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Article de revue

L’insignifiant comme altérité chez Clarice Lispector

Pages 93 à 101

Notes

  • [1]
    J. Lacan, « Maurice Merleau-Ponty », Les temps modernes, n° 184/185, 1961.
  • [2]
    C. Lispector, Um sopro de vida (1978), Rio de Janeiro, Rocco, 1999, p. 108 ; Un souffle de vie, trad. fr. J. et T. Thiériot, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1998, p. 146.
  • [3]
    O. Borelli, Esboço para um possivel retrato, Rio de Janeiro, Nova Fronteira, 1981, p. 79.
  • [4]
    Sur l’épiphanie dans l’oeuvre de Clarice Lispector, voir notamment : O. de Sá, Clarice Lispector a travessia do oposto, Rio de Janeiro, Annablume, 1999 ; A.R. de Santa’Anna, « O ritual epifânico do texto », dans B. Nunes (sous la direction de), A paixão segundo G.H. Edição crítica, Editora Unesco, 1996, p. 241-261.
  • [5]
    Cf. C. Millot, La vocation de l’écrivain, Paris, Gallimard, 1991.
  • [6]
    J. Lacan, Le Séminaire, Livre xxiii, Le sinthome (1975-1976), Paris, Le Seuil, 2005, p. 154.
  • [7]
    À comprendre selon l’expression deleuzienne « faire bégayer la langue ». Selon lui, il s’agirait non pas de faire du personnage un bègue de la langue, mais de l’écrivain lui-même. L’auteur ne se contente pas d’une indication extérieure (bégaya-t-il), et une certaine atmosphère est créée qui recueille le tremblé, le murmuré, le bégayé. C’est toute la langue qui tremble, qui vibre. Chez Clarice Lispector, c’est la répétition, la fragmentation, les hésitations qui font éclater la langue, créant une langue étrangère dans la langue.
  • [8]
    Cette chronique a été traduite en français sous le titre de « Pour pardonner Dieu », dans La découverte du monde (1984), trad. fr. J. et T. Thiériot. Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1995.
  • [9]
    Ibid., p. 385.
  • [10]
    C. Lispector, Agua viva, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, édition bilingue, trad. fr. R.H. de Oliveira Machado, 1973, p. 237.
  • [11]
    Pour une définition plus poussée du mot dans la mystique, voir C.-A. Bernard, Traité de la théologie spirituelle, Paris, Cerf, 1986, et pour une analyse de « Le partage des pains », voir H. Cixous, « Reaching the point of wheat, or a portrait of the artist as a maturing woman », Remate de Males, n° 9, 1989, p. 39-54, notamment la partie intitulée « The art of blessing ».
  • [12]
    C. Lispector, « Pour pardonner Dieu », op. cit., p. 386.
  • [13]
    Ibid., p. 387.
  • [14]
    C. Lispector, Agua viva, op. cit., p. 27.
  • [15]
    C. Lispector, A paixão segundo G.H., op. cit., p. 37 et 40, traduction de l’auteur.
  • [16]
    Il est intéressant de remarquer que le cheminement de G.H. vers le neutre de la matière vivante se déroule à la lumière du jour, sous le soleil, le noir de la blatte se situant comme un point d’obscurité à l’intérieur même de la lumière.
  • [17]
    S. Freud, L’inquiétante étrangeté et autres essais (1919), Paris, Folio, 1985.
  • [18]
    Cf. G. Deleuze, Kafka, Pour une littérature mineure, Paris, Éditions de Minuit, 1975.
  • [19]
    Cf. M. Blanchot, Le livre à venir (1959), Paris, Folio Gallimard, 1986.
  • [20]
    C. Lispector, Où étais-tu pendant la nuit ? (1974), trad. fr. G. Leibrich, N. Biros, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1985, p. 107-112.

Introduction

1Clarice Lispector est, sans doute, l’un des plus importants écrivains de la littérature brésilienne. Son originalité a été reconnue dès le début dès sa première publication. Son roman d’initiation Près du cœur sauvage (1943) a reçu plusieurs prix et, en même temps, n’a pas manqué de provoquer quelque malaise parmi la critique littéraire par son style inédit. Ce livre marque l’entrée de Clarice Lispector dans la littérature brésilienne et trace une certaine conception de la création par le biais d’un portrait de l’artiste. Romancière unique, nous pouvons citer La passion selon G. H. (1964) et L’heure de lʼétoile (1977), elle s’est aussi fait connaître par ses chroniques écrites pour le Jornal do Brasil dans les années 1960-1970, et publiées dans La découverte du monde, et par ses nouvelles, rassemblées notamment dans Liens de famille. Comparée à Virginie Wolf et à James Joyce, son œuvre a été traduite dans de nombreux pays.

2Pourquoi l’œuvre lispectorienne intéresse-t-elle la psychanalyse ? Si l’art nous donne à voir ce qui ne saurait se voir [1175], le recours à la littérature se justifie comme recours à un discours détenteur d’un savoir qui ne saurait être ailleurs. L’écriture de Clarice Lispector porte la marque singulière d’une approche par le cri, le souffle, signalant un au-delà de la parole, un impossible à dire. Son œuvre est orientée non pas vers la recherche d’un temps perdu de l’objet introuvable, mais vers le silence, vers le manque de l’objet même. Nous pouvons parler d’une écriture où il est question plutôt d’une sonorité signalant l’objet que du récit. Certes, la lettre demeure comme support de cette écriture, mais il nous semble que le plus singulier, dans cette écriture, était moins une dépuration de la lettre jusqu’à sa matérialité qu’une pulsation, qu’une respiration, du texte. Clarice Lispector dit elle-même que le sens ne vient pas par les mots, mais par la respiration. Or, cette écriture est toujours en défaut par rapport à ce qu’elle veut dire, par rapport à ce qu’elle veut être. Son œuvre tend vers une dépuration de la fantaisie et du récit, pour ne devenir que son, musique. Penser l’insignifiant, le mineur et l’inachevé comme l’altérité élevée à la dignité d’une valeur esthétique positive à partir de l’œuvre de Clarice Lispector, tel est notre propos. L’insignifiant serait donc un mode d’inscription non pas du signifiant, et du récit qui s’enchaîne, mais de ce qui échappe aux signifiants, de ce qui se laisse saisir dans le rythme, dans la respiration, du texte, ainsi que dans ce qui apparaît comme mineur, inachevé, laid, autre. L’insignifiant se situe plutôt du côté de l’objet que du signifiant ; petit déchet à la fois précieux et immonde.

3Même si le thème de l’exil et de l’étranger ne constitue pas un sujet explicite dans son œuvre, il est là, comme une sorte de sol profond ou de rivière souterraine, flux continu qui alimente toute l’œuvre. Non pas qu’elle se soit sentie comme étrangère au Brésil, Clarice Lispector a toujours été brésilienne et a toujours déclaré son amour à la langue portugaise. De son passé, de ses origines juives et de l’immigration de sa famille, elle n’a presque jamais parlé et s’est même opposée à la réédition du livre de sa sœur Elisa Lispector dont le titre, Exil, nous énonce déjà l’histoire du déplacement de sa famille de l’Ukraine vers le Brésil, les persécutions et les humiliations endurées. Néanmoins, Clarice Lispector nous parle d’un autre exil, de cet étranger à l’intérieur de nous-même, de cette altérité qui nous habite, de ce qui nous fait étranger quelque part dans le monde, en dehors de nous-même. Dans Un souffle de vie, livre posthume qui se présente comme une sorte de reprise de toute son œuvre, on peut lire : « Ce livre est l’ombre de moi-même. »

4L’altérité pourrait sans doute être une caractéristique de son œuvre elle-même. Dès la publication de son premier roman, des critiques ont remarqué l’originalité de son style, l’innovation que son expérience littéraire pourrait représenter pour la littérature brésilienne, son refus d’appartenir à un groupe littéraire. En effet, le sentiment de solitude et d’exception l’a toujours accompagnée au long de sa vie.

5Il semble que tout l’art de Clarice Lispector pourrait se contenir dans cette question posée par l’auteur, dans Un souffle de vie : « Comment faire un discours de ce qui est tout au plus un cri ou une douceur ou rien ou une insanité ou un vague idéal [2176] ? » Comment parler du cri, de l’ombre, de ce qui n’est presque rien, de l’insignifiant, telle est la question posée par son écriture. Cette écriture porte la trace de cette question, d’où la nécessité de toute une syntaxe particulière, l’effort de tout un langage qui veut être le plus proche possible de ce rien, de ce hors-langage. À la recherche de la reproduction de ce qui ne peut se reproduire, l’écriture réalise, dans sa forme même, ce dont elle parle, au point d’être réduite à un cri, à un souffle. Ainsi Clarice Lispector pourra-t-elle dire : « Le sens me vient par la respiration, et non en paroles. C’est un souffle [3177]. »

L’épiphanie chez Clarice Lispector

6Mais de quoi nous parle Clarice Lispector ? Des événements banals, de la petite vie quotidienne, des petites choses insignifiantes qui, néanmoins, sont remplis d’une signification majeure et singulière constituant une révélation, le dévoilement d’un nouvel ordre. La critique a identifié, dans ce processus appelé « épiphanie », un élément essentiel de l’écriture lispectorienne [4178]. Le mot provient du vocabulaire théologique et signifie « manifestation », « apparition ». Or, L’épiphanie est un concept central dans le monde hébreu et signifie l’irruption de Dieu dans le monde devant les yeux des hommes par des formes humaines et non humaines qui se manifestent furtivement et rapidement. Les éléments épiphaniques sont déjà présents dans son premier roman Près du cœur sauvage, dont l’épigraphe est une citation de James Joyce : « He was alone. He was unheeded, happy and near to the wild heart of life », dévoilant son influence. Ce petit fragment du texte joycien précède une épiphanie dans A portrait of the artist as a young man. Bien que Clarice Lispector n’évoque jamais le mot « épiphanie », toute une poétique de l’instant peut se révéler dans son œuvre.

7Les épiphanies sont à la fois quelque chose de vide, de futile, et la condensation d’une signification intransmissible [5179]. Dans un sens littéraire, l’épiphanie signifie le récit d’une expérience simple et anodine qui, néanmoins, a la force d’une révélation inattendue. C’est la perception d’une réalité dérangeante quand les objets les plus banals, les gestes les plus quotidiens provoquent une illumination soudaine, l’extase. En outre, c’est une partie de l’œuvre où se développe le récit d’une révélation. Chez Clarice Lispector, soit dans les romans, soit dans les chroniques, le nœud consiste, en de nombreuses reprises, en une perception révélatrice d’une réalité à partir de laquelle le monde entier change. Il s’agit des révélations à partir des expériences quotidiennes banales, et l’écriture, c’est l’effort pour dire l’indicible qu’y a été révélé. L’épiphanie, dans son œuvre, procède d’une rencontre entre le moi et le monde, entre le moi et l’autre.

8Nous savons que Lacan, dans son séminaire Le sinthome, évoque brièvement l’épiphanie dans l’œuvre de Joyce. Il remarque que Joyce ne parle pas d’autre chose et que « L’épiphanie est ce qui fait que, grâce à la faute, inconscient et réel se nouent [6180]. » Dans ce sens, l’épiphanie est toujours liée au réel. Il est important de préciser qu’elle n’est pas le réel en tant que tel, mais elle y est liée. Ce sont des artifices de l’artiste pour dire ce qui, dans les choses, échappe à la représentation, rendant possible que le monde banal et ordinaire se présente comme extraordinaire.

9Un petit détail, un visage insignifiant, un événement anodin, c’est ce qui déclenche l’écriture. Le visage d’une nordestina capté au milieu de la ville, une blatte écrasée par la porte d’une armoire, un aveugle qui mastique son chewing-gum, un œuf sur la table de la cuisine, une nouvelle lue dans un journal, un rat, autant d’événements qui exigent la parole et qui, pourtant, résistent à la forme que le discours cherche à leur imposer. L’heure de l’étoile, La passion selon G.H., Amour, L’œuf et la poule, La plus petite femme du monde ou Pour pardonner Dieu sont de véritables combats du langage pour dire ce qui demeure indicible, pour dire ce presque rien qui insiste comme un souffle ou un cri. L’écriture se fait à partir de cet insignifiant qui instaure l’altérité la plus radicale et qui bouleverse l’ordre de choses.

10Le récit de l’épiphanie raconte la rencontre avec un réel opaque, résistant au sens, qui advient au sujet du dehors, dans une altérité radicale. Cet événement s’impose comme incontournable et exige d’être symbolisé, mis en évidence par les mots. Cependant, ce vécu résiste à ce discours susceptible de lui donner un sens, et exige l’invention d’un nouveau langage, d’où cette écriture qui trébuche, claudique, bégaye [7181].

11Une signification dense et énigmatique persiste, dépasse la parole laissant toujours un reste inaliénable, inassimilable. Il s’agit d’une limite du langage, d’un hors-sens et d’une mise en évidence de ceci : ce qui n’est pas langage n’est pas, pour autant, rien. L’écriture de Clarice Lispector est la présentation de ce hors-langage, l’affirmation de l’existence d’un reste, d’un résidu, qui signale la limite du langage. L’écriture ne nomme pas l’innommable, en le transformant en chose palpable, concrète et porteuse de sens, mais au contraire elle fait entendre que quelque chose échappe, laissant un reste informe, irreprésentable ; elle inscrit une absence. Or, c’est par l’échec qu’on parvient à l’inexprimable, c’est par le mutisme qu’on parvient à la voix. Ce n’est pas un hasard si cette écriture s’intéresse à l’informe, au laid, au défectueux, à l’erroné, à l’insignifiant.

La conception lispectorienne de l’autre

12Nous retrouvons Clarice Lispector déambulante et flâneuse dans une petite chronique intitulée « Perdoando Deus [8182] », datée du 19 septembre 1970 dans le Jornal do Brasil, et publiée postérieurement dans l’ensemble des nouvelles Felicidade Clandestina, en 1971. Nous la voyons marcher d’un pas insoucieux, libre, sans direction, elle va vers.

13

« Je marchais dans l’avenue Copacabana et je regardais distraitement les immeubles, un bout d’océan, des gens, sans penser à rien. Je ne m’étais pas encore rendu compte qu’en fait je n’étais pas distraite, j’étais attentive sans effort, j’étais une chose rare : libre [9183]. »

14Ce texte concentre le thème de l’altérité chez Clarice Lispector et y dévoile sa conception de l’autre. Tout d’abord, l’harmonie domine la scène. Clarice marche dans le monde et, insouciante, voit les choses qui lui ont été données de voir. Elle en fait partie, un bien-être la remplit à un tel point qu’elle se sent la mère de Dieu, qui est le monde, la terre. Non qu’elle ait éprouvé une quelconque supériorité ou un sentiment de possession, le monde se donne à voir, la gratuité de ce sentiment fait naître un amour libre et ouvert. Cet amour de Dieu était un amour tendre, comme l’amour de la mère pour un enfant, qui, au lieu de le réduire, le développe. Ce n’était pas l’amour qu’on apprend à avoir pour Dieu, fait de peur, de respect et de révérence, mais un sentiment nouveau pour Lui, fait de tendresse et de gratuité. Ce n’était pas non plus l’amour possessif et sa férocité, c’était un amour qui nous renvoie à la grâce.

15Le mot grâce revient constamment dans l’œuvre de Clarice Lispector, et renvoie soit à l’état de grâce mystique, soit à la gratuité et à la générosité des sentiments. Dans la mystique, le mot grâce désigne tout ce qui est don de Dieu, elle est la bienveillance divine, et, en vertu de ses manifestations, les hommes sont portés à la connaissance de Dieu et à Son amour. Inutile de le vouloir : elle ne vient que quand elle veut et spontanément[10184]. La grâce est un don. L’état mystique apparaît comme extérieur, subi. Don extérieur, la grâce peut néanmoins être aussi considérée comme un don intérieur. Ce qui est défini comme grâce actuelle est, peut-être, ce qui se rapproche le plus de l’état de grâce lispectorien – ce sont des instants fugaces qu’illumine l’esprit, des instants transitoires et minuscules qui constituent un constant dialogue avec Dieu. Leur raison d’être tient au besoin que l’homme a de l’aide divine et leur manifestation est une réponse à cette demande. La grâce, en tant que gratuité des sentiments et don de soi, est merveilleusement illustrée par « Le partage des pains », nouvelle du recueil Corps séparés (titre original Felicidade Clandestina). Il s’agit là de l’art de donner et de la bénédiction des choses, simplement parce qu’elles existent [11185]. Une femme reçoit des invités, et la gratuité de son acte est non seulement dans l’invitation qui n’est adressée à personne en particulier, mais aussi dans le don des choses telles qu’elles sont.

16Il y avait le monde, il y avait les choses du monde, il y avait moi, tout cela comme la gratuité de la vie. Est-ce là le sentiment d’appartenance qui lui manque tant ?

17C’est alors que fait irruption le rat. La mère de Dieu, marchant librement dans les rues, a failli marcher sur un rat mort.

18

« En moins d’une seconde j’étais hérissée par la terreur de vivre, en moins d’une seconde je me déchiquetais toute en panique et je contrôlais comme je pouvais mon cri le plus profond. Courant presque, en proie à la peur, aveugle parmi les gens, j’ai fini par m’arrêter à un autre pâté de maisons appuyée contre un pylône, fermant violemment les yeux qui ne voulaient plus voir. Mais l’image restait collée à mes paupières : un grand rat roux, à la queue énorme, les pattes écrasées, et mort, tranquille, roux. Ma peur démesurée des rats [12186]. »

19Le mouvement s’arrête, le monde s’arrête, paralysé par la perplexité et la torpeur. Par le rat, un abîme entre le monde et le moi s’installe, et cette distance bouleverse le rapport au monde – il la laisse séparée, incohérente, et lui donne le sentiment de douter de ses propres sensations, de les refuser et de ne pas les comprendre. L’insolite et l’étonnement viennent ainsi instaurer l’incongru et la différence. Ce qui se cache, ce qui ne se donne pas à voir, ce qui ne se voit pas, est lancé contre son visage nu, est béant au milieu de la rue, et se montre, obscène.

20Les deux événements, l’amour et le rat, sont désormais liés et ont, illogiquement, une relation. La nausée provoque la destruction de l’harmonie, du sentiment de l’Un, de l’Unité, vécu auparavant. Non seulement le rat met fin à l’harmonie, mais sa vision a un effet rétroactif sur le sentiment éprouvé auparavant. Il est le contrepoint de l’harmonie, il est là, au milieu de l’amour. Aussi, la révolte commence-t-elle à se former. Alors, le contrepoint du sentiment d’être la mère de Dieu, la mère du monde, était un rat ? L’abandon dans l’amour aboutissait dans la rencontre avec un rat mort ?

21

« Il n’était pas nécessaire de jeter à mon visage tout nu un rat. Pas à ce moment-là. On aurait pu prendre en considération la terreur qui depuis l’enfance m’hallucine et me poursuit, les rats se sont déjà moqués de moi, dans le passé du monde les rats m’ont déjà dévorée, pressés et rageurs. Alors c’était ainsi, moi qui marchais dans le monde sans rien demander, sans avoir besoin de rien, aimant d’un pur amour innocent, et voilà que Dieu me montre son rat [13187] ! »

22Or, le rat est l’abject, le moins, le primitif, l’organique, le laid, le grotesque. Il est ce qui ne se montre pas, qui est caché, qui vit dans les coins, dans les égouts. Nous rejoignons là cette esthétique de Clarice Lispector que nous avons mentionnée auparavant, dont l’intérêt s’oriente vers ces figures de l’insignifiance. Ce goût pour l’informe, pour le laid, se révèle non seulement dans l’intérêt porté, par cette écriture, aux êtres ordinaires, répulsifs, mais aussi dans sa syntaxe et son lexique. En même temps, l’on entend l’ironie lispectorienne comme la contrepartie du dramatique de la scène.

23L’écriture lispectorienne est une écriture fragmentaire, en soi multiple et mobile, différant de toute unité, affirmant l’intervalle, la rupture, le discontinu, comme sens, ouvrant la possibilité de rapports nouveaux. Cette forme informe multiplie les blancs, les intervalles, les traits de séparation, jamais ne s’accomplit ni ne renonce à s’accomplir. Aussi introduit-elle l’autre, elle est incessamment devenir autre, non pas dans le sens d’un fusionnement avec l’autre, mais saut dans l’inconnu qui est à l’intérieur du moi. Écrire est devenir autre. Or, pour Deleuze, l’écriture n’est certainement pas donner une forme à un vécu, mais au contraire, elle serait plus proche de l’informe et de l’inachèvement, comme Clarice Lispector le fait. De ce vide, de ce silence, du petit détail, se fait l’écriture. Outre les blancs et les ruptures, des insectes, des êtres immondes, des animaux, autant de métaphores de l’autre, abondent dans plusieurs textes de Clarice Lispector, comme dans ce passage dans Agua Viva :

24

« Les grottes sont mon enfer. […] Dans la caverne obscure scintillent, pendus, les rats aux ailes en forme de croix des chauves-souris. Je vois des araignées duveteuses et noires. Des rats et des souris courent épouvantés sur le sol et sur les murs. Entre les pierres, le scorpion. Des crabes, égaux à eux-mêmes depuis la préhistoire, à travers morts et naissances, sembleraient des bêtes menaçantes s’ils avaient la taille d’un homme. Des vieilles blattes rampent dans la pénombre. Et tout cela c’est moi [14188]. »

25La mise en scène de l’insignifiant comme autre qui nous renvoie notre image inversée est amenée à son extrême dans La passion selon G.H., récit d’une femme qui essaie de raconter l’inénarrable, une expérience mystique vécue dans la confrontation avec une blatte et qui attend les limites de l’indicible. Une révélation impossible à arrêter est déclenchée et rendue possible à partir de la blatte, rencontrée dans la chambre de la bonne, que G.H. écrase dans la porte de l’armoire et qui ne finit pas de mourir. Ayant vu son visage, le visage de la blatte, G.H. ne peut accomplir son geste meurtrier et fait la rencontre avec l’autre le plus abject qui est à déchiffrer et qui, pourtant, demeure énigmatique et innommable, tout en dévoilant la part cachée de G.H. Nous citons un court passage :

26

« C’était un visage sans épaisseur. Les antennes sortaient comme des moustaches de chaque côté de la bouche. La bouche marron était bien dessinée. Les fines et longues moustaches remuaient, lentes et sèches. Ses yeux noirs facettés regardaient. C’était une blatte vieille comme un poisson fossilisé. C’était une blatte vieille comme les salamandres et chimères et griffons et les Léviathans. Elle était aussi ancienne qu’une légende.
La blatte est séduction pure. Cils, cils qui cillent et appellent.
Moi aussi, qui peu à peu me réduisais à ce qui en moi est irréductible, moi aussi j’avais des milliards de cils qui cillent, et avec mes cils j’avance, moi, protozoaire, protéine pure [15189]. »

27Cette écriture, faite à partir des restes, des êtres répugnants, des parias du monde, de l’insignifiant, nous fait penser à Deleuze dans Kafka – Pour une littérature mineure. L’insignifiant est non seulement le mode d’apparition de l’altérité, mais c’est aussi à travers lui que la langue balbutie, bouleversant et créant une langue autre à l’intérieur d’une langue propre. D’où le bégaiement, le souffle de Clarice Lispector.

28Le rat incarne l’instant de révélation d’une autre réalité, d’un autre ordre. Il est l’événement banal et insignifiant, le presque rien qui, cependant, concentre en soi la force d’une illumination. Tel est le processus épiphanique, élément de fond de l’écriture lispectorienne dont nous avons parlé auparavant. Bien que cette chronique ne se place pas parmi les épisodes les plus caractéristiques de ce processus chez Lispector, la vision du rat peut être considérée comme une sorte d’épiphanie, plus précisément comme ce qu’Olga de Sa appelle anti-épiphanie, celle qui révèle l’envers des choses, le laid et non pas le beau ; non pas une claritas qui illuminerait la partie de l’ombre, mais au contraire une ombre qui se révélerait au sein même de la luminosité [16190].

29Qu’est-ce que nous révèle cette épiphanie chez Clarice Lispector ? Quelle conception de l’autre s’y profile ? Que l’on ne s’y trompe pas, l’autre n’est pas extérieur, séparé, en dehors, l’autre est en moi. Ce petit détail, ce qui, du monde, ne se compte pas, ne se voit pas, ce reste, ce presque rien, sera la révélation même du cerne de l’amour.

30Nous retrouvons l’inquiétante étrangeté dont nous parlait Freud [17191], qui déloge l’altérité de l’extérieur dans lequel elle était apprivoisée, pour la placer à l’intérieur, non d’un familier en tant que propre, mais d’un familier entaché par l’impropre. Or, le rat est ce qui est dans l’ombre et qui vient à la lumière. Il la renvoie à un passé, à sa peur démesurée des rats, aux temps où ils l’ont dévorée. Le rat est les crimes qu’elle n’a pas commis, et leur distance la protège de cette partie d’elle-même, dangereuse et déplaisante. Le rat est sa part de destruction qu’elle ne peut contenir en elle. Le rat crie sa difficulté de se mettre en rapport avec l’autre, et avec cette partie de l’autre à l’intérieur d’elle-même.

31Mais une autre inversion se produit. Le rat est fait de ce dont elle-même est faite ; c’est la fin de l’unité et l’abolition des oppositions bien/mal, beau/laid, amour/horreur. L’ordre venu à la lumière par le rat n’est pas, comme nous pourrions le croire, l’obscurité de la haine, mais la part d’ombre de cet amour, tendre et ouvert, pour Dieu. Le rat, cet animal abject et insignifiant, est à la fois le grotesque, l’immonde, l’abject, Clarice Lispector elle-même, et finalement Dieu, l’infiniment Autre.

32Cette intimité extériorisée nous révèle la partie inassimilable de l’Autre. L’autre fait partie de moi, il est en moi, mais reste tout de même un certain silence secret, une altérité, qui ne se réduit pas à l’autre comme semblable, mais qui nous renvoie à l’Autre dans sa dimension radicalement étrangère et autre. Cela empêche toute assimilation entre le moi et l’Autre qui annulerait l’altérité et la différence. Contrairement à ce qu’on aurait pu penser dans un premier temps, chez Clarice Lispector, il n’y a pas d’annulation de l’altérité dans une assimilation de l’Autre au moi ; une partie en lui demeure étrangère.

33L’Autre auquel nous avons affaire, depuis l’enfance, a deux faces. L’une qui est à notre image et à notre ressemblance, c’est mon semblable, mon autre ; et l’autre qui est au-delà du semblable, l’Autre innommable, hors signifié, étrange et étranger à moi-même. Or, c’est de cet Autre, irréductible altérité, que nous parle Clarice Lispector. Cet Autre nous met dans l’inconnu, dans l’énigme. Néanmoins, cette altérité qui m’échappe et me bouleverse est étrangement proche de moi-même, l’Unheimlich de Freud, et le nier c’est reculer devant notre propre part maudite. Nous ne sommes pas ici dans le registre du miroir, l’Autre demeure radicalement Autre.

34Cette écriture révèle l’étrange en nous, et pour ce faire, elle introduit l’autre à l’intérieur de la langue propre, créant une autre langue à l’intérieur de la langue [18192]. Clarice Lispector fait respirer la langue. Dans une chronique intitulée « Amour pour la langue portugaise » (11 mai 1968), elle avoue son amour pour cette langue difficile et pas malléable, pour cette langue qui n’a pas été approfondie, et elle affirme la nécessité de faire travailler cette langue, et de la faire travailler contre la tradition, contre un héritage qui n’a pas été suffisant. Il nous semble qu’il s’agit là de travailler la langue de son intérieur, de faire un usage mineur et intense de cette langue, de créer une langue autre dans son intérieur même, comme le dit Deleuze.

35La préservation de l’altérité, le refus de s’assimiler à une tradition et la nécessité d’instaurer l’autre à l’intérieur de son héritage, voilà l’ambition même de l’expérience littéraire de Clarice Lispector, et son appartenance à la littérature brésilienne porte la marque de cette différence.

36L’insignifiant comme altérité fait partie d’une esthétique de la minoration porteuse d’un ordre autre, d’une éthique autre, d’une langue autre, où une valorisation de ce qui est moins, périphérique, caché, se fait jour, comportant quelque chose de révolutionnaire. L’approche de cette énigme qu’est l’altérité radicale suscite le surgissement d’une autre éthique.

Pour conclure

37Chez Clarice Lispector, l’insignifiant, comme altérité, nous enseigne une esthétique du moins ou de la minoration, où non seulement les personnages sont réduits aux figures mineures, mais aussi la narratrice se voit réduite à la dimension du mot, de sorte que le fragment et la textualité prennent la place du récit. Un personnage réduit aux initiales de son nom, sans visage, ni biographie, une nordestina qui semble être dépossédée d’elle-même, une narratrice qui n’est qu’une voix, une poule, une blatte, un rat, un criminel, ou encore, une narratrice qui se fait fragment, forme informe et multiple, qui affirme la rupture, l’intervalle, tels sont les modes de fonctionnement de cette minoration qui se fait entendre dans l’écriture lispectorienne.

38Lorsque la littérature presse ainsi les paroles, exigeant une discontinuité essentielle, elle vise le déséquilibre, l’éternel devenir, elle défait le livre, l’ajourne, le promet à un avenir sans fin ; elle est, en somme, devenir autre [19193]. Le bégaiement lispectorien serait à entendre dans cette fragmentation du récit, dans la multiplication de vides et de blancs qui empêche et déroute une lecture linéaire et logique, dans la répétition qui cherche à épuiser l’unité. L’insignifiant et le mineur deviennent alors porteurs de l’altérité, messagers du devenir autre, mais messagers aussi d’un nouvel ordre, d’une nouvelle esthétique/éthique, qui ne veut ni le beau ni l’expressivité.

39Le rat est chose précieuse qui nous dévoile une autre éthique/esthétique. Ces trois petits récits nous donnent une idée de ce qu’est l’insignifiant dans la poétique lispectorienne. Le mineur est ce qui introduit la différence, l’étranger, l’altérité, ce qui bouleverse l’ordre établi, ce qui nous met dans la voie de l’informe, de l’inachevé, du devenir.

40L’insignifiant comme altérité, élevé ainsi au statut de cause et de centre de l’écriture, nous parle aussi de l’altérité de Clarice Lispector, elle-même. Son rapport paradoxal à la littérature, sa difficulté à se professionnaliser, sa relative solitude dans le monde des lettres brésiliennes, sa réclusion sociale, finalement son œuvre singulière, composent le cadre. Elle est étrangère dans le monde, huître arrachée de son rocher, et non seulement parce qu’elle a une histoire d’exil, mais parce qu’elle incarne et a un rapport privilégié à notre part d’ombre.

41Grande dame de la littérature brésilienne, Clarice Lispector nous donne curieusement l’impression d’être elle-même chose minuscule, presque absente de ses mots. Son mode de présence dans le texte semble être le souffle, c’est comme souffleuse qu’elle s’y inscrit, et c’est ainsi que vie et œuvre s’articulent, la seule biographie possible étant celle de ses livres. C’est un mode de présence particulier, qui veut l’absence, l’effacement, qui est hors scène. De là vient, peut-être, son refus à être au-devant de la scène, à s’affirmer écrivain, à parler, à vivre. Son parler se veut mutique, effacé, bas, comme seule l’écriture le permet.

42En même temps, l’écriture est la construction d’un nom propre. Chose minuscule, Clarice Lispector est altérité insignifiante qui se transforme en nom d’auteur. « […] au bout des doigts un objet – c’est là que je vais », écrit-elle. Et nous pourrions ajouter : c’est là que je suis. La réponse de Clarice Lispector à la vie est l’écriture et l’amour, et c’est à partir de l’insignifiant, du rien, qu’ils surgissent.

43

« Au-delà de l’oreille existe un son, à l’extrémité du regard un aspect des choses, au bout des doigts un objet – c’est là que je vais.
À la pointe du crayon, le trait. […]
Je ne sais pas de quoi je parle. Je parle de rien. Je suis rien. Une fois morte je grandirai et je m’épandrai, et quelqu’un dira mon nom avec amour.
C’est vers mon pauvre nom que je vais.
Et de là, de lui, je reviens pour appeler le nom de l’être aimé, celui de mes enfants. Ils me répondront. J’aurai enfin une réponse. Quelle réponse ? Celle de l’amour. Amour : je t’aime tant [20194]. »

Œuvres de Clarice Lispector citées dans le texte

44« A menor mulher do mundo », dans Laços de familia (1960), Rio de Janeiro, Rocco, 1998 ; « La plus petite femme du monde », dans Liens de famille, traduit par Jacques et Teresa Thiériot, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1989.

45A paixão segundo G.H. (1964), Edição critica Coordenador Benedito Nunes, Edição Unesco, Coleção Arquivos 13, 2°edição ; La passion selon G.H., traduit par Clélia Pisa, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1978.

46« A repartição dos pães », dans Felicidade clandestina (1971), Rio de Janeiro, Rocco, 1998 ; « Le partage des pains », dans Corps séparés, traduit par Jacques et Teresa Thiériot, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1993.

47Agua viva (1973), traduit par Regina Helena de Oliveira Machado, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, édition bilingue, 1973.

48Onde Estivestes de Noite, Rio de Janeiro, Artenova, 1974, Où étais-tu pendant la nuit ?, traduit par Geneviève Leibrich et N. Biros, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1985.

49Um sopro de vida (1978), Rio de Janeiro, Rocco, 1999 ; Un souffle de vie, traduit par Jacques et Teresa Thiériot, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1998.

50« Perdoando Deus », dans A descoberta do mundo (1984), Rio de Janeiro, Rocco, 1999; « Pour pardonner Dieu », dans La découverte du monde, traduit par Jacques et Teresa Thiériot, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1998.


Mots-clés éditeurs : insignifiant, Clarice Lispector, Altérité

Date de mise en ligne : 12/11/2020

https://doi.org/10.3917/sc.027.0093

Notes

  • [1]
    J. Lacan, « Maurice Merleau-Ponty », Les temps modernes, n° 184/185, 1961.
  • [2]
    C. Lispector, Um sopro de vida (1978), Rio de Janeiro, Rocco, 1999, p. 108 ; Un souffle de vie, trad. fr. J. et T. Thiériot, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1998, p. 146.
  • [3]
    O. Borelli, Esboço para um possivel retrato, Rio de Janeiro, Nova Fronteira, 1981, p. 79.
  • [4]
    Sur l’épiphanie dans l’oeuvre de Clarice Lispector, voir notamment : O. de Sá, Clarice Lispector a travessia do oposto, Rio de Janeiro, Annablume, 1999 ; A.R. de Santa’Anna, « O ritual epifânico do texto », dans B. Nunes (sous la direction de), A paixão segundo G.H. Edição crítica, Editora Unesco, 1996, p. 241-261.
  • [5]
    Cf. C. Millot, La vocation de l’écrivain, Paris, Gallimard, 1991.
  • [6]
    J. Lacan, Le Séminaire, Livre xxiii, Le sinthome (1975-1976), Paris, Le Seuil, 2005, p. 154.
  • [7]
    À comprendre selon l’expression deleuzienne « faire bégayer la langue ». Selon lui, il s’agirait non pas de faire du personnage un bègue de la langue, mais de l’écrivain lui-même. L’auteur ne se contente pas d’une indication extérieure (bégaya-t-il), et une certaine atmosphère est créée qui recueille le tremblé, le murmuré, le bégayé. C’est toute la langue qui tremble, qui vibre. Chez Clarice Lispector, c’est la répétition, la fragmentation, les hésitations qui font éclater la langue, créant une langue étrangère dans la langue.
  • [8]
    Cette chronique a été traduite en français sous le titre de « Pour pardonner Dieu », dans La découverte du monde (1984), trad. fr. J. et T. Thiériot. Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1995.
  • [9]
    Ibid., p. 385.
  • [10]
    C. Lispector, Agua viva, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, édition bilingue, trad. fr. R.H. de Oliveira Machado, 1973, p. 237.
  • [11]
    Pour une définition plus poussée du mot dans la mystique, voir C.-A. Bernard, Traité de la théologie spirituelle, Paris, Cerf, 1986, et pour une analyse de « Le partage des pains », voir H. Cixous, « Reaching the point of wheat, or a portrait of the artist as a maturing woman », Remate de Males, n° 9, 1989, p. 39-54, notamment la partie intitulée « The art of blessing ».
  • [12]
    C. Lispector, « Pour pardonner Dieu », op. cit., p. 386.
  • [13]
    Ibid., p. 387.
  • [14]
    C. Lispector, Agua viva, op. cit., p. 27.
  • [15]
    C. Lispector, A paixão segundo G.H., op. cit., p. 37 et 40, traduction de l’auteur.
  • [16]
    Il est intéressant de remarquer que le cheminement de G.H. vers le neutre de la matière vivante se déroule à la lumière du jour, sous le soleil, le noir de la blatte se situant comme un point d’obscurité à l’intérieur même de la lumière.
  • [17]
    S. Freud, L’inquiétante étrangeté et autres essais (1919), Paris, Folio, 1985.
  • [18]
    Cf. G. Deleuze, Kafka, Pour une littérature mineure, Paris, Éditions de Minuit, 1975.
  • [19]
    Cf. M. Blanchot, Le livre à venir (1959), Paris, Folio Gallimard, 1986.
  • [20]
    C. Lispector, Où étais-tu pendant la nuit ? (1974), trad. fr. G. Leibrich, N. Biros, Paris, Éditions des femmes-Antoinette Fouque, 1985, p. 107-112.

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