Notes
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[1]
Tout est calme, wea, 2006.
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[2]
Dans cet esprit, Claudine Tiercelin organisa au Collège de France un colloque international intitulé « La fabrique de la peinture » en octobre 2014, à partir du témoignage de seize peintres sur leur pratique picturale, interrogeant ainsi le processus et le type de connaissance pratique que suppose l’acte de peindre.
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[3]
L. Lefèvre, « L’imaginaire” dans les établissements d’accueil du jeune enfant », eje Journal, n° 34, 2012, p. 42-44.
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[4]
I. Bertola, « Être spectateur avant 3 ans ? » L’école des parents, 1994, p. 49-53.
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[5]
Sur ce thème, voir l’article de M.-O. Némoz-Rigaud, « Culturland… », Spirale, n° 35, 2005.
1 Dans sa « chanson pas chantée » intitulée Cosmonaute, Loïc Lantoine commence ainsi :
« Mon père m’a dit un jour
Un jour que j’étais en légère errance
Écoute-moi bien, fils
Aujourd’hui quand on veut la lune
On n’est pas poète
On est cosmonaute [1]. »
3 Ces mots évoquent l’importance des aspects du concret pour atteindre une finalité, pour vivre. Ce début de chanson propose une tension entre le poète et le cosmonaute, c’est-à-dire entre la poésie comme rêverie et utopie, et les exigences de résultats concrets de notre époque. Le cosmonaute est choisi. Le poète est mis de côté. Au-delà de ce conseil paternel, je me demande alors comment fait le poète pour créer son poème ?… Il s’arrête sur de précis moments vécus, en écho à sa mémoire restée vive, et il utilise de manière créative une technique, un cadre d’écriture avec un vocabulaire riche et rigoureux. L’abstraction du poème se fabrique [2] aussi concrètement. Le dire et le faire sont tous deux imparfaits, ils ont besoin mutuellement l’un de l’autre. Ce mouvement d’imbrication m’évoque alors le lien entre théorie et pratique, faisant advenir un troisième espace qui est celui de la pédagogie. Quand j’étais éducatrice de jeunes enfants, j’essayais de rendre vivant ce mouvement pédagogique à partir du faire, entre le faire et le dire (Houssaye, 1997). Aujourd’hui formatrice auprès des éducateurs de jeunes enfants et doctorante en sciences de l’éducation, je réfléchis sur la pédagogie à partir du thème des projets artistiques et culturels dans les crèches collectives. Je m’y arrête, prête à interroger le réel, en me demandant : pourquoi est-ce si bon aujourd’hui de se soucier des capacités artistiques et culturelles des enfants dans les crèches ? Qu’est-il réellement dit ? En quoi cela fait-il sens pour moi ?
Laurence Lefèvre
Laurence Lefèvre
4 Dans une première partie, j’évoquerai les évidences du discours, pour préciser ensuite le sens des mots culture et art, tels des aiguillons pour l’action. Ces réflexions me sont inspirées par des rencontres avec des artistes.
De l’engouement au risque des évidences
5 Salariée en crèche collective dans les années 2000, j’ai vu progressivement croître un engouement pour les activités littéraires, artistiques et culturelles dans les établissements, en partenariat avec des spécialistes de ces questions, à savoir les bibliothécaires et les artistes. Ce recours m’intéresse fortement étant à titre privé une lectrice, consommatrice et praticienne dilettante de ce type d’activité. Mes années de pratique d’éducatrice de jeunes enfants et de pédagogue me donnent alors l’occasion d’expérience, de tâtonnements, transformant ces activités (avec le livre surtout [3]) en support de médiation éducative dans ma rencontre avec les enfants, insufflant une dynamique de projet pour l’équipe, avec les familles, et pour l’institution.
6 À la suite de discussions informelles et d’entretiens de recherche, je me rends compte que cet engouement règne dans le discours jusqu’à devenir une évidence, une nouvelle norme. Cette évidence se confirme dans des articles parus dans des magazines destinés aux professionnels de la petite enfance. Ainsi, alors qu’en 1994 un article [4] interrogeait la pertinence et les conditions de cette transmission en considérant les réticences et les difficultés, à partir de 2000, les articles sont multiples et leurs titres révèlent un consensus général jusqu’à induire une injonction. La culture ferait-elle partie des commandements pour être un bon professionnel d’aujourd’hui ? Cependant, bien que les évidences (orales et écrites) suscitent le plaisir d’un ralliement collectif, elles peuvent dissimuler des désaccords dans les pratiques professionnelles, voire des contradictions. Ce décalage entre le dire et le faire me ramène à la complexité du dire, comme l’illustre un extrait de la pièce de Pirandello, Six personnages en quête d’auteur : « Et comment pouvons-nous nous comprendre, monsieur, si dans les mots que je dis, je mets le sens et la valeur qu’ils ont pour lui, le sens et la valeur du monde qu’il a en a lui ? On croit se comprendre, on ne se comprend jamais ! » (Pirandello, 2007, p. 138-139). J’apprécie ce passage, non pour son pessimisme à propos de l’impossibilité à communiquer avec les autres mais parce qu’il me ramène à ce que je dis à propos du comment ça se passe pour et avec moi dans de telles situations, ce qui est autrement expliqué par Saül Karsz (2011) : « À prendre [les évidences] pour des vérités premières, on se contente de les évoquer, voire de les déclamer avec plus ou moins de conviction, sans pour autant les faire fonctionner, les montrer effectivement à l’œuvre chez des êtres et sur des situations. […] les évidences sont finalement des énigmes à éclaircir. » Les évidences trop facilement acceptées ne risquent-elles pas de se rigidifier par peur du vide, pour se transformer en listing de bonnes pratiques dictées par d’autres, en transformant les professionnels en de simples exécutants ?
Des artistes : des étrangers ?
7 Pour m’aider à sortir de ce bain d’évidence, j’ai commencé par rencontrer ceux que je connaissais le moins, c’est-à-dire des artistes impliqués dans des projets artistiques et culturels en crèche. J’en sollicite deux qui ont déjà effectué des spectacles, des ateliers voire une résidence d’artiste en crèche collective. D’emblée, nos échanges pour fixer un rendez-vous me paraissent « compliqués », je sens que je les envisage comme des étrangers. Puis un café, un regard, de l’écoute ; l’apprivoisement se met en marche. Leurs dires me permettent de faire un pas de côté et m’offrent trois éléments concrets pour cerner leur valeur des choses.
8 Le premier élément recueilli concerne la représentation de l’enfant-spectateur en crèche, résumable en ces termes : « c’est un excellent public », ceci en raison notamment de la capacité de l’enfant à signifier clairement ce qui ne lui plaît pas. De plus, une adaptation doit s’opérer avec l’âge, avec l’espace d’accueil ; ce qui est comparé avec les spectacles de rue : même captation nécessaire et même maintien des spectateurs dans l’instant présent. Je comprends que, pour un artiste, intervenir auprès des jeunes enfants dans un établissement petite enfance, c’est « un défi », et cela lui demande de mobiliser des compétences spécifiques.
9 Le deuxième élément concerne la considération de la crèche en tant que collectif institutionnel, perçu avec sa qualité « humaine et sociale », la quantité de professionnels (« de nombreux adultes ») et sa différence évidente avec l’école maternelle. Plus précisément, un second artiste habitué à intervenir en crèche et à échanger avec les équipes, notamment dans le cadre d’ateliers de manipulation artistique, souligne ce que peut déclencher sa venue chez des professionnels : « Mais pourquoi l’artiste fait-il ça ? Il fout le bordel et les enfants touchent à tout, ils en mettent partout et il dit rien, ça sert à quoi ? Est-ce que c’est simplement pour foutre le bordel ? » Bien que cela puisse exprimer des représentations erronées de la proposition d’un atelier artistique, de telles pensées sont à considérer, car elles signifient justement que ce type de démarche ne parle pas à tout le monde, que cela ne va pas de soi et peut susciter des incompréhensions au sein d’une institution partie prenante ; un autre aspect du « défi » en quelque sorte.
10 Le troisième élément illustre le langage des artistes. Deux mots en seront révélateurs : médiateur et performance. Tout d’abord, un artiste me dit considérer le professionnel de l’enfance comme un « médiateur culturel » : « entre les parents et nous […] entre les parents, les enfants et nous ». De mon côté, en entendant ce mot, j’associe aussitôt l’expression de médiation éducative, entre l’enfant et l’éducateur avec un support faisant tiers, un support à la relation éducative dans le sens de la définition de Joseph Rouzel (2014) : « Dans l’espace de médiation, la personne prise en charge vient buter sur le cadre, sur les limites, sur les interdits, et ainsi questionner son rapport aux autres à travers la rencontre avec un éducateur. […] Les moyens mis en œuvre dans cet espace de médiation sont ceux dont disposent les éducateurs. La boîte à outils des éducateurs est vaste comme le monde et ils savent faire flèche de tout bois : les activités diverses, manuelles ou intellectuelles, physiques et sportives, de loisirs… ; les médiations sociales, comme la recherche d’emploi, de logement, l’accompagnement aux soins, le partage de la vie quotidienne. » Le premier aurait pour but l’usage collectif de l’art alors que la finalité du second serait la relation éducative.
11 Mon attention a ensuite été attirée par le mot performance – qui est une des formes possibles du spectacle pour enfants que je trouve avec étonnement dans le descriptif de la compagnie d’un des artistes rencontrés. Je sollicite un intervenant sur le sujet, qu’il définit comme relevant de l’improvisation : « C’est un événement unique qui ne se reproduira pas. » En lien avec son expérience avec les jeunes enfants, l’artiste poursuit : « La performance, c’est avant tout se servir du lieu […] et ça laisse une marge d’improvisation qui est très adaptée à la petite enfance […] c’est l’idée d’être le plus possible adapté au lieu et de jouer avec les lieux, et non seulement les lieux géographiques mais aussi l’organisation des lieux. »
12 L’environnement d’accueil du jeune enfant est ici considéré, et devient le nouvel espace scénique, imprévisible en partie, qui se substitue à une écriture préétablie. Ce souci d’ajustement est un espace esthétique d’improvisation dans les inter-actions avec les enfants qui me semble s’apparenter au souci pédagogique de prendre en compte leur point de vue. Je lui demande alors « Est-ce que la pédagogie compte pour vous ? », l’artiste répondra aussitôt : « Surtout pas. » Le personnage de la pièce Six personnages en quête d’auteur pourrait ici nous répéter : « Comment pouvons-nous nous comprendre ? » Cette difficulté est bel et bien réelle et ses conséquences sont les risques inhérents à de tels projets [5] : refuser, résister, ne plus oser agir, ne pas savoir comment faire, ne pas savoir comment en parler. Notre but ici est de reconnaître les différences de chacun… pour faciliter la rencontre. Reconnaître cette différence est un préalable pour éviter les discours stéréotypés. Les intervenants artistiques ne peuvent se cantonner au « faire », à leur activité en tant qu’acteurs de la culture, ils doivent aussi se positionner. C’est là que le détour par l’approfondissement théorique de la question de l’art destiné aux enfants est précieux : comprendre les différents points de vue, la manière dont ils s’expriment, permettre l’échange, sont de nature à renforcer la coopération entre professionnels et la cohérence des interventions.
Définir
13 Comme le dit Lilian Gravière (2012) : « Langage, pensée et action sont donc tenus ensemble ; s’intéresser à l’un revient à dire quelque chose des deux autres. » J’ai constaté qu’avant 2000, on nommait différemment ces projets artistiques et culturels, on parlait alors de « l’expression de l’enfant ». Aujourd’hui, c’est le mot « culturel » qui domine. Il a été dénombré plus de cent cinquante acceptions du mot culture (Lézé, 2007), il est donc légitime de se demander : de quoi parle-t-on vraiment lorsque nous parlons des projets culturels pour les jeunes enfants ?
14 Le terme « culture » est d’emblée polysémique. Marie-Claude Blais distingue deux niveaux de définitions. Le premier sens de la culture est un sens anthropologique, où tout comme la terre, l’homme se cultive pour s’élever au-dessus « de la pure animalité, et au-dessus de la simple nature. On ne naît pas homme, on le devient par l’éducation, par le soin attentif de ceux qui eux-mêmes ont été éduqués » (Blais, 2002). Ce processus concerne donc tous les êtres humains. C’est en ce sens que la formulation que nous sommes naturellement des êtres de culture est ici inconcevable, car il s’agit justement de sortir de la nature, c’est-à-dire de notre animalité première pour apprendre à parler, à penser. Je me souviens alors du petit enfant en crèche collective, pris dans une jungle d’émotions, où mon accompagnement d’éducatrice consistait à l’aider à accueillir ses émotions, à les nommer, à les transformer ; concrètement en disant non, en disant je, en attendant son tour de parole, en s’asseyant parmi les autres et en défendant sa place en ma présence.
15 Le second sens du mot culture est apparu plus tard et met davantage l’accent sur la dimension collective qu’elle permet, ainsi la culture est « cet ensemble complexe de formes symboliques, que toutes les sociétés élaborent pour comprendre et aménager leur monde commun, formes qu’elles accumulent et transmettent aux nouvelles générations ». L’art fait alors partie de ces formes possibles de culture et c’est l’enjeu de sa transmission. Mais aujourd’hui, les familles se sont détournées de la transmission de la dimension sociale de l’existence, alors que l’enfant a besoin d’être « institué », c’est-à-dire d’être inscrit dans un collectif et dans une histoire plus grands que lui (Blais, Gauchet, Ottavi, 2010). Les familles ont considérablement changé depuis une trentaine d’années. Face aux écarts des capitaux culturels transmis d’une famille à l’autre, nos institutions ont commencé à s’en mêler afin de pérenniser l’idéal démocratique de nos sociétés. Ainsi, quand les familles n’ont plus l’entière responsabilité de cette transmission culturelle, quand l’institution décide aussi de s’en mêler, cela implique qu’au fil du temps un travail de renouvellement se fasse sur ce qui est à transmettre, rendant précieuses ces questions du quotidien : quels livres achetons-nous ? Quels spectacles choisissons-nous ?
Six personnages en quête d’auteur pourrait ici nous répéter :
« Comment pouvons-nous nous comprendre ? »
16 Le sens du mot art interroge aussi tant il peut paraître vaste. Nous venons de le considérer au sein de la culture dans un sens collectif et symbolique, de génération en génération. Mais une confusion peut apparaître, car il existe plusieurs modalités de transmission de l’art. Elles ont été catégorisées par Bruno Duborgel (1989), philosophe et spécialiste de l’art, qui propose des distinctions très utiles pour penser le rapport entre l’art et l’éducation.
17 Le premier modèle de la transmission consiste à utiliser des modèles, à les imiter, afin d’acquérir des compétences techniques. Une conversion va nécessairement s’opérer. Il s’agit, avec l’exigence d’éduquer, d’instituer un autre état, un trajet pour faire naître l’adulte à l’art, à la culture et par extension à la raison.
18 Le second modèle est la subversion du premier, car il y a ni repères ni personne extérieure. L’imitation est évitée car elle risquerait de réduire le potentiel d’expression créative. C’est la libération de toute référence commune, de tout jugement de spécialistes qui permet au sujet humain, qui a déjà tout en lui, de créer. L’art est ici en fusion avec la vie. L’artiste peintre Jean Dubuffet, par exemple, valorise un état naturel des choses, sans aucune forme de mise à distance, surtout pas celle du vocabulaire qu’il considère comme l’ennemi de la pensée. L’enfance est érigée en mythe, tel un paradigme de la vie artistique, car Dubuffet l’associe à un état brut de la vie, à une certaine pureté ; ce qui l’amène à valoriser l’état de nature, visant donc un combat avec une « reconquête de la nature et de la vie sur l’histoire et la culture ». Alors qu’au premier modèle on reprochera l’exigence voire la rigidité du trajet, le second modèle à la Dubuffet est critiqué ainsi par Duborgel : « Mais trop souvent [ce modèle] ne dispose guère que d’un vague mot d’ordre : créez, faites quelque chose d’original, exprimez-vous, soyez vous-même, innovez ! […]. Et l’exhortation à l’innovation est bien vite menacée de stérilité si elle n’est pas accompagnée d’une pédagogie » (Duborgel, 1989). La proposition de Duborgel pour sortir des oppositions entre ces deux modèles n’est pas la facilité du juste milieu mais une reproblématisation pédagogique. Il propose de sortir de l’opposition entre « homme académique » et « homme brut » en utilisant ces multiples propositions comme occasion de fécondité créatrice afin de « vivre l’art », de se connecter à notre nature humaine qu’est l’« être culturel ». Duborgel propose donc un troisième modèle de transmission avec un éducateur « médiateur entre l’enfance et l’homo symbolicus » et qui propose « l’axe d’une relation poétique, d’un regard de réappropriation et d’aventure, d’une audacieuse instauration du sens face aux œuvres qui font signe. Bref, il conduit l’enfant à cette attitude du spectateur-artiste à laquelle il lui faut d’ailleurs lui-même s’entraîner ». L’axe proposé réintroduit une dimension pédagogique, avec une autre fonction pour le médiateur. Déjà à l’Antiquité, le pédagogue était un esclave qui accompagnait l’enfant entre son domicile et l’école. Ici, il s’agirait d’accompagner l’enfant à devenir spectateur d’une œuvre, fréquenter une salle de spectacle, un musée, selon « l’axe d’une relation poétique » proposé par Duborgel mais inspiré par le philosophe Gaston Bachelard, qui investit l’imagination comme un pôle nécessaire à l’existence humaine ; au même titre que le pôle de la raison. Bachelard invite donc à la promotion de l’imagination et de la raison, tous deux s’alimentant au sein d’un projet éducatif et culturel enfin harmonisé.
19 « Le bordel » – pour reprendre le terme utilisé par l’un des interviewés –, autrement dit, le désordre ressenti par les éducateurs lors d’une ouverture vers d’autres, vers les artistes, illustre ce principe universel de vie mis en lumière avec l’exposition « Les maîtres du désordre », en 2012, au Quai Branly. Cette exposition présentait des personnages du monde entier (esprits, dieux, chamanes, clowns, etc.) qui régulent la vie sociale car ils savent bricoler, négocier avec les esprits. Le visiteur à la fois conduit et désorienté se rappelait alors que l’ordre n’est jamais sans désordre, afin d’atteindre un difficile équilibre. La place des artistes dans les crèches représente un point de vue différent mais qui ne va pas de soi. Ils possèdent leur propre langage professionnel, et s’engagent avec des objectifs et considérations artistiques qui leur sont spécifiques. Faire avec eux ne nécessite pas de faire comme eux, mais cela représente une occasion salutaire de confirmer, de vivifier le travail pédagogique complémentaire de leur posture artistique. Partant du principe anthropologique que la culture nous concerne tous, et que le goût et la pratique de l’art se transmettent, la pédagogie de l’art pour la petite enfance nous semble avoir toute sa place aujourd’hui, avec des modalités de transmission adéquates à notre société et aux éducateurs. Ceci d’autant plus que le secteur de la petite enfance vit une période de mutation car il n’a pas échappé aux exigences managériales de notre époque (de Gaulejac, 2012). On nous propose des programmes d’inter-vention précoce (comme « Parler bambin ») qui éloignent les professionnels de leur propre capacité à penser, on imagine une formation initiale des éducateurs de jeunes enfants de plus en plus transversale. Ainsi, à l’heure où la rationalité et la technicité prennent bien souvent le dessus, l’investissement du domaine du sensible apparaît comme une perturbation nécessaire à l’équilibre de l’ensemble.
Bibliographie
Bibliographie
- Blais, M.-C. ; Gauchet, M. ; Ottavi, D. 2002. Pour une philosophie politique de l’éducation, Paris, Bayard.
- Blais, M.-C. ; Gauchet, M. ; Ottavi, D. 2010. Conditions de l’éducation, Paris, Fayard.
- Duborgel, B. 1989. Imaginaires à l’œuvre, Paris, Greco.
- Gaulejac, V. (de) ; Mercier, A. 2012. Manifeste pour sortir du mal-être au travail, Paris, Desclée de Brouwer.
- Gravière, L. 2012. « Langue de bois ou pragmatisme ? Esquisse d’analyse du langage de la formation », Le sociographe, n° 37, p. 27-34.
- Houssaye, J. 1997. « Spécificité et dénégation de la pédagogie », Revue française de pédagogie, n° 120, p. 83-97.
- Karsz, S. 2011. « Naître au monde et à la culture : mais c’est bien sûr ! », Spirale, n° 56, p. 41-45.
- Lézé, S. 2007. « Culture », dans J.-P. Cazier, (sous la direction de), Abécédaire de Claude Lévi-Strauss, Mons, Sils-Maria.
- Pirandello, L. 2007. Six personnages en quête d’auteur, Paris, Gallimard.
- Rouzel, J. 2014. Le travail de l’éducateur spécialisé, Paris, Dunod.
Mots-clés éditeurs : coopération, discours, artiste, pratiques professionnelles, professionnel de la petite enfance, pédagogie, partenariat
Mise en ligne 20/11/2015
https://doi.org/10.3917/spi.075.0177Notes
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[1]
Tout est calme, wea, 2006.
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[2]
Dans cet esprit, Claudine Tiercelin organisa au Collège de France un colloque international intitulé « La fabrique de la peinture » en octobre 2014, à partir du témoignage de seize peintres sur leur pratique picturale, interrogeant ainsi le processus et le type de connaissance pratique que suppose l’acte de peindre.
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[3]
L. Lefèvre, « L’imaginaire” dans les établissements d’accueil du jeune enfant », eje Journal, n° 34, 2012, p. 42-44.
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[4]
I. Bertola, « Être spectateur avant 3 ans ? » L’école des parents, 1994, p. 49-53.
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[5]
Sur ce thème, voir l’article de M.-O. Némoz-Rigaud, « Culturland… », Spirale, n° 35, 2005.