Notes
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[1]
INPES : Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, s’est substitué au CFES par la loi du 4 mars 2002.
INPES, 42 boulevard de la Libération, 93203 Saint-Denis cedex. -
[2]
L’INPES s’est substitué au Comité français d’éducation pour la santé (CFES), qui avait initié l’expérimentation.
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[3]
Comités Régionaux d’Éducation pour la Santé et Comité départementaux d’éducation pour la santé.
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[4]
Caisses Primaires d’Assurance Maladie.
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[5]
Association pour la Promotion de la Santé du Nord Isère, CRES Haute Normandie, CPAM du Gard, CPAM de Lyon, CPAM de la Somme.
Introduction
1Conformément aux objectifs définis dans le Plan national d’éducation pour la santé [18], et à ses missions (loi du 4 mars 2002), l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES [2]) en partenariat depuis 1997 avec la Caisse nationale de l’assurance maladie des travailleurs salariés (CNAMTS) met en œuvre des activités qui visent à développer l’éducation pour la santé des patients dans la pratique des médecins généralistes et des pharmaciens. « Le but de l’éducation pour la santé du patient est que la personne qui consulte un professionnel de soins, quel que soit son état de santé, soit en mesure de contribuer elle-même à maintenir ou améliorer sa qualité de vie » [21]. L’éducation pour la santé du patient s’adresse donc aussi bien à des personnes malades que bien portantes ; elle s’attache à développer le potentiel des personnes pour leur permettre de faire les meilleurs choix concernant leur santé [6, 16.]. C’est « une composante de l’éducation en général, (qui) considère l’être humain dans son unité, ne pouvant dissocier les dimensions biologique, psychologique, sociale et culturelle de la santé » [18]. Les médecins généralistes et les pharmaciens, par leur proximité et leur accessibilité, sont des acteurs clés de l’éducation pour la santé [5, 20]. L’éducation pour la santé se démarque de l’information ou du conseil en ce qu’elle est un acte d’accompagnement des personnes dans un cheminement personnel au sujet de leur santé [12, 21]. Son développement nécessite donc le renforcement des compétences psychopédagogiques des professionnels, notamment par la formation et l’utilisation de guides méthodologiques ou d’outils pédagogiques [11, 21, 22].
2Les limites d’une approche thématique en éducation pour la santé des patients sont souvent mentionnées [9,14]. Qu’il s’agisse de promouvoir une alimentation équilibrée, de lutter contre une toxicomanie, de prévenir l’apparition ou les complications d’une maladie, l’approche éducative thématique :
- ne tient pas assez compte du caractère généraliste de la pratique en officine et en médecine générale ;
- conduit à une prise en charge morcelée et/ou partielle de l’individu ;
- s’appuie le plus souvent sur des documents et outils thématiques qui ne peuvent se multiplier à l’infini.
Objectifs
3L’objectif de l’expérimentation était de déterminer la faisabilité de différentes démarches d’éducation pour la santé en médecine générale et en officine, prenant en compte à la fois la globalité de la personne et les caractéristiques communes du groupe populationnel auquel elle appartient, avec une complémentarité médecin/pharmacien. Elle devait explorer, les modalités concrètes de mise en œuvre des différentes démarches, leur intérêt et leurs limites, ainsi que les possibilités de collaboration médecins/pharmaciens et les besoins de ces professionnels en termes de formation et d’outils pédagogiques. Les résultats de cette expérimentation devaient permettre d’établir des recommandations pratiques pour le développement de l’éducation pour la santé des patients en médecine générale et en pharmacie.
4L’objectif du présent article est de présenter la méthodologie de l’expérimentation, la phase de conception des projets éducatifs par les 5 sites pilotes et les projets eux-mêmes. Les autres résultats feront l’objet d’analyses ultérieures.
Méthode
Principes généraux de l’expérimentation
5L’expérimentation adoptait une méthodologie de recherche-action [3] : les professionnels devaient eux-mêmes élaborer des projets de démarches éducatives adaptées à leur activité professionnelle et respectant les caractéristiques de l’éducation pour la santé. L’expérimentation était coordonnée au niveau national et mise en œuvre sur plusieurs sites pilotes chargés chacun d’élaborer une démarche éducative différente.
6Deux principaux freins exprimés par les professionnels de santé et relatifs au développement de démarches éducatives dans ces lieux de soins étaient levés : le manque de temps (lié au manque de reconnaissance financière) et le manque de formation [2, 8, 20]. En effet, les professionnels participant à l’expérimentation étaient indemnisés pour le temps passé en réunion, en formation et en entretien prolongé avec les patients. Les formations étaient des « formations-actions » [7] alliant à la fois l’acquisition de compétences en éducation pour la santé à l’élaboration collective de démarches éducatives. Leur contenu et leur rythme étaient fonction des projets et les méthodes pédagogiques alternaient séances collectives, recherche d’information et analyse de pratiques.
7Les patients volontaires étaient inclus selon des critères définis par chaque site. Un document de présentation de l’expérimentation leur était remis avec un temps de réflexion suffisant pour adhérer ou renoncer à la démarche. Un consentement éclairé et signé n’était requis qu’auprès des parents des adolescents de moins de 15 ans.
8L’évaluation de l’expérimentation était une évaluation « de performance » [1, 4, 15] : ont été mesurés les écarts entre le « projet » de démarche éducative (ce qui était prévu dans chaque site) et ce qui a été effectivement réalisé. Elle comportait une évaluation de résultat et une évaluation de processus combinant une approche chiffrée (quantitative) et une approche compréhensive (qualitative). Le résultat attendu de l’expérimentation était la détermination de la faisabilité des interventions éducatives en médecine générale et en pharmacie, non la mesure de leurs effets sur la santé des patients.
9Déroulement de l’expérimentation et attribution des rôles : tableau I et II
Déroulement prévu de l’expérimentation (fixé en novembre 2001 à l’issue du premier regroupement national)
Déroulement prévu de l’expérimentation (fixé en novembre 2001 à l’issue du premier regroupement national)
Attribution des rôles
Attribution des rôles
10Le calendrier initial figurant dans l’appel à projets (juillet 2001) a été réajusté dès la première rencontre, compte tenu de la nécessité de consacrer davantage de temps aux formations-actions et à la rédaction des projets.
11Dans le présent article, seules les trois premières phases sont décrites, s’appuyant sur l’analyse :
- des projets des sites pilotes, « référentiels » des démarches éducatives prévues, auxquels ont ensuite été comparées les démarches effectivement réalisées ;
- des carnets de bord de chaque site, décrivant le déroulement global de l’expérimentation ;
- des questionnaires « professionnels », auto administrés à la fin de l’expérimentation ;
- des questionnaires « patients », auto administrés à la fin de chaque démarche éducative ;
- des questionnaires « comité de pilotage local », remplis par les membres des comités de pilotage locaux, s’attachant à décrire l’organisation et la dynamique des groupes.
Résultats
12En réponse à l’appel à projets, 16 notes d’intention ont été envoyées au comité de pilotage national qui en a retenu 7. Deux sites pilotes se sont désistés par la suite pour des raisons indépendantes de l’expérimentation, ce qui a réduit à 5 le nombre de sites pilotes : Amiens, Lyon, Nîmes, Nord Isère, Rouen.
13L’expérimentation s’est déroulée entre juillet 2001 (envoi de l’appel à projets aux CRES/CODES [3] et aux CPAM [4]) et mai 2004 (élaboration collective des conclusions) soit 5 mois de plus que la durée prévue à l’issue du premier regroupement national. La phase de conception des projets a duré jusqu’à décembre 2002, dépassant de 4 mois la durée prévue, car les professionnels ont rencontré des difficultés à élaborer une démarche d’éducation pour la santé répondant au cahier des charges. La phase « terrain » de réalisation des interventions éducatives a duré 10 mois conformément à ce qui était prévu (de janvier à octobre 2003) et la phase d’évaluation des conclusions 1 mois supplémentaire (de novembre 2003 à mai 2004).
1 – Les professionnels
14Trente-quatre professionnels ont répondu au questionnaire qui leur était destiné : 20 médecins et 14 pharmaciens. Ils exerçaient principalement en milieu urbain ou semi-urbain (28/34). Un tiers de ces professionnels faisaient partie d’un réseau de soins. Tous les médecins (n=20) exerçaient en secteur I, les trois-quarts d’entre eux étant médecins référents, et autant exerçant en cabinet de groupe. Les pharmaciens (n=14) étaient tous titulaires de leur pharmacie, qui comprenait en moyenne 6,2 salariés. Avant l’expérimentation, 14/20 médecins avaient une activité de formateur (pour seulement 1 pharmacien) et 10/20 des activités relatives à une association de prévention. De même, 11/14 pharmaciens avaient des activités de maître de stage et seulement 4 étaient en lien avec des associations de prévention. Douze médecins sur 20 avaient eu antérieurement une ou plusieurs expériences en éducation pour la santé/éducation du patient pour seulement 4 des pharmaciens sur 14. Les médecins avaient suivi également plus de formations utiles à des actions d’éducation pour la santé (6/20 en psychologie ou psychosociologie et 4 en santé publique). Quatre professionnels sur 34 avaient reçu antérieurement une formation en promotion de la santé et en éducation du patient.
15Le recrutement des professionnels s’est effectué principalement par cooptation, au sein de réseaux formels ou informels, ou dans la poursuite d’une dynamique de travail préexistante. Les médecins avaient une plus fréquente antériorité de travail entre eux que les pharmaciens (16 médecins et 8 pharmaciens avaient déjà travaillé auparavant avec les médecins de leur groupe pour seulement 9 médecins et 7 pharmaciens avec les pharmaciens de leur groupe), le plus souvent dans des activités de formation. Les principales difficultés lors du recrutement des professionnels ont été : une définition du projet paraissant imprécise et une incertitude sur la charge de travail prévisible.
16Les principales motivations des professionnels étaient (question fermée) : l’intérêt pour l’éducation pour la santé/ l’éducation du patient (25/34) ; le désir de faire évoluer ses pratiques (23/34), l’intérêt pour un travail en commun avec une autre profession (17/34) surtout pour les pharmaciens (11/14). Quinze professionnels sur 61 ont abandonné en cours d’expérimentation, principalement à cause d’une charge de travail trop lourde et d’un manque de temps.
2 – Les patients
17Cent-quatre-vingt-cinq patients ont été inclus (voir tableau III) sur les 500 attendus soit en moyenne 5 patients (3 à 6) par professionnel ayant inclus. Les difficultés d’inclusion évoquées par les professionnels étaient :
18– un manque de temps et des documents de recueil de données perçus comme représentant une charge de travail trop importante ;
19– un manque de disponibilité de certains patients ou une réticence due à une crainte de s’engager dans l’inconnu et/ou d’être jugé, ou une difficulté à percevoir le bénéfice possible, voire un déni des aspects problématiques de leur situation.
Nombre de professionnels et de patients participant à l’expérimentation
Nombre de professionnels et de patients participant à l’expérimentation
20Selon les patients, leurs principales motivations à participer étaient (n = 141, question fermée) : la confiance dans le professionnel (adolescents, personnes âgées, femmes enceintes), la curiosité (adolescents) et l’envie de faire avancer la recherche (personnes âgées, femmes enceintes).
3 – Le processus de l’expérimentation
21Contexte local d’implantation du projet :
22La plupart des sites pilotes (4 sur 5) se sont appuyés sur un projet antérieur pour répondre à l’appel à projets de l’expérimentation. Deux projets sur 5 s’inscrivent en outre dans un programme régional. Le choix du groupe de population a été effectué, soit du fait d’actions antérieures et d’une bonne connaissance de ce public, soit au contraire du fait d’un intérêt lié à une absence de connaissance de ce public ou des difficultés rencontrées avec lui.
23Ressources :
24Les comités de pilotage locaux ont, sous l’impulsion du chef de projet, consacré en moyenne pour la gestion du projet 121 jours de travail par site (de 75 à 189) durant l’ensemble de l’expérimentation. Des compétences complémentaires ont été parfois nécessaires (en secrétariat, communication, formation) portant ce temps de travail moyen à 150 jours par site, hors interventions éducatives avec les patients, avec de fortes disparités inter sites : de 75 à 247 jours.
25En 2002 et 2003, de nombreux temps d’échanges ont été organisés : principalement des réunions du comité de pilotage (9 réunions en moyenne par site, de 0 à 19) ; des réunions avec l’ensemble des professionnels du site (plus de 9 en moyenne, de 4 à 13), et des formations-actions (plus de 5 en moyenne, de 2 à 9).
26Concernant le travail en équipe, 8 à 9 professionnels / 10 se sont déclarés « satisfaits » ou « très satisfaits » du déroulement des activités et de l’animation des discussions. La moitié d’entre eux se sont déclarés « plutôt satisfaits » de l’utilisation des compétences de chacun, de l’incitation de chacun à participer et des modalités de prise de décisions.
27Facteurs favorisants ou difficultés rencontrées dans la mise en œuvre :
28Selon les membres des comités de pilotage locaux, les principaux facteurs favorables à la mise en œuvre de l’expérimentation ont été la préexistence d’une relation entre les professionnels, les interventions des référents du comité de pilotage national, l’indemnisation des professionnels, ainsi que leur motivation pour l’expérimentation.
29Les principales difficultés étaient : un manque de culture préalable en éducation pour la santé chez les professionnels, la gestion du projet au niveau national et un manque de motivation de certains professionnels.
30Les membres des comités de pilotage locaux se sont déclarés « très satisfaits » des moyens matériels, essentiellement financiers, mis à leur disposition (14/19) et de la gestion du projet au niveau local (11/19).
4 – Les démarches éducatives élaborées par les 5 sites
31Grâce à l’appui des structures locales porteuses [5], chaque groupe de professionnels a élaboré une démarche d’éducation pour la santé, soit cinq démarches au total.
Discussion - conclusion
1 – Caractéristiques des démarches élaborées par les professionnels des 5 sites (tableaux IV, V, VI, VII, VIII) :
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Rouen (Adolescents)
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Rouen (Adolescents)
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Lyon (Adolescents)
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Lyon (Adolescents)
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Nîmes (Personnes âgées)
Description synthétique du projet de démarche éducative du site de Nîmes (Personnes âgées)
description synthétique du projet de démarche éducative du site d’Amiens (Personnes âgées)
description synthétique du projet de démarche éducative du site d’Amiens (Personnes âgées)
description synthétique du projet de démarche éducative du site du Nord Isère (Femmes enceintes)
description synthétique du projet de démarche éducative du site du Nord Isère (Femmes enceintes)
32Une approche globale de la santé. La santé n’étant pas seulement l’absence de maladie, les démarches éducatives avaient pour objectif de s’attacher au développement par les patients de compétences nouvelles et transversales : faire connaître ses besoins, s’approprier sa santé ou sa grossesse, faire des choix pour améliorer sa santé, conserver ou développer son autonomie (Nord Isère, Lyon, Rouen, Nîmes) [6,16]. Seule la démarche éducative envisagée par le site d’Amiens est restée proche d’une démarche thématique, en s’intéressant au patient âgé présentant des risques cardio-vasculaires et en élaborant des objectifs ciblés sur cette pathologie. Les démarches envisagées s’appuyaient sur les acquis préalables des personnes (connaissances, représentations, motivations) qui devaient donc être explorés par les professionnels. Les déterminants de santé à prendre en compte étaient multiples et touchaient surtout le style de vie, les comportements ainsi que l’environnement social et l’offre de soins.
33Une approche populationnelle. Les professionnels ont pris en considération les caractéristiques du groupe de population concerné, essentiellement dans l’attitude et le mode de communication qu’ils comptaient adopter, et dans la nature des supports prévus. Ils ont également identifié des problématiques spécifiques à chaque population.
34Des objectifs d’éducation pour la santé. Les objectifs ont été exprimés sous forme de compétences à acquérir pour être acteur de sa santé et développer son autonomie (Nord Isère, Nîmes, Rouen, Amiens, Lyon) [6, 16]. Certaines compétences étaient proches des compétences psychosociales définis par l’OMS (Lyon, Rouen) [17] et/ou des compétences à acquérir par le patient au terme d’un programme d’éducation thérapeutique (Lyon, Amiens) [10]. Le projet du site d’Amiens avait principalement des objectifs d’acquisition de connaissances ou de compétences cognitives (savoir, comprendre, etc.).
35Les professionnels avaient également définis pour eux-mêmes les objectifs éducatifs.
36Une grande importance accordée à l’expression de la personne. Un temps supplémentaire était prévu pour favoriser cette expression, ainsi que des aménagements des bureaux ou officines dans certains cas. Les professionnels prévoyaient également d’utiliser des reformulations, des questionnements ouverts, une écoute active, ainsi que des supports favorisant la prise de parole (questionnaire, photos) ou l’expression écrite (carnet personnel).
37Une implication du patient et de ses proches dans la démarche. Dans tous les projets, à l’exception de celui d’Amiens, les patients devaient déterminer avec le professionnel les sujets qu’ils souhaitaient aborder : leurs besoins, leur(s) objectif(s) et les solutions à mettre en place. Les proches étaient impliqués dans le projet « femmes enceintes » dans lequel le père devait être systématiquement sollicité, et dans une moindre mesure dans les projets « personnes âgées ». Les proches étaient délibérément peu impliqués dans les projets « adolescents ».
38Des démarches personnalisées. Les projets prévoyaient une étape importante consacrée à la prise de connaissance mutuelle (au sens de « faire connaissance »), pour l’adaptation individuelle des démarches.
39Des techniques pédagogiques adaptées. Tous les projets prévoyaient essentiellement des entretiens individuels. Certains souhaitaient s’appuyer en outre sur des séances éducatives de groupes déjà existantes (Nord Isère, Nîmes) ou l’utilisation de techniques plus sophistiquées comme l’étude de cas, le photolangage®, le métaplan®, la projection de films vidéo, le classeur imagier, etc., qui nécessitent un savoir-faire spécifique du professionnel (Amiens, Nîmes) [11].
40Des déroulements favorisant la relation patient/professionnel. Le déroulement des 5 démarches devait s’organiser autour de 3 principaux temps : un temps de rencontre et de diagnostic, un temps pour cheminer, réfléchir, mettre en œuvre, progresser, et un temps pour évaluer, réajuster, continuer. Ceci est conforme aux recommandations de la littérature sur l’amélioration des relations patients/médecins au cours de la consultation [13, 23].
2 – Remarques concernant la méthodologie de l’étude :
41L’étude est construite sur le modèle d’une recherche-action d’inspiration lewinienne ou néo-lewinienne [3]. Cette méthodologie permet aux acteurs, ici les professionnels, de développer leur capacité à analyser leurs pratiques afin d’élaborer et mettre en œuvre un projet propre à apporter une amélioration. Les personnes ressources en éducation pour la santé sont en position d’accompagner un changement dans les pratiques. Cette démarche suppose que le professionnel accepte de gérer l’incertitude et de procéder à des réajustements permanents, ce qui est très innovant pour des professionnels de santé, plus familiers d’une démarche d’observation entièrement prédéfinie, comme par exemple lors d’une recherche clinique. Cette méthode implique de concilier des contraintes et des logiques différentes entre les promoteurs des actions et les acteurs de terrain [19]. La coordination nationale a dû trouver l’équilibre entre une guidance ferme pour assurer une rigueur méthodologique et une souplesse favorisant la créativité des équipes locales. Réciproquement, les équipes locales ont exprimé à la fois une demande d’autonomie accrue, acceptant difficilement les directives nationales (outils de recueil de données et calendrier imposés, relance devant le faible taux d’inclusion), et une attente de plus de précisions et de cadrage. La difficulté à faire coïncider des enjeux locaux et nationaux est apparue encore plus importante lorsque le projet local était inclus dans un programme de santé régional. La qualité de la relation et de l’échange d’information entre les niveaux national et local s’est avérée déterminante pour surmonter ces difficultés.
42Le déroulement de l’expérimentation dans plusieurs sites a permis de fructueux échanges d’expériences et des comparaisons entre sites, mais présente aussi des difficultés liées à une progression synchrone.
43L’expérimentation a fait la preuve qu’une collaboration constructive est possible, d’une part entre différentes institutions et des professionnels libéraux, d’autre part, entre médecins et pharmaciens, ceci d’autant plus facilement que ces derniers étaient déjà engagés dans des démarches de réflexion sur leurs pratiques.
44En levant deux obstacles exprimés par les professionnels de santé concernés (formation et rémunération), l’expérimentation a permis à cinq groupes de professionnels d’élaborer dans le cadre de formations-actions, des démarches d’éducation pour la santé originales et adaptées à la fois aux trois populations et aux pratiques professionnelles des médecins généralistes et des pharmaciens.
45Les résultats de la comparaison entre les projets de démarches éducatives présentés ici et les interventions effectivement menées feront l’objet d’analyses et de publications ultérieures.
REMERCIEMENTS
Les auteurs tiennent à remercier pour leur implication dans l’expérimentation :– L’ensemble des membres du comité de pilotage national : Sabine Abitbol Ruimy, Lucette Barthélémy, Danielle Capgras Baberon, Jean-François Collin, Matthieu De Stampa, Clémentine Frémontier (CNAMTS), Eugénie Hammel (CNAMTS), Stéphanie Portal (CNAMTS), Bérengère Porret, Robert Pujol, Christian Schoch (CNAMTS), Lydie Texerot (CNAMTS).
– Les membres des comités de pilotage locaux ; chefs de projet : Diane Boesch, Patrick Dutilleul, Mireille Gilquin, Béatrice Grenier, Maurice Xambeu ; autres membres : Aysé, Akyurek, Georges Baraton, Chantal Bour, Marie Bulard, Paul Carles, Florence Chauvin, Michèle Dinomais, Alain Douiller, Marc Forget, Marie Pierre Lassaigne, Alain Libert, Jean Louis Macé, Johnny Marque, Jean Martin, Vincent Rebeillé-Borgelas, Henri Regimbaud, Bernard Réocreux, Éliane Roché, Denis Rochefort, Christian Sepieter, Marion Tardres, Jeannine Tison.
– Les professionnels, médecins et pharmaciens, et les patients qui ont bien voulu se prêter à cette expérimentation.
– Les personnes de l’INPES ayant apporté leur contribution à l’expérimentation : Hélène Bourdessol, Antonia Dandé, Cécile Fournier, Sandra Kerzanet.– Les initiateurs du projet : François Baudier, Brigitte Sandrin-Berthon.
Le financement de l’expérimentation a été assuré par la CNAMTS et l’INPES.
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- 21Sandrin-Berthon B (dir.). L’éducation du patient au secours de la médecine. Paris : PUF, 2000 ; 198 p.
- 22Sandrin-Berthon B. Education pour la santé, éducation thérapeutique : quelles formations en France ? État des lieux et recommandations. Rapport établi à la demande de M. Bernard Kouchner Ministre délégué à la Santé, mars 2002.
- 23Santé Canada. La communication efficace… à votre service. Outil de communication II. Ottawa : Santé Canada : 2001.
Mots-clés éditeurs : personnes âgées, recherche-action, éducation pour la santé, éducation du patient, femmes enceintes, pharmacie d'officine, pratique médicale, adolescents
Date de mise en ligne : 01/01/2008
https://doi.org/10.3917/spub.043.0471Notes
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INPES : Institut national de prévention et d’éducation pour la santé, s’est substitué au CFES par la loi du 4 mars 2002.
INPES, 42 boulevard de la Libération, 93203 Saint-Denis cedex. -
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L’INPES s’est substitué au Comité français d’éducation pour la santé (CFES), qui avait initié l’expérimentation.
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Comités Régionaux d’Éducation pour la Santé et Comité départementaux d’éducation pour la santé.
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Caisses Primaires d’Assurance Maladie.
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Association pour la Promotion de la Santé du Nord Isère, CRES Haute Normandie, CPAM du Gard, CPAM de Lyon, CPAM de la Somme.