Notes
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[*]
Wilfried Coussieu est doctorant en sociologie au Centre d’Étude sur l’Actuel et le Quotidien (CEAQ), Université Paris Descartes, et membre du Groupe de Recherche en Anthropologie du Corps et ses Enjeux (GRACE) et du Groupe de Recherche et d’Etude sur la Technique et le Quotidien (GRETECH). wilfried.coussieu@ceaq-sorbonne.org.
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[1]
Mémoire pour l’obtention du Master II Recherche en Sociologie, « L’expérience sociale in virtuo, un cas de participation ludique et fictionnelle : le jeu de rôle en ligne », sous la direction du professeur Michel Maffesoli, soutenu en juin 2009 à l’Université Paris V – Sorbonne.
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[2]
Un acronyme pour Massively-Multiplayer Online Role-Playing Games, ou Jeu de Rôle en Ligne Massivement Multijoueur.
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[3]
Dans son plus récent communiqué de presse, la société Blizzard Entertainment dévoile pour World of Warcraft un chiffre dépassant les 11,5 millions d’abonnés à travers le monde. Source : http://eu.blizzard.com/fr-fr/company/press/pressreleases.html?081223. Dernier accès le 17 février 2010.
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[4]
Ce sont les « Maîtres du Jeu », employés par la compagnie du jeu, afin d’assurer une assistance directe, à l’intérieur de l’environnement virtuel. Ils sont aussi considérés comme les médiateurs entre la communauté des joueurs et les développeurs. Voir par exemple, le « Forum des Maîtres de Jeu » de World of Wacraft : <http://forums.wow-europe.com/>.
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[5]
Le terme est de Georges Balandier et qualifie les ailleurs inventés par l’homme. Voir « L’imaginaire de l’espace », in Le détour : pouvoir et modernité, Paris, Fayard, coll. « L’espace du politique », 1985.
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[6]
Le projet Daedalus. Ces six dernières années, plus de 40 000 joueurs ont participé au projet dont Nick Yee publie régulièrement ses résultats et analyses. Site : http://www.nickyee.com/daedalus/.
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[7]
Voir les créations de Will Wright, à ce jour les plus manifestes du genre, avec The Sims notamment, vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde, et plus récemment Spore.
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[8]
Voir la série Populous ou encore Black and White du concepteur Peter Molyneux.
« Une situation ne nous affecte que si nous la jouons. »
« Le Jeu est sans pourquoi. »
Prémices
1Dans cet article, nous nous proposons, à partir d’une précédente étude [1] menée sur le jeu de rôle en ligne, de considérer les conditions de possibilité d’une expérience sociale dans un monde virtuel. Le phénomène du jeu par « téléprésence » n’ayant pas encore suscité de nombreuses publications, du moins francophones, cet article est une proposition d’amorce à la complexité dont cet objet rayonne. Le jeu en ligne, si ce n’est le jeu vidéo, dissémine depuis plus d’un quart de siècle un ensemble de pratiques ayant une prise considérable sur le monde de la vie quotidienne (Roustan, 2003). Avec le jeu de rôle en ligne (mmorpg) [2], qui se présente comme massivement multijoueur, il n’est plus désormais question de plateaux ou d’espaces concrets, mais d’espaces virtuels dans lesquels des personnes interagissent et coopèrent. L’aire de jeu se mesure à l’étendue d’un monde ludique entièrement simulé et accessible par le biais informatique, contorsionnant de fait les concepts et modèles connus du jeu.
2Contrairement à certaines analyses pouvant rattacher le jeu électronique à la sphère accommodante de la « culture jeune », voire des loisirs, nous privilégions une exploration afin de dégager des pistes pour saisir cette socialité émergente, semblant esquisser depuis quelques années le contour de transformations contemporaines, voire d’une véritable mutation culturelle (Beau, 2007). Nous concentrerons cette note sur le problème du jeu de rôle et des affectations provoquées à son égard par la modalité ludique nommée « univers persistant ». Il est vrai que ces espaces nouveaux, résultant de la combinaison entre les technologies d’imagerie synthétique de l’infographie et des télécommunications, exercent depuis quelques années une attraction sur le pôle des sciences humaines et sociales. Il s’agit de jeux dans lesquels l’acte de jouer est rendu possible par une interface programmée. Un logiciel permet d’accéder à un environnement de synthèse où les images se chevauchent pour former un monde virtuel en trois dimensions. Dans Le Seigneur des Anneaux Online ou encore le célèbre World of Warcraft [3] (wow), le joueur est invité à créer son personnage en choisissant son nom, sa morphologie, sa catégorie ou classe de jeu (sorcier, soigneur, guerrier, etc.), ainsi que son appartenance à une faction. Une fois son personnage constitué, le joueur répond à l’invitation interactive de pénétrer dans un « autre monde », de s’immerger audio-visuellement dans un récit inspiré par la littérature de genre fantastique et héroïc-fantasy, et en l’occurrence, pour notre premier exemple, des légendes de La Terre du Milieu, continent imaginaire décrit dans l’œuvre de l’écrivain anglais J.R.R. Tolkien. Soutenu par un serveur informatique accessible sept jours sur sept, chaque joueur est ainsi libre de retrouver son avatar, sorte d’alter-ego numérique, à tout moment, afin de s’immerger à nouveau dans un univers de jeu qui, durant son absence, continue d’accueillir des joueurs et, tel un écosystème artificiel, connaît des perturbations, nouveautés ou modulations.
3Le mot-substrat « virtuel » confronté à celui d’espace nous conduit d’abord à repenser certaines de nos catégories d’entendement. Comment prendre, en effet, connaissance de phénomènes sociaux délocalisés dans des espaces immatériels, numérisés en strates graphiques formant de véritables paysages électroniques, et qui au premier regard semblent s’éloigner du principe de réalité ? Nous pouvons supposer que le rassemblement de personnes en un lieu géographiquement indéterminé n’exclut pas le fait que ce rassemblement soit socialement organisé. Dans les mondes virtuels, il n’existe que des groupes « sans corps ». Cependant, l’interaction, voire le face-à-face, et la formation d’entités socialement définies ne disparaissent pas. Il existe dans ces environnements une modalité inédite de la rencontre, de la relation sociale et par conséquent du « problème d’autrui ». Par ailleurs, le sociologue Georg Simmel soulignait qu’il existe « société partout où des hommes se trouvent en réciprocité d’action et constituent une unité permanente ou passagère » (Simmel, 1896-1897, p. 73). Il apparaît souvent que les groupes en ligne se forment sur la base de remarquables points d’ancrage préexistants dans la « vraie vie » quotidienne (cercles amical et/ou familial), dont le monde du jeu ne serait en définitive qu’une extension. Sur ce point, Jacques Henriot considère que le jeu s’offre à la conscience comme une de ses modalités et ne saurait, comme le dit Caillois, se définir comme une activité fictive « par rapport à la vie courante. » Le jeu situe avant tout le joueur par rapport à lui-même. L’activité ludique se présente comme l’intention d’un redoublement de la réalité, d’un ordre fictionnel dotant le sujet de la possibilité d’être autre en même temps que soi. Son action se définit ainsi par un « coefficient d’irréalité relative » sans néanmoins l’empêcher d’être la « transposition intériorisée d’une action réelle », réfléchie, typifiée et par conséquent sociale (Henriot, 1989, p. 175). Ainsi, le jeu pourrait, toutes proportions gardées, se présenter comme à la fois simulation, dissimulation et assimilation de la réalité sociale.
Une métamorphose ludique
4Nous ne saurons réduire et résumer le jeu de rôle à une « projection identitaire », point de vue souvent adopté en psychologie et délaissant l’idée que les joueurs individualisent avant tout une simulation (un univers particulier) pour se permettre un « éventail » d’actions originales (Caïra, 2003). Nous n’avons pas l’intention d’expliquer les conditions d’émergence des premières aventures à choix multiple, mais de contextualiser quelque peu notre énoncé. Le jeu de rôle traditionnel, que nous qualifions ainsi pour désigner le jeu sur table, trouve son origine dans une évolution des formes ludiques associées aux premiers jeux de simulation de batailles militaires, se jouant sur plateau avec des figurines et connus sous le nom de wargames. À la fin des années 1960, certains créateurs transposèrent l’histoire des batailles et des seigneurs dans de plus vastes univers, issus de la littérature et particulièrement du genre fantasy. Le jeu mettait en scène des affrontements duellistes permettant de réduire le champ d’action au niveau subjectif, et par là-même le rayonnement de nouvelles possibilités puisque des caractéristiques singulières, comme la personnalité et la biographie attachées au personnage, étaient de la partie. Schématiquement, le jeu de rôle est né de ce rapprochement entre prise en compte d’une subjectivité jouée sur le mode de la fiction, et le plateau de figurines représentant l’aire de jeu – un monde imaginaire.
5En 1974, l’écrivain Gary Gygax et le concepteur de jeu David Arneson publient et commercialisent le premier jeu de rôle : Donjons et Dragons. La matrice du jeu est constituée d’un ensemble de règles édictées à destination des joueurs ainsi qu’à l’attention d’un Meneur de Jeu, ou Maître de Jeu (mj). Ce dernier conduit, sur le mode de la narration, un ensemble de joueurs selon les ficelles d’un scénario évolutif. La situation d’énonciation dans le jeu est double. Tandis que les joueurs évoquent leurs actions en tant que personnages, le mj incarne de son côté tous les personnages non-joueurs (pnj) de l’univers, c’est-à-dire les protagonistes et antagonistes qui croiseront la route des joueurs. Pour explorer et faire avancer la partie de jeu, le lancer de dés intervient au moindre choix emprunté par les joueurs et est immédiatement interprété par le meneur afin de poursuivre la trame du récit. La question fondamentale du jdr pourrait se résumer dans la formule « Qu’est-ce que vous faites ? ». Une analyse comparative s’impose maintenant avec le jeu de rôle en ligne. Ici, le système de coexistence des personnages-joueurs est différent. L’accord tacite du « tout existe », qui maintient le système du jeu de rôle dans la narrativité à laquelle chaque joueur participe par la parole et le jet de dés, devient un accord explicite puisque l’univers du jeu apparaît au travers d’un écran ; il est ainsi perceptible en tant que phénomène : la fiction est interactive, tout à la fois textuelle, imageante et sonore. Néanmoins, on pourrait considérer que les mmorpg ne proposent qu’une image unique pour tous, alors que le jeu de rôle traditionnel posséderait un canevas de « jeu de société » impliquant l’imagination de tous les joueurs. En effet, au cours d’une partie, les conséquences d’une mauvaise interprétation peuvent ruiner ce que le philosophe et poète Samuel Taylor Coleridge appelait le phénomène de « suspension consentie de l’incrédulité » (willing suspension of disbelief) qui est ici l’essence du jeu collectif. Dans le mmorpg, si un joueur « ne joue pas le jeu de tout le monde », le monde du jeu ne s’arrête pas, il persiste en tant que phénomène aux yeux de tous les autres joueurs, à la fois acteurs et observateurs. Le joueur manquant sa « prestation ludique » sera, au mieux, rejeté du groupe, au pire « banni du royaume » si d’autres joueurs interviennent auprès des autorités du monde [4]. L’hypothèse d’une « image unique pour tous » reviendrait à débattre d’un totalitarisme de l’image et d’une réduction panoptique de l’acte de jouer. En réalité, tous les joueurs ne voient pas la même chose dans le jeu. De ce fait, leurs participations sont remarquablement hétérogènes. L’expérience du jeu de rôle en ligne ne peut être que multivoque parce qu’indépendamment de cette même image, les règles et la charte du jeu sont soumises aux variations de l’expérience de chacun. La question fondatrice du mmorpg serait donc « Qu’est-ce que je fais ? », revenant à une sémantique du sujet rapportée à des actes vécus, où l’acte de jouer ouvre des potentialités à la notion de rôle et d’action sociale.
6La typologie ludique de Caillois s’avère, de ce point de vue, intéressante. L’emprise de l’agôn, démonstration de supériorité sociale par le jeu des raffinements, des règles et l’acquisition d’un mérite, se remarque très nettement dans la dimension belliciste du jeu de rôle en ligne : affrontements entre joueurs, tournois, accumulation de points et de trophées virtuels. L’aléa, qui participe d’une évasion du monde, en lui substituant une situation ludique hasardeuse où chacun a « sa chance », est également intégré aux mécanismes du mmorpg comme composante essentielle à l’action. Il va s’agir des « jets de dés » invisibles qui sont, dans le logiciel du jeu, calculés à base d’algorithmes pour simuler l’imprédictibilité de l’action, mais aussi de l’aspect aléatoire des contre-stratégies puisque le joueur n’affronte pas que des intelligences artificielles, mais des humains de chair et d’os assis devant leurs écrans. La mimicry correspond à l’établissement d’un simulacre conventionnel, accepté dans le cadre de l’illusion ludique, où l’on s’évade du monde mais « en se faisant autre. » (Caillois, 1967, pp. 60-65) La mimicry pourrait être considérée comme l’attitude dominante du mmorpg, puisqu’effectivement la simulation y est à l’œuvre et transfigure les activités humaines, les recomposant dans l’enceinte du monde virtuel. Que je joue mon personnage ou non, le principe d’immersion suppose déjà l’adhésion temporaire à une réalité d’efficience fictionnelle. La fascination du masque, du « devenir autre » ou de se prêter autrement au groupe et à l’environnement, donne ainsi à qualifier le jeu de rôle en ligne de « simulation d’une réalité seconde » (ibid., p. 67). Il existe cependant des degrés d’immersion comme des niveaux d’investissement. Il ne plaît pas à tous les joueurs d’interpréter leur personnage en permanence comme si le jeu n’était qu’une pièce de théâtre. Quant à l’Ilinx, emprunté par Caillois à l’ilingos grec signifiant le vertige, nous considérons en la matière que le virtuel est déjà un vertige. En effet, la projection de la conscience dans un monde autre n’est-elle pas en ce sens vertigineuse ? La participation fictionnelle n’est-elle pas déjà un anéantissement, ou une mise en abyme de l’ordre de la réalité ?
7Les éléments de la typologie, que nous n’avons pas la place d’étayer exhaustivement, n’expriment donc, ici, qu’une seule et même réalité complexe, ce que Caillois n’avait pu envisager. Les catégories principielles précédemment énoncées s’interpénètrent étrangement pour maintenir cet univers du jeu, lieu ludique mais aussi et surtout lieu d’une réalité sociale où des êtres humains agissent, construisent des opinions, se jugent les uns les autres et définissent des critères de légitimité. Un très grand nombre de situations coexistent à ma propre participation ludique sans que je les aperçoive ou qu’elles affectent directement mon vécu. Cette spécificité génératrice de sociabilités, durables ou non, est observable en tout endroit du monde virtuel. Mais ces ligatures sociales invisibles sont d’une grande variabilité opératoire, autrement dit il existe un millier de façons de se rencontrer et de tisser des rapports. Une guilde, association durable de joueurs réunis autour d’un intérêt commun et d’une même bannière, initialement conçue par un cercle amical peut très bien accueillir des joueurs d’horizons divers aux motivations diverses. Il est au final difficile d’établir un diagnostic nomothétique des rapports sociaux sans mutiler leur propriété socioludique, à savoir de se former tout en se déformant, de faciliter la jonction d’un lien tout aussi efficacement que sa disjonction.
8Jeu de rôle massivement multijoueur sur ordinateur (mmorpg) et jeu de rôle traditionnel (jdr) autour d’une table, accompagné de convives, de dés et crayons à papier, impliquent donc une forme ludique à part entière. Dans les deux cas, l’acte de jouer un rôle et de s’immerger dans un ailleurs imaginaire présuppose une dialogique factuelle-fictionnelle. Les modélisations de sens provenant du réel se projettent et se « fixent » dans les formes ludiques comme processus efficient qui amplifie l’instant de la fiction, lui attribuant pour ainsi dire un « accent de réalité » (Schütz, 1987, p. 128). Cette immersion peut s’interpréter comme un « voyage » qui n’est paradoxalement possible que lorsque le corps est immobile. Vécu à l’arrêt, ce voyage immobile sollicite pourtant une grande part de notre sensorialité : nervosité et émotion participent pleinement du jeu. Je suis face à mon écran et j’explore un monde. Je me délie de l’espace que je vis quotidiennement pour élaborer mentalement une nouvelle modulation de cet espace, du déplacement, de la vitesse, de ma perception spatiale tout entière. La traversée de l’écran se présente comme une implication mentale du soi qui prend la forme de multiples itinéraires sous la coupe d’un avatar à l’identité certes délibérément choisie (nom, physiologie, fonction de classe, appartenance), mais pour le moins soumise à l’errance, à une infinitude indispensable. Je participe au jeu en endossant directement un rôle mais je demeure libre de recommencer, de créer un autre personnage (rerolling), de poursuivre le voyage en métamorphoses. Autre spécificité, l’inachèvement nécessaire du jeu, c’est-à-dire que la « partie » n’existe plus. Les joueurs peuvent discuter pendant des heures sans avancer dans leur quête principale, sans accumuler le moindre point. Ils ajustent leur expérience ludique en fonction d’un pattern d’activités toujours renouvelées par les mises à jour du logiciel-monde. Cette abolition de la partie comme mesure temporelle laisse place à une durée vécue. Par exemple, l’histoire du jeu évolue selon un récit dans lequel les bouleversements majeurs sont séquencés. En effet, la chronologie est rythmée par paliers appelés « extensions », qui sont des mises à jour payantes ou non du jeu. Avec ces add-on, le temps de jeu est étendu par un ajout de contenu, de nouveaux territoires, et d’une continuité dans le récit initial qui jusqu’ici était comme « figé » dans le temps par sa version-palier. Mais le temps de jeu est déjà élastique in situ. Dans wow, le monde synthétique d’Azeroth est pourvu d’un découpage contextuel nommé « système de phases » ou d’« instances ». Selon les événements et la position des joueurs, le contenu du jeu peut se modifier et ne se révéler qu’à un petit nombre (donjons, lieux instanciés, autres dimensions). Ainsi, il n’existe pas un temps qui serait hégémonique et commun à tous les joueurs, mais plutôt une succession de micro-durées bergsoniennes, multitude de rapports au temps et à l’espace. Sans cette dimension, le jeu de rôle en ligne ne serait qu’une partie de jeu. Par ailleurs, le « game over » n’existe pas ; si le personnage meurt, il renaît presque aussitôt. Nous sommes bien en présence d’une u-topie vécue selon des modalités ludiques.
9La différence essentielle opposant les deux formes de jdr repose cependant sur la disparition, dans le jeu de rôle en ligne, du Meneur de Jeu. L’interprétation classique du personnage ne peut qu’en être affectée. Cependant, prenons le problème en considérant que le Meneur de Jeu n’a pas vraiment disparu et que sa fonction s’est plutôt transfigurée. Le système narratif, les jets de dés et le chiffrage des caractéristiques sont désormais calculés en temps réel par un algorithme informatique. Mais l’essentiel du bouleversement concerne le méta-jeu, ou le méta-discours du jdr, c’est-à-dire quand le joueur fait avancer son personnage en utilisant ses connaissances d’acteur social et non les connaissances fictionnelles censées appartenir à son personnage. Par exemple, dans l’univers du jeu, le magicien ne lance pas de dés pour effectuer son sortilège, cependant l’efficacité de ce sort dépend de ce lancer de dés du joueur. Le Meneur de Jeu, lui, détient un méta-discours concernant les décisions rationnelles affectant le déroulement du récit. Cependant, dans le cadre du mmorpg, il est « remplacé » en quelque sorte par les relations sociales inter-joueurs, ceux-là même qui vivent, pour une durée, le jeu comme une succession d’interactions sociales, et qui disposent spontanément du libre arbitre de jouer ou non leur personnage, de choisir tel ou tel sentier, d’affronter ou de fuir une situation hostile, etc. Les décisions prises par le joueur sont directement celles de son personnage, et elles sont représentées en temps réel dans un monde qu’il partage avec d’autres. L’intermédiaire entre le jeu et le méta-jeu a disparu, ils ont pour ainsi dire fusionné. La connaissance déployée dans le jeu se conjugue dans un même mouvement à la connaissance sociale du joueur, toutes les deux articulées à un canevas cognitif global – celui du sujet pensant.
10Le mmorpg ne nécessite pas un regard en surplomb (comme sur un plateau) pour intégrer des règles, puisque les situations sociales qui ont lieu à travers lui sont intimées directement par simulation. C’est pourquoi adapter le jdr traditionnel à un usage ludo-virtuel se heurte inévitablement à des difficultés. Les rôlistes se rassemblent souvent dans des guildes orientées « roleplay» afin de vivre leur personnage aux côtés d’autres passionnés. Des événements ont lieu au quotidien : rencontres et attitudes spontanément théâtrales, rites d’initiation pour les nouveaux venus dans le clan, explorations scénarisées, cérémonies de mariage entre joueurs-avatars, etc.
11Cependant, ces événements ont lieu dans un monde virtuel en majorité partagé par des joueurs qui n’incarnent pas leur personnage, au sens d’une interprétation stanislavskienne, c’est-à-dire où l’individu jouerait en vivant et intériorisant l’univers du jeu du point de vue de son avatar. La qualité de l’immersion peut ainsi se dégrader et prendre soudainement une tournure factice, rappelant qu’il ne s’agit plus d’un jdr traditionnel mais d’un espace où évoluent plusieurs subjectivités aux motivations singulières. C’est pourquoi s’affranchir d’une analyse classique du jeu est nécessaire, le fond du problème dépassant largement la question de l’activité ludique, mais concernant plutôt une socio-logique au sens le plus littéral. Immédiatement alors, survient la question merleau-pontienne : « comment autrui est-il possible » dans ces univers persistants ?
Le monde virtuel comme « province limitée de signification »
12Pour comprendre la structuration sociale de ce monde virtuel, nous avons recours à la sociologie phénoménologique d’Alfred Schütz, en particulier à sa théorie des réalités multiples. Pour cela, nous faisons « momentanément abstraction de l’assimilation du jeu au passe-temps. » (Henriot, 1989, p. 41) L’expérience que nous nous proposons de décrire est celle d’un micro-univers social, d’un monde virtuel qui, même s’il est exotopique [5], ne déroge pas, en tant qu’il est un espace social, au développement d’un système de typicalités, de conduites et de « sens commun d’une pratique » élaboré et maîtrisé par ses acteurs. Schütz, dans un texte intitulé « Sur les réalités multiples », présente et développe une intuition du psychologue William James. Pour ce dernier, il n’y a pas de réalité mais seulement un « sens de la réalité » dont chacun fait l’expérience lorsqu’il fait le choix de privilégier une manière ou une autre de penser. Tout objet relève de la croyance, du fait même de le concevoir et d’y accorder une réalité efficiente. Cette théorie, nommée « théorie des sous-univers », ou des modes de la réalité, va être réappropriée par Schütz (1987, p. 128) :
« Nous préférons ne pas parler de sous-univers de la réalité, mais de provinces limitées de signification dont chacune peut se voir attribuer un accent de réalité. Nous parlons de provinces de signification et non de sous-univers, parce que c’est la signification de nos expériences et non la structure ontologique des objets qui constitue la réalité. »
14En fondant son analyse sur la notion d’expérience de la vie courante, Schütz trouve dans la « province de signification » (le monde des rêves, des images, de l’imagination, dit-il, mais aussi l’expérience religieuse, le jeu, la contemplation) des formes spécifiques de l’expérience : expériences de soi, des autres et du temps, consistantes en un style cognitif donné, toujours en relation avec les autres provinces de la vie quotidienne qui demeure néanmoins la « réalité primordiale ». De ce point de vue, penser la réalité sociale comme multivoque nous éclaire sur la possibilité théorique d’explorer le monde virtuel et de le concevoir comme une province enchevêtrée aux plus vastes formes de la vie sociale dont il est issu. Cette conception jette un pont heuristique entre les usages circulant dans cette province et la mise en scène d’une expérience sociale, qui plus est terriblement manifeste puisque s’exprimant par le partage d’images significatives. Des êtres sociaux y communiquent, contractent des alliances, choisissent un métier, s’investissent dans des activités de récolte, de découverte, s’échangent des biens virtuels et les revendent dans des hôtels de vente aux enchères… Dans tous les cas, les conventions, attitudes, sentiments ou encore croyances personnelles s’y expriment au cours d’interactions quotidiennes. Jouer dans ce type d’environnement de simulation revient à solliciter les mêmes instruments cognitifs que dans la « vraie vie » afin d’interpréter l’action et les rôles d’autrui. Sur le double fond jeu de rôle et rôle social, Berger et Luckmann précisent d’ailleurs que la construction sociale « est le fait que l’individu prend en main non seulement les rôles et les attitudes des autres, mais également leur monde dans le même processus. En fait, l’identité est objectivement définie comme une place occupée dans un certain monde et ne peut être subjectivement appropriée qu’avec le monde » (1966, p. 181)
15La dimension sociale recouvrant le jeu de rôle en ligne est aussi abordée par le chercheur américain Nick Yee, auteur d’une monumentale étude [6] quantitative questionnant les usages des joueurs de mmorpg. Il distingue chez eux cinq motivations : la socialisation (faire des rencontres), l’immersion (s’engager dans les potentialités du jeu), la perturbation (griefplay, la recherche d’un avantage sur les autres), le leadership (le désir ou l’exercice de l’autorité) et l’accomplissement (achievement, le désir de tout explorer). Entre l’immersion et la socialisation, la pratique du roleplay se révèle assez polythétique, contingente et dépend bien souvent de situations jouées spontanément (Yee, 2006). Autrement dit, chaque joueur en a sa propre vision, et chaque groupe de joueurs est susceptible d’identifier ou de modeler à sa guise, selon des conventions propres, le principe du roleplay, voire la légitimité des caractéristiques qui lui sont associées en tant que pratique et comportement. Lorsqu’ils habitent leurs avatars, les joueurs agissent selon ce qu’il nomme l’effet Proteus, polymorphisme radical, du nom de Protée – divinité marine de la mythologie grecque qui était douée du don de métamorphose. Autrement dit, les joueurs se conforment le plus souvent aux modèles typiques des avatars qu’ils choisissent d’incarner. Un mage ne joue pas comme un guerrier, au risque de déséquilibrer le groupe et de provoquer sa mort. Et plus précisément, dit Yee, les joueurs modèrent leurs comportements en fonction de ce qu’ils croient qu’autrui attend d’eux (Yee, 2007). Nous retrouvons ceci chez Berger et Luckmann qui déclarent que, dans une interaction entre A et B, l’assimilation du rôle de l’un par l’autre amènera à ce que « A accaparera intérieurement les rôles réitérés de B et fera d’eux les modèles de son propre jeu de rôle. » (ibid,, p. 81)
16C’est pourquoi, même si l’écran de jeu figure un monde imaginaire, nous y vivons tout de même des situations, en reconnaissant l’existence de normes, de rôles, de valeurs. La guilde est pleine de ces situations où hiérarchie, sentiment d’appartenance, normalisation des comportements et conflits entre membres s’exercent selon des codes sociaux. Les rapports entretenus entre moi et les autres dans ce monde sont imbriqués dans des modèles de connaissance sociale, même s’ils sont vécus au travers de l’écran. Georges Herbert Mead rappelle que la constitution d’un monde social est possible au moyen d’expériences partagées, de significations établies sur une pratique, où le monde apparaît comme « monde de l’esprit ou monde d’objets de sens commun » (Mead, 1963). Dans notre cas, ces objets sont des signes, et plus encore des images, des instants de jeu. Le monde virtuel est reconnu comme socialement « réel » par ses acteurs qui intègrent un savoir pratique, le gameplay, et des motifs de pertinences suivant leurs motivations. Selon Schütz, dans le monde de la vie quotidienne – monde vécu ou monde-vie (Lebenswelt) –, l’action sociale est possible parce que l’acteur agit en vertu de recettes cognitives, par intériorisation de modèles de référence socialement approuvés. Il s’agit de règles qui lui permettent de répondre à des problèmes typiques en recourant à des manières typiques afin d’obtenir des fins typiques. Dans le monde virtuel du jeu, le « stock de connaissances disponible » des acteurs, la connaissance ordinaire intégrée préalable à toute interprétation du monde, est active au même titre que dans le monde réel car il s’y joue pareillement des modèles d’interactions typiques. Le monde-vie du jeu, posant une coexistence de sujets impliqués dans des relations de réciprocité, n’est pas alors différent d’un monde-jeu de la vie.
17L’immersion dans un monde-jeu ne saurait donc se réduire à un vécu illusoire puisqu’elle impulse des situations vécues, intègre des sentiments subjectifs et des dispositions objectives – par conséquent, elle est médiation de sens. Partagé socialement, le monde-jeu s’apparente ainsi au monde de la vie quotidienne, élargissant notre appréhension à propos de cette socialité émergente. Nous pourrions sans doute établir qu’une nouvelle catégorie de joueurs est en train de voir le jour. En effet, il n’est pas inintéressant de voir dans ces être-ensemble et ces « secondes vies » mises en scène par avatars interposés, l’indice d’une socialité dépassant les frontières du ludique (accumulation, gain, mérite) et qui rejoindrait plutôt l’idée d’une simulation de « vie parallèle » se détachant de l’essence temporaire du jeu et s’entremêlant à la vie quotidienne. Il faudrait mentionner à ce propos cette catégorie de jeux vidéo se rattachant à la « simulation ». Simulation biologique, économique ou sociale, ce sont des jeux de gestion dans lesquels les joueurs sont à la tête de cités artificielles, coordonnent la survie d’une espèce animale, ou encore président à la prospérité d’une société où il s’agit d’assigner des tâches sociales à des agents numériques comme en témoignent les social simulation games [7]. C’est à peu près dans la même veine ludique que l’on retrouve les god games [8], sorte de « jeux démiurgiques » où le joueur devient la divinité ou l’entité surnaturelle d’un monde simulé, et se retrouve confronté à façonner le destin d’une civilisation. La prolifération de ces œuvres montre comment l’activité du joueur et le donné socioculturel s’agrègent, voire se dissolvent réciproquement en une aire d’expérience plus vaste. Dans sa théorie du jeu, le psychanalyste Donald Winnicott considère que l’infinie variation du jouer (play) se produit dans une zone intermédiaire où se déploie la capacité créative. En s’interrogeant sur la relation-séparation entre la mère et le bébé, Winnicott va développer une théorie générale de l’expérience humaine où le jeu est une fonction fondamentale de la vie psychologique et sociale du sujet. Pendant la petite enfance, l’omnipotence imaginaire exercée par l’enfant sur son existence dépend de l’illusion qu’entretient sa mère par l’opération de « phénomènes transitionnels », au cours desquels l’enfant ne perçoit que continuité et immédiateté entre ses désirs et leurs réalisations. En s’adaptant aux besoins du bébé, la mère lui fournit l’illusion que ce qu’il crée existe réellement. Pour le petit humain, cet espace d’illusion intermédiaire n’appartient ni à sa réalité intérieure, ni au monde extérieur, c’est une aire d’expérience interstitielle. De façon générale, Winnicott postule que cette aire d’expérience persiste après la séparation avec la mère, dans un nouvel espace intermédiaire entre l’enfant et l’environnement : le jeu, ou l’espace potentiel. Cette aire intermédiaire « subsistera tout au long de la vie, dans le monde d’expérimentation interne qui caractérise les arts, la religion, la vie imaginaire et le travail scientifique créatif » (Winnicott, 1971, p. 49) Plus loin, il écrit que « l’expérience culturelle commence avec un mode de vie créatif qui se manifeste d’abord dans le jeu » (p. 186). Suivant ce raisonnement, nous constatons que le monde-jeu, monde virtuel, n’est jamais tout à fait en dehors puisqu’il est joué et vécu subjectivement dans l’immersion, ni jamais tout à fait en dedans du fait qu’il met en scène des interactions qui sont le produit de schèmes sociaux. L’attitude ludique, en tant que fonction mentale, cristallise donc des matériaux issus des représentations sociales et participe d’une expérience culturelle. En ce sens, les œuvres vidéoludiques permettent la simulation de catégories socioculturelles et font que, dans le jeu, les phénomènes du monde extérieur et ceux qui habitent l’individu s’enchevêtrent, s’associent et se reconfigurent.
18Ceci amène à penser que la conceptualisation du monde-jeu comme « détaché de la vie courante » apparaît insuffisante et qu’il est préférable de le traiter comme un espace où des interactions humaines s’ordonnent dans des situations vécues. Les catégories ludiques doivent se comprendre comme vectrices de processus sociaux, ce que Caillois ne manquait pas de souligner dans son œuvre classique, Les jeux et les hommes, qui portait le jeu dans le champ de la sociologie afin de comprendre les phénomènes de la culture dont il est issu – et que vraisemblablement il participe à élaborer.
Ouverture – Le jeu est un imaginaire en acte
19Il s’est vu au cours de ce qui précède qu’interroger le mode d’existence des jeux à univers persistant, et particulièrement le jeu de rôle en ligne, dépendait systémiquement et ne pouvait se déprendre de la « question sociale ». Le sujet s’incorpore dans l’image perçue à l’écran par son avatar, et se livre à des interactions avec d’autres sujets. Une perspective simmelienne décrirait cette réalité comme un dialogue formel entre les inclinaisons subjectives de l’acteur et les formes d’association sociale où des individus interagissent « les uns avec, pour et contre les autres » (Simmel, 1981, p. 121). Il faut également noter que l’expérience sociale dans le monde-jeu est figurative. Les rapports qu’entretiennent les joueurs à ces espaces comme terres d’une rêverie électronique dans le mouvement incessant et confus des images (Bachelard, 1970, p. 195) suggère une ouverture des perspectives sociologiques. La description de l’attitude ludique demeure cependant interprétative. Penser le jeu revient à construire une idée du jeu, inséparable de l’illusion subjective qui le conçoit et l’active. D’une manière générale, le joueur lui-même s’imagine qu’il joue. Par conséquent, la chose jouée n’existe qu’imaginée et, lorsqu’elle se prête au regard d’un observateur, celui-ci s’imagine le joueur qui s’imagine. En tant que telle, la phénoménalité du jeu ne serait rien d’autre qu’un imaginaire en acte (Henriot, 1989, p. 156). À partir du seuil d’intelligibilité tracé jusqu’ici, une ouverture consisterait en cette prise en compte de la dimension imaginée et imaginaire du ludique. Imaginaire subjectif du joueur, et imaginaire social ou exogène, qui fournit les outils nécessaires pour maintenir le monde du jeu. Le monde virtuel pourrait alors s’entrevoir comme un mésocosme, milieu d’élection d’une expérience sensible exprimant un imaginaire social en gestation, dans l’alignement de ce que Michel Maffesoli exprime en écrivant que « participer au monde du jeu revient à participer au jeu du monde » (Maffesoli, 2008, p. 209).
Bibliographie
Bibliographie
- Bachelard Gaston (1970). Le droit de rêver, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Quadrige », 3e édition, 2007.
- Baudrillard Jean (1981). Simulacres et simulations, Paris, Galilée, coll. « Débats ».
- Beau Frank (éd.) (2007). Culture d’Univers : Jeux en réseau, mondes virtuels, le nouvel âge de la société numérique, Ouvrage collectif coordonné par la FING et le GET/Télécom Paris, Limoges, FYP Éditions.
- Berger Peter & Luckmann Thomas (1966). La construction sociale de la réalité, Paris, Armand Colin, 3e éd., 2003.
- Blin Thierry (1999). Phénoménologie de l’action sociale : à partir d’Alfred Schütz, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques sociales ».
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- Maffesoli Michel (1985). La Connaissance ordinaire. Précis de sociologie compréhensive, Paris, Méridiens Klincksieck.
- Maffesoli Michel (2008). Iconologies : nos idol@tries postmodernes, Paris, Albin Michel, coll. « Essais Doc. ».
- McLuhan Marshall (1968). Pour comprendre les médias, Paris, Seuil, coll. « Points Essais ».
- Mead George H. (1934). L’esprit, le soi et la société, Paris, Presses Universitaires de France, coll. « Le lien social », 2006.
- Merleau-Ponty Maurice (1945). Phénoménologie de la perception, Paris, Gallimard, coll. « Tel ».
- Queau Philippe (1993). Le virtuel : vertus et vertiges, Seyssel, Champ Vallon, coll. « Milieux ».
- Proulx Serge & Latzko-Toth Guillaume (2000). La virtualité comme catégorie pour penser le social : l’usage de la notion de communauté virtuelle, in Sociologie et sociétés, XXXII, 2, Presses de l’Université de Montréal, pp. 99-122.
- Roustan Mélanie (2003). La pratique du jeu vidéo, réalité ou virtualité ?, Paris, L’Harmattan, coll. « Dossiers Sciences Humaines et Sociales ».
- Schütz Alfred (1987). Le chercheur et le quotidien : phénoménologie des sciences sociales, Paris, Méridiens-Klincksieck, coll. « Sociétés ».
- Schütz Alfred (1998). Éléments de sociologie phénoménologique, Introduction et traduction par Thierry Blin, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques sociales ».
- Simmel Georg (1981). Sociologie et épistémologie, Paris, Presses Universitaires de France.
- Simmel Georg (1896-1897). « Comment les formes sociales se maintiennent. », publié en français dans L’Année sociologique, première année, pp. 71-109.
- Winnicott Donald W. (1971). Jeu et réalité : l’espace potentiel, Paris, Gallimard, coll. « Folio Essais ».
- Yee Nick (2007). The Proteus Effect: Behavioral modification via transformations of digital selfrepresentation, Thèse de Ph.D accessible en ligne, permalien : http://www.nickyee.com/pubs/Dissertation_Nick_Yee.pdf.
- Yee Nick (2006). « Introduction to the Role-Playing Series » in Project Daedalus, vol. 4-3, publié en ligne le 6 octobre 2006, permalien : http://www.nickyee.com/daedalus/archives/pdf/4-3.pdf.
Notes
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[*]
Wilfried Coussieu est doctorant en sociologie au Centre d’Étude sur l’Actuel et le Quotidien (CEAQ), Université Paris Descartes, et membre du Groupe de Recherche en Anthropologie du Corps et ses Enjeux (GRACE) et du Groupe de Recherche et d’Etude sur la Technique et le Quotidien (GRETECH). wilfried.coussieu@ceaq-sorbonne.org.
-
[1]
Mémoire pour l’obtention du Master II Recherche en Sociologie, « L’expérience sociale in virtuo, un cas de participation ludique et fictionnelle : le jeu de rôle en ligne », sous la direction du professeur Michel Maffesoli, soutenu en juin 2009 à l’Université Paris V – Sorbonne.
-
[2]
Un acronyme pour Massively-Multiplayer Online Role-Playing Games, ou Jeu de Rôle en Ligne Massivement Multijoueur.
-
[3]
Dans son plus récent communiqué de presse, la société Blizzard Entertainment dévoile pour World of Warcraft un chiffre dépassant les 11,5 millions d’abonnés à travers le monde. Source : http://eu.blizzard.com/fr-fr/company/press/pressreleases.html?081223. Dernier accès le 17 février 2010.
-
[4]
Ce sont les « Maîtres du Jeu », employés par la compagnie du jeu, afin d’assurer une assistance directe, à l’intérieur de l’environnement virtuel. Ils sont aussi considérés comme les médiateurs entre la communauté des joueurs et les développeurs. Voir par exemple, le « Forum des Maîtres de Jeu » de World of Wacraft : <http://forums.wow-europe.com/>.
-
[5]
Le terme est de Georges Balandier et qualifie les ailleurs inventés par l’homme. Voir « L’imaginaire de l’espace », in Le détour : pouvoir et modernité, Paris, Fayard, coll. « L’espace du politique », 1985.
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[6]
Le projet Daedalus. Ces six dernières années, plus de 40 000 joueurs ont participé au projet dont Nick Yee publie régulièrement ses résultats et analyses. Site : http://www.nickyee.com/daedalus/.
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[7]
Voir les créations de Will Wright, à ce jour les plus manifestes du genre, avec The Sims notamment, vendu à plusieurs millions d’exemplaires dans le monde, et plus récemment Spore.
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[8]
Voir la série Populous ou encore Black and White du concepteur Peter Molyneux.