Notes
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[1]
Pierre Bourdieu, Sociologie de l’Algérie, collection Que sais-je, PUF, 1958, réédité en 2001.
-
[2]
Sa thèse sur l’enseignement technique est publiée dans Claude Grignon, L’ordre des choses. Les fonctions sociales de l’enseignement technique, Paris, Éditions de Minuit, Coll. le Sens Commun, 1971.
-
[3]
Patrick Champagne, « Les paysans à la plage », Actes de la recherche en sciences sociales, n° I-2, 1975.
-
[4]
Patrick Champagne, « La restructuration de l’espace villageois », Actes de la recherche en sciences sociales, n° I-3, 1975.
-
[5]
Patrick Champagne et Sylvain Maresca, D’une génération à l’autre, 1985.
-
[6]
La FNSP et la CNSPT créeront la Confédération paysanne en 1987.
-
[7]
Voir notamment Pierre Bourdieu, « L’opinion publique n’existe pas », Les Temps modernes, n°318, janvier 1973.
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[8]
Patrick Champagne, Faire l’opinion. Le nouveau jeu politique, Paris, Éditions de Minuit, 1990.
-
[9]
Patrick Champagne, « De la doxa à l’orthodoxie politologique. La “théorisation” de l’inconscient politique », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 101-102, 1994.
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[10]
Patrick Champagne, Rémi Lenoir, Franck Poupeau et Marie-Christine Rivière, Sur l’État : Cours au Collège de France (1989- 1992), Raisons d’agir, Le Seuil, janvier 2012.
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[11]
Pierre Bourdieu, Marie-Claire Bourdieu, Christophe Charle, Pascale Casanova, Manet, Une révolution symbolique : Cours au collège de France (1998-2000) suivis d’un manuscrit inachevé de Pierre et Marie-Claire Bourdieu, Raisons d’Agir, Le Seuil, novembre 2013.
1 Savoir/Agir : Quel a été votre parcours avant de rencontrer Pierre Bourdieu et de devenir sociologue ?
2 Patrick Champagne : Mon histoire avec la sociologie commence en classe de philo au lycée Henri IV. Je viens d’une famille où on ne faisait pas d’études. J’avais une sœur et un frère plus âgés que moi, qui avaient juste passé leur certificat d’études avant, pour ma sœur, de passer un CAP de dactylo et pour mon frère, d’aller en Centre d’apprentissage pour passer un CAP de tourneur. Comme j’étais le dernier enfant et que je marchais pas trop mal à l’école primaire, le directeur de l’école avait incité ma mère à m’inscrire dans un cours complémentaire, sûr que je n’aurais pas trop de mal à suivre. J’ai donc passé le concours d’entrée en sixième qui existait à l’époque.
3 Je me suis plu au cours complémentaire. J’avais de bonnes notes en français, en maths et dans les disciplines scientifiques. Mon seul problème, c’était l’allemand que, sans doute à tort, j’avais choisi comme première langue. À la fin de la troisième s’est posé le problème de mon orientation. Mon intention était d’intégrer une école de chimie après le BEPC tout simplement parce que j’étais bon en chimie. Ce sont les profs, notamment ceux de chimie et de maths, qui m’ont fait changer d’avis, ceux-ci me disant que je pouvais continuer des études jusqu’au bac et que je pourrais toujours faire de la chimie après le bac si je voulais.
4 C’était un peu une habitude chez moi : je réussissais plutôt bien ce que je faisais mais mes décisions étaient spontanément sans ambition, un peu « poussives ». C’est donc sur les conseils de mes profs du cours complémentaire que, après la troisième, je suis entré « sur titre » en classe de seconde à Henri IV. Ce privilège était réservé à quelques bons élèves seulement des cours complémentaires – j’avais obtenu la mention « très bien » au brevet – les autres élèves devant passer un examen réputé très difficile. Au lycée, j’ai choisi la série Sciences expérimentales en classe terminale. C’est là que, comme beaucoup, j’ai pris goût à la philo. Cela donnait l’impression d’être plus intelligent parce qu’on « réfléchissait », on « problématisait », on « s’analysait », on « pensait la pensée ». Mon prof de philo, un Alsacien d’un certain âge, qui avait un très fort accent, n’était pourtant pas exceptionnel. Il faisait cours à partir de notes qui dataient sans doute de l’époque où il préparait l’agrégation. Il répétait son cours écrit sur des feuilles jaunies par le temps mais parfois on pouvait voir des pages plus blanches, signe de lectures récentes. Il était bergsonien et a abordé Freud très rapidement pour nous dire… que ce n’était pas pour nous.
5 Après le bac, mon côté « réaliste » s’est encore manifesté. Il fallait que « j’assure » mon avenir, ce qui m’a conduit à faire une licence en droit. Mais comme la philo m’intéressait, j’ai aussi fait parallèlement une année de propédeutique où j’ai eu Jean-Claude Filloux comme prof., un philosophe qui s’est intéressé à Durkheim. Il nous a fait étudier trois auteurs : Kant, Marx et Durkheim. J’ai trouvé Kant fascinant mais difficile. En revanche, j’ai littéralement dévoré Marx. Quant à Durkheim, je l’ai trouvé un peu vieillot, académique et je suis passé complètement à côté (c’est Bourdieu qui trois ans plus tard me le fera découvrir).
6 J’ai donc commencé mes études de droit tout en lisant parallèlement de manière un peu désordonnée de la socio, me disant, sans conviction, à chaque livre que je lisais : « oui, pourquoi pas ? ». Aucun auteur ne me paraissait l’emporter sur les autres. C’est à cette époque que j’ai connu Rémi Lenoir, qui était dans le même groupe de TD de droit que moi et qui suivait les cours de Bourdieu à l’EPHE. J’avais déjà lu Gurvitch, Levi-Strauss, etc. mais pas encore Bourdieu. C’est à cette époque que j’ai lu Les Héritiers, un livre qui a été un choc pour moi. Ce qui m’avait impressionné c’était ce mélange très spécifique chez Bourdieu, de données empiriques précises et de questionnement quasi philosophique qui faisait que, à la fois, on se reconnaissait dans cette description du monde étudiant et en même temps on comprenait la nécessité qui s’exerçait sur nos comportements et attitudes au lieu de se culpabiliser. J’avais eu la même impression à la lecture de Freud. En tout cas, je me suis dit, « la socio, c’est ça. » et je suis allé consulter le fichier de la bibliothèque pour voir s’il y avait d’autres publications au nom de Bourdieu. J’ai découvert son petit livre sur l’Algérie paru dans la collection Que sais-je ? [1], Travail et travailleur en Algérie. Et les livres de la collection « le sens commun » aux Éditions de minuit, notamment Un art moyen sur la photographie, L’amour de l’art sur la fréquentation des musées et aussi Le partage des bénéfices qui prenait le contrepied des discours sur les « 30 glorieuses ». Pendant plusieurs mois, je n’ai lu que du Bourdieu, traquant le moindre article. C’était un peu ma manière de travailler : quand je tombais sur un auteur qui m’intéressait, je lisais tout ce qu’il avait écrit. C’est ainsi que j’avais lu une grande partie des livres de Lévi-Strauss pendant les vacances d’été, puis Marx et maintenant c’était Bourdieu. C’est comme ça que j’ai découvert Bourdieu. chaque lecture me confirmant dans l’idée qu’il s’agissait d’un auteur majeur.
7 Quand Rémi Lenoir m’a dit que Bourdieu faisait un séminaire à l’EPHE et que l’on pouvait y assister comme auditeur libre, j’ai été suivre son enseignement, c’était en 1967. Cette année-là, le séminaire portait sur l’épistémologie des sciences sociales – il préparait à l’époque avec Passeron et Chamboredon Le métier de sociologue – et sur Durkheim que Bourdieu m’a fait découvrir. C’était un enseignant tout à fait exceptionnel, loin des routines académiques. Il ne faisait pas un cours à proprement parler mais exposait ses recherches, expliquait comment il travaillait, ce qui était passionnant.
8 En 1968, je décidais de faire une thèse de sociologie avec Bourdieu et je lui ai remis un projet sur les journalistes politiques. Ce sujet devait beaucoup à mon parcours en droit et à Sciences Po qui m’avait amené à m’intéresser à la sociologie politique. Bourdieu a accepté mon projet qui était d’inspiration très « bourdieusienne ». En Mai 68, j’allais fréquemment au Centre de sociologie européenne, le laboratoire dirigé par Bourdieu, pour donner un coup de main pour tirer des textes sur divers sujets liés à l’éducation, textes qui étaient rédigés à partir des travaux menés par les chercheurs du Centre, et pour les diffuser dans les Assemblées générales.
9 En octobre 68, le directeur du CNAM a demandé à Bourdieu de faire une étude sur son public. Qui sont les étudiants du CNAM ? quelles sont leurs motivations ? etc. Bourdieu a sollicité Grignon, qui travaillait à l’époque sur l’enseignement technique [2]. Celui-ci, pris par la rédaction de sa thèse, a décliné. Bourdieu m’a proposé de faire l’enquête sous la direction de Grignon. Ce que j’ai accepté. Je garde de cette expérience un souvenir peu glorieux car je n’avais jamais fait d’enquête sociologique et cette première expérience fut assez laborieuse. Car si c’était facile de lire les enquêtes faites par Bourdieu et son équipe, c’était une autre affaire que d’en faire une soi-même. Je prenais comme modèle les enquêtes du Centre mais je n’arrivais pas à sortir de la copie et même du pastiche. Ce qui fait que Grignon a été mobilisé plus qu’il n’aurait voulu dans cette enquête notamment pour rédiger le rapport final.
10 En 1970 j’ai fait mon service militaire et quand je suis revenu, Bourdieu m’a proposé un poste de collaborateur technique en attendant de trouver un poste de chercheur. Pour candidater à un poste, il fallait avoir des publications. J’ai donc préparé un article sur la télévision et ses conditions de réception. C’est Bourdieu qui m’a suggéré le thème parce que je lui avais dit que je souhaitais travailler sur la télévision. Je me suis heurté au même problème que pour mon enquête sur le CNAM : je commençais à savoir un peu mener une enquête mais c’était encore très laborieux et j’avançais difficilement. Bourdieu me mettait la pression, me demandant régulièrement où j’en étais et quand je lui passerais mon article. Je retardais le moment jusqu’au jour où travaillant dans un bureau au Centre, il passe par là et me demande ce que j’étais en train de faire. J’ai eu à peine le temps de bafouiller que je travaillais sur l’article qu’il me l’a littéralement pris des mains en disant : « Donnez-le moi, donnez-le moi… ». Je me suis dit que ma carrière au Centre allait s’arrêter là car mon texte n’était pas très bon ! En fait, il est venu me voir le lendemain, et au lieu de me virer du centre, il m’a aidé, me faisant un certain nombre de remarques, me donnant des conseils sur la façon de rédiger tel ou tel passage, citant une référence à consulter, suggérant des changements dans le plan de l’article. En somme, il a refait l’article avec moi ce qui m’a encouragé. J’ai évidemment rédigé l’article en suivant ses conseils. Il est paru dans la Revue française de sociologie en 1971. Sans Bourdieu, je n’aurais pu faire cet article dont je suis cependant l’auteur. Cette aide généreuse que Bourdieu m’a apportée, bien des chercheurs en ont également bénéficié. C’est quelque chose qui était mal perçu de l’extérieur. Certains disaient : « Bourdieu fait les papiers de tous ses collaborateurs, qui ne font donc rien ». D’autres disaient au contraire : « Ce sont ses collaborateurs qui font tout et Bourdieu qui signe ». Ils n’arrivaient pas à comprendre cette espèce de production collective dont Bourdieu était l’inspirateur.
11 1971, c’est l’année où je me présente au concours du CNRS mais aussi à celui de l’INRA, où était déjà Grignon. Pour le CNRS, il fallait rédiger un projet de recherche. Bien que mon projet fût bien noté par le jury, il ne fut pas retenu. Pour l’INRA, il fallait passer un concours. Je n’ai pas eu l’impression d’avoir été très bon mais j’ai été pris. Il faut dire aussi qu’à cette époque le nombre de candidats qui se présentaient par rapport au nombre de postes mis au concours rendait possible une chance de recrutement plus grande qu’aujourd’hui.
12 Savoir/Agir : Pourquoi l’INRA recrutait-elle des sociologues ?
13 Patrick Champagne : L’INRA, avant la seconde guerre mondiale, était un centre de recherche en physiologie animale et végétale. Après la guerre, il s’agissait de rendre l’agriculture française plus productive et autosuffisante. L’INRA a donc créé des labos d’économie rurale. Il s’agissait d’apprendre aux paysans traditionnels à être des agriculteurs modernes sachant élaborer un budget, tenir une comptabilité, accepter de s’endetter lourdement au Crédit agricole pour se moderniser. Cette marche forcée vers le productivisme a entraîné une succession de réformes qui, en 1962-63, ont conduit à d’importantes manifestations paysannes, et parfois à de véritables jacqueries. L’INRA, qui était un peu le bureau d’études du ministère de l’Agriculture, a donc souhaité que des chercheurs étudient les « résistances à la modernisation » – un thème fréquent à cette époque et pas seulement à l’INRA – dont ces manifestations étaient supposées être l’expression. D’où cette ouverture de l’INRA à la sociologie pour étudier ces phénomènes. Grignon avait été recruté je crois dès 1965 à cette fin. La sociologie à l’INRA était très marginale et l’est restée longtemps, par rapport aux économistes qui eux-mêmes ont connu, dans les années 70 des changements importants. Dans les années 1950-1970, l’INRA avait recruté des Agros qui avaient acquis une formation en économie rurale, qui pensaient qu’il y avait une spécificité de l’économie rurale par rapport aux lois générales de l’économie. Certains d’entre eux avaient été formés aux États-Unis après la guerre dans les « missions de productivité ». À la fin des années 1960, l’INRA a recruté des chercheurs ayant suivi des cursus d’économie dans des facs de droit et de sciences économiques. Ces chercheurs étaient plutôt politisés à gauche, ils s’appuyaient sur Marx et Kautsky, et défendaient la « petite production marchande » contre le capitalisme agraire. Quand je suis entré à l’INRA, les problématiques marxistes étaient dominantes. En ce qui me concernait, il fallait que je définisse un projet de recherche. Ma première idée était de travailler sur les journalistes agricoles. Mais Bourdieu qui travaillait sur le célibat paysan m’a incité à faire d’abord du terrain et à enquêter directement sur le milieu paysan. Il y avait un chercheur du Centre qui avait une maison de famille en Mayenne et qui m’a proposé de m’y installer et de m’aider au démarrage de mon enquête. Ce qui fut le cas. C’est donc pour cette raison très conjoncturelle que j’ai fait mon premier terrain dans la Mayenne. J’ai vu le notaire du coin, l’institutrice du village, les artisans et surtout les familles paysannes que j’ai interviewées presque intégralement. Mon enquête a duré six ou sept ans, avec des séjours réguliers et répétés là-bas. J’ai observé les fêtes à l’ancienne, des bals locaux, des paysans à la plage. J’ai pu nouer avec le temps, des relations amicales avec des personnes que j’avais d’abord interrogées en tant qu’enquêteur, c’est-à-dire en tant qu’étranger. Le retour avec eux sur les premiers interviews m’a fait prendre conscience très vite du fait que les réponses que les enquêtés font en général au sociologue sont très convenues et que moins le sociologue en sait moins ils lui en disent. C’est là que j’ai appris à faire des entretiens et à voir que la réalisation d’un bon entretien suppose une bonne connaissance préalable du terrain d’enquête.
14 J’ai rédigé à partir de cette monographie deux articles qui ont été publiés dans les Actes de la recherche en sciences sociales qui venaient juste de paraître en 1975. Un premier article – les paysans à la plage – qui est paru dans le numéro 2 est sans doute le texte le plus court que j’aie publié mais qui a eu le rendement le plus grand au niveau de sa circulation et de l’intérêt qu’il a suscité [3]. L’idée de cet article est venue de Bourdieu. Il travaillait sur le célibat paysan dans son village natal et il utilisait le concept d’habitus comme principe explicatif. Si les paysans ne se mariaient pas, c’est, disait-il dans un raccourci, « parce qu’ils ne savaient pas danser » alors que le marché matrimonial s’était déplacé des familles vers les pistes de danse. J’avais observé que les paysans du village que j’étudiais partaient à la mer le dimanche, y passaient la journée puis rentraient le soir pour la traite des vaches. Ils voulaient eux aussi faire comme les citadins en vacances. Le problème c’est que une fois arrivés sur la plage, ils ne savaient pas quoi faire parce qu’ils ne savaient pas nager et n’osaient pas trop se mettre en maillot de bain et exhiber un corps qui ne répondait pas aux critères esthétiques dominants. Là encore, les paysans n’avaient pas, comme sur la piste de danse, le bon habitus. Dans le deuxième article tiré de cette enquête [4], je recense les problèmes de méthode que j’avais rencontrés lorsque j’avais voulu faire des comptages. Les relations économiques, culturelles, matrimoniales n’étaient pas toutes contenues dans l’aire géographique du village et même débordaient de plus en plus le cadre de la commune. Utilisant l’analyse en terme de « champ », j’ai essayé de montrer que le village restait un cadre d’analyse pertinent en tant qu’intersection de champs différents, économiques, politiques, etc., qui sont en interconnections fortes en un lieu physique mais qui tendent à se déconnecter.
15 J’ai travaillé sur ces sujets dans les années 1970 tout en continuant à lire de la sociologie politique, mais un peu en marge. De 1978 à 1984 j’ai fait une nouvelle enquête en milieu rural dans la Bresse bourguignonne. Le thème était : « la crise de la reproduction de la petite et moyenne paysannerie ». J’avais été sollicité pour être la « personnalité scientifique » dans le conseil d’administration de l’écomusée de la Bresse bourguignonne. En Bresse, dans la continuité avec mon enquête en Mayenne, j’ai travaillé sur la crise de la reproduction de la petite et moyenne paysannerie et sur la dimension symbolique de cette crise à partir d’une enquête par questionnaires, complétée par des entretiens et un reportage photographique [5].
16 Savoir/Agir : Comment expliquez-vous votre intérêt ultérieur pour les sondages d’opinion et, par conséquent, le retour de la socio-politique dans vos réflexions ?
17 Patrick Champagne : Le lien avec mes préoccupations antérieures – la paysannerie – s’est fait avec la manifestation paysanne massive de mars 1982 à l’initiative de la FNSEA. Le nouveau gouvernement de gauche, voulant rompre avec le monopole de la FNSEA qu’il considérait comme de droite, a voulu faire entrer dans le jeu les organisations minoritaires, plutôt à gauche, qui en étaient exclues jusque-là : le Mouvement de défense des exploitations familiales (MODEF), la Fédération nationales des syndicats paysans (FNSP) ou la Confédération nationale des syndicats de travailleurs paysans (CNSTP) [6]. Jusque-là, la FNSEA avait quasiment cogéré le milieu agricole avec les gouvernements de droite. Dans ce contexte, la manifestation était devenue une exhibition (réussie) de représentativité pour la FNSEA ! On était à mi-chemin entre la manifestation ouvrière et le Salon de l’agriculture avec le défilé de toutes les délégations départementales.
18 J’ai observé cette démonstration de force symbolique avec l’intention d’en faire une étude, plus généralement, sur « ce que manifester veut dire », cette manifestation paysanne n’étant qu’un cas particulier d’un mode d’action plus général. Surtout cette enquête me rapprochait de la sociologie politique sans me couper des paysans. Cette enquête renvoyait vers différents thèmes : « exhibition de capital symbolique », problème de la représentativité, présentation de soi des paysans, rôle de la presse, production de l’événement politique, etc. J’ai donc fait un article qui a été très lu à Sciences po notamment parce qu’il renouvelait un peu le domaine. Je montrais que cette manifestation marquait un changement : ce qui comptait désormais c’était de se faire voir par la presse pour produire ce que j’ai appelé des « manifestations de papier », c’est-à-dire des comptes rendus dans les journaux et surtout à la télévision.
19 Cette enquête m’a conduit à me tourner vers la presse et les sondages d’opinion puisque ce type de manifestation visait, par l’intermédiaire des médias, à peser sur l’opinion publique et par là sur les gouvernants. J’ai donc repris l’analyse des sondages d’opinion que Bourdieu avait bien avancée dès 1970 [7]. J’ai mené une recherche sur la notion « d’opinion publique », sur les instituts de sondage et sur les utilisateurs des sondages, c’est-à-dire les acteurs du champ politique et les journalistes. J’ai réuni tout cela dans un manuscrit que j’ai passé à Bourdieu qui m’a proposé de faire un certain nombre d’aménagements et qui a décidé de le publier dans la collection « le sens commun ». Le manuscrit final a été transmis à Lindon qui a été emballé par le livre et il l’a publié sous le titre Faire l’opinion. Le nouveau jeu politique [8].
20 Savoir/Agir : Comment le livre a-t-il été reçu dans le milieu des sciences politiques, compte tenu du fait que vous étiez un peu un outsider dans ce milieu ?
21 Patrick Champagne : Il y a eu deux types de réactions. On m’a dit souvent : « Depuis que j’ai lu le livre, je vois les choses différemment ». Ce qui m’a évidemment fait plaisir car c’était le même type de réaction que j’éprouvais lorsque je lisais les livres de Bourdieu. Je me disais que je n’étais donc pas trop loin du modèle ! C’était plus compliqué du côté des politologues spécialistes des sondages d’opinion. Certains se sont empressés de discréditer l’ouvrage au lieu de le discuter. Les plus violents me reprochaient sur le plan scientifique de ne pas faire référence aux travaux nombreux des Américains sur les enquêtes d’opinion. Je les connaissais effectivement assez peu, notamment à cause de la barrière de la langue mais je ne pense pas cependant que toute cette littérature américaine sur les sondages aurait changé profondément mon analyse. D’autres politologues m’attaquaient politiquement, assimilant ma critique des sondages à une critique de la démocratie. J’ai même été qualifié de « marxiste léniniste » dans un manuel pour étudiants. Ce qui fait réfléchir sur les manuels. J’ai répondu à ces critiques dans un article paru en 1994 [9]. Donc, il y avait ces réactions assez négatives de certains politologues. Mais il y avait aussi des sociologues politiques, que j’avais eu, pour certains, comme étudiants dans les groupes de travaux dirigés à l’université de Paris1, comme Daniel Gaxie au début des années 1970. Ils avaient été intéressés par mes travaux et ceux de Bourdieu que je leur faisais étudier en TD. Je sais que mon livre a été très lu par les étudiants, à Sciences po notamment, bien qu’il ne figurât pas parmi les lectures recommandées par les enseignants. Faire l’opinion est un livre qui, aujourd’hui, n’est toujours « pas mort », comme disent les éditeurs quand un livre continue à être demandé régulièrement même en petite quantité. 15 000 exemplaires ont été vendus à ce jour depuis sa parution et il sort cette année en livre de poche.
22 J’ai ensuite travaillé sur la presse et ses relations avec les autres univers sociaux, notamment avec le milieu médical. J’ai étudié entre autres, avec Dominique Marchetti, l’affaire du sang contaminé qui a marqué un tournant dans les relations entre journalistes et scientifiques. Ce qui m’intéressait, c’était d’observer la restructuration des relations entre le champ journalistique et les autres champs sous l’effet des transformations internes du champ journalistique et des logiques de production de l’information. Cela a été le thème de deux numéros des Actes auxquels j’ai collaboré et qui montraient que le champ de la presse connaît des contraintes de production particulières qu’il impose en contrebande aux autres champs. Le deuxième article analysait les forces qui travaillent le champ journalistique à partir du changement de la ligne éditoriale du Monde telle qu’elle était justifiée par le médiateur du journal qui expliquait de chroniques en chroniques que Le Monde changeait parce que le monde changeait alors qu’en fait c’est le champ journalistique qui changeait, les médias dominants n’étant plus indiscutablement la presse écrite mais les médias audiovisuels qui eux-mêmes étaient fortement dépendants des logiques économiques par le biais de l’audimat et de la publicité.
23 Savoir/Agir : Vous vous êtes engagés dans l’Acrimed aussi…
24 Patrick Champagne : À l’origine, c’est une chose qui est aussi liée indirectement à Bourdieu. En 1995, on pouvait constater que les journalistes minimisaient fortement sous la pression du pouvoir, les grèves de l’automne et notamment celle de la SNCF qui durait pourtant depuis un mois. Ce traitement très orienté de l’information choquait beaucoup d’entre nous. Auparavant, avec Bourdieu, j’avais participé à l’université de la communication, un grand rassemblement des responsables des médias, qui avait lieu chaque année à Carcans dans la Gironde. Des séminaires étaient organisés pendant plus d’une semaine dans lesquels on parlait production de l’information. Nous avions proposé la création d’un Observatoire du journalisme. L’idée a été reprise par l’école de journalisme de Lille qui a organisé pendant deux ans un colloque sur la fabrication de l’information auquel j’étais invité. Cet observatoire était un début encourageant car si la presse est prompte à exercer sa critique sur les autres, elle accepte difficilement qu’on la critique et encore moins qu’elle se critique elle-même publiquement. Lorsqu’il y a eu le mouvement social de décembre 95, l’idée de faire un observatoire des médias a de nouveau été envisagée, mais cette fois dans une logique militante. Il y a eu une première réunion qui regroupait quelques chercheurs et universitaires (qui ont rapidement, pour la plupart, déserté les réunions), et des militants. C’est là que j’ai rencontré Henri Maler, qui était le plus engagé dans cette opération. On a fondé l’association Acrimed (action critique des médias) qui, au début, a tourné au ralenti à raison d’une réunion par mois. Au bout de six mois, nous nous sommes heurtés à un petit problème de trésorerie. Les adhérents payaient une petite cotisation mais comme ils étaient peu nombreux, leurs cotisations partaient presque intégralement en frais de timbres pour les informer de la réunion suivante ! Nous sommes donc par la force des choses passés au tout numérique : convocations par messagerie électronique, puis création d’un site avec mise en ligne des articles de critique, etc.
25 J’ai participé activement à la création et à la mise en place de l’association, ainsi qu’aux premiers papiers qui ont été rédigés pour le site. Mais ensuite, c’est Henri Maler qui a tenu à bout de bras l’association et qui a joué un rôle important dans son développement sur Internet notamment. D’autres adhérents se sont joints à nous activement et participent aujourd’hui à la vie de l’association qui est importante car elle est devenue la référence en matière de critique des médias. Le site est alimenté quasiment en permanence par des articles de critique et d’analyse des médias. L’expérience montre qu’il faut deux à trois nouveaux articles par semaine pour entretenir l’intérêt pour le site, ceux qui sont les plus lus étant évidemment ceux qui dézinguent telle ou telle personnalité médiatique. Nous cherchons à combiner militantisme scientifique et militantisme politique sans que l’un prenne le pas sur l’autre. Du point de vue scientifique, nous cherchons à faire un travail aussi précis dans le recueil de l’information que le ferait un chercheur, ce qui explique que le site serve beaucoup aux étudiants. Du point de vue politique, Acrimed milite en faveur de dispositions qui permettraient d’assurer un véritable pluralisme de l’information.
26 Savoir/Agir : Est-ce que vous avez l’impression que les journalistes lisent Acrimed ?
27 Patrick Champagne : Oui, beaucoup ! Ils cherchent à la fois les critiques que nous faisons et des idées de papiers à publier. Acrimed existe pour les journalistes. Sans forfanterie, on peut noter que le premier nom qui arrive lorsqu’on parle critique des médias, c’est Acrimed. Des tentatives ont été faites, par exemple du côté du Monde Diplo ou de l’Observatoire des médias, pour faire la même chose. Mais il faut faire le travail d’observation et de recueil des données, ce qui suppose de lire la presse, d’écouter la radio, etc. Sinon, au bout d’un certain temps, on tourne en rond parce qu’on n’a plus rien à dire. Une des raisons de la survie d’Acrimed et de son développement réside précisément dans cette observation permanente des médias.
28 Savoir/Agir : Où en est l’édition des cours de Bourdieu ?
29 Patrick Champagne : À l’origine, quand nous avons fait le transfert des archives relatives aux cours sur l’État, c’est Pierre Rimbert je crois qui a découvert un repiquage du cours fait par quelqu’un que nous ne connaissons pas et qui l’avait donné à Bourdieu. Celui-ci l’a lu et l’a trouvé intéressant. C’est à partir de là qu’est née l’idée de cette publication. Nous avons donc réuni les enregistrements des cours à partir des stocks personnels de chacun d’entre nous. J’en avais par exemple chez moi. Nous pensions pouvoir boucler rapidement la publication mais nous nous trompions. Le repiquage qui avait été fait comportait beaucoup d’erreurs et de coupures et ne pouvait pas être publié tel quel. En outre une telle publication supposait un appareil critique minimum. Le premier travail a donc consisté à faire une transcription exacte du cours. Puis, pour le rendre lisible, il a fallu faire un travail de réécriture minimum, qui consistait à supprimer les tics de langage, les répétitions inutiles, à finir les phrases et à mettre la ponctuation adéquate. Mon rôle, dans ce travail de rewriting, était non négligeable car très tôt, depuis le séminaire de 1967, je venais avec un magnétophone pour enregistrer ce que disait Bourdieu et en garder une trace. Je suis devenu ainsi le « préposé au magnétophone ». Je repartais du séminaire avec les bandes et Bourdieu me demandait s’il était possible de les repiquer rapidement. Je devenais donc non seulement celui qui enregistrait mais aussi celui qui transcrivait les enregistrements très rapidement, en général dans la semaine qui suivait. Je ne le faisais pas mot à mot mais en réécrivant un minimum pour que cela soit lisible et que les comptes rendus puissent être diffusés auprès des membres de son groupe qui n’assistaient pas aux séminaires. Je n’étais pas seul à faire ce travail, Monique de Saint Martin ou Rémi Lenoir le faisant de temps en temps aussi. Nous avions donc une expérience du repiquage des cours de Bourdieu qui nous a servi pour l’édition de ses cours au Collège de France. Nous sommes tombés d’accord pour que la version finale soit faite sans fétichisme. Ce qui veut dire qu’elle devait être fidèle, bien sûr, à ce qui avait été dit. Mais aussi qu’il fallait rendre ces transcriptions lisibles en « nettoyant » le texte et même en supprimant certains passages redondants. Quand Sur l’État est finalement sorti, plusieurs chercheurs m’ont dit sans se concerter que lorsqu’ils lisaient le livre, ils avaient l’impression de retrouver Bourdieu, de l’entendre. Ce qui, à mes yeux, garantissait que nous avions été fidèles à Bourdieu tout en rendant le texte lisible.
30 La date de sortie du premier tome [10] était « stratégique », et ne respectait pas pour cette raison l’ordre chronologique. La question se posait en effet de savoir quel cours publier en premier. Ce qui a été déterminant, c’est le fait que la place de l’État était au centre du débat public et l’on a pensé que les cours de Bourdieu sur l’État pouvaient être une contribution utile sur cette question. La publication du cours sur Manet obéissait à une autre raison qui était que la publication de ce cours était très attendue [11].
31 Savoir/Agir : Le Manet donne pourtant l’impression d’avoir été conçu de façon un peu différente… Il fait davantage conversation, conférence. Alors que l’État fait plus « écrit ».
32 Patrick Champagne : Il a pourtant été fabriqué de la même manière, sans fétichisme mais en restant proche de ce qui a été dit et de la manière dont cela a été dit. Nous n’avons pas par exemple reconstruit ou déplacé des phrases. Pour revenir à ce qu’a été la ligne éditoriale de la publication des cours, les choix à faire étaient simples. Que fallait-il publier ? Dans quel ordre publier ? Mais il y avait aussi une troisième dimension, celle de l’édition critique : vérifier les citations, les noms d’auteurs, donner des références pour des propos qui étaient allusifs ou à des articles écrits ultérieurement et qui développent beaucoup mieux ce qui est abordé dans les cours. Ce qui implique évidemment une bonne connaissance de l’œuvre. Un autre problème était la masse des notes que Bourdieu utilisait pour préparer ses cours. Que publier de ce corpus ? Comment le publier ? Je donne ces précisions qui peuvent paraître très marginales parce que une fois la solution trouvée, on imagine mal toutes les possibilités qui ont été écartées. Faut-il faire une publication brute et publier ce qui a été dit au Collège de France ? Ou alors faire une édition pour spécialistes et publier les notes de cours, les variantes, etc. et avoir des notes qui sont plus importantes que le texte. La solution adoptée a été de dire : il y a les notes de cours, nous les laissons là où elles sont, c’est-à-dire dans les archives où elles pourront être consultée par les chercheurs et il y a le cours du Collège réécrit a minima (ce qui était indispensable parce que Bourdieu n’écrivait pas ses cours mais improvisait à partir de ses notes) et seulement l’indication de références ou de précisions jugées utiles ou indispensables.
33 Savoir/Agir : Quel est l’intérêt des notes que Bourdieu utilisaient pour ses cours et que vous n’avez donc pas retenues ?
34 Patrick Champagne : Elles montrent le cheminement d’une pensée en train de s’élaborer et tous les développements qu’il avait envisagés car ses notes débordaient largement ce qu’il en disait en cours.
35 Savoir/Agir : Est-ce qu’il avait ces notes sous le nez quand il faisait cours ?
36 Patrick Champagne : Il les regardait de temps en temps mais il serait plus juste de dire qu’il improvisait à partir de ses notes. Il y avait aussi des morceaux de textes tapés à l’ordinateur, comme s’il allait les lire mais qu’il ne lisait pas. Il arrivait souvent une heure avant le cours, il allait dans le café en face du Collège, rue des Écoles, il se mettait au fond du café et relisait ses notes en silence comme pour en quelque sorte se répéter le cours mentalement.
37 Savoir/Agir : On dit souvent que cette École de Bourdieu est une secte. Comment réagissez-vous à cela ?
38 Patrick Champagne : Ce qui me frappe, c’est la différence de perception qui existe entre ceux qui n’ont pas connu Bourdieu, je veux dire qui n’ont pas travaillé avec lui, et nous. Pour nous, une secte, c’est l’opposé de ce que Bourdieu a voulu construire. Pourquoi cette perception existe-t-elle alors ? Nous vivons dans un univers intellectuel et social où, pour exister, il faut avoir un nom. Bourdieu, lui, a eu pour ambition de constituer un groupe scientifique, un point de rencontre qui n’empêche pas chacun de suivre son chemin. Son souci, c’était d’avoir un groupe intégré intellectuellement et scientifiquement. Il lisait tous les textes des membres de son labo et faisait lire également les siens et était très attentif et reconnaissant pour les observations que l’on pouvait lui faire. Il faisait lire également les textes entre les membres du labo afin de mettre en place un système de contrôle croisé en fonction notamment de l’origine sociale des chercheurs. C’est ce qui fait que les travaux qui sortaient du labo répondaient souvent par avance aux objections et avaient un air de famille. C’est peut-être aussi cela qui était à l’origine du sentiment de « totalitarisme intellectuel » que pouvait produire le labo de Bourdieu chez les concurrents. Le style de l’écriture y contribuait aussi sans doute car il y avait un style (des phrases très longues avec des « qui » et des « que ») et des expressions propres à Bourdieu (« tout se passe comme si », « s’il est vrai… il n’en reste pas moins que ») que les membres du groupe adoptaient, copiaient ou pastichaient. Le style Bourdieu qui avait sa raison d’être scientifique (il s’agissait d’écrire de façon rigoureuse) marquait aussi l’appartenance à un groupe dont le chef était Bourdieu et dont les membres étaient perçus négativement et réduits au statut d’imitateurs serviles, d’épigones. C’est ce qui explique en partie, je pense, les ruptures éclatantes de certains membres du groupe avec Bourdieu, ruptures qui étaient nécessaires pour exister dans un univers ou, comme disait Bourdieu, on n’existe, comme les phonèmes, que par différence. Ne supportant plus que l’on dise de leurs publications, que ce qu’ils faisaient, « c’était du Bourdieu », certains membres du groupe quitteront le labo, les uns passant leur vie à démolir celui qu’ils avaient admiré et imité, tandis que d’autres construiront des théories du monde social aussi ambitieuses que celle de celui qui fut leur maître et que, bien sûr, ils prétendront dépasser. ■
Notes
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[1]
Pierre Bourdieu, Sociologie de l’Algérie, collection Que sais-je, PUF, 1958, réédité en 2001.
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[2]
Sa thèse sur l’enseignement technique est publiée dans Claude Grignon, L’ordre des choses. Les fonctions sociales de l’enseignement technique, Paris, Éditions de Minuit, Coll. le Sens Commun, 1971.
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[3]
Patrick Champagne, « Les paysans à la plage », Actes de la recherche en sciences sociales, n° I-2, 1975.
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[4]
Patrick Champagne, « La restructuration de l’espace villageois », Actes de la recherche en sciences sociales, n° I-3, 1975.
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[5]
Patrick Champagne et Sylvain Maresca, D’une génération à l’autre, 1985.
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[6]
La FNSP et la CNSPT créeront la Confédération paysanne en 1987.
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[7]
Voir notamment Pierre Bourdieu, « L’opinion publique n’existe pas », Les Temps modernes, n°318, janvier 1973.
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[8]
Patrick Champagne, Faire l’opinion. Le nouveau jeu politique, Paris, Éditions de Minuit, 1990.
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[9]
Patrick Champagne, « De la doxa à l’orthodoxie politologique. La “théorisation” de l’inconscient politique », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 101-102, 1994.
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[10]
Patrick Champagne, Rémi Lenoir, Franck Poupeau et Marie-Christine Rivière, Sur l’État : Cours au Collège de France (1989- 1992), Raisons d’agir, Le Seuil, janvier 2012.
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[11]
Pierre Bourdieu, Marie-Claire Bourdieu, Christophe Charle, Pascale Casanova, Manet, Une révolution symbolique : Cours au collège de France (1998-2000) suivis d’un manuscrit inachevé de Pierre et Marie-Claire Bourdieu, Raisons d’Agir, Le Seuil, novembre 2013.