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Article de revue

Le vaccin qui fit la gloire de Pasteur

Pages 25 à 33

1Le Figaro du 27 octobre 1885 : « L’Académie des sciences a tenu hier une séance qui fera époque dans l’histoire de la science. M. Pasteur a fourni la preuve qu’il guérissait l’homme atteint de la rage. Cette maladie redoutable qui vouait à d’horribles souffrances, et nécessairement à la mort, les personnes qu’elle tenait en son pouvoir, est définitivement vaincue par le traitement de l’illustre savant de la rue d’Ulm. »

2Le Journal des Débats du 28 octobre : « Un des plus grands fléaux de l’humanité vient d’être vaincu. La rage, cette maladie terrible qui ne pardonne jamais, va devenir inoffensive. On peut affirmer que désormais on pourra sauver d’une mort certaine toute personne mordue par un animal enragé. Le 26 octobre restera une date mémorable dans l’histoire de la science. […] C’est une des plus belles découvertes dont puisse s’enorgueillir l’esprit humain. »

3Le Courrier de Lyon du 29 octobre : « L’Institut de France a applaudi d’enthousiasme à la relation, sobre comme un procès verbal, de ce merveilleux miracle par le modeste thaumaturge lui-même ; toutes les nations applaudissent comme nous. Si un homme a mérité jamais d’être coulé en bronze de son vivant, c’est M. Pasteur, c’est Pasteur. Les Grecs reconnaissants l’auraient fait dieu. »

4Voilà quelques-unes des manifestations de l’enthousiasme qui saisit la presse à la suite des communications présentées par Pasteur à l’Académie des sciences le 26 octobre et à l’Académie de médecine le 27. Les journaux Le Gaulois, Le Temps, Voltaire, Le National, La France, Le Soleil et bien d’autres célèbrent de la même manière la découverte de Pasteur. En manière d’apothéose, L’Illustration du 7 novembre fait sa couverture d’un dessin représentant la vaccination d’un enfant sous l’œil attentif – peut-être un peu inquiet ? – de Pasteur.

5Quelques fausses notes, cependant. De la part de journalistes opposants de longue date à Pasteur, et généralement de gauche comme nous dirions maintenant.

6Le Cri du Peuple du 30 octobre : « Je voudrais simplement mettre en regard des panégyriques l’exposé simple et loyal des choses. C’est-à-dire rétablir dans ses véritables dimensions la découverte (?) de M. Pasteur. La rage “incurable ?” Allons donc ! Un fer rouge appliqué en temps utile sur la morsure, en a toujours raison. On dira qu’on n’a pas partout un fer rouge sous la main. Soit, mais encore est-il plus facile à se procurer qu’une seringue remplie de virus rabique. La rage “la plus terrible maladie qui existe ?” Bah ! On mesure d’ordinaire l’intensité d’un fléau aux ravages qu’il exerce. Se fait-on une idée du nombre des “enragés” ? De 1850 à 1872, c’est-à-dire pendant une période de vingt-trois ans, six-cent-quatre-vingt-cinq cas de rage ont été constatés en France. Moyenne par an : trente cas. – Le rhume de cerveau est infiniment plus dangereux. »

7Et dans L’Intransigeant du 2 novembre, une charge du redoutable Henri de Rochefort : « Mais voilà qu’une Chambre nouvelle est élue et qu’on parle partout de sérieuses économies, afin d’échapper aux nouveaux impôts prédits par le jongleur Ferry. Beaucoup d’opportunistes, protecteurs et soutiens de M. Pasteur, étant restés sur le carreau, sa pension de vingt-cinq mille francs pourrait bien y rester aussi. Alors, huit jours à peine avant l’ouverture du Parlement, le génie du grand microbe se révèle de nouveau par un coup de maître. La guérison de la rage est trouvée. L’affaire est faite, il n’y a plus à y revenir […] M. Pasteur a présenté à ses amis un jeune berger qui, ayant été mordu par un chien qu’on supposait enragé, n’a, jusqu’à présent, donné aucun signe d’hydrophobie, grâce aux soins que lui a prodigués le savant distingué qui nous coûte annuellement vingt-cinq mille francs de pension. Or, il serait d’abord indispensable d’établir que le chien était enragé ; en second lieu qu’il a communiqué son mal au berger qu’il a mordu. Des habitants du pays prétendent même que ce brave garçon a été cautérisé avant d’être amené chez M. Pasteur ; de sorte qu’on ignore si c’est l’inoculation ou la cautérisation qui l’a sauvé… J’attends donc, pour me réjouir, du progrès scientifique qu’on proclame actuellement si haut, des démonstrations un peu plus convaincantes. »

« Une inoculation chez M. Pasteur. » On vaccine Jupille. Pasteur est debout derrière

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« Une inoculation chez M. Pasteur. » On vaccine Jupille. Pasteur est debout derrière

Dessin de Le Riverend et F. Dochy, L’Illustration, 7 novembre 1885

8Quelle est donc la teneur de cette communication qui fait couler tant d’encre ?

9Pasteur rapporte que, après avoir effectué de nombreuses expériences sur des chiens, il a pour la première fois entrepris de vacciner contre la rage un enfant de neuf ans, Joseph Meister, qui avait été gravement mordu par un chien enragé et qui avait de grands risques de contracter la maladie. Cette vaccination avait eu lieu au début du mois de juillet, et l’enfant, alors que la durée d’incubation de la rage ne dépasse guère deux mois, est en parfaite santé trois mois et trois semaines plus tard. Fort de ce succès, Pasteur a entrepris le 20 octobre de vacciner un autre enfant, Jean-Baptiste Jupille.

10Qu’est donc ce vaccin ? Lors de travaux antérieurs sur le choléra des poules, le rouget du porc et le charbon, Pasteur avait montré que l’on pouvait immuniser les animaux contre ces maladies en leur inoculant une variété atténuée des microbes responsables. Ces variétés atténuées, il les avait obtenues en laissant vieillir les cultures en présence d’oxygène. Pour la rage, Pasteur avait rencontré de nombreuses difficultés dues au fait, qu’il ignorait, que le « microbe » de la rage, contrairement à ceux causant les maladies ci-dessus mentionnées, n’était pas une bactérie, visible au microscope optique et cultivable dans un milieu de culture. C’était ce que nous appelons aujourd’hui un virus, qui ne peut être vu qu’au microscope électronique – lequel ne sera inventé que dans les années 1930 – et qui ne se multiplie qu’à l’intérieur de cellules. Pasteur confirme d’abord ce qui avait été suggéré par le médecin Paul-Henri Duboué, que ce microbe, invisible et incultivable, qui ne se manifeste que par sa capacité à donner la rage, se localise dans le système nerveux des animaux. Il entreprend alors de le « cultiver » par transfert d’animal à animal. Travaillant avec des lapins, sensibles à la rage mais moins dangereux à manipuler que les chiens, il inocule du matériel nerveux rabique à un premier animal puis, lorsque celui-ci meurt de rage, il prélève un peu de son système nerveux pour le transmettre à un autre lapin, et ainsi de suite. La moelle épinière d’un lapin enragé devient ainsi, en quelque sorte, une culture du virus de la rage.

Tableau extrait de la publication de Pasteur donnant le protocole des inoculations effectuées sur Joseph Meister

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Tableau extrait de la publication de Pasteur donnant le protocole des inoculations effectuées sur Joseph Meister

11Reste à atténuer ce virus. Fort de son expérience avec les bactéries du choléra des poules, du rouget du porc et du charbon, Pasteur entreprend alors de laisser sécher des moelles de lapins rabiques et constate que leur virulence décroît au cours du temps, pour devenir nulle au bout d’une quinzaine de jours. Le protocole de vaccination qu’il emploie, d’abord avec des chiens puis chez le petit Joseph Meister, s’apparente alors plus à une mithridatisation qu’aux vaccinations que nous connaissons aujourd’hui. Le premier jour, il inocule un fragment de moelle vieille de quinze jours remise en suspension dans un peu de liquide. Le deuxième jour l’inoculation est faite avec une moelle vieille de seulement quatorze jours, et ainsi de suite, pour terminer avec une moelle de la veille, pleinement virulente.

12L’application d’un tel protocole le conduit à dire, dans sa communication du 26 octobre : « Joseph Meister a donc échappé non seulement à la rage causée par les morsures, mais encore à celle que je lui ai inoculée pour contrôler l’immunité. » À cette phrase, on mesure le risque pris par Pasteur en effectuant une telle vaccination, dont on imagine mal qu’il aurait pu y procéder aujourd’hui ! Ce risque, il en est conscient. Aussi est-il la proie d’un intense débat de conscience avant d’y procéder et une profonde angoisse ne cesse-t-elle de l’étreindre pendant les jours puis les semaines qui suivent la vaccination. En raison de ce risque, d’ailleurs, il se garde bien de rendre publique cette première vaccination avant d’en connaître le résultat. En effet, alors que celle-ci avait eu lieu durant la première quinzaine de juillet, il ne l’annonce que le 26 octobre… quand il est raisonnablement sûr que Meister a échappé à la rage. Le secret qui entoure cette première vaccination transparaît dans une lettre de Mme Pasteur à sa fille, datée du 7 juillet, où elle évoque la première inoculation, faite la veille. Elle écrit en tout petit : « Tout ceci est extrêmement confidentiel […]. Ce serait un succès qui fermerait la bouche à tous ces braves gens qui enragent [sic] de voir le chemin parcouru depuis quelques années par les doctrines pastoriennes. »

13La vaccination de Jupille, qui est en cours le 26 novembre, est au contraire abondamment médiatisée. Celui-ci est présenté comme un héros qui s’est fait mordre en protégeant ses petits camarades contre un chien enragé. Pasteur lui fait attribuer un prix de vertu par l’Académie. Jupille est même interviewé par des journalistes du Voltaire et du Journal des Débats qui visitent le laboratoire de Pasteur.

14Les articles dithyrambiques qui célèbrent la découverte de Pasteur contiennent évidemment diverses erreurs et exagérations.

15La plus grosse erreur, qui transparaît souvent dans le titre des articles, est que Pasteur aurait guéri le petit Joseph Meister de la rage. C’est inexact car la rage, encore aujourd’hui, est inguérissable une fois qu’elle s’est déclarée. Ce qu’a fait Pasteur c’est, tirant parti du fait que le virus met plusieurs jours à migrer depuis le lieu de la morsure jusqu’au cerveau, empêcher ce virus, par une vaccination in extremis, de provoquer la rage. Il s’agit de prophylaxie, de prévention, et non de guérison. Cette erreur a laissé des traces, et aujourd’hui encore beaucoup confondent vaccination et acte thérapeutique. Lorsqu’on tente d’expliquer qu’un vaccin constitue une prévention chez des sujets en bonne santé, et ne doit pas être confondu avec les antibiotiques, par exemple, qui visent à guérir un sujet malade, on s’entend souvent opposer : « Le vaccin de Pasteur n’a-t-il pas guéri la rage ? »

16Une exagération patente dans les articles de presse consiste à écrire : « On peut affirmer que désormais on pourra sauver d’une mort certaine toute personne mordue par un animal enragé. » En effet, comme n’ont pas manqué de le souligner les opposants à la doctrine pastorienne, Pasteur n’avait « guéri » qu’un seul sujet. Certes, le protocole avait déjà réussi chez plusieurs chiens, mais pouvait-on pour autant affirmer que ce succès chez Joseph Meister était extrapolable à l’ensemble de l’humanité ? C’était exact, mais on ne pouvait en être certain le 26 octobre 1885.

17La question de la fréquence de la maladie, soulevée par certains des opposants, est pertinente. Faute de statistiques valables à l’époque, on ignore le nombre véritable de personnes décédant de la rage en France. Probablement guère plus d’une centaine, ce qui était très peu par rapport à d’autres maladies infectieuses. Cependant, comme l’a écrit Émile Duclaux, proche collaborateur de Pasteur : « La rage pèse sur les imaginations. Elle évoque des visions de légende, de malades furieux, inspirant la terreur à tout leur entourage, attachés et hurlants, ou bien asphyxiés entre deux matelas. » On comprend ainsi mieux comment la victoire contre une maladie si rare, mais au caractère mythique, a pu provoquer un tel enthousiasme.

18Une autre question est celle de l’efficacité de la vaccination pasteurienne. En effet, toutes les personnes mordues par un chien enragé ne contractent pas la rage. Loin de là. Peut-être Meister et Jupille auraient-ils survécu même s’ils n’avaient pas été vaccinés ! Une fois encore, faute de statistiques valables lors de la communication de Pasteur, un doute pouvait demeurer sur l’efficacité de la prévention. Il ne fut réellement levé qu’en 1887, lorsqu’une commission anglaise sur la rage rendit ses résultats. D’après celle-ci, alors que la mortalité chez des sujets non vaccinés était de 12 à 15 %, elle était de 0,5 à 1 % chez les vaccinés. Cela dit, le fait que les vaccinés survivaient à un protocole impliquant l’inoculation de moelle virulente lors de la dernière injection, un processus entraînant une létalité de 100 % chez les animaux non vaccinés, montre bien l’efficacité de la vaccination.

19Un passage très important et rarement souligné de la communication de Pasteur est le suivant : « On serait, dès lors, porté à croire que la méthode prophylactique dont il s’agit repose sur l’emploi de virus d’abord sans activité appréciable, faibles ensuite et de plus en plus virulents. Je montrerai ultérieurement que les faits sont en désaccord avec cette manière de voir. Je prouverai que les retards dans les durées d’incubation de la rage communiquée, jour par jour, à des lapins, ainsi que je l’ai dit tout à l’heure, pour éprouver l’état de virulence de nos moelles desséchées au contact de l’air, sont un effet d’appauvrissement en quantité du virus rabique contenu dans ces moelles et non un effet de son appauvrissement en virulence. » Il s’agit là d’une révolution dans la manière de penser de Pasteur et celle-ci devait avoir d’immenses conséquences dans la conception ultérieure des vaccins, et dans l’émergence de l’immunologie.

20Les premiers travaux de Pasteur sur les vaccins avaient été inspirés par la vaccination jennerienne. Jenner avait montré, au cours des dernières années du XVIIIe siècle, que l’on pouvait protéger les humains contre la variole en leur transmettant la variole de la vache, la « vaccine », qui apparaissait comme une forme bénigne de la variole. Pour Pasteur, convaincu que la variole était causée par un microbe, comme toutes les maladies infectieuses, le microbe de la vaccine devait être une variété atténuée du microbe de la variole. Il entreprend alors la recherche de variétés atténuées de microbes causant diverses maladies animales. On a vu qu’il en obtint dans le cas du choléra des poules, du rouget du porc et du charbon. Dans ces diverses situations, le caractère atténué du microbe se maintenait lors de cultures ultérieures. Initialement, dans le cas de la rage, il pensait également obtenir des variétés atténuées du virus en laissant sécher les moelles de lapin. Pourtant, il constate que l’inoculation de moelles partiellement atténuées met plus longtemps à provoquer la rage chez un animal mais que, lorsque la rage se déclare, le virus présent chez les animaux a une virulence identique à celle du virus initial. Il n’est pas atténué. C’est ce qui lui fait dire que l’atténuation des moelles ne correspond pas à une atténuation du virus, mais à une diminution de la quantité de celui-ci. Mais alors, comment expliquer que l’inoculation de moelles ayant perdu toute virulence protège contre l’injection ultérieure de moelles de plus en plus virulentes ? Pasteur en donnera son interprétation un an plus tard dans le premier article du premier tome des Annales de l’Institut Pasteur : « Les faits s’accordent […] avec l’idée d’une matière vaccinale qui serait associée au microbe rabique, celui-ci gardant sa virulence propre, intacte dans toutes les moelles en dessiccation, mais s’y détruisant progressivement et plus vite que la matière vaccinale. » Et, sur la suggestion de son collègue Elie Metchnikoff, Pasteur suggère que la « matière vaccinale » pourrait être du microbe tué.

21Alors que, jusque-là, pour Pasteur, les vaccins devaient être constitués de microbes vivants atténués, voilà qu’il envisage la possibilité de vacciner avec une matière vaccinale non vivante, du microbe tué. Ainsi, alors que ses premiers travaux ouvraient la voie aux vaccins constitués de microbes atténués, comme le BCG, les vaccins contre la fièvre jaune, la rougeole ou l’un des vaccins contre la poliomyélite, le vaccin contre la rage ouvrait la voie aux vaccins consistant en des microbes inactivés ou même en molécules provenant de ces microbes, la voie qui est préférée aujourd’hui.

22Cela changeait en outre la conception que l’on pouvait avoir de l’immunité. Initialement, Pasteur imaginait que l’immunité induite par un microbe atténué résultait du fait que celui-ci épuisait, dans le corps de l’individu vacciné, des substances essentielles à la croissance du microbe virulent. Une telle explication ne pouvait évidemment rendre compte de l’immunité induite par une matière vaccinale non vivante. Il reviendrait à d’autres, aux savants de l’École allemande comme Behring et Ehrlich, mais aussi à des pasteuriens comme Roux, Metchnikoff et bien d’autres, de montrer le rôle des anticorps et des phagocytes dans l’immunité. Ce serait l’émergence de l’immunologie.

23On voit donc, n’en déplaise à Henri Rochefort et autres journalistes grincheux, que la communication faite par Pasteur le 26 octobre 1885 était d’une importance majeure. Pas seulement parce qu’elle annonçait la victoire contre la rage, mais parce qu’elle ouvrait la voie à la science des vaccins et à l’étude des mécanismes de la défense immunitaire.

Bibliographie

Bibliographie récente

  • H. Bazin, L’Histoire des vaccinations, John Libbey Eurotext, 2008.
  • P. Debré, Louis Pasteur, Flammarion, 1994.
  • A. Desquand, Madame Pasteur, Dmodmo Éditions, 2013.
  • H. Meunier, Et la rage fut vaincue, www.histoire.presse.fr/mensuel/74/et-la-rage-fut-vaincue-01-01-1985-47025
  • A. Perrot, M. Schwartz, Pasteur et ses lieutenants. Roux, Yersin et les autres, Odile Jacob, 2013.
  • A. Perrot, M. Schwartz, Pasteur et Koch. Un duel de géants dans le monde des microbes, Odile Jacob, 2014.

Date de mise en ligne : 16/07/2015.

https://doi.org/10.3917/seve.047.0025
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