Couverture de SAVA_039

Article de revue

Carmaux

La cité de Jaurès à l’épreuve de la désindustrialisation

Pages 24 à 30

Notes

  • [1]
    Jefferson Cowie, Joseph Heatcott, Beyond the Ruins : The Meanings of Deindustrialization, Ithaca, Cornell University Press, 2003, p. 2.
  • [2]
    Stéphane Beaud, Michel Pialoux, Retour sur la condition ouvrière. Enquête aux usines Peugeot de Sochaux-Montbéliard, Paris, La Découverte, 2012.
  • [3]
    Rolande Trempé, Les Mineurs de Carmaux (1848-1914), Paris, Éditions ouvrières, 1972.
  • [4]
    Nicolas Verschueren, Fermer les mines en construisant l’Europe. Une histoire sociale de l’intégration européenne, Bruxelles, Peter Lang, 2013.
  • [5]
    Michelle Zancarini-Fournel, Changer la Vie ! Histoire sociale des contestations, thèse d’habilitation, université Paris 1, 1998, p. 153.
  • [6]
    L’expression est théorisée par Jean Fourastié (Les Trente glorieuses ou La révolution invisible de 1946 à 1975, Paris, Fayard, 1979) au terme d’une croissance exceptionnelle. Cette appellation est aujourd’hui critiquée par de nombreuses études qui pointent les contrecoups sociaux, conflictuels et écologiques de cette période.
  • [7]
    Paul Thibaud, « Du conflit à la crise », Esprit, n° 2, 1974.
  • [8]
    Gérard Noiriel, Vivre et lutter à Longwy, Paris, Maspero, 1980.
  • [9]
    Robert Frank et al., « Les années grises de la fin de siècle », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 84, 2004.
  • [10]
    L’expression est issue d’un film documentaire réalisé en 1981 par Jean-Pierre Thorn, Dos au mur, portant sur la grève des ouvriers d’Alsthom à Saint-Ouen pendant l’automne 1979.
  • [11]
    La Dépêche du midi, 22 février 1983.
  • [12]
    La Dépêche du midi, 20 février 1986.
  • [13]
    Renaud Payre, Gilles Pollet., Socio-histoire de l’action publique, Paris, La Découverte, Repères, 2013.
  • [14]
    Gérard Noiriel, Les ouvriers dans la société française. XIX e -XX e siècle, Paris, Seuil, 1986, p. 260.

1 le 16 avril 2012, à quelques jours du premier tour de l’élection présidentielle, François Hollande est de passage dans l’ancienne cité minière tarnaise, Carmaux. Ce faisant, il se situe dans une tradition des candidats socialistes de la Ve République qui voyaient en Carmaux un moyen de se placer dans les pas de Jean Jaurès. C’est ici que ce dernier se rallia définitivement au socialisme en soutenant le maire et mineur Jean-Baptiste Calvignac, licencié par le marquis de Solages, directeur des mines et adversaire aux élections en 1892.

2 Le lendemain de l’annonce de sa candidature, François Mitterrand se rendait également à Carmaux le 8 novembre 1980, et en faisait un point de départ symbolique de sa campagne. La ville apparaît à travers le temps comme un instrument précieux de légitimation de candidats de gauche en quête de légitimité ouvrière. Faire campagne à Carmaux, c’est rompre avec les accommodements libéraux, et prendre de la distance avec ceux qui les représentent, à l’image d’un Michel Rocard par exemple. Accompagné par une foule dense dans les rues de la ville, François Mitterrand est entouré de mineurs en tenues de travail. L’enthousiasme d’en découdre avec la droite est palpable et le cortège prend des allures de pèlerinage dans la « cité de Jaurès ».

3 Cette scène de meeting de masse, quasi spontané, est donc du plus grand effet pour François Mitterrand qui fait oublier quelques instants le tournant économique, social et politique que vit au même moment Carmaux. Le candidat ne vient en effet pas les mains vides et présente longuement la 38e « proposition pour la France » prévoyant une relance charbonnière. L’équipe du candidat avance le chiffre de 15 millions de tonnes annuelles. La proposition stipule que « les crédits en faveur des énergies nouvelles ou des techniques nouvelles d’exploitation des énergies traditionnelles (charbon) seront très considérablement augmentés ». En attendant, le bassin carmausin est engagé dans un processus précoce de désindustrialisation et la population attend des mesures tendant à la survie de l’activité et par conséquent de la région entière, malgré le scepticisme denombre de syndicalistes sur la possibilité d’atteindre une telle production.

4 Le concept de « désindustrialisation », souvent mobilisé par les journalistes afin de désigner le recul du secteur secondaire, est généralement peu étudié en France. Il désigne en effet une réalité beaucoup plus vaste, tenant aussi à la disparition progressive de pratiques, de solidarités, d’une identité ouvrière et de ses traces dans le temps et l’espace. Phénomène « socialement compliqué, historiquement profond, géographiquement divers et politiquement embarrassant » [1], son existence est attestée dès les débuts de la Révolution industrielle et rend nécessaire une approche historique. Loin des discours déclinistes et téléologiques annonçant la disparition d’une France industrielle, et d’une prétendue morosité de la classe ouvrière qui reste substantielle dans le pays [2], étudier la désindustrialisation suppose d’analyser les actions et réactions des travailleurs et des populations lors de la disparition partielle ou totale d’une activité. Le phénomène concerne particulièrement Carmaux où les mines ont depuis le dix-neuvième siècle construit au sens propre et figuré la ville, où le paternalisme a aménagé les quartiers ouvriers, des cadres et des ingénieurs, où le charbon est depuis cette époque l’unique source de revenus de la ville avec la culture de la terre comme l’a montré Rolande Trempé dans une thèse de doctorat devenue un classique de l’histoire sociale [3]. Lorsque François Mitterrand passe par Carmaux, l’indicateur démographique suffit à mesurer l’ampleur des transformations engendrées par le recul de l’activité charbonnière. Approchant les 15 000 habitants à son apogée en 1968, Carmaux en compte environ 12 000 en 1981 et 9 000 lorsque François Hollande tient son discours en 2012. Notre contribution analyse donc la nature et l’ampleur des transformations subies par la population d’une cité laboratoire de la classe ouvrière française, de son histoire sociale et politique, symbole d’une solidarité collective au sein d’une entreprise nationalisée à la Libération, les Houillères de France. Comment se sont déroulés les derniers jours de la classe ouvrière carmausine ?

« Jaurès, reviens ! », le déclin précoce de l’activité (1961-1977)

5 Puisque l’histoire industrielle de Carmaux est étroitement liée au charbon, les origines de son déclin suivent logiquement les soubresauts du secteur dans son ensemble. Le schéma de désindustrialisation carmausin ne suit pas celui admis par l’imaginaire collectif, à savoir la délocalisation récente d’une activité dans un pays à bas coût. Le processus débute dès la fin des années 1950, quand commence à être mentionné le terme de « désindustrialisation » dans les rapports commandés par différents ministères. Ce n’est pas Carmaux mais Decazeville, bassin minier aveyronnais voisin qui est classé « critique » par les Charbonnages de France. Carmaux et Decazeville sont solidaires administrativement et culturellement, en raison de la forte prégnance des traditions paysannes. Les suppressions de postes et les reconversions se jouent donc dès l’après-guerre. L’échelle européenne est déterminante, sous l’égide de la Haute Autorité de la CECA [4]. C’est sous son impulsion qu’est décidée la publication du décret Jeanneney en 1961 visant à « fermer, aussi vite qu’il est socialement possible, les puits des mines non rentables », dans le cadre du « plus grand effort européen de reconversion ». 75 % des ouvriers du fond voient leur emploi supprimé, provoquant un important mouvement de protestation dans l’ensemble du secteur.

6 À Carmaux, cette fermeture et la lutte qui en a découlé sont prises très au sérieux et perçues comme un avertissement. D’autant plus que les plans de départs anticipés et le gel progressif des embauches conduisent à la perte d’environ 1 000 postes, faisant baisser les effectifs de 3 500 à 2 500 mineurs. L’inquiétude renforce dans un premier temps l’action syndicale lors de l’« année sociale de la Ve République » [5], pendant l’hiver 1963. Partant de revendications sur les salaires et les conditions de travail, le mouvement est un archétype de la grève traditionnelle à caractère salarial, sous l’égide d’une CGT historiquement hégémonique. Cependant, la perspective de la désindustrialisation transforme le répertoire d’action des Carmausins. Les mineurs mobilisent au-delà de la profession en impliquant le bassin dans son ensemble. Des meetings collectifs sont organisés sur la place Jean-Jaurès regroupant jusqu’à 4 000 personnes, tandis que les paysans en lutte contre la baisse du prix du lait apportent des denrées aux grévistes et accueillent plus de 600 enfants dans des fermes, pendant la grève. Les autres entreprises nationalisées, à l’image d’EDF, de la SNCF ou des PTT, débrayent régulièrement et simultanément avec les mineurs. Les femmes ont un rôle déterminant dans l’action, comme travailleuses à la mine d’une part, et se faisant les porte-parole de l’identité régionale d’autre part. Elles étaient déjà plus de 2 000 à organiser une « marche des femmes de mineurs » à Decazeville le 28 décembre 1961. Au cœur des prétendues « Trente Glorieuses » [6], au paroxysme de la centralité ouvrière française, apparaît dans le même temps une France de la désindustrialisation, du chômage et de la dépopulation. Les structures traditionnelles de l’engagement ouvrier continuent à se mobiliser pour des motifs corporatistes, mais doivent dans le même temps répondre à une angoisse liée à la survie du bassin.

Lutter pour survivre (1983-1991)

7 Jusqu’à la fin des années 1970, pourtant, l’hypothèse d’une fermeture des mines de Carmaux – tout comme les mines du Nord et de Lorraine – reste lointaine. Il s’agit essentiellement d’unépouvantail syndical brandi pour son caractère mobilisateur. La figure du mineur, protégée par son aura de « premier ouvrier de France », est directement liée à son rôle dans la Résistance et la reconstruction du pays. La perspective d’une arrivée de la gauche au pouvoir à partir de 1974 cristallise les attentes et focalise l’action syndicale. Carmaux concilie donc son double héritage de berceau du socialisme et celui de l’action directe par une veille contestataire visant à démontrer la faculté de résistance des mineurs. La cokerie, menacée de fermeture, est occupée un mois par les salariés en 1979, et la statue de Jean Jaurès est dynamitée à moins d’un an des élections présidentielles de 1981. La centralité du travail accompagnée de nombreuses luttes salariales pendant les années 1970 laisse place à une centralité de l’emploi où l’avenir de l’activité est en jeu [7]. Les mineurs carmausins assistent en ce sens au démantèlement de la sidérurgie lorraine et à la lutte emblématique à Longwy en 1978- 79 [8] qui a perdu plus de 15 000 emplois en une dizaine d’années.

8 Le danger planant sur la profession est désormais pleinement acté par les édiles qui organisent une journée « ville-morte », le 24 novembre 1977. Les rideaux de commerçants baissés, les rues désertées, des habitants marchant silencieusement : cette mobilisation s’oppose radicalement à la culture contestataire des mineurs s’appuyant sur une visibilité des actions. La cité de Jaurès devient un symbole de la « conscience de crise » [9] qui se développe en France, avec la progression du chômage. Le seuil du million de chômeurs est franchi en 1975, et Carmaux, dans l’actualité des années 1980, illustre l’obscurcissement de l’avenir industriel de la France.

9 Il n’est donc pas surprenant que, le 10 mai 1981, 70 % des Carmausins votent pour François Mitterrand, le candidat de la relance charbonnière. La ville n’a jamais autant voté à gauche, comme pour s’accrocher à son identité politique. La déception est donc d’autant plus vive lorsque les mesures promises sont progressivement abandonnées. En 1983, le masque tombe, et le ministre du Travail Jean Auroux annonce suivre les décisions des Charbonnages de France de geler toute embauche au fond de la mine, en vue d’arrêter son exploitation au profit d’une mine à découvert. Pour les mineurs carmausins, il s’agit d’un véritable « tournant de la fureur ». La ville entre dans une des plus violentes grèves de son histoire, un sursaut devant la mort et une lutte « le dos au mur » [10]. Claude Badey, directeur des Houillères du Bassin Centre-Midi (HBCM) insiste sur l’insignifiance du bassin dans la productivité nationale, renforçant le sentiment d’abandon des pouvoirs publics tout en déniant l’identité ouvrière locale. Interrogé sur la grève en cours, il affirme :

10

« Ce mouvement est d’abord strictement local. Carmaux ne représente que 3 % de l’extraction nationale du charbon. Ce qui relativisele problème. […] En 1982, le fond a perdu, à Carmaux, 158 millions de francs. Les Charbonnages concentrent leur effort sur la réduction de telles factures, de tels déficits. Nous voulons produire le maximum de charbon avec le minimum de pertes. […] La Houillère ne portera pas Carmaux sur ses épaules » [11].

11 La ville est donc réduite, depuis vingt ans déjà, à son déficit et un archaïsme de sa production. Le conflit s’enflamme et devient l’emblème du renoncement du gouvernement socialiste à son programme économique. Le journal Libération du 2 mars 1983 qualifie la grève de « Dossier noir du gouvernement » et titre « Grève à Carmaux pour une relance charbonnière qui n’aura pas lieu ».

12 Malgré une victoire à la Pyrrhus – 104 mineurs sont embauchés et le projet est reporté – le divorce entre les Carmausins et le gouvernement socialiste est brutal. Le maire Jacques Goulesque mène des négociations interminables avec le ministère de l’Industrie pour sauver des emplois. L’érection de Carmaux comme bastion authentique du socialisme contre les dérives libérales du gouvernement est un fil rouge de l’engagement des acteurs syndicaux, communistes et socialistes de la ville. Contre la fermeture de la cokerie en 1986, la CGT drape la statue de Jean Jaurès afin de lui cacher la vue devant ce qu’ils estiment être un spectacle de désolation. La banderole mentionne « Jaurès, réveille-toi, le pouvoir est devenu fou ! » [12]. À l’évidence, les habitants se sont tournés vers les origines pour mieux répondre au désarroi du présent, à la figure tutélaire du passé contre celle de François Mitterrand qui représentait quelques années plus tôt l’avenir et l’espoir.

Construire l’avenir sur les ruines de la mine (1991-2012)

13 La Découverte (surnom donné à la nouvelle exploitation minière mise en place à la fin des années 1980) s’avéra un des chantiers les plus coûteux d’Europe (1,4 milliard de francs) visant principalement à acheter la paix sociale à Carmaux. L’abandon de la production de charbon en France rend caduc le projet et le déficit de la Découverte est de 200 millions de francs par an, pour un coût total astronomique de 2,3 milliards de francs en 1991 ! Les mineurs se lancent dans une lutte finale, pourtant une des plus méconnues. Ils encerclent la préfecture du Tarn, Albi, à la fin du mois de juin 1991, avec les imposants véhicules du chantier pour lequel ils ont été reconvertis et formés. Le scénario de 1983 se reproduit avec une âpre négociation entre le maire Jacques Goulesque et le ministre de l’Industrie Dominique Strauss-Kahn, révélant la prégnance d’une fracture à gauche.

14 C’est donc bien la fin de l’épopée du charbon carmausin, comme une mort annoncée progressivement acceptée par les protagonistes. Ce constat latent d’échec ouvre une ultime phase dans le processus de deuil des bassins touchés par la désindustrialisation : la patrimonialisation [13]. L’objectif est de tourner la page de l’industrie et d’ouvrir celle d’une prétendue modernité économique. Les habitants sont exhortés à réparer un passé traumatique en construisant un avenir différent, tout en intégrant, de manière symbolique, la mémoire ouvrière. La patrimonialisation est la première réponse apportée par les pouvoirs publics afin de rendre la cité attractive, et de changer son image ternie par l’agonie d’une activité ayant englouti les revenus de la ville. Une fois la défaite actée par les salariés, la voie est libre pour les acteurs publics locaux et les entreprises afin de construire un scénario de reconversion. Dès les années 1980, un collectif d’anciens mineurs met en place le « musée du Château » exposant les dérivés minéraux du charbon ainsi que la tradition verrière du bassin. En 1989, six anciens mineurs créent le musée de la mine installé sur un ancien carreau du dix-neuvième siècle dans la commune de Cagnac-les-Mines. L’attractivité de la ville d’Albi conduit à l’ouverture de l’École nationale supérieure des Mines d’Albi-Carmaux, qui s’appuie sur la tradition technologique et industrielle de la région.

15 L’arrêt définitif de la production et la fermeture de la Découverte provoquent un tournant dans les années 2000 avec un éloignement définitif de l’identité ouvrière du bassin. La mine devient un gigantesque parc de loisirs pour touristes avec des pistes synthétiques de ski, un skate park, des espaces nautiques et de remise en forme. Les haveuses et engins de chantiers sont disposés sur le site à vocation décorative, les casques de mineurs prennent place dans le restaurant afin de restituer le caractère industriel de la Découverte. Les musées sont rachetés par le département afin d’intensifier l’activité touristique jusqu’en 2010. Carmaux est devenue une cité tertiaire, où l’on parle désormais de « tourisme industriel ». L’industrie, justement, ne représente plus que 11 % des actifs en 2013, le chômage s’élevant à 13,5 % et le secteur public représentant pas moins de 44,1 % des emplois.

16 Quand François Hollande vient faire son meeting en avril 2012, Carmaux est déjà une autre ville que celle qu’a connue François Mitterrand, et il n’existe plus de mineurs en activité pour lui reprocher les choix de ses prédécesseurs.

Épilogue (2012-2017)

17 Alors, Carmaux, ville morte ? Les discours gouvernementaux et patronaux ont fait de Carmaux le symbole d’une France perpétuellement en retard, archaïque, attachée à une culture vouée à disparaître dans la révolution tertiaire, défendant un régime salarial d’exception malvenu dans une France de la « fracture sociale », avec une CGT incapable de mobiliser au-delà de la corporation, et par des méthodes de blocage d’un autre temps, « prenant en otage » les habitants. Le concept de désindustrialisation a donc accompagné l’histoire de Carmaux, de son apogée dans les années 1960 jusqu’à la disparition de la mine. Il met en exergue les mécanismes de résistance et l’organisation du monde ouvrier constamment mis à l’épreuve par les différentes fermetures, plans sociaux, restructurations, qui ont entamé une sociabilité constituée depuis plus d’un siècle.

18 Cependant, la cité de Jaurès reste un laboratoire. Elle fut le berceau du socialisme français, et demeure encore aujourd’hui un symbole. Celui des territoires abandonnés par les pouvoirs publics autant que par les investisseurs, dont la population attendait un avenir sous le signe de la justice sociale grâce à la gauche et aux organisations ouvrières. Depuis l’élection présidentielle de 2012, le Front National n’a cessé d’obtenir plus de 20 % des voix, et 32 % lors du dernier scrutin régional en décembre 2015. Alors que le parti prospère sur le sentiment d’exclusion et l’image de déclassement des cités désindustrialisées, les partis politiques de gouvernement sont confrontés au « désenchantement et la crise de conscience rencontrée par la gauche tout entière » [14]. Abandonnée par les socialistes parisiens et vidée de ses ouvriers, l’ancienne cité minière est désormais la cible de l’extrême-droite. Une campagne d’affiche du FN en 2009 avait déjà commencé la récupération idéologique du héraut carmausin avec le slogan « Jaurès aurait voté Front National »… ■


Date de mise en ligne : 06/06/2017

https://doi.org/10.3917/sava.039.0024

Notes

  • [1]
    Jefferson Cowie, Joseph Heatcott, Beyond the Ruins : The Meanings of Deindustrialization, Ithaca, Cornell University Press, 2003, p. 2.
  • [2]
    Stéphane Beaud, Michel Pialoux, Retour sur la condition ouvrière. Enquête aux usines Peugeot de Sochaux-Montbéliard, Paris, La Découverte, 2012.
  • [3]
    Rolande Trempé, Les Mineurs de Carmaux (1848-1914), Paris, Éditions ouvrières, 1972.
  • [4]
    Nicolas Verschueren, Fermer les mines en construisant l’Europe. Une histoire sociale de l’intégration européenne, Bruxelles, Peter Lang, 2013.
  • [5]
    Michelle Zancarini-Fournel, Changer la Vie ! Histoire sociale des contestations, thèse d’habilitation, université Paris 1, 1998, p. 153.
  • [6]
    L’expression est théorisée par Jean Fourastié (Les Trente glorieuses ou La révolution invisible de 1946 à 1975, Paris, Fayard, 1979) au terme d’une croissance exceptionnelle. Cette appellation est aujourd’hui critiquée par de nombreuses études qui pointent les contrecoups sociaux, conflictuels et écologiques de cette période.
  • [7]
    Paul Thibaud, « Du conflit à la crise », Esprit, n° 2, 1974.
  • [8]
    Gérard Noiriel, Vivre et lutter à Longwy, Paris, Maspero, 1980.
  • [9]
    Robert Frank et al., « Les années grises de la fin de siècle », Vingtième Siècle. Revue d’histoire, n° 84, 2004.
  • [10]
    L’expression est issue d’un film documentaire réalisé en 1981 par Jean-Pierre Thorn, Dos au mur, portant sur la grève des ouvriers d’Alsthom à Saint-Ouen pendant l’automne 1979.
  • [11]
    La Dépêche du midi, 22 février 1983.
  • [12]
    La Dépêche du midi, 20 février 1986.
  • [13]
    Renaud Payre, Gilles Pollet., Socio-histoire de l’action publique, Paris, La Découverte, Repères, 2013.
  • [14]
    Gérard Noiriel, Les ouvriers dans la société française. XIX e -XX e siècle, Paris, Seuil, 1986, p. 260.

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