Notes
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[1]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1958, vol. I, p. 49.
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[2]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 73.
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[3]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1958, vol. I, p. 193.
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[4]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1961, vol. II, p. 102.
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[5]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 119.
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[6]
Les similitudes d'approches du quotidien entre De Certeau et Maffesoli, sont en ce sens, plus que remarquables comme l'a reconnu Maffesoli lui-même (voir Maffesoli, Le mystère de la conjonction, Paris, Fata Morgana, 2001, pp. 127-134). Dans les deux cas, la vie quotidienne est pensée comme une affirmation, comme une réappropriation de l'existence. Pour De Certeau, dans la quotidienneté une forme sociale souterraine et subversive est exprimée et sert de résistance face à la coercition du pouvoir. La formulation de De Certeau s'appuie sur la distinction intéressante établie entre stratégies et tactiques. Les tactiques seraient toutes les actions sociales que les stratégies ne pourraient pas contrôler. Avec la notion de tactique une dignité enfouie de l'homme ordinaire serait ainsi récupérée, parfois exilée par la prétendue scientificité du discours sociologique. Le fil conducteur de la conception de De Certeau est analogue à celui de Maffesoli: la modernité impose une logique uniformisatrice qui trouve une résistance dans le quotidien. Mais, comme chez Maffesoli, la sagesse populaire est un antidote, un contrepouvoir, qui témoigne d'une bonne santé sociale étant donné qu'elle possède les ressources nécessaires pour contrecarrer toute idéo- logie dominante. La culture populaire, composée de jeux, de contes et de légendes exprime, à travers la narration, une originalité, une richesse vitale (arts de faire) difficilement limitable par le discours aseptique et technocratique (suite note 6) imposé par la modernité. En somme, les dominés ne sont pas que de simples récep- teurs d'une idéologie dominante, ils ont la faculté de métamorphoser et de dévier de sens une soi-disant idéologie dominante. On peut consulter à ce sujet, Michel De Certeau, L'invention du quotidien, 1. Arts de faire, Paris, Gallimard, 1990, pp. 11- 67. La même idée se retrouve chez Manuel Delgado, El animal público, Barcelone, Anagrama, 1999, pp. 23-58. Dans son cas, l'espace de vie publique de la ville comme reconquête d'une liberté réprimée dans le domaine institutionnel est mis en évidence, ou bien comme dans l'étude classique sur l'éducation des classes travailleuses menée par Paul Willis dans les années soixante-dix. Willis nous montre les ressources dont disposent les enfants de travailleurs pour ne pas être de simples victimes réceptrices et reproductrices d'une idéologie scolaire dominante qui manie des codes extérieurs à la culture populaire, voir Paul Willis, Aprender a trabajar, Madrid, Akal, 1988, pp. 139-228.
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[7]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, 1998, p. 152.
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[8]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, vol. I, L'Arche, 1958, p. 78.
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[9]
Sur ce point je renvoie à Walter Benjamin, surtout les thèses X et XII dans Sur le concept d'histoire : Écrits français, Paris, Gallimard, 1991, pp. 344-345.
-
[10]
Michel Maffesoli, L'instant éternel, Paris, Denoël, 2000, p. 81.
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[11]
Michel Maffesoli, La Conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 18.
-
[12]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 73.
-
[13]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 84.
-
[14]
Edgar Morin, El cine o el hombre imaginario, Barcelona, Paidós, 2001, pp. 30-37.
-
[15]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 98.
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[16]
Gilbert Durand, La imaginación simbólica, Buenos Aires, Amorrortu, 1971, p. 47.
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[17]
Gilbert Durand, Las estructuras antropológicas de lo imaginario, Madrid, Taurus, 1981, pp. 406-409.
-
[18]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 94.
-
[19]
Michel Maffesoli, La transfiguration du politique. La tribalisation du monde, Pa- ris, Livre de Poche, 1992, pp. 29-42.
-
[20]
Michel Maffesoli, Au creux des apparences. Pour une éthique de l'esthétique, Pa- ris, Plon, 1992, p. 109.
-
[21]
Émile Durkheim, Las formas elementales de la vida religiosa, Madrid, Akal, 1982, pp. 387-414.
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[22]
Edgar Morin, El Método III, Madrid, Cátedra, 1998, pp. 167-184.
-
[23]
Cornelius Castoriadis, La institución imaginaria de la sociedad, Barcelona, Tusquéts, vol. II, 1989, pp. 213-219.
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[24]
Mircea Eliade, El mito del eterno retorno, Madrid, Alianza, 2000, pp. 135-156.
« Les gens ne trouvent plus leur âme personnelle et adoptent la première âme de groupe quise présente à eux etquileur déplaît le moins »
1 Le débat sur l'aliénation
1Selon Henri Lefebvre, Marx a analysé l'aliénation qui se produisait dans la sphère productive mais il n'a fait que pressentir son énorme projection dans le domaine du quotidien.Voilà donc ce qui fait concevoir à cet auteur la quotidienneté comme une prolongation de l'aliénation qui se manifeste déjà dans le domaine de la production. Selon Lefebvre, le besoin d'élargir le concept d'aliénation à des espaces apparemment éloignés du productif serait dû à la reconnaissance de l'imbrication existant entre la sphère du travail et les domaines sociaux qui lui sont externes, ce qui serait, d'autre part, une caractéristique sociologique fondamentale dans une nouvelle phase de développement du système capitaliste. De ce point de vue, aucun espace social de fuite ou de résistance n'a sa place face à une vie qui apparaît séquestrée en tant que telle. « Le loisir apparaît ainsi comme le non-quotidien dans le quotidien. On ne peut sortir du quotidien. Le merveilleux ne se maintient que dans la fiction et l'illusion consentie. Il n'y a pas d'évasion. Cependant, l'on désire avoir aussi proche que possible – à portée de la main si possible – l'illusion de l'évasion. Illusion qui ne sera pas entièrement illusoire, mais constituera un « mundo » à la fois apparent et réel – réalité de l'apparence et apparence du réel autre que la quotidienneté et cependant aussi largement ouvert et aussi inséré en elle que possible. On travaille ainsi pour gagner des loisirs, et le loisir n'a qu'un sens : sortir du travail. Cercle infernal» [1].
2Dans la construction théorique de Lefebvre un présupposé est présent : l'idéologisation généralisée qui imprègne et manipule le quotidien. L'attachement des individus à l'ordre social obéirait donc à la transmission d'une idéologie dominante, à la diffusion d'une représentation chimérique du monde dans laquelle les contradictions internes sont cachées. Ainsi donc, la critique du quotidien chez Lefebvre est introduite dans l'analyse du rôle joué par les massmedia dans la vie sociale. La vie quotidienne est donc vue comme un espace d'évasion encouragé de façon intéressée par une culture de masses idéologique. La publicité inciterait une consommation symbolique d'images destinée à conformer des styles de vie régulés qui favoriseraient l'attachement des sujets à l’ordre social dominant. À partir de ce fait, on comprend mieux la fausse liberté, l'illusoire satisfaction résultant d'une insatisfaction préalable, générée par la division sociale du travail et la domination de classe. « Si tel publicitaire lie à la représentation d'un pot de yaourt celle de la santé, tel autre opérant pour une autre marque liera la même image à celle de “velouté”. Qui se prononcera ? Le consommateur. Manipulé, il aura une petite marge de liberté : il choisira. Le “choisir” se représente dans le quotidien comme une valeur que la manipulation ne détruit pas mais exalte [2].
3» Le quotidien serait privé d'originalité, de créativité, d'inventivité, de traduction de désirs selon cette perspective. On lui ôte son expressivité, on relègue la figure du quotidien et on le force unilatéralement à la passivité. Le monde du quotidien est supposé absorber sans entraves les représentations du monde imposées par les détenteurs du pouvoir économique et qui coagulent facilement dans les consciences des dominés. Dans ce contexte, pour Lefebvre, la science dialectique se transformerait en méthode critique d'analyse de la réalité sociale et permettrait une connaissance démystificatrice de la logique du quotidien. Pour ce faire, il faudrait faire appel à la notion de totalité hégélienne, outil théorique destiné à nier et à dépasser la fausse conscience qui assume le réel de façon connaturelle : « Le mécanisme ou l'organisme social cessent d’être compréhensibles à ceux qui y participent et l'entretiennent par leur travail. Les hommes sont ce qu'ils font et pensent d'après ce qu'ils sont. Et cependant ils ignorent ce qu'ils font et ce qu'ils sont. Leur propre œuvre, leur propre réalité leur échappent [3].
4» En raison de ce qui vient d'être dit, et toujours selon Hegel, la théorie, pour Lefebvre, est donc toujours imprégnée d'un compromis de transformation, elle est contemplée comme ayant un lien très étroit avec la praxis. Le savoir est associé, indubitablement à une action consécutive. Pour ces raisons, la critique possède, implicitement, une composante éthique, elle oblige à agir pour métamorphoser la réalité et la transformer. « La connaissance, indissociable de la pratique ou de la praxis, développe un programme de transformation. Connaître la quotidienneté, c'est vouloir la transformer [4].
5» À partir d'une conception sociale différente, Michel Maffesoli réfute la proposition de Lefebvre qui contemple le quotidien comme une source univoque d'aliénation. En fait, Maffesoli pense que la catégorie d'aliénation possède des résonances judéo-chrétiennes et de ce fait, son assomption impliquerait une conception de la nature du social à partir d'un vice théologique au départ duquel une existence aliénée impliquerait un état de manque d'être, d'incomplétude. L'illustration serait en ce sens, une métamorphose séculaire de la philosophie de l'histoire judéo-chrétienne qui mondainisant le sens de l'histoire voudrait matérialiser historiquement un paradis rédempteur et réconciliateur regretté dans lequel la négativité caractéristique d'un état d'aliénation serait totalement dépassée. Cependant, Maffesoli soutient que dans ce projet illustré une linéalité historique s'impose, qu'une perverse unidirectionnalité du monde séquestre l'expérience présente.
6La théorie de l'aliénation de source hégélienne-marxiste, cas de Lefebvre, serait fondamentalement réformiste, elle viserait à l'amélioration éthique du monde, elle serait destinée à construire un meilleur futur. Assumer qu'une aliénation généralisée colonise la vie sociale débouche sur l'urgence de modifier moralement la quotidienneté, sur l'introduction d'un devoir-être dans le monde de l'être. À partir d'une position diamétralement opposée, Maffesoli part d'un autre présupposé : la fausseté d'une éthique de l'existence ou, ce qui revient au même, l'incompatibilité irrésolue de l'être et du devoir-être dans la vie sociale. D'où, son emphase réitérée à aborder le quotidien en se dégageant de catégories valorisantes, en essayant de le comprendre tel qu'il est et non comme il devrait être prétendument.
7En dernier lieu, la conception du quotidien pour Maffesoli part du discrédit de toute absoluité possible d'une perfection historique, de l'impossibilité d'un dépassement résolutoire de l'aliénation, du caractère inévitable de la contradiction pour le propre devenir de la vie. Chez Maffesoli, l'optimisme historique illustré devient scepticisme face à une réalisation historique définitive où l'ambiguïté, la polysémie et la contradiction sont évitées. L'incompatibilité des lectures sur le quotidien entre Lefebvre et Maffesoli est similaire à celle existant entre Marx et Nietzsche, entre le tragique et le dramatique, entre la délégation de la liberté dans un projet de futur et l'affirmation d'un présent qui embrasse l'instant comme plénitude de vie. En somme, la différence entre Lefebvre et Maffesoli c'est que le premier cherche à transcender l'incomplétude, tout ce qui est paradoxal, tandis que le second cherche à enrichir la vie acceptant qu'apprendre à vivre sans dieux passe par le refus de toute instance de plénitude lointaine où la vie présente est hypothéquée. Un activisme politique qui part d'une mutilation préalable de la vie face à une passivité tragique, esthétique et individualiste de l'existence qui souhaite donner un sens au présent – et non pas se réconcilier avec lui – à partir de l'assomption d'un scepticisme face à tout idéal de futur. « La perfection est dans le donné mondain une contradiction dans les termes. Et la dialectique, dont on connaît l'importance dans la pensée du XIXe et du XXe siècle, la dialectique qui est dynamisée par la négation n'est en fin de compte que la forme profonde de la théodicée, toutes les deux postulant un sens, un terminus ad quem et un terminus a quo. On peut dire encore, pour reprendre métaphoriquement le discours de la mystique, que le diable est l'esprit qui dit toujours non, alors que le dieu est toujours affirmation [5].
8» Maffesoli entend que la théorie de l'aliénation présuppose une passivité des masses, qu'elle accepte que les dominés ne soient que de simples récepteurs passifs de l'idéologie dominante transmise à travers les différents canaux institutionnels. Cependant, cette version du social ne prend pas en compte la créativité, l'invention, le génie des masses face aux contraintes qui sont exercées sur elles. Michel de Certeau, comme Maffesoli, utilise la notion de ruse pour qualifier cette particulière façon d'opérer inscrite dans le quotidien [6]. Au lieu de supercherie généralisée, il existerait curieusement, une sagesse dissidente qui accepte un double jeu de la réalité, qui trouve ses racines dans le scepticisme et est donc, par définition, incroyante et cynique. Son champ d'action c'est la clandestinité par rapport à l'institutionnel, fonctionnant comme une rumeur sourde, souterraine, puisque sa propre survie dépend justement de cette invisibilité. Sagesse qui, d'autre part, ne devrait pas être interprétée de façon erronée comme conservatrice. La catégorie de puissance vitale proposée par Maffesoli est, à cet égard, très éclairante : l'organicité d'un vouloir vivre des masses face à la domination et à l'administration de la vie collective. Ainsi, dans différents contextes de la vie quotidienne, cette puissance sociale agirait comme une réplique subversive face à l'exercice du pouvoir.
9D'autre part, selon Maffesoli, la critique de la culture de masses, identifiée à une simple apparence sociale, reposerait sur une métaphysique de l'authenticité illusoire. Les prises de position, entre autres, de Guy Debord, Adorno et Horkheimer, et on pourrait inclure Lefebvre, reposeraient sur une nostalgie d’un idéal de perfection, variante particulière de déité ou d'absolu à partir de laquelle on catalogue ce qui est insignifiant, spectaculaire, de monde faussé. Le reproche fait au monde de l'image véhiculé à travers la culture de masses poursuit, en dernier lieu, une fausse authenticité. D'où, l'impossibilité de dépasser les apparences. « Ainsi le spectacle est faiblesse, certes, dans le sens ou il ne permet pas la domination généralisée du productivisme, il est toujours ce hiatus irrationalis qui fait éclater le désordre dans un processus linéaire, il est pluriel et a de multiples facettes. Vouloir le supprimer, ou espérer le dépasser, c'est vouloir l'accomplissement parfait et clos d'un donné essentiellement incohérent [7].
10» En définitive, selon Maffesoli, pour ce type de critique on continue à prendre comme référent un modèle de devoir-être incompatible avec la nature de la vie quotidienne. De plus, la critique prétend s'effectuer à partir d'une localisation privilégiée toujours éloignée du monde, sans se rendre compte que la vie et la pensée de la cohérence évoluent sur des voies différentes. La vie se vit mais elle ne se conçoit pas à partir de catégories conceptuelles ou d'illusoires justifications d'apriorismes. Et pourtant, la critique de l'image en tant qu'apparence est effectuée à partir d'une posture prétendument absolue, éloignée et séparée de la vie. Pour finir, un rationalisme intellectualiste serait sous-jacent dans ce type de critique.
2 Modernité ou Postmodernité : projet de futur ou apologie du présent
11En syntonie avec l'esprit de la modernité, dans la position de Lefebvre il y a un compromis éthique et politique avec la naissance d'un homme nouveau. Lefebvre prétend dépasser une quotidienneté aliénante avec comme référent une réconciliation finale de l'homme avec son mode d'existence. Dans sa pensée, la construction d'un idéal politique est donc indubitablement présent et dans lequel les contradictions provoquées par la division sociale du travail et la domination de classes se dissolvent. Son modèle de critique de la vie qotidienne aspire, tel un idéal régulateur kantien, à l'obtention d'un homme total, à la réalisation future d'un rêve humaniste et heureux d'avenir. Ce référent sert de support à une critique qui conçoit le quotidien comme une imperfection, comme une inauthenticité qui requiert un dépassement inévitable. Attitude totalement moderne qui imprime une direction et une finalité historique au présent et lui donne tout son sens. « L'avance, le progrès dans l'humain ne prennent sens (c'est-à-dire à la fois signification et direction) que par la notion de l'homme total. Chaque moment de l'histoire, chaque étape historiquement atteinte constitue un tout ; de même chaque activité partielle, chaque pouvoir pratiquement conquis ; chaque moment contient aussi son grain de réalité humaine, qui se dégage et apparaît au cours du développement ultérieur. En même temps l'homme total est une limite à l'infini [8]. » Maffesoli utilise les catégories de drame et de tragédie pour opposer deux conceptions différentes de la quotidienneté. La modernité est dramatique alors que la postmodernité est tragique. La conceptualisation du quotidien pour Lefebvre serait dramatique puisqu'elle prétendrait atteindre une résolution historique absolue et définitive des contradictions sociales. Par contre, Maffesoli entend le social à partir d'une perspective tragique, c'est-à-dire acceptant le caractère irrésolu et consubstantiel de la contradiction sociale. La distinction antérieure implique de plus, des ébauches opposées pour la conception de la temporalité historique. La pensée marxiste est, sauf exceptions [9], pleinement moderne car elle place toujours le présent dans une tension de futur. La postmodernité, en revanche, doute de n'importe quel type de futurisation historique et privilégie de ce fait, un vécu intense de l'instant présent comme révélateur d'une réappropriation de l'existence. Il s'agirait d'une position sceptique possédée en même temps d'une dimension tragique qui, sans se réconcilier avec le monde, assume le présent et refuse tout type de proposition messianique et morale où l’être et le devoir-être coïncident. La récupération d'une vitalité du présent implique, dans cette perspective une reconquête de la vie. « En effet, le propre du « présentéisme » est, justement, de vivre d'une manière plus globale, c'est-à-dire en ne considérant pas qu'il y a des choses importantes et d'autres qui ne le sont pas [10].
12» De cette façon, selon Maffesoli, le discrédit des macrorécits, ceux qui proposaient des finalités historiques lointaines et futures, laisse la place à une effervescence culturelle de microrécits locaux et dégagés de toute dimension d'avenir et qui assument à nouveau le vécu de l'instant présent dans toute sa plénitude vitale. La logique de l'identité se transforme en une logique émergente de l'identification. À l'unicité du projet moral, politique et idéologique d'antan se substitue bricolage fragmentaire micromythologique qui accueille une pluralité d'identités sociales régies par des liens d'affinité et d'identification de type émotionnel, proxémique et empathique. D'où, selon Maffesoli, le fait que nous assistions à une importante mutation culturelle consistant en une transfiguration du politique en socialités tribales, ce qui nous révélerait un retour du réprimé par la modernité, de ce qui est archaïque, symbolique et mythologique. Par le biais de cette floraison bariolée néotribale, s'exprimerait une affirmation de la vie, un irrésistible vitalisme social opposé aux contraintes et aux impératifs imposés par la modernité, en somme une tentative de reconquête d'une souveraineté disparue à cause des projets idéologiques totalisateurs, des constructions de futur. Pour lui, voilà en quoi consisterait la nature de la culture postmoderne : « Empiriquement, il semble que l'Individu, l'Histoire et la raison laissent, peu ou prou, la place à la fusion affectuelle s'incarnant au présent autour d'images com-munielles » [11].
3 Le statut de l'imaginaire : mystification idéologique ou rêverie créatrice
13Dans le troisième volume de sa Critique de la vie quotidienne, publié en 1981, Lefebvre établit un lien entre l'évolution de la vie quotidienne au cours des dernières décades et les changements survenus, parallèlement, dans le système économique capitaliste. La nouveauté serait due à l'implantation d'une industrie de la culture qui, suscitant la consommation, provoque un style de vie normalisé et aligné sur la logique du capital. De cette manière, un ensemble manipulé de fausses nécessités serait créé dont l'objectif serait de susciter une consommation programmée qui encourage d'illusoires satisfactions vitales et, revers de la médaille, contribue à fixer les individus à leur place dans la structure sociale. La reproduction de l'ordre social passe donc, par une sorte de séduction médiatique qui, utilisant des représentations symboliques, vise l'aquiescement sans failles des dominés. Cette stimulation de la consommation, adressée particulièrement à une classe moyenne consolidée et désidéologisée s'effectue au travers d'une publicité qui utilise des micromythologies planifiées mais qui, en même temps, dissimule, intentionnellement, la domination de classe qui existe dans la société. À partir de cette constatation, l'imaginaire acquiert une importance particulière. Le monde de l'imaginaire, composé de rêves et de fantaisies se transformerait en exigence que la consommation médiatique encouragerait afin d'essayer de séduire les individus. « Le quotidien se réduirait à sa continuité réversible si cette unidimensionalité ne s'interrompait perpétuellement pour laisser place aux songes, aux rêves, aux fantasmes, à tout ce que l'on nomme “l'imaginaire”, mais surtout aux “scènes” dont on sait qu'elles le purgent par une catharsis élémentaire ; un peu comme les crises classiques purgeaient l'économie des éléments excédentaires [12].
14» Le quotidien, pour Lefebvre, est un reflet d'un mercantilisme généralisé qui absorbe tout le tissu social, c'est un espace dans lequel l'inertie et la routine s'emparent finalement de la vie. D'où surgit, par conséquent, le besoin d'évasion sociale, de fuite ou de transgression d'un quotidien asphyxiant et claustrophobe. L'imaginaire prend une importance particulière dans cette évasion, car un monde désenchanté et chosifié appelle l'exigence de chimères, de fictions, de transfigurations. Cependant, de l'avis de Lefebvre, la proposition d'évasion, d'altérité que renferme l'imaginaire, renforce, à la fin, la propre conservation fonctionnelle de la réalité quotidienne à laquelle on pensait apparemment échapper. La fonctionnalité sociale de l'imaginaire est ainsi politique, puisque sa raison d'être est contemplée à partir d'une étroite imbrication par rapport à une domination sociale préexistante. L'imaginaire devient alors la mystification, la dissimulation et la légitimation des contradictions sociales. « Comment ne pas se retourner vers les mythes pour mettre un peu d'ombres fraîches dans cette luminosité impitoyable ? Comment ne pas avoir recours à l'imaginaire, aux résurgences du passé historique, à la fiction évocatrice d'autres vies et de choses différents ? Plus le “réel” s'affirme et se clôt devant nous, plus le présent devient imaginaire, plus on le charge de fictions peu crédibles : contes, rêves, utopies, en enrichissant d'apparences l'actuel [13].
15» Pour Maffesoli, cependant, l'imaginaire est une dimension consubstantielle au social. Se basant sur l'œuvre de Morin, Le cinéma ou l'homme imaginaire, il nous dévoile la facette de fiction qui accompagne toujours le réel. L'apport de Morin, avec sa conception du double jeu [14] de la vie sociale nous permettrait selon lui de comprendre l'imaginaire qui colore le quotidien comme une altérité, comme un dédoublement de l'identité qui servirait de résistance face aux contraintes et aux coercitions qui sont exercées sur l'individu. De ce point de vue, l'imaginaire acquiert un statut fondamental dans la vie des sociétés. « Il n'est pas étonnant que l'on ait pu qualifier la religion d'“opium du peuple”. Fondées sur le fantastique, sur l'imaginal, le fictionnel, les représentations religieuses ne peuvent en aucun cas favoriser un développement progressiste et productiviste qui atteint son acmé au XIXe siècle. Dès lors, il est normal que tous ceux qui fondent leur espoir sur ce progressisme, quelles que soient leurs divergences sur les étapes ou les modulations de celui-ci, ceux-là, donc, se méfient de tout ce qui peut l'entraver [15].
16» Gilbert Durand [16] montra comment ces courants de pensée qui sous-évaluaient l'imaginaire le faisaient toujours au nom d'un étroit paradigme rationaliste incapable d'aborder la manière particulière qu'a l'homme d'affronter son destin existentiel. Maffesoli, influencé par Durand, entend l'imaginaire comme un archétype structurateur de la réalité sociale, comme une constante anthropologique qui se concrétise et se réactualise dans la vie quotidienne. Même si l'imaginaire est une fiction qui se présentifie dans le réel, sa nature, cependant, renverrait à des structures anthropologiques profondes et quasitranscendantales qui s'enracineraient dans un archaïsme sous-estimé, de façon simplificatrice, par la modernité.
17De fait, nous pourrions nous demander, interrogeant en même temps Lefebvre, si le magnétisme de certains imaginaires utilisés par la publicité afin de provoquer des identifications sociales séductrices par le biais de la suggestion de stéréotypes ne renvoie pas nécessairement à une dimension plus profonde, dense, fondatrice, archétypique qui les dote d'efficacité. Sans une condition préalable archétypale, sans une demande préalable ancrée dans des structures anthropologiques transhistoriques, certains imaginaires encouragés par la société de consommation, s'enracineraient difficilement dans l'ordre de la projection du désir des individus. La notion d'archétype ouvre donc une perspective complexe et innovatrice pour la compréhension de la domination sociale. La thèse marxiste classique de l'idéologie dominante nous apparaît donc maintenant simplificatrice. Il faudrait démontrer que des modèles de vie proposés par une culture dominante finissent par cristalliser dans la conscience sociale quand ils se greffent sur des images archétypiques et que sans cela, ils se solidifient difficilement dans la quotidienneté. Force est de reconnaître, pour Maffesoli, que l'imaginaire imprègne le quotidien de fiction. D'où le besoin de réinterpréter le statut de l'onirique dans la vie collective comme signe d'un retour du réprimé par un programme illustré qui l'avait évincé au profit d'une raison asceptique. Mais il faut aussi souligner que, selon lui, l'imaginaire ne peut jamais être évalué à partir d'un modèle intellectualiste de vérité qui se base sur le critère de correspondance ou de représentation digne de foi du réel, étant donné que sa nature est liée à la vérité de la croyance. Durand avait déjà souligné, à cet égard, que la vérité de l'imaginaire a un rapport avec le besoin de recherche de sens, avec une conception tragique de l'existence humaine condamnée à affronter le temps et la mort [17].
18En ce sens, pour Maffesoli, la vie est toujours prioritaire à la pensée et pour cela la quotidienneté se raccroche toujours à des convictions et à des préjugés jamais intellectualisés ou problématisés, mais qui ne doivent pas pour autant être sous-estimés. On ne peut concevoir l'imaginaire, la rêverie, comme faux qu'à partir d'une supposée localisation extérieure à la vie « Au-delà d'une pulsion rationalisatrice et positiviste qui postule “la vérité ne nous échappera pas”, on peut dire que le réel fictionnel de tous les jours ou la fiction surréaliste reposent tout ou partie sur les mensonges auxquels l'individu décide de croire. Plutôt que d'affronter la vérité qui dans sa forme ultime est la mort par le biais du mensonge [18].
19» On pourrait parler, selon Maffesoli, de monde imaginal, instance qui, en se localisant dans le domaine de la représentation mythique-symbolique, permet de rendre compte de l'observance d'un ordre social par les individus [19]. Monde imaginal qui garde une étroite relation avec l'image puisque l'image – le matériel – nous renverrait à l'imaginal – l'immatériel. En même temps, l'image serait garante du maintien du lien social, elle aurait la faculté de fonder et de recréer une socialité [20]. Ainsi, grâce à elle, on constituerait une coparticipation à un sacrement de l'identité, dans lequel l'intégration symbolique des différents groupes sociaux se réaffirme, de la même façon qu'Émile Durkheim exprimait que la religion renforçe l'intégrité et la cohésion sociale [21]. L'imaginaire, à travers l'image, relie, c'est le continent d'accueil d'une multiplicité d'identités sociales.
20En somme, Maffesoli ne trace pas une ligne catégorique entre le matériel et l'idéal, entre la réalité et le rêve. Pour lui, l'homme, mais aussi les sociétés, comme ont pu le souligner entre autres Morin [22] et Castoriadis [23] sont demens, c'est-à-dire qu'ils ont besoin de mythes qui servent d'aliment existentiel de sens pour le tissu social. Les sociétés se forment aussi à partir de leurs rêves, de leurs fantaisies afin de faire face, stratégiquement, à la précarité de l'existence. Revenant ainsi à notre point de départ, Maffesoli affirme que l'imaginaire devrait être entendu comme une expression de résistance individuelle et sociale devant toute sorte d'imposition externe, comme une fissure dans le monde unidimensionnel caractéristique de la modernité. Il est donc une source potentielle d'invention et d'ouverture de possibilités de réalité non matérialisées dans un monde résigné et désenchanté. L'imaginaire, quand l'idéal politique d'une société achevée est devenu motif de méfiance, se transforme en hiatus interstitiel qui, face au pouvoir, nous permet de réenchanter la vie. Il vivifierait et enrichirait ainsi, à travers la créativité propre de l'imagination, les expectatives de réalité d'une quotidienneté inerte. En somme, il nous permettrait une véritable esthétisation de l'existence.
21Pour conclure, et revenant à l'étude comparative, il faudrait distinguer deux niveaux dans l'approche de l'imaginaire. Un premier niveau superficiel, qui se transforme en objet d'étude pour Lefebvre, où l'imaginaire est contemplé comme une fuite suscitée par la logique du système capitaliste. Et un deuxième niveau, plus profond et que Lefebvre n'aborde pas, qui l'enracine dans une condition anthropologique quasi transcendantale dont l'entité sort des marges d'une genèse socio-historique. Lefebvre se situe dans le premier niveau tandis que Maffesoli, lui, se place dans le deuxième. Évidemment, une relation de continuité existe entre les deux niveaux, étant donné que l'évasion imaginaire fomentée et suscitée par le capitalisme est ancrée dans une dimension anthropologique archétypale liée à une demande universelle d'abolition de la temporalité quotidienne. Cependant, l'analyse du premier niveau ne va jamais jusqu'au bout de la fécondité socio-anthropologique de l'imaginaire. Le système capitaliste encourage, en effet, des évasions chimériques planifiées, mais, en plus, il faut reconnaître une condition rêveuse de l'être humain qui le pousse à une transcendance du réel pour pouvoir affronter, citant Eliade [24], la pression de l'historique et qui n'a pas besoin d'être fomentée nécessairement par la logique du système capitaliste. Une inhérente faculté de créer des mythes pour, de cette façon, s'installer durablement dans une sorte d'irréalité s'inscrit dans l'idiosyncrasie de l'être humain. Ce dédoublement du réel dans l'imaginaire ne devrait pas être interprété, légèrement, comme une simple expression d'aliénation. Au contraire, on pourrait très bien le définir comme une rêverie créatrice de l'existence et qui échappe à la gestion de la vie que le pouvoir prétend toujours exercer.
22Au lieu de juger de façon critique, comme le fait Lefebvre, une transfiguration du réel factice et planifiée qui pousserait à la consommation, il serait plus fécond de reconnaître l'impossibilité de survie pour n'importe quel système social sans une évasion contrôlée, qui n'est donc pas le patrimoine du système capitaliste. Ce qui impliquerait, en dernier lieu, d'élargir l'horizon de la critique à la façon dont la modernité a institué une rationalisation totalisatrice et mutilatrice de l'existence, pour ainsi dévoiler la contradiction sans solution qui existe entre la constitution de la vie moderne et la possibilité d'épanouissement de la fantaisie.
Bibliographie
Bibliographie
- BENJAMIN, Walter (1972). Sur le concept d'histoire: Écrits français. Paris : Gallimard, 1991.
- CASTORIADIS, Cornelius (1975). La institución imaginaria de la sociedad, Barcelona :Tusquets, vol. II, 1989.
- DE CERTEAU, Michel (1980). L'invention du quotidien, 1. Arts de faire. Paris : Gallimard, 1990.
- DELGADO, Manuel (1999). El animal público. Barcelona : Anagrama, 1999.
- DURAND, Gilbert (1960). Las estructuras antropológicas de lo imaginario. Madrid : Taurus, 1981. (1964). La imaginación simbólica. Buenos Aires : Amorrortu, 1971.
- DURKHEIM, Émile (1912). Las formas elementales de la vida religiosa. Madrid : Akal, 1982.
- ELIADE, Mircea (1951) El mito del eterno retorno, Madrid, Alianza, 2000.
- LEFEBVRE, Henri (1958) Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, vol. I,1958. (1961) Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, vol. II, 1961. (1981) Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, vol. III, 1981.
- MAFFESOLI, Michel (1979). La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quotidienne, Paris : Desclée de Brouwer, 1998. (1988). El tiempo de las tribus. El declive del individualismo en las sociedades de masas. Madrid : Icaria, 1990. (1990). Au creux des apparences. Pour une éthique de l'esthétique. Paris : Plon, 1992. (1992) La transfiguration du politique. La tribalisation du monde. Paris : Grasset, 1992. (1997) Le mystère de la conjonction. Paris : Fata Morgana, 1997. (2000) L'instant éternel, Paris : Denoël, 2000.
- MORIN, Edgar (1956). El cine o el hombre imaginario, Barcelona : Paidós, 2001. (1986). El Método III. Madrid : Cátedra, 1988.
- NIETZSCHE, Friedrich (1873). Sobre verdad y mentira en sentido extramoral. Madrid : Tecnos, 1994.
- WILLIS, Paul (1978). Aprendiendo a trabajar. Madrid : Akal, 1988.
Notes
-
[1]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1958, vol. I, p. 49.
-
[2]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 73.
-
[3]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1958, vol. I, p. 193.
-
[4]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1961, vol. II, p. 102.
-
[5]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 119.
-
[6]
Les similitudes d'approches du quotidien entre De Certeau et Maffesoli, sont en ce sens, plus que remarquables comme l'a reconnu Maffesoli lui-même (voir Maffesoli, Le mystère de la conjonction, Paris, Fata Morgana, 2001, pp. 127-134). Dans les deux cas, la vie quotidienne est pensée comme une affirmation, comme une réappropriation de l'existence. Pour De Certeau, dans la quotidienneté une forme sociale souterraine et subversive est exprimée et sert de résistance face à la coercition du pouvoir. La formulation de De Certeau s'appuie sur la distinction intéressante établie entre stratégies et tactiques. Les tactiques seraient toutes les actions sociales que les stratégies ne pourraient pas contrôler. Avec la notion de tactique une dignité enfouie de l'homme ordinaire serait ainsi récupérée, parfois exilée par la prétendue scientificité du discours sociologique. Le fil conducteur de la conception de De Certeau est analogue à celui de Maffesoli: la modernité impose une logique uniformisatrice qui trouve une résistance dans le quotidien. Mais, comme chez Maffesoli, la sagesse populaire est un antidote, un contrepouvoir, qui témoigne d'une bonne santé sociale étant donné qu'elle possède les ressources nécessaires pour contrecarrer toute idéo- logie dominante. La culture populaire, composée de jeux, de contes et de légendes exprime, à travers la narration, une originalité, une richesse vitale (arts de faire) difficilement limitable par le discours aseptique et technocratique (suite note 6) imposé par la modernité. En somme, les dominés ne sont pas que de simples récep- teurs d'une idéologie dominante, ils ont la faculté de métamorphoser et de dévier de sens une soi-disant idéologie dominante. On peut consulter à ce sujet, Michel De Certeau, L'invention du quotidien, 1. Arts de faire, Paris, Gallimard, 1990, pp. 11- 67. La même idée se retrouve chez Manuel Delgado, El animal público, Barcelone, Anagrama, 1999, pp. 23-58. Dans son cas, l'espace de vie publique de la ville comme reconquête d'une liberté réprimée dans le domaine institutionnel est mis en évidence, ou bien comme dans l'étude classique sur l'éducation des classes travailleuses menée par Paul Willis dans les années soixante-dix. Willis nous montre les ressources dont disposent les enfants de travailleurs pour ne pas être de simples victimes réceptrices et reproductrices d'une idéologie scolaire dominante qui manie des codes extérieurs à la culture populaire, voir Paul Willis, Aprender a trabajar, Madrid, Akal, 1988, pp. 139-228.
-
[7]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, 1998, p. 152.
-
[8]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, vol. I, L'Arche, 1958, p. 78.
-
[9]
Sur ce point je renvoie à Walter Benjamin, surtout les thèses X et XII dans Sur le concept d'histoire : Écrits français, Paris, Gallimard, 1991, pp. 344-345.
-
[10]
Michel Maffesoli, L'instant éternel, Paris, Denoël, 2000, p. 81.
-
[11]
Michel Maffesoli, La Conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 18.
-
[12]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 73.
-
[13]
Henri Lefebvre, Critique de la vie quotidienne, Paris, L'Arche, 1981, vol. III, p. 84.
-
[14]
Edgar Morin, El cine o el hombre imaginario, Barcelona, Paidós, 2001, pp. 30-37.
-
[15]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 98.
-
[16]
Gilbert Durand, La imaginación simbólica, Buenos Aires, Amorrortu, 1971, p. 47.
-
[17]
Gilbert Durand, Las estructuras antropológicas de lo imaginario, Madrid, Taurus, 1981, pp. 406-409.
-
[18]
Michel Maffesoli, La conquête du présent. Pour une sociologie de la vie quoti- dienne, Paris, Desclée de Brouwer, 1998, p. 94.
-
[19]
Michel Maffesoli, La transfiguration du politique. La tribalisation du monde, Pa- ris, Livre de Poche, 1992, pp. 29-42.
-
[20]
Michel Maffesoli, Au creux des apparences. Pour une éthique de l'esthétique, Pa- ris, Plon, 1992, p. 109.
-
[21]
Émile Durkheim, Las formas elementales de la vida religiosa, Madrid, Akal, 1982, pp. 387-414.
-
[22]
Edgar Morin, El Método III, Madrid, Cátedra, 1998, pp. 167-184.
-
[23]
Cornelius Castoriadis, La institución imaginaria de la sociedad, Barcelona, Tusquéts, vol. II, 1989, pp. 213-219.
-
[24]
Mircea Eliade, El mito del eterno retorno, Madrid, Alianza, 2000, pp. 135-156.