Couverture de RS_065

Article de revue

Se former dans le temps de retraite

Analyse sociologique des parcours de vie en formation

Pages 81 à 100

Notes

  • [1]
    Ces deux enquêtes sont complémentaires aux enquêtes Emploi conduites par l’Insee, en collaboration notamment avec le Cereq. La première porte sur un échantillon de 28 700 personnes âgées entre 15 et 65 ans et ayant terminé leur formation initiale ; la seconde porte sur un échantillon de 16 500 personnes âgées entre 15 et 65 ans et sorties du système scolaire.
  • [2]
    S’il n’est pas toujours aisé de repérer quantitativement les retraités qui fréquentent le monde universitaire traditionnel, précisons que le mouvement de constitution des UTA en France est particulièrement complexe. De ce point de vue, une recherche mériterait d’être conduite pour déterminer le plus précisément possible le nombre de retraités participant aux activités des UTA quels que soient leur statut juridique (universitaire, association, service municipal) et leurs liens formels avec le monde universitaire.
  • [3]
    Il s’agit ici de souligner que les études deviennent quasiment une activité exclusive qui vient remplacer le temps précédemment consacré à l’activité professionnelle. En ce sens, la vie de retraite, dans ses dimensions familiales et sociales, s’organise alors autour des études devenues une activité pivot pour le retraité.
  • [4]
    Lors du travail de terrain, il était encore possible de rencontrer des travailleurs en fin de carrière concernés par le dispositif de dispense de recherche d’emploi (DRE). La suppression de ce dernier a néanmoins été votée en 2008 et est appliquée depuis le 1er janvier 2012.
  • [5]
    Seule une structure, de type universitaire, observée au moment de l’enquête, s’efforçait de mettre en place des formations diplômantes à destination du public retraité.
  • [6]
    Diplôme universitaire de tutorat social proposé en 2004 par une UTA possédant le statut universitaire.
  • [7]
    G. Felouzis (2001) observe différentes tactiques mises en œuvre chez les jeunes étudiants qui s’opposent aux stratégies investies par les retraités rencontrés, telles que la « tactique de l’élection » (se focaliser sur certains modules et pas d’autres) ou la « tactique du sacrifice » qui se traduit par une répartition de l’effort entre deux sessions d’examens.
  • [8]
    Une recherche plus récente sur les démarches de retour à l’emploi à l’heure de la retraite au Québec permet de préciser ces mutations (Chamahian, 2012).

1 Depuis plusieurs décennies, le temps de la retraite est analysé comme un moment de redéfinition de son parcours, le plus souvent anticipé (Berteau-Rapin, Mette, 2008) et marquant un horizon temporel dans lequel les individus se projettent pour orienter leurs vies (Kohli, Künemund, 2002). Cette orientation personnelle se situe par définition en dehors de la vie professionnelle, car « prendre sa retraite » consiste le plus souvent, et jusqu’à très récemment, à rompre définitivement avec le monde du travail pour s’ouvrir à une vie consacrée à soi, à sa famille et à des activités culturelles, sportives ou dites d’engagement politique et social. Cette construction sociale a permis d’ordonnancer – avec le processus d’industrialisation de nos sociétés occidentales – les parcours de vie en trois temps (jeunesse, vie adulte, vieillesse) profondément cloisonnés et orientés, de façon irréversible, sur la flèche du temps. Avec cette tripartition des âges se dessine une répartition standardisée des temporalités sociales : il y aurait ainsi un âge pour se former, un âge pour travailler et pour fonder une famille et, enfin, un âge pour se retirer du monde, notamment professionnel.

2 Le système éducatif d’un côté et l’institution de la retraite de l’autre participent grandement à ce processus d’institutionnalisation des parcours individuels, si bien qu’il semble paradoxal de penser que l’activité de formation puisse intéresser les retraités. En effet, le temps de la formation symbolise avant tout le temps de la jeunesse et, dans une certaine mesure, la vie adulte, mais l’avancée en âge a pour effet de rendre peu significatif l’engagement en formation (tableau 1), notamment professionnel (Santelmann, 2004). C’est ce que tendent à montrer les résultats des enquêtes Formation continue 2000 et 2006 [1] (Lainé, 2002 ; Fournier, 2010), même s’il est encore difficile de quantifier le nombre de retraités en situation de formation. Ce constat indique à quel point ces démarches de formation sont peu institutionnalisées [2] et qu’elles tendent à se construire à travers la seule initiative individuelle, en empruntant de multiples voies : formelles (au sein des universités), non formelles (par exemple, au sein des universités tous âges – UTA) et informelles (ensemble des activités du quotidien, discussions informelles, ou apprentissages sur le tas, liés à la pratique des technologies de l’information et de la communication, par exemple). Les données construites par le Cereq constituent dès lors une première source d’information non négligeable pour situer cette population. Si elles rendent compte, comme dans le tableau 1, de la faible proportion de retraités en situation de formation, elles permettent néanmoins d’observer que 80 % des retraités à la veille de leur formation ont réalisé un stage, pris des cours, etc. ; 19 % sont en situation d’autoformation et 1 % a réalisé une Fest (formation en situation de travail).

Tableau 1 > Répartition des personnes formées par type de formation selon la situation à la veille de la formation
Alternance Stages, cours, etc. Formation en situation de travail Autoformation Ensemble
Effectifs % Effectifs % Effectifs % Effectifs % Effectifs %
Salariés du public 9 498 0 2 185 736 78 487 977 18 122 389 4 2 805 600 100
Salariés du privé 60 583 1 3 043 707 69 1114 986 25 194 305 5 4 413 581 100
Indépendants 0 387 444 79 54 339 11 47 864 10 489 647 100
Chômeurs 79 294 10 617 489 73 67 530 8 76 613 9 840 926 100
Retraités 96 763 80 1 433 1 23 405 19 121 601 100
Inactifs (non-retraités) 37 368 11 255 647 74 25 028 7 28 925 8 346 968 100
Ensemble 186 743 2 6 586 786 73 1 751 293 20 493 501 5 9 018 323 100
figure im1
Lecture : neuf millions de personnes âgées de 15 à 65 ans ont fait au moins une formation entre janvier 1999 et février 2000. Parmi l’ensemble des formés sur la période, 1,3 % est retraité (121 601).
enquête Formation continue 2000 ; traitement par le Cereq.

3 Plus finement, le tableau 2 permet d’observer quelles sont les attentes de ces retraités à l’égard de la formation. Les données permettent ainsi de constater que l’intérêt des retraités pour une formation est principalement culturel, sportif ou personnel (90 %), mais on trouve également le projet de prendre des fonctions associatives ou syndicales (2,5 %) ou encore d’obtenir un diplôme ou une qualification reconnue (1,6 %), même si cela est moins prégnant.

4 Ces données de cadrage, tout en révélant une diminution des besoins de formation avec l’avancée en âge, n’attestent pas d’un désintérêt total des personnes vieillissantes concernant la formation. Macro-sociologiquement, ces données permettent de confirmer que les retraités sont principalement animés par la culture cultivée à travers les enseignements suivis, aussi diversifiés soient-ils. Pourtant, depuis 2003, le temps de la retraite est profondément redéfini politiquement afin de répondre au défi du vieillissement démographique de la France. La formation tout au long de la vie est d’ailleurs posée au cœur de la stratégie européenne pour l’emploi (Jolivet, 2002). Elle concerne l’ensemble des individus, mais constitue un vecteur majeur d’une politique d’« activation » à destination des plus âgés en vue de favoriser leur maintien ou leur retour sur le marché du travail. De ce fait, à côté de l’attrait pour la culture cultivée, l’engagement en formation n’est-il pas animé par d’autres types de projets ? Plus globalement, alors que le temps de la retraite est institutionnalisé à l’opposé du temps de formation, que signifie de s’inscrire à l’université, de suivre des cours, des séminaires et des conférences de façon assidue, de passer les examens et, souvent, d’organiser la vie de retraite autour de l’activité éducative ? Quel sens recouvrent ces démarches selon les contextes éducatifs choisis ? Comment ce choix se justifie-t-il au niveau de l’entourage familial, amical, professionnel ?

Tableau 2 > Attente principale selon la situation à la veille de l’entrée en formation
Salariés secteur public Salariés secteur privé Indépendants Chômeurs Retraités Autres inactifs Ensemble
Adaptation à l’emploi 77,6 79,9 79,7 11,8 ns 11,2 69,3
Obtenir un emploi ou en changer 5,2 4,2 2,9 57,1 ns 16,5 9,6
Obtenir un diplôme ou une qualification reconnue 6,7 6,0 2,9 15,8 1,6 24,2 7,6
Fonctions associatives, syndicales 0,6 0,7 1,6 0,4 2,5 2,8 0,8
But culturel, sportif, personnel 9,9 9,2 12,9 14,9 90,0 45,3 12,7
Total 100 100 100 100 100 100 100
figure im2
Lecture : 90 % des formations suivies par les retraités visaient un but culturel, sportif, personnel ; ns : non significatif.
enquête Formation continue 2000 ; traitement par le Cereq.

5 Afin d’éclairer ce questionnement, nous souhaitons non pas confronter l’éducation et la vieillesse comme « états » irrévocablement positionnés aux antipodes de la flèche du temps, mais plutôt envisager l’objet dans sa dynamique processuelle. Le temps de la retraite est donc pensé comme un événement (parmi d’autres) qui rythme l’expérience individuelle du vieillissement. Il conduit l’individu vieillissant à réfléchir à sa trajectoire de vie et à redéfinir son rapport au monde, à lui-même et à autrui (Caradec, 2004). En ce sens, il est propice à la mise en œuvre d’un travail de réorientation de son parcours au sein duquel le processus de formation prend sens et consistance. La notion de formation telle que nous la pensons est proche de la définition que donne J.-C. Forquin de la notion d’éducation permanente, c’est-à-dire « une éducation étendue sur toute la durée de la vie, intéressant toutes les dimensions de la vie et intégrant en un dispositif cohérent les différentes modalités possibles du processus éducationnel : initiale et continue, formelle et informelle, scolaire et non-scolaire » (2004, p. 11). « Vieillir » et « se former » constituent ainsi des expériences qui se conjuguent et produisent au fil du temps une « modification identitaire » (Haissat, 2006).

6 C’est sur cette base théorique que nous nous proposons de comprendre les formes de l’engagement en formation à l’heure de la retraite et tout au long de l’avancée en âge dans des contextes institutionnels différenciés (universités traditionnelles et universités tous âges). La notion d’engagement ne se limite pas ici à la seule « inscription » dans une structure éducative, mais est entendue comme un acte volontaire et durable qui oblige les retraités à une certaine prise de risque (notamment à l’université traditionnelle) et une mise en jeu de soi.

ENCADRÉ 1 Méthodologie

Cet article reprend les principaux résultats de notre thèse (Chamahian, 2009a). L’analyse se fonde sur la réalisation de 69 entretiens compréhensifs avec des retraités âgés de 57 à 92 ans inscrits dans une structure éducative. Cinq sites ont ainsi fait l’objet d’une investigation : l’université de Lille 3, l’université d’Aix-Marseille 1, les universités tous âges de Lille, Lyon et Nice.
Le choix de ces différents terrains, au niveau des universités traditionnelles, se justifie par le constat d’une concentration des étudiants âgés de 55 ans et plus (parmi lesquels se situe la population retraitée) au sein des facultés de Lettres et de Sciences humaines. Ils représentent ainsi sur les deux sites sélectionnés entre 0,7 et 1 % de la population étudiante globale. Précisons également, au niveau des UTA, que l’Union française des universités tous âges (Ufuta) fédère actuellement environ 44 UTA « mères », soit environ 250 structures (antennes comprises) regroupant un peu moins de 100 000 étudiants. Mais, il existe des UTA, comme celle de Lyon qui ne sont pas fédérées par l’Ufuta et qui recensent (antennes comprises) environ 10 000 étudiants. Nous nous sommes donc efforcée de choisir des structures, qui tout en étant conventionnées avec une université traditionnelle, reflètent le caractère diversifié des UTA du point de vue de leur histoire institutionnelle (date de création, appellations, etc.) et de leur statut juridique (services universitaires ou associations).
Au sein de chacune de ces structures, nous avons systématisé les critères de sélection des enquêtés. Ainsi, pour être intégrés à l’échantillon, les enquêtés devaient impérativement être retraités au moment de l’enquête (2006-2007), mais pas nécessairement au moment de leur première inscription dans une structure éducative (sur 69 enquêtés tous sites confondus, 19 se sont inscrits avant la prise de retraite, 28 au moment de la retraite et 22 après la prise de retraite). Par ailleurs, ils devaient être engagés depuis au minimum deux années dans un processus de formation, afin de nous permettre de caractériser la démarche d’engagement dans la durée. Le processus de recrutement de ces enquêtés s’est déroulé au sein de chacune des structures éducatives observées (soit par le biais d’un questionnaire de prise de contact notamment sur les deux sites lillois, soit par la méthode de proches en proches). Ce protocole nous assurait ainsi de ne rencontrer que des retraités en situation de formation au moment de l’enquête. Si l’échantillon a été diversifié du point de vue de l’âge, de la situation matrimoniale, du parcours de formation initiale et continue et du statut professionnel, il présente deux caractéristiques emblématiques qui tendent à définir ce public retraité spécifique : il est composé en majorité de femmes (environ 70 %) et se situe dans les catégories moyennes à supérieures.
Les entretiens ont été construits autour de trois axes permettant de situer temporellement l’engagement : le parcours de vie, l’ici et maintenant de la formation et le rapport à l’avenir. Chacun des entretiens, d’une durée d’environ deux à trois heures, a été enregistré et littéralement retranscrit. Dans un second temps, le corpus a fait l’objet d’une analyse thématique à la fois verticale (entretien par entretien, permettant d’observer les parcours individuels) et horizontale (permettant de confronter les expériences individuelles et de les situer au sein des différents contextes institutionnels observés).

7 Nous analyserons les liens entre processus de formation (inscription, maintien, formes de déprise et de sortie) et vieillissement (passage à la retraite, veuvage, effets propres du vieillissement, etc.) en trois moments distincts. En premier lieu, nous reviendrons sur la phase de transition vers la retraite et les circonstances (professionnelles, familiales, personnelles) qui conduisent les retraités à s’engager en formation. Nous verrons notamment que l’amorce de l’engagement n’est pas mécaniquement liée à la prise de retraite, mais peut se décider avant ou après celle-ci. Nous montrerons enfin quels sont les rapports que les retraités entretiennent à l’activité de formation, selon les contextes institutionnels et le sens que cela donne à leur démarche. Dans un second temps, nous analyserons l’originalité des parcours de formation des retraités selon les contextes éducatifs d’inscription. Nous soulignerons ainsi comment les temporalités institutionnelles peuvent tout à la fois favoriser ou freiner le « désir de savoir » de ces retraités et comment, dans chacune de ces situations, la façon de se représenter et de vivre le vieillissement se corrèle à la façon de construire son parcours de formation. Enfin, une dernière partie sera consacrée aux formes de sortie du processus de formation qui se justifient et prennent différents contours selon que le grand âge devient une réalité vécue, que le sentiment d’être rassasié intellectuellement se fait sentir ou qu’un projet de reconversion professionnelle implique de finaliser un cursus.

Passages à la retraite et démarches d’engagement en formation

8 Avoir un agenda bien rempli tout au long de la vie constitue l’une des injonctions majeures de la modernité (Boutinet, 2004) que l’on traduit bien volontiers par le fait d’être dynamique, actif et, par extrapolation, jeune. Le passage à la retraite exacerbe cette injonction par la libération de capital temps qu’il induit. Le choix de s’engager dans une activité de formation constitue un signal fort de négociation positive de l’entrée dans cette nouvelle phase de l’existence. Mais il est nécessaire de souligner que « prendre sa retraite » n’entraîne pas mécaniquement de s’engager en formation et que ce sont la multiplicité des parcours individuels, les ressources dont disposent les individus pour conduire à bien leur projet et les attentes qu’ils vont développer à son égard qui permettent de saisir l’hétérogénéité des démarches.

La signification de l’engagement à la lumière des parcours individuels

9 La complexification des parcours de fins de carrière révèle que le processus d’engagement ne se situe pas nécessairement au moment même de la prise de retraite, pour se construire soit avant, soit après ce passage. Dans les deux cas, le sens donné à l’activité est différent. Lorsque le processus s’élabore en amont de la prise de retraite, deux cas de figure tendent à se dessiner : l’engagement prend sens et consistance pour faire face à des fins de carrière difficiles ou bien il constitue un projet visant à anticiper sereinement la vie de retraite. Lorsque le processus est amorcé après l’entrée en retraite, et souvent après une période de latence, il vient compenser un sentiment de frustration dans la capacité à trouver des activités consistantes qui orientent positivement l’existence.

10 Revenons sur le premier cas de figure. Comme l’explique A.-M. Guillemard, le passage de la vie active à la retraite est marqué, depuis de nombreuses années, par une multiplication de statuts intermédiaires et de « voies institutionnelles de sorties anticipées » (2003) qui complexifient et singularisent les parcours individuels. Bien souvent, les retraités rencontrés situent ainsi leur première inscription en formation alors qu’ils étaient en situation de préretraite ou encore de chômage. Les cas de préretraites produisent par exemple un détachement progressif et définitif vis-à-vis de l’activité professionnelle et supposent parfois une sorte de conciliation entre temps de travail et temps de formation où l’activité éducative prend peu à peu une place conséquente, conduisant in fine à un arrêt total de l’activité professionnelle pour marquer l’entrée en retraite et l’engagement à temps plein [3] dans les études. Dans ces vécus, la possibilité de se former encore en milieu de travail est évoquée dans les discours, mais elle ne fait plus sens et c’est la formation de type « extrinsèque » qui anime les retraités rencontrés. Dans d’autres cas, l’entrée en retraite est précédée par une période de rupture profonde vécue avec le milieu professionnel à travers l’épreuve du chômage. Ici, les discours se rejoignent pour signifier l’impossibilité institutionnelle de retrouver un emploi ou d’envisager une formation pour repartir sur le marché du travail. Ces vécus font basculer les individus du statut de « chômeur » à celui de « dispensé de recherche d’emploi [4] ». Pourtant, le sentiment d’être encore utile et actif persiste et conduit à l’élaboration d’un travail subjectif de la situation personnelle permettant de donner du sens à une situation institutionnelle peu satisfaisante. Pour beaucoup, le choix de s’engager en formation est alors un moyen de compenser la situation de flou qu’induit ce statut intermédiaire : « je n’étais plus chômeuse et pas encore retraitée », explique une enquêtée qui, en s’inscrivant à l’université, bénéficie du statut étudiant et se donne un nouveau rôle social en attendant la retraite : « c’est quand même un statut social beaucoup plus confortable que d’être chômeur vis-à-vis de tout le monde ». Il existe enfin des situations où les fins de carrière sont parfaitement choisies et orientées vers une forte anticipation de ce que devra être la vie de retraite. L’engagement en formation est alors un projet au long cours visant à préparer cette période de la vie : « lorsque la transition est anticipée et donc se fait volontaire, elle se métamorphose en projet » (Boutinet, 2005, p. 344). L’enjeu de ne pas vivre la transition comme un moment critique (Strauss, 1992), c’est-à-dire à la fois comme une période déstabilisante et comme l’entrée dans le grand âge avec l’ensemble des représentations stéréotypées qui lui sont associées, justifie l’anticipation : « Je ne voulais pas qu’il y ait de coupure : tu t’arrêtes et tu fais autre chose. Donc, j’ai fait les deux choses en même temps. […] Je m’étais inscrite avant d’être à la retraite parce que j’ai pensé qu’il était utile après à ne pas rester chez soi à regarder par la fenêtre ce qui se passait. J’ai pensé faire des choses beaucoup plus intéressantes », explique une enquêtée inscrite dans une UTA. Le temps de la retraite ne doit donc pas être synonyme d’un temps d’arrêt et la « peur de ne rien faire » marque de nombreux témoignages.

11 Le second cas de figure, caractérisé par un engagement situé après la prise de retraite, rend compte également de cette ambition d’occuper ce nouvel horizon par des activités signifiantes. Cette réorientation des attentes à l’égard des activités de retraite s’opère dans des vécus contrastés. Pour certains, l’entrée en retraite est marquée par l’aide aux parents vieillissants ou aux petits-enfants qui rend impossible tout autre engagement ; pour d’autres, l’entrée en retraite n’en est pas vraiment une et consiste en « une période professionnelle avec peu de contraintes », comme en témoigne un enquêté qui bénéficie durant 9 années du dispositif de cumul emploi-retraite avant de décider de prendre en main ses « problèmes de retraite » et de s’inscrire à l’université pour entrer dans « la vraie retraite » ; pour d’autres, enfin, la transition est marquée par un certain désenchantement, car les activités dans lesquelles les jeunes retraités se projetaient deviennent peu épanouissantes. Ainsi, les voyages, le jardinage, le bricolage, la vie familiale qui permettaient d’avoir un emploi du temps bien rempli se transforment en des activités de « routinisation du quotidien » (Lalive d’Épinay, 1996) insatisfaisantes qui supposent de parvenir à « se trouver » : « c’était pas passer mon temps jusqu’à la mort quoi, qu’est-ce que je vais faire ? Passer mon temps pour ne pas déprimer avant de mourir ? C’était pas du tout mon projet ! » explique une enquêtée. Si le temps de la retraite est profondément désiré, il devient générateur d’ennui, de manque et conduit à une relecture de sa trajectoire personnelle, de ses attentes et de sa projection dans « l’à-venir » : « chercher sa voie », « faire des expériences nouvelles », comme le soulignent les enquêtés, conduisent à l’activité de formation comme vecteur d’ouverture intellectuelle et de dépassement de soi.

12 Il existe donc différentes voies par lesquelles la décision de s’inscrire dans une structure éducative prend forme. Au-delà des cadres institutionnels sur lesquels nous allons revenir dans la seconde partie de notre propos, il est important de mentionner que les retraités en reprise d’études construisent des rapports différenciés à l’égard de l’activité de formation qu’il semble nécessaire d’éclairer à la lumière de leur position dans le cycle de vie.

Des rapports différenciés à la formation

13 L’analyse des entretiens conduits au sein des différentes structures observées (universités et UTA) a permis de construire trois types de rapport à la formation : se former pour se cultiver, pour se rendre utile et actif ou encore pour se reconvertir (Chamahian, 2009b).

14 Quels que soient les lieux de formation, la volonté de s’ouvrir culturellement et intellectuellement est la démarche la plus observée chez les retraités. Cet intérêt personnel accordé aux études (Dubet, 1994) définit la culture comme « souci de soi » (Lorvellec, 2002) et alimente le désir de savoir et le plaisir d’apprendre qui peuvent être orientés sur différentes logiques : existentielle, citoyenne ou pratique (Chamahian, 2010). En ce sens, l’histoire de l’art, la philosophie, la littérature ou l’histoire des religions sont des disciplines qui participent à une réflexion sur soi, sur son existence et sur la fin de vie. Ces enseignements permettent de « se compléter et se réaliser », « se reconnaître soi-même », c’est-à-dire d’investir une démarche plus profonde, de type humaniste, qui ouvre sur une certaine authenticité intellectuelle ; bref, une démarche qui « cherche à éveiller chez l’étudiant des questions fondamentales concernant son vécu, en l’amenant à prendre conscience de lui-même et de son monde » (Proulx, 1976, p. 106). Il y a donc un lien étroit entre cet intérêt culturel et la position dans le cycle de vie : « je veux savoir ce qu’ils pensent [les théoriciens] pour avoir aussi des idées pour ma vie, réfléchir sur ma vie. Vous savez, c’est important pour moi aujourd’hui, on fait quand même un certain bilan de sa vie », explique une enquêtée (76 ans) inscrite dans une UTA.

15 À la différence des jeunes étudiants, l’enjeu de la formation n’est pas de « faire sa vie », mais plutôt de mieux la prolonger et la finaliser. La question du choix des disciplines a d’ailleurs provoqué chez certains enquêtés beaucoup d’émoi, nous permettant de réaliser que l’intérêt pour les études peut être lié à des événements biographiques dramatiques (la mort d’un proche) qui donnent de l’intérêt à la philosophie, mais aussi à une recherche personnelle concernant l’histoire familiale, à travers les cours d’histoire, ou à la volonté de retrouver ses racines identitaires par l’apprentissage d’une langue étrangère. D’un autre côté, l’histoire, la géopolitique, les conférences sur le monde contemporain, l’Europe et la mondialisation contribuent à donner aux retraités le sentiment de se maintenir dans le monde, de le comprendre et d’y agir. Les travaux de V. Caradec révèlent à quel point le sentiment d’étrangeté participe de l’expérience individuelle du vieillissement et peut être une épreuve (2007). Ces enseignements sont alors importants pour se construire en tant que citoyen éclairé, c’est-à-dire pour réfléchir aux principes actifs qui orientent la réalité sociale, politique, économique. Développer une « conscience historique » (Martuccelli, 2006) est également important d’autant que ces retraités ont parfois une trajectoire personnelle marquée par de grands événements historiques, comme la Grande Guerre ou la guerre d’Algérie. Ces attentes vis-à-vis des contenus d’enseignement révèlent un intérêt non contraint pour la formation et qui n’est pas désintéressé. D’ailleurs, certaines de ces attentes sont très « pratiques » à l’égard des enseignements suivis : ainsi, l’histoire de l’art, l’archéologie et les langues peuvent être étroitement liées à des projets de voyages culturels, de sorties dans des musées et des expositions. L’objectif étant d’acquérir des outils pertinents au déchiffrage des œuvres et monuments. Pour des retraités d’origine étrangère ou qui ont une belle-famille d’une autre nationalité, apprendre une langue peut être le moyen de mieux s’intégrer dans la vie sociale et familiale. Mais les enseignements en psychologie, en sciences environnementales, en santé ou en droit sont tout aussi appréciés pour accompagner une personne souffrante, connaître ses droits, se sensibiliser à la question écologique ou s’informer sur les questions sanitaires. L’intérêt culturel révèle ainsi des attentes très diversifiées en matière de formation qui, tout en se recoupant, donnent du sens à la vie de retraite. De ce point de vue, cette activité est loin de relever de la simple distraction.

16 Dans le cadre plus particulier des UTA, l’intérêt culturel et intellectuel peut être dépassé par sa dimension occupationnelle. Deux cas se dessinent alors : soit les retraités suivent des conférences pour occuper le temps en complémentarité d’autres activités associatives (ici le temps de formation ne se confond pas totalement avec le temps de retraite), soit ils cherchent par leur engagement une plus grande implication dans la vie de la structure et lient leur intérêt intellectuel à la prise de responsabilités.

17 Les UTA ont un mode de fonctionnement (absence d’examens, d’obligation d’assiduité, logique de partage des savoirs plutôt que transmission verticale des connaissances, etc.) qui favorise certainement un rapport strictement occupationnel à la formation où l’activité éducative est synonyme de passe-temps qui vient compléter d’autres engagements calendaires. Pourtant, les UTA sont aussi des structures (associatives ou universitaires) qui nécessitent la contribution de bénévoles. Dès lors que les retraités acceptent la prise de responsabilités au sein de ces structures, ils doivent concilier un « double statut ». Par exemple, certains retraités sont à la fois « étudiants » et bénévoles (c’est-à-dire que tout en suivant les activités, ils y participent comme organisateurs en tant que préposés à l’accueil, au secrétariat, membres du bureau, du conseil d’administration ou encore dirigeants) ; d’autres peuvent être à la fois « étudiants » et enseignants (les universitaires en retraite acceptent souvent de jouer ce rôle). Si dans les deux cas, les retraités souhaitent devenir des « participants directs à la structure », pour ceux qui sont à la fois étudiants et enseignants, on constate un changement du sens donné au temps de la retraite, comme en témoignent les propos de cet enquêté (61 ans), paléontologue en retraite : « je suis en retraite active, c’est une transition et la retraite, la véritable retraite, sera autour de 65 ans ». Le temps de la retraite devient un prolongement de la vie professionnelle antérieure à la seule différence que ces retraités redécouvrent leur pratique d’enseignement dans la redéfinition d’une relation pédagogique originale qui n’a rien en commun avec celle qui se construit face à un jeune public étudiant. C’est dans cette relation fondée sur un partage et une co-construction des savoirs avec leurs pairs qu’ils parviennent à compléter leur formation personnelle.

18 Cette façon d’envisager le temps de la retraite grâce à l’activité de formation rejoint d’une certaine manière le dernier type de rapport observé, qui constitue l’un des résultats majeurs de cette recherche, car il était peu attendu : se former pour se reconvertir, c’est-à-dire envisager la formation à la fois dans sa dimension culturelle et intellectuelle, mais aussi dans sa dimension utilitariste. L’université bien sûr, mais aussi les UTA (dès lors qu’elles proposent des formations diplômantes [5]) participent de ce projet qui vise, d’une certaine façon, à réorienter le parcours professionnel grâce au départ en retraite. Le cas le plus emblématique de notre étude est celui d’une enquêtée (62 ans) inscrite en psychologie à l’université et qui se représente la retraite comme l’occasion de réparer un parcours de formation contrarié : « Pour moi, la retraite, c’était : Ah ! Enfin, faire le métier qui m’intéresse ! » Après 30 années d’exercice comme enseignante de sciences physiques dans le secondaire, la retraite est le moyen de retourner à une discipline mise de côté dans sa formation initiale, la psychologie, et de devenir psychologue : « entre 24 ans et 61 ans, j’ai réalisé mon rêve ». L’assouplissement des règles de cumul emploi-retraite depuis 2003 et récemment, en 2009, permet de concrétiser ce projet. Pour d’autres enquêtés, il s’agit plutôt de prolonger un parcours professionnel inachevé, comme cette retraitée (63 ans), enseignante spécialisée, qui arrête sa carrière avec le sentiment de ne pas avoir saisi les difficultés d’écriture de ses élèves. Elle décide de suivre des cours de sciences de l’éducation à l’université pour explorer cette problématique, obtient un doctorat sur ce sujet et, à partir de son expertise de terrain et de son statut de « jeune » chercheuse, devient chargée de cours à l’université et membre d’un laboratoire de recherche. D’autres encore, profondément animés par la dimension culturelle de leurs études souhaitent, à un moment donné du parcours, partager leurs acquis grâce à des emplois à mi-temps (traducteur dans une ambassade, guide-conférencier, enseignant de langue dans des associations…). L’enjeu d’obtenir une qualification apparaît clairement au cœur des préoccupations de ces enquêtés qui, par leur rapport utilitariste à la formation, mettent parfois à distance leur statut de retraité et valorisent leur nouveau statut professionnel, comme cette retraitée qui, grâce à un DUTS [6], explique : « Moi, ce diplôme, il m’a permis souvent dans des négociations, quand on me dit “qui êtes-vous ?” Ben, je dis, je suis médiatrice, ça fait mieux que de dire, je suis retraitée ! Voilà, ça m’a servi à ça, là j’ai un statut. » Enfin, précisons que ce dernier type de rapport concerne majoritairement des femmes nées entre 1940 et 1949 dont les parcours de formation initiaux ont été bien souvent imposés ou contrariés. Sans affirmer que le temps de la retraite devient dès lors, pour elles, un temps de réparation d’un parcours insatisfaisant, leurs récits rendent compte du rôle emblématique de leur histoire familiale, mais aussi de leurs parcours professionnels (souvent marqué par des interruptions de carrière) et de formation pour comprendre le sens de leur engagement dans les études à la retraite (Chamahian, 2008).

19 L’analyse des rapports différenciés à la formation révèle d’une certaine façon l’importance des cadres institutionnels qui permettent d’orienter les attentes des retraités à l’égard de l’activité éducative. Mais faire le choix d’une structure plutôt qu’une autre – en début de parcours – n’est pas non plus tout à fait étranger à une définition subjective de sa position personnelle dans cette période de l’existence et de son rapport à l’avancée en âge. L’analyse du lien entre le désir de savoir et les temporalités institutionnelles sur la durée conforte ce constat.

Maintenir sa démarche dans la durée : le rôle des contextes éducatifs

20 L’observation des parcours de formation dans lesquels s’engagent les retraités est révélatrice d’un même constat, leur importante durée : plus de 10 ans à l’université et parfois plus de 20 ans dans les UTA. Néanmoins, là où l’organisation des curricula universitaires limite le désir de savoir (insatiable) des retraités, les UTA – par le renouvellement continu de l’offre de formation – permettent d’apprendre pour une durée indéterminée. Les cadres éducatifs construisent ainsi un rapport au temps particulier (Bourdieu, Passeron, 1985) qui contribue à modeler les expériences individuelles de formation et de vieillissement.

À l’université : stratégies de maintien, logique de l’effort et enjeux de la durée

21 Pour l’ensemble des retraités rencontrés, l’université est un lieu majeur d’accès à la culture et de « formation des élites », représentée dans bien des discours comme le « temple du savoir ». De ce fait, les aspirations à puiser dans les ressources de ce monde valorisé et valorisant sont très fortes. Or, la structuration des curricula universitaires devient rapidement un frein : leur rigidité et leur durée limitée, selon les diplômes à préparer, supposent de sortir plus ou moins rapidement des filières et limitent ainsi l’appétence pour les savoirs. Ce décalage entre d’un côté des « pratiques sociales vécues qui cherchent à s’épanouir » et de l’autre « des temps institutionnels qui en bloquent l’expression » (Sue, 1991) est une expérience typique du public retraité à l’université traditionnelle. À la différence des jeunes étudiants, les retraités ne cherchent pas à faire valoir leurs acquis pour finaliser le plus rapidement possible leur cursus et s’insérer professionnellement. Leur rapport au travail universitaire se traduit par un « travail pour soi » (Sembel, 2003) où la réussite aux examens est certes importante, car il s’agit pour eux de ne pas perdre la face vis-à-vis de leurs pairs plus jeunes, mais ils ne sont pas soumis à une pression temporelle pour y parvenir. Au contraire, une préparation réussie des examens passera par un effort d’appropriation de l’ensemble des connaissances que suppose l’enseignement suivi. Il s’agit donc pour eux de construire stratégiquement les conditions favorables à une situation de maintien. Trois stratégies (parfois complémentaires) se dessinent plus précisément : le dédoublement des cursus, la multiplication de ces derniers et le changement de statut d’inscription (inscrit aux examens ou auditeurs libres).

22 Dédoubler les cursus est une stratégie qui consiste à passer une licence en 6 ans, un master 1 ou 2 en 2 ans ou 4 ans et une thèse en minimum 6 ans. Il s’agit de « prendre son temps » dans le processus de formation, non seulement pour aller au bout des connaissances à acquérir, mais aussi pour se maintenir dans la dynamique universitaire (qui se situe à distance de la vie de retraité traditionnel) : « Finalement, je crois que si un jour j’ai ma licence et mon master, qu’est-ce que je vais faire ? Alors, faut pas mettre un terme à ce contentement », explique l’un des enquêtés. À plus long terme, il s’agit aussi de réussir ses examens avec des résultats convaincants et non des compensations entre unités d’enseignement qui constitue une tactique courante chez les jeunes étudiants [7] qui tentent une réussite à la marge (Félouzis, 2001). C’est ici que l’engagement rime avec mise en gage de soi : la position dans le cycle de vie oblige les retraités à réussir « haut la main » à la fois vis-à-vis des pairs étudiants et des universitaires (envers qui ils se présentent comme des personnes expérimentées) et vis-à-vis de l’entourage proche, comme en témoigne cette retraitée : « Je suis très sensible au regard des autres et être en échec pour moi c’est horrible […] donc en allant progressivement, au moins, ça me convenait. » L’expérience des retraités est ici très proche de l’analyse que propose A. Barrère sur le rapport des lycéens aux évaluations où « la note, qui valorise ou rabaisse, finit par être une véritable “carte d’identité personnelle”, une partie de la définition de soi » (1997, p. 173).

23 Multiplier les cursus est une stratégie qui suppose d’avoir également une bonne connaissance du monde universitaire, des filières et des statuts. Au fil du parcours, les retraités passent ainsi d’une discipline à une autre et se meuvent dans les filières selon les opportunités, les attentes à l’égard d’une thématique précise ou les besoins liés à un projet de recherche en cours. Les récits qui rendent compte de ces parcours de formation sont particulièrement denses, tant les itinéraires de formation dont ils témoignent sont complexes et non-conventionnels. Pris par « une espèce de virus » pour la formation ou dans « une espèce d’engrenage » dont on ne peut plus s’extraire, car il permet de se complémenter, les retraités deviennent particulièrement créatifs dans la construction de ces parcours originaux qui permettent de durer en formation de très nombreuses années.

24 Dans cette logique, le changement de statut d’inscription est une dernière stratégie qui peut aussi participer d’un allongement de la durée de formation. L’usage du statut d’auditeur libre est ici emblématique selon qu’il soit pris en début de parcours (initiation au monde universitaire), au cours de celui-ci de façon exclusive (ce qui laisse une grande liberté pour se mouvoir dans les enseignements et dépasser le cadre rigide des curricula) ou dans la logique de multiplication des cursus, notamment à l’issue d’une formation diplômante.

25 L’analyse de ces stratégies montre que le maintien de soi dans la formation universitaire permet d’entretenir un rapport positif au vieillissement, car il repousse le plus loin possible l’échéance de l’entrée dans le grand âge. L’expression d’un enquêté « j’apprends donc j’existe », nous semble bien caractériser l’enjeu de ces stratégies de maintien. Il ne s’agit plus d’ailleurs ici de négocier la transition à la retraite, mais plutôt de parvenir à construire un rapport positif au temps qui passe. Vivre la vie des études, c’est éprouver un sentiment d’intemporalité où ils « oublient leur âge ». De ce point de vue, le rapport à la thèse est intéressant à observer, comme en témoigne ce retraité pris dans un dilemme entre poursuivre son projet de recherche et finaliser la thèse : « Si j’attaque la thèse, il va falloir que je la finisse et puis après, une fois que je l’aurai finie, je n’aurai plus qu’à mourir. Tant que je ne la commence pas… comme je sais que je ne la commence pas…, je ne suis pas pressé de mourir. »

26 Mais l’enjeu de la durée n’est pas sans conséquence sur la sociabilité de ces retraités. En effet, se maintenir à l’université suppose de ne jamais véritablement appartenir à une « promotion » d’étudiants (ceux-ci éprouvant la pression temporelle pour réussir leurs diplômes et avancer le plus vite possible), ce qui peut mettre en péril la nécessaire « affiliation » au monde étudiant (Coulon, 1997) pour vivre pleinement la vie des études. Hors cadre universitaire, la logique de l’effort qui anime ces retraités pour réaliser le travail universitaire et réussir les examens induit une prise de distance avec l’entourage amical (composé de retraités qui vivent « traditionnellement » ce temps de l’existence, non soumis aux contraintes universitaires), mais aussi familial. En effet, se maintenir est d’autant plus facile que le retraité vit seul et sans enfants ou petits-enfants, car lorsque le réseau familial est conséquent, la logique de l’effort peu dissoner avec les rôles et les attentes traditionnellement attribués aux retraités, par exemple, le rôle grand-parental.

27 C’est une tout autre expérience qui est vécue dans les UTA, qui se présentent comme des structures qui accompagnent et soutiennent – par la formation – le processus d’avancée en âge.

Dans les UTA : la formation comme « support » face à l’expérience du vieillissement

28 Les UTA se caractérisent par un mode de fonctionnement très souple fondé sur le renouvellement annuel de l’offre de formation. Elles favorisent ainsi institutionnellement, à la différence des universités, le maintien en formation des retraités. Nous pourrions dire que ceux-ci peuvent s’engager de façon illimitée dans ces structures, mais il s’agit en réalité d’une formation à durée « indéterminée », car les modalités du maintien se posent en des termes plus personnels liés aux événements de la biographie, parfois imprévisibles. Ce cadre éducatif souple permet donc d’adapter son parcours de formation pour mieux concilier les temps de la vie quotidienne. Cet attachement pour le cadre souple des UTA peut se concrétiser après plusieurs années de formation universitaire classique placées sous la logique de l’effort (cf. supra) et qui ne sont plus tolérées par le conjoint. Les UTA permettent de mieux gérer l’emploi du temps conjugal, là où le calendrier universitaire vient souvent contrarier les projets conjugaux ou familiaux pour la retraite, comme en témoigne ce retraité : « Ma compagne me dit “tu te calmes un petit peu, parce qu’il faut qu’on s’accorde des loisirs aussi hein !” Bon, jusqu’à maintenant le problème se posait pas vraiment puisqu’elle travaillait la semaine. Maintenant, il faudra un peu plus tenir compte de la vie familiale. » Le rôle grand-parental peut également être contrarié par un surengagement dans l’activité de formation, mais les UTA permettent le plus souvent de concilier sur le long terme vie familiale et vie des études. Dans d’autres cas, la relation conjugale peut être marquée par de vives tensions qui font que le maintien au sein de l’UTA constitue « une part d’échappatoire », un « moment de libération » face au carcan de la situation. Se maintenir est alors un moyen de s’extirper d’un vécu douloureux dans la sphère privée, mais qui doit nécessairement rester ponctuel.

29 Dans une perspective plus globale, nous dirons que les UTA se présentent comme des « supports » permettant de « se tenir face au monde » (Martuccelli, 2002). C’est ce que souligne cette enquêtée lorsqu’elle explique : « J’ai besoin de cette structure, c’est un soutien, c’est une béquille, c’est tout ce que vous voulez, c’est formidable ! J’ai besoin de ça pour m’activer, c’est mon oxygène. » D’autres enquêtés témoignent de leur vécu douloureux, suite à des problèmes de santé qui les ont repliés sur la sphère privée. Décider à un moment donné de se « ré-activer » en faisant le choix de revenir à l’UTA est un moyen de « se battre et de s’en sortir ». Ces structures se présentent donc parfois comme une sorte de « remparts » face aux épreuves de la vie et du vieillissement, que celles-ci se traduisent par des problèmes de santé, l’accompagnement de proches malades, la perte d’un proche ou du conjoint, comme l’illustrent ces extraits d’entretiens : « Ça m’aide beaucoup parce que ça me permet d’oublier, parce que je suis dans les études, donc j’étudie, et pendant ce temps, j’apprends des choses. » ; « Je pense que j’ai réussi à survivre à la perte de mon épouse, presque essentiellement avec le besoin d’apprendre, c’est pour ça que l’UTA, ça représente quelque chose d’important. »

30 Au-delà du caractère éducatif, le rôle social de ces structures est donc important à saisir et il s’observe également dans la création d’un « être ensemble » ou, comme le souligne un responsable de structure, dans « la construction d’une communauté d’esprit ». À la différence des retraités attachés aux universités classiques et qui rejettent les UTA, qui se présentent à leurs yeux comme des « clubs du 3e âge », les retraités qui y participent tendent plus facilement à accepter leur vieillissement, sans pour autant se sentir vieux. De ce point de vue, les UTA et leur public participent d’un certain positionnement personnel vis-à-vis du processus de vieillissement : « C’est triste aussi de vieillir avec les amis parce qu’ils ont des fois plus de soucis que vous. Alors, c’est le fameux “t’as mal où ?”, on se réunit et c’est “qu’est-ce que tu prends comme médicaments ? Moi j’entends plus hein…” puis c’est le tour de tout ça. Ça aussi, j’ai voulu fuir tout ça, et à l’UTA j’aimais bien, ces gens-là ne parlent pas de… j’ai mal ci, j’ai mal là, ça retarde la vieillesse non ? »

31 Par son importante durée, la phase de maintien est le moment où les processus de formation et de vieillissement sont étroitement liés. Si les cadres institutionnels structurent différemment les vécus, il n’empêche que l’enjeu reste le même : apprendre et se former signifie se maintenir en vie et lutter contre la vieillesse et ses effets propres. Pourtant, il est bien un moment où les parcours de formation aboutissent ou se redéfinissent à la baisse pour favoriser l’engagement dans d’autres activités ou, plus simplement, cheminer vers le grand âge.

Vers une sortie du processus de formation

32 Après plusieurs années d’inscription dans une ou plusieurs structures de formation, construisant parfois des parcours assez complexes pour « durer » dans la vie des études ou pour se maintenir dans un cadre institutionnel propice à la création de liens indispensables à une expérience positive du vieillissement, il arrive un moment où les parcours sont réorientés. Bien souvent, le processus de vieillissement devient un frein au maintien de soi en formation, mais il arrive aussi que des parcours de formation à durée « déterminée » soient souhaités afin de poursuivre de nouveaux projets de vie – notamment professionnels – à la retraite.

Formation à durée « déterminée » et nouveaux projets de vie à la retraite

33 L’observation de retraités entretenant un rapport utilitariste à la formation nous a permis de nuancer quelque peu notre réflexion sur les liens entre processus de formation et de vieillissement. Dans ces situations tout à fait originales, mais révélatrices des mutations en cours en matière d’allongement des fins de carrière, le temps de formation ne peut être qu’à durée « déterminée ». Il constitue un sas entre passage à la retraite et nouvelle vie (notamment professionnelle) et recouvre les mêmes enjeux que pour les jeunes étudiants : l’obtention d’un diplôme et de qualifications reconnues permettant de s’investir dans un nouveau domaine. En ce sens, un enquêté qui est passé par un diplôme universitaire de tutorat social explique le rôle de ses études pour travailler dans l’association d’accompagnement des chômeurs à laquelle il appartient : « Je savais qu’au bout des deux ans, j’allais m’arrêter, parce que moi, personnellement, j’avais vraiment besoin de dire “maintenant, je vais travailler”. » Dans ces logiques instrumentalistes, c’est plutôt le maintien en formation qui risque d’être pénalisant : se former prend du temps, un temps précieux compte tenu de la position dans le cycle de vie de ces retraités et qui doit être court pour que la réorientation du parcours soit encore possible et légitime. Nous voyons aussi comment, dans ces situations, le temps de la retraite n’est pas vraiment une période de transition, il est une libération professionnelle qui permet l’engagement en formation, période charnière au cours de laquelle la réorientation du parcours est mise en œuvre. Tout cela induit une profonde redéfinition de ce que signifie « être retraité », comme en témoigne cette enquêtée qui se positionne à distance du statut de retraité : « C’est une période très active. Je n’avais pas du tout envie de m’arrêter de travailler […] Je ne me vois même pas arrêter de travailler à 70 ans. J’aime bien travailler, j’aime bien être active […] Donc je suis retraitée de l’éducation nationale, mais je ne suis pas retraitée par rapport à tout ce monde puisque j’ai une activité professionnelle. » La retraite, loin d’être une période de repli et de retrait, devient une période de re-traitement (Mercier, 2000) de soi, de son existence et de ses compétences. Certains considèrent d’ailleurs qu’entrer en retraite serait synonyme d’entrée dans la vieillesse. Les retraités qui recherchent une formation en vue d’un projet de reconversion sont donc très critiques vis-à-vis de la retraite et investissent la formation pour « bâtir un deuxième projet de vie », comme nous l’explique cette enquêtée : « Je pense que, quand on est en retraite, on est exclu de la société, les gens disent “c’est formidable”, oui, d’accord, mais, en même temps, on est exclu de la vraie vie. Au fond, travailler, c’est exister dans la société. » Nous voyons ici à quel point le temps de la retraite est en train de se transformer [8] et que la question du lien formation/emploi se déplace peu à peu sur l’échelle des âges (Chamahian, Tremblay, 2011).

34 Il existe néanmoins d’autres formes de sorties du processus de formation beaucoup plus étroitement liées au processus de vieillissement, qui devient, à un moment donné, un frein à l’engagement.

La vieillesse comme frein au maintien de soi en formation

35 Lorsque le temps de formation se confond pendant de nombreuses années avec le temps de retraite, il tend à se modifier et à perdre de sa consistance. L’expérience de l’avancée en âge est en parallèle davantage éprouvée. Plus conscientisée, elle conduit vers un nouveau tournant, l’entrée dans le grand âge, et amène les retraités à se déprendre peu à peu de la formation. V. Caradec souligne que « la prise de conscience de sa finitude » est l’un des facteurs déclencheurs du processus de (dé)-prise (2007). Le rapport au temps est alors posé au cœur des discours des retraités rencontrés : « à la radio, ils parlaient des gens qui prenaient leur retraite et qui avaient 60 ans et j’ai dit “Mon Dieu, ça fait 15 ans que j’ai pris ma retraite !” Je ne m’étais pas rendue compte… je pense que ces 15 ans de retraite, je ne les ai pas vus et c’est grâce à l’UTA entre autres, parce que je les ai bien vus les décès autour de moi. », explique une retraitée. En prenant conscience de son âge, son rapport à l’activité de formation se transforme. Tout en étant une activité pivot qui structure son agenda, cette enquêtée s’autorise plus facilement à annuler ou modifier son emploi du temps. Ses problèmes de santé l’amènent également à recentrer son activité au sein de l’UTA en limitant sa participation au seul groupe de recherche. Ce n’est donc plus le processus de formation qui oriente l’engagement des retraités dans cette phase, mais le processus de vieillissement. Il y a ici un renversement de la dynamique où la quête de soi, le sentiment d’inachèvement et la volonté de savoir pour s’épanouir personnellement perdent de leur importance. La stratégie qui se met en place n’est donc plus vraiment celle du maintien que celle de l’adaptation face aux effets propres du vieillissement (Caradec, 2004). Cela se traduit par un effort pour conserver un lien avec la formation, car, pour plusieurs retraités, « le jour où on ne se forme plus on… on… va dans le sommeil ou la léthargie ».

36 Enfin, dans cette période de l’existence qui s’ouvre sur le grand âge, le processus de (dé)prise à l’égard de la formation peut consister en la volonté de se recentrer « sur l’essentiel ». La prise de conscience soudaine de son âge et de sa finitude soumet les retraités à une certaine « urgence du temps » qui nécessite, une fois le sentiment éprouvé de s’être accompli dans une activité (ici la formation), de se recentrer sur d’autres. Il s’agit alors « de ne pas gaspiller le temps » et de se tourner plus concrètement vers la vie familiale, certaines valeurs, le projet de laisser des traces de l’histoire familiale en se consacrant à ses mémoires, ce que J.-C. Kaufmann appelle un besoin d’extériorisation qui participe au « mouvement de fondation de soi » (2007). Il est bien évident que la formation est là encore un « support » qui permet de mener à bien certains de ces projets (écrire ses mémoires, construire une généalogie, retracer l’histoire familiale, transmettre des repères aux enfants et petits-enfants et, parfois, partager une langue apprise sur le tard).

Conclusion

37 À l’heure où les temporalités sociales se brouillent et se complexifient, il est possible d’observer des phénomènes sociaux émergents, profondément emblématiques des mutations en cours. L’analyse des démarches de formation dans le temps de retraite et tout au long de l’avancée en âge en fait partie.

38 La lecture sociologique compréhensive présentée dans cet article permet de constater que, dès la transition de la vie professionnelle à la retraite, et pendant de nombreuses années, les processus de formation et de vieillissement évoluent de concert, les cadres institutionnels d’inscription participant pleinement à dessiner les contours de ces expériences. C’est d’ailleurs parce que ces processus se vivent sur le long terme que cette analyse a pu être menée, révélant que le processus d’engagement en formation constitue pour les retraités à la fois une aventure intellectuelle et personnelle, en ce qu’il implique un travail constant de redéfinition de soi, vis-à-vis de soi-même et d’autrui, mais aussi une certaine « restructuration existentielle » (Fond-Harmant, 1996). Il reste que, dans la grande majorité des cas, ces démarches d’engagement en formation ne viennent pas fondamentalement bouleverser l’organisation ternaire des parcours. L’activité de formation participe en effet d’une conception traditionnelle de la vie de retraite comme un temps tourné vers soi et vers des activités qui font sens en dehors de la vie professionnelle. Néanmoins, la recherche montre que les rapports à la formation ne sont pas homogènes et qu’il est possible aujourd’hui de se former à la retraite en poursuivant un but qui dépasse la seule intention culturelle. Se former pour se reconvertir à la retraite constitue l’un des résultats majeurs de cette étude. Ce type de rapport illustre les enjeux en train de se construire dans cette période de l’existence qui devient un temps possible de retour à la vie professionnelle, où la formation peut de nouveau jouer un rôle déterminant. Il fragilise ainsi le modèle de la tripartition des parcours, révélant des parcours réversibles tout au long de l’avancée en âge. Le temps de la retraite ne serait plus un temps cloisonné dans le « hors travail », mais peut-être une période de préparation à une nouvelle vie professionnelle.

39 Cette recherche révèle ainsi à quel point les injonctions modernes au « vieillir actif » prennent des colorations différenciées prises en tension entre logiques culturelles et citoyennes et logiques fonctionnelles et économiques : certes, l’ensemble de ces retraités cherche à vivre la retraite de façon active, dynamique et intelligente avant l’entrée dans le grand âge, mais pour d’autres la notion d’activité se décline dans un sens plus strict de « productivité ». Dans ces cas, la formation à la retraite devient un vecteur favorisant le maintien de l’employabilité aux âges les plus élevés, ce qui permet de rendre convergents les effets des politiques valorisant le vieillissement actif en lien avec la notion de formation tout au long de la vie (Chamahian, 2012).

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Date de mise en ligne : 19/09/2013

https://doi.org/10.3917/rs.065.0081

Notes

  • [1]
    Ces deux enquêtes sont complémentaires aux enquêtes Emploi conduites par l’Insee, en collaboration notamment avec le Cereq. La première porte sur un échantillon de 28 700 personnes âgées entre 15 et 65 ans et ayant terminé leur formation initiale ; la seconde porte sur un échantillon de 16 500 personnes âgées entre 15 et 65 ans et sorties du système scolaire.
  • [2]
    S’il n’est pas toujours aisé de repérer quantitativement les retraités qui fréquentent le monde universitaire traditionnel, précisons que le mouvement de constitution des UTA en France est particulièrement complexe. De ce point de vue, une recherche mériterait d’être conduite pour déterminer le plus précisément possible le nombre de retraités participant aux activités des UTA quels que soient leur statut juridique (universitaire, association, service municipal) et leurs liens formels avec le monde universitaire.
  • [3]
    Il s’agit ici de souligner que les études deviennent quasiment une activité exclusive qui vient remplacer le temps précédemment consacré à l’activité professionnelle. En ce sens, la vie de retraite, dans ses dimensions familiales et sociales, s’organise alors autour des études devenues une activité pivot pour le retraité.
  • [4]
    Lors du travail de terrain, il était encore possible de rencontrer des travailleurs en fin de carrière concernés par le dispositif de dispense de recherche d’emploi (DRE). La suppression de ce dernier a néanmoins été votée en 2008 et est appliquée depuis le 1er janvier 2012.
  • [5]
    Seule une structure, de type universitaire, observée au moment de l’enquête, s’efforçait de mettre en place des formations diplômantes à destination du public retraité.
  • [6]
    Diplôme universitaire de tutorat social proposé en 2004 par une UTA possédant le statut universitaire.
  • [7]
    G. Felouzis (2001) observe différentes tactiques mises en œuvre chez les jeunes étudiants qui s’opposent aux stratégies investies par les retraités rencontrés, telles que la « tactique de l’élection » (se focaliser sur certains modules et pas d’autres) ou la « tactique du sacrifice » qui se traduit par une répartition de l’effort entre deux sessions d’examens.
  • [8]
    Une recherche plus récente sur les démarches de retour à l’emploi à l’heure de la retraite au Québec permet de préciser ces mutations (Chamahian, 2012).

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