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Article de revue

Processus attentionnels et apprentissage moteur

Pages 71 à 83

Introduction

1Les théories cognitives considèrent que l’apprentissage moteur est un processus qui se déroule en une succession d’étapes que l’apprenant franchit. Le modèle le plus souvent cité dans cette perspective est celui de Fitts & Posner (1967) décrivant l’apprentissage selon 3 stades. Le premier correspond au stade cognitif consistant à réaliser un mouvement à partir d’une représentation consciente élaborée par l’apprenant. L’apprenant cherche à mettre en action cette représentation et mobilise son attention a fin d’ajuster chacun de ses gestes aux contraintes de la situation. Le système cognitif n’étant pas efficient dans le contrôle et la régulation des mouvements, il est contraint de réduire ce contrôle ce qui induit un gel de certaines articulations, une imprécision et une lenteur de mouvements. Le coût cognitif de ce contrôle est très élevé et toute l’attention de l’apprenant est centrée sur la tâche.

2Le second stade d’apprentissage est le stade associatif. L’apprenant a résolu la plupart des problèmes cognitifs tels que se représenter la tâche, son objectif et l’enchaînement des différents mouvements qui la constitue ou bien déterminer les informations sensorielles importantes pour sa réalisation. Il maîtrise les patrons moteurs nécessaires aux mouvements et acquiert la capacité à détecter et corriger certaines erreurs au cours du mouvement. L’apprentissage consiste alors à optimiser le mouvement en modifiant progressivement ses caractéristiques motrices (activations musculaires, cinématique) et spatiales.

3Enfin le stade autonome est atteint après une quantité suffisante de pratique variant en fonction de la nature de la tâche à réaliser. Ainsi l’atteinte du niveau expert dans l’apprentissage du slalom sur simulateur de ski ne nécessiterait que 6 h 30 réparties sur 13 semaines (Nourrit et al., 2003) alors que la maîtrise complète d’une activité sportive réclamerait 7 à 15 ans de pratique à raison de plusieurs heures par semaine (Baker et al., 2003). Ce stade est caractérisé par des mouvements précis, peu variables et automatiques. Cette automatisation des mouvements permet de libérer l’expert d’un contrôle cognitif volontaire. Fitts & Posner (1967) suggèrent qu’à ce stade toute verbalisation pendant l’action détériore les performances. L’athlète cherche à améliorer d’autres éléments que l’exécution du geste tels que les aspects stratégiques et stylistiques (Larue & Ripoll, 2004).

4Un tel modèle sous-entend que la sollicitation des processus attentionnels diminue avec l’apprentissage. La suite de cet article discutera cette hypothèse au regard des recherches actuelles. Après avoir défini le construit d’attention, cette revue de question cherchera à déterminer comment sont mobilisées les ressources attentionnelles au cours de l’apprentissage puis comment elles peuvent être orientées grâce aux consignes ou de l’aménagement de la situation. En fin, les modèles explicatifs de ces résultats seront présentés.

Définition de l’attention

5Historiquement, l’apparition du construit d’attention est contemporaine de celle de la psychologie expérimentale et trouve ses origines dans la phénoménologie (Abernethy, 2001). La définition la plus couramment citées en psychologie est celle de James (1890) qui définit l’attention comme « la prise de possession par l’esprit, sous une forme claire et vive, d’un objet ou d’une suite de pensées parmi plusieurs qui semblent possibles. Focalisation, concentration, conscience font partie de son essence. Elle implique le retrait de certains objets a fin de traiter plus efficacement les autres ». Cette définition associe l’attention à la prise de conscience mais s’avère insuffisante au regard des travaux qui lient l’attention à des processus automatiques (Schneider & Shiffrin, 1977) ou à l’apprentissage implicite (Rowland & Shanks, 2006 ; Shanks et al., 2005). La définition proposée par Posner & Boies (1971) consistant à identifier 3 aspects dans l’utilisation du terme d’attention semble plus exhaustive. Ces auteurs proposent de dissocier : (1) l’attention en tant que système d’alerte, qui correspond au développement et au maintien d’une vigilance optimale a fin de réagir ; (2) l’attention en tant que ressource limitée, que les recherches étudient en demandant aux sujets de diviser leur attention entre 2 tâches concurrentes ; (3) l’attention sélective qui renvoie à des processus préférentiels d’encodage de certaines informations.

L’attention : une ressource limitée

6Les processus attentionnels peuvent tout d’abord être appréhendés grâce au paradigme de la double tâche, consistant à imposer au sujet l’exécution de 2 tâches simultanées. Ce paradigme part du postulat que les capacités attentionnelles sont limitées et que le sujet les répartit entre une tâche principale et une tâche secondaire (tâche généralement considérée comme moins importante telle que réagir le plus vite possible à un stimulus). Si la tâche principale sollicite les processus attentionnels, l’ajout d’une tâche secondaire entraînera une dégradation de la tâche principale. À l’inverse, si la tâche principale est automatisée et ne nécessite pas d’attention, l’ajout de la tâche secondaire ne modifiera pas son exécution (Abernethy, 2001).

Capacités attentionnelles et expertise

7Leavitt (1979) est le premier auteur à avoir utilisé le paradigme de la double tâche dans le cadre de l’activité physique. Des joueurs de hockey, débutants ou expérimentés, devaient slalomer avec le palet tout en identifiant la forme de figures géométriques s’affichant sur un écran placé à la fin du slalom. Les résultats montrent que cette tâche d’identification ne modifie pas les performances des joueurs expérimentés mais affecte celles des débutants. Leavitt (1979) suggère donc une réduction de l’attention portée aux mouvements avec l’expertise.

8De la même manière, Smith & Chamberlin (1992) ont étudié l’importance des processus attentionnels au cours de la réalisation d’un slalom au football. Les sujets de différents niveaux (novice, intermédiaire ou expert) dribblaient entre des plots en identifiant ou non des formes géométriques. Les résultats obtenus sont similaires à ceux de Leavitt (1979) et révèlent que l’ajout d’une tâche d’identification augmente le temps de parcours pour les sujets novices ou intermédiaires mais pas pour les experts. Un résultat similaire a été trouvé par Parker (1981) dans le cadre du netball. L’ensemble de ces recherches montre que le coût attentionnel diminue avec la pratique et semble confirmer le modèle de Fitts et Posner (1967).

9Néanmoins, la tâche secondaire et la tâche principale sont exécutées dans la même modalité sensorielle, i.e. la vision. Or, l’ajout d’une tâche secondaire peut provoquer une interférence de structure. L’interférence de structure est causée par l’utilisation simultanée d’une structure commune tels qu’un effecteur (ex : siffler et chanter) ou un récepteur sensoriel (ex : regarder le slalom et l’écran placé au loin) (Abernethy, 2001). Les résultats qui viennent d’ être présentés pourraient donc refléter une différence dans les capacités à compenser une interférence de structure et non une gestion différenciée des capacités attentionnelles. Il restait donc à prouver que les novices souffrent bien d’une interférence des capacités attentionnelles qui intervient parce que leurs ressources attentionnelles sont insuffisantes à la réalisation des deux tâches simultanées.

Modification des capacités attentionnelles ou interférence de structure ?

10Afin de trancher entre ces deux hypothèses, Beilock et al. (2004) ont présenté la tâche secondaire dans la modalité auditive. Des sujets experts ou débutants réalisaient un putt de golf vers des cibles placées à différentes distances. Ce putt était réalisé dans deux conditions distinctes : (a) les sujets devaient se concentrer sur leur putt et (b) au cours de chaque putt les sujets devaient détecter le plus vite possible la présence d’un son issu d’un enregistrement sonore. Les résultats montrent une interaction entre l’expertise et la tâche : les sujets novices sont plus précis dans la première condition au cours de laquelle ils doivent se concentrer sur le mouvement, alors que les sujets experts ont de meilleures performances dans la seconde condition de double tâche. Ces résultats confirment donc le modèle de Fitts & Posner (1967) puisqu’ils montrent que l’expertise se traduit donc par une économie attentionnelle et que les performances des experts sont dégradées lorsqu’ils se concentrent sur leur mouvement (Beilock & Carr, 2004). L’automatisation des mouvements pourrait être responsable de cette économie attentionnelle et, si tel était le cas, l’économie serait spécifique à l’habileté acquise.

Économie attentionnelle des experts : processus général ou spécifique ?

11Beilock et al. (2002) ont tenté de déterminer si cette réduction de l’attention portée au mouvement est liée au niveau d’expertise dans l’habileté ou résulte d’une amélioration générale des capacités attentionnelles. Ainsi, des sujets droitiers, experts ou novices en football, effectuaient un slalom avec le pied droit ou gauche. Les dribles étaient réalisés (a) en situation de double tâche (détecter le plus vite possible un son issu d’un enregistrement sonore) ou (b) en se concentrant sur le côté du pied en contact avec le ballon. Il est ` a noter que les sujets experts rapportent tous avoir plus de difficultés avec leur pied gauche, ce qui conduit les auteurs à postuler que les mouvements sont automatisés uniquement avec le pied droit. Les résultats montrent que l’effet de la tâche additionnelle varie selon le pied utilisé. Ainsi, pour les slaloms réalisés avec le pied droit, les résultats sont semblables à ceux déjà cités (Beilock et al., 2004 ; Beilock & Carr, 2004) puisque le temps de parcours est plus court chez les débutants lorsqu’ils se concentrent sur la tâche alors qu’il est plus court chez les experts en situation de double tâche. Toutefois, les résultats diffèrent pour les slaloms réalisés avec le pied gauche. Ainsi, quel que soit le niveau des joueurs, le temps de parcours est plus court lorsque les sujets se concentrent sur la tâche par rapport à la situation de double tâche. Ces résultats suggèrent que la demande attentionnelle varie en fonction du niveau de l’apprenant pour l’habileté concernée. Les experts ne développeraient donc pas une capacité générale d’économie attentionnelle mais une capacité spécifique à la tâche ou au membre utilisé. Les auteurs font l’hypothèse que le fait de porter son attention sur le mouvement conduit à une régulation explicite du mouvement qui dégraderait la performance des habiletés automatisées. Cette hypothèse sera discutée ultérieurement.

L’attention : un processus de sélection de l’information

12Selon Posner & Boies (1971), le construit d’attention englobe également les processus de sélection qui permettent d’encoder les informations nécessaires à la réalisation des mouvements. Pour étudier cette attention sélective, les chercheurs orientent l’activité des sujets par le biais de consignes comme dans les recherches de Beilock et collaborateurs dans lesquelles les auteurs demandaient aux sujets de se concentrer sur leurs mouvements. La première recherche révélant les effets de la focalisation attentionnelle sur l’apprentissage a été réalisée par Wulf et al. (1998). Les sujets apprenaient à utiliser un simulateur de ski pendant 2 jours consécutifs à raison de 8 essais de 90 s par jour. Les sujets étaient répartis en 3 groupes : (a) un groupe contrôle sans consigne particulière, (b) un groupe avec une consigne de focalisation interne consistant à diriger l’attention sur leurs mouvements (i.e. exercer une force sur le pied extérieur) et (c) un groupe avec une consigne de focalisation externe visant à diriger l’attention sur les effets produits par les mouvements (i.e. exercer une force sur les roues du simulateur). L’analyse des résultats était centrée sur l’amplitude des mouvements qui s’accroît avec la pratique. Les résultats montrent qu’à la fin du deuxième jour de pratique, le groupe adoptant une focalisation externe obtient de meilleures performances que le groupe contrôle qui a lui-même de meilleures performances que le groupe utilisant une focalisation interne. Lors du test de rétention réalisé le lendemain, les sujets sans consigne ou utilisant une focalisation interne ne se différencient plus mais présentent une amplitude de mouvement inférieure à celle du groupe adoptant une focalisation externe. Cette recherche montre donc que la focalisation attentionnelle modifie les performances mais également l’apprentissage.

13Ce bénéfice de la focalisation externe sur les performances a été retrouvé dans de nombreuses activités [cf. Wulf (2007) pour une revue]. Ainsi, la focalisation externe permet d’améliorer l’équilibre sur un stabilomètre (Wulf et al., 1998). Elle accroît également la précision des putts de golf (Wulf et al., 1999), des tirs au panier au basket (Zachry et al., 2005), des lancers de fléchettes (Marchant et al., 2005, 2007) et des tirs au but au football (Wulf et al., 2003a). En fin, la focalisation externe permet d’améliorer la hauteur d’un saut (Wulf et al., 2007b). Toutefois, Poolton et al. (2006) ne retrouvent pas cet effet. Ainsi, ils montrent dans une tâche de putt au golf que la focalisation attentionnelle ne modifie pas les performances au cours de 10 blocs de 30 essais. Il faut toutefois préciser que le trou à atteindre était situé à 2 m alors qu’il était à 15 m dans le recherche de Wulf et al. (1999).

14Les recherches concernant les effets de la focalisation attentionnelle sur l’apprentissage sont moins nombreuses et unanimes que celles portant sur les performances. L’apprentissage peut être évalué par le biais d’un test de transfert ou de rétention. Par exemple, Poolton et al. (2006) ont utilisé un test de rétention (conditions semblables à celles de la pratique mais après introduction d’un délai et sans instruction donnée aux sujets) et le paradigme de la double tâche comme test de transfert (les sujets effectuaient leur putt tout en dénombrant le nombre de sons cible présents dans une bande sonore). Les résultats ne révèlent aucune différence entre les focalisations attentionnelles pour le test de rétention alors que la focalisation externe augmente le nombre de putts réussis lors du test de transfert. En revanche, Totsika & Wulf (2003) montrent les bénéfices de la focalisation attentionnelle externe sur l’apprentissage du « pédalo ». Après 20 essais où ils apprenaient à avancer sur un « pédalo », les sujets étaient exposés à la même tâche sous pression temporelle ou à une tâche de transfert consistant à pédaler à l’envers. Les résultats montrent que la focalisation externe favorise l’apprentissage du pédalo quelque soit le test utilisé. En fin, Wulf (2007) et Wulf et al. (2003a) étudient les effets de la focalisation attentionnelle sur les tests de rétention et de transfert dans une tâche de tirs au but. Le test de rétention était réalisé sans consigne et le test de transfert différait de la tâche apprise par le fait que les sujets devaient frapper une balle en mouvement au lieu d’une balle fixe. Les résultats révèlent que la focalisation attentionnelle ne modifie pas la précision des tirs lors de la pratique ou du test de rétention. En revanche, la focalisation externe permet d’accroître la précision des tirs dans la tâche de transfert.

15Comment expliquer cette divergence de résultats ? Wulf (2007) a émis l’hypothèse que la difficulté de la tâche doit être élevée pour que les bénéfices d’une focalisation externe apparaissent. Ainsi, les divergences entre Poolton et al. (2006) et Wulf et al. (1999) sur une même tâche de golf s’expliqueraient par une différence de difficulté de la tâche. Lorsque la difficulté augmente, soit par l’augmentation de la distance (15 m pour Wulf contre 2 m pour Poolton), soit par l’introduction d’une double tâche (test de transfert de Poolton), les bénéfices de la focalisation externe se manifestent. De même, dans les recherches de Wulf (2007) et Wulf et al. (2003), l’utilisation d’une balle en mouvement lors du test de transfert augmente la difficulté de la tâche et favoriserait les sujets utilisant une focalisation externe. Pour démontrer cette hypothèse, Wulf et al. (2007a) ont étudié les effets de la focalisation attentionnelle en fonction de la difficulté de la tâche. Les sujets devaient se maintenir en équilibre sur une surface solide ou en mousse. Les résultats montrent que la focalisation attentionnelle ne modifie pas la posture sur une surface solide. En revanche, sur une surface en mousse l’équilibre est plus difficile (i.e. les oscillations posturales sont plus élevées) et l’amplitude des oscillations posturales est plus faible avec une focalisation externe qu’avec une focalisation interne. Cette recherche révèle donc que l’effet de la focalisation attentionnelle n’apparaît que si la difficulté de la tâche est élevée.

Focalisation attentionnelle et expertise

16L’ensemble des résultats présentés suggère que la focalisation externe est favorable à la performance et l’apprentissage. Wulf et al. (2001b) ont alors testé l’hypothèse selon laquelle l’expertise permettrait de détecter les bénéfices d’une focalisation externe et conduirait à une utilisation préférentielle de cette focalisation. La tâche des sujets consistait à se maintenir en équilibre sur un stabilomètre oscillant dans le plan médio-latéral tout en regardant droit devant eux. Le premier jour, les sujets alternaient à chaque essai entre les focalisations externe et interne, consistant respectivement à se concentrer sur des marques tracés sur le stabilomètre ou sur leurs pieds. À la fin de la journée, 10 sujets sur 17 choisirent d’utiliser une focalisation interne pour l’entraînement du lendemain. Le troisième jour comportait un test de rétention durant lequel les sujets étaient à nouveau libres d’utiliser la focalisation attentionnelle qu’ils désiraient. Les résultats montrent que 12 sujets sur 17 choisissent une focalisation externe et sont alors plus stables que les sujets utilisant une focalisation interne. Ces résultats suggèrent donc que la pratique favorise l’utilisation de la focalisation externe.

17Cette hypothèse a été testée par Perkins-Cecatto et al. (2003) avec des golfeurs experts (Handicap moyen de 4 au Royal Canadian Golf Association) ou moins expérimentés (Handicap moyen de 26) réalisant des putts vers des cibles placées entre 10 et 25 m. Les sujets ne disposaient d’aucune connaissance des résultats car leur vision était occultée lorsque le club entrait en contact avec la balle. En condition de focalisation interne, les joueurs devaient porter leur attention sur la forme de leur swing et ajuster leur force à la distance requise. En condition externe, les joueurs pensaient a `placer la balle le plus près possible de la cible. A fin de s’assurer de leur focalisation, les joueurs évaluaient sur une échelle en 5 points leur force (condition interne) ou leur précision (condition externe). Les résultats révèlent que la focalisation attentionnelle ne modifie pas la précision des putts mais influence leur variabilité : une variabilité réduite apparaît avec une focalisation externe pour les experts et interne pour les joueurs moins expérimentés. Ces résultats montrent que les bénéfices d’une focalisation externe se manifestent exclusivement chez les experts. Cette divergence avec les travaux antérieurs aurait plusieurs origines. Tout d’abord, contrairement aux expériences précédentes, les sujets ne disposaient pas de la connaissance de leurs résultats et évaluaient subjectivement leurs performances. Malheureusement les auteurs ne présentent pas ces évaluations. Il est donc impossible de rejeter l’hypothèse selon laquelle l’augmentation de la variabilité en condition externe serait liée à une mauvaise évaluation de la précision de leurs gestes. Ensuite, la focalisation interne exhorte les sujets à se concentrer à la fois sur leur technique et sur la force du swing alors que la focalisation externe ne porte que sur une conséquence du mouvement (la précision de la balle). Cette multiplicité des focalisations en interne pourrait être responsable des bénéfices observés chez les joueurs moins expérimentés qui ont besoin d’améliorer leur technique pour progresser (Wulf et al., 2000). En fin, lors de la focalisation externe, les joueurs focalisaient sur la cible qui est un élément lointain par rapport à leurs gestes. Cette distance de focalisation pourrait empêcher la mise en place d’un lien entre la performance et le mouvement annulant ainsi les effets de la focalisation attentionnelle externe. Cette dernière hypothèse sera discutée ultérieurement dans l’article.

18L’influence de la focalisation attentionnelle selon le niveau des pratiquants a également été étudiée par Wulf et al. (2002) dans une tâche de service au volley-ball. Les sujets étaient totalement novices ou savaient déjà servir. Contrairement aux recherches précédentes, la focalisation attentionnelle n’était pas induite par les consignes mais par le biais des feedbacks donnés aux sujets. Les résultats montrent que la focalisation externe améliore la précision et également la manière d’exécuter le service. Il est toutefois possible de reprocher aux auteurs de ne pas avoir pris de réels experts dans la discipline. Cette lacune a été comblée par la recherche de Wulf & Su (2007) dans le cadre du golf. Des joueurs experts (handicap moyen de 1,3) devaient atteindre une cible placée à 15 m en utilisant une focalisation interne (se concentrer sur leur bras), externe (se concentrer sur leur club) ou sans consigne particulière (condition contrôle). Les résultats montrent que la focalisation externe améliore la précision des putts par rapport aux deux autres conditions qui ne se différencient pas. Ces résultats suggèrent donc que les bénéfices de la focalisation externe apparaissent à tous les niveaux de l’apprentissage. On peut néanmoins postuler que cet effet doit disparaître pour les experts de très haut niveau qui géreraient de manière optimale leurs gestes. En effet, Wulf (2007) a étudié l’effet de la focalisation attentionnelle sur la posture chez des acrobates du Cirque du Soleil qui devaient se tenir sur un demi cercle en caoutchouc. Cette posture était réalisée dans trois conditions de focalisation attentionnelle : (a) sans consigne (condition contrôle), (b) interne (se concentrer sur leurs pieds) ou (c) externe (se concentrer sur le demi-cercle). Les résultats montrent que l’amplitude des oscillations posturales des acrobates est environ 50 % inférieure à celle de sujets novices (ce qui démontre l’expertise) et que leur fréquence d’oscillation est plus grande. De plus, les fréquences d’oscillations des acrobates se réduisent par rapport à la condition contrôle lorsqu’ils portent leur attention sur leurs pieds (interne) ou sur le demi-cercle (externe). Ces résultats suggèrent que la posture est automatisée et que tout forme d’attention portée aux mouvements la dégrade. Les auteurs concluent alors que la focalisation externe ne procure aucun avantage si les stratégies de contrôle sont entièrement automatisées.

Hypothèses explicatives des effets de la focalisation attentionnelle

19Quelle peut être l’origine des effets de la focalisation attentionnelle ? L’ensemble des résultats qui viennent d’ être présentés a été interprété de manières distinctes. La première hypothèse dite des « processus conscients »est soutenue par Masters (1992), Poolton et al. (2006) et Beilock et al. (2002). Elle postule qu’une chute de la performance se manifeste lorsqu’un individu porte son attention sur le mouvement et favorise les traitements explicites. La seconde hypothèse dite de « l’action contrainte »a été présentée par Wulf et al. (2001a). Elle suppose que la focalisation interne interfère avec les processus de contrôle sous-jacents aux mouvements et dégrade ainsi la performance. La suite de cet article présentera les arguments à l’appui de ces deux hypothèses.

L’hypothèse des « processus conscients »

20La première hypothèse qui sera développée est celle des « processus conscients ». Elle se situe dans la lignée des travaux de Fitts & Posner (1967) et d’Anderson (1982, 1993). Ces modèles postulent que l’acquisition des habiletés transite d’une mémoire déclarative vers une mémoire procédurale. Chez les débutants, les habiletés seraient majoritairement acquises selon un mode explicite. La mémoire de travail serait sollicitée pour guider pas à pas les mouvements au cours de leur exécution et les sujets accumuleraient des règles explicites sur la structure sous-jacente des habiletés qu’ils sont en train d’apprendre. Ces acquisitions explicites sont souvent renforcées par l’attitude des enseignants qui expliquent à leurs élèves la technique à utiliser. Chez les experts, une régulation des mouvements par la mémoire procédurale se mettrait en place. Elle permet un apprentissage implicite caractérisé par : (1) une automatisation des mouvements, (2) un faible accès conscient aux règles de fonctionnement et (3) une réduction de la sollicitation de la mémoire de travail permettant de libérer l’attention des experts pour d’autres tâches. Il s’ensuit que ces acquisitions sont beaucoup plus résistantes à des éléments perturbateurs tels que le stress ou la pression extérieure (Masters & Maxwell, 2004).

21Quels sont les arguments soutenant cette hypothèse ? Les premiers arguments visant à révéler la distinction entre les processus explicites et implicites d’apprentissage ont été fournis par Liao & Masters (2001). Lors de l’apprentissage du tennis de table, les performances d’un groupe ayant des instructions explicites sur la technique du coup droit ont été comparées à celles d’un groupe apprenant de manière implicite. La nature implicite de cet apprentissage résultait de la réalisation d’une double tâche (génération aléatoire de lettres) qui surchargeait la mémoire de travail des sujets et les empêcher de s’engager dans des stratégies conscientes d’apprentissage. Après plusieurs blocs de pratique (250 –300 tentatives), les sujets étaient testés lors de tests de transfert consistant à compter à rebours ou à réaliser la tâche en situation d’évaluation (situation de stress). Les résultats révèlent que : (1) le groupe ayant un apprentissage explicite est capable de restituer plus de règles sur les mouvements qu’ils viennent de réaliser que le groupe implicite ; (2) les performances du groupe explicite chutent lorsqu’on les place en situation de stress ou en condition de double tâche alors qu’elles n’évoluent pas si l’apprentissage est implicite et (3) une corrélation entre la performance prédite par les sujets et leur performance réelle apparaît pour le groupe explicite alors qu’elle est nulle pour le groupe implicite. Cette absence de corrélation montre que les sujets du groupe implicite n’ont aucun accès conscient à des règles leur permettant de prédire l’adéquation de leur mouvement à la tâche et donc que l’apprentissage est bien implicite. En conséquence, cette recherche révèle que même chez des débutants, l’apprentissage moteur peut être implicite.

22Chez les novices comme chez les experts, l’apprentissage implicite semble plus efficace que l’apprentissage explicite. Ainsi, Wulf & Weigelt (1997) ont étudié l’apprentissage sur un simulateur de ski avec des sujets qui recevaient ou non des instructions explicites sur le mouvement à réaliser. Il faut toutefois noter que les informations explicites exhortaient les sujets à « exercer une force sur la plateforme », ce qui pouvait être difficile à comprendre pour les sujets. Les résultats montrent que l’apprentissage est meilleur pour le groupe sans instruction et notamment en situation stressante. Cette supériorité de l’apprentisage implicite serait révélée lors de situations stressantes (Masters, 1992) ou de fatigue (Masters et al., 2008).

23Cette hypothèse explicative suppose également que les apprentissages implicites et explicites ne sont pas utilisés au même moment de l’apprentissage. L’ensemble des résultats sur les doubles tâches étayent cette hypothèse puisqu’ils montrent que les experts sont moins perturbés que les novices par la double tâche (Beilock et al., 2002, 2004 ; Leavitt, 1979; Parker, 1981; Smith & Chamberlin, 1992) et que l’attention portée au mouvement dégrade les performances des experts et favorise celles des novices (Beilock et al., 2002). Dans d’autres recherches, Beilock & Carr (2001, 2004) ont étudié les capacités de mémorisation en fonction de l’expertise. Ils postulent que si les experts utilisent un apprentissage implicite, ils devraient ressentir des difficultés à décrire ce qu’ils viennent de faire. Pour ce faire, des sujets novices ou experts (handicap moyen inférieur à 8) effectuaient des putts vers des cibles placées à différentes positions. De manière inattendue, les auteurs demandaient aux sujets d’imaginer qu’un ami vient d’arriver et de lui décrire leur dernier putt avec suffisamment de détails pour qu’il puisse le reproduire. Les résultats révèlent que les sujets experts rapportent moins d’étapes dans la réalisation de leur précédent putt que les sujets novices. Ils révèlent donc bien une régulation des mouvements par la mémoire procédurale et l’absence de mémorisation consciente des mouvements.

24Toutefois, il est difficile nier que les experts basculent sur un mode explicite lorsqu’ils cherchent volontairement à améliorer leur performance. Pour mettre expérimentalement en évidence ce phénomène, Beilock & Carr (2004) ont demandé aux sujets de réaliser leurs putts avec un club atypique c’est à dire ayant un poids arbitraire et une forme en S. Les résultats montrent que chez les experts uniquement la nature du club modifie la précision des putts (le club atypique dégrade les performances) et le souvenir des mouvements. Ainsi lorsque le club est atypique, les experts rapportent plus d’étapes sur leur mouvement que les novices alors que les résultats sont inversés pour un club ordinaire. L’ensemble de ces résultats suggère que (1) les novices et les experts utilisent spontanément un apprentissage respectivement explicite ou implicite et (2) l’originalité du club contraint les experts à basculer sur un contrôle explicite de leurs gestes qui dégrade leurs performances mais accroît la représentation consciente qu’ils ont de leurs mouvements. Ce résultat peut être assimilé à l’hypothèse de « dé-automatisation » introduite par Deikman (1969) qui consiste à supprimer l’automatisation des mouvements en portant l’attention sur les actions et les perceptions (Ford et al., 2005). Dans le cadre de la dissociation implicite/explicite, Masters (1992) utilise le terme de « réinvestissement » qui réfère à la propension à manipuler des savoirs explicites conscients en utilisant la mémoire de travail a fin de contrôler les mouvements.

25Selon l’hypothèse des « processus conscients », la focalisation attentionnelle, qu’elle soit interne ou externe, entraîne un réinvestissement et le passage à un contrôle explicite. Une consigne de focalisation externe conduit le sujet à porter son attention sur une seule source d’information qui est extérieure au sujet. En revanche, une consigne de focalisation interne conduirait le sujet à porter son attention sur des informations internes mais également sur des éléments extérieurs lié au fait que ces derniers sont saillants. La focalisation interne entraînerait alors une surcharge des processus attentionnels en mémoire de travail. Or, Maxwell et al. (2000) ont montré chez des golfeurs débutants qu’une surcharge de la mémoire de travail (consécutive à une double tâche de génération aléatoire de lettres) est associée à une réduction des performances et de l’apprentissage. La chute des performances associée à la focalisation interne pourrait alors s’expliquer par la surcharge en mémoire de travail induite par cette focalisation.

26Cette surcharge de la mémoire de travail liée à une focalisation interne a été mise en évidence par Wulf et al. (2001a) dans une tâche d’équilibre sur un stabilomètre. Les sujets maintenaient leur équilibre grâce à une focalisation interne ou externe et réalisaient en parallèle une seconde tâche consistant à réagir le plus vite possible à un signal auditif. Les résultats montrent que le temps de réaction est plus élevé lorsque les sujets utilisent une focalisation interne suggérant que l’attention accordée au contrôle de la posture est plus importante. Toutefois, ces auteurs interprètent ce résultat différemment de Masters et collaborateurs puisqu’ils l’utilisent comme argument pour démontrer l’hypothèse de « l’action contrainte ».

L’hypothèse de « l’action contrainte »

27La seconde hypothèse, dite de « l’action contrainte », permettant d’expliquer les effets de la focalisation attentionnelle a été présentée par Wulf et al. (McNevin & Wulf, 2002; Wulf et al., 2001a, 2001b). Elle suppose que lorsque les sujets focalisent leur attention sur leurs mouvements (i.e. utilisent une focalisation interne), ils tentent consciemment d’intervenir dans les processus de contrôle qui régulent la coordination de leurs mouvements. Ce contrôle actif perturbe de manière involontaire les processus automatiques qui assurent l’efficience du mouvement et conduisent à une dégradation des performances et de l’apprentissage.

28À l’inverse, la focalisation externe promeut un fonctionnement naturel et le système moteur s’auto organise sans être contraint par les processus conscients. Les mouvements s’exécutent de manière rapide, inconsciente et automatique et ne sont régulés que par l’atteinte du résultat désiré. Cette régulation des mouvements par le but désiré est efficace si l’on s’appuie sur les théorisations de Prinz (1997). Il postule l’existence d’une représentation commune entre l’action et la perception. Les représentations joueraient alors un rôle crucial car elles permettent de planifier et de contrôler les actions sur la base des conséquences sensorielles attendues. Selon cette théorie, la focalisation externe améliorerait les performances et l’apprentissage en favorisant la prise d’informations afférentes et la régulation du mouvement sur la base de ces informations (Wulf et al., 1998; Wulf & Prinz, 2001).

29Comme il l’a été vu précédemment, la focalisation attentionnelle varie avec l’expertise. Les débutants utilisent souvent une focalisation interne et tenteraient de réguler consciemment leurs mouvements pour plusieurs raisons : (1) à cause de leur inexpérience, les apprenants sont peu sûr d’eux-mêmes et tentent de contrôler leurs mouvements a fin de l’exécuter correctement ; (2) les consignes des enseignants visent à développer une régulation interne en mettant l’accent sur les gestes à exécuter et (3) les risques de chutes ou l’appréhension conduisent à réduire volontairement les degrés de liberté du système moteur a fin de réduire ces risques. Avec l’expertise, les individus automatisent leurs mouvements et les régulent au moyen d’une focalisation externe. Plusieurs arguments permettent d’étayer cette hypothèse de « l’action contrainte ».

Focalisation externe et contrôle automatique

30Tout d’abord, Wulf postule que la focalisation externe promeut un mode de contrôle plus automatique que la focalisation interne. Le premier argument en faveur de cette hypothèse a déjà été présenté précédemment et correspond au fait que la focalisation interne a un coût attentionnel élevé (Wulf et al., 2001a). Toutefois, contrairement à l’hypothèse de Masters & Maxwell (2004) selon laquelle la focalisation interne renforce la récupération des réafférences sensorielles, Wulf et al. (2001a) suggèrent que le contrôle volontaire des gestes serait responsable de la surcharge attentionnelle et par conséquent de l’augmentation du temps de réaction de la tâche secondaire.

31Le second argument démontrant le caractère automatique du contrôle des mouvements provient d’analyses sur la fréquence des mouvements d’ajustement, ces analyses étant réalisées à l’aide de ce qui est appelé la « transformée de Fourier rapide ». Cette transformée de Fourier rapide permet de déterminer la fréquence dominante dans le pattern des oscillations étudiées. Une fréquence dominante élevée (i.e. 6 Hz) indique que les ajustements posturaux sont rapides et de faible amplitude alors qu’une fréquence dominante faible (i.e., 2 Hz) révèle des ajustements plus lents et amples et suggère un gel volontaire des degrés de liberté. Wulf et al. (2001a) ont ainsi calculé la fréquence d’oscillation grâce à la transformée de Fourier rapide alors que les sujets tentaient de se maintenir en équilibre sur un stabilomètre. Les résultats montrent que la fréquence dominante est plus élevée pour une focalisation attentionnelle externe que pour une focalisation interne. Ce résultat a été confirmé par McNevin et al. (2003). Il conforte donc l’hypothèse d’une ingérence dans les processus automatiques de contrôle du mouvement.

32Les auteurs ont ensuite cherché à déterminer si cette interférence apparaissait au niveau musculaire. Pour ce faire, Vance et al. (2004) ont enregistré l’activité électromyographique lors d’un soulèvement de poids grâce à une flexion de l’avant-bras droit. Les sujets devaient ?ramener vers eux une barre initialement placée à 90 en utilisant une focalisation interne (se concentrer sur leur bras) ou externe (se concentrer sur la barre). Les résultats révèlent que l’activité électromyographique du biceps et du triceps est moins importante avec une focalisation externe qu’avec une focalisation interne et donc que cette dernière implique un recrutement plus important d’unités motrices. Toutefois, la vitesse et l’amplitude des mouvements étant identique dans les 2 conditions, les auteurs concluent que les mouvements sont exécutés de manière plus économique avec une focalisation externe. Ces résultats confirment ainsi le caractère naturel et automatique des mouvements exécutés avec une focalisation externe.

Focalisation externe et détournement de l’attention

33Selon l’hypothèse de « l’action contrainte », la focalisation externe ne consiste pas à détourner l’attention du sujet d’une focalisation interne mais induit un bénéfice à elle seule. Wulf & McNevin (2003) ont donc suggéré que la focalisation attentionnelle externe ne peut pas être associée à un simple effet de distraction envers la tâche. Pour ce faire, ils ont comparé, dans une tâche d’équilibre sur un stabilomètre, les effets des focalisations interne ou externe et ceux d’une simple distraction consistant à répéter une histoire à haute voix. Les résultats montrent que la focalisation externe conduit à un meilleur apprentissage que la distraction ou la focalisation interne ; de plus, l’importance de l’apprentissage pour ces deux dernières conditions ne se différencie pas l’une de l’autre. Ce résultat perdure même si la distraction est supprimée. Il montre donc que porter son attention sur le mouvement n’est pas plus efficace que penser à autre chose. La focalisation attentionnelle externe ne consiste donc pas à détourner l’attention du mouvement mais permettrait de récupérer des informations nécessaires à l’apprentissage.

34Wulf et al. (2000) ont réalisé une recherche avec des sujets débutants au tennis pour déterminer quelle focalisation externe serait optimale lors de la réalisation d’une action. Plusieurs focalisations externes ont été utilisées : (a) focalisation sur un antécédent du mouvement : les sujets devaient se concentrer sur la trajectoire de la balle avant qu’elle entre en contact avec la raquette ; (b) focalisation sur une conséquence du mouvement : ils se concentraient sur la trajectoire de la balle après qu’elle ait quitté la raquette. Les résultats révèlent que la précision des coups droits lors du post-test réalisé le lendemain de la pratique est plus faible si les sujets focalisent sur un antécédent du mouvement. L’apprentissage est donc meilleur lorsque les sujets focalisent sur une conséquence du mouvement. Ces résultats valident l’hypothèse de Prinz (1997) selon laquelle la focalisation externe favorisait la prise d’informations afférentes et la régulation du mouvement sur la base de ces informations.

35En fin, le dernier argument soutenant l’hypothèse d’un bénéfice lié exclusivement à la focalisation externe est l’effet de la distance de focalisation découvert par McNevin et al. (2003) lors d’une tâche d’équilibre sur un stabilomètre. Différentes focalisations externes étaient induites grâce à des marqueurs placés sur le stabilomètre : les sujets portaient leur attention sur les marqueurs situés juste devant leurs pieds (focalisation externe proche) ou entre leurs pieds (focalisation externe lointaine et à l’intérieur) ou de part et d’autre de leurs pieds (focalisation externe lointaine et à l’extérieur). Ces focalisations ont été comparées à une focalisation interne. Les résultats montrent que la focalisation interne conduit à de moins bonnes performances que l’ensemble des focalisations externes. Toutefois, les focalisations externes lointaines (qu’elles soient à l’intérieur ou à l’extérieur) améliorent l’équilibre par rapport à la condition de focalisation externe proche des pieds. Il semblerait donc que l’élément pertinent soit la distance par rapport au corps et non l’extériorité de la focalisation. Dans le cadre de l’équilibre sur un stabilomètre, la focalisation externe est efficace même si elle se situe à 1 m du sujet (Wulf, 2007). Toutefois, la distance optimale de focalisation varierait avec l’expertise. Ainsi, Castaneda & Gray (2007) ont montré que les débutants ont besoin d’informations relatives à la tâche alors que les experts bénéficient plus d’une focalisation sur des éléments externes lointains.

« Processus conscients »ou « action contrainte » ?

36Parmi l’ensemble des travaux sur les processus attentionnels, deux recherches ont tenté de trancher entre les deux hypothèses explicatives des effets de la focalisation. Ainsi, Ford et al. (2005) demandaient à des sujets expérimentés (en moyenne 13 ans de compétition ou joueurs semi professionnels) ou moins expérimentés (pratiquant uniquement pour le plaisir depuis leur jeune âge) de réaliser un slalom en football dans 4 conditions : (1) une condition contrôle sans consigne, (2) une situation de double tâche [procédure utilisée par Beilock et al. (2002) consistant à identifier des mots], (3) une consigne interne appropriée à la tâche (indiquer au signal sonore quel côté du pied entre en contact avec la balle) et (4) une consigne interne inappropriée à la tâche (indiquer au signal sonore quel bras est en avant de l’autre). Ce slalom était réalisé le plus rapidement et précisément possible avec le pied dominant puis pour le groupe d’experts uniquement avec le pied non dominant. Selon l’hypothèse de « l’action contrainte », l’effet de la focalisation devrait être identique quelque soit le niveau d’expertise des sujets et le pied utilisé puisque la focalisation interne dégrade les performances en perturbant l’exécution automatique des mouvements. Selon l’hypothèse des « processus conscients », les focalisations internes devraient dégrader uniquement les performances des sujets experts pour les slaloms réalisés avec le pied dominant. Ainsi, lorsque la tâche n’est pas régulée par la mémoire procédurale (sujets moins expérimentés ou sujets experts avec le pied non dominant), les mouvements sont contrôlés de manière explicite et ne seraient donc pas concernés par le réinvestissement. Les résultats révèlent un nombre très restreint d’erreurs et aucune interaction entre la focalisation et l’expertise ou le pied dominant, soutenant ainsi l’hypothèse de « l’action contrainte ». Les résultats du temps de parcours révèle que le niveau d’expertise interagit avec la focalisation. Chez les experts, l’augmentation du temps de parcours par rapport à la condition contrôle est plus importante dans les conditions de consignes internes qu’en situation de double tâche. Chez les joueurs moins expérimentés, la consigne interne appropriée à la tâche ne modifie pas le temps de parcours alors que la double tâche ou la consigne interne inappropriée l’augmente. Ces résultats étayeraient donc l’hypothèse des « processus conscients ». Toutefois, contrairement aux résultats obtenus, il ne devrait pas y avoir de différence entre les deux conditions de focalisation interne puisque toutes les deux conduisent à un réinvestissement. De plus, chez les experts, les résultats obtenus sont identiques pour le pied dominant (i.e. des mouvements automatisés) et le pied non dominant (i.e. mouvements non automatisés). Plusieurs hypothèses peuvent être envisagées pour expliquer ces différences. La première, présentée par les auteurs, est qu’il existerait un effet de la distance de focalisation interne (similaire à celui de la distance de focalisation externe). Une seconde hypothèse, en accord avec les travaux de Wulf, serait que dans la condition contrôle, les moins expérimentés utilisent spontanément une focalisation interne alors que les experts utilisent une focalisation externe. Cette hypothèse expliquerait que la focalisation interne appropriée détériore peu les performances par rapport au groupe contrôle chez les moins expérimentés alors qu’elle interfère chez les experts. Elle expliquerait également l’absence d’interaction entre le pied et les consignes de focalisation chez les experts. En résumé, cette recherche ne permet donc pas de trancher entre les deux hypothèses explicatives.

37La seconde recherche visant à départager les deux hypothèses portait sur la pratique du golf (Poolton et al., 2006). En accord avec l’hypothèse des « processus conscients », la première expérience visait à montrer que la focalisation interne conduit à un apprentissage explicite alors que la focalisation externe permet un apprentissage implicite. Par conséquent, un apprentissage avec une focalisation externe devrait être plus résistant à une surcharge attentionnelle puisqu’il fait l’économie de la boucle utilisant la mémoire de travail. Comme il l’a déjà été vu précédemment, cette recherche n’a révélé aucune différence dans les performances ou l’apprentissage (test de rétention) entre les focalisations interne et externe. Elle révèle toutefois une détérioration des performances dans la condition de focalisation interne lorsque l’on ajoute une double tâche. De plus, elle montre que les sujets énoncent un nombre similaire de règles explicites sur des éléments extérieurs (règles externes) quelque soit la condition de focalisation. En revanche, les sujets du groupe « interne » rapportent plus de règles sur le mouvement (règles internes) que ceux du groupe « externe ». Ce résultat confirme donc l’hypothèse selon laquelle les sujets récupèrent plus de règles explicites avec une focalisation interne ce qui entraînerait une surcharge attentionnelle. Toutefois, une incertitude demeure : la surcharge pourrait également être liée à la régulation consciente des mouvements (conformément à l’hypothèse de « l’action contrainte »). A fin d’éclaircir ce doute, les auteurs ont répliqué leur expérience en donnant aux sujets un nombre équivalent de règles explicites et implicites (expérience 2). Si la surcharge attentionnelle est liée à l’utilisation excessive de règles explicites, aucune différence ne devrait être observée entre les focalisations interne et externe. Si la focalisation interne contraint les processus automatiques, alors la différence devrait persister. Les résultats n’indiquent aucune différence entre les deux focalisations attentionnelles au cours de la pratique, des tests de rétention et lors de l’ajout d’une seconde tâche. De plus, l’ajout de la double tâche fait chuter les performances par rapport aux tests de rétention. Cette recherche tendrait donc à montrer que ce n’est pas la focalisation interne qui induit la surcharge attentionnelle mais bien la récupération de règles explicites et validerait ainsi l’hypothèse des « processus conscients ». Toutefois, deux critiques peuvent être formulées dans l’interprétation de ces résultats. Wulf (2007) souligne tout d’abord que la complexité de la tâche pourrait être responsable de la disparition des effets de la focalisation. Ainsi, les sujets auraient des difficultés à porter leur attention sur plus de deux éléments à la fois. Augmenter le nombre d’instructions entraînerait une disparition des bénéfices de la focalisation externe comme dans l’expérience de Marchant et al. (2005) demandant aux sujets de suivre 4 instructions externes. L’utilisation par Poolton et al. (2006) de 6 instructions « internes » ou « externes » pourrait annuler l’ensemble des effets de focalisation. En fin, ces résultats pourraient résulter d’une différence méthodologique entre les deux expériences présentées par Poolton et al. (2006). Ainsi, dans la seconde expérience réalisée par ces auteurs, des points supplémentaires sont accordés si la balle est proche de la cible. Il en résulte que les scores de performances sont plus élevés. Ce mode de calcul diminue la difficulté de la tâche. Or, comme il l’a été vu, les bénéfices de la focalisation externe disparaissent si la tâche est trop facile (Wulf et al., 2007a). La disparition des effets de la focalisation dans la condition de double tâche pourrait donc résulter de la diminution de la difficulté de la tâche. Cette supposition est cohérente avec l’absence de différence entre les conditions « interne » et « externe » au cours de la pratique. En résumé, cette recherche ne permet toujours pas de trancher entre les deux hypothèses explicatives des effets de la focalisation attentionnelle.

Conséquences pour l’optimisation des apprentissages

38Bien que les mécanismes responsables des bénéfices de la focalisation attentionnelle ne soient pas encore totalement identifiés, ces travaux ont fourni des pistes a fin de concevoir de nouvelles méthodes visant à améliorer l’apprentissage. Ces méthodes d’optimisation de l’apprentissage divergent selon l’hypothèse soutenue.

39Ainsi, l’hypothèse de « l’action contrainte » suggère que l’amélioration de l’apprentissage passe par une focalisation externe pour tous les pratiquants (en prenant garde au fait que la focalisation est inefficace si le geste est totalement automatisé ). Comme il l’a été vu précédemment, la focalisation externe peut être obtenue par le biais des consignes données aux sujets. D’autres méthodes peuvent également contraindre cette focalisation comme l’utilisation de feedbacks ou l’adjonction de tâches supra posturales. Le rôle des feedbacks a été démontré par Shea & Wulf (1999) dans une tâche où les sujets se maintenaient en équilibre sur un stabilomètre aux moyens de feedbacks présentés sur écran. Ces feedbacks correspondaient à une ligne représentant l’inclinaison de la plateforme. Ils étaient identiques pour tous les sujets mais ces derniers croyaient qu’ils reflétaient leurs pieds (feedback interne) ou la plateforme (feedback externe). Les résultats montrent que l’apprentissage est plus efficace lorsque le feedback est perçu comme externe. Ce résultat a été reproduit dans le cadre d’activité physique telle que le volley-ball (Shea & Wulf, 1999; Wulf et al., 2002). Une seconde méthode pour contraindre l’utilisation d’une focalisation externe est de donner au sujet une tâche supra posturale. Ces tâches sont essentiellement utilisées dans les recherches sur la posture et se définissent comme des tâches ou des buts comportementaux super ordonnés au contrôle de la posture (Riley et al., 1999). Il s’agit d’une tâche exécutée en supplément de la posture sans intention de la modifier, comme par exemple toucher un rideau (Riley et al., 1999) ou une feuille de papier (McNevin & Wulf, 2002), et tenir une barre (Wulf et al., 2004) ou un tube contenant une balle (Wulf et al., 2003b). L’ajout de ces tâches a pour conséquence de réduire les oscillations posturales avec une augmentation de la fréquence dominante des ajustements traduisant un contrôle plus automatique de la posture. Elles sont donc présentées par Wulf comme un moyen d’améliorer l’apprentissage (Wulf et al., 2003b).

40Selon l’hypothèse des « processus conscients », l’optimisation des apprentissages nécessite la promotion d’un mode d’apprentissage implicite. Masters & Maxwell (2004) proposent plusieurs solutions autres que la focalisation attentionnelle externe a fin de limiter le réinvestissement. Tout d’abord, ils suggèrent de surcharger la mémoire de travail des apprenants par l’ajout d’une double tâche, ce qui les empêcherait d’extraire des règles explicites et les contraindrait ainsi à un apprentissage implicite (Maxwell et al., 2001). L’apprentissage est alors plus stable et résistant à des perturbations extérieures telles que le stress (Hardy & Mullen, 1996; Masters, 1992 ; Mullen & Hardy, 2000), l’anxiété (Mullen & Hardy, 2000) ou la fatigue (Masters et al., 2008; Poolton et al., 2007). Il est toutefois difficile de généraliser ce mode d’apprentissage en dehors d’un laboratoire. C’est pourquoi ces auteurs ont imaginé l’apprentissage « sans erreur » comme méthode d’apprentissage implicite. Ils partent du postulat que la présence d’une erreur engage le sujet dans un processus explicite de correction de ses mouvements et qu’il faut donc limiter les erreurs pour favoriser l’apprentissage (Maxwell et al., 2001 ; Orrell et al., 2006; Poolton et al., 2005). Par exemple, pour la pratique du golf, un apprentissage sans erreur consiste à accroître la difficulté de la tâche au cours des essais en commençant par une cible proche puis en augmentant progressivement la distance. L’apprentissage est alors supérieur à celui obtenu dans des situations de pratique variable (cible à atteindre aléatoire) ou de difficulté dé croissante [rapprochement progressif de la cible, Maxwell et al. (2001)]. En fin, une dernière méthode pour favoriser l’apprentissage consiste à réduire le nombre de règles explicites récupérées par l’apprenant. Pour ce faire, Masters (2000) a mis en place un apprentissage par analogie consistant à compacter un ensemble de règles conscientes en une seule par le biais d’une métaphore. Ainsi, Liao & Masters (2001) ont utilisé la métaphore du triangle rectangle dans le cadre du tennis de table. Ils demandent aux apprenants de réaliser un coup droit en déplaçant la raquette selon l’hypoténuse d’un triangle rectangle. Cette règle simple permet de rassembler l’ensemble des règles classiquement enseignées dans le cadre du coup droit et conduit à un apprentissage implicite (Liao & Masters, 2001).

41En résumé, ces recherches montrent que les apprentissages implicites ou utilisant une focalisation attentionnelle externe sont bénéfiques à tous les apprenants. Elles suggèrent de contraindre les novices à utiliser le mode d’apprentissage des experts et de réduire chez les experts l’usage des savoirs explicites a fin de mieux appréhender le stress et la compétition. Ces recherches offrent des perspectives de développement prometteuses puisqu’elles permettent d’envisager une nouvelle manière de concevoir l’entraînement des sportifs.

Conclusion

42Les travaux portant sur les effets de la focalisation attentionnelle sont relativement récents dans le champ des recherches sur l’attention. La jeunesse de ces recherches ainsi que les différences paradigmatiques sont très certainement responsables des divergences d’explications sur les bénéfices de la focalisation attentionnelle. L’origine de ces effets reste donc à élucider et plusieurs pistes de travail peuvent être envisagées. Ainsi, la plupart des études ont utilisé des mesures des performances, telles que la précision ou l’amplitude des mouvements ; très peu se sont intéressées aux aspects qualitatifs ou cinématiques du mouvement. Les conséquences de la focalisation attentionnelle sur la planification et la programmation du mouvement restent donc encore à identifier. En fin, il serait intéressant de dissocier les aspects représentationnels, temporels et perceptif de la focalisation attentionnelle. Ainsi, Weigelt et al. (2007) ont suggéré que la focalisation attentionnelle externe modifie les représentations des apprenants qui devraient s’approcher de celles utilisées par les experts. Hegele & Erlacher (2007) ont quant à eux postulé que la focalisation externe serait efficace car temporellement plus éloignée du mouvement que la focalisation interne. En fin, l’hypothèse du « codage commun »de Prinz (1997) postule que la focalisation attentionnelle affecte la récupération des réafférences sensorielles. Les nombreuses questions qui restent en suspens sont donc la promesse du futur foisonnement des travaux dans ce champ de recherche.

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Mots-clés éditeurs : apprentissage, cognition, attention, focalisation, réinvestissement, processus implicite et explicite

Date de mise en ligne : 01/01/2012.

https://doi.org/10.3917/sm.071.0071

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