Notes
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[1]
Déplaude MA : Instituer la « sélection » dans les facultés de médecine. Genèse et mise en œuvre du numerus clausus de médecine dans les années 68 », Revue d’histoire de la protection sociale 2009/1 (n° 2) : 79-1001.
-
[2]
Hardy-Dubernet AC, Arliaud M, Horellou-Lafarge C, Le Roy F, Blanc MA. La réforme de l’internat de médecine de 1982 et ses effets sur les choix professionnels des médecins : recherche réalisée dans le cadre du programme INSERM/ CNRS/MIRE 98 : processus de décision et changements des systèmes de santé. 2001. <halshs-00847791>.
-
[3]
Atlas de la démographie médicale en France, situation au 1er janvier 2018, Conseil national de l’Ordre des médecins.
-
[4]
Note d’information du SIES 18.08 Novembre.
-
[5]
DREES. Portrait des professionnels de santé. Édition 2016, pages 89- 93.
-
[6]
Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, rapport au président de la République, 17 décembre 2012.
-
[7]
Propositions de transcriptions législatives et réglementaires des conclusions des Assises 2012 de l’enseignement supérieur et de la recherche, rapport remis à Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, le 14 janvier 2013 par Jean-Yves Le Déaut.
1Le numerus clausus et les modalités de sélection des futurs médecins sont fortement décriés depuis plusieurs décennies. Les critiques portent autant sur le manque de médecins dans certains territoires, considéré comme consécutif à un numerus clausus trop bas, que sur l’échec de candidats de qualité au concours de première année commune aux études de santé (PACES) ou les modalités de sélection.
2Le président de la République, Emmanuel Macron, s’était engagé durant la campagne à l’élection présidentielle à « mettre fin à ce système absurde qui en médecine exclut 80 % des étudiants ». Dans son interview au journal Ouest France du 18 avril 2017, il déclarait : « Il faut en finir avec le numerus clausus, qui est à la fois inefficace et injuste. Il est inefficace, parce que le monde a changé. Plus du quart des nouveaux inscrits au tableau de l’Ordre des médecins se sont formés à l’étranger. On écarte précocement des étudiants motivés qui auraient fait d’excellents médecins, pour finir par en retenir, voire à en chercher d’autres, dont la formation est inégale. Le numerus clausus est aussi injuste, car nos jeunes sont sélectionnés sur des épreuves qui ne rendent pas compte de leurs capacités à devenir demain d’excellents professionnels, au service de leurs patients. Chaque année, des milliers de vocations sont ainsi brisées, et parfois pour quelques QCM. Je mettrai donc un terme à ce dispositif périmé. (…) »
3Le 18 septembre 2018, il annonçait la suppression du numerus clausus et de la PACES : « Le système est absurde, et il nous faut donc le regarder en face. Au même moment, nos entreprises cherchent des talents en biotechnologie, dans les laboratoires de recherche et cherchent ces mêmes compétences, j’ai exprimé sur ce point ma conviction de longue date, et les ministres m’ont proposé une rénovation complète des études de santé, et notamment médicales. Le numerus clausus sera donc supprimé pour cesser d’entretenir une rareté artificielle, et pour nous permettre de former plus de médecins avec un mode de sélection rénové, et de renforcer la dimension qualitative et le niveau de formation des études de santé.
4C’est ce travail que les ministres conduiront dans les prochains mois pour repenser, après les concertations indispensables, les études de médecine. »
5« Dès la rentrée 2020, il n’y aura plus de concours à la fin de la première année, c’est-à-dire plus de PACES, cet acronyme synonyme d’échec pour tant de jeunes. Demain, tous les étudiants inscrits en licence, quelle que soit leur spécialité, pourront rejoindre en deuxième, troisième ou quatrième année le cursus de médecine, et les ministres détailleront justement toutes les formations aux métiers de la santé qui seront ainsi rénovés, pour favoriser les passerelles entre les métiers, les enseignements communs, la possibilité de poursuivre ou de reprendre une formation et de participer à des activités de recherche. »
6Ainsi la double suppression du numerus clausus et de la PACES et des ECN a été proclamée.
Le numerus clausus : instauration, évolution et critiques
7► Suite aux événements de mai 1968, l’externat des hôpitaux, créé par le décret du 4 ventôse an X, 23 février 1802, a été supprimé par le décret du 18 février 1969 (annexe 1), modifié par le décret du 8 octobre 1970 (annexe 2). Ce décret disposait que les étudiants en médecine de quatrième et cinquième années étaient chargés de fonctions hospitalières et qu’ils portaient le titre « d’étudiants hospitaliers à l’exclusion de tout autre titre », ce qui actait la disparition du titre d’externe des hôpitaux et de l’externat des hôpitaux. Ainsi, tout étudiant en médecine a pu accomplir des stages pratiques à l’hôpital, et non uniquement les étudiants nommés au concours de l’externat. Cette augmentation significative du nombre d’étudiants à l’hôpital a soulevé la question de l’encadrement et de la qualité de la formation. Proposer une limitation du nombre d’étudiants en médecine réunissait les intérêts convergents de professeurs de médecine soucieux du prestige de leur profession, de la Fédération hospitalière de France qui redoutait un trop grand nombre d’étudiants dans les services hospitaliers susceptible de nuire à l’image de l’hôpital public, et du ministère en charge du budget en raison d’une part de la rémunération des étudiants en médecine et d’autre part de la maîtrise des dépenses de santé en ville. C’est dans ce contexte que le numerus clausus a été instauré par la loi du 12 juillet 1971 (annexe 3) et défini par arrêté interministériel pour l’admission dans les études de médecine et d’odontologie. Le gouvernement, afin d’éviter de le recours à une loi, avait prévu que cette sélection reposerait sur un arrêté, mais la loi Edgar Faure d’orientation de l’enseignement supérieur de 1968 interdisait toute sélection à l’entrée de l’université. Le Conseil d’État auquel le projet d’arrêté avait été soumis a statué en assemblée générale que les dispositions de la loi Faure « excluent toute sélection ». Ainsi, le gouvernement a déposé un projet de loi qui ne portait pas uniquement sur le numerus clausus mais sur différentes dispositions de la loi Edgar Faure [1]. Afin de ne pas remettre en question l’interdiction de toute sélection à l’entrée de l’université, la loi du 12 juillet 1971 n’utilise pas les termes « sélection » et « numerus clausus ». Elle énonce qu’un arrêté « fixe pour chaque année le nombre des étudiants susceptibles d’être accueillis pour leur formation clinique et pratique dans les services hospitaliers ». La sélection à l’université qui avait été refusée en 1968 apparaît subrepticement avec cette loi qui traite déjà de l’orientation des étudiants et notamment annonce un décret qui « organisera les enseignements conduisant à un diplôme universitaire de biologie ». Suite à la commission mixte paritaire, le sénateur Adolphe Chauvin, rapporteur pour le Sénat de la CMP, avait expliqué : « Nous voulons qu’à la fin du premier cycle d’études un examen sanctionné par un diplôme permette aux intéressés de trouver un emploi dans une profession paramédicale (annexe 4) ».
Annexes. Textes législatifs et réglementaires relatifs à la sélection des étudiants en médecine depuis 1971 (extraits)
2. Décret n° 70-931 du 8 octobre 1970 relatif aux fonctions hospitalières des étudiants en médecine.
3. Loi 71-557 du 12 juillet 1971 aménageant certaines dispositions de la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968 d’orientation de l’enseignement supérieur. « Art. 15. - L’article 45 de la loi du 12 novembre 1968 est complété par les deux alinéas suivants :
En vue de permettre aux étudiants qui se destinent aux professions médicales et dentaires de participer effectivement à l’activité hospitalière, un arrêté du ministre de l’Éducation nationale et du ministre de la Santé publique et de la Sécurité sociale fixe pour chaque année le nombre des étudiants susceptibles d’être accueillis pour leur formation clinique et pratique dans les services hospitaliers relevant tant des centres hospitaliers et universitaires et des centres de soins, d’enseignement et de recherche dentaires, que des établissements avec lesquels les-dits centres ont passé convention, sur avis du comité de coordination hospitalo-universitaire créé par l’article l8 de la loi n° 70·1318 du 31 décembre 1970. Les unités d’enseignement et de recherche médicales et odontologiques doivent fixer en conséquence le nombre des étudiants admis à entreprendre des études médicales ou dentaires proprement dites ; les conseils d’universités détermineront, conformément aux propositions de ces unités, les modalités selon lesquelles il est procédé à cette limitation.
« Avant le 15 octobre 1972 un décret organisera les enseignements conduisant à un diplôme universitaire de biologie ».
4. JORF du 1er juillet 1971, p 1550.
5. Fixation pour l’année universitaire 1974-1975 du nombre des étudiants susceptibles d’être accueillis pour leur formation clinique et pratique dans les services hospitaliers relevant tant des centres hospitaliers et universitaires et des centres de soins, d’enseignement et de recherche dentaires que des établissements avec lesquels lesdits centres ont passé convention. JORF 23 octobre 1971, 10449-50.
6. Loi n° 79-4 du 2 janvier 1979 portant réforme de la loi n° 68-978 du 12 novembre 1968 d’orientation de l’enseignement supérieur et relative aux études en pharmacie et au statut des personnels enseignants des unités d’enseignement et de recherche pharmaceutiques.
7. Loi n° 79-565 du 6 juillet 1979 relative aux études médicales et pharmaceutiques Art. 3.
Le troisième alinéa de l’article 45 de la loi no 68- 978 précitée du 12 novembre 1968, modifiée, est rédigé comme suit :
« Le· ministre chargé de la Santé et le ministre chargé des Universités arrêtent pour chaque année, après avis des comités de coordination hospitalo-universitaires, compte tenu des besoins de la population, de la nécessité de remédier aux inégalités géographiques et des capacités de formation des centres hospitaliers régionaux faisant partie des centres hospitaliers et universitaires et des établissements avec lesquels lesdits centres ont passé convention, le nombre des étudiants de première année du premier cycle des études médicales ou odontologiques admis à entrer en deuxième année du premier cycle ; les conseils d’université déterminent, conformément aux propositions des unités d’enseignement et de recherche, les modalités selon lesquelles il est procédé à cette limitation. »
Art. 4.
« À titre transitoire : au cours des deux années universitaires suivant la promulgation de la présente loi, la variation des effectifs globaux des étudiants admis à poursuivre leurs études au-delà de la première année du premier cycle ne pourra excéder 10 % par rapport à l’année antérieure.(…) ».
8Le premier arrêté (annexe 5) a été signé le 21 octobre 1971 par le ministre de l’Éducation nationale Olivier Guichard et par le ministre de la Santé publique et de la Sécurité sociale Robert Boulin. Il fixait le nombre d’étudiants à 25 764 pour l’année universitaire 1974-1975. Ce nombre fixé en fonction des capacités de formation des hôpitaux recouvre les trois années d’études, soit de l’ordre de 8 600 étudiants par an.
9Ce n’est qu’en 1979 que fut créé le numerus clausus dans les études de pharmacie par la loi du 2 janvier 1979 (annexe 6), mais la question des études uniquement de pharmacie ne sera pas développée dans le présent texte.
10► La loi de 1971 qui conférait aux universités l’initiative de la fixation de la capacité de formation a rapidement montré ses limites. L’attractivité de la profession de médecin a conduit à ce que le nombre d’étudiants inscrits en 1re année de médecine soit passé de 15 540 pour l’année 1970-1971 à 35 885 pour l’année 1975-1976. Certaines filières étaient pléthoriques alors que des besoins n’étaient pas couverts [2]. C’est dans ce contexte rénové qu’a été préparée la loi n° 79-565 du 6 juillet 1979 (annexe 7) relative aux études médicales et pharmaceutiques. Dans son rapport au nom de la commission spéciale sur le projet de loi, le sénateur Gouteyron expliquait que « les propositions formulées par la commission [Fougère] rendent indispensable la régulation des effectifs. En effet, le bon fonctionnement des cycles de formation du généraliste comme du spécialiste, et à un moindre degré, l’amélioration des premiers et deuxièmes cycles, imposent la réduction de près d’un tiers du nombre des médecins formés chaque année – de 9 000 aux environs de 6 000 – qui devrait être obtenue par le renforcement de la sélection à la fin de la première année du premier cycle ». Cette loi de 1979 visait « à adapter la médecine, en quantité et en qualité, aux besoins de la population ». La réforme de 1971 était considérée comme n’ayant pas eu l’efficacité escomptée, dès lors que plus de 10 000 étudiants ont été admis annuellement en deuxième année de médecine, entre 1975 et 1977, malgré l’arrêté interministériel fixant à 8 600 la capacité de formation annuelle. La loi de 1979 a donné toute compétence aux ministres de la Santé et des Universités pour fixer le nombre d’étudiants en médecine admis en deuxième année, en supprimant ainsi le pouvoir d’appréciation de la loi de 1971. Elle a aussi pris en compte, non seulement les capacités de formation mais aussi les besoins de la population et, enfin, elle confie aux ministres de déterminer la proposition d’étudiants pouvant accéder soit aux spécialités, soit à la médecine générale, qui n’était pas alors considérée comme une spécialité médicale.
11Le numerus clausus a été ensuite progressivement réduit jusqu’à 3500 étudiants en 1993, puis est resté en dessous de 4 000 jusqu’en 2 000. Ensuite l’augmentation a été rapide avec 7 400 places en médecine en 2009 et il est de 8 205 en 2018 plus 60 au titre du numerus clausus complémentaire (figure).
Évolution du numerus clausus depuis son instauration*
Évolution du numerus clausus depuis son instauration*
*Les évolutions du numerus clausus et des quotas pour les professionnels de santé. Portrait des professionnels de santé, édition 2016, DREES12► Le numerus clausus reste l’objet de nombreuses critiques :
- le contournement par des formations hors de France mais au sein de l’Union européenne (UE) et permettant d’intégrer le 3e cycle des études de médecine via les ECN ;
- la reconnaissance automatique de la validité des diplômes au sein de l’UE. Au cours de l’année 2017, l’Ordre des médecins a comptabilisé 84,13 % de nouveaux inscrits titulaires d’un diplôme français, 8,07 % d’un diplôme de l’UE et aussi 7,80 % d’un diplôme extra-européen [3] ;
- son nombre est insuffisant pour répondre aux besoins en santé dans certains territoires évalués comme sous-denses en médecins. Toutefois, le nombre de médecins inscrits à l’Ordre des médecins n’a jamais été aussi élevé avec 296 755 médecins inscrits au tableau de l’Ordre des médecins au 1er janvier 2017, selon l’atlas de la démographie médicale 2018 du CNOM. Mais tous les médecins inscrits ne sont pas en activité et surtout le nombre de médecins en activité régulière est en diminution avec 198 081 médecins en activité totale contre 62 275 retraités sans activité et 17 373 qui bénéficient d’un cumul emploi-retraite. La question du temps médical et non uniquement du nombre de médecins doit être prise en compte. De plus, une modification du numerus clausus n’a d’impact qu’après dix ans du fait de la longue durée des études médicales ;
- l’échec d’étudiants ayant obtenu de bons résultats en fin de première année, mais insuffisants pour s’inscrire en deuxième année. Les termes de « gâchis humain » sont régulièrement utilisés d’autant plus que des bacheliers avec mention très bien au baccalauréat S sont recalés.
13► Nombre de médecins nécessaires aux besoins en santé de la population : de l’organisation du système de santé et de l’évolution des technologies dépend le nombre de médecins nécessaires aux besoins en santé de la population. Ainsi la réponse aux besoins de santé ne repose pas que sur le nombre de médecins pondéré du temps médical mais d’abord sur celui du nombre de professionnels de santé et sur la distribution des tâches. Doivent être prises en considération les pratiques avancées, ou les compétences partagées entre médecins et autres professionnels de santé, comme la vaccination, la filière visuelle avec orthoptistes et ophtalmologistes, la filière obstétricale avec sages-femmes et obstétriciens.
14Il en est de même avec le développement de nouvelles technologies facilitant la télémédecine avec téléconsultation et télé-expertise.
15L’intelligence artificielle (IA) modifiera profondément les pratiques médicales et dès à présent les professions d’anatomo-pathologistes, de radiologues ou de dermatologues doivent évoluer avec les avancées de l’IA dans l’analyse d’image.
16Le nombre de médecins nécessaires pour satisfaire les besoins en santé de la population étant la conséquence de cette organisation du système de santé, ce nombre peut être très différent selon l’organisation retenue.
17De plus, à supposer que la projection du nombre de médecins puisse être établie en réduisant les incertitudes, il reste à prendre en compte les médecins s’ajoutant au numerus clausus : médecins non français mais venant exercer en France une fois le diplôme obtenu, et étudiants européens rejoignant le 3e cycle via les ECN.
18Enfin, le numerus clausus n’est pas le seul critère susceptible d’assurer la répartition des médecins sur le territoire afin de permettre l’accès aux soins dans les zones sous-denses qualifiées de « déserts médicaux ». Selon le rapport 2014-2015 de l’ONDPS, 63 % des primo-inscrits à l’Ordre s’installent dans la région de leur diplôme. Or la région du diplôme est en lien avec la subdivision où le 3e cycle a été réalisé et non uniquement avec le lieu où le médecin a réussi la première année de médecine.
19► Quelle régulation en l’absence d’un numerus clausus ?
20La suppression du numerus clausus ne doit pas faire perdre l’acquis d’une régulation quantitative, en termes d’approche des besoins de santé et de capacités de formation, indispensable au développement des compétences. Le nombre de praticiens doit aussi être compatible avec une pratique professionnelle suffisante pour garantir la qualité des actes.
21La Grande conférence de santé (11 février 2016) avait suggéré d’introduire une modulation régionale du numerus clausus en le fixant au sein de chaque subdivision avec une fourchette pour le numerus clausus régional dont la borne minimale serait établie en fonction des besoins de santé du territoire et la borne maximale en fonction des capacités réelles de formation. Dans le cadre de la stratégie de transformation du système de santé, le rapport « Adapter les formations aux enjeux du système de santé » (A. Tesnière, S. Rist et I. Riom, 2018) recommandait la suppression du numerus clausus pour les quatre filières de la PACES et le remplacement par « des populations définies par les capacités d’accueil des sites universitaires ». La régulation du nombre d’étudiants serait fonction des capacités de formation et des critères académiques de chaque université.
22De plus, un étudiant en médecine reçoit une rémunération à partir de la 4e année de médecine (DFASM1) pour son activité hospitalière qui se poursuit durant les années d’internat. Cette rémunération représente environ 150 000 € par étudiant sur la totalité du cursus, ce budget relevant du ministère en charge de la Santé. Ce coût nécessite que le ministère de la Santé soit étroitement associé à la décision de fixation du nombre d’étudiants admis à poursuivre les études de médecine afin de garantir la soutenabilité financière. Une possibilité serait de demander au directeur général de l’ARS de valider ou non la proposition formulée par l’université ou les universités de sa région.
23Le projet de loi relatif à l’organisation et à la transformation du système de santé prévoit que les objectifs pluriannuels d’admission en première année du deuxième cycle des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de maïeutique, soient arrêtés par l’université après avis conforme de l’ARS.
PACES (première année commune aux études de santé) : instauration, évolution, critiques
24► Le rapport du sénateur Gouteyron sur le projet de loi du 6 juillet 1979 relevait déjà que « l’examen de sélection passé à l’issue de la première année départage encore trop souvent les candidats sur des connaissances mathématiques et scientifiques. (…) Cette situation a pour effet de ne retenir que certaines catégories de bacheliers : seuls les titulaires du baccalauréat C et D ont des chances réelles de succès. Ceux des autres séries, qui représentent parfois encore 15 à 20 % des effectifs, n’en ont presque aucune ». La critique sur le manque de diversification des formations secondaires des futurs médecins reposait sur le contenu des enseignements de première année de médecine.
25Avant la mise en place de la PACES coexistaient le premier cycle des études médicales, PCEM, et le premier cycle des études pharmaceutiques, PCEP. Le PCEM accueillait des étudiants qui à l’issue du concours choisissaient, selon leur rang de classement et dans les limites du numerus clausus de chaque filière, de poursuivre des études de médecine, d’odontologie ou de sage-femme. Certaines universités offraient également la possibilité de poursuite d’études ou d’admissibilité pour les professions de kinésithérapeute, ergothérapeute ou psychomotricien, notamment. Le PCEM faisant l’objet de vives critiques, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Valérie Pécresse, a confié, en octobre 2007, une mission au Pr J.-F. Bach pour élaborer des propositions concrètes de réforme du PCEM et du PCEP. Dans son rapport remis le 21 février 2008, le Pr J.-F. Bach énonçait : « En tout état de cause, le taux d’échec est beaucoup trop lourd. La perte de deux années n’est pas justifiée pour la majorité des étudiants, tant bien sûr pour ceux qui ne sont pas reçus, que pour une grande partie de ceux qui sont finalement reçus mais qui avaient déjà le niveau nécessaire pour suivre la deuxième année après le premier concours : une perte de temps et une frustration inutiles donnant lieu à des effets pervers graves, notamment un ‘‘bachotage‘‘ bien éloigné de l’esprit de la formation universitaire, auxquelles s’ajoute le développement d’officines privées coûteuses de préparation aux concours. »
26Ce rapport a conduit à une proposition de loi portée par le député Jacques Domergue et de nombreux autres députés et aboutissant à la loi du 7 juillet 2009 (annexe 8). Le rapport du député soulignait la sélection « très sévère pour les étudiants et mal adaptée aux besoins de santé de la population ». Elle critiquait également l’organisation « trop cloisonnée » des études de santé, offrant aux étudiants des débouchés restreints et des possibilités de réorientation insuffisantes. La PACES a ainsi créé une première année commune pour les quatre filières médecine, odontologie, pharmacie et sage-femme, avec quatre concours distincts. L’organisation des enseignements repose sur un tronc commun et des unités d’enseignement spécifiques à chaque filière.
9. Code de l’éducation
Article L631-1
I. - La première année des études de santé est commune aux études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de sage-femme. Les ministres chargés de l’Enseignement supérieur et de la Santé déterminent par voie réglementaire :
- L’organisation de cette première année des études de santé ;
- Le nombre des étudiants admis dans chacune des filières à l’issue de la première année des études de santé ; ce nombre tient compte des besoins de la population, de la nécessité de remédier aux inégalités géographiques et des capacités de formation des établissements concernés. Toutefois, les universités peuvent répartir ce nombre entre plusieurs unités de formation et de recherche pour répondre à des besoins d’organisation et d’amélioration de la pédagogie. Un arrêté détermine les critères de répartition de ce nombre de façon à garantir l’égalité des chances des candidats ;
- Les modalités d’admission des étudiants dans chacune des filières à l’issue de la première année ;
- Les conditions dans lesquelles les étudiants peuvent être réorientés à l’issue du premier semestre de la première année des études de santé ou au terme de celle-ci ainsi que les modalités de leur réinscription ultérieure éventuelle dans cette année d’études.
2. Peuvent également être admis en deuxième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou en première année d’école de sage-femme des étudiants engagés dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou de sage-femme et souhaitant se réorienter dans une filière différente de leur filière d’origine ; cette possibilité de réorientation est ouverte aux étudiants ayant validé au moins deux années d’études dans la filière choisie à l’issue de la première année.
Les ministres chargés de l’Enseignement supérieur et de la Santé arrêtent le nombre, les conditions et les modalités d’admission des étudiants mentionnés aux 1 et 2.
III. - Le ministre chargé de la Santé est associé à toutes les décisions concernant les enseignements médicaux, odontologiques et pharmaceutiques.
27La PACES avec cette année commune permet aux étudiants d’acquérir une culture de santé commune.
28La loi du 7 juillet 2009 offre la possibilité d’une réorientation à l’issue du premier semestre ou de la première année, instaure des passerelles d’accès en deuxième année et troisième année pour chacune des quatre filières et un « droit au remords » pour les étudiants ayant accompli deux ans dans une des quatre filières santé et souhaitant changer de passerelles.
29L’article L.631-1 (annexe 9) du code de l’éducation, dans sa version issue de cette loi, constitue la base juridique de la PACES et du numerus clausus.
30► Il est apparu que la PACES n’a pas modifié la très forte sélection. 12 % des primants en 2015-2016 ont été admis en deuxième année, 47 % des redoublants ont réussi la PACES, et au total environ un tiers des étudiants ont réussi le concours, d’une des quatre formations, sur les deux années de présentation possible [4]. Toutefois, dès lors que près de 60 000 étudiants étaient inscrits en PACES durant l’année universitaire 2017-2018, le nombre de candidats ayant échoué reste considérable.
31De plus, la PACES n’a pas rendu moins homogène la population de futurs médecins, mais a hiérarchisé les différentes disciplines. Elle a notamment conduit à des choix de disciplines par défaut dont se sont plaints, notamment, les doyens de pharmacie. La PACES est également critiquée du fait du bachotage qui est relayé par des cours privés préparant au concours et ajoutant un biais de sélection par l’argent. Les épreuves sur lesquelles repose l’évaluation font l’objet de critiques en ce qu’elles ne sélectionnent pas les futurs professionnels de santé sur les compétences attendues de ces professionnels.
32La PACES a également reproduit la hiérarchie des baccalauréats et des mentions au bac série S.
33Par ailleurs, la DREES [5] a relevé, en 2016, que « les catégories sociales favorisées continuent d’être surreprésentées », les enfants de cadres et professions intellectuelles supérieures représentant 40 % du nombre d’inscrits contre 30 % de l’ensemble des inscrits à l’université et par suite la filière médicale accueille moins de boursiers sur critères sociaux.
34► Les Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, réunies en 2012, ont abouti à 135 propositions [6] dont la réforme des études de santé selon trois scénarios : l’ouverture des accès passerelles à la deuxième ou troisième année des études de santé à partir de licences généralistes, la création d’une licence santé généraliste, ou la mise en place des parcours LMD correspondant aux quatre grands domaines de formation en santé. Ce rapport a été suivi des propositions de transcriptions législatives et règlementaires [7] par un parlementaire en mission, Jean-Yves Le Déaut. Ce dernier a proposé d’une part « la suppression du concours en fin de première année, la mise en place d’une spécialisation progressive dans le cadre d’une licence par grand domaine (médical, pharmaceutique, rééducation, soins infirmiers, maïeutique…) qui permettra d’orienter, en fonction des résultats académiques, les étudiants sur plusieurs années » et d’autre part de repousser à la fin de la troisième année les concours ouvrant aux formations diplômantes de niveau master et doctorat et a précisé que « l’orientation active progressive aboutira à l’amélioration du taux de réussite au concours et mettra fin au gâchis actuel qui est inacceptable ».
35► À défaut de supprimer la PACES récemment mise en place, la ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, Geneviève Fioraso, a inscrit dans la loi du 22 juillet 2013 (annexe 10) une disposition permettant des expérimentations dérogeant avec les modalités de la PACES (annexe 11). L’exposé des motifs indiquait : « Il pourra s’agir, d’une part, d’assurer la réorientation des étudiants de première année n’ayant pas réussi les épreuves portant sur les enseignements dispensés en début d’année, d’autre part, de prévoir pour des étudiants ayant suivi un premier cycle adapté qui conduit à un diplôme de licence, de bénéficier d’une admission différée en 2e ou en 3e année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de maïeutique, selon des modalités fixées par décret. Ces expérimentations sont autorisées pour une durée de six ans et feront l’objet, au cours de l’année précédant l’expiration de ce délai, d’un rapport d’évaluation, présenté au Conseil national de l’Enseignement supérieur et de la Recherche par le ministre chargé de l’Enseignement supérieur et le ministre chargé de la Santé, puis adressé au Parlement ».
11. Loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche. Article 39
À titre expérimental, pour une durée de six ans, et par dérogation aux dispositions du I de l’article L. 631-1 du code de l’éducation, des modalités particulières d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et de maïeutique peuvent être fixées par décret sous la forme :
1 D’une réorientation des étudiants de la première année commune aux études de santé à l’issue d’épreuves organisées au plus tôt huit semaines après le début de celles-ci, portant sur les enseignements dispensés au cours de cette période. Seuls les étudiants considérés, sur la base de ces épreuves, comme n’étant pas susceptibles d’être classés en rang utile à l’issue de la première année peuvent être réorientés. La réorientation peut être systématique, le nombre de ces réorientations ne pouvant alors excéder un pourcentage du nombre d’inscrits, déterminé par arrêté après consultation des organisations représentatives concernées. Une réorientation facultative peut également être proposée aux étudiants au-delà de ce pourcentage. L’université assure dans tous les cas la réorientation de ces étudiants en leur proposant une inscription dans une formation qui les accueille dès l’année universitaire en cours ;
2 D’une admission en deuxième ou en troisième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques ou de maïeutique après une à trois années d’un premier cycle universitaire adapté conduisant à un diplôme national de licence. Le nombre des étudiants admis en deuxième année après la première année commune et le nombre des étudiants admis directement en deuxième ou en troisième année sont fixés, pour chaque université concernée et pour chacune des filières, par arrêté conjoint des ministres chargés de l’Enseignement supérieur et de la Santé.
Au cours de la cinquième année de l’expérimentation, les ministres chargés de l’Enseignement supérieur et de la Santé présentent conjointement au Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche un rapport d’évaluation des expérimentations menées au titre du présent article. Ce rapport, accompagné de l’avis du Conseil national de l’enseignement supérieur et de la recherche, est adressé au Parlement.
36La réorientation des étudiants de la PACES est possible « à l’issue d’épreuves organisées au plus tôt huit semaines après le début de celles-ci, portant sur les enseignements dispensés au cours de cette période. Seuls les étudiants considérés, sur la base de ces épreuves, comme n’étant pas susceptibles d’être classés en rang utile à l’issue de la première année peuvent être réorientés ». Cette loi ouvrait donc l’accès aux études de médecine par une autre voie que la PACES en s’appuyant sur des initiatives des universités mais après accord ministériel.
37► Le décret du 20 février 2014 (annexe 12) a mis en œuvre cette possibilité d’expérimentations. Sept premières universités (annexe 13) ont été autorisées à mettre en place ces expérimentations par l’arrêté du 20 février 2014 (annexe 14). La Grande conférence de santé avait recommandé d’une part de « poursuivre et renforcer les expérimentations de la première année commune aux études de santé » et d’autre part de « favoriser les passerelles entre les études paramédicales et médicales », notamment en permettant aux professionnels paramédicaux d’accéder aux formations médicales sans repartir de zéro dans les études.
38L’arrêté du 20 février 2014 a été modifié par celui du 30 mai 2018 (annexe 15) autorisant 24 universités expérimentatrices (annexe 16). Les expérimentations sont de trois types : PluriPASS, AlterPACES seul, ou PACES adaptée et AlterPACES.
39L’expérimentation PluriPASS a été mise en place à l’université d’Angers dès le premier appel à expérimentation du ministère de l’Enseignement supérieur et de la Recherche. La PACES a été remplacée par un parcours multidisciplinaire commun aux études de santé mais aussi à plusieurs licences des universités d’Angers et du Maine et à des diplômes d’ingénieur (ISTIA, ENIM). Les licences couvrent de larges champs disciplinaires : droit, sciences économiques et de gestion, psychologie, informatique, sciences chimiques, sciences de la vie, sciences pour l’ingénieur… Les étudiants accèdent aux filières de santé en fin de deuxième semestre et de troisième semestre. Pluri- PASS met en œuvre des modalités pédagogiques comme le travail encadré à distance sur la plateforme numérique Moodle, des petits groupes d’enseignements dirigés, des examens en continu, et un tutorat organisé par l’association étudiante.
40AlterPACES est un dispositif de formation qui permet à des étudiants de L2 ou de L3 de suivre des enseignements scientifiques afin d’intégrer la deuxième année d’une filière santé. L’obtention de la licence est indissociable de l’admission en 2e année d’études en santé.
41► La loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants (annexe 17) inclut un amendement sénatorial prolongeant de deux ans les expérimentations autorisées par la loi Fioraso, sur l’argument que les universités ont tardé à s’engager dans ce dispositif à compter de la rentrée universitaire 2014 et que les retours d’expérience ont conduit d’autres universités à souhaiter entrer dans le dispositif. L’amendement a également élargi les possibilités d’expérimentation en ajoutant « un dispositif qui combine une PACES modifiée et adaptée de sorte de permettre aux étudiants qui ont validé cette première année d’études sans être admis, à son terme, en deuxième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques, de poursuivre leur études dans une formation conduisant à la licence, tout en leur conservant la possibilité de se présenter une nouvelle fois aux épreuves d’admission en deuxième année des études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques après un à six semestres d’études postérieures à la PACES, selon le dispositif expérimenté par l’université intéressée, et conduisant à une licence », selon l’objet de l’amendement.
13. Les universités d’Angers, de Paris-V, Paris-VII, Paris-XIII, Rouen, Saint-Étienne et Strasbourg.
14. Arrêté du 20 février 2014 relatif à l’expérimentation de nouvelles modalités d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques.
15. Arrêté du 30 mai 2018 modifiant l’arrêté du 20 février 2014 relatif à l’expérimentation de nouvelles modalités d’admission dans les études médicales, odontologiques, pharmaceutiques et maïeutiques.
16. Les universités d’Aix-Marseille, d’Angers, Besançon, Brest, Caen, Clermont-Auvergne, Corse, Grenoble-Alpes, Lorraine, Lyon 1, Paris V, Paris VI, Paris VII, Paris XI, Paris XII, Paris XIII, Poitiers, Reims, Rennes-I, La Réunion, Rouen, Saint-Étienne, Sorbonne université, Strasbourg et Tours.
17. Loi n° 2018-166 du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants
Article 16
L’article 39 de la loi n° 2013-660 du 22 juillet 2013 relative à l’enseignement supérieur et à la recherche est ainsi modifié :
- Au premier alinéa, les mots : « six ans » sont remplacés par les mots : « huit ans » ;
- Après le 1°, il est inséré un 1° bis ainsi rédigé :
42► Quelles alternatives possibles à la PACES ?
43La question des alternatives possibles à la PACES doit être examinée à la fois quant au contenu de la formation et à l’année de la sélection.
44– Sélection à l’entrée à l’université. Cette sélection a longtemps été souhaitée notamment par des doyens de médecine. Et nous avons vu précédemment que la loi de 1971 était déjà un compromis en prévoyant une sélection en fin de première année de médecine et non à l’entrée en première année. Le principe d’absence de sélection à l’entrée de l’université prononcé par la loi Edgar Faure de 1968 ne pouvait être remis en question par crainte d’un grand mouvement étudiant. Le sujet avait été une fois de plus traité lors des Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche en 2012 dont le rapport relève que « l’hypothèse de la sélection des étudiants à l’entrée de la PACES – défendue par certains directeurs des UFR de médecine – a rencontré un front de refus motivé de la part des syndicats étudiants et certains syndicats enseignants, faisant valoir que chaque bachelier doit pouvoir tenter sa chance ». La loi du 8 mars 2018 relative à l’orientation et à la réussite des étudiants en instaurant une procédure nationale de préinscription, Parcoursup, reposant sur les capacités d’accueil des formations du premier cycle pourrait permettre de procéder à une limitation du nombre d’inscrits en première année d’études de santé. Toutefois, les modalités et critères de sélection resteraient à définir : dossier, entretien, type de baccalauréat et mention, tout en permettant une diversification des profils. Le sujet reste néanmoins très sensible pour les syndicats étudiants. Indépendamment des modalités de sélection, une critique majeure opposée à cette sélection à l’entrée est qu’elle concernerait essentiellement des néobacheliers, alors que des étudiants peuvent ne connaître leurs souhaits d’orientation dans les études de santé qu’après avoir suivi un socle de formation. Une sélection à l’entrée devrait être accompagnée de possibilités significatives d’accès ultérieur aux études.
45– Sélection partielle à l’issue d’une première année unique. Il ne s’agit pas de reproduire la PACES mais de prévoir une PACES sans redoublement. Ainsi, trois universités parisiennes instituent, dès la rentrée universitaire 2018-2019, une organisation de la PACES, intitulée PACES ONE avec deux sessions en première année, épuisant les places mises au recrutement par cette voie. Les places restantes étant accessibles au moyen de passerelles telle l’Alter PACES. La première conséquence est la disparition des redoublants s’ajoutant aux primants pour une année entière. Or, sur l’année 2017-2018, le pourcentage national de redoublants en PACES était de 30,7 %. Cette proposition réduit donc de manière très significative le nombre d’étudiants en première année. Les étudiants ayant échoué le concours mais ayant la moyenne sont titulaires de 60 crédits ECTS et peuvent poursuivre leurs études en deuxième année de licence.
46– Sélection progressive sur trois années de licence sur le modèle de Pluri- PASS ou d’une licence permettant l’accès aux études de médecine. La différence entre PluriPASS et la licence est que PluriPASS sélectionne aux trois premiers semestres les futurs étudiants en médecine et que la licence pourrait ne pas être une licence santé mais une licence comportant des enseignements avec des « majeurs » ou des « mineurs » en santé et intégrant une orientation active et progressive sur trois années.
47– Cas particulier des doubles cursus : certains étudiants pourraient bénéficier d’un double cursus dès la première année post-baccalauréat. Ces doubles cursus pourraient, par exemple, consister en un cursus simultané en médecine et en sciences, qu’il s’agisse de sciences exactes, sciences pour l’ingénieur, sciences de la vie, mais aussi sciences humaines et sociales. Toutefois, la question des modalités d’accès à ce double cursus aménagé est semblable à celle que nous avons abordée pour la sélection à l’entrée de l’université.
48Quel que soit le modèle retenu, l’apport des expérimentations a été le respect de l’autonomie des universités et la rupture avec un modèle unique d’accès aux études de médecine. Autonomie et absence de modèle unique sont appréciés par les acteurs.
Conclusion
49À la suppression du numerus clausus et de la PACES s’ajoute celle des ECN, épreuves classantes nationales, annoncée par la ministre des Solidarités et de la Santé et par la ministre de l’Enseignement supérieur, de la Recherche et de l’Innovation. Cette triple suppression constitue une réforme majeure de l’accès aux études de médecine et aux spécialités. Elle ne signifie nullement une dérégulation mais une nouvelle régulation du nombre de médecins formés en France. Toutefois, elle ne sera un plein succès que si elle permet de diversifier le profil des étudiants en médecine, d’encore accroître leurs motivations et leurs compétences professionnelles et de répondre aux besoins en santé de la population, tout en garantissant la facilité d’accès à un médecin partout sur le territoire. Mais la durée des études de médecine est telle que les premiers effets ne seront connus qu’une dizaine d’années après la mise en place effective de la réforme.
Notes
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[1]
Déplaude MA : Instituer la « sélection » dans les facultés de médecine. Genèse et mise en œuvre du numerus clausus de médecine dans les années 68 », Revue d’histoire de la protection sociale 2009/1 (n° 2) : 79-1001.
-
[2]
Hardy-Dubernet AC, Arliaud M, Horellou-Lafarge C, Le Roy F, Blanc MA. La réforme de l’internat de médecine de 1982 et ses effets sur les choix professionnels des médecins : recherche réalisée dans le cadre du programme INSERM/ CNRS/MIRE 98 : processus de décision et changements des systèmes de santé. 2001. <halshs-00847791>.
-
[3]
Atlas de la démographie médicale en France, situation au 1er janvier 2018, Conseil national de l’Ordre des médecins.
-
[4]
Note d’information du SIES 18.08 Novembre.
-
[5]
DREES. Portrait des professionnels de santé. Édition 2016, pages 89- 93.
-
[6]
Assises de l’enseignement supérieur et de la recherche, rapport au président de la République, 17 décembre 2012.
-
[7]
Propositions de transcriptions législatives et réglementaires des conclusions des Assises 2012 de l’enseignement supérieur et de la recherche, rapport remis à Jean-Marc Ayrault, Premier ministre, le 14 janvier 2013 par Jean-Yves Le Déaut.