I – Quatrième évangile (1 à 11)
2. Derek Tovey, Narrative Art and Act in the Fourth Gospel (Journal for the Study of the New Testament-Supplement Series 151), Sheffield Academic Press, Sheffield, 1997, 296 p.
3. Michael Labahn, Jesus als Lebenspender. Untersuchungen zu einer Geschichte der johanneischen Tradition anhand ihrer Wundergeschichten (Beihefte zur Zeitschrift für die neutestamentliche Wissenschaft und die Kunde der älteren Kirche ; Bd 98), W. de Gruyter, Berlin, New York, 1999, 560 p.
4. Claus Westermann, The Gospel of John. In the Light of the Old Testament. Translated by Siegfried S. Schatzmann [Original : Das Johannesevangelium aus der Sicht des Alten Testaments. Stuttgart 1994], Hendrickson Publishers, Peabody, Massachussetts, 1998, 106 p.
5. Edmund Little, Echoes of the Old Testament in The Wine of Cana in Galilee (John 2 :1-11) and The Multiplication of the Loaves and Fish (John 6 : 1-15). Towards an Appreciation (Cahiers de la Revue Biblique 41), Gabalda, Paris, 1998, 210 p.
6. Yves-Marie Blanchard, Saint Jean (La Bible tout simplement), Éditions de l’Atelier/Éditions Ouvrières, Paris, 1998, 144 p.
7. Christian Cebulj, Ich bin es. Studien zur Identitätsbildung im Johannesevangelium (Stuttgarter Biblische Beiträge 44). Verl. Kath. Bibelwerk, Stuttgart, 2000, 329 p.
8. David E. Orton (ed.), The Composition of John’s Gospel. Selected Studies from Novum Testamentum (Biblical Studies — Volume 2), Brill, Leiden, Boston, Köln, 1999, 276 p.
9. Johan Ferreira, Johannine Ecclesiology (Journal for the Study of the New Testament-Supplement Series 160), Sheffield Academic Press, Sheffield, 1998, 246 p.
10. Konrad Haldimann, Rekonstruktion und Entfaltung. Exegetische Untersuchungen zu Joh 15 und 16 (Beihefte zur Zeitschrift für die neutestamentliche Wissenschaft 104), W. de Gruyter, Berlin, New York, 2000, 444 p.
11. Johannes Nissen & Sigfred Pedersen (edited by), New Readings in John. Literary and Theological Perspectives. Essays from the Scandinavian Conference on the Fourth Gospel in Arhus 1997 (Journal for the Study of the New Testament — Supplement Series 182), Sheffield Academic Press, Sheffield 1999. 269 p.
11. B. Kowalsky présente dans cet ouvrage une lecture exégétique soignée du discours sur le Bon Berger en Jn 10,1-18, de sa place et de sa fonction dans le quatrième évangile. Les premières pages offrent un état de la question à partir de trois ouvrages fondamentaux, ceux de Simonis (1967), de Kiefer (1967) et de Tragan (1973/80). B. K. fait le point de la critique littéraire et présente des statistiques du vocabulaire (pages 60-65) particulièrement intéressantes. Toutefois, dès cette partie de l’analyse, on pourra regretter que la délimitation s’arrête au verset 18.
2L’auteur poursuit ensuite sa recherche sur l’originalité de ce passage par l’étude de la forme. La péricope s’ouvre par la paroimia (10,1-5) et s’achève sur une finale christologique. Les deux dits sur la porte (10,7 et 10,9-10) et les deux dits sur le berger (10,11-13 et 10,14-16) constituent le centre de cet ensemble. La variété des formes littéraires n’empêche pas la cohérence du passage ; ce dernier point est important pour B. K.. Elle poursuit l’analyse de la forme par l’étude des divers acteurs dans les dits positifs (le berger, la porte) et dans les figures en contraste (voleur, mercenaire, etc.). Sur ce dernier point, on pouvait s’attendre à une étude plus ancrée dans les recherches contemporaines, à partir du schéma actantiel de Greimas par exemple, ou selon les principes de la narratologie.
3La deuxième partie de l’ouvrage porte sur le contenu du discours (p. 152-334) étudié sous trois aspects. Dans une première section, l’A. met en évidence les deux niveaux de lecture de ce texte. À un premier niveau du récit, la parole de Jésus s’adresse aux Pharisiens ; à un autre niveau (Metaebene) le discours s’oriente vers la communauté johannique. La situation de la communauté johannique est une clé herméneutique pour entrer dans l’exégèse de ce passage. B. K. adopte ainsi la position de la plupart des commentateurs johanniques à l’heure actuelle.
4La péricope est ensuite située dans le macrocontexte de l’évangile. Avec grand soin l’auteur passe en revue tous les liens possibles avec le chapitre 9 (la guérison de l’aveugle). Elle observe ensuite comment Jn 10,1-18 résonne dans l’ensemble de l’évangile. Ce dernier point (194-226) me paraît important ; je me demande toutefois si l’analyse n’est pas quelque peu bloquée, ici également, par la segmentation du discours au verset 18. La reprise de la thématique en 10,26-29 (mentionnée p. 198) est-elle assez prise en considération, notamment dans le passage sur le don de la vie (203 ss) ?
5B. K. aborde alors l’étude du contexte ecclésiologique. Certes, les quelques pages consacrées à cette question ne peuvent être qu’un aperçu, tant les problèmes sont complexes. Mais il fallait peut-être mieux cerner le qualificatif « ecclésiologique » pour ne pas trop se laisser déborder. Des thèmes trop vastes et souvent très complexes sont abordés successivement dans cette partie de l’analyse. Parler à la fois de la mission, des sacrements, des dimensions christologique et pneumatologique de l’Église, etc. risque de ne conduire qu’à un survol des questions.
6Le chapitre final de cette deuxième partie sur le contenu vise à déterminer la fonction du discours dans le macrocontexte. L’auteur présente tout d’abord l’excellente étude de Mlakuzhyil, puis elle s’attarde aux hypothèses qui ont analysé l’évangile comme un drame. L’A. présente un examen personnel de l’organisation du quatrième évangile et elle montre la fonction du discours sur le bon berger dans la structure d’ensemble.
7Ce livre fut d’abord présenté sous forme de thèse en 1995. L’auteur réussit sans nul doute à convaincre son lecteur de la portée significative du discours sur le bon berger en Jn 10 qu’elle délimite au verset 18. Rédigé avec clarté, ce commentaire est d’un intérêt certain pour la recherche actuelle du quatrième évangile. La fonction et la place des derniers chapitres sur le ministère terrestre (Jn 10-12) dans la narration du quatrième évangile constituent actuellement un lieu d’investigation privilégié. L’étude minutieuse de Beate Kowalski apporte donc sa contribution à ces recherches.
82. Après une introduction d’une quarantaine de pages sur l’importance de la narration johannique, Derek Tovey propose une étude en deux parties, l’une sur la dynamique de la narration, l’autre sur la relation originale du discours johannique à l’histoire. Dans une première partie de l’ouvrage, l’auteur rappelle quelques modèles importants des théories linguistiques de la communication et des modèles d’analyse narrative. Il critique des interprétations trop statiques de la fonction de l’auteur implicite. L’étude de F. K. Stanzel, A Theory of Narrative (Cambridge, Cambridge University Press, 1984), lui semble pouvoir remédier à cette difficulté. Stanzel a en effet proposé une compréhension plus dynamique de la situation narrative et souligné l’interaction des personnages. Il montre en outre comment un même personnage peut occuper plusieurs postes dans l’histoire racontée ; ces différents rôles peuvent être représentés sur un schéma circulaire, le cercle typologique. Tovey s’appuie sur cette hypothèse et l’applique à la question complexe de « l’auteur » qui se cache ou se révèle dans le processus narratif du quatrième évangile ; celui qui façonne et dirige la narration johannique peut en effet être identifié comme narrateur, auteur implicite, disciple bien-aimé ou encore se dévoiler derrière les paroles en « je » ou en « nous ».
9Cette nouvelle perspective fait ressortir les déplacements des personnages de la narration ; de ce point de vue, le récit de l’entretien de Jésus avec Nicodème offre un excellent terrain d’analyse que l’A. prend largement en considération. Au chapitre 3 de l’évangile, le narrateur/auteur implicite se présente tantôt comme un narrateur omniscient, tantôt comme un personnage du discours rapporté. Ainsi, avant le début de l’entretien, le lecteur est informé des sentiments intérieurs de Jésus (2,23-25) par le narrateur omniscient. Il se situe dès lors à l’extérieur de l’histoire (story). À un autre moment de la même narration, le narrateur entre au contraire dans l’histoire ; sa voix et son point de vue se confondent avec ceux des personnages du récit, avec ceux de Jésus ou de Jean-Baptiste, voire avec le point de vue du disciple bien-aimé. Diverses solutions ont été proposées pour l’interprétation du chapitre 3 dans l’évangile de Jean ; la lecture de D. T. déplace les questions et présente une analyse narrative plus dynamique du jeu des personnages.
10Par ailleurs, l’intérêt pour la question du narrateur/auteur implicite ne saurait être posée dans le quatrième évangile sans prendre en compte celle du disciple bien-aimé. Ce personnage occupe une position éminente dans la narration et son rapport à l’histoire ne cesse d’intriguer les lecteurs du récit johannique. Le quatrième évangile présente ce personnage de façon paradoxale, puisqu’il en maintient l’anonymat tout en suggérant des possibilités pour son identification. Parmi les multiples possibilités, il convient de faire une place au lecteur implicite. À la suite d’autres auteurs, D. T. examine à son tour ce jeu du récit qui provoque le lecteur à une lecture interactive ; par un processus de lecture en miroir (reflectorization), le lecteur entre dans le monde de l’histoire (story) pour y voir les choses avec les yeux du disciple bien-aimé (reflector-character). La question de l’identité du disciple bien-aimé sera encore reprise à la fin de l’ouvrage, à propos de son lien avec l’histoire.
11Dans la deuxième partie du livre, l’A. aborde précisément la question des rapports entre la narration johannique et l’histoire. Un premier chapitre en présente l’aspect théorique (170-228) ; un deuxième chapitre examine le récit des vendeurs chassés du temple à la lumière des indications méthodologiques précédemment énoncées. Il s’agit de situer l’originalité narrative du quatrième évangile dans le vaste champ des genres narratifs allant de l’historique à la fiction. Lorsqu’il reprend la discussion sur le plan théorique, D. T. s’appuie sur les analyses du discours, notamment sur l’ouvrage de M. L. Pratt, Toward a Speech-Act Theory of Literary Discourse (Bloomington 1977). Cet auteur montre comment le locuteur cherche non seulement à emporter la conviction de ses lecteurs, mais à susciter leur imagination et leur affect ; il les incite à partager ses sentiments par rapport à l’événement. Le texte devient monstratif (a display text) et le récit tellement vivant que l’on croit y être. D. T. reprend les principes de ces analyses pour montrer comment l’élaboration théologique mise en œuvre dans le quatrième évangile produit une histoire (story), celle d’une figure historique mais interprétée de manière singulière. L’auteur implicite a sélectionné quelques aspects du récit sur le Jésus de l’histoire ; il présente au lecteur implicite son interprétation de la signification réelle et vraie du Jésus historique. La ‘refiguration’ créative de la tradition historique sur Jésus se fait à la lumière de Pâques et sous la mouvance du Paraclet.
12D. T. a voulu présenter le « point de vue » johannique. Il le fait en se reportant à différentes descriptions théoriques de la narrativité. Celles-ci sont intéressantes, d’autant plus que l’auteur ne se contente pas en ce domaine de suivre les sentiers battus, comme le montrent par exemple les références à Stanzel et à Pratt. Mais peut-être fallait-il supprimer certaines longueurs sur la théorie, pour pouvoir davantage développer les applications dans le domaine johannique. Ces défauts tiennent peut-être au genre littéraire de la thèse, dont le livre ne se démarque sans doute pas suffisamment. Par ailleurs, la multiplication du vocabulaire technique nuit parfois à la clarté de l’exposé. En plus d’un passage, D. T. aurait gagné à rejoindre les analyses et le vocabulaire précis donné par Gérard Genette sur la diégèse ou les propositions de Boris Uspensky (à peine mentionné : voir page 24) qui a bien étudié le point de vue évaluatif du narrateur, l’opposition entre le mode d’exposition du ‘dire’(telling) et du ‘montrer’(showing). Malgré ces remarques et malgré la complexité de certains passages, le livre est important pour définir l’art narratif spécifique du quatrième évangile, le rôle de l’auteur implicite, la portée significative et la fonction du disciple bien-aimé. Les pages finales sont particulièrement décisives pour la réflexion sur la présentation johannique de l’histoire de Jésus.
133. Le présent travail, Jesus als Lebenspender, a d’abord été présenté comme dissertation doctorale à Göttingen amorcée sous la direction du regretté G. Strecker, puis de E. Lohse. Avec sagacité, l’auteur se penche sur l’interprétation des récits de miracles dans l’histoire de la tradition johannique.
14Dans un premier temps, Michael Labahn aborde la question de la Form-Kritik et Form-Geschichte pour le quatrième évangile : c’est une question délicate et très actuelle de l’exégèse johannique. Un des principaux objectifs du livre consiste précisément à démêler les questions qui se posent sur le plan méthodologique (Critique de la forme, formation et Sitz im Leben du quatrième évangile, tradition et rédaction) pour ouvrir les recherches à la « composition » du quatrième évangile. La problématique est posée tant sur le plan synchronique que diachronique et constamment articulée sur l’agencement de ces deux niveaux. Les miracles johanniques constituent un excellent terrain d’analyse pour la Formgeschichte johannique (ein Testfall : p. 118).
15Dans la deuxième partie de l’ouvrage (c’est la partie principale aux pages 120-465), l’auteur analyse minutieusement les différents miracles johanniques : le récit des noces de Cana (Jn 2,1ss), la guérison du fils de l’officier royal (4,46ss), la guérison du paralysé au chapitre 5, les récits de nourriture et de marche sur les eaux du chapitre 6, la guérison de l’aveugle en Jn 9 et la résurrection de Lazare en Jn 11. Il faut saluer d’emblée l’excellente connaissance du dossier. Pour chacun de ces passages, le lecteur trouve une présentation soignée de la délimitation et du contexte dans lesquels sont insérées les péricopes, une comparaison attentive avec les récits synoptiques lorsque les textes l’exigent, une recherche du contexte historique et religieux qui apporte un éclairage nouveau pour la recherche sur le milieu johannique. On ne peut mentionner toutes les références intéressantes ; j’ai été particulièrement sensible à l’enracinement hellénistique (par exemple pour le récit des noces de Cana).
16Un chapitre final présente les principaux résultats des études de textes et reprend la problématique générale de l’ouvrage. Les analyses textuelles sont détaillées, sans que l’auteur ne perde de vue sa préoccupation initiale : l’intérêt pour la composition narrative et le lien avec le motif du don de la vie par Jésus. Pour proclamer la bonne nouvelle de la venue de Jésus, Jean puise à la tradition des miracles. Il ne se contente pas toutefois de choisir quelques-uns des signes, mais il les fait entrer dans une composition narrative de manière originale. Les analyses de M. L. font particulièrement bien ressortir comment l’évangéliste ‘contextualise et interprète’ les récits de miracles par différents moyens de technique narrative ; ainsi les liens tissés entre les récits et les dialogues ou les discours, l’organisation de cycles géographiques (par exemple de Cana à Cana aux chapitres 2 à 4), la communication qui s’établit avec le lecteur tout au long du récit. On trouvera dans l’exégèse de chaque péricope et dans le bilan final (voir notamment pages 488 s) la valorisation de cet art narratif spécifique de Jean où se répondent les récits et les discours.
17Un article récent du même auteur permet de faire le point sur cette question très actuelle : M. Labahn, « Between Tradition and Literary Art. The Miracle Tradition in the Fourth Gospel », Biblica 80 (1999), 178-203. Le nouvel ouvrage de M. Labahn qui vient de paraître applique cette même recherche au récit et discours du Pain de vie (Jn 6) : voir M. Labahn, Offenbarung in Zeichen und Wort. Untersuchungen zur Vorgeschichte von Joh 6,1-25a und seiner Rezeption in der Brotrede (Wissenschaflliche Untersuchungen zum Neuen Testament 2. Reihe 117), Mohr Siebeck, Tübingen, 2000.
18Dans l’ouvrage ici présenté, l’auteur met en relief le fil conducteur qui relie les récits de miracles les uns aux autres dans l’interprétation johannique. Par le thème de la vie, Jean centre l’attention sur Jésus. En lui, c’est la Vie même qui se donne, selon le sous-titre de l’ouvrage, Jesus als Lebenspender. Lors du premier signe de Cana, les disciples croient non pas dans le miracle ou dans le thaumaturge, mais dans le Fils envoyé. Si Jésus y manifeste sa doxa divine (2,11) c’est parce qu’il est venu pour le salut du monde, c’est-à-dire pour donner la vie (fur die Spende des Leben : p. 161). Tout l’art narratif du quatrième évangile consiste à établir un lien entre la christologie, la sotériologie et l’eschatologie. Jésus est présenté comme le dispensateur de la vie, de manière « absolue » : il est la vie, au point que être en relation avec lui, c’est avoir part à la vie, « so dass … Anteil an ihm Anteil am ewigen Leben … bedeutet » (voir p. 501).
194. Qu’un éminent exégète de l’Ancien Testament se penche sur le quatrième évangile pour y faire découvrir l’éclairage des Écritures surprendra peut-être, suscitera l’intérêt en tout état de cause. Les premières pages de Claus Westermann trouveront facilement l’adhésion des lecteurs sur les affirmations de la réciprocité entre l’Ancien Testament et le Nouveau Testament. L’histoire même de Jésus ne saurait se déchiffrer et se comprendre indépendamment de son enracinement dans l’Ancien Testament. Dans la lignée des prophètes, Jésus est envoyé par Dieu. Il s’adresse au même peuple que celui des prophètes et lui parle le même langage, tant par ses actions que par ses paroles. Le Dieu auquel Jésus fait référence renvoie au Dieu de l’Ancien Testament. Par sa structure narrative enfin, l’évangile de Jean est marqué par les récits de l’Ancien Testament concernant l’œuvre de Dieu.
20C. W. examine ensuite le texte johannique dans sa composition d’ensemble et dans sa dimension narrative. Il fait tout d’abord certaines observations sur le récit long. Comme dans les autres évangiles, le ministère de Jésus (1-12) est organisé chez Jean en différentes journées. La narration est liée à des lieux précis, selon un fonctionnement habituel de la tradition orale : comme on évoque le puits de Jacob (Jn 4,5-6), on se remémore les lieux fréquentés par Jésus. Les différents récits sur Jésus durant son ministère sont orientés vers la passion et reliés entre eux par des micro-récits (par exemple le récit sur Jean-Baptiste en ouverture au ministère). Par ailleurs, le récit long est rythmé par des énoncés très concis sur les réactions suscitées par les paroles et les œuvres de Jésus. Bâties sur un même modèle, ces notices deviennent de plus en plus intenses lorsqu’il s’agit de décrire l’attitude des adversaires, leur désir d’arrêter Jésus, de s’en saisir (7,32.45), pour finalement le conduire à la mort par crainte du tumulte (11,47-53). Ces comptes rendus introduisent ou concluent les discours et les descriptions d’une action. D’une simple phrase (p. 9), C. W. compare leur fonctionnement au livre de Jérémie (« … they resemble parts of the book of Jeremiah, in which the words and actions lead to a passion narrative as well »).
21L’auteur s’attarde ensuite aux miracles de Jésus, comparables aux récits de guérison des prophètes. En outre, et l’A. y insiste, ils se comprennent à la lumière des passages psalmiques sur la délivrance des justes qui ont invoqué le Seigneur et ont été guéris. L’accent porte sur la nouvelle relation instaurée entre celui qui est guéri et celui qui l’a pris en compassion. Dans les psaumes comme dans les récits de guérison de Jean, il ne s’agit pas (p. 12), d’une foi cérébrale, mais d’une foi qui embrasse toute la personne. Quant aux discours, ils ne sont pas des ‘discours’ au sens rhétorique du terme : Jésus se situe au même niveau que ses auditeurs. Il est vulnérable, constamment mis au défi, exposé aux questions et aux provocations : « His speaking is part of the humiliation of the Son of God » (p. 15). On reconnaîtra peut-être difficilement le Jésus de Jean dans cette présentation. Mais on trouve dans ces pages des remarques fort pertinentes sur la façon dont Jean présente Jésus en dialogue et en discussion, sur l’organisation de ces entretiens dans l’ensemble de l’évangile et de manière générale, sur les distinctions entre les différents types de discours.
22À la fin de ce chapitre sur la composition de l’évangile, l’auteur aboutit à une conclusion un peu étonnante. Elle mérite que l’on s’y attarde, car elle est essentielle dans ce livre et elle retiendra certainement l’attention des critiques par les problèmes qu’elle pose. Lors de sa première composition, le quatrième évangile aurait été un récit organisé selon un itinéraire biographique dans lequel l’évangéliste aurait inséré les paroles et les gestes de Jésus jusqu’à la passion. À son étape initiale, ce récit johannique était encore rattaché aux situations premières des événements, parfois complété par quelques notes. En revanche, les dialogues de controverses et le chapitre 17 ne relèveraient pas de la même veine ; insérés plus tardivement, ils ont marqué le langage du Jésus johannique par leurs développements gnostiques. L’évangile en son entier n’a pas subi l’influence gnostique ; cette influence serait limitée au complexe des dialogues de controverses et dans des versets isolés insérés ultérieurement. : « The Gospel without this complex provides the story of Jesus of Nazareth without gnostic influence » (en italiques dans le texte, p. 22). Très importante dans la perspective d’ensemble du livre, cette phrase conclusive du chapitre 2 (avant l’excursus) conduit au chapitre 3 « The Controversy Dialogues ».
23Dans ce troisième chapitre, C. W. attire l’attention sur les cinq passages suivants de controverses (5,17-47 ; 6, 25-65 ; 7, 14-30 (36), 8,12-59 ; 10,22-39) qui sont à considérer comme des éléments « étrangers » dans l’évangile de Jean. Il s’agirait du langage « gnostique » de Jésus, importé par une deuxième strate de la composition johannique. Dans la première strate de l’évangile le langage (de Jésus) était ouvert et positif. Dans les discours de controverses introduits selon C. W. par des éléments gnostiques, le ton serait devenu dur et exclusif, marqué par les contrastes. Jésus définit la non-foi plutôt que la foi : « vous ne connaissez ni moi, ni mon Père ; vous êtes d’en bas ; de ce monde ; du diable … ». Selon C. W., le changement de ton dans ces passages doit être attribué à l’influence gnostique. On y reconnaît la pensée dualiste qui détermine la réalité en deux espaces, le monde d’en bas et le monde d’en haut. Lors de ses conversations avec les individus dans le récit évangélique premier, Jésus se révélait de manière positive. À l’opposé, le Jésus des controverses exclut et repousse. Lors de la première étape, toute l’attention était dirigée vers l’histoire de Dieu qui envoie Jésus, de la même manière qu’il a envoyé les prophètes, une histoire où Jésus fait l’œuvre de Dieu. Dans la deuxième strate, les paroles de Jésus sont elles-aussi centrées sur un motif décisif, mais elles ne disent pas la relation de Jésus à Dieu ; elles disent la relation de Jésus à ses interlocuteurs et insistent sur l’hostilité qui conduit vers l’opposition, vers la condamnation. Jésus n’invite pas ; il condamne et rejette (p. 56).
24L’auteur a raison de souligner l’importance des relations entre l’Ancien et le Nouveau Testament et de vouloir secouer l’exégèse johannique sur ce point. J’avoue toutefois avoir été plutôt étonnée par l’ensemble, notamment par l’absence de démonstration et de discussion avec d’autres critiques. De nombreuses études ont en effet accordé une grande importance aux questions abordées par C. W., mais elles ne sont pas mentionnées. Par ailleurs et surtout, dès l’introduction, l’A. place le lecteur devant un point de vue nettement affirmé sur l’importance de nombreux éléments gnostiques dans l’évangile de Jean et sur les passages ainsi qualifiés. Il présente dans un tableau le prologue de l’évangile (Jn 1,1-18) où il place en colonnes le prologue (initial) de l’évangile et les révisions gnostiques. Dès ces premières pages, l’absence notoire d’argumentation ne manque pas de surprendre. Le qualificatif « gnostique » n’est jamais examiné attentivement et l’on peut se demander s’il correspond toujours à ce que C. W. définit comme tel. On trouvera en épilogue à la fin du volume six positions d’auteurs (R. Bultmann, E. Käsemann, G. Bornkamm, L. Schottroff, K. Wengst, H. Thyen) qui ont abordé plus ou moins amplement la question des relations de Jean avec la gnose.
25En définitive, ce spécialiste de l’Ancien Testament entraîne avec raison et avec finesse son lecteur vers une meilleure appréciation du langage johannique à la lumière des Écritures. Jésus connaît et parle ce même langage. Mais peut-on classer toutes les originalités johanniques dans le registre de la gnose ? Avant de conclure à deux langages de Jésus dans l’évangile de Jean, l’un biblique (où l’on retrouve une atmosphère d’Ancien Testament : voir p. 62,3 par exemple) et l’autre gnostique, ne faudrait-il pas davantage analyser les textes proposés et tenir compte des apports scientifiques sur les étapes de la tradition et de la rédaction ? La question de l’originalité du langage de Jésus dans le quatrième évangile reste une question ouverte, mais la réponse ne saurait se situer dans des positions trop tranchées ni insuffisamment démontrées.
265. Le long titre de l’ouvrage d’Edmund Little correspond simplement et exactement au plan du livre organisé en deux parties. La première présente les échos de l’Ancien Testament dans le récit de la transformation de l’eau en vin à Cana de Galilée ; la deuxième procède de la même façon pour le miracle des pains et des poissons. D’emblée on est surpris par la manière de faire, on oserait presque dire par l’absence de rigueur méthodologique. L’auteur se livre en effet à une simple accumulation de concordances où il renvoie en vrac à l’ensemble de la bible. Il juxtapose ensuite simplement ses trouvailles dans de petits paragraphes sans lien les uns avec les autres.
27La concordance s’établit d’abord à partir du thème du ‘vin’ dans l’Écriture. Edmund Little fait correspondre ainsi le motif de l’absence de vin à Cana avec des contextes où l’on devrait s’attendre à avoir du vin, par exemple avec celui du récit de l’hospitalité d’Abraham au chêne de Mambré ou encore avec des épisodes sur le temps de la famine en Israël, etc. La recherche des « échos » porte non seulement sur le vocabulaire mais sur des thèmes, ce dernier terme étant à comprendre dans un sens très large, beaucoup trop étendu. Il propose cette observation thématique dans cinq paragraphes, dont les titres disent l’originalité de la démarche : le pouvoir sur l’eau, la transformation, la nourriture, la multiplication, l’abondance et la purification. Prenons simplement l’exemple du premier paragraphe. Les textes de l’Ancien Testament où le pouvoir sur l’eau est mis en relief sont variés ; l’auteur mentionne successivement divers motifs bibliques : l’Esprit sur les eaux de la création, le déluge, la pluie bienfaisante, la destruction des Égyptiens dans la mer, le Jourdain, etc.. Les correspondances ne sont pas insignifiantes et loin d’être inintéressantes, mais aucun critère de discernement ne permet de maîtriser l’effet de concordance ; sa validité pour l’interprétation du texte johannique reste donc problématique.
28Pour le récit du miracle des pains et des poissons l’auteur suit le même parcours. Chaque terme est présenté « en écho » à quelques passages de l’Ancien Testament ; ce système aboutit à de curieuses mises en symétrie.
29L’idée de développer et d’ouvrir le processus des relectures de l’Ancien Testament dans les récits johanniques est excellente, mais la méthode pour y parvenir ne saurait être aussi peu maîtrisée. Les allusions à l’Ancien Testament considéré comme une sorte de « fourre-tout » sont noyées dans d’impressionnantes listes d’« échos » qui laissent pour le moins songeur. Si cet ouvrage contient de bonnes suggestions pour dire l’importance de l’Ancien Testament dans l’écriture johannique, il risque de décourager le lecteur par son foisonnement incontrôlé.
306. Y.-M. Blanchard propose une initiation à la lecture de l’évangile, dans le ton simple voulu par la collection « Tout simplement », collection désormais bien connue et appréciée. Après une courte introduction, l’auteur aborde en huit courts chapitres des points importants du quatrième évangile : le disciple, la communauté, les signes, la gloire, le Fils, l’Esprit, l’Église, le monde. L’auteur part d’une des conclusions de l’évangéliste en Jn 20,30-31 et propose de regrouper les chapitres de son livre par groupes de deux. Les principales questions sont abordées, et le lecteur trouvera dans cette plaquette des éléments sérieux d’introduction au quatrième évangile. Y. M. B. réussit aussi à présenter le quatrième évangile dans les premiers siècles du christianisme : on notera les notations particulières sur Irénée, Justin, etc. Elles ne nous étonnent pas sous la plume de ce spécialiste d’Irénée de Lyon ; l’auteur fait profiter ses lecteurs de sa compétence avec simplicité et clarté dans un ouvrage bien écrit, qui se devait d’être court comme le veut la collection.
31Dans cette initiation au quatrième évangile, on peut regretter toutefois l’absence (ou presque) d’un aspect pourtant essentiel de la théologie johannique. À mon sens, Y. M. B. ne mentionne pas assez la référence au Père et à la christologie de l’Envoyé dans le quatrième évangile. On trouve çà et là quelques éléments (p. 88 par exemple et dans le chapitre consacré au Fils), mais je pense qu’il fallait accorder plus d’importance à ces données. Elles traversent le quatrième évangile et cette accentuation le distingue fortement des trois synoptiques. Par ailleurs, quelques points sont traités de manière incomplète, comme la question du dualisme (p. 134), ou l’originalité de l’expression le Fils de l’homme (la référence à Dn 7 doit être nuancée pour ce qui concerne le quatrième évangile et les parallèles avec les synoptiques mieux différenciés).
32Ces remarques n’enlèvent rien à la valeur du livre. On ne saurait tout aborder, surtout en si peu d’espace, et les choix restent toujours sujets à discussion. Cet ouvrage rendra assurément service au lecteur-croyant moderne ; ce dernier y trouvera une présentation claire et soignée, des réponses à bien des questions qu’il se pose à propos d’un évangile dont la singularité du témoignage ne cessera d’étonner.
337. C. Cebulj propose une nouvelle interprétation des dits egô eimi qui jalonnent le quatrième évangile. Ces énoncés mettent en relief la « haute christologie » comme le souligne depuis longtemps la critique exégétique. Mais C. C. entreprend de lire ces formules et leur fonction dans le mouvement de l’évangile, à la lumière des principes sociologiques. Il retient en particulier le processus de la « stigmatisation », de l’auto-stigmatisation, par lequel un groupe définit son identité. Les énoncés « moi, je suis » révèlent non seulement la personnalité du Jésus johannique, mais en même temps l’identité du groupe johannique.
34L’A. commence par établir un status quaestionis ; après avoir observé et rappelé l’importance de l’expression egô eimi dans la littérature hellénistique et dans l’Ancien Testament, il observe le fonctionnement des dits egô eimi du point de vue de l’analyse littéraire sociologique. En guise d’introduction au corpus johannique, il rappelle brièvement les principaux éléments concernant la chronologie des écrits attribués à Jean, sans trop entrer dans la discussion ; il se situe dans le cadre majoritaire de la critique à l’heure actuelle, c’est-à-dire en faveur de la postérité des épîtres par rapport à l’évangile (pages 60-80 ; pour d’autres positions, voir dans le présent Bulletin, les ouvrages de J. Frey).
35L’auteur indique ensuite ses sources et les auteurs qui constitueront la base de sa recherche dans le domaine de l’analyse socio-littéraire. On peut nommer les travaux de G. Theissen, mais aussi pour le fonctionnement plus particulier de la stigmatisation (aux pages 87 ss), les recherches de Erving Goffman (l’ouvrage souvent cité a sans doute été oublié dans la bibliographie) et de Howard Becker. J’ajoute, pour les lecteurs intéressés, l’article de M. N. Ebertz, « Le stigmate du mouvement charismatique autour de Jésus de Nazareth », Social Compass 39, 1992, 255-273. Des études sociologiques de la déviance et de l’exclusion ont analysé ce phénomène de la stigmatisation par lequel un groupe exclu se construit progressivement une nouvelle identité. Comment s’applique-t-il au groupe johannique ? Après l’exclusion de la synagogue, le processus identitaire du groupe johannique s’élabore dans un cadre conflictuel, au niveau sociologique et religieux. Cette recherche d’identité se projette dans la présentation de la vie et des œuvres de Jésus. En conséquence les dits egô eimi jouent un rôle important à un double niveau. Ils expriment l’identité du Jésus johannique en corrélation avec le renforcement identitaire du groupe johannique (pages 83-94).
36L’analyse proprement dite commence au chapitre 4, avec une présentation de l’expression caractéristique de l’exclusion du groupe johannique par la synagogue (aposunagôgos en Jn 9,22 ; 12, 42 ; 16,2) suivie d’une courte présentation des dits egô eimi dans l’évangile de Jean. Ces derniers sont répartis en trois types de formules (absolues, anaphoriques, prédicatives), le troisième groupe étant le plus expressif.
37Le chapitre 5 examine chacun des dits egô eimi dans le contexte de l’évangile. Ces dits permettent de voir comment le groupe johannique a réagi à l’exclusion de la synagogue, comment il s’est défini et « stigmatisé », mais aussi comment ce groupe gère et construit progressivement son image identitaire (stigma management). À l’examen de chacune de ces formules, la thèse de l’A. se renforce. Dans la stratégie narrative de l’évangéliste, certains dits egô eimi montrent comment le groupe johannique a surmonté la séparation de la synagogue ; d’autres énoncés egô eimi relèvent plutôt d’une rédaction ultérieure et manifestent comment le groupe johannique a renforcé sa cohésion interne, à un stade final de la rédaction johannique. Cette conclusion s’appuie sur les dits egô eimi de Jn 15 situés dans le contexte du schisme interne au groupe johannique ; ce moment est attesté par la première épître de Jean : voir 1 Jn 2,19.
38Dans un dernier chapitre, C. C. souligne l’impact d’une relecture des dits egô eimi dans la ligne de la théologie sapientiale. Jésus est présenté avec l’autorité de la Sagesse personnifiée.
39Toutes les études consacrées à l’étude de cette expression caractéristique du Jésus johannique ont surtout montré son intérêt christologique. Le travail de ce jeune auteur mérite l’attention des chercheurs, car il offre une voie nouvelle qu’il conduit vers des analyses pertinentes ; les critiques apprécieront.
408. Dans la série Readers in Biblical Studies — Volume 2, les éditions Brill ont pris l’heureuse initiative de rassembler, sous la direction de David E. Orton, une série d’articles parus dans la revue Novum Testamentum, de 1966 à 1985, sur la composition de l’évangile de Jean. Chacune de ces douze études porte en effet sur les origines, le but ou la composition littéraire du quatrième évangile. Le lecteur trouvera dans cet ouvrage un choix de travaux qui ont joué un rôle décisif dans les recherches johanniques de ces dernières années. Les noms et des éléments du titre suffiront à évoquer la pertinence de cette sélection, la plupart des articles étant aujourd’hui reconnus comme des « classiques » : H. M. Teeple sur les relations de Qumran et les origines du quatrième évangile, C. F. D. Moule sur l’individualisme du quatrième évangile à lire en lien avec une interprétation originale de l’eschatologie « réalisée », H. Ridderbos sur la structure et la portée du prologue, A. Wind, sur la destination et le but du quatrième évangile, P. Borgen sur le Logos, véritable lumière, J. A. Grassi, sur les Noces de Cana, R. Kysar à propos d’un consensus sur les sources du quatrième évangile, J. D. Purvis sur les Samaritains, P. S. Minear sur le Disciple bien-aimé, J. J. O’Rourke au sujet des commentaires éditoriaux qui jalonnent l’évangile de Jean, J. Ashton sur l’identité et la fonction des « Juifs », B. Grigsby sur la piscine de Siloé.
41L’ouvrage permet d’avoir sous la main des articles importants. Il manifeste également la dynamique des études johanniques et montre l’évolution de la recherche en ce domaine durant ces dernières années. D’une part, l’un ou l’autre d’entre eux retrace brièvement les grandes avenues des investigations depuis Bultmann : Ridderbos, Kysar, Purvis, etc. D’autre part, le lecteur s’apercevra vite de la pertinence de ces travaux pour la recherche actuelle ; en effet ces études contiennent souvent à l’état embryonnaire des éléments de recherche qui ont été décisifs aux alentours des années 80. J’ai retenu quelques points intéressants : sur la relation de Jean aux synoptiques (71), sur les Juifs (65.94), sur Qumran (74), sur l’eschatologie (21), sur la composition originale de cet évangile (130).
429. Le présent ouvrage, Johannine Ecclesiology, J. Ferreira, provient d’une dissertation doctorale sous la direction de M. S. Lattke. Les pages d’introduction établissent un rapide status quaestionis concernant l’ecclésiologie johannique ; mais l’ensemble du travail se présente plutôt comme une exégèse de la prière de Jésus en Jn 17. Cette péricope est examinée selon les étapes habituelles de l’analyse (contexte, structure, différentes parties) ; l’auteur consacre ensuite une vingtaine de pages au thème de la gloire et une trentaine de pages au motif de l’envoi. En conclusion, Johan Ferreira affirme que le quatrième évangile accorde une place éminente à l’ecclésiologie en lui donnant des contours particuliers.
43Certes la célèbre prière de Jésus doit retenir l’attention de celui qui se préoccupe de l’ecclésiologie johannique, cette dernière étant comprise au sens large où J. F. la définit (relations de Jésus à la communauté des disciples) ; mais on pouvait attendre sur ce sujet des développements plus conséquents sur l’ecclésiologie johannique et une recherche plus directement liée à la question. L’auteur se prémunit contre ces critiques en introduction, mais sans véritables justifications. J. F. centre sa recherche sur le chapitre 17 du quatrième évangile et exclut simplement de son champ d’investigation les épîtres de Jean ou d’autres passages de l’évangile. Depuis quelques années pourtant, les recherches sur la communauté johannique se sont largement développées ; les traces de l’existence et de la vitalité de ce groupe se laissent deviner dans de nombreux passages du quatrième évangile ou des épîtres de Jean. On ne saurait donc étudier l’ecclésiologie johannique à travers le seul chapitre 17 de l’évangile de Jean, ni le considérer comme une entité isolée. Le titre du livre risque dès lors d’égarer les lecteurs ; cette étude de Jn 17 apporte une contribution aux recherches sur l’ecclésiologie johannique.
4410. À l’inverse du précédent, le présent ouvrage de K. Haldimann indique clairement en sous-titre le type de recherche auquel le lecteur doit s’attendre, puisqu’il propose une exégèse des chapitres 15 et 16 du quatrième évangile. Dès les premiers chapitres, K. H. situe sa recherche sur le plan méthodologique. Dans ces pages introductives, l’auteur souhaite entrer dans la confrontation des méthodes et marquer sa recherche par un double intérêt, à la fois pour les analyses linguistiques portées par les théories de la communication (voir 43-93) et pour l’analyse rédactionnelle.
45Les présupposés méthodologiques étant posés, tant sur la théorie du texte (1-93) que sur la structure de Jn 15 et 16 comme discours d’adieux, l’auteur adopte un plan très systématique, (trop peut-être ?), pour l’interprétation de chaque péricope. L’analyse des différents passages procède selon un schéma identique : réflexion sur la structure du passage, puis commentaire des diverses unités, verset par verset. L’étude est précise, bien documentée ; les notes importantes manifestent une excellente connaissance du dossier bibliographique. Le lecteur trouvera dans ces pages l’essentiel des problèmes posés par tel ou tel passage de Jn 15-16.
46Le chapitre 10 propose une présentation plus synthétique de l’ensemble des chapitres 15-16 comme deuxième discours d’adieux, après Jn 13,31-14,31. K. H. divise cette partie conclusive en deux grands points, distinguant l’analyse littéraire de la partie théologique. La partie littéraire résume les analyses des différentes péricopes : le lecteur peut commencer à lire ces quelques pages pour avoir une vue d’ensemble des deux chapitres johanniques et pour connaître le processus rédactionnel qui les aurait mis en œuvre selon l’hypothèse de K. H.
47Dans la partie théologique du chapitre conclusif (412-430), l’auteur retient le thème théologique de l’incarnation qu’il présente en trois points successifs : la communauté et le monde, l’amour, la création. Dans ces quelques pages fort intéressantes, l’auteur dépasse le cadre de l’analyse littéraire des seuls chapitres 15-16. Il les interprète en lien avec le premier discours d’adieux et dans le mouvement d’ensemble du quatrième évangile. Toutefois, alors que les deux premiers aspects de cette partie théologique (la communauté et le monde, l’amour) viennent judicieusement compléter les analyses, les dernières pages du livre sur l’Incarnation-création à partir de la formule egô eimi de Jn 6,35 nous paraissent une pièce rapportée, malgré les efforts (p. 429) de l’auteur pour la situer dans le cadre de la présente recherche.
48En définitive, l’ensemble du livre rendra service à tous ceux, exégètes ou théologiens, qui chercheront à comprendre par le menu détail ces longs chapitres 15-16 du quatrième évangile ; ils auront en mains les éléments essentiels et récents du dossier.
4911. Les articles rassemblés dans ce volume par J. Nissen et S. Pedersen ont pour origine le Congrès tenu en mai 1997 à l’Université de Ahrus, sur le quatrième évangile. En voici le contenu : H. K. Nielsen : la recherche johannique ; G. Hallbäck : l’évangile de Jean comme littérature ; R. Kieffer : le lecteur implicite dans l’évangile de Jean ; K. Nielsen : l’imagerie de l’Ancien Testament en Jean ; T. S. Dokka : l’ironie et le sectarisme dans l’évangile de Jean ; I. Dunderberg : les anomalies johanniques et les synoptiques ; A. Pilgaard : Qumran et l’évangile de Jean ; B. Olsson : Dieu dans les écrits johanniques ; S. Pedersen : Anti-Judaïsme dans l’évangile de Jean : Jn 8 ; J. Nissen : Communauté et éthique dans l’évangile de Jean ; ibid. Mission dans le quatrième évangile. Perspectives historiques et herméneutiques ; H. K. Nielsen : l’interprétation johannique de la mort de Jésus.
II – Quatrième évangile et épîtres de Jean (12 à 16)
13. Giorgio Giurisato, Struttura e teologia della prima lettera di Giovanni. Analisi letteraria et retorica, contenuto teologico (Analecta Biblica 138). Editrice Pontificio Istituto Biblico, Rome, 1998, 720 p. et un dépliant du texte grec disposé en stiques.
14. Jörg Frey, Die johanneische Eschatologie II. Das johanneische Zeitverständis (Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament 110), Mohr Siebeck, Tübingen, 1998, 369 p.
15. Jörg Frey, Die johanneische Eschatologie III. Die eschatologische Verkündigung (Wissenschaftliche Untersuchungen zum Neuen Testament 117), Mohr Siebeck, Tübingen, 2000, 600 p.
16. Klaus Scholtissek, In ihm sein und bleiben. Die Sprache der Immanenz in den johanneischen Schriften (Herders Biblische Studien 21). Herder, Freiburg, 2000, 436 p.
5012. J. Rinke, Kerygma und Autopsie. — À la fin du quatrième évangile, Jésus promet la béatitude à celui qui croit sans avoir vu. Comment comprendre cet abandon du motif de la vue, alors que voir signifie croire non seulement dans l’évangile, mais également dans la première épître de Jean ? Lorsqu’ils indiquent leur projet d’écriture, notamment en introduction ou en conclusion à leurs livres, les auteurs johanniques (de Jn et de 1 Jn) insistent précisément sur le privilège du témoignage des yeux, de l’autopsie (du grec : avoir vu opsè ; par soi-même autos), sur son lien avec l’annonce kérygmatique, et donc sur l’importance de la communication avec le lecteur. J. Rinke se propose de retracer l’histoire de ce privilège de l’‘autopsie’dans les passages où s’exprime le projet de communication de l’auteur au lecteur. Dans les deux chapitres d’introduction, il pose les principes méthodologiques et indique notamment son intérêt pour le processus de communication.
51Une première partie de l’ouvrage (chapitres III-VI) porte sur l’évangile. J. R. commence par prendre en compte cinq passages de l’évangile où l’auteur johannique communique de manière explicite avec ses lecteurs, à savoir les deux épilogues, celui de l’évangéliste (E) en 20,30-31 et celui du rédacteur en 21,24-25. Il examine ensuite le témoignage du disciple au pied de la croix (19,35) puis Jn 3,11. Il aboutit enfin à Jn 1,14-18. Nous pouvons précisément partir de ce dernier texte et retenir la position de l’A. par rapport au prologue, puisqu’elle servira de base à la suite de sa démonstration. Le privilège du « voir » n’y est pas négligé, mais rectifié. Au « nous, nous avons vu » (1,14) le texte actuel du prologue juxtapose un « nous tous nous avons reçu » (1,16). La suite de l’évangile s’inscrit précisément dans cette rectification d’un « voir » offert à tous. Cette correction se manifeste dans le travail de relecture des signes (sèmeia) et dans la reconsidération du titre de Messie. Les sèmeia ne sont pas (plus) seulement des signes de la venue du Messie, mais des œuvres (erga) par lesquelles se manifeste le Fils de Dieu. Le titre de Messie est relayé par celui de Fils de Dieu qui le corrige et le complète.
52Dans une deuxième partie (chapitres VII à IX), l’auteur étudie le projet et le processus de communication dans la première épître de Jean (chapitres VII). Le prologue de l’épître insiste également (faut-il dire « de nouveau » ?) sur le privilège du « voir ». Pour cet auteur, les épîtres johanniques sont postérieures au quatrième évangile ; il montre cette évolution dans la présentation des titres christologiques. Comme il l’a fait pour l’évangile, J. R. analyse ces titres qui se présentent sous d’autres formes (Jésus, sauveur du monde, vrai Dieu, Messie-Christ, Fils de Dieu) ou qui sont différemment accentués. Il examine ensuite plus en détail trois passages (2,18-27 ; 3,23-4,21 et 5,1-13) où l’épître accentue la sotériologie. Ces différentes études de l’évangile et de la première épître, des projets kérygmatiques de leurs auteurs et de leurs stratégies de communications conduisent l’A. à s’interroger d’une manière originale sur la situation de la communauté johannique. C’est l’objectif de la troisième partie. Il montre la progression du groupe johannique et son enracinement dans la tradition. L’histoire communautaire est marquée par des déchirements (séparation de la synagogue pour l’évangile ; schisme à l’intérieur de la communauté pour la première épître), mais elle ne cesse d’être en mouvement pour une juste expression christologique.
53L’ouvrage provient d’une thèse soutenue à Würzburg sous la direction de H. J. Klauck. Le sujet est traité avec vigueur et dans une démonstration équilibrée, selon un rythme très soutenu ; à chaque étape de l’analyse, l’auteur fait le point et ouvre aux questionnements suivants. Tous les résultats ne sont sans doute pas également convaincants ; je pense en particulier à l’interprétation du « nous/nous tous » dans le prologue de l’évangile et aux conclusions proposées pour les différentes interprétations des titres christologiques du quatrième évangile et des épîtres. Il n’en demeure pas moins que cette thèse et ces hypothèses engagent la réflexion et suggèrent à tout le moins des discussions intéressantes.
5413. Ce commentaire de la première épître de Jean par G. Giurisato est remarquable à plus d’un point de vue. L’auteur propose d’abord une histoire de la recherche particulièrement minutieuse et documentée, répartie en quatre périodes : du début jusqu’à la Réforme, de 1500 à 1700, les commentaires du xixe siècle, puis ceux du xxe siècle. La richesse et de la rareté de la documentation dans ces premières pages font déjà de l’ouvrage une mine précieuse pour la recherche critique.
55Chaque séquence est ensuite examinée par une analyse littéraire précise dans la ligne des recherches de A. Vanhoye (disposition en stiques, inclusions, mots-crochets, thématique, termes importants, transitions, répétitions, alternance des genres littéraires, figures, … etc.). L’analyse rhétorique de la chrie a retenu l’attention de notre auteur. Il retrouve les trois éléments caractéristiques de ce genre rhétorique (la chrie initiale, l’exhortation et l’élaboration) dans chacune des unités textuelles.
56Le dernier chapitre porte sur la cohérence et la progression des péricopes. G. Giurisato propose un plan que je rejoins en bien des points, bien que par une méthode différente. Le prologue (1,1-4) et l’épilogue (5,18-21) se correspondent. Sept péricopes composent le corps de l’épître : I. 1,5-2,6 ; II. 2,7-17 ; III. 2,18-28 ; IV. 2,29-3,10 ; V. 3,11-22 ; VI. 3,23 — 5,4 ; VII. 5,5-17.
57L’ouvrage me paraît désormais incontournable pour les études sur la première lettre de Jean, pour la compréhension de la structure ainsi que pour le lien entre la rhétorique et la visée théologique.
5814. Le premier volume, Die Johanneische Eschatologie, par J. Frey a été recensé dans le précédent Bulletin johannique en 1998, (RSR 86/2, 309-912). Le volume II, et déjà le volume III, de l’œuvre importante que Jörg Frey consacre à l’eschatologie johannique sont utilisés par les spécialistes. Il est temps de les recenser.
59Le deuxième volume aborde la question du temps dans le quatrième évangile, à partir d’un examen minutieux et détaillé du vocabulaire temporel (jusqu’à la p. 246). Ces analyses serrées sont constamment accompagnées d’une réflexion herméneutique. J. F. la ressaisit en fin de volume, une première fois dans les paragraphes 10-11, une deuxième fois dans la partie conclusive de l’ouvrage ; ces dernières pages sur la compréhension du temps johannique préparent le troisième volume qui sera consacré à l’analyse des textes eschatologiques.
60Dans la partie analytique, J. F. s’attarde longuement sur le système verbal des écrits johanniques et passe en revue l’ensemble du vocabulaire qui a trait au « temps » sous diverses formes. L’étude méticuleuse des tournures verbales, du point de vue de la temporalité comme du point de vue de l’aspectualité, conduit à une réflexion sur l’originalité de la langue johannique et sur le fonctionnement théologique. Le temps des verbes n’est pas le fruit du hasard, mais au contraire, et dans de nombreux cas, le résultat d’un choix délibéré ; c’est une des conclusions intéressantes de ces pages d’analyse. La sélection judicieuse du temps des verbes vise à faire ressortir tel aspect christologique ou sotériologique. Mentionnons au passage quelques exemples : l’emploi du présent pour la prédication de Jésus dans les formules-egô eimi (Jn 8,58 et 12,26), les distinctions subtiles et intentionnelles entre l’aoriste et le parfait, l’importance accordée au parfait dans le quatrième évangile et dans la première épître, les contrastes temporels fréquents (« l’heure vient et c’est maintenant »), etc.
61L’A. complète cette enquête grammaticale sur le système verbal par un examen de tous les autres éléments marquant la temporalité. Il relève les nuances de vocabulaire (entre chronos et kairos, entre nun et arti, etc.) et précise longuement le sens de certains vocables spécifiques, tel le mot hora, pour désigner l’Heure de Jésus et mettre en relief la visée christologique et eschatologique de ce terme dans la narration évangélique.
62Dans la partie analytique déjà, d’importantes remarques conclusions théologiques sont dégagées. On ne peut les mentionner toutes. À titre d’exemple, on notera comment la Résurrection de Jésus (glorification, élévation) marque une césure temporelle tout en soulignant la continuité. Jésus lui-même (ou le narrateur) distingue le temps d’avant et le temps d’après Pâques (Jn 2,22 ; 12,16), mais cette distinction n’implique pas une rupture temporelle infranchissable. Dans l’ensemble du quatrième évangile les notices temporelles orientent vers une lecture à un double registre, où le symbolique et le réel se croisent ou se superposent, pour dire à la fois l’identité du Jésus historique et du Christ glorieux. La distinction et la continuité du temps d’avant et d’après Pâques ont été fortement soulignées ces dernières années par l’exégèse johannique récente, notamment dans l’étude des discours d’adieux (RSR 86/2, 1998, 301-304) où le quatrième évangile qualifie le temps de la communauté croyante comme le temps sous la mouvance de l’Esprit saint.
63À la suite des recherches de H. G. Gadamer sur le « cercle herméneutique », J. F. parle d’une « stéréoscopie temporelle » (151, 248 ; « stereoscopic perspective » selon R. A. Culpepper, Anatomy of the Fourth Gospel 33), où le temps de Jésus se confond avec le temps de la communauté. Deux moments centraux marquent le temps johannique, l’heure de Jésus et le présent de l’auteur et de ses destinataires. Ces réflexions herméneutiques préparent le terrain pour l’examen des principaux textes de l’eschatologie johannique, eschatologie présente et/ou future. L’A. annonce le troisième volume et indique d’ores et déjà une des conséquences majeures de ses analyses pour l’eschatologie des écrits johanniques : elle consiste à noter la différence entre la situation contextuelle et la stratégie de communication (voir la présentation du volume III) des épîtres et celle du récit sur Jésus dans l’évangile. J. F. relève la différence entre les dits eschatologiques des épîtres johanniques ou des discours d’adieux et les dits eschatologiques à but ‘christologique’ dans le récit johannique du ministère de Jésus.
6415. Avec ce troisième volume, Die Johanneische Eschatologie III, et après une dizaine d’années de recherche, le travail de J. Frey aboutit à une œuvre complète. La première partie de l’ouvrage définit la situation de la communauté johannique dans sa réception des traditions eschatologiques et dans son attente de la Parousie. J. F. se penche essentiellement sur deux passages, l’un dans l’évangile en Jn 21,22s et l’autre dans la première épître de Jean à propos de la venue de l’antichrist et de la Parousie (voir 1 Jn 2). J. F. analyse ensuite successivement la signification des notions apocalyptiques et eschatologiques des épîtres de Jean, puis les traditions eschatologiques johanniques dans les discours d’adieux (Jn 13-17). Il considère à part les autres éléments eschatologiques du quatrième évangile, dans le dialogue de Jésus avec Nicodème où l’annonce eschatologique de Jésus proclame la venue du salut et le jugement (Jn 3), dans le discours qui présente la puissance eschatologique du Fils après le récit d’une guérison (Jn 5, 19-30) et dans le récit de la résurrection de Lazare où le discours sur l’eschatologie s’inscrit dans la narration, puisque Jésus donne la vie éternelle et ressuscite le mort (Jn 11,1-44). On comprend la répartition des textes, puisque la thèse consiste précisément à relever la différence entre, d’une part les épîtres et les discours d’adieux, et d’autre part, l’eschatologie christologique des passages du quatrième évangile dans le ministère de Jésus. Les analyses de textes sont détaillées. On ne saurait résumer ce grand et magnifique travail.
65Je voudrais retenir deux points importants des études détaillées de J. F. sur l’eschatologie johannique. Un premier élément concerne l’interprétation de la double eschatologie, future et présente dans les écrits johanniques. On y trouve les dits relatifs à l’eschatologie future (annonce de la Parousie du Christ, résurrection des morts au dernier jour, enseignements sur le combat final des ennemis par Dieu à la fin des temps et sur les événements apocalyptiques qui l’accompagnent, …) et les dits relatifs à l’eschatologie présente (accueil de la vie éternelle par les croyants comme un don du salut déjà octroyé). L’une et l’autre veine traditionnelle ont été intégrées et valorisées par la même communauté johannique ; les deux types de dits eschatologiques sont parfois juxtaposés, sans que l’on puisse reconstruire le processus de leur rencontre. Le quatrième évangile et les épîtres de Jean présentent donc des traits communs trop souvent négligés. Mais les différences sont d’importance. Elles s’expliquent toutefois davantage par la diversité de situations et par le contexte des deux écrits que par des hypothèses rédactionnelles par trop fragiles ou insuffisamment fondées. La différence se situe essentiellement, selon J. F., au niveau du mode de communication mis en œuvre par l’une et l’autre catégorie d’écrits. Dans l’évangile, la communication de l’auteur avec sa communauté est indirecte. Les dits eschatologiques adviennent dans un discours fictif mis dans la bouche de Jésus. De ce fait, l’évangéliste accentue d’abord la christologie sotériologique ; l’ecclésiologie, l’éthique ainsi que l’eschatologie en dépendent (voir notamment en Jn 3,5 et 11). Dans les épîtres au contraire, la relation de l’auteur avec ses destinataires est immédiate et directe. Parce que ces écrits sont rédigés en temps de crise, l’ecclésiologie et l’éthique, mais aussi les topoi eschatologiques de l’attente, de la parousie, du jugement prennent plus de relief.
66Un deuxième point de cette longue recherche sur l’eschatologie johannique retiendra l’attention des spécialistes. J. F. montre que la situation de crise interne à la communauté johannique (1 Jn 2,19) apparaît également dans certains passages de l’évangile, notamment dans la finale de Jn 6 et à propos de la trahison de Judas. Le quatrième évangile a donné une forme narrative à ce motif du schisme entre les disciples de Jésus et il l’a retravaillé théologiquement. Pour l’A., nous avons là un indice en faveur de l’antériorité des épîtres johanniques par rapport à l’évangile. À plusieurs reprises, J. F. aborde cette question du rapport des épîtres à l’évangile. À la différence de R. E. Brown (les épîtres sont postérieures à l’évangile qu’elles précisent), mais dans la ligne de G. Strecker et avec d’autres arguments, l’A. propose une nouvelle manière de prendre en compte les relations entre les écrits johanniques. Je suis assez convaincue par cette interprétation que je rejoins par des voies d’analyse différentes.
67En définitive, l’œuvre en trois volumes de J. F. devient un dossier incontournable de l’exégèse johannique, pour ce qui concerne l’eschatologie plus particulièrement, mais aussi pour l’élaboration théologique mise en œuvre dans ces écrits.
6816. Dans un ouvrage de plus de 400 pages In ihm sein und bleiben, Klaus Scholtissek a repris les résultats de son habilitation, dirigée par H.-G. Klauck et centrée sur le langage de l’immanence dans les écrits johanniques (évangile et épîtres) analysé du point de vue linguistique, culturel et théologique. En établissant le status quaestionis, K. S. montre comment les dits de l’immanence ont été interprétés par les chercheurs ; il les regroupe en petites unités thématiques dont voici les principaux motifs : l’unité, l’obéissance au commandement, la foi et la fidélité, l’amour, la mystique, la participation à la vie divine, la mystique en lien avec l’éthique (vie et agapè). Après ce premier parcours, K. S. constate que pour tous les chercheurs, le langage de l’immanence est un thème théologique important dans les écrits johanniques, mais, dit-il, le débat reste entier concernant l’histoire traditionnelle de ce motif et le ou les milieu(x) religieux dans lequel ou dans lesquels il s’enracine.
69La première enquête conduit notre auteur vers une deuxième investigation. En quelques pages très serrées, il ouvre la question à différents niveaux (histoire des religions, philosophie, grammaire, etc.) et interroge de nombreux documents des philosophes grecs et des textes gnostiques. Une place importante de ce dossier revient bien entendu au langage de l’immanence dans la tradition biblique, dans l’Ancien Testament en général, comme dans les écrits juifs aux alentours de l’ère chrétienne (littérature de Sagesse, Qumran, Philon, Flavius Josèphe, etc.). Un court chapitre (126-130) reprend ce parcours à travers le temps et l’espace pour constater que, en dépit des différences inéluctables et indéniables, on assiste à travers cette diversité de langage à une même volonté d’exprimer le lien entre la transcendance et l’immanence, pour dire la présence de Dieu en l’homme et dans l’histoire des hommes. Le concept de Logos, si différent soit-il, représente une des possibilités de cette tentative spéculative pour énoncer la rencontre de la transcendance et de l’immanence. Le chapitre conclusif intitulé « Transcendance-Immanence-Logos » sert de charnière à l’étude des textes johanniques qui occupe le reste du livre jusqu’à la fin.
70Avant de procéder à la présentation proprement dite des textes johanniques, l’A. introduit une réflexion méthodologique sur la relecture et la réécriture, réflexion qui constitue un des pôles privilégiés de sa recherche actuelle. Les études récentes ont insisté sur l’importance de la « relecture » dans les écrits johanniques : voir J. Zumstein et A. Dettwiler (pour ce dernier, cf. le dernier bulletin johannique RSR 86/2, 1998, 302-304). Selon K. S., cette dimension de la diachronie doit s’accompagner et être complétée par une recherche au niveau synchronique, qualifiée de « réécriture » : le terme est emprunté aux travaux des linguistes (voir par exemple C. Oriol-Boyer (éd.), La réécriture, Grenoble 1990 ; définition : K. S., p. 137-139).
71Pour situer l’originalité johannique et la pertinence d’une recherche sur les énoncés johanniques de l’immanence, K. S. reprend le dossier de l’analyse sémantique. Il retient la préposition grecque en (en, dans, à l’intérieur), les verbes demeurer et être en, et d’autres verbes connexes. Cela lui permet de dégager un corpus d’analyse et de proposer à l’examen les textes les plus décisifs. Le prologue du quatrième évangile est considéré comme un meta-texte de la théologie johannique de l’immanence. K. S. considère ces versets d’ouverture de l’évangile comme une « réécriture christologique », indiquée par les différentes parties du prologue lui-même (voir p. 178-179) et par les liens de ce condensé théologique avec le reste de l’évangile. L’A. s’arrête ensuite longuement sur Jn 6 considéré dans son ensemble, c’est-à-dire avec ses deux signes et le discours sur le Pain de vie. Dans ce complexe, les énoncés sur l’immanence de la catéchèse johannique ne sont pas au point de départ de la tradition, mais un résultat du langage johannique de l’immanence.
72Le troisième texte qui retient l’attention de K. S. est le premier discours d’adieux (Jn 13,31-14,31). Les prépositions caractéristiques des formules d’immanence y sont nombreuses ; il aurait été intéressant de mieux marquer le passage de l’une à l’autre et la signification de ce passage. Dans ce chapitre, K. S. s’attarde aux termes de l’inhabitation et propose une bonne analyse sémantique (222-247) sur les diverses métaphores de l’accueil dans la maison et sur les vocables afférents. J’ai particulièrement apprécié cette étude ; les pages sur la réécriture de Jn 8,12-59 méritent attention : par d’autres voies de démonstration, on peut arriver à des conclusions similaires. La conclusion de l’analyse des formules d’immanence dans le premier discours d’adieux montre comment la théologie de l’immanence est liée à la sotériologie et à l’éthique dans le quatrième évangile. Ce point est particulièrement renforcé et approfondi dans le quatrième grand texte que l’A. choisit de présenter, la métaphore sur la vigne en Jn 15-1-17.
73Pour le cinquième passage, K. S. rapproche l’un de l’autre Jn 10 (le bon pasteur et les brebis) et Jn 17 (la prière de Jésus). Il me paraît préférable de noter les correspondances de Jn 1 (Prologue) et de Jn 17, sur le plan narratologique comme sur le plan théologique. Le rapprochement ici est néanmoins intéressant et s’impose lorsqu’il s’agit de souligner la place du motif de l’unité du Père et du Fils fortement exprimé dans les deux passages.
74L’examen du langage et de la théologie de l’immanence johannique s’achève par la présentation des trois épîtres. K. S. fait d’abord un rapide tour de quelques particularités de vocabulaire (avoir la communion, la vie, être de Dieu, connaître). Il montre ensuite qu’il y a une évolution entre les deux types d’écrits johanniques ; elle serait marquée par la transformation des énoncés non personnels de l’immanence (n. 13 p. 367) aux énoncés plus personnels : en Lui, en son Fils Jésus Christ. Pour K. S. les énoncés sur l’immanence dans les épîtres johanniques, en particulier dans la première, sont « une relecture » des énoncés du quatrième évangile (p. 357). Comme nous venons de le voir dans le précédent ouvrage, la discussion sur ce point reste largement ouverte. Les lecteurs du présent Bulletin pourront comparer les analyses des textes des épîtres de Jean de K. S. à celles de J. Frey (Eschatologie III). En conclusion de ce chapitre sur les épîtres johanniques, K. S. accorde avec raison une place de choix au rôle de l’Esprit (voir p. 360-362).
75K. S. est déjà bien connu des spécialistes de l’exégèse johannique, puisqu’il est l’auteur de nombreuses recensions et articles et qu’il propose régulièrement des bulletins johanniques où il fait le point sur l’avancée des recherches. La présente contribution à la théologie johannique ne laissera pas les chercheurs indifférents. Le sujet choisi, la méthode d’analyse et l’examen du vocabulaire, la bibliographie et les observations relatives aux diverses hypothèses manifestent une bonne maîtrise du dossier et ouvrent, comme tout travail de cette qualité, des pistes intéressantes pour l’exégèse et pour la théologie.
III – Apocalypse (17 à 22)
18. Pierre Prigent, L’Apocalypse de Saint Jean (Commentaire du Nouveau Testament XIV Deuxième série). Labor et Fides, Genève, 2000, 507 p.
19. Peter R. Carrell, Jesus and the angels. Angelology and the Christology of the Apocalypse of John (Society for New Testament Studies — Monograph Series 95). Cambridge University Press, Cambridge, 1997, 270 p.
20. James L. Resseguie, Revelation Unsealed. A Narrative Critical Approach to John’s Apocalypse (Biblical Interpretation Series 32). Brill, Leiden, 1998, 233 p.
21. Thomas B. Slater, Christ and Community. A Socio-Historical Study of the Christology of Revelation (Journal for the Study of the New Testament Supplement Series 178). Sheffield Academic Press, Sheffield, 1999, 281 p.
22. G. K. Beale, John’s Use of the Old Testament in Revelation (Journal for the Study of the New Testament Supplement Series 166). Sheffield Academic Press, Sheffield, 1998, 443 p.
7617. Ce commentaire de l’Apocalypse en trois volumes (chapitres 1-5/6-16/17-22) comprend une introduction (XLVII-C.C.XI) au cours de laquelle D. E. Aune examine avec attention les questions usuelles (auteur, date, genre littéraire, structure, critique des sources et critique de la rédaction, critique textuelle, étude de la syntaxe et du vocabulaire) et un commentaire explicite de chaque péricope, verset par verset. De nombreux excursus présentent plus en détail certains problèmes « classiques », mais aussi et surtout des questions techniques particulières pour lesquelles l’auteur souligne la pertinence à partir d’une bonne connaissance des dossiers et de l’actualité de la recherche. La bibliographie générale et les bibliographies spécifiques de chaque passage permettent de préciser les points abordés plus rapidement ou de confronter les positions de l’auteur à d’autres points de vue.
77Dans l’introduction, D. A. propose une hypothèse personnelle sur la rédaction ou la composition de l’Apocalypse qui serait le résultat de trois étapes de formation.
78— Une première phase de composition peut être située vers les années 50-60. Dans le contexte actuel de l’Apocalypse, une douzaine de passages se distinguent du reste du livre par leur style et leur genre littéraire. Ces unités textuelles n’ont pas été composées originellement pour le contexte littéraire dans lequel elles sont actuellement intégrées. Selon D. A., et contrairement à d’autres opinions exégétiques, ces passages ne sont pas à considérer comme des développements ultérieurs, mais constituent la base de l’Apocalypse. Il s’agit des unités textuelles suivantes : 7,1-17 ; 10,1-11 ; 11,1-13 ; 12,1-17 ; 13,1-18 ; 14,1-20 ; 17,1-18 ; 18,1-24 ; 19,11-16 ; 20,1-10 ; 20, 11-15 ; 21,9-22,5.
79— L’A. envisage ensuite une deuxième étape dans la formation de l’Apocalypse ; il place la première édition du livre vers les années 68-74. La première révolte juive (66-73) en est donc le Sitz im Leben. Les différentes unités précédemment citées sont insérées dans deux grandes parties qui forment désormais l’armature d’une compilation bien structurée (4,1-16,21 et 17,1-22,9). La première grande partie est marquée par le triple septénaire (des sceaux, des trompettes, des coupes). Les trois premières unités (7,1-17 ; 10,1-11 ; 11,1-13) sont placées avant le septième élément des deux premiers septénaires : celui des sceaux pour le chapitre 7, celui des trompettes pour les chapitres 10-11. Trois autres unités (12,1-17 ; 13,1-18 ; 14,1-20) sont insérées entre les sept trompettes et les sept coupes. Pour la mise en œuvre de la deuxième grande partie (17,1-22,9) l’auteur-éditeur adopte une structure différente. On peut y distinguer deux révélations angéliques (17,1-19,10 et 21,9-22,9) parallèles. Entre ces deux passages l’auteur-éditeur a enchâssé les autres unités textuelles qu’il a amplifiées.
80— Dans une troisième étape, une seconde édition de l’Apocalypse voit le jour à la fin du premier siècle, peut-être à l’époque du règne de Trajan (98-117). Elle est essentiellement marquée par les développements christologiques dans l’addition des lettres aux sept églises et dans la vision du Fils de l’homme (Ap 2-3). Par le style, ces passages se démarquent du reste de l’Apocalypse, ce qui pourrait faire penser à un auteur différent.
81L’hypothèse ainsi formulée est étayée point par point, au fur et à mesure du commentaire minutieux. L’immense culture de l’auteur en différents domaines (archéologique, historique et littéraire) fait de ce commentaire un instrument de travail précieux pour les chercheurs. Parmi de nombreux points remarquables, j’ai particulièrement apprécié les précisions de critique textuelle, les notes linguistiques de détail (sur l’article, les pronoms), l’appui sur les recherches archéologiques, historiques et sur la plastique de l’antiquité, etc. À titre indicatif on peut relever la recherche sur l’ekphrasis (description d’une œuvre d’art) et sur la numismatique qui permettent une meilleure interprétation de la vision de la grande prostituée au chapitre 17. Par ailleurs, les analyses littéraires profitent largement de la multiplicité des méthodes. Enfin, dans la ligne des réflexions méthodologiques actuelles (historico-critique, narratologie, intertextualité), D. A. s’interroge sur le processus de composition de l’Apocalypse ; tout au long de l’ouvrage de nombreuses indications sont apportées sur cette question méthodologique. Outre son apport essentiel sur le plan strictement exégétique, ce travail intéressera certainement le théologien par ses nombreuses pistes de recherches concernant l’élaboration de la christologie au premier siècle.
8218. Ancien professeur de Nouveau Testament à la Faculté de Théologie protestante de l’Université Marc Bloch de Strasbourg, Pierre Prigent est bien connu pour ses études relatives à l’Apocalypse de Jean, pour ses recherches actuelles sur l’iconographie (l’image dans le judaïsme, Jésus au cinéma) ; il vient en outre de publier très récemment une petite plaquette sur l’évangile de Jean : Ainsi parlait l’apôtre Jean (Lire la Bible 122). Cerf, Paris, 2001.
83L’auteur propose une édition renouvelée de son commentaire de l’Apocalypse paru aux mêmes éditions, il y a une vingtaine d’années. Plusieurs passages de l’ancien commentaire ont été repris ou allégés, en tenant compte des discussions en cours et des avancées de la recherche sur l’Apocalypse. La bibliographie est mise à jour ; on y trouve bien entendu les récents commentaires de D. E. Aune (voir ci-dessus), ainsi que les recherches de R. Bauckham et de J. Frey (dans M. Hengel, Die johanneische Frage). Dans son excellente introduction (p. 12-78), partie entièrement neuve par rapport à l’ancien commentaire, P. P. indique les nouvelles pistes d’investigations qui sont proposées par la recherche contemporaine sur l’Apocalypse johannique et précise comment il se situe lui-même dans ces courants.
84Ce n’est sans doute pas fausser les perspectives de l’auteur que de retenir l’attention sur deux points majeurs.
85— L’A. redit l’intérêt de l’étude des racines juives pour l’interprétation de l’Apocalypse johannique. Il s’attache surtout à faire découvrir deux courants essentiels de cette grande tradition, par l’importance accordée aux écrits de Qumran et, par ailleurs, par l’ouverture sur le courant mystique et ésotérique des Hekhalot.
86— Un deuxième point a retenu plus particulièrement l’attention de P. P. et la nôtre, c’est l’interrogation sur le « johannisme » de l’Apocalypse. Il aborde cette question, non seulement par les problèmes habituels (langue de l’auteur, etc.), mais en insistant sur la mise en relief de la théologie eschatologique spécifique du johannisme.
87Dans la recherche sur le johannisme de l’Apocalypse et sur l’eschatologie, on peut se demander toutefois pourquoi l’A. évacue les épîtres de Jean. Sans entrer dans le détail de la discussion, ou plus exactement pour dire l’intérêt de cette recherche, je proposerais par exemple de reprendre les données sur les parallélismes de langage évoqués (p. 27s) et sur la théologie (p. 29), en élargissant l’enquête aux épîtres de Jean. Dans la présentation très brève de l’histoire du cercle johannique, l’A. cite à juste titre les premières recherches de O. Cullmann, mais ne dit mot, semble-t-il, des hypothèses de R. E. Brown concernant l’histoire du groupe johannique et sur l’eschatologie. Sur ce thème qu’il ne faudrait pas trop vite simplifier, les lecteurs du présent Bulletin comprendront la nécessaire confrontation avec les positions de J. Frey, notamment dans le tome III ; P. P. n’a pu mentionner cet ouvrage qui a paru en même temps que le sien.
8819. Cette monographie par P. R. Carrell porte sur la christologie de l’Apocalypse (= Apocalypse de Jean) et sur l’influence éventuelle de l’angélologie. En introduction l’auteur indique clairement la problématique. Il rappelle en premier lieu le petit nombre d’ouvrages consacrés à la christologie de l’Apocalypse, puis il retient deux questions majeures : la divinité du Christ et le rôle influent de l’angélologie sur la christologie. Le plan s’organise autour de deux grandes parties : dans la première l’auteur fait état de la documentation indispensable pour comprendre les représentations de l’angélologie ; dans la seconde, il examine les textes importants.
89Jusqu’au chapitre cinq inclus, P. C. étudie le contexte de l’angélologie dans la littérature apocalyptique environnante. Les trois écrits de Zacharie, Ezéchiel et Daniel jouent un rôle important dans l’Apocalypse. L’attention se porte ensuite vers les anges « principaux » comme Michel et Gabriel. Le chapitre 4 prend en compte les traits angélomorphiques de certains personnages comme Abel, Hénoch (etc.) ainsi que ceux du Logos chez Philon d’Alexandrie. Au chapitre 5, en conclusion de ses premières investigations et en préalable aux analyses de textes, l’auteur s’interroge sur une christologie angélique ou angélomorphique au début de l’ère chrétienne. Il parcourt, peut-être un peu rapidement, certains écrits des Pères de l’Église ou de la littérature parabiblique. Le terrain est quelque peu balisé pour aborder la question de l’influence possible de l’angélologie sur la christologie de l’Apocalypse. Le chapitre 6 sert de mise en perspective : l’examen de Ap 1,1 permet de préciser les relations entre Jésus et Dieu et Jésus et les anges dans l’Apocalypse. Les chapitres 7-10 présentent dès lors des analyses des visions dans les trois passages de Ap 1,13-16 ; 14,14 et 19,11-16.
90L’ouvrage se situe dans la ligne des recherches sur l’élaboration du discours christologique dans le Nouveau Testament, plus précisément dans l’Apocalypse. Je relève volontiers deux aspects principaux dans cette recherche. L’auteur met en évidence la juxtaposition de la figure de l’Agneau aux côtés de la forme angélique. La complémentarité de ces deux traits christologiques est particulièrement importante pour P. C. dans le livre de l’Apocalypse. Comme Agneau, le Christ est distingué des anges à cause de son rôle dans le culte et de son union à Dieu sur le trône divin (« coordonate with God rather than subordinate », p. 219). Une autre ligne de recherche intéressante dans ce livre porte sur l’expression de l’incarnation. Les premières christologies chrétiennes de l’incarnation se comprennent à juste titre en regard des figures de Sophia dans la littérature de Sagesse et du Logos dans les discussions philoniennes et hellénistiques. Mais les recherches sur l’expression de l’incarnation doivent aussi inclure la familiarité avec les représentations angéliques du Logos et avec les représentations des anges sous formes humaines. La présente monographie offre une contribution intéressante pour ce type de recherche en christologie.
9120. James L. Resseguie propose une approche originale de l’Apocalypse de Jean à partir d’une analyse narratologique, Revelation Unsealed. Un long chapitre d’introduction présente successivement des éléments de méthode qui seront à la base des chapitres suivants. Dans un premier temps, l’auteur donne une appréciation de la rhétorique narrative d’ensemble. Certaines particularités de la composition narrative de l’Apocalypse sont bien mises en relief. On relèvera par exemple le fonctionnement herméneutique de la juxtaposition entre ce qui est vu et ce que l’on entend ; les paroles entendues interprètent les visions. Notons la juxtaposition des figures de l’agneau et du lion au chapitre 5. Jean voit un agneau mais il entend un lion. La figure située au niveau de l’entendre donne le sens de celle qui est vue : le lion de la tribu de Juda interprète le sens caché de la mort sur la croix (l’agneau) qui, loin d’être une défaite, manifeste le chemin de la puissance, annonce la victoire (voir p. 34 ; en complément on lira l’excellente analyse de R. Bauckham cité page 134). D’autres exemples sont donnés de ce lien herméneutique entre le voir et l’entendre.
92Dans toute analyse narrative, il importe de décrire le ‘point de vue’ du narrateur. L’Apocalypse de Jean présente une gestion originale de l’espace. J. L. R. relève cette particularité dans la manière de décrire les visions, tantôt centrifuge, tantôt centripète. À titre d’exemple (il y en a d’autres), on peut se reporter à description de celui qui est ‘comme un Fils d’homme’ au milieu des sept églises (Ap 1). En premier lieu, le visionnaire décrit le pourtour, avec la lumière des sept lampes d’or qui étincellent. Elle s’intensifie au fur et à mesure que l’on se rapproche de celui qui est « comme un Fils d’homme », pour éclairer le centre de la vision. Les visions des chapitres 4 et 5 décrivent au contraire d’abord le centre. Le visionnaire part du trône de celui qui siège (chapitre 4) pour élargir progressivement la description vers la périphérie, vers les quatre vivants, puis les vingt-quatre anciens.
93À partir d’autres exemples, habituellement mis au compte du dualisme johannique, J. L. R. montre comment l’auteur de l’Apocalypse exploite une infinité de registres pour faire jaillir la signification théologique du dynamisme de la narration, le travail des contraires et des oppositions comme l’intérieur et l’extérieur (symbolisme du vêtement), le bas et le haut, l’ouvert et le fermé. Il consacre quelques pages au rôle et à la signification des nombres dans l’Apocalypse johannique, mais il me semble qu’il aurait été important de ne pas simplement aligner les chiffres les uns à la suite des autres pour en donner une signification dans l’absolu. Dans l’Apocalypse johannique, les symboles demandent à être reliés les uns aux autres ; de mon point de vue, les chiffres désignent moins le quantitatif que le qualitatif.
94Dans un deuxième chapitre, l’auteur aborde, un peu en vrac, les lieux symboliques. Il les répartit en trois grandes catégories. Dans un premier groupe, se rangent toutes les métaphores qui servent à désigner la rébellion contre Dieu le chaos, la mer, Babylone, Sodome, l’Égypte, Gog et Magog. À l’opposé l’auteur énumère les lieux positifs comme le trône, la nouvelle Jérusalem, le Temple et l’autel, l’arbre ; ils représentent l’ordre, la promesse et la vie. On peut y ajouter trois références topographiques (le fleuve, le désert, la montagne) ‘neutres’, qui peuvent être négatives ou positives. À la fin de l’Apocalypse cette ambiguïté disparaît, puisque la Jérusalem nouvelle désigne le lieu définitivement positif.
95Toute analyse narrative observe avec attention le parcours des personnages. Les deux personnages principaux, Dieu et le Christ, sont caractérisés par leurs traits les plus marquants. Dieu se révèle par sa parole et son action. Sa parole comme alpha et omega située en inclusion au début et à la fin du livre, le désigne comme le Créateur et comme celui qui accompagne l’histoire vers son achèvement. L’auteur de l’Apocalypse évite soigneusement les antropomorphismes. Pour affirmer l’indescriptible transcendance de Dieu, il souligne l’adoration incessante qui parcourt tout le livre de l’Apocalypse. Le mystère du Christ se révèle à travers trois figures, celle du « comme un Fils d’homme » (au chapitre 1 et au chapitre 14), celle de l’agneau (à partir du chapitre 5), et celle du cavalier fidèle et vrai au chapitre 19. On comparera ces pages à l’analyse de Th. B. Slater dans l’ouvrage recensé ci-dessous.
96Dans la caractérisation apocalyptique, le bestiaire occupe une place de choix. Utilisant la répartition de N. Frye (Le grand code), J. L. R. répartit cet imaginaire fantastique en deux groupes opposés, avec d’un côté les animaux démoniaques (les criquets, les oiseaux, le dragon et les bêtes) et d’autre part, les animaux « apocalyptiques » idéalisés (les quatre vivants, l’agneau et l’aigle). On trouvera aux pages 124-127 une réaction critique à rencontre de ceux qui identifient la bête avec l’empire romain et qui interprètent notamment le retour de la bête avec le retour de Néron. Selon J. L. R., nous n’avons pas ici une référence au mythe de Nero redivivus mais une parodie de la victoire de l’agneau et de sa mort-résurrection. L’auteur de l’Apocalypse veut signifier que la bête est combattue, mais elle continue à être suivie par ses adeptes jusqu’au jour de la « parousie » du Christ (voir p. 127). On retrouve la même réaction dans la description de la prostituée du chapitre 17 ; dans cette description, l’auteur de l’Apocalypse ne chercherait pas à identifier la femme à Rome, mais à montrer le pouvoir séducteur du mal et ses parodies de la divinité (voir p. 140).
97Les différents personnages sont abordés les uns après les autres. On aurait aimé une meilleure présentation des relations entre ces figures et la superposition des images, par exemple sur la femme-ville. À grandes enjambées (pages 167-192), L’A. parcourt les 22 chapitres de l’Apocalypse pour en donner une rapide paraphrase de contenu.
98En définitive, j’ai davantage apprécié les premiers chapitres de cet ouvrage que sa finale. L’auteur montre qu’une lecture de l’Apocalypse ne saurait faire l’économie d’une analyse narrative. L’attention à la stratégie narrative permet au lecteur de découvrir certains codes pour entrer dans un récit hautement symbolique.
9921. Comme il l’indique dans le sous-titre de son ouvrage, Thomas B. Slater applique des principes sociologiques à l’étude de la christologie de l’Apocalypse johannique. L’ouvrage est organisé en deux parties. La première concentre essentiellement l’attention sur la figure du Fils de l’homme, la deuxième sur celles de l’Agneau (Ap 5) et du Guerrier (19, 11-21). Les recherches entendent déterminer la fonction et l’importance de ces figures pour la vie de la communauté.
100La première partie de l’ouvrage présente la figure du Fils de l’homme de manière assez classique. L’auteur s’appuie à juste titre sur un arrière-fond juif bien délimité : Dn 7,13, les Paraboles d’Hénoch, le quatrième Esdras et d’autres textes de la littérature intertestamentaire. Le survol pourtant est trop rapide pour apporter du neuf à une question encore fort débattue. L’auteur examine ensuite la présentation de la figure du Fils de l’homme dans le chapitre d’ouverture de l’Apocalypse. Là encore le relevé des parallèles avec la figure de Dn 7 ou avec celle(s) de 1 Hén et de 4 Esd n’est pas nouveau. L’auteur pose l’une ou l’autre questions sur la communauté visée par cette réinterprétation de la figure du Fils de l’homme (p. 105), mais les réponses, qui tiennent en une petite page (105-106), sont insuffisamment développées. En revanche, la partie consacrée aux lettres adressées aux sept églises s’engage dans des questions et des réponses plus fermes du point de vue sociologique, même si parfois l’examen se contente d’un relevé de détails qui pourraient être classés dans un registre « sociologique », sans s’attacher à une véritable étude sociologique. Les remarques des pages 158-160 sur l’enracinement social des communautés chrétiennes visées par l’auteur de l’Apocalypse devraient être davantage étayées.
101L’auteur examine ensuite les nombreux passages de l’Apocalypse qui évoquent la figure de l’Agneau. Il note en particulier la fonction christologique de cette figure et son rôle eschatologique dans la conduite de la communauté vers la Jérusalem nouvelle. La figure de l’Agneau véhicule une imagerie à la fois négative et positive. Liée à la victoire par la souffrance et par la vengeance, elle est souvent associée dans l’Apocalypse à des métaphores prises dans le domaine du combat militaire. L’image de l’Agneau s’inscrit aussi dans un certain déterminisme qui affirme l’assurance du salut.
102En complément de la figure de l’Agneau, Th. S. propose l’examen du chapitre 19,11-21 qui présente un Cavalier partant au combat sanglant. L’image enrichie d’allusions vétérotestamentaires décrit le Christ Juge eschatologique et annonce la victoire définitive sur le Mal. Si la communauté chrétienne manifeste l’expression de son espoir de salut au travers de cette imagerie guerrière, c’est parce qu’elle est convaincue que seule une intervention divine saura alléger et enlever ses souffrances (232). Le Christ est la pleine manifestation de la puissance divine (235). La figure du guerrier en dit la souveraineté et la seigneurie, comme l’indiquent les titres qui lui sont attribués dans cette vision apocalyptique. En définitive, les trois figures, le Fils de l’homme, l’Agneau et le Guerrier attribuent au Christ la puissance auparavant réservée à Dieu.
103La recherche de ce travail est prometteuse surtout par l’intérêt que l’auteur porte à un point précis ; il montre bien dans l’introduction de l’ouvrage comment l’analyse de l’univers symbolique construit par un groupe ou une société permet de déterminer la carte sociologique de ce groupe. Th. S. relève à plusieurs reprises le fonctionnement des « stratégies de maintenance » ; il s’en explique bien en introduction et reprend ce point en conclusion du travail, mais si elles sont affirmées, ces stratégies sont à mon avis encore insuffisamment explicitées dans l’examen des textes à propos des trois figures retenues : voir par exemple p. 138. Le présent ouvrage a le mérite d’ouvrir l’exégèse de l’Apocalypse aux recherches sociologiques. Le sujet est bien cerné par l’examen de trois figures importantes et par la mise en œuvre du lien entre les registres de l’imaginaire et du sociologique. L’auteur a perçu la nécessité de ce lien qui doit faire comprendre le message de l’apocalypticien à ses destinataires premiers comme au lecteur d’aujourd’hui ; mais il reste à affiner les instruments et à affermir l’application des techniques sociologiques pour des résultats plus précis.
10422. G. K. Beale est connu par ses travaux sur la littérature apocalyptique, et notamment par l’ouvrage paru en 1984, (The Use of Daniel in Jewish Apocalyptic Literature and in the Revelation of John) qu’il vient en quelque sorte compléter dans le présent ouvrage, John’s use of the Old Testament in Revelation. Ce livre rassemble et retravaille nombre d’articles déjà publiés : la liste en est donnée page 8.
105Le chapitre d’introduction est nouveau ; G. K. Beale examine les études exégétiques récentes sur l’utilisation de l’AT dans l’Apocalypse. Il rappelle tout d’abord son propre travail de 1984 (The Use of Daniel). Il montrait que des parties entières de la littérature apocalyptique avaient comme base de grandes sections du livre de Daniel et, en particulier, Dn 7 et Dn 10-12. Selon G. K. B., nous n’avons pas dans la littérature apocalyptique une copie ou une utilisation servile de Dn, mais au contraire une utilisation créative en lien avec les perspectives et les circonstances propres à chaque écrivain-apocalypticien. Ces écrivains enrichissaient le texte daniélique lui-même et le rendaient plus compréhensible par l’intermédiaire d’autres textes de l’AT. Dans l’Apocalypse de Jean, c’est à la fois la compréhension de la mort -résurrection du Christ et la mise en place de la communauté ecclésiale en temps de persécution qui ont permis de comprendre Daniel et d’en saisir un commencement d’accomplissement. Malgré cette exégèse créative, les auteurs apocalypticiens manifestent un grand respect et une fidélité des contextes de l’AT auxquels ils se réfèrent.
106L’A. considère ensuite différentes hypothèses sur la relation de l’Apocalypse à l’Ancien Testament : — Selon J. M. Vogelgesang, 1985, Ezéchiel est le modèle qui a influencé sinon toute l’Apocalypse, du moins des parties importantes du livre. — J. Paulien, (Decoding, 1987) a proposé une classification des allusions à l’AT dans l’Apocalypse de Jean. — Pour R. Bauckham (Climax 1993/1999), l’Apocalypse de Jean ne serait pas une œuvre écrite dans l’urgence, mais au contraire une méditation travaillée calmement, à la fin de la période de l’apocalyptique chrétienne. Seul le lecteur patient saura décoder la mosaïque et voir apparaître l’Ancien Testament en toile de fond constante. — J. Fekkes, (Isaiah, 1994) est le premier à avoir présenté une étude attentive aux rapprochements de l’Apocalypse avec Isaïe. G. K. B. réserve une appréciation plus longue à deux autres auteurs, qu’il considère à part, car il entend poser les questions herméneutiques, à partir de leurs travaux. Il s’agit des ouvrages de J. P. Ruiz sur Ezéchiel dans l’Apocalypse (1989) et de S. Moyise sur l’AT dans le livre de l’Apocalypse (1995).
107Cet état des lieux sur la recherche récente conduit l’auteur à cerner de plus près dans un deuxième chapitre les différents types d’utilisations de l’AT dans l’Apocalypse de Jean : utilisation des grandes séquences (par exemple Dn 2 et 7 dans Ap 1,4-5 ; 13 et 17), thèmes (par exemple le thème du Jugement-Salut), utilisation analogique (voir le tableau p. 99), développement de l’universalisation, accomplissement des prophéties ou lectures typologiques, etc.
108Dans le long chapitre 3 (129-294) G. K. B. offre une étude intéressante sur l’influence de l’AT dans l’eschatologie de l’Apocalypse. Il accorde une particulière importance à 1,19 (écris ce que tu as vu, ce qui est et ce qui vient après cela) et au terme de mustèrion (1,19-20 ; 10,6b-7 ; 17,5.7). Ce terme ne s’enracine pas dans les religions à mystères de l’Hellénisme, mais dans l’eschatologie des traditions juives. Il renvoie non seulement au motif de l’accomplissement, mais au mode d’accomplissement marqué par la nouveauté et l’inattendu.
109Les chapitre 4 et 5 reprennent et prolongent des articles déjà parus, l’un sur le thème de l’écoute notamment dans la formule répétée : « celui qui a des oreilles qu’il écoute » ; l’autre chapitre est une étude sur la grammaire de l’Apocalypse, en particulier sur les solécismes. Le chapitre 6, en finale, s’attarde au chapitre 20 de l’Apocalypse sur le Millenium et à son enracinement dans la tradition juive.
IV – Approche thématique (n° 23)
11023. L’auteur de cette étude thématique sur la joie dans les écrits johanniques, Giuseppe Ferraro, a déjà plusieurs publications à son actif ; sans les nommer toutes, on peut relever que plusieurs d’entre elles ont insisté sur la place de l’Esprit dans le quatrième évangile et sur l’importance que les écrits johanniques accordent à l’expression des relations entre le Père, le Fils et l’Esprit (RSR 1998, 315-316). Dans le présent ouvrage, G. Ferraro analyse les différents vocables de la joie (chairô, chara, agalliaô, euphrainô) dans le quatrième évangile et dans les épîtres de Jean, ainsi que dans l’Apocalypse. La première partie de l’ouvrage est consacrée à l’évangile de Jean par les études successives de 10 péricopes déterminées selon leur emploi des vocables précités.
111Chaque passage est présenté dans son contexte, et, pour chacun d’eux, l’auteur précise les différentes nuances de la joie. La présentation apparaît un peu trop linéaire, mais il semble que l’on puisse en faire ressortir deux traits principaux ; la joie caractérise à la fois la christologie et l’attitude des disciples. Pour la christologie, je relèverais surtout le thème de la joie nuptiale (Jn 3,22-36) et le motif de la joie d’Abraham à propos de la préexistence (Jn 8,51-59). Dans la plupart des autres péricopes, G. F. note le lien de la joie avec les disciples, en particulier dans les discours d’adieux, mais également en Jn 4, 42 (joie apostolique) ou en Jn 11,1-16. Les deux aspects se conjuguent assez bien, me semble-t-il, dans l’épisode de la résurrection en Jn 20,19-23.
112L’auteur examine ensuite en un seul chapitre les mentions de la joie dans les épîtres johanniques, dans l’introduction et dans les conclusions épistolaires. Une courte conclusion (159) souligne comment le thème de la joie se lit au niveau christologique, théologique et pneumatologique. Dans les épîtres, notamment dans la première, le thème de la joie rejoint celui de la koinônia.
113La troisième partie de l’ouvrage aborde le même thème dans le livre de l’Apocalypse, à la fois dans son aspect négatif (11,10) et positif lorsqu’il exprime la joie eschatologique du ciel qui célèbre la victoire (12,12 ; 18,20). L’appel à la joie invite à célébrer les noces de l’agneau (19,7.9).
114Le sujet mérite l’attention des chercheurs. L’A. fournit un bon dossier thématique. Des analyses ultérieures viendront sans doute compléter ce travail et fournir des pistes d’interprétation pour les questions qui restent en suspens, dans le domaine de l’élaboration de la réflexion théologique et littéraire par exemple.
V – Perspectives pastorales (24 à 26)
25. Edwin Walhout, Revelation. Down to Earth. Making Sense of the Apocalypse of John. William B. Eerdmans Publishing Company, Grand Rapids, Michigan/Cambridge, 2000, 254 p.
26. Daniel Foucher, Brûlante actualité de l’Apocalypse. Publié à compte d’auteur. La Chapelle Montligeon, 2000, 382 p.
11524-26. Ces ouvrages proposent une lecture suivie de l’Apocalypse et visent un public assez large. Dans un langage clair, ils répondent aux questions habituelles qui se posent pour ce texte si riche en symboles et en références aux Écritures.