Notes
-
[1]
Les termes bacheliers, élèves, étudiants… sont pris au sens générique et ont à la fois valeur de féminin et masculin dans cet article.
-
[2]
94 % des bacheliers généraux et 80 % des bacheliers technologiques s’inscrivent dans les formations de l’enseignement supérieur en 2016 (ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche-Direction de l’évaluation et de la prospective. 2018. L’état de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, n° 11, p. 31).
-
[3]
Jellab, Aziz. 2009. Sociologie du lycée professionnel : L’expérience des élèves et des enseignants dans une institution en mutation, Toulouse, Presses universitaires du Mirail ; Palheta, Ugo. 2012. La domination scolaire. Sociologie de l’enseignement professionnel et de son public, Paris, PUF.
-
[4]
Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, direction de l’évaluation et de la prospective, op. cit. p. 30.
-
[5]
Felouzis, Georges. 2001. La condition étudiante, Paris, PUF ; Beaud, Stéphane ; Pialoux, Michel. 2001. « Les bacs pro à l’université. Récit d’une impasse », Revue française de pédagogie, n° 136, p. 87-95 ; Aschieri, Gérard. 2013. « Les inégalités dans l’enseignement supérieur » in Penser et combattre les inégalités. Pour un « faire société » plus égalitaire, Le français aujourd’hui, vol. 4, n° 183, p. 51-59 ; Belghith, Feres. 2016. « Des étudiants atypiques ? Les bacheliers technologiques et professionnels dans l’enseignement supérieur », in Giret, Jean-François ; Van De Velde, Cécile ; Verley, Élise. Les vies étudiantes. Tendances et inégalités, Paris, La Documentation française, p. 249-262.
-
[6]
Maetz, Isabelle. 2016. « Parcours et réussite aux diplômes universitaires : les indicateurs de la session 2015 », Note Flash, n° 15, novembre, ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
-
[7]
Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP). 2014. Repères et références statistiques, ministère de l’Éducation nationale, p. 177.
-
[8]
Cf. Association nationale des classes préparatoires publiques aux écoles supérieures d’art, site www.appea.fr.
-
[9]
En 2016, 41 % d’une génération obtient le baccalauréat général, 23 % le baccalauréat professionnel, qui se positionne ainsi devant le baccalauréat technologique (16 %). Rappelons que ce baccalauréat professionnel ne regroupait que 14 % d’une génération en 2010, avant la réforme de la voie professionnelle qui a aligné le cursus du baccalauréat professionnel en trois ans à partir de 2009 (DEPP. 2017. Repères et références statistiques, p. 229).
-
[10]
Beaud, Stéphane. 2002. 80 % au bac et après ? Les enfants de la démocratisation scolaire, Paris, La Découverte.
-
[11]
Jellab, Azis. 2015. « Apprendre un métier ou poursuivre ses études ? Les élèves de lycée professionnel face à la réforme du bac pro trois ans », Formation Emploi, n° 131, p. 79-99.
-
[12]
Érard, Carine ; Guégnard, Christine ; Murdoch, Jake. 2016. « Étudiants en Staps, les territoires de la réussite » in Landrier, Séverine ; Cordazzo, Philippe ; Guégnard, Christine (dir.), Études, galères et réussites. Conditions de vie et parcours à l’Université, Injep, Paris, La Documentation française, p. 43-62.
-
[13]
Danner, Magali ; Guégnard, Christine. 2015. « Des bacheliers professionnels sur le pont des Arts, du rêve à la réalité ? », Formation Emploi, n° 131, p. 141-162.
-
[14]
Bourdieu, Pierre. 1964. Les héritiers. Les étudiants et la culture, Paris, Minuit, p. 42.
-
[15]
Durkheim, Émile. 2004 [1893]. De la division du travail social, Paris, PUF.
-
[16]
Dans notre étude à l’université de Bourgogne, la filière Staps était accessible de droit après obtention du baccalauréat et ne faisait l’objet ni d’une sélection à l’entrée, ni d’une limitation de la capacité d’accueil, ni d’un tirage au sort.
-
[17]
Bourdieu, Pierre. 1994. Raisons pratiques, Paris, Seuil, p. 151.
-
[18]
Giret, Émilie ; Michot, Thierry. 2006. « Les étudiants en Staps face à leurs employeurs », Esprit critique, vol. 8, n° 1, p. 1-17.
-
[19]
DEPP. 2014. op. cit., p. 195.
-
[20]
Dutercq, Yves ; Masy, James. 2016. Comment l’école amplifie les inégalités sociales et migratoires ? Origine sociale des étudiants de CPGE : quelles évolutions ?, université de Nantes, CNESCO.
-
[21]
Danner, Magali ; Érard, Carine ; Guégnard, Christine. 2016. « Probabilités d’orientation déjouées… Des bacheliers professionnels en Staps et en classe préparatoire aux écoles supérieures d’art », Les sciences de l’éducation – Pour l’ère nouvelle, vol. 49, n° 3, p. 19-48.
-
[22]
Les frais d’inscription varient selon les écoles publiques de 200 à 1 100 €, alors que le montant d’inscription à l’université en licence, fixé au plan national, est de moins de 200 € au moment de notre enquête.
-
[23]
Costey, Paul. 2005. « L’illusio chez Pierre Bourdieu. Les (més)usages d’une notion et son application au cas des universitaires », Tracés, n° 8, p. 13-27. L’auteur définit les « natifs » du champ, terme qu’il emprunte à Pierre Bourdieu, comme « ceux qui possèdent à l’état pratique les compétences requises pour s’y épanouir, car ils sont les produits de ce même univers », p. 13.
-
[24]
Danner M. ; Guégnard, C., op. cit.
-
[25]
Bourdieu, Pierre. 2002 [1984]. Questions de sociologie, Paris, Minuit, p. 173-195.
-
[26]
Mennesson, Christine ; Julhe, Samuel. 2012. « L’art (tout) contre le sport ? La socialisation culturelle des enfants de milieux favorisés », Politix, n° 99, p. 109-128.
-
[27]
Ministère des Sports et ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative. 2010. « Les premiers résultats de l’enquête 2010 sur les pratiques physiques et sportives en France », Stat-Info, n° 10, décembre.
-
[28]
Bourdieu, P. 1994. op. cit., p. 116, 160-161.
-
[29]
Engagés dans des études où, a priori, leurs pratiques sportives et artistiques peuvent constituer des avantages susceptibles de se convertir en bénéfices scolaires, les bacheliers professionnels continuent de suivre leur « libido sociale », terme emprunté à Pierre Bourdieu, ibid., p. 160.
-
[30]
Ibid., p. 156.
-
[31]
Ibid., p. 150.
-
[32]
Jaoul-Grammare, Magali ; Nakhili, Nadia. 2010. « Quels facteurs influencent les poursuites d’études dans l’enseignement supérieur ? », Net.Doc, n° 68, Céreq, p. 19.
-
[33]
Veblen, Thorstein. 1970 [1899]. The Theory of the Leisure Class – An Economic Study of Institutions. [Traduction française : Théorie de la classe de loisir], Paris, Gallimard ; Brohm, Jean-Marie. 1992 [1976]. Sociologie politique du sport, Nancy, PUN ; Liot, Françoise. 1999. « L’école des Beaux-Arts face aux politiques de soutien à la création », Sociologie du travail, n° 41, p. 411-429 ; Darriulat, Jacques. 2007. « Introduction à la philosophie esthétique : de l’Académie au Salon », Actes de conférences, in Pommier, Édouard. Comment l’art devient l’Art dans l’Italie de la Renaissance, Paris, Gallimard ; Vandenbunder, Jérémie. 2014. La pédagogie de la création : une sociologie de l’enseignement artistique, thèse, Versailles/Saint-Quentin-en-Yvelines.
-
[34]
Bourdieu P., 2002 [1984]., op. cit.
-
[35]
Laguillaumie, Pierre. 1968. « Pour une critique fondamentale du sport », Partisan, n° 43, « Sport, culture et répressions », Paris, Maspero, p. 27-44 ; Bourdieu, Pierre. 2003 [1979]. La distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Minuit.
-
[36]
Pociello, Christian. 1987. Sports et société. Approche socio-culturelle des pratiques, Paris, Vigot, coll. « Sport + enseignement », p. 33-56.
-
[37]
Sofio, Séverine. 2007. « La vocation comme subversion : artistes femmes et anti-académisme dans la France révolutionnaire », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, p. 34-49.
-
[38]
Sapiro, Gisèle. 2007. « La vocation artistique entre don et don de soi », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, 4-11 ; Élias, Norbert. 1991 [1986], Mozart, sociologie d’un génie, Paris, Seuil.
-
[39]
Bourdieu, Pierre. 2007. « Entretien, 1991 », in Dollinger, Dominique, Penseurs de notre temps. Perspectives philosophiques, CNDP.
-
[40]
Oraison, Marc. 1970. Vocation, phénomène humain, Paris, Desclée de Brouwer.
-
[41]
On peut citer notamment dans le champ artistique les travaux de : Elias N., op. cit. ; Blacking, John. 1980. Le sens musical, Paris, Minuit ; Augustins, Georges. 1991. « Le don chez les musiciens », in Segalen, Martine. Jeux de famille, Paris, CNRS, p. 99-113 ; Menger, Pierre-Michel. 1997. La profession de comédien, ministère de la Culture et de la Communication, département des études et de la prospective ; Brenot, Philippe. 1997. Le génie et la folie, en peinture, musique et littérature, Paris, Odile Jacob ; Coulangeon, Philippe. 2004. Les musiciens interprètes en France, Paris, La Documentation française ; Liot, Françoise. 2004. Le métier d’artiste, Paris, L’Harmattan ; Sorignet, P.-E., op. cit. ; Morinière, Thomas. 2007. « Les petites voies de la chanson de variétés. La révélation du charisme du chant et la démocratisation de la vocation d’interprète », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, p. 68-81 ; Ravet, Hyacinthe. 2007. « Devenir clarinettiste. Carrières féminines en milieu masculin », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 3, p. 50-67 ; Sapiro G., op. cit. On peut citer notamment dans le champ sportif les travaux de : Fleuriel, Sébastien. 2004. Le sport de haut niveau en France : sociologie d’une catégorie de pensée, Grenoble, PUG ; Forté, Lucie ; Bertrand, Julien. 2011. « La vocation au croisement des espaces de socialisation. Étude sociologique de la formation des footballeurs professionnels », Sociétés contemporaines, vol. 2, n° 82, p. 85-106 ; Mennesson, Christine. 2012. « Réussite athlétique et héritage sportif », SociologieS, Théories et recherches, [en ligne : http://sociologies.revues.org/4082].
-
[42]
Schotté M., 2002. op. cit. ; Lefèvre, Nicolas. 2014. « Transmission et apprentissage du métier de coureur cycliste », SociologieS, Dossiers, La transmission du métier, [en ligne : https://sociologies.revues.org/4551].
-
[43]
Dubet, François. 1994. « Dimensions et figures de l’expérience étudiante dans l’université de masse », Revue française de sociologie, vol. 35, n° 4, Monde étudiant et monde scolaire, p. 511-532.
-
[44]
Les bacheliers généraux n’ont pas tous évoqué cette logique, alors qu’objectivement ils pouvaient le faire puisqu’ils pratiquent tous au moins une activité sportive extra-scolaire. D’autant plus que la commande institutionnelle les encourageait à le faire. Sur le site Admission post-bac de l’université de Bourgogne, il était explicitement demandé, en effet, aux futurs bacheliers : « Pouvez-vous préciser brièvement vos motivations pour intégrer cette formation et indiquer les métiers que vous aimeriez exercer à l’issue de vos études. »
-
[45]
Les propos des jeunes sont reproduits sans correction orthographique et les prénoms ont été changés pour garder l’anonymat.
-
[46]
Becker, Howard Saul. 1985 [traduction française Briand, Jean-Pierre ; Chapoulie, Jean-Marc]. Outsiders, Études de sociologie de la déviance, Paris, Métailié.
-
[47]
Weber, Max. 1995 [1922]. Économie et société, Paris, Plon, p. 55-61. La vocation est une notion qui s’est affirmée vers le xviiie siècle avec force dans la théologie protestante (Weber, 2000) et a peu à peu investi les sphères intellectuelles dont le milieu artistique (Judith Schlanger, 1997 ; Séverine Sofio, 2007). En élevant la pratique artistique des arts serviles aux arts libéraux, l’artiste s’est trouvé aussi doté de cet idéal vocationnel. Ainsi, les artistes représentent « une élite acceptable en régime démocratique » par le don qu’ils héritent à la naissance et le mérite qu’ils acquièrent par un travail exigeant (Nathalie Heinich, 2005). Parallèle qu’il est possible de faire avec le sport, notamment dans la représentation des jeux olympiques créés au début du xixe siècle. Weber, Max. 2000 [1905]. L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Flammarion ; Sofio S., op. cit. ; Schlanger, Judith. 1997. La vocation, Paris, Seuil ; Heinich, Nathalie. 2005. L’Élite artiste. Excellence et singularité en régime démocratique, Paris, Gallimard.
-
[48]
Schlanger J., op. cit., p. 56.
-
[49]
Godbout, Jacques. 2004. « Les conditions sociales de la création en art et en sciences », Revue du MAUSS, n° 24, p. 411-427 ; Irigaray Adenot, Pauline. 2007. Le désenchantement des instrumentistes d’orchestre symphonique en France au début du xxe siècle. Histoire d’une domination, thèse, université de Paris-Sorbonne 1.
-
[50]
Sorignet, Pierre-Emmanuel. 2006. « Danser au-delà de la douleur », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 163, p. 40-61.
-
[51]
Pociello C., op. cit., p. 172-237.
-
[52]
Action réfléchie soumise à des impératifs éthiques envers lesquels l’individu se sent engagé, cf. Weber, Max. 1964 [1905]. Éthique protestante et esprit du capitalisme, Paris, Plon.
-
[53]
Chapoulie, Jean-Michel. 1973. « Sur l’analyse sociologique des groupes professionnels », Revue française de sociologie, n° 14, p. 86-114.
-
[54]
Veblen T., op. cit. ; Bourdieu P., 2002 [1984], op. cit.
-
[55]
Octobre, Sylvie. 2009. « Pratiques culturelles chez les jeunes et institutions de transmission : un choc de cultures ? », Culture prospective, n° 1, p. 1-8.
-
[56]
Forté, Lucie ; Mennesson, Christine. 2012. « Réussite athlétique et héritage sportif », SociologieS, Théories et recherches.
-
[57]
Veblen T., op. cit.
-
[58]
Schlanger J., op. cit., p. 13
-
[59]
Schotté, Manuel. 2002. « Réussite sportive et idéologie du don. Les déterminants sociaux de la “domination” des coureurs marocains dans l’athlétisme français (1980-2000) », Staps, vol. 1, n° 57, p. 21-37.
-
[60]
Le concept wébérien de « social closure » décrit le processus par lequel un groupe préserve ses ressources et avantages en limitant l’accès des autres aux ressources et récompenses en usant de stratégies sociales (comme une sélection par le niveau de connaissance, les pratiques, les affiliations …). Weber Max. 1995 [1922]. op. cit.
-
[61]
Moulin, Raymonde. 1992. L’artiste, l’institution et le marché, Paris, Flammarion ; Lefèvre, N. 2014. op. cit.
-
[62]
Menger, Pierre-Michel. 2002. Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme, Paris, Seuil, coll. « La République des idées ».
-
[63]
Schotté, M. 2002. op. cit. ; Fleuriel S., op. cit. ; Lefèvre, Nicolas. 2006. « Qualifications, compétences et accès au marché du sport professionnel », in Dire le monde social, 2e Congrès de l’Association française de sociologie, 5-8 septembre 2006, Bordeaux ; Buisine, Sébastien. 2006. « Le jeu des cyclistes face à leurs contrats professionnels », 2e Congrès de l’Association française de sociologie, 5-8 septembre 2006, Bordeaux.
-
[64]
Elias, N., op. cit. ; Becker, H., op. cit. ; Paradeise, Catherine. 1998. Les comédiens. Professions et marchés du travail, Paris, PUF.
-
[65]
Becker, Howard Saul. 1988. Les mondes de l’art, Paris, Flammarion ; Pociello, C., op. cit., p. 9-29.
-
[66]
Chevalier, Vérène. 1998. « Pratiques culturelles et carrières d’amateurs : les cas des parcours des cavaliers dans les clubs d’équitation », Sociétés contemporaines, n° 29, p. 27-41 ; Mennesson, Christine. 2004. « Être une femme dans un sport « masculin ». Modes de socialisation et construction des dispositions sexuées », Sociétés contemporaines, n° 55, p. 69-90 ; Louveau, Catherine. 2006. « Inégalité sur la ligne de départ : femmes, origines sociales et conquête du sport », Clio, n° 23, p. 119-143.
-
[67]
Actuellement, les formations artistiques les accueillent massivement dès le secondaire avec un taux de féminisation qui flirte avec les 60 % jusque dans le supérieur. Cf. Lutinier, Bruno ; Dietsch, Bruno ; Sotto, Marie-Françoise. 2011. « Formations artistiques, culturelles et en communication en 2009 : 155 000 étudiants dans des filières très diversifiées », Culture chiffres, département des études de la prospective et des statistiques.
-
[68]
Gouyon, Marie ; Patureau, Frédérique ; Volat, Gwendoline. 2016. « La lente féminisation des professions culturelles ». Culture Études, département des études de la prospective et des statistiques.
-
[69]
Danner, Magali. 2012. « L’auto-sélection des femmes dans les carrières artistiques » in Mélody, Jan-Ré, Créations : le genre à l’œuvre, vol. 2, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques sociales ».
-
[70]
Lamoureux, Eve. 2004. « La question du genre dans les arts visuels : les femmes artistes mobilisées dans le féminisme au Québec ». Actes de colloque, 26 et 27 novembre, Genre et militantisme, Lausanne.
-
[71]
Quinby, Diana. 2003. Le collectif Femmes/Art à Paris dans les années 1970 : une contribution à l’étude du mouvement des femmes dans l’art, thèse, université de Paris-1, Panthéon-Sorbonne.
-
[72]
Pasquier, Dominique. 1983. « Carrières de femmes : l’art et la manière », Sociologie du travail, n° 4, p. 418-431.
-
[73]
Nochlin, Linda. 1994. Why Have There Been No Great Women Artists, Prentice Hall, United-States, Englewood Cliffs, NJ (Writings about art) ; Naudier, Delphine ; Rollet, Brigitte. 2007. Genre et légitimité culturelle. Quelle reconnaissance pour les femmes ?, Paris, L’Harmattan.
-
[74]
Louveau, Catherine. 1987. « La forme, pas les formes ! », in Pociello, C., op. cit., p. 303-318 ; Mennesson, Christine. 2007. « Les sportives professionnelles : travail du corps et division sexuée du travail », Cahiers du genre, n° 42, p. 19-41 ; Louveau, Catherine. 2007. « Le corps sportif : un capital rentable pour tous ? », Actuel Marx, n° 41, p. 55-70.
-
[75]
Buscatto, Marie. 2000. « Chanteuse de jazz n’est point un métier d’homme. L’accord imparfait entre voix et instrument », Revue française de sociologie, n° 44, p. 35-62 ; Sorignet, Pierre-Emmanuel. 2004. « Un processus de recrutement sur un marché du travail artistique : le cas de l’audition en danse contemporaine », Genèses, n° 57, p. 64-88.
-
[76]
Bourdieu, Pierre. 1998. La domination masculine, Paris, Seuil.
-
[77]
Schotté, Manuel. 2013. « Le don, le génie et le talent. Critique de l’approche de Pierre-Michel Menger », Genèses, vol. 4, n° 93, p. 144-164.
-
[78]
Bourdieu, P., 1994, op. cit., p. 151.
-
[79]
Weber, M., 1995 [1922], op. cit., p. 285.
-
[80]
En première année de Staps ou en classe préparatoire entrent ainsi des bacheliers ayant suivi un cursus de boulanger-pâtissier, vente, sécurité prévention, géomètre topographe, électrotechnique, comptabilité, bâtiment…
-
[81]
Nécessairement plus longue que dans l’enseignement général jusqu’à la réforme du baccalauréat professionnel en 2009.
-
[82]
Bautier, Elisabeth ; Rochex, Jean-Yves. 1998. L’expérience scolaire des nouveaux lycéens. Démocratisation ou massification ?, Paris, Armand Colin.
-
[83]
Office national de l’information sur les enseignements et les professions. 2014. Fiche « Après un bac pro », p. 2.
-
[84]
Onze jeunes ne sont pas passés par cette procédure suite à une inscription tardive ou une réorientation, un redoublement.
-
[85]
Jellab Aziz. 2015. op. cit.
-
[86]
Bernard, Pierre-Yves ; Troger, Vincent. 2012. « La réforme du baccalauréat professionnel en trois ans ou l’appropriation d’une politique éducative par les familles populaires », Éducation et sociétés, n° 30, p. 131-143.
-
[87]
Jellab, Aziz. 2015. op. cit.
-
[88]
Bernard, Pierre-Yves ; Troger, Vincent. 2015. « Les lycéens professionnels et la réforme du bac pro en trois ans : nouveaux contextes, nouveaux parcours », Formation Emploi, n° 131, p. 23-40, p. 35.
-
[89]
Jellab, Aziz. 2015. op. cit.
-
[90]
Gambetta, Diego. 1996 [1987]. Were They Pushed or Did They Jump? Individual Decision Mechanisms in Education, Cambridge, Cambridge University Press paperback edition by Westview Press.
-
[91]
Ibid., p. 186-187.
-
[92]
Dubet, F., op. cit.
-
[93]
Parlebas, Pierre. 1986. Éléments de sociologie du sport, Paris, PUF ; Dubet, François. 1994. Sociologie de l’expérience, Paris, Seuil.
-
[94]
Touraine, Alain. 1995. « Introduction », in Dubet, François ; Wievorka, Michel (dir.). Penser le sujet. Autour d’Alain Touraine, Actes du colloque de Cerisy, Paris, Fayard. p. 29.
-
[95]
Bourdieu, Pierre. 1980. Le sens pratique, Paris, Minuit. p. 90.
-
[96]
Schehr, Sébastien. 2007. « Ostentation et refus du travail chez Veblen : le cas des jeunes chômeurs et de la spécificité militaire », Revue Interventions économiques [en ligne], 36, 2007, mis en ligne le 1er octobre 2007, consulté le 1er octobre 2016. URL : http://interventionseconomiques.revues.org/543
-
[97]
Palheta, Ugo. 2011. « Enseignement professionnel et classes populaires : comment s’orientent les élèves orientés », Revue française de pédagogie, n° 175, p 59-72, p 69.
-
[98]
Au sens de Thorstein, Veblen, op. cit.
-
[99]
Érard, Carine ; Guégnard, Christine. 2017. « Ombres et lumières à propos des parcours d’insertion des jeunes de la filière Staps », Échanges, 5, Céreq, p. 367-384.
-
[100]
Stebbins, Robert. 1992. Amateurs, professionals, and serious leisure, Montréal, Mc Gill-Queen’s University Press.
-
[101]
Hughes, Everett Cherrington. 1971. « Professional and Career problems of sociology », The Sociological Eye, Selected papers, Chicago and New-York, Aldine-Atheton, p. 464-472.
-
[102]
Goffman, Erving. 1975 [1963]. Stigmate. Les usages sociaux des handicaps, Paris, Minuit, coll. « Le sens commun ».
1La quasi-totalité des bacheliers [1] généraux et les trois quarts des bacheliers technologiques accèdent à l’enseignement supérieur [2]. La poursuite d’études des bacheliers professionnels, en revanche, ne concerne qu’une minorité (30 % hors apprentissage en 2016). Certes, la finalité première de cette formation est de préparer à une insertion sur le marché du travail, mais leur rapport distancié aux études supérieures s’explique aussi par les difficultés rencontrées dans leur scolarité. Ils sont souvent orientés pour cette raison vers l’enseignement secondaire professionnel, et cette expérience s’est accompagnée parfois d’un sentiment de relégation sociale, la voie professionnelle accueillant plus souvent des élèves de milieu populaire [3]. Peu motivés dès lors pour s’engager envers une école qui ne les a pas valorisés, ces jeunes n’ont pas toujours investi les savoirs académiques ou adopté les comportements scolaires attendus pour envisager une poursuite d’études.
2Pour le tiers des bacheliers professionnels qui s’aventurent néanmoins dans l’enseignement supérieur, le choix se porte traditionnellement sur les formations courtes préparant au brevet de technicien supérieur (BTS). Une faible proportion s’engage aussi dans des filières impliquant de longues études, notamment à l’université (8 %) [4], mais cette trajectoire atypique relève plus souvent d’un choix par défaut [5] et s’inscrit, de ce point de vue, dans le prolongement d’une orientation plutôt contrainte vers l’enseignement secondaire professionnel. Leur probabilité d’obtenir un diplôme est mince, puisque seuls 6 % d’entre eux valideront une licence en trois ou quatre ans [6]. Ces statistiques remettent en question la valeur réelle de leur baccalauréat, premier titre universitaire, et interrogent plus profondément notre société sur le droit légitime accordé aux « relégués du secondaire » de se réapproprier leur histoire pour décider de leur trajectoire scolaire.
3Ce tableau pessimiste peut cependant être réinterrogé à la lumière de certains parcours du supérieur long qui sont adossés à un champ professionnel. Par l’importance accordée aux enseignements appliqués ou pratiques, ils instaurent une continuité avec l’enseignement secondaire professionnel à laquelle ces jeunes peuvent être sensibles. Ces filières peuvent aussi retenir leur attention par leur ouverture sur des enseignements qui, dans le secondaire, ont peu participé aux processus de sélection scolaire (sport, musique, dessin, art…), et leur ont laissé un espace dans l’institution pour se valoriser socialement.
4Cette recherche exploratoire s’intéresse à l’enjeu que représente la poursuite d’études pour ces jeunes à travers une réflexion portant sur deux de ces filières : la première année des Sciences et techniques des activités physiques et sportives (Staps) et la classe préparatoire publique aux écoles supérieures d’art. Ces deux filières ont connu une élévation forte des demandes d’inscription ces dernières années. Alors que les effectifs des nouveaux entrants augmentaient de 5 % pour l’année 2013 dans les universités françaises, les Staps connaissaient une croissance de 15 % [7]. De même, si les classes préparatoires d’art se sont multipliées davantage dans le secteur privé, l’offre publique de formation est passée de 14 à 18 établissements en l’espace de deux ans [8]. Dans ces deux filières s’adressant à un public traditionnellement d’origine scolaire composite, l’augmentation des effectifs s’est traduite par une présence plus manifeste des bacheliers professionnels dont le diplôme occupe désormais la seconde place dans la trilogie des baccalauréats [9].
5Malgré une histoire scolaire différente, les bacheliers généraux, technologiques et professionnels qui entrent dans ces cursus ont pour caractéristique d’avoir la plupart du temps un projet d’études en lien avec un engagement effectif, souvent précoce, dans la pratique sportive ou artistique (loisirs, options, expériences professionnelles, stages…). Adossées à un champ professionnel où l’idéologie de la vocation reste prégnante, ces études laissent entrevoir la possibilité de convertir cet engagement en avantage scolaire. Pour les bacheliers professionnels cependant, cette espérance subjective se heurte à leur chance objective de valider un diplôme. La proximité avec les savoirs théoriques ou issus de la recherche, propre aux cursus longs du supérieur, s’ajuste mal avec leur formation secondaire. Dans cette tension entre espoir et réalité, la problématique de cette recherche est de s’interroger sur la capacité des bacheliers professionnels à donner du sens à leur choix d’études, alors même qu’une analyse coût-bénéfice-risque aurait dû les éloigner d’une telle orientation.
6Afin de répondre à cette problématique, nous formulons l’hypothèse que, pour ces jeunes orientés souvent par défaut vers l’enseignement professionnel, l’enjeu de ces études supérieures n’est peut-être pas tant la réussite au diplôme que la possibilité de se (re)construire une trajectoire positive. Il s’agirait moins « d’une revanche sur le système scolaire et plus particulièrement sur l’orientation subie [10] » que d’une « opportunité de faire valoir leur réussite [11] ». En effet, confrontés dans le secondaire à une sélection sociale dont ils continueront de faire l’objet au cours de leurs études supérieures, ces jeunes peuvent s’être mobilisés sur des projets plus immédiats, comme se valoriser à travers des compétences jusque-là peu reconnues par l’école, ou réussir à établir une cohérence entre des aspirations personnelles, des pratiques de loisirs et un projet professionnel.
7Explorer cette hypothèse suppose de s’intéresser aux motivations des jeunes à entreprendre ces études. À cette fin, les résultats de deux recherches conduites en 2013 ont été réexploités. Ces enquêtes, initialement indépendantes l’une de l’autre, ont été réalisées à partir de supports différents. La première recherche auprès des 468 étudiants de première année de Staps inscrits à l’université de Bourgogne [12] s’intéresse aux déclarations faites au moment de l’inscription sur le portail Admission post-bac (APB) et aux réponses à un questionnaire distribué lors du premier travail dirigé de l’unité de valeur obligatoire « Accompagnement du projet professionnel ». La seconde étude concernant les 323 élèves des 16 classes préparatoires publiques aux écoles supérieures d’art réparties sur l’ensemble du territoire [13] s’est appuyée sur un questionnaire anonyme distribué lors d’un cours commun. Au niveau des inscrits, 32 bacheliers professionnels sont présents en Staps, représentant 7 % des inscrits, aux côtés d’une population composite, mais à dominante scientifique (40 %) et masculine (72 %). Tandis qu’en classe préparatoire, 19 bacheliers professionnels (6 % des inscrits) côtoient des jeunes aux profils variés à dominante littéraire (46 %) et féminine (65 %). Le faible nombre de bacheliers professionnels présents dans ces deux enquêtes est une limite inhérente à toute recherche portant sur les trajectoires rares ou les « destins d’exception [14] ». Cette contrainte, associée au cadre méthodologique propre à chaque enquête, donne nécessairement à cette réflexion un caractère davantage exploratoire que démonstratif.
8L’objet de la première partie de l’article est de s’appuyer sur les apports de la sociologie pour démontrer que l’élitisme social dans les domaines artistique et sportif ne s’accorde pas avec le destin de ces bacheliers professionnels. Cette vision fonctionnaliste durkheimienne qui donne à chacun la place qui devrait être la sienne dans la division sociale du travail [15] n’explique cependant pas pourquoi certains bacheliers professionnels font figure d’exception.
9Aussi, la deuxième partie explore l’importance du registre vocationnel pour expliquer ces trajectoires atypiques de bacheliers professionnels. Or, l’idéologie de la vocation, particulièrement active dans le champ sportif et artistique peut s’analyser comme un construit social qui exerce, au niveau de l’enseignement supérieur, une violence symbolique à l’encontre des bacheliers professionnels. En effet, investis dans leurs pratiques et portés par un discours vocationnel comme la plupart des jeunes qui choisissent des études adossées à ces champs, ils enregistrent cependant les probabilités les plus faibles d’y réussir.
10Néanmoins, la dernière partie invite à dépasser l’idée que ces bacheliers seraient les victimes d’une mystification sociale. En Staps, l’institution informe, en effet, ces jeunes des risques pris dans les études compte tenu de leur parcours antérieur [16]. Dès lors, leur persévérance pour s’inscrire dans ce cursus pourrait être l’expression d’un refus d’assignation sociale. Ainsi, les raisons exposées pour expliquer leur choix d’orientation invitent à élargir la réflexion pour ne plus s’intéresser uniquement aux conséquences des rapports sociaux qui tournent à leur désavantage, mais à la façon dont ils se réapproprient une réalité qui s’impose à eux pour vivre une expérience scolaire positive.
I – L’élitisme historique des activités sportives ou artistiques
11« L’illusio, c’est le fait d’être pris au jeu, d’être pris par le jeu, de croire que le jeu en vaut la chandelle, ou, pour dire les choses simplement, que ça vaut la peine de jouer [17]. »
12L’explosion des effectifs dans les cursus de sport et d’art a eu un impact sur le recrutement social des étudiants, avec davantage de jeunes venant de milieux sociaux populaires, notamment en Staps où la suppression de la sélection à l’entrée de cette discipline en 1995 a pu accélérer cette évolution [18]. Comparativement à la situation moyenne en 2013 sur le territoire national toutes formations confondues qui établit à 30 % le taux d’étudiants ayant des parents cadres supérieurs [19], cette filière apparaît bien plus diversifiée. En Bourgogne, les enfants de cadres supérieurs représentent ainsi seulement le quart des effectifs en première année de Staps. Il en va de même pour les classes préparatoires publiques aux écoles supérieures d’art qui inscrivent un peu moins du tiers d’élèves d’origine favorisée, alors que leur proportion pour l’ensemble des classes préparatoires aux grandes écoles est de 50 % [20] (Tableau 1).
Origine sociale des inscrits en 2013 (en %)
Classes préparatoires aux écoles sup. d’art | Staps 1re année UB | Étudiants en France | |
---|---|---|---|
Agriculteur | 3 | 4 | 3 |
Artisan, commerçant | 10 | 9 | 7 |
Cadre supérieur | 31 | 22 | 30 |
Profession intermédiaire | 19 | 20 | 12 |
Employé | 8 | 16 | 12 |
Ouvrier | 12 | 22 | 10 |
Retraité, inactif | 5 | 6 | 12 |
Inconnu | 12 | 1 | 14 |
Total | 100 | 100 | 100 |
Effectif | 323 | 468 | 2 134 763 |
Origine sociale des inscrits en 2013 (en %)
Lecture : 30 % des étudiants en France ont un parent cadre supérieur.13Dans ce contexte de mixité sociale, les bacheliers professionnels se situent pourtant encore parmi les étudiants les moins avantagés [21]. En Staps, un seul déclare avoir un parent cadre, et en classe préparatoire d’art, environ le tiers des bacheliers professionnels sont dans cette situation (pour 45 % des bacheliers généraux). Quant aux classes préparatoires, la moitié des bacheliers professionnels reconnaissent rencontrer des difficultés financières nombreuses ou très sérieuses (pour 17 % des autres jeunes). De fait, la classe préparatoire impose des frais de scolarité qui dépassent ceux de l’université tout en ne permettant pas aux jeunes d’accéder au statut d’étudiant ouvrant droit aux bourses et à tous les avantages sociaux inhérents (repas, logement…) [22].
14Ce positionnement social, qui distingue les bacheliers professionnels des autres bacheliers, s’exprime aussi dans les loisirs familiaux. En Staps, 71 % des jeunes déclarent que la pratique d’un sport a toujours tenu une grande place dans leur famille. Ils peuvent donc être considérés, de ce point de vue, comme des « natifs » du champ [23]. De même, en classe préparatoire d’art, deux jeunes sur cinq ont une expérience artistique familiale, leurs parents ayant suivi une formation artistique et/ou étant artistes amateurs ou professionnels [24]. D’une manière générale cependant, la pratique sportive ou artistique reste encore aujourd’hui plus fréquemment observée chez les cadres supérieurs et les professions libérales [25] ou leurs enfants [26]. De ce fait, il n’est pas surprenant de constater en Staps que ce capital familial spécifique est moins souvent mis en avant par les bacheliers professionnels (la moitié) que les autres bacheliers (les trois quarts), même si, au regard de leur positionnement social, ce taux reste relativement élevé [27].
15Si la dotation en capital symbolique [28] et spécifique (sport ou art) différencie les jeunes, le rapport à la pratique sportive ou artistique extra-scolaire reste comparable. Ainsi en Staps, tous les jeunes déclarent avoir pratiqué depuis leur plus jeune âge au moins un sport ou une activité physique dans un club ou une association, dont le tiers en compétition (inter)nationale. La quasi-totalité des bacheliers estiment même avoir figuré parmi les meilleurs en EPS ou dans les activités artistiques (pour 94 % des bacheliers généraux en Staps et 71 % en classe préparatoire d’art), proportion plus marquée encore chez les bacheliers professionnels.
16Le choix d’orientation vers ces filières semble donc se fonder sur une certaine assurance de leur potentiel en sport ou en art. Ce rapport à la pratique sportive ou artistique qui rassemble tous les étudiants sous une même identité d’adeptes du sport ou de l’art semble donc reléguer au second plan la question des origines scolaires ou sociales. Prédisposé ainsi à entrer dans l’« illusio », chacun se sent en droit de penser que sa présence en Staps ou en classe préparatoire d’art s’inscrit dans l’ordre des choses [29]. Plus précisément, écrit Pierre Bourdieu [30], « […] quand les structures incorporées et les structures objectives sont en accord, quand la perception est construite selon les structures de ce qui est perçu, tout paraît évident, tout va de soi ».
17Toutefois, les acteurs « peuvent avoir des conduites raisonnables sans être rationnels [31] », et ces bacheliers professionnels ne semblent pas avoir pris la mesure des différentes réalités auxquelles ils devront se confronter : d’une part, les études dans ces filières vocationnelles adossées à un champ professionnel ne se valident pas, tant s’en faut, sur la base uniquement des compétences sportives ou artistiques ; d’autre part, la réussite dans les études n’est pas neutre socialement, les enfants de cadres continuant à bénéficier d’une plus-value dans l’enseignement supérieur [32]. Enfin, le marché du travail peut s’avérer lui-même fort discriminant à leur égard, les activités sportives ou artistiques ayant fait historiquement l’objet d’une appropriation par la classe sociale aisée [33] pour finalement se présenter comme des objets de distinction [34]. Les discours idéologiques, philosophiques et politiques mobilisés au service d’un ordre bourgeois [35] ont investi les pratiques culturelles, tout comme les activités « par procuration » d’encadrement ou de promotion de ces pratiques [36]. En particulier s’est installée l’idée que l’engagement sportif ou artistique ne répond pas à une occupation alimentaire, mais à une vocation [37], entendue comme l’expression d’un destin d’exception [38].
II – L’idéologie de la vocation et du don comme processus de fermeture sociale
« La logique de la vocation est l’un des principes de l’élimination différentielle des garçons et des filles et des enfants de diverses origines [39]. »
18Étant le produit d’une interaction entre le désir de devenir quelqu’un (être appelé) et le désir projeté d’autrui (l’appel) [40], la vocation a d’autant plus de chances de s’exprimer lorsque l’environnement familial partage une même culture ou un même projet. Bien des trajectoires s’expliquent ainsi par la présence d’un parent artiste ou sportif ayant servi de modèle identificatoire, par un soutien psychologique, social ou économique de la famille dans le projet professionnel, ou encore par les habitus [41]. Dans cette recherche, près des trois quarts des étudiants de Staps et 95 % des étudiants d’art se sentent effectivement soutenus dans leur projet d’études par leurs parents, eux-mêmes souvent impliqués dans une pratique sportive ou artistique. Relayée par des instances de socialisation secondaire (options scolaires, associations, clubs, cours privés…), la pratique sportive ou artistique se renforce et apporte, dans la complicité entre pairs et les incitations de l’encadrement à croire en son talent, les justifications et les représentations nécessaires pour se définir comme sportif ou artiste [42]. Cette émulation autour de la pratique sportive ou artistique se retrouve dans les propos des jeunes pour justifier leur inscription dans ces cursus de Staps ou d’art.
19Plus précisément, une analyse des réponses apportées par les étudiants a été réalisée selon une grille de lecture proposée par François Dubet [43]. Le sociologue définit l’expérience scolaire des jeunes selon trois enjeux – à savoir le projet, l’intégration et la vocation – répondant respectivement à une logique d’action stratégique, sociale et de subjectivation. En Staps comme en art, le registre vocationnel est le plus souvent mobilisé pour justifier les choix d’orientation. Ceci est en particulier le cas des bacheliers professionnels qui, à l’exception de deux jeunes, affirment tous aimer le sport et/ou l’exercer depuis longtemps contre 70 % des bacheliers généraux [44] : « J’ai toujours pratiqué du sport [45]… », « Depuis l’âge de 5 ans je pratique du sport », « Passionné par le sport depuis toujours… », « Le sport est l’une de mes passions depuis mon plus jeune âge… ». Cette tendance se retrouve en classe préparatoire d’art où tous les bacheliers professionnels considèrent que leur choix d’études est une opportunité pour développer leur potentiel artistique et avoir de meilleures connaissances culturelles et artistiques, à l’instar des bacheliers généraux (95 %). Ce discours vocationnel n’entre d’ailleurs pas en contradiction avec une vision plus stratégique des études, à l’image de Louis (bachelier professionnel vente) qui explicite : « J’ai toujours apprécier le sport, et j’en ai toujours pratiquer en club. Je souhaiterais devenir entraîneur sportif », ou de Marc, diplômé en aménagements paysagers qui résume son orientation par ces mots : « Développer mes pratiques artistiques, m’épanouir. Mettre en lien mon bac pro et ma formation artistique. »
20Au cours de leur trajectoire sportive ou artistique, l’intégration dans des structures éducatives où tous partagent une même culture crée une distance avec les autres jeunes qui favorise ce processus d’intériorisation de la vocation, d’autant plus effectif que des logiques sélectives, comme c’est le cas en classe préparatoire d’art, ont pu donner le sentiment d’une élection. La coupure avec ce qui représente la normalité peut mener l’acteur vers une marginalité qui apparaît alors comme la seule existence acceptable et légitime [46]. Plus qu’une « rationalité en valeur », telle que la définit Max Weber [47], à savoir une action réfléchie soumise à des valeurs ou des impératifs éthiques envers lesquels l’individu se sent engagé, la vocation tend à se justifier par un « désir auquel le reste se subordonne parce qu’il est plus profond, plus lucide, plus constant que le reste [48] ». Elle en appelle dès lors au registre romantique de la souffrance, de l’isolement [49] ou de l’abnégation [50], comme le souligne avec force le titre de l’étude de Pierre-Emmanuel Sorignet, « Danser au-delà de la douleur ».
21S’il est réducteur d’attribuer un élitisme de classe à toutes les activités artistiques et sportives [51], il n’en reste pas moins vrai que cette « rationalité en valeur [52] », présentée comme la garantie d’une certaine probité [53], ne peut être assumée, dans les faits, que par les plus nantis [54], libérés de la nécessité d’assurer quotidiennement les moyens de leur survie. Ce qui est vrai de la société en général, l’est en particulier pour les jeunes qui traduisent par leurs préférences sportives ou artistiques un rapport différencié propre à leur milieu social [55], notamment dans le sport de haut niveau [56]. Pour Thorstein Veblen [57] (1970), la vocation ne doit donc rien au hasard. Réservée à « quelques âmes d’élite ou quelques personnes situées au sommet de la hiérarchie sociale [58] », la vocation ne s’inscrirait pas dans le destin des classes laborieuses.
22En ce sens, l’idéologie de la vocation, renforcée en sport et en art par l’idéologie du don [59], instaure une barrière sociale [60]. Le discours vocationnel dispense d’avoir à s’interroger sur le succès fulgurant de certains, comme si réussir ne tenait qu’à soi. Ignorant l’importance de la socialisation primaire et secondaire en art ou en sport, le mythe de l’autodidaxie n’est d’ailleurs pas rare [61]. Ce discours passe aussi sous silence l’enjeu que représentent l’inscription dans des réseaux institutionnels et les stratégies d’appariements sélectifs [62], dans le champ du sport [63] et de l’art [64], pour évoluer du statut d’amateur à celui de professionnel. Or, gérer ses cercles de notoriété ou trouver sa place dans la chaîne productive [65] n’est pas aussi aisé pour ceux qui ne disposent pas d’un capital social et culturel approprié, comme c’est souvent le cas des bacheliers professionnels.
23Ces inégalités d’accès au marché du travail sportif ou artistique se renforcent pour les femmes, notamment dans le sport de haut niveau qui a conservé une culture élitiste largement empreinte de valeurs masculines (virilité, puissance, courage, résistance à la douleur…) [66]. L’approche socio-historique du rapport au labeur de Thorstein Veblen explique cette différenciation sexuée des vocations et des métiers par le mysticisme de l’époque antique qui, à travers des héros tels Hercule ou Ulysse, a inscrit durablement dans la mémoire collective la supériorité masculine dans les arts guerriers. Le monde de l’art reste dominé par les mêmes logiques. Comparativement à leur poids dans la formation [67], les femmes sont peu nombreuses à en faire une profession [68], de surcroît quand il s’agit de s’affirmer en tant que créateur-auteur [69]. Peu valorisées dans les ouvrages de références [70], les lieux d’expositions [71] ou le marché des œuvres [72], elles accèdent difficilement à la notoriété [73]. Réussir dans le sport [74] comme dans l’art [75] demande d’ailleurs aux femmes d’assumer la double épreuve de la maîtrise de techniques corporelles masculines et de la mise en valeur de certains stéréotypes propres au genre féminin. Cette logique du social [76], qui impulse dans les représentations collectives l’idée que les hommes ont « naturellement » et objectivement plus de chances d’y réussir, explique sans doute en partie l’audace des bacheliers professionnels qui, dans les deux enquêtes conduites dans le cadre de cette recherche, sont majoritairement des hommes : 28 hommes et 4 femmes en Staps, filière traditionnellement masculine, mais 12 hommes et 7 femmes en classe préparatoire aux écoles supérieures d’art, filière traditionnellement féminine.
24La vocation et la croyance en son talent sont ainsi collectivement orchestrées et individuellement subjectivées, et, de ce point de vue, peuvent difficilement résister à l’analyse sociologique [77]. Celle-ci est à même d’expliquer par quels processus d’imposition les individus se laissent finalement prendre par le jeu et établissent un rapport enchanté à l’enjeu [78]. Le discours vocationnel dominant tenu par les étudiants de Staps et Art incarne précisément ce « sens du jeu » qui pose un voile lissant sur la réalité des inégalités de chances dans ces filières.
III – Le choix d’une filière vocationnelle comme refus d’une assignation de classe
25« Tout véritable rapport de domination comporte un minimum de volonté d’obéir [79]. »
26Pris au jeu et même encouragés par leurs parents ou leurs enseignants du secondaire à valoriser leurs dispositions sportives ou artistiques dans le supérieur, bercés par une idéologie de la vocation que partagent tous les étudiants de Staps ou d’art, il est aisé de croire que la motivation et la pratique de loisir pourraient suffire à compenser un profil social et scolaire peu favorable à une poursuite d’études dans ces filières. En détournant les acteurs d’une analyse rationnelle des risques pris, le discours vocationnel dominant est de nature à placer les bacheliers professionnels au cœur d’une duperie sociale.
27Si une partie des bacheliers professionnels semblent appartenir à l’élite scolaire de l’enseignement secondaire professionnel avec une mention au baccalauréat, plus fréquente en Staps (12 sur 32 versus 28 % pour les bacheliers généraux) ou comparable aux autres bacheliers en classe préparatoire aux écoles supérieures d’art (la moitié), il n’en reste pas moins que les contenus enseignés dans le secondaire professionnel ne favorisent pas un rapport évident aux savoirs conceptuels, théoriques et scientifiques de l’enseignement supérieur long.
28Quant aux connaissances spécifiques en sport ou en art des bacheliers professionnels, elles se limitent pour beaucoup à celles apportées par une pratique de loisir qui n’est pas toujours transférable au niveau des attendus académiques. Ainsi, un seul bachelier professionnel en Staps évoque avoir « déjà eu la chance d’être en sport étude en 4e », alors que 15 % des bacheliers généraux signalent une option sport au lycée ou « être actuellement sportif de haut niveau ». En classe préparatoire d’art, seulement le tiers des bacheliers professionnels se reconnaissent une spécialisation artistique par le choix de la spécialité ou le suivi d’une option au baccalauréat [80] pour les deux tiers des autres inscrits.
29Enfin, les redoublements et réorientations, que certains cumulent avec une durée d’études dans le secondaire professionnel [81], en font des bacheliers en moyenne plus âgés (19,8 ans) que les bacheliers généraux (18,4 ans en Staps et 18,6 ans en classe préparatoire d’art) et donc plus susceptibles d’être confrontés à l’entrée dans la vie adulte et d’être exposés à ses contraintes (vie de couple, prêt, salariat…) pouvant mener à une interruption d’études ou à un moindre investissement scolaire.
30Ces situations suffisent à illustrer l’idée qu’entre l’intention de prolonger une pratique sportive ou artistique dans les études et sa concrétisation dans des attitudes et des pratiques favorables à une réussite au diplôme, il existe une réalité que les bacheliers professionnels doivent sans doute davantage assumer que les autres jeunes. La décision des bacheliers professionnels d’entrer en Staps ou en art s’est, d’ailleurs, affirmée relativement tard. Ainsi, les deux tiers ont décidé d’entreprendre des études artistiques à partir du lycée alors que cela concerne moins de la moitié des bacheliers généraux.
31Dans l’enseignement supérieur, leur investissement studieux en dehors des cours est moins important. En Staps, le tiers d’entre eux déclarent ne pas consacrer de temps à du travail personnel pour 16 % des autres étudiants. En classe préparatoire d’art, les bacheliers professionnels ont aussi tendance à consacrer moins d’heures de suivi des enseignements et de travail personnel en dehors des cours (10 heures pour 13 heures déclarées par les bacheliers généraux). En temps cumulés, ils s’investissent en moyenne 43 heures dans leur formation, soit près de 4,5 heures de moins que les autres jeunes. Cette implication moindre peut aussi s’expliquer par des habitudes scolaires différemment sollicitées dans l’enseignement secondaire général et professionnel.
32Ce peut être aussi lié à leur anticipation des risques d’échec dans ces filières qui les place dans une logique de cheminement [82], où il s’agit de résister aux différentes étapes de la sélection scolaire, plutôt que dans une logique d’investissement consistant à se doter des meilleurs atouts pour une insertion future. Pour argumenter dans ce sens, si tous s’accordent en Staps sur leur intérêt pour le sport, seulement la moitié des bacheliers professionnels expriment en réalité un projet professionnel. Comparativement, trois quarts des bacheliers généraux sont déjà en mesure de formuler des espérances à long terme. De même, en classe préparatoire aux écoles supérieures d’art, cette incertitude est formulée par 13 des 19 bacheliers professionnels pour la moitié des autres inscrits. Ils sont aussi moins nombreux à envisager une admission en école supérieure d’art.
33Ces bacheliers peinent ainsi à transformer leur discours vocationnel en un investissement studieux qui pourrait leur permettre de marquer l’essai dès la première année. Si l’idéologie de la vocation et du don présente en sport ou en art maintient ces jeunes dans la croyance qu’une pratique de loisir peut se convertir en avantage scolaire, les institutions, au moins en Staps, tentent de les ramener à une certaine lucidité en précisant les difficultés auxquelles ils s’exposent.
34Parmi les signaux institutionnels envoyés explicitement aux bacheliers professionnels, on trouve celui de l’Onisep [83] qui souligne dans sa brochure nationale cette mention : « Études longues ? Une voie risquée pour les bacheliers pro qui l’envisagent, car la formation suivie au lycée ne les y prépare pas. » De plus, avant de s’inscrire en Staps à l’université de Bourgogne, il est vivement conseillé aux jeunes de solliciter l’orientation active via le système APB. Cette pré-inscription leur permet de bénéficier d’un avis institutionnel quant à la faisabilité de leur projet. Pour les bacheliers professionnels, cette procédure se veut plutôt dissuasive : aucun des 32 bacheliers professionnels n’a reçu un avis favorable, 17 ont eu un avis réservé, 4 un avis avec recommandation [84]. Ceci indépendamment de la solidité de leur argumentation.
35Quillian, bachelier professionnel géomètre, précise ainsi son choix : « Je suis très motivé pour intégrer cette formation pour les raisons qui suivent : J’adore le sport et notamment le football que je pratique depuis l’âge de 6 ans en club. L’enseignement et la pratique du sport en même temps de façon régulière m’intéressent beaucoup et j’ai déjà eu la chance d’être en sport étude en 4e, donc je sais un peu comment cela fonctionne. Depuis tout petit je rêve d’être professeur de sport, que ce soit au lycée ou au collège peu importe car j’aime être en contact avec les personnes et pouvoir enseigner le sport à d’autres personnes serait magnifique pour moi. » En retour, il reçoit ce conseil émis par le responsable de la filière Staps : « Avis réservé. Les études dans la filière Staps sont très exigeantes, et aimer pratiquer le sport ne suffit pas. Venant d’une voie professionnelle, vous devez être conscient des difficultés que vous risquez de rencontrer. Les statistiques attestent du faible taux de réussite des étudiants ayant obtenu un bac pro. Mais avec une solide motivation et un travail soutenu, vous pouvez vous donner les moyens de réussir. Si vous ne vous sentez pas prêt à vous investir suffisamment, je vous conseille de choisir une autre orientation. »
36En contraste, 80 % des bacheliers scientifiques recueillent un avis favorable sans autre commentaire, et ce, quel que soit leur discours, argumenté ou non, comme ce jeune qui motive sa décision par cette simple mention : « préparateur physique ». Un bachelier professionnel, qui exprime tout aussi simplement « J’aimerais exercer le métier de préparateur physique », obtient, lui, en revanche cet avertissement : « Avis réservé. Il n’est pas impossible de réussir dans la filière Staps après l’obtention d’un bac professionnel. Mais à condition que vous vous sentiez capable de fournir un travail personnel très important. » Si l’institution met tout en œuvre pour ramener les bacheliers professionnels à des principes de réalité au regard du risque pris dans les études, manifestement ces étudiants ont tenu à ignorer ces alertes pour atteindre leur objectif personnel de se réaliser dans et par le sport. Il s’agit donc d’explorer la possibilité que le choix du supérieur long dans une filière vocationnelle adossée à un champ professionnel réponde à des enjeux autres que ceux attribués aux études supérieures par les bacheliers généraux.
37La création du baccalauréat professionnel, sa généralisation puis son alignement symbolique à l’enseignement général en 2009 ont désormais fait de la voie professionnelle moins l’aboutissement d’un cursus préparant à une insertion rapide qu’un élargissement du champ des possibles (poursuivre des études, vivre sa jeunesse, se donner du temps pour élaborer un projet professionnel) [85]. Ainsi, le lycée a progressivement attiré des publics plus armés scolairement et socialement, plus ambitieux [86], et pour lesquels l’orientation vers le supérieur répond davantage à un processus d’appropriation de leur expérience scolaire où il y a adhésion à la cause scolaire [87], « à condition que la formation laisse une large place à la dimension pratique » [88] comme c’est le cas en Staps ou en école d’art. Attirées aussi par l’expérience universitaire comme espace de sociabilité juvénile, au-delà du rapport instrumental et utilitaire à la formation, ces jeunes générations de bacheliers professionnels prolongent un rapport plus positif à leur scolarité que les précédentes générations, sans nécessairement être portées par un attrait fort pour les études ou le travail scolaire [89]. Le comportement de ces nouveaux bacheliers professionnels, moins contraints par les logiques institutionnelles et plus opportunistes dans le jeu scolaire, invite à s’interroger sur leur stratégie d’orientation.
38Historiquement, le comportement des acteurs par rapport à la question de l’orientation scolaire a été étudié sous trois angles [90] : une orientation mécaniquement prévisible à partir des structures de l’économie (« structuralistview »), une orientation conditionnée par le jeu des influences sociales ou psychologiques (« pushed-from-behind ») ou encore une orientation expliquée par la réflexion rationnelle d’individus évaluant des solutions de rechange selon des gains futurs (« pulled-in-front-of-view »). Ainsi, les décisions individuelles d’orientation sont définies par ce que l’individu peut faire, ce qu’il veut faire et les contraintes qui modèlent ses préférences et intentions. Pour Diego Gambetta, cependant, « So, were they pushed or did they jump? If anything, they jumped. They jumped as much as they could and as much as they perceived it was worth jumping [91]. » Il conclut ainsi que plus l’individu est conscient de ses choix, moins il subit le poids des contraintes structurelles et des influences sociales.
39L’approche de François Dubet [92] sur le sujet des projets d’études des lycéens permet d’approfondir cette réflexion en considérant que chacun se trouve placé devant la possibilité de conduire son projet en cohérence avec des modèles sociaux propres à son milieu, avec une réalité institutionnelle et économique ou avec des valeurs qu’il se définit lui-même. Dans cette approche réflexive, les individus établissent une distance à eux-mêmes qui les amène à analyser objectivement leur situation et se construire une réalité en fonction d’une réalité déjà là [93]. De ce travail de subjectivation peut alors émerger le désir de « vivre sa vie, trouver en elle une référence qui éclaire ses comportements particuliers plus que l’appartenance à une catégorie sociale ou à une communauté de croyances [94] ».
40Certains bacheliers professionnels évoquent ainsi, non pas le désir de réussir leurs études ou d’accéder à un métier, mais le souhait de se réorienter positivement, à l’image de ces deux jeunes en Staps : « Je me rends compte que je n’ai pas du tout pris la bonne orientation en faisant un bac professionnel de comptabilité et je souhaite pouvoir avoir une chance de suivre des études dans le domaine du sport qui me plaît vraiment… » ; « Je suis actuellement en terminale bac pro Électrotechnique et cette voie professionnelle ne me plaît pas. Étant passionné de sport en tous genres et motivé à travailler afin de réussir cette formation, je pense que la formation proposée par vos services est celle qui me convient le mieux. » Il en est de même pour Nathalie qui, après un baccalauréat vente, a comme projet de « lier sport et art » et s’est inscrite en classe préparatoire d’art « pour voir si j’ai assez de créativité pour tenter un avenir dans l’art ». C’est aussi une année privilégiée qui permet de « s’épanouir dans ses passions, ses projets, trouver sa voie et s’investir », que synthétise ce bachelier professionnel par ces mots : « car je veux être heureux et m’épanouir dans mon existence ».
41Le comportement paradoxal de ces bacheliers promis statistiquement à l’échec et, en même temps, bravant les avis institutionnels prononcés à leur encontre pourrait être alors interprété comme une tentative d’échapper à la « soumission immédiate à l’ordre qui incline à faire de nécessité vertu, c’est-à-dire à refuser le refusé et à vouloir l’inévitable [95] ». État d’esprit comparable finalement à celui que Sébastien Schehr [96] croit voir chez certains chômeurs et travailleurs précaires qui refusent l’assignation à un travail salarié pour bénéficier des mêmes droits que s’accorde de façon ostentatoire la « leisure class », comme celui de disposer de son temps.
42Or, pour Ugo Palheta, « le propre des dominés, notamment dans le système de formation, consisterait à jouer sur le terrain et selon les règles de “l’adversaire” et à “profiter des occasions” pour tenter, malgré tout, de tirer quelque avantage de leur situation [97] ». Ainsi, sans nécessairement être animés d’intentions stratégiques, mais plus d’un « sens pratique » au sens bourdieusien amenant les jeunes bacheliers professionnels à se comporter comme des tacticiens dans un jeu imposé qui se joue dès lors pour eux au « coup par coup ». Les études sportives ou artistiques seraient ainsi investies dans le projet de rompre avec une destinée sociale qui les prépare surtout, après leur passage dans l’enseignement secondaire professionnel, à prendre leur tour dans la chaîne productive [98]. D’autant que, une année seulement dans ces parcours peut déjà devenir pour eux une expérience constructive. Par exemple, le fait d’être en Staps est un atout pour réussir certains concours où la condition physique est un critère d’évaluation (pompier ou gendarme) ou permet d’obtenir la carte professionnelle d’éducateur sportif et le brevet d’aptitude aux fonctions d’animateur s’ils valident les deux premières années universitaires [99]. Et puis, faut-il le rappeler, pour ces jeunes qui sont passés du « casual leisure » au « serious leisure [100] », se lancer dans une carrière sportive ou artistique sans qualification reste possible puisque, sur ces marchés du travail non réglementés, l’exercice professionnel ne dépend pas d’une « licence [101] ». Enfin, il est toujours de ces réussites exemplaires qui encouragent à la persévérance, comme celle de ce bachelier professionnel en menuiserie qui, après avoir validé sa licence en trois années, tente le certificat d’aptitude au professorat d’éducation physique et sportive conformément à son projet initial : « Devenir enseignant d’éducation physique et sportive ». Ainsi, ces bacheliers professionnels quelque peu dissidents retourneraient à leur avantage une idéologie de la vocation, comme pour euphémiser les « stigmates [102] » que laisse sur eux un passage par l’enseignement secondaire professionnel.
Pour ne pas conclure
43Nous avons tenté de comprendre le sens des poursuites d’études des bacheliers professionnels dans des filières du supérieur long adossées à des champs professionnels où l’idéologie de la vocation est présente. Celle-ci entretient la croyance que le talent suffit pour réussir et attire sous cette doxa, dès les premiers niveaux de formation, un public diversifié. Le succès académique et professionnel reste cependant incertain pour les bacheliers professionnels dont le profil scolaire et social prédispose peu à ce choix de cursus, à plus d’un titre élitiste. Pour autant, l’idéologie de la vocation est aussi un levier puissant pour ces jeunes désireux de dépasser ou s’extraire des logiques sociales vers lesquelles les oriente leur profil. Pour ces jeunes générations, les études supérieures se présentent comme une alternative « de droit » au marché du travail. Prenant appui sur leur passion pour accéder à une formation supérieure longue, ils tentent à travers elles de se construire une expérience scolaire (enfin) positive et de se donner éventuellement une raison d’échapper à un destin de classe.
Mots-clés éditeurs : études supérieures, bacheliers professionnels, orientation, vocation
Mise en ligne 06/09/2019
https://doi.org/10.3917/rsss.014.0075Notes
-
[1]
Les termes bacheliers, élèves, étudiants… sont pris au sens générique et ont à la fois valeur de féminin et masculin dans cet article.
-
[2]
94 % des bacheliers généraux et 80 % des bacheliers technologiques s’inscrivent dans les formations de l’enseignement supérieur en 2016 (ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche-Direction de l’évaluation et de la prospective. 2018. L’état de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, n° 11, p. 31).
-
[3]
Jellab, Aziz. 2009. Sociologie du lycée professionnel : L’expérience des élèves et des enseignants dans une institution en mutation, Toulouse, Presses universitaires du Mirail ; Palheta, Ugo. 2012. La domination scolaire. Sociologie de l’enseignement professionnel et de son public, Paris, PUF.
-
[4]
Ministère de l’Éducation, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche, direction de l’évaluation et de la prospective, op. cit. p. 30.
-
[5]
Felouzis, Georges. 2001. La condition étudiante, Paris, PUF ; Beaud, Stéphane ; Pialoux, Michel. 2001. « Les bacs pro à l’université. Récit d’une impasse », Revue française de pédagogie, n° 136, p. 87-95 ; Aschieri, Gérard. 2013. « Les inégalités dans l’enseignement supérieur » in Penser et combattre les inégalités. Pour un « faire société » plus égalitaire, Le français aujourd’hui, vol. 4, n° 183, p. 51-59 ; Belghith, Feres. 2016. « Des étudiants atypiques ? Les bacheliers technologiques et professionnels dans l’enseignement supérieur », in Giret, Jean-François ; Van De Velde, Cécile ; Verley, Élise. Les vies étudiantes. Tendances et inégalités, Paris, La Documentation française, p. 249-262.
-
[6]
Maetz, Isabelle. 2016. « Parcours et réussite aux diplômes universitaires : les indicateurs de la session 2015 », Note Flash, n° 15, novembre, ministère de l’Éducation nationale, de l’Enseignement supérieur et de la Recherche.
-
[7]
Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance (DEPP). 2014. Repères et références statistiques, ministère de l’Éducation nationale, p. 177.
-
[8]
Cf. Association nationale des classes préparatoires publiques aux écoles supérieures d’art, site www.appea.fr.
-
[9]
En 2016, 41 % d’une génération obtient le baccalauréat général, 23 % le baccalauréat professionnel, qui se positionne ainsi devant le baccalauréat technologique (16 %). Rappelons que ce baccalauréat professionnel ne regroupait que 14 % d’une génération en 2010, avant la réforme de la voie professionnelle qui a aligné le cursus du baccalauréat professionnel en trois ans à partir de 2009 (DEPP. 2017. Repères et références statistiques, p. 229).
-
[10]
Beaud, Stéphane. 2002. 80 % au bac et après ? Les enfants de la démocratisation scolaire, Paris, La Découverte.
-
[11]
Jellab, Azis. 2015. « Apprendre un métier ou poursuivre ses études ? Les élèves de lycée professionnel face à la réforme du bac pro trois ans », Formation Emploi, n° 131, p. 79-99.
-
[12]
Érard, Carine ; Guégnard, Christine ; Murdoch, Jake. 2016. « Étudiants en Staps, les territoires de la réussite » in Landrier, Séverine ; Cordazzo, Philippe ; Guégnard, Christine (dir.), Études, galères et réussites. Conditions de vie et parcours à l’Université, Injep, Paris, La Documentation française, p. 43-62.
-
[13]
Danner, Magali ; Guégnard, Christine. 2015. « Des bacheliers professionnels sur le pont des Arts, du rêve à la réalité ? », Formation Emploi, n° 131, p. 141-162.
-
[14]
Bourdieu, Pierre. 1964. Les héritiers. Les étudiants et la culture, Paris, Minuit, p. 42.
-
[15]
Durkheim, Émile. 2004 [1893]. De la division du travail social, Paris, PUF.
-
[16]
Dans notre étude à l’université de Bourgogne, la filière Staps était accessible de droit après obtention du baccalauréat et ne faisait l’objet ni d’une sélection à l’entrée, ni d’une limitation de la capacité d’accueil, ni d’un tirage au sort.
-
[17]
Bourdieu, Pierre. 1994. Raisons pratiques, Paris, Seuil, p. 151.
-
[18]
Giret, Émilie ; Michot, Thierry. 2006. « Les étudiants en Staps face à leurs employeurs », Esprit critique, vol. 8, n° 1, p. 1-17.
-
[19]
DEPP. 2014. op. cit., p. 195.
-
[20]
Dutercq, Yves ; Masy, James. 2016. Comment l’école amplifie les inégalités sociales et migratoires ? Origine sociale des étudiants de CPGE : quelles évolutions ?, université de Nantes, CNESCO.
-
[21]
Danner, Magali ; Érard, Carine ; Guégnard, Christine. 2016. « Probabilités d’orientation déjouées… Des bacheliers professionnels en Staps et en classe préparatoire aux écoles supérieures d’art », Les sciences de l’éducation – Pour l’ère nouvelle, vol. 49, n° 3, p. 19-48.
-
[22]
Les frais d’inscription varient selon les écoles publiques de 200 à 1 100 €, alors que le montant d’inscription à l’université en licence, fixé au plan national, est de moins de 200 € au moment de notre enquête.
-
[23]
Costey, Paul. 2005. « L’illusio chez Pierre Bourdieu. Les (més)usages d’une notion et son application au cas des universitaires », Tracés, n° 8, p. 13-27. L’auteur définit les « natifs » du champ, terme qu’il emprunte à Pierre Bourdieu, comme « ceux qui possèdent à l’état pratique les compétences requises pour s’y épanouir, car ils sont les produits de ce même univers », p. 13.
-
[24]
Danner M. ; Guégnard, C., op. cit.
-
[25]
Bourdieu, Pierre. 2002 [1984]. Questions de sociologie, Paris, Minuit, p. 173-195.
-
[26]
Mennesson, Christine ; Julhe, Samuel. 2012. « L’art (tout) contre le sport ? La socialisation culturelle des enfants de milieux favorisés », Politix, n° 99, p. 109-128.
-
[27]
Ministère des Sports et ministère de l’Éducation nationale, de la Jeunesse et de la Vie associative. 2010. « Les premiers résultats de l’enquête 2010 sur les pratiques physiques et sportives en France », Stat-Info, n° 10, décembre.
-
[28]
Bourdieu, P. 1994. op. cit., p. 116, 160-161.
-
[29]
Engagés dans des études où, a priori, leurs pratiques sportives et artistiques peuvent constituer des avantages susceptibles de se convertir en bénéfices scolaires, les bacheliers professionnels continuent de suivre leur « libido sociale », terme emprunté à Pierre Bourdieu, ibid., p. 160.
-
[30]
Ibid., p. 156.
-
[31]
Ibid., p. 150.
-
[32]
Jaoul-Grammare, Magali ; Nakhili, Nadia. 2010. « Quels facteurs influencent les poursuites d’études dans l’enseignement supérieur ? », Net.Doc, n° 68, Céreq, p. 19.
-
[33]
Veblen, Thorstein. 1970 [1899]. The Theory of the Leisure Class – An Economic Study of Institutions. [Traduction française : Théorie de la classe de loisir], Paris, Gallimard ; Brohm, Jean-Marie. 1992 [1976]. Sociologie politique du sport, Nancy, PUN ; Liot, Françoise. 1999. « L’école des Beaux-Arts face aux politiques de soutien à la création », Sociologie du travail, n° 41, p. 411-429 ; Darriulat, Jacques. 2007. « Introduction à la philosophie esthétique : de l’Académie au Salon », Actes de conférences, in Pommier, Édouard. Comment l’art devient l’Art dans l’Italie de la Renaissance, Paris, Gallimard ; Vandenbunder, Jérémie. 2014. La pédagogie de la création : une sociologie de l’enseignement artistique, thèse, Versailles/Saint-Quentin-en-Yvelines.
-
[34]
Bourdieu P., 2002 [1984]., op. cit.
-
[35]
Laguillaumie, Pierre. 1968. « Pour une critique fondamentale du sport », Partisan, n° 43, « Sport, culture et répressions », Paris, Maspero, p. 27-44 ; Bourdieu, Pierre. 2003 [1979]. La distinction. Critique sociale du jugement, Paris, Minuit.
-
[36]
Pociello, Christian. 1987. Sports et société. Approche socio-culturelle des pratiques, Paris, Vigot, coll. « Sport + enseignement », p. 33-56.
-
[37]
Sofio, Séverine. 2007. « La vocation comme subversion : artistes femmes et anti-académisme dans la France révolutionnaire », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, p. 34-49.
-
[38]
Sapiro, Gisèle. 2007. « La vocation artistique entre don et don de soi », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, 4-11 ; Élias, Norbert. 1991 [1986], Mozart, sociologie d’un génie, Paris, Seuil.
-
[39]
Bourdieu, Pierre. 2007. « Entretien, 1991 », in Dollinger, Dominique, Penseurs de notre temps. Perspectives philosophiques, CNDP.
-
[40]
Oraison, Marc. 1970. Vocation, phénomène humain, Paris, Desclée de Brouwer.
-
[41]
On peut citer notamment dans le champ artistique les travaux de : Elias N., op. cit. ; Blacking, John. 1980. Le sens musical, Paris, Minuit ; Augustins, Georges. 1991. « Le don chez les musiciens », in Segalen, Martine. Jeux de famille, Paris, CNRS, p. 99-113 ; Menger, Pierre-Michel. 1997. La profession de comédien, ministère de la Culture et de la Communication, département des études et de la prospective ; Brenot, Philippe. 1997. Le génie et la folie, en peinture, musique et littérature, Paris, Odile Jacob ; Coulangeon, Philippe. 2004. Les musiciens interprètes en France, Paris, La Documentation française ; Liot, Françoise. 2004. Le métier d’artiste, Paris, L’Harmattan ; Sorignet, P.-E., op. cit. ; Morinière, Thomas. 2007. « Les petites voies de la chanson de variétés. La révélation du charisme du chant et la démocratisation de la vocation d’interprète », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 168, p. 68-81 ; Ravet, Hyacinthe. 2007. « Devenir clarinettiste. Carrières féminines en milieu masculin », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 3, p. 50-67 ; Sapiro G., op. cit. On peut citer notamment dans le champ sportif les travaux de : Fleuriel, Sébastien. 2004. Le sport de haut niveau en France : sociologie d’une catégorie de pensée, Grenoble, PUG ; Forté, Lucie ; Bertrand, Julien. 2011. « La vocation au croisement des espaces de socialisation. Étude sociologique de la formation des footballeurs professionnels », Sociétés contemporaines, vol. 2, n° 82, p. 85-106 ; Mennesson, Christine. 2012. « Réussite athlétique et héritage sportif », SociologieS, Théories et recherches, [en ligne : http://sociologies.revues.org/4082].
-
[42]
Schotté M., 2002. op. cit. ; Lefèvre, Nicolas. 2014. « Transmission et apprentissage du métier de coureur cycliste », SociologieS, Dossiers, La transmission du métier, [en ligne : https://sociologies.revues.org/4551].
-
[43]
Dubet, François. 1994. « Dimensions et figures de l’expérience étudiante dans l’université de masse », Revue française de sociologie, vol. 35, n° 4, Monde étudiant et monde scolaire, p. 511-532.
-
[44]
Les bacheliers généraux n’ont pas tous évoqué cette logique, alors qu’objectivement ils pouvaient le faire puisqu’ils pratiquent tous au moins une activité sportive extra-scolaire. D’autant plus que la commande institutionnelle les encourageait à le faire. Sur le site Admission post-bac de l’université de Bourgogne, il était explicitement demandé, en effet, aux futurs bacheliers : « Pouvez-vous préciser brièvement vos motivations pour intégrer cette formation et indiquer les métiers que vous aimeriez exercer à l’issue de vos études. »
-
[45]
Les propos des jeunes sont reproduits sans correction orthographique et les prénoms ont été changés pour garder l’anonymat.
-
[46]
Becker, Howard Saul. 1985 [traduction française Briand, Jean-Pierre ; Chapoulie, Jean-Marc]. Outsiders, Études de sociologie de la déviance, Paris, Métailié.
-
[47]
Weber, Max. 1995 [1922]. Économie et société, Paris, Plon, p. 55-61. La vocation est une notion qui s’est affirmée vers le xviiie siècle avec force dans la théologie protestante (Weber, 2000) et a peu à peu investi les sphères intellectuelles dont le milieu artistique (Judith Schlanger, 1997 ; Séverine Sofio, 2007). En élevant la pratique artistique des arts serviles aux arts libéraux, l’artiste s’est trouvé aussi doté de cet idéal vocationnel. Ainsi, les artistes représentent « une élite acceptable en régime démocratique » par le don qu’ils héritent à la naissance et le mérite qu’ils acquièrent par un travail exigeant (Nathalie Heinich, 2005). Parallèle qu’il est possible de faire avec le sport, notamment dans la représentation des jeux olympiques créés au début du xixe siècle. Weber, Max. 2000 [1905]. L’éthique protestante et l’esprit du capitalisme, Paris, Flammarion ; Sofio S., op. cit. ; Schlanger, Judith. 1997. La vocation, Paris, Seuil ; Heinich, Nathalie. 2005. L’Élite artiste. Excellence et singularité en régime démocratique, Paris, Gallimard.
-
[48]
Schlanger J., op. cit., p. 56.
-
[49]
Godbout, Jacques. 2004. « Les conditions sociales de la création en art et en sciences », Revue du MAUSS, n° 24, p. 411-427 ; Irigaray Adenot, Pauline. 2007. Le désenchantement des instrumentistes d’orchestre symphonique en France au début du xxe siècle. Histoire d’une domination, thèse, université de Paris-Sorbonne 1.
-
[50]
Sorignet, Pierre-Emmanuel. 2006. « Danser au-delà de la douleur », Actes de la recherche en sciences sociales, n° 163, p. 40-61.
-
[51]
Pociello C., op. cit., p. 172-237.
-
[52]
Action réfléchie soumise à des impératifs éthiques envers lesquels l’individu se sent engagé, cf. Weber, Max. 1964 [1905]. Éthique protestante et esprit du capitalisme, Paris, Plon.
-
[53]
Chapoulie, Jean-Michel. 1973. « Sur l’analyse sociologique des groupes professionnels », Revue française de sociologie, n° 14, p. 86-114.
-
[54]
Veblen T., op. cit. ; Bourdieu P., 2002 [1984], op. cit.
-
[55]
Octobre, Sylvie. 2009. « Pratiques culturelles chez les jeunes et institutions de transmission : un choc de cultures ? », Culture prospective, n° 1, p. 1-8.
-
[56]
Forté, Lucie ; Mennesson, Christine. 2012. « Réussite athlétique et héritage sportif », SociologieS, Théories et recherches.
-
[57]
Veblen T., op. cit.
-
[58]
Schlanger J., op. cit., p. 13
-
[59]
Schotté, Manuel. 2002. « Réussite sportive et idéologie du don. Les déterminants sociaux de la “domination” des coureurs marocains dans l’athlétisme français (1980-2000) », Staps, vol. 1, n° 57, p. 21-37.
-
[60]
Le concept wébérien de « social closure » décrit le processus par lequel un groupe préserve ses ressources et avantages en limitant l’accès des autres aux ressources et récompenses en usant de stratégies sociales (comme une sélection par le niveau de connaissance, les pratiques, les affiliations …). Weber Max. 1995 [1922]. op. cit.
-
[61]
Moulin, Raymonde. 1992. L’artiste, l’institution et le marché, Paris, Flammarion ; Lefèvre, N. 2014. op. cit.
-
[62]
Menger, Pierre-Michel. 2002. Portrait de l’artiste en travailleur. Métamorphoses du capitalisme, Paris, Seuil, coll. « La République des idées ».
-
[63]
Schotté, M. 2002. op. cit. ; Fleuriel S., op. cit. ; Lefèvre, Nicolas. 2006. « Qualifications, compétences et accès au marché du sport professionnel », in Dire le monde social, 2e Congrès de l’Association française de sociologie, 5-8 septembre 2006, Bordeaux ; Buisine, Sébastien. 2006. « Le jeu des cyclistes face à leurs contrats professionnels », 2e Congrès de l’Association française de sociologie, 5-8 septembre 2006, Bordeaux.
-
[64]
Elias, N., op. cit. ; Becker, H., op. cit. ; Paradeise, Catherine. 1998. Les comédiens. Professions et marchés du travail, Paris, PUF.
-
[65]
Becker, Howard Saul. 1988. Les mondes de l’art, Paris, Flammarion ; Pociello, C., op. cit., p. 9-29.
-
[66]
Chevalier, Vérène. 1998. « Pratiques culturelles et carrières d’amateurs : les cas des parcours des cavaliers dans les clubs d’équitation », Sociétés contemporaines, n° 29, p. 27-41 ; Mennesson, Christine. 2004. « Être une femme dans un sport « masculin ». Modes de socialisation et construction des dispositions sexuées », Sociétés contemporaines, n° 55, p. 69-90 ; Louveau, Catherine. 2006. « Inégalité sur la ligne de départ : femmes, origines sociales et conquête du sport », Clio, n° 23, p. 119-143.
-
[67]
Actuellement, les formations artistiques les accueillent massivement dès le secondaire avec un taux de féminisation qui flirte avec les 60 % jusque dans le supérieur. Cf. Lutinier, Bruno ; Dietsch, Bruno ; Sotto, Marie-Françoise. 2011. « Formations artistiques, culturelles et en communication en 2009 : 155 000 étudiants dans des filières très diversifiées », Culture chiffres, département des études de la prospective et des statistiques.
-
[68]
Gouyon, Marie ; Patureau, Frédérique ; Volat, Gwendoline. 2016. « La lente féminisation des professions culturelles ». Culture Études, département des études de la prospective et des statistiques.
-
[69]
Danner, Magali. 2012. « L’auto-sélection des femmes dans les carrières artistiques » in Mélody, Jan-Ré, Créations : le genre à l’œuvre, vol. 2, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques sociales ».
-
[70]
Lamoureux, Eve. 2004. « La question du genre dans les arts visuels : les femmes artistes mobilisées dans le féminisme au Québec ». Actes de colloque, 26 et 27 novembre, Genre et militantisme, Lausanne.
-
[71]
Quinby, Diana. 2003. Le collectif Femmes/Art à Paris dans les années 1970 : une contribution à l’étude du mouvement des femmes dans l’art, thèse, université de Paris-1, Panthéon-Sorbonne.
-
[72]
Pasquier, Dominique. 1983. « Carrières de femmes : l’art et la manière », Sociologie du travail, n° 4, p. 418-431.
-
[73]
Nochlin, Linda. 1994. Why Have There Been No Great Women Artists, Prentice Hall, United-States, Englewood Cliffs, NJ (Writings about art) ; Naudier, Delphine ; Rollet, Brigitte. 2007. Genre et légitimité culturelle. Quelle reconnaissance pour les femmes ?, Paris, L’Harmattan.
-
[74]
Louveau, Catherine. 1987. « La forme, pas les formes ! », in Pociello, C., op. cit., p. 303-318 ; Mennesson, Christine. 2007. « Les sportives professionnelles : travail du corps et division sexuée du travail », Cahiers du genre, n° 42, p. 19-41 ; Louveau, Catherine. 2007. « Le corps sportif : un capital rentable pour tous ? », Actuel Marx, n° 41, p. 55-70.
-
[75]
Buscatto, Marie. 2000. « Chanteuse de jazz n’est point un métier d’homme. L’accord imparfait entre voix et instrument », Revue française de sociologie, n° 44, p. 35-62 ; Sorignet, Pierre-Emmanuel. 2004. « Un processus de recrutement sur un marché du travail artistique : le cas de l’audition en danse contemporaine », Genèses, n° 57, p. 64-88.
-
[76]
Bourdieu, Pierre. 1998. La domination masculine, Paris, Seuil.
-
[77]
Schotté, Manuel. 2013. « Le don, le génie et le talent. Critique de l’approche de Pierre-Michel Menger », Genèses, vol. 4, n° 93, p. 144-164.
-
[78]
Bourdieu, P., 1994, op. cit., p. 151.
-
[79]
Weber, M., 1995 [1922], op. cit., p. 285.
-
[80]
En première année de Staps ou en classe préparatoire entrent ainsi des bacheliers ayant suivi un cursus de boulanger-pâtissier, vente, sécurité prévention, géomètre topographe, électrotechnique, comptabilité, bâtiment…
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[81]
Nécessairement plus longue que dans l’enseignement général jusqu’à la réforme du baccalauréat professionnel en 2009.
-
[82]
Bautier, Elisabeth ; Rochex, Jean-Yves. 1998. L’expérience scolaire des nouveaux lycéens. Démocratisation ou massification ?, Paris, Armand Colin.
-
[83]
Office national de l’information sur les enseignements et les professions. 2014. Fiche « Après un bac pro », p. 2.
-
[84]
Onze jeunes ne sont pas passés par cette procédure suite à une inscription tardive ou une réorientation, un redoublement.
-
[85]
Jellab Aziz. 2015. op. cit.
-
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[87]
Jellab, Aziz. 2015. op. cit.
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[88]
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[89]
Jellab, Aziz. 2015. op. cit.
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[91]
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