Notes
- (1)Centre de Recherche en Activité Physique et Sportive UPRES EA 2131, Université de Basse-Normandie, UFR STAPS 14032 Caen, France.
- (2)Laboratoire Performance Motrice EA 2253, Université de Poitiers, UFR Sci du Sport 86000 Poitiers, France. Correspondance : Davenne Damien, Centre de Recherche en Activité Physique et Sportive UPRES EA 2131, Université de Basse-Normandie, UFR STAPS, Tel : 33.2.31.56.72.83., Fax : 33.2.31.56.72.82., E.Mail : davenne@ staps. unicaen. fr
Introduction
1 La plupart des grandes fonctions psychophysiologiques fluctuent rythmiquement, c’est-à-dire qu’en fonction du temps elles passent par des états de plus ou moins grande efficacité. La chronobiologie étudie ces fluctuations et les mécanismes qui les sous-tendent en fonction de la périodicité des phénomènes. Dans le domaine de la performance sportive, ce sont surtout les rythmes dits « circadiens », ayant une période proche de 24 h, qui ont été le plus étudiés. Il est maintenant bien établi que les systèmes cardio-circulatoires, ventilatoires, métaboliques et hormonaux au repos ou lors d’exercices de type aérobie présentent des rythmes circadiens caractéristiques (pour revue : Atkinson et Reilly, 1996). En revanche, les données disponibles sur les exercices supra-maximaux, sollicitant fortement le métabolisme anaérobie, sont beaucoup moins nombreuses. De même que nous avons très peu d’information sur les nombreux facteurs susceptibles de perturber ces rythmes : le type et l’intensité de l’exercice, le chronotype des sujets, l’âge, les horaires habituels des repas et d’entraînement, les niveaux d’activité physique habituelle, les privations de sommeil ainsi que les décalages horaires liés aux vols transméridiens.
2 Le but de cet article est de faire une revue de question sur la rythmicité circadienne des performances anaérobies et sur les effets de deux facteurs potentiellement perturbateurs des caractéristiques principales de ces rythmes, à savoir la privation de sommeil et l’heure habituelle d’entraînement. Le premier facteur, la privation de sommeil, doit être considéré comme un facteur externe subi par les sujets. Le deuxième facteur, l’heure d’entraînement, doit être considéré comme une action individuelle gérée par le sujet lui-même.
Rythmes circadiens et performances anaérobies
Rythme circadien de la force musculaire
3 Les travaux concernant les rythmes circadiens de la force musculaire sont peu nombreux. De plus, la majorité des actions musculaires enregistrées au cours des différentes études se résument au régime musculaire isométrique. Le faible nombre de travaux lors d’actions dynamiques peut s’expliquer par le nombre limité d’appareils de mesure fiables et reproductibles.
4 Les études consacrées à la rythmicité circadienne de la force isométrique maximale montrent clairement l’existence d’un rythme au cours de la journée. Toutefois, les amplitudes (différence entre le maximum et le minimum) de ces rythmes circadiens sont très variables, généralement elles restent comprises entre 5 % (Atkinson et al., 1993) et 21,2 % (Coldwells et al., 1994) suivant les protocoles et les muscles étudiés mais dans tous les cas, le pic est toujours situé en fin d’après-midi–début de soirée (16 :30 à 19 :30 heures).
5 Freivalds et al., (1983) établissent un rythme significatif de la force isométrique des fléchisseurs du coude avec une acrophase à 17 :00 heures et une amplitude de 6,8 %. De même, Gauthier et al., (1996) font état d’un rythme circadien de la force isométrique maximale des fléchisseurs du coude (à 90° de position angulaire) avec une acrophase à 17 :00 heures et une amplitude de variation qui représente 7,63 % de la valeur moyenne du rythme. D’autres études sur les extenseurs du genou (Taylor et al., 1993 ; Coldwells et al., 1994 ; Callard et al., 2000) ont montré que la force maximale isométrique varie au cours de la journée avec une amplitude de 6 à 18 %. Pour la force des doigts ou d’agrippement, la majorité des travaux confirme l’existence d’un rythme circadien (Ilmarinen et al., 1980 ; Reinberg et al., 1988 ; Atkinson et al., 1992) à l’exception des travaux de Baxter et Reilly (1983), qui indiquent que la force ne varie pas de manière significative au cours de la journée chez des adolescents.
6 L’existence de rythmes circadiens des moments musculaires dynamiques (concentriques) des fléchisseurs et des extenseurs du genou, évalués par un dynamomètre isocinétique, est controversée. En effet, alors que Cabri et al., (1988) n’observent pas de variations circadiennes, Wyse et al., (1994) et Atkinson et al., (1995) mettent en évidence un rythme circadien de ces variables préférentiellement à de faibles vitesses angulaires (1,05 et 3,14 rad · s–1). Les acrophases des rythmes circadiens ont lieu en fin d’après-midi, début de soirée c’est-à-dire entre 18 :00 heures et 20 :00 heures. Deschenes et al., (1998) mettent en évidence une variation journalière des moments musculaires développés par les fléchisseurs du genou. Cependant, cette variation n’est observée que pour la vitesse de mouvement la plus élevée (3,14 rad · s–1), ce qui suggère que l’observation des fluctuations circadiennes serait spécifique à certaines vitesses d’exécution du mouvement. Il faut tenir compte du fait que plus la vitesse angulaire est élevée plus le coefficient de variation des mesures est important (3 % vs 9 % vs 18 % à respectivement 1,05 vs 3,14 vs 5,24 rad · s–1) (Atkinson et al., 1995). Même si cette erreur est diminuée avec les multiples essais réalisés, il est probable que c’est la cause de l’absence de rythme de la force à des vitesses angulaires élevées (> 3,14 rad · s–1). Selon Reilly et al., (1997), la reproductibilité de ce type de mesure doit être vérifiée avant d’étudier leur variation au cours de la journée. Les derniers travaux de notre laboratoire (Souissi et al., 2002) ont montré que les moments musculaires isocinétiques des extenseurs du genou, réalisés à 6 vitesses angulaires en isocinétisme (1,05 ; 2,10 ; 3,14 ; 4,19 ; 5,24 et 6,29 rad · s–1), présentent des fluctuations diurnes significatives.
7 Récemment, Gauthier et al., (2001) observent que, pour des contractions concentriques des fléchisseurs de coude, l’allure de la relation Moment/Vitesse Angulaire n’est pas affectée par l’heure de la journée. Cependant, pour chaque vitesse angulaire considérée, le moment musculaire produit fluctue selon un rythme circadien. Les acrophases sont mesurées entre 17 :22 et 18 :37 heures pour chaque vitesse angulaire et les amplitudes sont comprises entre 9 et 12 %.
Rythmes circadiens des puissances anaérobies
8 L’exploration des fluctuations journalières des puissances anaérobies a été faite en utilisant différentes aporoches.
9 L’existence d’un rythme circadien des puissances moyennes (Pmean) et pic (Ppeak) développées lors du test de Wingate est discutée. En effet Hill et Smith (1991) et Melhim (1993) observent des valeurs de Pmean et de Ppeak significativement plus élevées (6 à 16 %) l’après-midi par rapport au matin. En revanche, Down et al., (1985) et Reilly et Down (1992) ne montrent pas de variations significatives de Pmean et Ppeak lors d’une exploration menée à différentes heures de la journée. Les divergences observées ne semblent pas être liées au chronotype des individus. En effet, Reilly et Marshall (1991) font état d’une variation circadienne significative (acrophase autour de 16 :00 heures) de Pmean et Ppeak indépendante du chronotype des sujets, lors d’un test modifié de Wingate sur banc de nage. Ces résultats contradictoires peuvent être liés à la motivation que requiert cette épreuve et à la difficulté de contrôler la totale adhésion du sujet. Au cours du test de force-vitesse sur ergocycle qui permet de mesurer la puissance maximale anaérobie (Pmax), les travaux de Bernard et al., (1998) ont mis en évidence une augmentation significative de Pmax l’après-midi (14 :00 – 18 :00 heures) par rapport au matin (09 :00 heures) avec des amplitudes de variations comprises entre 5 et 7 %. Les travaux récents de notre laboratoire (Souissi et al., 2003ab) ont montré que les puissances anaérobies Ppeak et Pmean et Pmax enregistrées au cours des tests de Wingate et de force-vitesse présentent des rythmes circadiens clairement établis avec des acrophases à 17 :24 ± 00 :36,18 :00 ± 01 :01 et 17 :10 ± 00 :52 heures et des amplitudes de 7,6 ± 0,8 %, 11,3 ± 1,1 % et 7 ± 0,8 %, respectivement.
10 Reilly et Down (1992) font également état d’un rythme circadien de la puissance maximale anaérobie au cours du test de Margaria. L’amplitude des variations reste néanmoins faible avec 2 % et les valeurs pics sont atteintes autour de 17 :30 heures. Bernard et al., (1998) ont observé aussi un effet de l’heure de la journée sur la puissance développée au cours de l’épreuve de multibonds avec des acrophases observées l’après-midi et une amplitude de 7 %. Récemment, Falgairette et al., (2003) n’ont pas observé d’effet de l’heure de la journée sur la puissance pic et la quantité totale de travail réalisé lors de sprints de 7s et sur les processus de récupération suite à une épreuve de sprint.
Explication du phénomène circadien des performances anaérobies
11 Au cours des différentes études des rythmes circadiens de la force et de la puissance musculaires, différentes hypothèses explicatives ont été avancées, sans toutefois être toutes vérifiées. Tous les auteurs, qui observent l’évolution en phase des rythmes de la performance musculaire et de la température corporelle au repos, évoquent la possibilité d’un effet causal (figure 1a), les variations de la température seraient directement responsables des fluctuations de la performance musculaire. Cette hypothèse est reprise par les auteurs qui ont travaillé sur le fonctionnement musculaire en anaérobie (Melhim, 1993 ; Bernard et al., 1998). L’augmentation de la température corporelle au cours de la journée peut être assimilée à un échauffement, celui-ci s’accompagne d’une diminution de la viscosité musculaire et d’une augmentation de la vitesse de conduction nerveuse et de l’amplitude articulaire (Shéphard, 1984 ; Atkinson et al., 1993) et donc d’une amélioration de la performance musculaire. Cependant, si les tests d’évaluation de la force sont pratiqués toutes les 4 heures au cours d’un exercice soutenu et continu de 24h, des fluctuations circadiennes de la force musculaire perdurent malgré l’échauffement musculaire dû à l’activité physique (Callard et al., 2000). Les travaux de Martin et al., (1999), au cours desquels la température du muscle est artificiellement élevée le matin semblent indiquer que la fluctuation de la température ne suffit pas à expliquer l’amplitude totale des rythmes observés. Par ailleurs, l’amplitude des variations de la température obtenues dans notre étude (Souissi et al., 2003) est beaucoup trop faible pour expliquer l’amplitude des variations des performances anaérobies. Une deuxième hypothèse peut alors être avancée pour laquelle les deux rythmes circadiens (performances anaérobies et température) dépendraient de la même horloge biologique et recevraient la même information simultanément, sans avoir de lien de causalité entre eux (Figure 1b).
Hypothèses de relation entre l’horloge interne, la température et les performances anaérobies.
Hypothèses de relation entre l’horloge interne, la température et les performances anaérobies.
12 D’autres travaux sont nécessaires pour trancher entre ces hypothèses et mieux comprendre l’origine des fluctuations journalières des performances musculaires. Par exemple, il serait intéressant d’enregistrer la température intramusculaire pendant l’effort ou bien d’étudier les effets de l’échauffement sur les fluctuations des performances anaérobies.
13 D’autres hypothèses ont été avancées. La possibilité que le niveau d’éveil, indice de la performance dont le niveau maximum a lieu dans l’après-midi, puisse être responsable des variations circadiennes de la production de force et de puissance musculaires a été évoquée (Reilly, 1990 ; Davenne et Lagarde, 1995). D’autres facteurs tels que la bonne volonté et la motivation des sujets à exercer un effort maximal ont aussi été suggérés (Krivoschekov et al., 1980).
14 L’origine centrale ou périphérique a aussi été questionnée (Reilly, 1992). Selon les travaux de Davenne et Gauthier (1997), les rythmes circadiens des moments musculaires dépendraient plutôt de l’état des propriétés contractiles des muscles (facteurs périphériques) que de celui du système nerveux central (facteurs centraux) qui génère la commande musculaire. Cette théorie a été confirmée par l’étude menée par Martin et al., (1999). Ces derniers montrent, grâce à des enregistrements EMG et d’éléctrostimulation, que l’amplitude de variation de 9,6 %, au cours de la journée, du couple maximal enregistré à la suite d’une contraction maximale volontaire de l’adducteur de pousse, n’est pas due à la commande motrice, l’individu conservant la même capacité de stimulation nerveuse au cours de la journée. Alors que la baisse de l’EMG, pour développer un niveau de force sous-maximal donné, indique que les modifications ont lieu au niveau du muscle (Thépaut-Mathieu et al., 1988).
15 Le rythme circadien de la force maximale serait donc préférentiellement imputable à des modifications d’ordre périphérique. Des modifications journalières du couple excitation/contraction au sein des muscles ont été observées. Ainsi, la potentiation post-tétanique est augmentée de 17 % le soir par rapport au matin (Martin et al., 1999). Ceci pourrait être directement lié au rôle joué par le Ca++ dans la contraction musculaire (Blinks et al., 1978). L’augmentation du relâchement du Ca++ par le réticulum sarcoplasmique (Duchateau et Hainaut, 1986) et l’amélioration de la sensibilité des protéines contractiles au Ca++ (Vandenboom et al., 1993) au cours de la journée, sont des phénomènes périphériques qui peuvent expliquer la variation journalière de la force maximale volontaire (Davenne et Gauthier, 1997). Par ailleurs, l’amélioration de l’activité de la myosinATPase et l’augmentation des concentrations en phosphate inorganique au cours de la journée ne peuvent être négligées (Barany, 1967), celles-ci pouvant amener à une augmentation de la force produite par chaque pont d’union actine/myosine.
Sommeil, rythmes circadiens et performance
16 Les sportifs peuvent être soumis à divers types de perturbations du cycle du sommeil allant de la privation partielle à la privation totale. La privation totale de sommeil se rencontre fréquemment chez les sportifs, par exemple, lors de courses en haute montagne, de navigation en solitaire ou d’épreuves sportives d’une durée supérieure à 24 heures (ultratriathlon). Le sommeil peut aussi se trouver fragmenté par de mauvaises conditions de couchage, par l’anxiété ou le stress induit par la compétition et par les voyages. Les effets de la perturbation du sommeil vont dépendre de plusieurs facteurs interindividuels dont le chronotype, la personnalité, le sexe, l’âge et le niveau de forme du sujet.
Effets de la privation de sommeil sur les performances anaérobies
17 Lors d’une privation de sommeil, tous les résultats concordent pour dire que les performances psychomotrices et cognitives (pour revue : Horne, 1988) ainsi que l’humeur (Pilcher et Huffcut, 1996) sont préférentiellement les plus affectées. En revanche, les résultats concernant les performances physiques restent discutés (Naitoh et al., 1990). Néanmoins, les études les plus récentes font généralement état d’un effet de la privation de sommeil sur les performances aérobies (VanHelder and Radomski, 1989).
18 Concernant les performances anaérobies, la force musculaire semble peu affectée par la privation de sommeil. En effet, Reilly et Deykin (1983) n’observent aucun effet significatif de la privation partielle de sommeil (sommeil réduit à 2,5 h pendant 3 nuits consécutives) sur la force isométrique d’agrippement. Takeuchi et al., (1985) montrent qu’une privation de sommeil de 64 h n’a pas d’effet sur la force isométrique et les moments musculaires des extenseurs du genou à des vitesses angulaires de 3.14 et 5.22 rad · s-1 évalués par ergomètre isocinétique, mais observent une réduction des moments musculaires à la vitesse angulaire 1.05 rad · s-1. Symons et al., (1988a, b) ont montré que 60 h de privation de sommeil ne modifient pas la force maximale isométrique des extenseurs du genou, la force maximale volontaire (FMV) et le temps nécessaire pour produire 25 %, 50 % et 100 % de la FMV. Plus récemment et contrairement aux résultats précédents, Bulbulian et al., (1996) ont montré que 30 h de privation de sommeil affectent les moments musculaires des extenseurs et des fléchisseurs du genou évalués par un dynamomètre isocinétique mais ne modifient pas l’indice de fatigue mesuré à partir de 45 mouvements de flexion-extension du genou à une vitesse angulaire constante de 3,14 rad · s-1.
19 Comme pour la force musculaire, les puissances anaérobies semblent peu sensibles à la privation de sommeil. En effet, suite à une limitation de sommeil (heures de coucher et de lever imposées respectivement à 03 :00 et 07 :00 heures), Mougin et al., (1996) n’observent pas de variations de la vitesse maximale, de la Pmean, de la Ppeak et des concentrations sanguines de lactates mesurées lors d’un test de Wingate par rapport à une nuit de référence. De même, Symons et al., (1988 a) ont observé que 60 h de privation de sommeil sont sans effet sur la Ppeak, la Pmean, l’indice de fatigue et les concentrations sanguines de lactates mesurés lors d’un test de Wingate. Reilly et Deykin (1983) constatent qu’un raccourcissement de sommeil n’affecte pas la performance obtenue lors d’un saut en longueur réalisé avec une prise d’appel pieds joints. Cependant, pour ces mêmes sujets, la puissance développée lors du test de Margaria est diminuée. De même, Copes et Rosentswieg (1972) observent une diminution des performances en saut en longueur après 40 à 50 h de privation de sommeil.
20 Ces études analysent l’effet de la privation de sommeil sur la performance à un moment donné de la journée mais ne tiennent pas compte des aspects chronobiologiques. En effet, les perturbations des rythmes biologiques sont rarement prises en compte lors des études sur les conséquences d’une privation de sommeil sur la performance. Récemment nous avons réalisé une étude (Souissi et al., 2003b) dont l’objectif est d’analyser les effets d’une nuit de privation de sommeil sur les fluctuations diurnes des performances anaérobies lors des tests de Wingate et de force-vitesse sur ergocycle. Afin de répondre à cet objectif, treize sujets ont réalisé deux sessions de tests à 06 :00 et 18 :00 heures après une nuit de privation de sommeil et une nuit normale de sommeil. Les résultats de cette étude ont montré que les fluctuations diurnes des performances anaérobies lors des tests de Wingate et de force-vitesse sur ergocycle persistent après une perturbation de sommeil. Néanmoins, une nuit de privation de sommeil induit une diminution de l’amplitude de ces fluctuations. Ainsi, les effets de la privation de sommeil sur les puissances anaérobies dépendent de l’heure de la réalisation des tests. Il est possible que la privation de sommeil « aplatisse » la courbe circadienne aux détriments des périodes les plus efficaces (Figure 2).
Rythme circadien des performances anaérobies après une nuit normale de sommeil ( )
Rythme circadien des performances anaérobies après une nuit normale de sommeil ( )
Entraînement et rythmicité circadienne
21 Au cours d’un entraînement pour développer les capacités aérobies, Torii et al., (1992) ont mis en évidence que selon l’heure à laquelle l’entraînement est réalisé, il est possible d’enregistrer aussi bien des progrès significatifs qu’une absence d’amélioration des performances. De plus, Hill et al., (1989,1998) montrent que, lorsqu’il y a une augmentation des performances, celle-ci est dépendante de l’heure de la journée. En effet, les gains les plus importants sont observés à l’heure habituelle d’entraînement :
-
Torii et al.,
(1992) ont analysé les effets d’un entraînement réalisé à trois moments de la
journée entre 09 :00 et 09 :30 heures, 15 :00 et
15 :30 heures et entre 20 :00 et 20 :30 heures. L’effet de l’entraînement.
sur l’aptitude aérobie (max) n’est significatif que pour le groupeV s’étant entraîné l’après-midi. Ces résultats indiquent que la période optimale pour la réalisation de l’entraînement aérobie est l’après-midi mais il faut signaler que les tests avant et après l’entraînement étaient réalisés une seule fois à 15 :00 heures. -
Hill et al.,
(1989,1998) ont étudié l’effet d’un entraînement sur l’existence des
fluctuations diurnes des performances physiques.
Ils ont observé que l’heure habituelle d’entraînement peut modifier ces fluctuations. En effet, Hill et al., (1989) constatent lors des post-tests que les sujets s’entraînant le matin obtiennent des valeurs de.
au seuil ventilatoire supérieures le matin par rapport à l’après-V midi, tandis que le contraire est observé pour les sujets s’entraînant l’après midi. Plus récemment, Hill et al., (1998) observent, après cinq semaines d’entraînement intense, que la capacité de travail lors d’un exercice d’intensité élevée est supérieure l’après-midi par comparaison au matin chez un groupe qui s’entraîne l’après-midi.
Cependant, chez le groupe qui s’entraîne le matin la capacité de travail reste constante au cours de la journée.
22 Ces différents travaux permettent de souligner l’importance de la spécificité temporelle de l’entraînement destiné à l’amélioration de la..
23 max, de la au seuil ventilatoire et de la capacité de travail. V V
24 Les horaires d’entraînement semblent également jouer un rôle dans le gain de force et de puissance (Hildebrandt et al., 1990 ; Oschütz, 1993). En effet, Hildebrandt et al., (1990) ont observé au cours d’un entraînement de sept semaines, une augmentation de la force plus importante dans le groupe entraîné à 21 :00 heures (20 %) comparativement aux groupes entraînés à 03 :00,09 :00 et 15 :00 heures. Au cours de cette étude, les tests étaient réalisés une seule fois pour chaque groupe à l’heure qui correspond à celle de l’entraînement. De même, Oschütz (1993) a étudié les effets d’un entraînement destiné à améliorer la vitesse et la puissance des membres inférieurs à trois heures différentes de la journée : 08 :00, 14 :00 et 18 :00 heures. Les performances réalisées lors des différents tests (puissance d’extension de la jambe, saut en longueur et vitesse de course sur 30 m) montrent que les gains les plus importants sont observés chez les sujets entraînés le soir. Toutefois, il est nécessaire de préciser que les différents groupes n’ont été évalués qu’à une seule heure de la journée, non précisée par les auteurs.
25 Récemment, nous avons réalisé une étude (Souissi et al., 2002) dont l’objectif était d’évaluer les effets d’un entraînement en renforcement musculaire, réalisé uniquement le matin ou uniquement le soir, sur l’amélioration des moments isocinétiques et de la puissance pic (Ppic) lors du test de Wingate et sur les caractéristiques des fluctuations diurnes de ces performances. Afin de répondre à cet objectif, les sujets ont réalisé des sessions de tests (entre 07 :00 – 08 :00 heures) et le soir (entre 17 :00 – 18 :00 heures) avant et deux semaines après un entraînement régulier de six semaines en musculation des extenseurs du genou. Les sujets étaient répartis selon deux groupes : un groupe d’entraînement « matin » et un groupe d’entraînement « soir ». Les résultats de cette étude ont montré que l’heure habituelle d’entraînement modifie les caractéristiques des fluctuations diurnes des performances anaérobies. En effet, ces fluctuations s’amplifient chez les sujets qui s’entraînent le soir et disparaissent chez les sujets qui s’entraînent le matin. L’amplitude des rythmes circadiens pourrait être diminuée par l’augmentation des performances enregistrées le matin après l’entraînement matinal (Figure 3). L’entraînement à une heure donnée conduit à une augmentation préférentielle des moments musculaires isocinétiques et de Ppic à l’heure correspondant à celle de l’entraînement. Ainsi, la rythmicité circadienne influe sur les adaptations à l’entraînement et confirme le bien fondé de l’idée selon laquelle il conviendrait de faire coïncider les heures d’entraînement avec l’heure de la performance critique envisagée.
Evolution des performances anaérobies au cours du nycthémère avant ( )
Evolution des performances anaérobies au cours du nycthémère avant ( )
Conclusion
26 Cette revue de question montre que les performances réalisées au cours d’exercices intense sollicitant principalement le métabolisme anaérobie présente des variations circadiennes avec des acrophases observées enfin de l’après-midi début de soirée. Cependant ces fluctuations journalières dépendent de la qualité de sommeil et de l’heure habituelle d’entraînement.
27 La désynchronisation induite par la privation totale de sommeil se traduit par une diminution de l’amplitude des fluctuations journalières. Ainsi, La privation de sommeil n’affecte pas les performances anaérobies le matin. Cependant, ces performances sont diminuées le soir suite à la privation.
28 L’heure habituelle d’entraînement perturbe également les fluctuations journalières des performances. En effet, ces fluctuations s’amplifient chez des sujets qui s’entraînent le soir et disparaissent chez les sujets qui s’entraînent le matin. De plus les sujets qui s’entraînent le matin observe les meilleurs gains le matin et inversement pour ceux qui s’entraînent le soir.
29 De nombreuses études restent à faire pour confirmer ces résultats, comprendre les mécanismes qui sous tendent ces phénomènes et envisager des applications pratiques dans le domaine de l’entraînement sportif.
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Mots-clés éditeurs : 'entraînement, rythmes biologiques, érobies, privation de sommeil
Notes
- (1)Centre de Recherche en Activité Physique et Sportive UPRES EA 2131, Université de Basse-Normandie, UFR STAPS 14032 Caen, France.
- (2)Laboratoire Performance Motrice EA 2253, Université de Poitiers, UFR Sci du Sport 86000 Poitiers, France. Correspondance : Davenne Damien, Centre de Recherche en Activité Physique et Sportive UPRES EA 2131, Université de Basse-Normandie, UFR STAPS, Tel : 33.2.31.56.72.83., Fax : 33.2.31.56.72.82., E.Mail : davenne@ staps. unicaen. fr