n’y a pas une politique mais un ensemble de mesures et d’interventions mal coordonnées, issues de plusieurs sources : lois de financement, programmes des administrations centrales et des opérateurs nationaux et régionaux, priorités politiques (par exemple les « plans présidentiels »), politiques sanitaires en dehors du périmètre du ministère en charge de la santé et dans le cadre des collectivités territoriales…
7Ainsi, il n’y a pas de ligne directrice claire à cette politique de santé, devenue la résultante d’un empilement de plans et d’objectifs, mais une nette confusion entre objectifs et priorités ; les contraintes financières sont insuffisamment prises en compte avec une construction inflationniste au gré de la constitution et de la superposition des plans ; l’action publique présente une image brouillonne liée à une grande hétérogénéité des méthodes d’élaboration, de suivi et d’évaluation des plans de santé publique ; et les approches interministérielles sont encore peu développées. La mise en place des ARS, par l’organisation d’une politique régionale de santé, met encore plus en exergue cette absence d’unité dans la politique nationale de santé.
8Enfin, les insuffisances propres à un secteur particulier, celui de la prévention, ont été pointées par un récent rapport de la Cour des Comptes [15]. Ces constats concernent la prévention dite sanitaire (réalisée par les acteurs du système de soin) mais peuvent concerner plus globalement la promotion de la santé (c’est-à-dire l’ensemble des stratégies – qui dépendent ou non du secteur de la santé – visant à préserver et améliorer l’état de santé).
9Ce secteur souffre, outre des limites générales déjà exposées, d’une absence de lisibilité des actions efficaces et des acteurs compétents, couplée à une absence d’évaluation solide permettant d’aider à la décision quant aux choix de financement. Ces failles conduisent certains à considérer aujourd’hui en France que la prévention est non prioritaire, inefficace ou inefficiente. Ce discours récurrent montre une réelle méconnaissance des acquis de la recherche par les tutelles, parfois même par les acteurs du domaine. En effet, les stratégies et interventions de prévention peuvent s’appuyer sur un important corpus scientifique qui en objective l’efficacité, comme l’efficience, et qui sert de base à de nombreuses politiques de santé à travers le monde [5].
Vers une politique nationale rénovée, structurée et plus intégrée aux autres secteurs
10Si l’on veut répondre aux enjeux sanitaires précédemment cités avec comme objectif principal et fil conducteur la promotion de l’égalité devant la santé, ce constat partagé plaide pour l’élaboration d’une politique nationale de santé qui soit structurante, pilotée et évaluée, fondée sur les connaissances et nécessairement intersectorielle pour tenir compte du fait que les déterminants de l’état de santé – et donc les leviers d’intervention – ne relèvent pas tous du secteur sanitaire.
11Une loi de santé publique serait la clef de voûte de cette politique nationale de santé. Elle est en effet nécessaire pour affirmer les finalités, objectifs et priorités et donner le cadre et les outils nécessaires à la gouvernance, la planification et la mise en œuvre de cette politique. Il s’agirait plus spécifiquement d’organiser la loi autour de trois axes forts : définir une politique nationale de santé, renforcer le secteur de la prévention et mettre en œuvre une stratégie de lutte contre les inégalités sociales de santé. Il n’y a qu’à l’aune de cette rénovation que le système français pourra réussir à concilier à la fois impératif de lutte contre les inégalités en santé et nécessité d’efficience.
12En tout premier lieu, il convient de se doter d’une véritable politique nationale de santé. C’est l’objet du rapport de l’IGAS sur la gouvernance en santé [14], développé dans l’article d’Alain Lopez de ce même numéro de la revue [9]. Il s’agirait de définir une politique unifiée comprenant l’ensemble des politiques qui ont pour objectif principal d’agir sur la santé de la population, incluant le ministère de la Santé mais aussi tout autre ministère intervenant dans le champ. En effet, des acteurs importants de la santé ne sont pas sous la dépendance du ministère de la Santé (par exemple la santé scolaire dépend du ministère de l’Éducation nationale). Or, il devient nécessaire que de tels acteurs soient coordonnés dans le périmètre de la politique de santé. Il s’agirait de structurer la gouvernance de cette politique nationale de santé. La loi de 2009 a donné une cohérence régionale structurelle avec les ARS et fonctionnelle avec une structuration des priorités et programmes à l’échelle régionale, il convient désormais d’organiser cette cohérence au niveau national, prenant notamment en compte l’articulation entre politique de santé publique et politique d’assurance maladie [3]. La forme qu’elle pourrait prendre (telle qu’une agence nationale de santé) a été discutée par ailleurs [10].
13Il s’agirait ensuite d’en préciser l’architecture. En premier lieu, cette politique doit séparer les notions d’objectifs et de priorités, la priorité étant définie comme un sujet d’importance majeure (problème de santé ou prise en charge spécifique d’enjeu national), légitimant des moyens supplémentaires et l’engagement de tous. Ces priorités ne peuvent être nombreuses, concentrant l’effort national en matière de santé publique. Pour autant, les objectifs de santé jusqu’ici structurés par la loi de 2004, pourraient être maintenus en complément, orientant l’ensemble des opérateurs tel un tableau de bord de la santé de la population, assortis d’indicateurs à atteindre en termes d’état de santé et couvrant cette fois tous les thèmes. Ces objectifs ne relèveraient cependant pas de la loi, contrairement aux priorités, afin de pouvoir s’ajuster en continu. Le rapport 2010 du HCSP, qui propose des objectifs actualisés pour la France, en serait un excellent socle [1]. Ainsi, la politique comprendrait trois à cinq priorités et autant d’objectifs que nécessaire, évitant ainsi la confusion qu’il y a eu dans la loi de 2004 entre objectif et priorité. Car, avoir cent priorités revient… à ne plus en avoir du tout.
14En outre, il est important de mieux articuler plans et objectifs, les plans devenant des outils organisant la réponse aux objectifs. Or, aujourd’hui, les plans se constituent plus ou moins de façon indépendante, chacun élaboré comme une politique de santé autonome, certains même affichant leurs propres objectifs de santé, différents de ceux de la loi de 2004 ! S’ajoute à cela que certains se recoupent, proposent des dispositifs redondants et cloisonnés résumant la politique à une compilation de plans. Plus surprenant encore, le plan est parfois le seul vecteur utilisable pour financer ou mettre en œuvre certaines interventions qui devraient pourtant être du « régime commun », comme par exemple le développement d’actions en milieu scolaire sur la nutrition ou les addictions ou encore la vie affective, continuellement rappelées dans les plans, alors même qu’elles font déjà l’objet d’une circulaire censée les inscrire dans le fonctionnement des établissements. Cette logique est inflationniste et inefficiente par nature. Il semblerait plus cohérent de proposer que les plans soient autant de référentiels de cadrage des dispositifs et interventions – pour une maladie, un déterminant de la santé ou une population donnés, des modes de prévention, de prise en charge, d’accompagnement et d’organisation – reconnus comme les plus efficaces et les plus efficients pour orienter les différents opérateurs de santé [9]. Resterait alors à la charge de chaque opérateur de décliner, à partir des orientations proposées par les plans, des programmes selon les besoins identifiés localement (programmes régionaux de santé des ARS par exemple), ou selon le périmètre d’intervention (par exemple un programme relatif à la santé des élèves), associant ainsi souplesse et rationalisation.
15Enfin, si la loi du 4 mars 2002 a posé les bases de la démocratie sanitaire en reconnaissant la place des usagers dans le système, la dilution des instances nuit à sa réelle efficacité. Son pouvoir pourrait se trouver grandi d’une simplification au sein d’un organe unique et dont l’avis deviendrait ainsi plus décisif. Cela pourrait prendre la forme d’un rassemblement des instances nationales de concertation et de suivi (il y en a actuellement plus d’une centaine !) au sein d’une structure unique consultée sur chaque thématique de programmation. Elle pourrait être adossée à la conférence nationale de santé qui serait alors réorientée de manière à être davantage en phase avec les Conférences Régionales de la Santé et de l’Autonomie (CRSA).
16La loi doit permettre de renforcer et faire reconnaître la prévention, prise ici dans une acception large comprenant actions sur les compétences individuelles – l’éducation pour la santé – et les environnements. Ce secteur, de la propre initiative des acteurs qui le constituent et de celle de l’Inpes, a commencé ce travail de structuration [16]. Il faut reconnaître cet effort. Il s’agirait en particulier de donner un cadre et une reconnaissance à l’éducation pour la santé, de définir en ce sens, les acteurs, les compétences et formations nécessaires, d’organiser la diffusion de pratiques innovantes. Loin de normer les pratiques, cet effort de cadrage pourrait par exemple permettre de distinguer les acteurs de première ligne (protection maternelle et infantile, santé scolaire, santé au travail), des méthodologistes plus impliqués dans la création de modalités d’interventions innovantes ou l’implantation à grande échelle de programmes (associations expertes, collectivités, etc.). Dans tous les cas, à l’image des autres secteurs (soins, éducation thérapeutique, intervention médico-sociale), l’éducation pour la santé, parce qu’elle porte la responsabilité d’influencer les comportements des populations, ne peut plus se passer d’un socle commun de compétences éthiques et techniques. Ceci doit évidemment être réalisé dans le respect des niveaux de compétences et dans l’objectif de faire reconnaître vis-à-vis des pouvoirs publics le travail réalisé par l’ensemble des acteurs de ce secteur. En effet, contrairement aux professionnels de santé ou aux intervenants en éducation thérapeutique, les acteurs du secteur de la prévention n’apparaissent pas aujourd’hui dans la loi, entraînant par conséquent un déséquilibre inacceptable en termes de reconnaissance et plus prosaïquement de prise en compte dans les financements. Enfin, il convient de rappeler combien l’accent presque exclusif mis sur la responsabilité individuelle est en décalage par rapport au poids des facteurs psychosociaux et socio-environnementaux, qu’il faudra nécessairement prendre en compte dans une politique de prévention [7]. Dans ce cadre, il s’agirait de coordonner au niveau interministériel l’action des différents opérateurs : Education nationale, professionnels médicaux, acteurs associatifs, acteurs du loisir et de l’intégration, spécialistes de la prévention, professionnels du logement, professionnel de l’aménagement du territoire, professionnels impliqués dans les conditions de travail, etc.
17Enfin, parce que la politique de santé publique est, comme indiqué dans la loi, le principal instrument de la Nation pour orienter et organiser son effort pour protéger, promouvoir et restaurer l’état de santé de l’ensemble de la population, ou de groupes ayant des traits communs, en s’attachant à corriger les inégalités, la lutte contre les inégalités doit (enfin !) être une des priorités de santé, comme le préconisent la Charte d’Ottawa depuis de longues années mais également les institutions communautaires plus récemment.
18Cette stratégie de lutte contre les inégalités sociales de santé doit être élaborée comme le fil conducteur de la prochaine loi. Celle de 2004 affichait déjà la réduction des inégalités de santé comme un objectif mais sans la différencier clairement de la lutte contre les effets de la précarité sur la santé ni vraiment s’en donner les moyens.
19En effet, les recherches sur la santé des populations menées, à l’échelle internationale, depuis plus de vingt ans, ont permis de mettre en évidence l’importance primordiale des déterminants sociaux, économiques et culturels de la santé [17, 18]. Ces déterminants ont plus d’influence sur l’état de santé des populations qu’en ont les soins médicaux. À titre d’illustration, une estimation des facteurs de mortalité prématurée évitable aux États-Unis montre que cette dernière est liée à 85 % aux facteurs socio-environnementaux et comportementaux et 15 % au système de soins [19]. En corollaire, l’état de santé de la population dépend, pour une très large part, de mesures prises dans d’autres secteurs que le secteur sanitaire [20]. Il apparaît donc que la réponse aux problèmes de santé doit articuler de manière complémentaire la prévention, le soin et des leviers complémentaires qui ne se trouvent pas dans le système de santé (éducation, environnement, cohésion sociale…). Autrement dit, l’amélioration équitable de la santé doit dépasser le cadre sanitaire strict pour envisager des mesures en amont à travers une évolution des environnements physiques, des environnements sociaux, d’éducation et de travail [21]. Ces constats ont permis, dans de nombreux pays, de définir et de mettre en œuvre de nouvelles modalités d’intervention plus intégrative des différents secteurs de la société, à travers une véritable stratégie intersectorielle de promotion de la santé. Leur expérience a montré que ces inégalités ne constituaient pas une fatalité et qu’il était possible de les réduire [2]. Or, la France est plutôt en retrait vis-à-vis de cette évolution : la dimension intersectorielle de la santé n’y est pas reconnue, et comme nous l’avons souligné, la prévention reste le « parent pauvre » de la santé, en particulier la prévention non médicalisée.
20Pourtant, les rapports du HCSP [1, 2] et de l’IGAS [22, 23] proposent des axes d’action aujourd’hui partagés. Un certain nombre de mesures ne sont pas spécifiques et ont déjà été évoquées. En particulier, nous l’avons vu, il est indispensable d’améliorer l’architecture et la gouvernance de la politique nationale de santé. On ne peut pas lutter efficacement contre les inégalités sociales de santé sans une politique nationale claire et structurée. Par-delà les nécessaires mesures favorisant l’accès aux soins, cette politique doit être décloisonnée pour concerner tous les autres secteurs : logement, éducation, solidarité et cohésion sociale, politique de la ville, famille, travail et insertion. C’est donc nécessairement par une prise en compte interministérielle des politiques de santé, dans une démarche de promotion de la santé, que la lutte contre les inégalités prendra son essor et pourra être efficace [24]. Les différents secteurs concernés ont été bien identifiés dans les rapports précités : l’éducation nationale, la politique du logement, les politiques familiales, le travail, l’environnement… À noter que ceci souligne l’importance de la prise en compte des collectivités territoriales dans cette politique, ces dernières étant en particulier en charge en France d’une large partie des politiques sociales. La réalisation d’un bilan du fonctionnement entre ARS et collectivités territoriales pourrait, en ce sens, être utile à améliorer, le cas échéant, les modes de coordination.
21De plus, il convient d’afficher clairement et concrètement un objectif chiffré de réduction des inégalités sociales de santé. Pour répondre à cet objectif, il s’agit de définir une stratégie nationale intersectorielle de lutte contre les inégalités sociales de santé, d’y affecter des moyens et de suivre cette stratégie par la production de données en routine. En effet, l’objectivation des inégalités est un préalable à la détermination des priorités et un outil de suivi et d’évaluation des politiques [1, 2]. Ainsi, tout indicateur de santé devrait être décliné selon les territoires et les catégories sociales et cela peut nécessiter de passer par la loi (en particulier pour apparier des fichiers sociaux et sanitaires). Il s’agit également de prendre en compte cette dimension dans la mise en œuvre et l’évaluation de politiques publiques en exprimant objectifs nationaux ou régionaux de santé, objectifs des plans et programmes non seulement en termes de moyenne mais aussi d’écart et d’évaluer les intervenants sur ces résultats.
22Enfin, il est temps de faire progresser le principe de « la santé dans toutes les politiques », levier essentiel de promotion de la santé. Pour cela, il existe un outil, depuis la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008, qui érige l’évaluation des politiques publiques en principe constitutionnel. Une déclinaison de ce principe est l’obligation de la réalisation d’une étude d’impact pour tout projet de loi (c’est-à-dire d’évaluation a priori du projet). Cet outil doit évoluer pour d’une part intégrer explicitement et systématiquement la santé et les inégalités de santé dans l’évaluation et d’autre part – pourquoi-pas – élargir son champ d’application, par exemple pour les propositions de loi, pour des textes de niveau réglementaires ou pour les délibérations des collectivités territoriales [1, 23].
Conclusion
23L’article L1411-2 du Code de santé publique, issu de la loi de 2004, précise que : « La loi définit tous les cinq ans les objectifs de la politique de santé publique. » Or, au-delà de cette nécessaire mise à jour, cette nouvelle loi de santé publique, qui gagnerait, nous l’avons vu, à se centrer sur les priorités et non les objectifs, pourrait représenter le vecteur de la structuration d’une politique nationale de santé. Une telle structuration est en effet la condition sine qua non de l’efficacité de mesures thématiques. Nous ne pouvons plus ignorer des constats récurrents qui objectivent les failles actuelles du système. Cette nécessité semble aujourd’hui admise, il convient désormais d’agir. Certes, une loi de santé publique n’est bien sûr pas nécessaire pour mettre en œuvre des actions pour améliorer la santé et lutter contre les inégalités dans ce domaine (de nombreuses propositions des rapports cités en référence pourraient d’ores et déjà être mises en œuvre), cependant une telle loi est indispensable si l’on veut en faire une priorité nationale suivie d’effets globaux et durables, sur l’ensemble du territoire. En l’absence d’une telle loi, il y a désormais un vrai risque de rendre la France incapable de répondre aux enjeux de santé, d’égalité et d’efficience qui sont aujourd’hui les siens précipitant ainsi son système dans l’asphyxie.
24Aucun conflit d’intérêt déclaré
Bibliographie
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