Notes
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[1]
Fédération nationale des associations de l’aide familiale populaire/Confédération syndicale des familles.
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[2]
Eu égard à la prédominance quantitative des femmes dans cette profession, nous inversons sciemment la règle grammaticale : « le masculin l’emporte sur le féminin », dans l’attente de mieux maîtriser l’écriture inclusive…
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[3]
Concept développé par Ingrid Bayot dans son livre Le quatrième trimestre de la grossesse, Toulouse, érès, 2018.
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[4]
« La maison des maternelles », France 5, 13 novembre 2017.
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[5]
Formation proposée par l’ifed (Institut de formation, d’étude et de documentation) et construite avec la fnaafp/csf et l’association Pikler-Lóczy. Elle est composée de trois niveaux, soit au total 107 heures de formation.
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[6]
N. Simon-Bogaers, « La Maison pirouette : un lieu de paroles, d’échange et de détente », dans P. Mauvais (sous la direction de), La parentalité accompagnée, Toulouse, érès, coll. « 1001BB », 2017 (2004 pour la 1re éd.).
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[7]
F. Édouard, « Les techniciens de l’intervention sociale et familiale en périnatalité : une relation d’aide intimement liée à l’empathie », dans M. Dugnat (sous la direction de), Empathie autour de la naissance, Toulouse, érès, 2016. François Édouard est vice-président de la fnaafp/csf.
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[8]
Prado, service de retour à domicile après un accouchement, est proposé en France aux mamans après l’accouchement, dès que l’équipe médicale ne juge plus l’hospitalisation nécessaire. Il concerne les femmes pour lesquelles la maternité a autorisé une sortie standard ou précoce (moins de 72 heures après un accouchement par voie basse ou moins de 96 heures après une césarienne).
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[9]
Rappelons que l’exercice du métier de tisf est conditionné à l’obtention d’un diplôme de niveau IV préparé par une formation initiale de deux ans ou par la validation des acquis de l’expérience.
1 Lorsque est évoqué le nécessaire soutien aux familles en sortie de maternité, on ne pense pas toujours à la technicienne de l’intervention sociale et familiale [258] (tisf) qui, pourtant, est la spécialiste de l’accompagnement à la parentalité au domicile et peut, de ce fait, jouer un rôle préventif essentiel. Encore mal connue des familles, elle l’est également des professionnels de santé, des acteurs du social et de la petite enfance, et des pouvoirs publics. Aussi, pour contribuer à une meilleure connaissance du rôle de cette professionnelle de première ligne au cœur du « quatrième trimestre de la grossesse [359] », nous avons choisi de partir des témoignages des acteurs concernés et de présenter dans un second temps quelques dispositifs existants qui permettent à la tisf d’accompagner dans de bonnes conditions la triade père-mère-nourrisson.
Les enjeux de l’accompagnement au quatrième trimestre de la grossesse
2 « Quand je suis aux côtés des familles durant cette période de grande vulnérabilité, mon expérience de tisf me permet de percevoir nettement les enjeux existants. Des liens ont commencé à se tisser entre les parents et le bébé bien au chaud dans le ventre de sa mère. Comment être sûr que ces liens vont perdurer et se consolider après la naissance ? Ce que je sais, c’est que des dispositifs d’accompagnement des familles en sortie de maternité existent et que, en tant que spécialiste du domicile et de la parentalité, il est légitime que j’y prenne part », explique Astrid.
3 Pour corroborer les interrogations de cette professionnelle, rappelons quelques chiffres : on estime qu’entre 10 et 15 % des femmes sont sujettes à une dépression du post-partum. De surcroît, la durée de séjour en maternité diminue. Ainsi, en raison d’une insuffisante préparation du retour à domicile, la Haute Autorité de Santé (has) avançait, en 2014, qu’en France, entre 15 et 30 % des femmes pouvaient rencontrer des difficultés relationnelles parents/nourrisson, avec les conséquences connues sur le développement de l’enfant.
Contribuer à la prévention de la dépression du post-partum
4 « Chez Madame G., je repère un manque de sommeil, un problème d’alimentation, une voix monocorde, une difficulté de concentration, un état de lenteur, de fatigue intense, ou à l’inverse, d’hyperactivité, des pleurs fréquents, une désorganisation ou une incapacité à prendre en charge les tâches quotidiennes au domicile, des plaintes somatiques, des douleurs fréquentes. Sur la relation mère-bébé, je repère sa difficulté à discerner les pleurs du bébé : le portage du bébé non adapté, la manipulation du bébé peu assurée, une crainte pour les soins (bains, changes, habillage ou déshabillage), une angoisse de se retrouver seule avec le bébé (le regard fuyant de la mère pour le bébé, le peu de stimulations », témoigne Lucie.
5 « L’intervention de Sabine, tisf, à mon domicile m’a beaucoup aidée à surmonter la difficulté éprouvée suite à la naissance de ma fille… En particulier, je suis heureuse d’avoir pu en parler et d’avoir dédramatisé cet épisode, d’avoir été rassurée concernant mon lien avec elle… Je pense que cette intervention a eu un rôle déterminant dans la “digestion” de mon épisode dépressif. Je suis très reconnaissante à Sabine pour son respect, sa douceur et la qualité de ses conseils », confie Madame T., maman de Sophie.
6 « On sort de plus en plus vite [de la maternité], ce n’est pas sans poser question. Il y a un joker extraordinaire : une professionnelle qui s’appelle la tisf. La tisf, c’est l’antidote contre l’isolement, l’isolement dans la réalité. Avoir une professionnelle qui vient à domicile deux demi-journées par semaine pour donner un coup de pouce, c’est un outil formidable […] et l’isolement et la dépression font malheureusement très bon ménage […]. Le bébé est livré sans mode d’emploi […]. Il faut accepter que ça puisse ne pas être facile parfois [460] », explique Michel Dugnat, pédopsychiatre.
Michel Dugnat, pédopsychiatre
Valoriser les compétences parentales et familiales : observer, comprendre, soutenir
7 « Oui, j’ai un rôle d’observation ; je prends le temps d’écouter ce que la maman dit ou ne dit pas à son bébé, je regarde ce qu’elle fait ou ne fait pas avec lui. Et en miroir, j’écoute le bébé, je le regarde. Je pressens l’inquiétude de la maman, les tensions du bébé. En parallèle, cette observation me permet de mieux travailler en lien avec la puéricultrice, la sage-femme, le pédopsychiatre et d’échanger sur la situation », analyse Fabienne.
8 « J’observe pour valoriser, transmettre et m’appuyer sur les petits détails d’une interaction entre la mère et le bébé. J’observe pour rassurer, pour accompagner et soutenir la relation », dit Véronique.
9 « Mon travail au quotidien consiste à repérer des éléments révélant une fragilité dans la relation mère-bébé. Cette compétence, indispensable dans mes relations de travail auprès des professionnels de santé, je l’ai acquise grâce à une formation complémentaire à l’observation active du lien mère/bébé que j’ai suivie dernièrement [561] », rapporte Manon.
10 « Très vite, Madame N. exprime un besoin d’écoute. C’est ma fonction première que d’être disponible, à l’écoute, et je lui dis. Parce qu’elle ne sait pas faire, ou tout du moins, c’est ce qu’elle exprime, je lui montre pour le bain du bébé, les mesures pour le biberon… Ensuite, je l’observe dans ce qu’elle fait elle-même, sans jugement, et lui donne des conseils au fur et à mesure. Je suis dans la transmission afin qu’elle retrouve une certaine autonomie », dit Soraya.
11 « Ma présence en tant que tisf peut s’avérer essentielle en période périnatale. Cette présence n’est pas là en remplacement mais en complément, pour mieux aider la famille, en tenant compte de ses compétences propres, en les valorisant et en les guidant », explique Christophe.
12 « Dès la première rencontre, j’explique à Madame B. pourquoi je suis là. On a très vite fait connaissance avec Madame B. et son bébé. Dès la deuxième intervention, elle m’appelle déjà par mon prénom. C’est bien la preuve que le courant passe entre nous. Mon travail consiste à participer aux tâches de la vie quotidienne ; ce qui m’aide à la mettre en confiance. Par exemple, je n’hésite pas à passer l’aspirateur, à m’occuper du linge, à m’investir dans la préparation des repas. Je lui montre certaines pratiques pour mieux s’organiser. Mon investissement dans les tâches du quotidien lui permet de souffler, de récupérer, et de passer plus de temps avec son bébé », témoigne Sandra.
13 « Il m’a semblé essentiel de vous expliquer comment, au travers des tâches du quotidien, j’ai axé mon accompagnement sur le prendre soin de Madame F., afin qu’à son tour elle prenne soin d’Alice et de Tom. Nous sommes là au cœur de ma mission de tisf. J’articule le faire au faire ensemble pour tendre vers le laisser faire, et ce, dans des engagements mutuels entre la famille et moi. Cette étape est primordiale pour asseoir la confiance », estime Aïcha.
14 « Le partage, valeur importante dans notre métier, est partout présent, aussi bien dans la réalisation des tâches du quotidien que dans la prise en charge du bébé, notamment dans les soins courants comme le change ou le bain. Il n’y a pas, d’un côté, la tisf qui « sait » ou « fait », et de l’autre, la famille qui « bénéficie de l’intervention », explique Manuela.
Du temps pour accompagner, être à l’écoute
15 « Un an d’accompagnement, à deux tisf, aura été nécessaire avec une maman adolescente qui nous renvoyait continuellement à la figure : “Je fais ce que je veux.” Finalement notre travail a porté ses fruits. Nous avons pu bâtir une alliance qui lui a permis de construire petit à petit des liens paisibles avec son bébé autour de l’alimentation, du bain, des soins du bébé… Nous l’avons accompagnée aux divers rendez-vous avec la sage-femme et au planning familial, mais également pour la scolarisation de son aîné de 2 ans et demi », raconte Carine.
16 « La durée d’intervention, plusieurs heures par semaine sur plusieurs mois, aura permis d’instaurer une confiance mutuelle et surtout, pour Madame H., de prendre confiance en elle et en ses capacités. C’est un atout formidable que ce “temps long” qui rend mon travail complémentaire à celui des autres travailleurs sociaux et des autres professionnels de santé, qui n’ont pas toujours cette chance de travailler sur la durée », rapporte Marie-Claire.
17 « Ce temps long, c’est le temps du domicile, de l’intimité. C’est celui qui permet de prendre le temps dans cette période si particulière de la périnatalité : celui de la découverte du bébé, de l’observation, mais aussi celui de prendre soin de soi – se reposer, se doucher, manger équilibré… –, le temps de devenir parents », nous dit Christelle.
18 « J’ai lu un texte écrit par Nicole Simon-Bogaers [662] : “Nous avons la conviction que nous devons garder une grande humilité quand nous rencontrons les familles, car chacune d’entre elles a des ressources et des compétences uniques que nous allons peut-être aider à potentialiser mais que nous abîmerions certainement si nous voulions aller trop vite ou influencer à tout prix.” En tant que tisf, cette pensée me correspond bien », affirme Anna.
Favoriser le lien mère/bébé
19 « Donner du sens à ce que j’observe dans le lien mère/bébé, c’est ce qui me permet d’ajuster mon travail, de répondre aux questions de la maman et de réfléchir avec elle sur ce qui a pu être perturbateur : des pleurs du bébé, une séparation difficile à supporter, l’isolement ou le sentiment de solitude…, et bien sûr, ce qui est au cœur de ma mission : lui proposer des solutions concrètes pour apaiser ses craintes, par exemple, en l’aidant à s’inscrire dans des activités collectives de quartier, à rencontrer d’autres femmes dans des groupes de parents », explique Sandra.
20 « J’observe que Madame J. a besoin d’être rassurée dans la prise en charge de son nourrisson. Je l’oriente vers l’unité mère-bébé, structure de soin avec laquelle j’ai la chance d’être en lien. Cette structure peut être mobilisée afin de travailler les troubles du lien, les difficultés psychiques de la mère, voire du père, ou les pathologies de l’enfant », déclare Carinne.
21 « L’intervention de Carole, tisf, m’a aidée à construire le lien avec mon fils. Son aide dans les tâches ménagères m’a permis d’être pleinement présente pour lui. Elle m’a également beaucoup apporté en me livrant ses conseils pour m’occuper de lui : sur la prise des biberons, l’endormissement, les pleurs… Mais elle m’a également beaucoup aidée en prenant le relais avec mon fils pour me permettre de me reposer et de reprendre des forces. Sa présence, sa bienveillance ont été très bénéfiques pour notre famille… Aujourd’hui, nous sommes une famille prête pour cette nouvelle vie. Elle m’a également permis de me sentir moins seule à la maison pendant cette période critique. J’ai pu voir petit à petit les liens qui se créaient avec mon fils, et elle a pu m’encourager dans cette prise de conscience de devenir maman. Aujourd’hui, je me sens pleinement maman », témoigne Madame F., maman de Jules.
22 « La tisf n’est pas là pour imposer des façons de faire, ni des postures éducatives, ni des styles de vie ; mais par la confiance et la proximité dans la réalisation des actes de la vie quotidienne, elle va pouvoir instaurer une relation de confiance qu’elle construit sur la base d’une véritable empathie. Cette posture est d’autant plus indispensable dans les interventions en périnatalité qu’il s’agit d’accompagner la mère dans la (re)construction des liens avec son nouveau-né [763]. »
Passer le relais
23 « Au vu du diagnostic, après six mois d’intervention, Madame et Monsieur D., et les enfants, n’ont plus besoin de mon soutien. Cela ne veut pas dire que tout est réglé mais il faut passer la main et prendre le temps d’accompagner la famille vers d’autres dispositifs adaptés à leurs besoins », considère Christophe.
24 « En général, dès le début de l’intervention, l’évaluation du temps et de la période d’intervention sont définies. J’anticipe la suite de l’intervention avec la famille, par exemple en l’aidant à trouver un mode de garde. Une évaluation avec la famille et les partenaires est indispensable », estime Sandra.
La préparation des interventions des tisf en amont du quatrième trimestre de la grossesse
25 L’accompagnement au domicile des familles en postnatal se construit en amont de l’intervention, dans le cadre de dispositifs nationaux. Des expériences locales existent également.
Les dispositifs nationaux
26 – La branche famille de la Sécurité sociale.
27 – Le dispositif « Aide à domicile » de la Caisse d’allocations familiales : la caf, actrice majeure dans l’accompagnement des familles et le soutien à la parentalité, est naturellement l’un des principaux partenaires des services de tisf. De par ses orientations politiques dans le domaine de l’action sociale et familiale, elle accompagne financièrement les services d’aide à domicile aux familles, dont l’objectif est de soutenir celles qui sont concernées par une grossesse ou une naissance. Dans ce cadre, la caf laisse aux familles une quote-part horaire calculée en fonction des revenus.
28 – Le dispositif « Prado maternité » : en janvier 2016, la Caisse nationale des allocations familiales (cnaf) et la Caisse nationale d’assurance maladie (cnam) ont signé une convention nationale de partenariat consistant, en particulier, à utiliser le dispositif « Prado maternité [864] » pour informer les mamans durant leur séjour en maternité de la possibilité d’un accompagnement par la tisf lors du retour à domicile. Cette proposition d’aide systématique émanant d’un conseiller de l’assurance maladie vient en complément des deux visites d’une sage-femme déjà prévues par le Prado. Les mères sont alors orientées vers les associations locales d’aide à domicile qui pourront intervenir dans le cadre des financements de la caf énoncés ci-dessus. Ce partenariat, très récent, n’a donc pas encore eu le temps de produire des résultats significatifs.
29 – Le conseil départemental.
30 – La Protection maternelle et infantile (pmi) : le service de pmi peut prescrire une intervention tisf à domicile, par exemple, pour une maman dont on a repéré une fragilité durant la grossesse et qui vient d’accoucher prématurément de son premier enfant. Certains conseils départementaux ont décidé d’une participation financière de la famille mais d’autres ne l’exigent pas, estimant à juste titre que le reste à charge constitue un frein à l’accès aux tisf pour les familles les plus vulnérables.
31 – L’Aide sociale à l’enfance : suite à un signalement de l’hôpital, le service départemental de l’ase a mis en place un dispositif dit « de placement à domicile » pour un bébé. Dans ce cadre, une intervention de tisf peut être préconisée pour accompagner, par exemple, des parents déficients intellectuels. En coordination avec la puéricultrice, la sage-femme, le pédopsychiatre et le service d’action éducative en milieu ouvert (aemo), la présence de la tisf à domicile va permettre un soutien et un travail important de consolidation du lien parents-bébé.
Les dispositifs locaux
32 – Les partenariats entre associations.
33 Localement, des partenariats s’établissent entre les associations d’aide à domicile et d’autres associations spécialisées intervenant auprès des mêmes publics. C’est le cas de l’association L’Oiseau bleu, qui soutient des familles de très jeunes parents et qui peut préconiser une intervention de tisf, par exemple, pour soutenir une jeune fille de 17 ans ayant eu un deuxième enfant né d’un père différent. La maman a subi des violences conjugales avec son premier compagnon mais le père de son nouvel enfant la soutient. Cette intervention s’inscrit dans le dispositif de l’ase.
34 – Les partenariats singuliers
35 – Avec un conseil départemental
36 Partant du constat que de nombreuses femmes en situation de vulnérabilité sortaient de maternité sans soutien et que cela pouvait engendrer des dysfonctionnements entre la mère et son bébé, le conseil départemental a décidé de financer 20 heures d’intervention tisf comme outil de veille et d’aide à la relation mère-bébé. Ces heures, totalement gratuites pour les familles, sont proposées en maternité le plus souvent par l’équipe de pmi (puéricultrices, sages-femmes) qui repère, en lien avec l’équipe de la maternité, une fragilité (isolement, âge, naissance multiple, signes de dépression, grande fatigue…).
37 – Avec la caf
38 La caf alloue à l’association une enveloppe financière complémentaire de 5000 euros permettant à l’association de proposer à certaines familles un accompagnement à domicile, pris en charge en totalité pour les 40 premières heures d’intervention en post ou en prénatal. La caf souhaite plutôt cibler les familles monoparentales isolées à faibles ressources et présentant un risque de dysfonctionnement du lien mère/bébé. Les sages-femmes, les puéricultrices et l’assistante sociale de la maternité à qui l’on a présenté le dispositif ont tout de suite compris son intérêt et l’utilisent donc de manière conséquente.
39 – Avec la caf et le conseil départemental
40 Dès leur retour à domicile, les familles peuvent bénéficier de 16 heures d’intervention prises en charge intégralement par la caf et la pmi. Les interventions doivent être assurées par des tisf formées en périnatalité et sont demandées conjointement par un travailleur social et un professionnel de santé. Elles sont adressées à la pmi du département. Une cellule spéciale étudie les demandes qui doivent résulter d’une observation des prescripteurs ou des préoccupations exprimées par la famille. Ainsi, sont pris en compte la crainte parentale de difficultés relationnelles avec le bébé, une fragilité émotionnelle parentale, une attitude inadaptée à l’égard du bébé, des interrogations sur la qualité de l’environnement familial, la crainte d’une décompensation psychologique en lien avec les circonstances de la grossesse ou de la naissance, des éléments d’observation du bébé pouvant évoquer une difficulté de lien, des inquiétudes exprimées pour les enfants restés au foyer.
Conclusion
41 Il est donc essentiel de pouvoir prévenir les risques liés au quatrième trimestre de la grossesse, période charnière, tant pour les parents que pour le bébé. La tisf a incontestablement des atouts pour y contribuer, mais de nombreux freins existent qui ne facilitent pas la prise en charge des familles, notamment :
42 – une information très insuffisante adressée aux familles. Ainsi, celle délivrée par le conseiller de l’assurance maladie dans le cadre du dispositif « Prado maternité » est actuellement inopérante car transmise de manière approximative quelques heures après l’accouchement, alors que la maman n’est pas toujours en état d’intégrer cette information ;
43 – un manque de tisf. Serons-nous capables d’attirer les jeunes générations vers ce métier dans les années à venir ?
44 – une grande difficulté à approcher les parents en situation de dépression du post-partum, maladie encore taboue car, d’une part, le parent est censé aimer son bébé tout de suite, il a honte de son état, évite d’exprimer ses difficultés et s’isole, et d’autre part, parce que la société nie cette maladie et les conséquences sur le développement de l’enfant, ce qui n’aide pas les pouvoirs publics à construire les bons dispositifs ;
45 – encore trop de tisf n’ont pas reçu de formation complémentaire, en particulier sur l’observation fine des relations mère-père-bébé, pourtant indispensable dans le cadre de la prévention des troubles relationnels parents-bébé [965] ;
46 – un reste à charge des parents se révèle absolument dissuasif, en particulier pour les femmes confrontées à l’anxiété et à la dépression du post-partum, les plus isolées. La participation financière exigée aux familles est d’ailleurs le principal motif de refus de se faire aider par une tisf. La création d’une prestation familiale légale « périnatalité », que nous appelons de nos vœux, permettrait de mieux répondre aux familles les plus fragiles par la reconnaissance de l’action des tisf en un véritable droit universel.
Notes
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[1]
Fédération nationale des associations de l’aide familiale populaire/Confédération syndicale des familles.
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[2]
Eu égard à la prédominance quantitative des femmes dans cette profession, nous inversons sciemment la règle grammaticale : « le masculin l’emporte sur le féminin », dans l’attente de mieux maîtriser l’écriture inclusive…
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Concept développé par Ingrid Bayot dans son livre Le quatrième trimestre de la grossesse, Toulouse, érès, 2018.
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« La maison des maternelles », France 5, 13 novembre 2017.
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Formation proposée par l’ifed (Institut de formation, d’étude et de documentation) et construite avec la fnaafp/csf et l’association Pikler-Lóczy. Elle est composée de trois niveaux, soit au total 107 heures de formation.
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[6]
N. Simon-Bogaers, « La Maison pirouette : un lieu de paroles, d’échange et de détente », dans P. Mauvais (sous la direction de), La parentalité accompagnée, Toulouse, érès, coll. « 1001BB », 2017 (2004 pour la 1re éd.).
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F. Édouard, « Les techniciens de l’intervention sociale et familiale en périnatalité : une relation d’aide intimement liée à l’empathie », dans M. Dugnat (sous la direction de), Empathie autour de la naissance, Toulouse, érès, 2016. François Édouard est vice-président de la fnaafp/csf.
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Prado, service de retour à domicile après un accouchement, est proposé en France aux mamans après l’accouchement, dès que l’équipe médicale ne juge plus l’hospitalisation nécessaire. Il concerne les femmes pour lesquelles la maternité a autorisé une sortie standard ou précoce (moins de 72 heures après un accouchement par voie basse ou moins de 96 heures après une césarienne).
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Rappelons que l’exercice du métier de tisf est conditionné à l’obtention d’un diplôme de niveau IV préparé par une formation initiale de deux ans ou par la validation des acquis de l’expérience.