Notes
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[*]
Cet article est issu d’un mémoire de Master 2 Ingénierie pédagogique en formation d’adultes, sous la direction de Philippe Carré, Université Paris 10 Nanterre
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[1]
En Suisse, les professionnels en formation post graduée de type expertise (ou spécialisations) suivent leur formation tout en étant « en emploi » dans l’unité de soins. Il existe des expertises en soins d’anesthésie, en soins intensifs et en soins d’urgence.
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[2]
PIC : pression intracrânienne, mesurée à l’aide d’un capteur, permettant d’évaluer le risque d’hypertension intracrânienne et d’engagement cérébral.
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[3]
« Adré », en jargon médical, signifie adrénaline, drogue vasoactive de l’urgence.
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[4]
Dans la procédure de massage cardiaque externe, un cycle correspond à 5 fois 30 compressions thoraciques alternant avec 2 insufflations (ventilation) sur une durée de 2 minutes.
Introduction
1La simulation en santé est une modalité pédagogique en plein essor en Europe, bien que le nombre de centres dédiés soit encore faible par rapport à l’Amérique du Nord où elle est utilisée de manière routinière dans la formation des professionnels de santé. En France, l’activité de simulation est en forte émergence (HAS, 2012) [1] et tend à devenir un élément d’attractivité des lieux de formation ainsi que des établissements de santé qui l’utilisent pour la formation continue de leurs personnels. Il existe aujourd’hui des recommandations en matière de politique de formation en faveur de son utilisation, notamment dans le cadre du développement professionnel continu (Ministère du Travail, de l’Emploi et de la Santé, 2011) [2]. Elle est considérée comme devant prendre une place de premier rang, dans le cadre du Programme national pour la sécurité des patients (Ministère des Affaires sociales et de la Santé, 2013) [3].
2La simulation se définit comme « l’utilisation d’un matériel (comme un mannequin ou un simulateur procédural), de la réalité virtuelle ou d’un patient standardisé, pour reproduire des situations ou des environnements de soins, pour enseigner des procédures diagnostiques et thérapeutiques et permettre de répéter des processus, des situations cliniques ou des prises de décision par un professionnel de santé ou une équipe de professionnels » (HAS, 2012) [4]. Il existe deux types de simulations : la simulation dite « procédurale » destinée à enseigner des gestes techniques ou à s’entraîner à des procédures, et la simulation dite « pleine échelle » dans laquelle les apprenants vont jouer un scénario en faisant « comme si » ils étaient en situation réelle. Dans cette dernière, les objectifs pédagogiques sont ciblés principalement sur la construction de compétences dites « non techniques », c’est-à-dire des compétences cognitives, organisationnelles et de travail en équipe.
3La particularité de ces formations est qu’elles ont lieu, pour certaines d’entre elles, en groupes pluriprofessionnels, réunissant médecins et infirmiers. Il s’agit là de modalités relativement rares en formation. Cela semble a priori pertinent et adapté dès lors que l’on se propose de réfléchir et d’apprendre sur la dimension collaborative du travail. La formation par la simulation est un dispositif qui offre l’opportunité de travailler sur les savoir-être et sur la dimension collaborative des soins. Ces dimensions sont particulièrement mises en exergue dès lors qu’il s’agit de gérer une situation d’urgence dans laquelle plusieurs acteurs sont impliqués, avec un impératif majeur : celui d’être efficace ensemble dans une temporalité brève car il y a un enjeu vital immédiat pour le patient.
4Cette étude se base sur une enquête réalisée au SimulHUG, centre de simulation des Hôpitaux Universitaires de Genève. Ce centre, dirigé par le Dr G. Savoldelli, propose des séances de simulation pleine échelle à des professionnels de santé dans le cadre de formations spécialisées ou continues. L’étude s’intéresse à l’apport de l’interprofessionnalité pour le développement des compétences collaboratives, et ce, dans le contexte particulier de la gestion d’une situation d’urgence vitale en anesthésie ou en réanimation.
Problématique
5L’urgence est définie comme « toute circonstance qui, par sa survenue ou sa découverte, introduit ou laisse supposer un risque fonctionnel ou vital si une action médicale n’est pas entreprise immédiatement » (Institut UPSA de la douleur, 2013) [5]. La particularité de la situation d’urgence vitale fait qu’elle ne peut en aucun cas être gérée efficacement par un professionnel agissant seul, aussi compétent soit-il. En effet, la situation, sur un plan médical, exige une prise en charge par au moins deux personnes, ne serait-ce que d’un point de vue technique pour ventiler le patient, réaliser le cas échéant un massage cardiaque, injecter des drogues de réanimation, donner l’alerte, etc.
6Ainsi, à partir des travaux de Brousseau, 1998, [6] et de Pastré, 1999, [7] sur l’analyse des situations de travail (une totalité dynamique insécable), la situation d’urgence vitale peut être caractérisée par quatre critères :
- La complexité : la situation est un tout dynamique et évolutif, de multiples paramètres sont à prendre en compte à tout instant pour l’analyser et la traiter ;
- L’incertitude : il s’agit d’une situation de crise, caractérisée par un déséquilibre, une instabilité, une imprévisibilité relative dans sa survenue, une incertitude quant à son évolution (pronostic vital ou fonctionnel menacé) ;
- L’immédiateté : l’urgence implique une forme de temporalité basée sur l’ici et le maintenant, obligeant les acteurs à agir sans délai, ce qui constitue un facteur de stress majeur ;
- L’interactivité : en agissant, les acteurs transforment la situation et en retour la situation transforme les acteurs. Ils doivent agir ensemble et se coordonner, dans leurs champs professionnels respectifs : ils sont interdépendants, ils ont besoin les uns des autres pour traiter la situation.
7La situation d’urgence vitale reste relativement rare. Paradoxalement, c’est justement ce caractère peu fréquent qui pose problème, car les professionnels y sont peu souvent confrontés et donc peu préparés. Pourtant, c’est lorsqu’un tel problème survient qu’il faut agir vite et mettre en œuvre un processus de raisonnement clinique et d’actions adaptées permettant de réanimer le patient tout en limitant au maximum le risque de séquelles neurologiques que causerait une réanimation trop tardive ou inefficace. Il s’agit donc d’une situation où la moindre hésitation, erreur ou retard à la décision peut avoir des conséquences graves, voire fatales pour le patient.
8La gestion opérationnelle d’une situation de crise comme celle de l’urgence vitale concerne l’ensemble des tâches attendues pour la traiter : elle est un système complexe d’actions et d’interactions qui impliquent la coopération de plusieurs acteurs, notamment médecins et infirmiers. Le rôle du médecin est d’analyser la situation afin d’envisager des hypothèses quant à la nature du problème, sa cause et son évolution possible. Il doit prendre des décisions, prescrire des thérapeutiques, définir les actions à mettre en œuvre, qu’il gère lui-même pour partie et confie à ses collaborateurs, en particulier à l’infirmier. L’infirmier quant à lui, n’est pas habilité à prescrire des thérapeutiques d’urgence, ni à décider d’actes invasifs comme l’intubation. En revanche, il doit être capable de reconnaître une situation comme relevant de l’urgence vitale, et doit initier des soins, en application de protocoles d’urgence préalablement écrits, datés et signés par le médecin responsable (Code de la santé publique, 2004) [8]. Il doit notamment, dans ce cadre strictement posé, accomplir les actes conservatoires nécessaires jusqu’à l’arrivée d’un médecin. Dans la gestion conjointe d’une telle situation, médecin et infirmier coopèrent et collaborent, l’un prescrivant des actes, l’autre les exécutant, tout en initiant aussi des actions relevant de son propre champ de compétences. Ainsi, la qualité de cette collaboration dépendra de la capacité des acteurs à mobiliser leurs connaissances et leurs savoir-faire, à gérer leur stress, à se comprendre et à coordonner leurs actions.
9Collaboration vient du latin « cum laborare » qui signifie travailler avec. Les principes clés de la collaboration sont la communication, la coopération et la coordination. Ainsi, la collaboration interprofessionnelle est un ensemble de relations et d’interactions qui permettent à des professionnels de mettre en commun, de partager leurs connaissances, leur expertise, leur expérience pour les mettre, de façon concomitante, au service du client (D’Amour, 1999) [9]. La collaboration interprofessionnelle est le lieu de structuration d’une action collective qui réunit médecins et infirmiers autour d’un but commun : ici la réanimation du patient ; elle se réalise à travers un processus d’interactions entre les acteurs d’une part et entre les acteurs et l’environnement d’autre part, dans une dynamique complexe de communications, de prise de décisions, de responsabilités, d’actions et d’apprentissages. Ces acteurs sont interdépendants, ils interagissent selon des modalités qui s’enracinent dans leurs rôles, statuts et cultures professionnelles respectifs. La collaboration interprofessionnelle suppose la connaissance du champ de pratiques de l’autre ainsi que la reconnaissance de ses compétences respectives.
10Or, ces deux groupes professionnels ont été formés dans des structures différentes, cloisonnées, qui ont peu (voire pas) de connections, en particulier en formation initiale. Lors des stages en milieu hospitalier, les apprenants se côtoient mais ne bénéficient pas de temps de formation conjoints où il leur serait possible d’expérimenter des pratiques en collaboration. Il existe peu de mutualisation de moyens pédagogiques au service de modules de formation communs pour médecins et infirmiers en ce qui concerne notamment la gestion des situations d’urgence ou l’annonce d’une mauvaise nouvelle, alors que dans la pratique, ces professionnels doivent travailler ensemble, en complémentarité, dans ce type de situations. De plus, même si ces deux groupes professionnels ont une expérience quotidienne de travail en commun, la réflexion sur la collaboration interprofessionnelle n’est pas réellement formalisée. Elle peut exister de façon informelle sur le lieu de l’action mais elle a une visée essentiellement fonctionnelle. Elle n’est pas organisée en termes de réflexivité sur les pratiques, ni après l’action, ni à distance de l’action, y compris dans le cadre de la formation continue. Dès lors, une formation qui propose d’emblée de réunir des médecins et des infirmiers pour réfléchir sur la gestion collective d’une situation d’urgence peut représenter une réponse possible aux enjeux de qualité et de sécurité des soins.
11Le travail en équipe implique des actions coordonnées entre ses membres. Il ne suffit pas de réunir des personnes expérimentées et compétentes, encore faut-il qu’elles agissent de concert. Une équipe d’experts n’est pas automatiquement une équipe experte ! Aux États-Unis, la publication du rapport « To err is human » (Kohn, Corrigan, Donaldson, 1999) [10], a fait prendre conscience de l’importance du facteur humain dans les erreurs médicales : ce rapport affirme que près de 100 000 Américains meurent chaque année dans les hôpitaux des suites d’erreurs humaines. Celles-ci seraient en cause dans 80 % des incidents évitables. En 2007, G. Chiniara [11] évoque plusieurs études qui montrent que le facteur humain est largement impliqué dans les erreurs médicales, mettant notamment en exergue les dysfonctionnements dans le travail d’équipe et les problèmes de communication. Les conditions d’un travail d’équipe efficace sont notamment une communication interpersonnelle facilitée, l’expression possible des tensions et des désaccords, l’entraide en cas de difficulté d’un des membres, la volonté de suppléance d’un membre défaillant, la connaissance a priori des aptitudes, réactions, initiatives de tous par chacun, la division du travail après élaboration en commun d’objectifs et l’acceptation d’un modèle d’organisation (Mucchielli, 1996) [12].
12Dans la gestion d’une situation de crise, les acteurs agissent avec un objectif commun (réanimer le patient) et chacun des acteurs a un rôle à jouer en fonction de ses attributions, de son expérience, de sa capacité à diriger, etc. Il s’agit de se coordonner et, généralement, pour l’un des membres, de prendre le leadership. Au sein d’une équipe, les professionnels ont généralement des niveaux de compétence différents, et face à l’urgence, leur compréhension de la situation diffère ; pour qu’une équipe soit efficace ensemble, il est nécessaire que chacun ait une conscience éclairée de ce qui est en train de se passer et des objectifs à atteindre. Ainsi, la communication interpersonnelle va être un facteur majeur d’efficacité, elle va jouer un rôle central afin que chaque acteur, occupé à sa tâche particulière (intuber, réaliser le massage cardiaque, …) puisse avoir néanmoins conscience de l’évolution globale de la situation et du résultat des actions des autres afin d’ajuster les siennes. Ainsi, il est clair que les savoirs théoriques et les savoir-faire ne suffisent pas quand il s’agit de se coordonner pour gérer ensemble une situation-problème : le geste, aussi techniquement parfait soit-il, ne suffit pas quand tout dépend du contexte. Il s’agit bien là de développer des compétences particulières : celles de savoir travailler ensemble.
Cadre théorique : l’apprentissage expérientiel et la pratique réflexive au cœur du processus de construction de la compétence collaborative
La situation didactique
13Une séance de simulation pleine échelle comprend généralement trois temps distincts (HAS, 2012) [4] :
- L’introduction (ou briefing) au cours duquel le formateur présente les objectifs pédagogiques, le principe de l’apprentissage expérientiel par simulation, les règles de fonctionnement au sein du groupe, les principes éthiques (confidentialité, non jugement, respect de chacun) et les attentes vis-à-vis des participants (participation active, engagement dans un contexte de réalisme limité).
- La deuxième étape est l’immersion en situation simulée proprement dite (ou encore « passage sur le simulateur ») ; celle-ci est jouée par les apprenants sur la base d’un scénario prédéfini avec un mannequin représentant le patient. Cette étape est filmée. Elle dure environ quinze minutes.
- La dernière étape est celle du débriefing où, à l’issue de l’exercice simulé, les participants vont pouvoir exprimer leurs réactions à chaud sur l’expérience, revenir sur ce qui s’est joué dans la situation, analyser leurs pratiques et réfléchir aux processus de pensée et aux intentions qui ont guidé leurs actions. A cette occasion, l’enregistrement vidéo de l’exercice pourra être utilisé pour revoir des points importants de la situation ou ceux qui sont particulièrement porteurs d’enseignement. Cette étape doit être guidée par le formateur afin de structurer les échanges, gérer l’expression des émotions, garantir la sécurité psychologique des participants et veiller à l’atteinte des objectifs. Cette étape dure quarante-cinq minutes à une heure.
14Il est aujourd’hui unanimement reconnu que le débriefing est l’étape essentielle dans le processus d’apprentissage par la simulation (HAS, 2012) [4]. En effet, la particularité de cette modalité pédagogique est qu’elle se base sur l’apprentissage expérientiel et la réflexivité sur sa pratique. Le simulateur est utilisé comme substitut du réel pour que les apprenants soient immergés dans la situation afin de s’entraîner comme s’ils étaient en situation réelle, mais sans qu’il y ait de risque pour le patient. Elle s’appuie sur l’analyse de situations réelles transposées à des fins didactiques vers des situations de formation permettant l’entraînement des équipes médicales et paramédicales à la gestion de situations critiques. La simulation comme modalité pédagogique est un moyen et non une fin : elle sert de médiateur entre l’apprenant et la situation de référence. Trois propriétés la caractérisent (Pastré, 2011) [7] :
- L’interactivité : l’opérateur prend connaissance du résultat de son action au fur et à mesure. L’apprenant et la situation évoluent l’un et l’autre.
- La fidélité : une réduction de l’écart entre la situation réelle de référence et la situation de formation est recherchée, dans le but d’en faire un substitut du réel ; une fidélité la plus complète possible vise à reproduire toutes les dimensions de la situation réelle : modes opératoires, habiletés nécessaires, environnement, etc., afin de favoriser la mise en œuvre de toutes les dimensions de la compétence.
- La problématicité : la mise en scène du problème est la priorité, il s’agit d’une approche constructiviste reposant sur la résolution de problème.
15Ainsi, la simulation permet à l’apprenant d’être confronté à une situation-problème, de mettre en œuvre les actions nécessaires pour la gérer, puis, dans le temps du débriefing, à distance de l’action, de conscientiser ses modes d’actions individuels ainsi que ses modes de relation avec ses collaborateurs. Cette pédagogie amène à analyser ce qui se joue là et à construire les principes conducteurs de l’action coordonnée.
L’apprentissage expérientiel et la pratique réflexive
16L’expérience est non seulement à l’origine de la connaissance mais elle en est le socle. Car pour Kant, « ce que l’on apprend le plus solidement, c’est ce que l’on expérimente soi-même », principe repris par Dewey, avec son leitmotiv « learning by doing ». En effet, Dewey, 1916, [13] fut le premier à analyser le rôle de l’expérience dans l’apprentissage. Pour lui, l’apprentissage est efficace quand il se fait à la faveur d’expériences qui, en interaction avec l’environnement de l’apprenant, sont en continuité avec les expériences passées : « chaque expérience emprunte aux expériences antérieures et modifie la qualité des expériences ultérieures ». La transformation des connaissances, la construction de nouveaux schèmes d’action (organisation invariante de l’activité pour une classe de situations donnée), (Vergnaud, 2011 [14]), pourront résulter de la confrontation physique, vécue émotionnellement, à la situation, mais aussi et surtout de la réflexivité lors du débriefing par l’intermédiaire des traces mnémoniques laissées par l’expérience et des traces objectives de la vidéo.
17Dans sa théorie de l’apprentissage expérientiel, D. Kolb, 1984, [15] démontre que tout savoir est enraciné dans l’expérience et passe par quatre phases : l’expérience concrète ne peut être apprenante qu’à la condition d’être ensuite réfléchie. Cette observation réfléchie conduit à une conceptualisation abstraite (généralisation, repérage des invariants) dont la validité et la pertinence doivent être vérifiées dans l’expérimentation, c’est-à-dire dans un retour actif et systématique à l’expérience (figure 1 ci-dessus). Dans cette perspective, la structuration du débriefing répond à des objectifs précis et distingue trois phases (HAS, 2012) [4] :
Le cycle d’apprentissage
Le cycle d’apprentissage
- Une première phase de « décompression » permet l’expression des émotions « à chaud ». Les observations des apprenants fournissent ainsi des indices au sujet du vécu de cette expérience singulière, et guident le formateur sur des éléments qui peuvent être importants à débriefer (sentiment d’échec par exemple). Le formateur vérifie également la compréhension des apprenants à propos de l’événement (« quel était le problème ? »).
- Une deuxième phase dite d’analyse a pour but de donner du sens aux expériences vécues. Pendant cette phase, le formateur peut utiliser des passages vidéo comme traces objectives. Il doit tenter de susciter le questionnement des apprenants sur les processus cognitifs et les intentions qui ont guidé leurs actions. Il s’agit ensuite de les conduire à repenser ou renforcer les déterminants fondamentaux de la performance afin d’assurer une meilleure prise en charge des patients dans des situations semblables à l’avenir. Dans cette phase, le formateur aide les apprenants à envisager comment ces enseignements pourraient être transférables à d’autres situations.
- Enfin la dernière phase est une phase de synthèse des apprentissages où les points-clés sont reformulés par les apprenants et traduits en principes opérationnels, de sorte qu’ils puissent être réinvestis afin d’améliorer leur pratique future.
19Avec l’utilisation de la vidéo et des « traces objectives », le sujet devient observateur de sa propre activité et celle-ci est commentée en sa présence par les autres. Il ne s’agit pas de juger l’individu mais bien son action. Selon Leplat, 2006, [16], « agir, se voir agissant lui-même et dans les commentaires de l’autre, voir un autre agir dans la même tâche […] vont amener le sujet à se découvrir des ressources et des possibilités d’action qui vont modifier en même temps son regard sur la tâche et sa manière de répondre à celle-ci ».
20La réflexivité prend l’action du sujet pour objet : elle commence quand le sujet prend sa propre action pour étude (geste, posture, savoir-être), c’est « marcher et se regarder marcher » (Fernagu Oudet, 1999) [17]. Il est difficile d’être dans l’action et de comprendre tout ce qui s’y passe, particulièrement lorsque les contraintes temporelles sont fortes. Le débriefing permet cette distanciation. D’après les travaux d’Argyris et Schön, 1974 [18], le processus d’apprentissage en réflexivité peut se décliner en trois paliers nommés boucles d’apprentissage : dans l’apprentissage en simple boucle, le sujet apprend en corrigeant son action en regard des objectifs mais sans changer fondamentalement les principes théoriques qui la guident. En revanche, dans l’apprentissage en double boucle, ces principes fondateurs sont remis en question : le sujet fait ainsi évoluer ses représentations et modifie ses schèmes opératoires. Enfin, dans un troisième niveau, le sujet apprend à comprendre comment il apprend de façon à réajuster le cas échéant sa méthode d’apprentissage : c’est la métacognition. Dans Le praticien réflexif D. Schön, 1983, [19], affirme que les savoirs d’expérience se construisent dans l’analyse réflexive : il convient de conscientiser le processus qui a permis d’aboutir au résultat afin de pouvoir le corriger ou s’en inspirer dans une situation future. Schön ajoute qu’il est nécessaire que ces savoirs soient partagés et fassent l’objet d’expériences collectives pour mieux évaluer leur pertinence. Ainsi, il faut que les membres du groupe s’engagent dans une réflexion collective pour que l’expérience soit véritablement apprenante. Le groupe sert alors de médiateur, de miroir : il est ressource, soutien, point de comparaison et de repère mais il peut être aussi lieu de tension, de confrontation et de conflit, tout aussi formateurs et producteurs de savoirs (conflit sociocognitif), pour autant que le formateur soit garant d’un cadre sécurisant pour les apprenants. Schön parle de réflexivité sur l’action et de réflexivité dans l’action. Dans la continuité de ces travaux, P. Perrenoud, 2001, [20] distingue réflexivité dans le feu de l’action et réflexivité hors du feu de l’action. Dans l’urgence, il est nécessaire de mobiliser des invariants opératoires (schèmes) afin d’économiser la réflexion et d’agir vite. Pourtant, Schön défend l’idée qu’aucune action professionnelle complexe n’est, même dans l’urgence, une action impensée, produit d’un pur automatisme. L’action découle d’un jugement professionnel, d’une décision qui résulte d’une réflexion dans l’action. En effet, le professionnel doit mettre en œuvre des opérations mentales en vue d’analyser l’événement, de faire un diagnostic de situation et de prendre des décisions sur la stratégie d’actions à mettre en œuvre : il s’agit bien de réfléchir en vue d’agir, même sur le vif. Le schème, lui, dispense de réfléchir lorsque ce n’est ni nécessaire ni possible. La réflexivité dans l’action vise l’efficacité : elle permet au professionnel de s’adapter à la particularité de chaque situation. La pratique est ici réfléchie dans une temporalité brève, dans la singularité du moment vécu et de l’événement. La réflexivité hors du feu de l’action est à la fois rétrospective et prospective (Perrenoud, 2001) [20] : rétrospective car il s’agit de comprendre ce qui s’est passé, ce qui a « marché » ou non, et prospective car il s’agit de capitaliser l’expérience et d’en tirer des savoirs transposables pour la pratique future. La réflexivité sur l’action est différée dans le temps, c’est la mise à distance de l’activité du sujet par lui-même. Sa finalité est la théorisation de l’expérience et la production de savoirs généralisables par la conceptualisation.
L’apprentissage par l’erreur
21Pour Vermersch, 1991, [21], un point important des formations expérientielles est qu’elles « s’enrichissent de la confrontation des différentes expériences, comme de l’effet sécurisant et déculpabilisant du partage des difficultés et des erreurs ». L’erreur en médecine est taboue. Parce que ses conséquences peuvent être graves, voire irrémédiables pour le patient, le soignant qui en est responsable éprouve une forte culpabilité. Depuis quelques années, un changement de regard sur l’erreur a permis que se développe une culture de la gestion des risques en médecine. Elle a pour objectif, entre autres, d’appréhender positivement l’erreur en en tirant enseignement. Dans l’apprentissage par la simulation, l’erreur n’est plus taboue car le mannequin ne risque rien. Au contraire, elle devient un support d’apprentissage car le groupe tente d’analyser les facteurs qui ont amené l’apprenant à se tromper : l’erreur est alors un indicateur du processus cognitif de l’apprenant. Dans une situation de stress, les types d’erreurs observées sont des erreurs en lien avec des automatismes, avec une insuffisance de connaissances ou avec une surcharge cognitive (De Keyser, Woods, 1990) [22].
22L’erreur de fixation est une typologie d’erreurs repérée dans la gestion des situations de crise. Il s’agit d’un terme utilisé pour rendre compte de certaines défaillances dans l’évaluation d’une situation et la prise de décision en médecine. Elle est caractérisée par la persistance de l’erreur malgré la présence d’indices indiquant que la décision est inappropriée. En anesthésie, on observe cela chez les médecins novices comme chez les experts. Les auteurs identifient cinq mécanismes à l’origine de ce phénomène : une défaillance des processus attentionnels (ressources insuffisantes pour traiter l’ensemble des informations), une insuffisance de connaissances (empêchant la reconnaissance du problème), des connaissances inertes (incapacité à les mobiliser pour agir, incluant la variable stress), une difficulté de formulation du problème, un défaut de stratégie d’évaluation (certaines hypothèses ne sont pas prises en compte à cause d’un effet de biais de confirmation : les informations qui viendraient contredire son évaluation première seraient d’emblée rejetées par le sujet, il s’agit d’un « effet tunnel »).
23Lors du débriefing, les erreurs sont particulièrement porteuses d’enseignement, en particulier avec l’utilisation du support vidéo de la séance : le professionnel identifie lui-même son erreur et cherche à analyser ses causes. Loin de stigmatiser et encore moins d’humilier l’apprenant, si le formateur veille à maintenir un climat bienveillant, le focus sur l’erreur peut avoir des vertus d’enseignement pour le sujet comme pour ses collaborateurs, lesquels ont une part de responsabilité dans la persistance de l’erreur (par exemple, en n’ayant pas osé alerter le leader qui se fourvoie). Il convient de travailler alors sur un double objectif : la conscience de la situation et la dynamique d’équipe face à l’erreur.
24L’hétérogénéité d’un groupe pluriprofessionnel peut être constructive dans le sens où les deux professions parlent un langage commun (ce qui permet l’échange) et que leurs différences de postures peuvent être porteuses en termes de modification des représentations de chacun (Meirieu, 1997) [23]. Comprendre les contraintes de l’autre et ses limites peut être un levier de changement des représentations au service d’une meilleure collaboration. Les dispositifs de formation par simulation s’inscrivent dans un contexte collectif : si l’apprentissage est toujours individuel, il s’effectue avec l’aide des autres. Le groupe peut ainsi devenir levier d’apprentissage pour chacun de ses membres.
Enjeux du développement des compétences collaboratives
« Être compétent, c’est finalement trivialement savoir se débrouiller dans des situations critiques, confuses, emmêlées ou imprévues ».
26La compétence est une notion complexe. Elle n’est pas stabilisée, ce qui n’en fait pas un concept, car elle est polysémique et fonctionne comme un « attracteur étrange », selon l’expression empruntée à Le Boterf.
27Dans une synthèse des approches psychologiques, sociologiques, ergonomiques et des sciences de l’éducation, Fernagu Oudet, 2006, [25] retient que la compétence :
- N’est pas uniquement liée à la personne qui la mobilise mais qu’elle la singularise : l’individu va traiter à sa manière la situation en mobilisant des ressources cognitives, expérientielles, affectives, etc., issues de son propre parcours d’apprentissage.
- Est structurée et composite : elle mobilise des ressources de diverses natures qui s’organisent et se structurent au gré des exigences de la situation. Elle se reconfigure en permanence.
- Est apprise et non pérenne : on construit une compétence, on l’acquiert, on la développe mais on peut aussi la perdre car elle s’use si l’on ne s’en sert pas !
- Est contextuelle et inférée à partir des situations de travail : elle ne s’exprime que dans l’action, à condition que les ressources nécessaires soient présentes (le « pouvoir agir ») ; elle est donc singulière et située.
- Se situe dans l’action réussie : elle est par nature inobservable car abstraite mais ce sont ses manifestations que l’on observe : le résultat, la performance. Mais elle ne peut être réduite à cela car alors, l’action réussie pourrait être le fruit du hasard sans pour autant que la personne soit à nouveau compétente dans une situation future. Ce n’est donc qu’à travers l’analyse de l’activité que l’on peut voir qu’une personne est compétente car elle peut expliquer comment elle s’y est prise pour arriver au résultat.
28Pour Le Boterf, 2011, [26], « être compétent, c’est être capable de gérer des situations complexes et instables » ; il propose une approche qui rend compte de la double dimension individuelle et collective de la compétence, résultant d’un savoir agir (combinatoire de ressources : savoirs théoriques, savoir-faire procéduraux, savoir-faire expérientiels et savoir-faire sociaux), d’un vouloir agir (motivation) et d’un pouvoir agir (l’environnement, les autres, le management).
29Dans une situation d’urgence, la collaboration entre les protagonistes est une condition essentielle à une gestion optimale du problème. Comment construire une compétence collective quand la construction des compétences individuelles reste quelque chose de volatile et mystérieux ? Comment aider les équipes à construire ces compétences ? En quoi la simulation peut-elle être un moyen de les développer ? Comment cette articulation entre compétences individuelles pour construire une compétence collective se produit-elle ? L’obtention d’une compétence collective suppose d’abord d’identifier les compétences individuelles pertinentes pour agir dans une situation donnée et de les réunir pour les mettre en synergie. Selon Chedotel et Pujol, 2009, [27], trois théories permettent d’apporter des éléments de compréhension :
- La théorie de l’expertise (Bunderson, 2003) [28] : le groupe est plus performant quand il est capable d’identifier le membre le plus compétent dans une situation donnée, puis de lui donner les moyens de cette expertise et de le mettre au cœur de la tâche. Le choix du groupe se fonde sur la reconnaissance de l’expert à être efficace dans la situation (statut, expérience, capacité à diriger, …) ; la compétence collective est donc la capacité du groupe à reconnaître en l’autre un expert pour traiter de façon optimale la situation.
- La théorie KSA (Knowledge, Skill and Ability requirements for teamwork) (Cannon-Bowers et al., 1995 [29], Morgeson et al., 2005) [30] : elle se base sur les connaissances, compétences et aptitudes individuelles nécessaires pour travailler en équipe, autrement dit des compétences sociales (communiquer, être à l’écoute, …) et organisationnelles (se coordonner, utiliser les ressources de l’environnement).
- La théorie de la diversité (Weber, Donahue, 2001) [31] : souligne la difficulté de mettre en synergie efficacement des compétences individuelles et suggère la nécessité d’un leader pour encadrer les pratiques.
30Dans un collectif tel qu’une équipe de soins, chacun se distingue de l’autre par sa position dans l’espace, son rôle, ses ressources, sa spécialisation ; c’est à travers ces variables que s’organise et se coordonne l’action (Lacoste, 1993) [32]. Si un événement comme l’urgence surgit, chacun cible son action de façon prioritaire sur le problème à traiter et une coopération étroite peut s’instituer. Il semble que la construction d’une représentation partagée de la gestion opérative d’une situation d’urgence puisse être une première hypothèse de développement de compétences collaboratives par l’intermédiaire d’une formation. Selon Wittorski, 2007, [33], l’activité collective qui exige la coordination d’activités individuelles nécessite l’élaboration d’une représentation de référence : la production de schémas coopératifs de résolution de problèmes, l’adoption d’un langage opératif commun. Il s’agit de construire des schèmes communs de référence.
31La compétence collective n’est sans doute pas la simple addition de compétences individuelles mais bien un processus qui la dépasse et la transcende : il s’agit de leur articulation et de leur combinaison spécifique dans un contexte particulier. Il est complexe de différencier compétences collectives et compétences collaboratives. Ces notions sont liées. Néanmoins, il semble que la compétence collective soit une résultante des compétences collaboratives (savoir interagir efficacement avec les autres) ; les compétences collaboratives seraient individuelles alors que la compétence collective serait attribuée à un collectif de travail, une équipe. En ce sens, la compétence collaborative appartient à l’individu quand la compétence collective appartient à l’organisation (Le Boterf, 2011) [34]. La compétence collaborative est un construit social à l’intérieur d’un cadre organisationnel plus ou moins formalisé (D’Amour, 1997) [35], il s’agit d’un phénomène dynamique et évolutif ; elle signifie la capacité pour le sujet à se mettre en synergie avec les autres pour traiter efficacement la situation ; Le Boterf (2011) [34] identifie des compétences « sociales », savoir-faire relationnels et sociaux qui s’expriment dans des situations particulières, qui participent de la compétence collaborative. Ainsi, les indicateurs de compétence collaborative dans la situation de formation par la simulation constitueront le modèle d’analyse de cette étude. Ces indicateurs sont les suivants :
- Agir en anticipant l’action des autres et en rendant son action intelligible pour les autres,
- Savoir interagir, agir non seulement avec, mais en fonction des autres : utiliser les ressources humaines, prendre en compte les contraintes des autres, communiquer les informations dont ils ont besoin et les aider à agir et à atteindre l’objectif,
- Prendre l’initiative et entretenir des relations d’aide, d’encouragement et de solidarité avec les autres acteurs,
- Se positionner en fonction de son degré d’autonomie et de responsabilité en fonction des exigences requises par la situation : faire preuve de leadership / de followership,
- Participer activement à des activités d’échanges et de capitalisation des pratiques professionnelles, savoir apprendre collectivement de l’expérience,
- Exprimer sans crainte et en temps opportun (dans l’action et hors de l’action) ses doutes, ses limites, ses besoins d’aide pour ne pas mettre en difficulté l’action des autres (et a fortiori pour ne pas mettre en péril la sécurité et la vie du malade).
Hypothèses
32Afin d’explorer cette problématique pratique, des hypothèses de travail sont posées :
- La formation par la simulation, parce qu’elle offre un espace privilégié d’échanges entre professionnels médecins et infirmiers qui vivent ensemble une même expérience, peut contribuer au développement de la compétence collaborative.
- La formation en groupes pluriprofessionnels, en agissant sur les représentations des soignants au sujet de leurs collaborateurs, permet de développer des ressources au service de la compétence collaborative.
- Le leadership est une question centrale dans la gestion coordonnée d’une situation d’urgence.
- La construction d’un modèle de référence partagé permet de créer le terreau d’une collaboration interprofessionnelle efficiente dans la gestion d’une situation d’urgence.
Méthodologie
33L’objectif est d’étudier l’apport de l’interprofessionnalité dans le développement des compétences collaboratives et d’apprécier l’apport de la pédagogie par la simulation dans cet apprentissage.
34L’étude se base sur l’observation directe de onze groupes en formation (figure 2 ci-dessous). Dans ces groupes, composés de quatre à dix personnes, chaque apprenant était la plupart du temps au moins une fois en charge du « patient ». Cependant, dans les groupes de dix personnes, certains n’étaient qu’observateurs ou figurants, mais participaient activement au débriefing. Les séances ont été observées dans leur intégralité : elles comprenaient un briefing d’introduction et plusieurs scenarii (passage sur le simulateur suivi d’un débriefing). Les observations étaient plus spécifiquement ciblées sur le débriefing et en particulier sur les éléments en lien avec les compétences collaboratives. Quatre groupes étaient mono professionnels et sept pluriprofessionnels. Il s’agissait de trois groupes d’infirmiers en formation spécialisée en soins intensifs [1], d’un groupe d’internes en anesthésie, et de sept groupes mixtes de médecins et infirmiers anesthésistes en formation continue. Il ne s’agit pas d’une étude comparative, l’échantillon trop restreint et la diversité dans la composition des groupes ne permettait pas d’envisager une telle étude.
35Ces observations ont été complétées par des entretiens semi-directifs avec certains participants de ces groupes (figure 3 p. 39). Ces entretiens avaient pour objectif complémentaire de faire préciser les apprentissages réalisés ainsi que la perception des avantages ou inconvénients de l’interprofessionnalité. Les personnes interrogées forment un panel de neuf personnes : trois médecins et six infirmiers. La plupart (sept sur neuf) sont des personnes en formation spécialisée (internes en anesthésie ou infirmiers de soins intensifs). Sur ces neuf personnes, cinq ont participé à une formation en groupe pluriprofessionnel, et deux des quatre autres avaient expérimenté la pluriprofessionnalité dans une formation antérieure. Seuls les deux internes n’ont pas expérimenté la pluriprofessionnalité en formation. Les entretiens ont été réalisés soit à l’issue de la séance de formation, soit sur rendez-vous à distance de quelques jours à trois semaines. Ils ont duré entre vingt-cinq minutes et une heure.
Caractéristiques des groupes en formation
Caractéristiques des groupes en formation
36Les indicateurs de compétences collaboratives ont permis de construire une trame d’entretien et une grille d’analyse des données recueillies. Les entretiens et les débriefings ont la plupart du temps été traités conjointement. Les items en lien avec les apprentissages et l’intérêt de la pluriprofessionnalité ont été analysés plus spécifiquement dans les entretiens. Il s’agit d’une analyse qualitative.
Résultats
Prise de conscience de l’importance des facteurs humains
37Bien que les apprenants relativisent la situation, « pas d’enjeu pour la vie du patient », l’implication, la perception de sa responsabilité, de son « devoir agir » génère un niveau de stress important. Le niveau de stress peut être tel qu’il paralyse l’action « j’étais comme vide ». Parfois au contraire la précipitation est telle qu’elle peut conduire à des réactions réflexes inadaptées de type stimulus-réponse, commandées par des automatismes mais insuffisamment réfléchies (ces quelques secondes nécessaires à la réflexion dans le feu de l’action pour s’ajuster à la situation particulière). Plusieurs personnes mettent en évidence la contagiosité du stress, notamment s’il émane du médecin : « si le médecin est stressé, il va me transmettre son stress, s’il est calme, je me dirai il assure, il sait où il va, donc je sais où je vais ». Le calme affiché par le médecin est interprété comme traduisant le contrôle de la situation, en conséquence les collaborateurs sont confiants et eux-mêmes peuvent agir avec calme. Tous les groupes affirment qu’ils ont perdu la notion du temps durant l’épisode critique. Il existe une distorsion temporelle : soit on surestime la durée, soit on la sous-estime. Lors d’un débriefing, le formateur a demandé à chacun d’estimer le temps passé entre l’événement critique (l’obstruction de la sonde d’intubation) et la reprise d’une ventilation correcte : l’estimation se situait entre trois et cinq minutes alors que le temps réel était de cinq minutes ; les bonnes réponses ont été données par les observateurs (figurants) : la durée de l’incident a donc été sous-estimée par les acteurs, ceux qui étaient précisément chargés de gérer l’incident…
38Plusieurs personnes disent n’avoir pas entendu, dans le feu de l’action, ce qui est dit par les autres, il y a comme une fermeture sensorielle à tout ce qui peut perturber la centration sur le problème, le raisonnement intellectuel à l’œuvre ou l’action, de façon à économiser les ressources psychiques : « le chirurgien a proposé à deux reprises de masser mais personne ne l’a entendu ». Parfois, l’insuffisance de connaissances ne permet pas d’analyser avec pertinence la situation « on n’entend que ce qu’on est capable d’analyser » dit un formateur. La perception de la situation peut être perturbée, témoignant d’une charge cognitive dépassant les ressources de la personne : « on était partis dans notre truc… on n’a rien vu ! ». Les erreurs de fixation sont ainsi particulièrement fréquentes (six groupes sur onze) : « je me suis fait un peu embarquer sur mon idée d’hypovolémie… », « Je m’étais fixé sur la bradycardie et j’ai pas vu la PIC [2] qui montait », témoignant du rejet non conscient de tout élément qui ne viendrait pas corroborer la première hypothèse à laquelle le sujet s’accroche. L’erreur, même si ici elle n’a pas de conséquence sur le patient, crée le trouble chez les apprenants, « on se dit, c’est pas possible, pourquoi j’ai fait ça ? ». Ce temps d’expression est particulièrement important parce que l’erreur déstabilise la personne. Le formateur doit favoriser la distanciation et la recherche objective et dépassionnée des causes et des améliorations possibles. La remise en question est forte mais grâce aux échanges, on apprend, la personne profite des erreurs d’autrui aussi bien que des siennes et aura potentiellement appris à les éviter dans une situation future.
Profil des personnes interrogées
Profil des personnes interrogées
Impacts sur le travail en équipe : leadership, followership, confiance
39C’est naturellement au médecin que revient le rôle de leader : c’est lui qui est habilité à prendre les décisions, donc il est naturel qu’on lui laisse spontanément cette place. Cette place est légitime, reconnue par le groupe, souhaitée même « Quand le médecin arrive, on se relâche ». La difficulté arrive quand il n’y a pas de médecin (un binôme d’infirmiers) « je me suis rendue compte qu’une de mes collègues avait pris le dessus mais je suis quelqu’un de docile alors on s’adapte… » ou quand il y a plusieurs médecins : « plusieurs chefs ça va pas… c’est le chaos… » ou encore quand le médecin est incompétent à gérer la situation « je me voyais pas prendre le leader, c’est pas à moi de le faire ! », dit l’infirmière. Le leadership est un construit social et, quand ce n’est pas le statut qui le détermine, alors ce sont les compétences : « elles (les infirmières) savaient quoi faire, je comptais sur elles », dira un interne. Ainsi, l’infirmière peut être légitimée par le médecin novice à prendre le leadership : cette prise de conscience s’est faite a posteriori au moment du débriefing alors que cela avait suscité incompréhension et tension au moment de la simulation. La position d’extériorité du leader a été systématiquement évoquée dans les débriefings : ne pas être impliqué dans l’action, prendre du recul, être en retrait « pour avoir conscience de la situation » et en « avoir une vision globale ». La question de la confiance est primordiale ; pour le médecin, se fier à ce que lui disent les collaborateurs et ne pas « sentir les choses » physiquement par lui-même peut être compliqué. Un bon leader, c’est quelqu’un qui fait confiance à ses collaborateurs, « un bon chef c’est celui qui vous dit : alors, tu ferais quoi ? ».
40Leadership et followership sont co-construits : en effet, « c’est fou, tout le monde suit, le fait de distribuer les ordres, tout s’enchaîne, on a l’impression que tout devient fluide », s’étonne une infirmière lors du visionnage de la vidéo de la séance. On note que le followership est une posture tellement naturelle à l’infirmière que lorsque le médecin est défaillant et qu’elle se sent en capacité et en devoir de prendre le leadership, elle s’exclame : « je me freinais ! j’ai pas l’habitude qu’on ne me dise pas ce que je dois faire ! ». Néanmoins, cette posture d’exécutant du suiveur est à nuancer dès lors que l’infirmier est plus expérimenté : il s’autorise alors à faire des suggestions au médecin, lesquelles sont souvent appréciées par celui-ci : « oui, j’aurais pu entendre ça, d’autant que je n’avais pas toutes les infos… ». Là encore, les échanges lors du débriefing permettent de mettre des mots sur ce que chacun pensait ou ressentait sans oser l’exprimer.
41La question de la confiance est revenue de façon importante lors des entretiens (six fois citée), à la fois en regard de la situation de formation, car on se livre au regard de l’autre dans cet exercice, et en regard des situations de travail dans la vie réelle. La confiance passe par la connaissance de l’autre, de ses compétences, de ses limites : « Connaître la personne avec qui on travaille, c’est essentiel dans une situation d’urgence… on a du mal à faire confiance aux nouveaux… ». Selon Bandura (2001) [36], le sentiment d’efficacité collective est « la croyance partagée par un groupe en ses capacités conjointes d’organiser et d’exécuter les actions nécessaires pour produire un niveau donné de réalisation ». L’un des groupes a manifesté ce sentiment de façon assez sensible : « j’étais contente, on avait réussi à sauver le patient ! », « on était super connectés », « j’ai senti un super travail d’équipe », ce que confirmera le médecin lorsqu’il arrive, appelé en renfort : « je savais que l’équipe fonctionnait bien dès que je suis entrée ». En termes de transfert des apprentissages, l’une des infirmières dira au sujet de la collaboration, quelques jours après la formation « après dans le travail, ça coulait de source ». Dans un autre groupe, une infirmière confirme « quand on fait une réa avec une personne avec qui on a fait la formation simulation, on est plus efficace… ». La satisfaction particulièrement forte à l’idée d’avoir réussi ensemble à « sauver le patient » (même s’il ne s’agit ici que d’un faux patient !), peut générer un fort sentiment d’efficacité personnelle dans le sens où l’on a contribué à cette réussite, où l’on a été l’un des acteurs de la performance.
Une communication opérative
42En termes de communication, les personnes se parlent parfois peu dans l’exercice simulé : « on communique aussi beaucoup par geste et par regard… on a confiance l’un en l’autre et on se comprend sans forcément parler… », dira une infirmière anesthésiste. Cela est confirmé dans un autre groupe par un formateur qui remarque « on voit que vous avez l’habitude de travailler ensemble parce que vous ne vous parlez pas beaucoup ». Il existe une communication non verbale implicite entre professionnels qui se connaissent et ont l’habitude de travailler ensemble : l’existence de codes (gestes), de regards éloquents signifiants pour le collaborateur. Néanmoins, remarque une infirmière, « c’est vrai que les autres ne comprennent pas forcément ». Aussi, plusieurs personnes évoquent la nécessité de verbaliser ce qu’elles font afin d’informer les collaborateurs. Navarro, 1993, [37], envisage la communication interpersonnelle opérative comme :
- une action mutuelle, coopérative, basée sur le traitement d’indices permettant de rendre les échanges efficaces (maintien des objectifs, compréhension mutuelle),
- supposant un espace commun de connaissances (référents communs),
- nécessitant un degré de pertinence élevé, les informations transmises devant être adaptées à l’interlocuteur.
43Ainsi, entre le médecin et l’infirmier, entre le novice et l’expert, la communication devra être ajustée à l’interlocuteur, ce qui suppose pour l’émetteur une évaluation des aptitudes du récepteur à décoder le message. La première leçon retenue est celle d’éviter de parler tous en même temps afin que l’on puisse se comprendre et d’adapter sa communication à l’interlocuteur « connaître la compétence des collaborateurs pour cibler les demandes ». Ensuite, il est important de cibler la personne à qui l’on s’adresse : comme le suggère un formateur « X, peux-tu préparer l’adré [3] ? » engage la personne qui le reçoit davantage que « il faut préparer l’adré » adressé à la cantonade », le risque étant que personne ne se sente concerné par la demande, ou plusieurs personnes, ce qui serait contre-productif. Lors des débriefings, les échanges portent sur la nécessité d’être clair et précis dans ses demandes : « quand on dit « c’est bon j’ai vérifié », dire de quoi on parle, que ce soit clair et rapide » parce que l’interlocuteur est sur autre chose, que cela lui demande donc un effort cognitif pour se rappeler de quoi l’autre parle, et cela peut créer des malentendus. Enfin, il est profitable de mettre le focus sur l’étude des boucles de communication. Dans la communication opérationnelle en situation d’urgence, il est capital que le message soit délivré de façon claire, précise et univoque, afin qu’il soit compris et qu’il permette l’action. En médecine, il n’existe pas de règles de communication et de phraséologie formalisées. Cependant, des techniques ou des outils peuvent être utilisés : on parle de « fermeture des boucles de communication » : le leader demande la réalisation d’un acte, le collaborateur annonce qu’il s’en charge (fonction proactive) et prévient le leader quand cet acte a été effectué (fonction rétroactive). Cette technique est d’un usage assez courant et spontané dans les équipes d’anesthésie. Aussi, lorsqu’une équipe a mis en place une communication opérative efficace, il est important de la mettre en évidence afin de valoriser ces bonnes pratiques et les ancrer dans les esprits :
- Médecin, qui ventile : « M., t’as le respi ? »,
- Aide-soignante, M. : « respi prêt ! »,
- Médecin, à l’infirmier qui masse : « tu as fait ton cycle [4] ? »
- Infirmier, D. : « cycle OK »,
- Médecin : « vérifie le pouls en fémoral ! »,
- Infirmier D., interrompant le massage pour vérifier : « j’ai pas de pouls »,
- Médecin : « OK, on masse ».
44Dans ce bref échange, dont la vidéo est projetée lors du débriefing, la communication, initiée par le médecin qui coordonne, est concise, rapide et efficace : les interlocuteurs comprennent le message car ils sont en mesure de le décoder, ils apportent ainsi une information claire et précise en retour ; la communication est ainsi parfaitement opérationnelle dans le contexte de la réanimation cardiopulmonaire.
45Enfin, il existe une prise de conscience de la nécessité de verbaliser ce que l’on fait ou ce que l’on pense pour se faire entendre et comprendre de l’autre (cité neuf fois), pour prévenir le risque de malentendu et pour que l’autre sache ce que l’on est en train de faire. Le fait de verbaliser permet de rendre son action ou sa réflexion intelligible pour les autres. Penser à haute voix est à la fois une aide pour les autres mais aussi pour soi-même « je le fais pour tout le monde et pour moi, pour comprendre », cela permet de demander de façon implicite une confirmation ou de l’aide au raisonnement. En revanche, il faut savoir doser et ne pas trop parler afin de ne pas gêner la réflexion. En ce qui concerne le fait, pour une infirmière, d’oser suggérer à un médecin d’autres hypothèses, la question est revenue à plusieurs reprises : « je voulais masser mais je me suis pas autorisée à le dire », dira une infirmière à un médecin. Au-delà de la question des rôles et du biais possible de la situation de formation, c’est bien là une situation qui peut se produire dans la vie réelle : la difficulté de positionnement de l’infirmière face au médecin peut l’empêcher d’oser faire des suggestions, voire de prendre des initiatives pertinentes et nécessaires. L’un des groupes de médecins a évoqué ce problème et a pris conscience de la nécessité de créer un climat de travail favorable à cette liberté d’expression : « être conscient qu’il faut instaurer un climat de confiance pour qu’un infirmier puisse oser dire ».
46Le débriefing permet d’échanger avec ses pairs et avec ses collaborateurs au sujet de la situation-problème et de sa manière de la gérer, ce qui est une occasion d’enrichissement : « on le partage avec les autres et ça, ça fait avancer… ». Les stratégies d’actions choisies sont argumentées et discutées, cela permet d’expliciter ses choix en termes de bénéfice/ risque pour le patient, de mobiliser ses connaissances, d’en acquérir de nouvelles issues de la confrontation avec celles des autres. Cet échange permet en outre d’exprimer ses doutes « je ne savais pas quelle était la meilleure solution, comment faire le bon choix », d’oser dire que l’on ne sait pas. C’est aussi l’occasion d’analyser sa prestation au regard des bonnes pratiques et de chercher ensemble comment mieux faire la prochaine fois « faire un retour en arrière sur ce qui a été bien et ce qui n’a pas été fait correctement et qu’on pourrait améliorer ».
Une meilleure connaissance de l’autre
47On apprend ainsi à mieux connaître l’autre : le pair ou le collaborateur. En ce qui concerne le pair, apparaît dans les entretiens la question de la comparaison qui permet de se situer : l’opportunité de pouvoir observer le pair exécuter une activité donnée est une expérience vicariante : elle constitue une source d’information importante qui influence la perception de son auto-efficacité (Bandura, 1985) [38]. Voir l’autre, le pair, agir avec succès dans la situation-problème malgré la difficulté augmente la croyance en ses propres capacités. Observer la réussite ou l’échec de ses semblables peut influencer le sentiment d’efficacité personnelle d’un individu par le fait d’un processus d’identification projective. Mais le fait d’observer le pair conduit aussi à une meilleure compréhension de celui-ci, de ses atouts et de ses limites.
48En ce qui concerne le collaborateur, il existe une différence entre les groupes pluriprofessionnels et les groupes mono professionnels. Dans ces derniers, les infirmières anesthésistes ont joué le rôle de médecin et ont pu se rendre compte de la difficulté d’avoir à prendre des décisions. En revanche, chez les médecins, l’un des internes exprime le biais que constitue le fait de jouer le rôle de l’infirmier « je me freinais ». Ils ne disent pas avoir développé de connaissances sur le rôle de leur collaborateur. La question de la collaboration avec l’infirmier sur le plan des rôles n’a pas vraiment été traitée dans les trois groupes de médecins, si ce n’est de façon anecdotique « j’avais un super infirmier ! », dit l’un d’entre eux de son collègue. Dans les groupes pluriprofessionnels, le fait d’échanger ensemble permet de mieux connaître le collaborateur et de mieux comprendre ses contraintes, en particulier la difficulté de la prise de décision pour les médecins.
La question de la pluriprofessionnalité
49Six personnes sur neuf ne voient aucun inconvénient à se former en groupes pluriprofessionnels, pour les trois autres personnes, deux n’en expriment pas et la troisième (infirmière) fait part de ses réserves : « les médecins vont répondre plus rapidement que nous… avec des mots plus justes que nous… c’est eux qui prennent l’avantage » ; cette personne a participé à une formation mono professionnelle mais elle a eu auparavant une expérience en groupe mixte. En ce qui concerne la question de l’égalité, trois infirmiers expriment au contraire le sentiment que cela met tout le monde dans une relation plus égalitaire « on est autour d’une table et on a l’opportunité de pouvoir se dire les choses en face », « on a le droit de faire des remarques à un médecin… ». Trois personnes trouvent cela pertinent car c’est le reflet de la réalité : « face aux situations d’urgence c’est ensemble que l’on travaille. C’est même le moment où l’on travaille le plus intensément ensemble », dit un interne. Cinq personnes considèrent que c’est une opportunité pour apprendre de l’autre ou sur l’autre : un infirmier « ils apprennent aussi à nous connaître, ils voient comment on travaille… », « Regarder d’un œil extérieur comment l’autre agit, réagit ». Enfin, peut-être, faire évoluer ses représentations sur le collaborateur : « maintenant quand on se voit, on se voit autrement… », « … s’ils ont des a priori vis-à-vis de tel infirmier, ça peut les faire changer d’avis parce qu’ils peuvent le voir autrement… », « ils ne sont pas parfaits, … et nous non plus… » : ces remarques émanent exclusivement d’infirmiers, il semble que transparaît ici le souhait d’être perçu autrement par le médecin, mieux reconnu pour ses compétences peut-être ? On ne retrouve pas dans les groupes mono professionnels d’éléments en lien avec la connaissance du collaborateur, si ce n’est la perception du bien-fondé des formations interprofessionnelles.
50En termes d’apprentissages, ce qui fait dire qu’il y a formalisation de schémas communs, c’est le tour de table de synthèse à la fin du débriefing, au cours duquel sont mis en évidence les principes fondamentaux retenus par les apprenants. Pour cinq groupes, c’est la découverte d’outils d’aide à la réflexion ou à la transmission des informations qui constitue l’apprentissage. Sept groupes évoquent la nécessité de mieux communiquer en verbalisant davantage et en exprimant leurs hypothèses à haute voix. D’autres principes clés sont évoqués : savoir reconnaître ses limites et appeler à l’aide précocement (cinq groupes), anticiper davantage (cinq groupes), prendre du recul et s’obliger à réfléchir dans le feu de l’action (quatre groupes).
Discussion
Apports et limites de la simulation dans le développement des compétences collaboratives
Des émotions fortes pour mieux apprendre
51Le caractère émotionnel de l’expérience est une dimension forte de l’apprentissage : éprouver les choses physiquement (en agissant en temps réel, en réalisant le geste comme on le ferait dans une situation réelle) et ressentir des sentiments forts en se projetant dans la situation comme s’il s’agissait d’un vrai patient, marque les esprits. Il y a comme une mémorisation de l’événement vécu en l’associant aux émotions et affects qui l’accompagnent. « L’intégration de l’expérience dans des schèmes durables est d’autant plus forte qu’elle est effectuée dans des circonstances qui se démarquent de la routine et qui sont associées à des émotions fortes » (Le Boterf, 2008) [39]. Ainsi, lors d’une confrontation future à une situation de ce type, réelle cette fois, la mobilisation des schèmes, devrait être plus aisée parce que la situation fera écho à celle vécue en formation et aux émotions ressenties alors. Cette expérience s’imprime d’autant mieux qu’elle est ensuite repensée, les actions examinées et les intentions questionnées. La prise de conscience, facilitée par les traces objectives de la vidéo, des actes non conscients effectués, tant dans la réalisation de gestes techniques que dans l’attitude, la posture ou le rapport aux autres, est un élément fort de ces formations. C’est parfois une découverte, voire une surprise, dans la perception de soi-même et des autres. En ce sens, cela fait évoluer la représentation de soi en situation de travail, dans son mode de collaboration, soit vers un renforcement de la confiance en soi, soit vers le réajustement de gestes, d’attitudes ou de comportements vis-à-vis des autres, ce qui contribue à la construction de nouveaux schèmes.
Un apprentissage co-construit
52Dans une perspective socioconstructiviste, l’aspect social des situations dans lesquelles l’apprenant est engagé (interaction avec les autres, posture du formateur, conditions dans lesquelles se déroule l’expérience), est un élément fort de l’expérience, donc de la transaction. Ici, le groupe fait partie intégrante du processus d’apprentissage, il en est un ingrédient à part entière. « On apprend toujours seul, mais jamais sans les autres » (Carré, 2001) [40], et c’est bien dans l’interaction entre les apprenants, et avec le formateur, que vont se construire les savoirs actionnables. Ce qui est travaillé au sein du groupe dans la phase de débriefing doit produire une double restructuration des relations interpersonnelles et de l’organisation collective de l’action : comment on interagit ensemble et comment on gère le problème ensemble. Il y a co-production d’invariants opératoires et co-construction de sens : plus les apprenants sont proactifs et participatifs dans ce processus d’élaboration, meilleures seront les chances qu’ils s’approprient individuellement les principes construits. Cette intériorisation deviendra une ressource mobilisable, donc transposable dans une situation future. Partant de ce constat, il est nécessaire que l’apprenant soit véritablement acteur et proactif dans cette démarche. Aussi, la taille du groupe est une limite : les groupes comprenant plus de six personnes, au sein desquels tous ne sont pas acteurs, ont probablement une portée moindre en termes d’apprentissage pour ceux qui sont observateurs, même si l’on apprend aussi dans cette position.
Une expérimentation active favorable au transfert
53Un autre élément en faveur du transfert des apprentissages est la répétition des scenarii au cours d’une même séance de formation. Si la situation-problème à traiter est différente d’un scénario à l’autre sur un plan médical, les principes fondamentaux reconnus ou construits lors du débriefing de la situation précédente restent identiques en ce qui concerne les compétences collaboratives. Par conséquent, ce qui a été analysé, et en particulier les schémas opératifs communs formalisés, peuvent être immédiatement réinvestis dans une nouvelle expérience. Cette mise en application immédiate, cette expérimentation active des nouveaux schèmes d’action, en favorise l’intégration individuelle, ce qui en fait un élément favorable au transfert dans la pratique future. Au fur et à mesure du déroulement des scenarii, une évolution positive de la performance des équipes en termes de communication a été constatée.
54Il est difficile d’apprécier le transfert, au niveau individuel, des acquis de la formation parce qu’il n’existe pas ici de réelles évaluations de l’efficacité pédagogique de ces séances. Du point de vue de la compétence collective d’une équipe de travail, c’est encore plus difficile à évaluer car celle-ci est à la fois inférée aux situations de travail et aux individus qui composent l’équipe. La perception de certaines personnes quant à l’efficacité des prises en charge de l’urgence va dans le sens d’une meilleure performance dans la « vie réelle » lorsqu’ils ont été formés ensemble sur le simulateur, mais cela reste une impression et n’est pas objectivé par des indicateurs précis, au moins au niveau de cette étude. Quoi qu’il en soit, la configuration d’une équipe de soins dans le contexte du bloc opératoire ou de la réanimation est sans cesse changeante, au gré des roulements des personnels soignants et des gardes des médecins. Ainsi, même si les personnes appartiennent à la même équipe, le groupe de travail est constitué chaque jour de personnes différentes. La dynamique des interactions est alors sans cesse à construire. La construction d’une compétence collective stabilisée est illusoire. Il faut alors miser sur les compétences individuelles à travailler en équipe, c’est-à-dire sur les compétences collaboratives davantage que sur la compétence collective.
55Nonobstant, il est raisonnable de penser que cette formation crée des conditions favorables à l’émergence et au transfert de ces compétences. En effet, selon Wittorski, 2007, [33], il faut que plusieurs conditions soient réunies :
- L’existence d’une situation de co-action visant à produire un nouveau schéma d’actions : c’est le cas avec l’expérience en groupe sur le simulateur et la gestion conjointe du problème.
- L’élaboration, à cette occasion, d’une représentation opératoire collective et la production d’un schéma coopératif de résolution de problèmes : c’est le cas lors du débriefing avec la recherche des invariants opératoires, la connaissance et l’utilisation d’algorithmes décisionnels et la production de schémas opératifs communs.
- Un recadrage collectif à l’occasion de la production de la solution collective, soit un changement dans la façon habituelle de penser et voir la situation. Ici, la régulation, la médiation du formateur, le feedback, les échanges et le miroir des autres font évoluer les représentations et modifient les schèmes antérieurs.
56De ce point de vue, il existe un fort potentiel de développement de ces compétences au moyen de ce dispositif de formation. En effet, ces formations sont l’occasion de construire ou de mobiliser des schémas opératifs communs au regard de la communication : cibler les demandes, nommer la personne, avoir un langage précis, concis et structuré. C’est aussi la prise de conscience que l’autre peut avoir des représentations différentes des siennes qui est intéressante du point de vue de la collaboration. En effet, si l’individu a conscience que l’autre n’a pas forcément le même niveau d’analyse de la situation (et c’est le cas entre novices et experts, entre infirmiers et médecins), alors il veillera à adapter sa communication et à rendre sa réflexion explicite pour que chacun dans l’équipe puisse comprendre quel est l’objectif commun à atteindre et comment l’atteindre en coordonnant son action à celle des autres.
Apports et limites de la formation interdisciplinaire dans le développement des compétences collaboratives
Une modalité innovante
57Dans une perspective d’amélioration de la qualité et de la sécurité des soins, le concept d’éducation interprofessionnelle (Gallan, Clerc, Gachoud, Morin, 2011) [41] est depuis quelques années en plein essor dans les pays anglo-saxons. En Europe, il existe quelques initiatives mais elles restent rares et elles concernent essentiellement des dispositifs utilisant la simulation. Les exigences actuelles en matière de gestion des risques orientent naturellement vers une nouvelle approche de la formation des professionnels de santé. L’approche par compétence des nouveaux référentiels de formation amène à reconsidérer la pédagogie à partir de l’analyse des situations de travail. Ces situations de travail mettant en présence des professionnels issus de différentes disciplines, il est logique que la dimension interprofessionnelle soit aujourd’hui prise en compte au niveau de la formation. Parce qu’il modifie les usages et les pratiques habituelles de formation, dans l’optique de s’adapter au contexte, le décloisonnement favorisant l’interprofessionnalité est une pratique innovante.
Un dispositif permettant de mieux connaître son collaborateur
58Dans les groupes réunissant des professionnels médecins et infirmiers issus d’un même service, la formation est l’occasion de découvrir une nouvelle facette de son collaborateur. Se former ensemble permet de mieux se connaître. La connaissance de l’autre, l’évaluation de ses compétences et de ses limites permet à l’individu d’apprécier quel soutien il pourra attendre de son collaborateur. Pourtant, chaque jour, dans leur service, les professionnels peuvent faire ce type d’évaluation vis-à-vis de leurs collègues ! Alors qu’est-ce que cette formation amène de plus ? Il semble que deux éléments peuvent entrer en jeu. D’une part, le temps privilégié et le lieu particulier de la formation (hors du temps et de l’espace quotidien du travail) permettent de se poser, de prendre du recul par rapport au rythme soutenu du travail, ce qui en fait un lieu de rencontre interpersonnelle. Ensuite, la pratique réflexive partagée au sein du groupe permet à chacun de s’exprimer, de parler de sa pratique, de se mettre en danger parfois dans l’expression de ses doutes ou de son vécu intime de l’échec, ce qui implique l’écoute de l’autre, la confiance et le non jugement. Reconnaître en l’autre les limites que l’on se reconnaît à soi-même crée une certaine proximité, et les partager construit de la complicité et de la confiance.
59Peut-être est-ce cette humilité partagée qui crée un facteur de cohésion pour la pratique collective future ? Lorsque les personnes interrogées disent que la formation leur a permis de voir l’autre différemment, d’avoir une relation différente (notamment plus symétrique), alors qu’elles sont issues de la même équipe, c’est bien un acquis de la formation. Dans les équipes composées de personnels de spécialisations diverses, il est nécessaire que chacun acquière un minimum de connaissances sur le champ d’activité de l’autre. Alors créer des conditions de formation qui favorisent les échanges afin de mieux connaître le domaine de responsabilité de l’autre, ses contraintes, ses difficultés, permet sans doute de mieux communiquer et de mieux se comprendre.
Travailler l’affirmation de soi
60Ces formations permettent de mesurer la complexité du positionnement de chacun dans la dynamique de gestion d’une situation de crise. Les difficultés de positionnement des infirmiers par rapport aux médecins peuvent générer des attitudes de retrait : ne pas oser dire au médecin qu’il se trompe, ne pas oser prendre les initiatives qui s’imposent. L’un des groupes de médecins l’a évoqué : il faut que l’infirmier puisse oser dire, et pour cela, il faut qu’il se sente autorisé par le médecin à dire les choses. Alors, il faut que les infirmiers entendent cela de la part des médecins… Quoi de mieux que de les réunir autour d’une table pour réfléchir ensemble à tout ce que cela implique ? L’étude a relevé un nombre élevé d’erreurs de fixation au cours des mises en situation sur simulateur, particulièrement chez les novices mais parfois aussi chez les experts. Elle a mis en évidence que certaines personnes, notamment celles qui n’étaient pas directement dans l’action, avaient eu conscience de l’erreur ou avaient été en mesure d’évaluer la situation mieux ou plus tôt que les acteurs principaux. Bien que la situation de formation représente un biais possible, il a été mis en évidence que le fait de dire à l’autre qu’il se trompe ou lui suggérer une autre hypothèse ou action plus adaptée, était loin d’être simple pour les professionnels. Prendre conscience que celui qui est dans l’action a un raisonnement moins exhaustif, une vision plus partielle que celui qui est plus en retrait, est fondamental. Dès lors, des principes d’action pourraient être envisagés : la mise en retrait systématique en posture d’observateur d’une des personnes de l’équipe, que ce soit le leader ou une personne compétente déléguée par le leader à ce poste, que ce soit un médecin ou un infirmier expert. En quelque sorte une redéfinition de la manière de coopérer…
Les limites de la formation interprofessionnelle
61Bien qu’elle soit plébiscitée par la plupart des participants, la formation en groupe pluriprofessionnel peut présenter quelques limites, voire quelques risques, que le formateur doit connaître afin de les prévenir et de les gérer. Une des infirmières interrogées y a fait allusion : les médecins, de par leur formation, ont un niveau de connaissances médicales supérieur par rapport aux infirmiers. Aussi, lorsqu’il est question, au moment du débriefing, d’évoquer la nature du problème médical, il est certain que le médecin aura davantage d’éléments de réponse. Le risque est alors qu’il monopolise la parole sur le cas et que l’infirmier n’ose pas exprimer ses propres questionnements. Les échanges sur les hypothèses interprétatives sur le plan médical peuvent être inégalitaires, en particulier lorsqu’il s’agit de public en formation spécialisée, donc novice. Par ailleurs, la question du leadership étant centrale, il est possible que le focus soit mis de façon privilégiée sur le rôle, la posture et les actions du leader (le médecin, par conséquent) au détriment de ceux des collaborateurs. Ceux-ci peuvent alors se sentir délaissés et l’intérêt formatif de moindre valeur pour eux. Il est donc important de veiller à équilibrer les temps d’expression pour chacun. L’étude du followership et du rôle actif du follower doit donc faire partie des points à aborder.
Travailler le followership actif
62En effet, reconnaître en l’autre un leader, c’est d’emblée accepter de le suivre dans ses décisions : on parle alors de followership. R. Kelley définit quatre styles de followership qui s’organisent autour de deux axes (un axe mesurant la pensée critique du suiveur et un axe mesurant son engagement passif/actif) (Collinson, 2006) [42]. Kelley parle de followership exemplaire lorsque le suiveur est capable de se conformer aux décisions du leader tout en exerçant sa pensée critique et en étant apte, le cas échéant, à dire au leader qu’il se trompe. D. Collinson, 2006, [42] considère les pratiques de followership et de leadership comme mutuellement constitutives et co-construites : cette approche va au-delà de la simple dialectique leader-suiveur et met en évidence la complexité de cette interaction. Ainsi, un « bon » suiveur serait celui qui est capable de se conformer aux décisions d’un plus compétent que lui lorsque la situation l’exige, tout en gardant son sens critique et sa capacité à alerter le leader si celui-ci se fourvoie. Et un « bon » leader serait celui qui est apte à prendre la direction des opérations et à répartir les tâches en évaluant les capacités de ses collaborateurs, tout en étant capable d’accepter les suggestions ou la remise en question de ses décisions et de reconnaître ses limites. Cette approche paraît particulièrement pertinente dans le contexte de l’urgence dans la mesure où l’enjeu est tel que le leader doit pouvoir s’appuyer sur des relais fiables et capables de lui fournir du feedback.
Implications en ingénierie pédagogique
« Il apparaît aujourd’hui que les conditions d’utilisation des simulateurs (caractéristiques des situations didactiques que l’on construit et la manière dont elles sont menées par l’instructeur) jouent un rôle aussi, sinon plus, important que les caractéristiques du simulateur lui-même ».
64Dans cette optique, l’accent doit être mis sur les objectifs pédagogiques, sur la conception des scenarii et sur la qualité du débriefing. Le rôle des formateurs et les compétences qu’ils doivent acquérir pour mener à bien cet exercice sont donc prépondérants. Ces compétences pédagogiques sont en lien avec trois temps particuliers de la formation : la conception du dispositif, la conduite de la situation simulée et l’animation du débriefing.
65Le débriefing représentant l’outil majeur de développement des compétences, l’intérêt de ces formations ne réside pas tant dans le jugement clinique sur le problème que dans la manière dont les professionnels vont le traiter collectivement. Ainsi, il conviendra, pour le formateur, de guider les échanges dans ce sens. Cet exercice est particulièrement complexe car il convient de veiller à plusieurs points :
- Créer et maintenir un climat de confiance au sein du groupe afin de garantir la sécurité psychologique des apprenants et une dynamique d’apprentissage. C’est dans le briefing d’introduction que le formateur posera le cadre : les valeurs de respect et d’écoute de l’autre, la libre parole, le droit à l’erreur, le non-jugement sur la personne.
- Favoriser et gérer la dynamique des échanges au sein du groupe : il s’agit là de permettre l’expression de chacun, de structurer le débriefing par étapes et de gérer le temps. L’annonce du déroulement des phases du débriefing informe les apprenants sur ce que l’on attend d’eux : un temps d’expression des ressentis, un temps d’analyse (observation réfléchie) et de construction des savoirs (conceptualisation abstraite) et un temps de synthèse.
- Se positionner comme médiateur et ressource pour aider les apprenants à analyser leur performance individuelle et collective, à conscientiser les raisons et intentions qui les ont poussés à agir ou à dire, et à envisager comment améliorer leurs pratiques dans une situation future.
Conclusion
66La formation par la simulation, parce qu’elle offre un espace privilégié d’échanges entre professionnels médecins et infirmiers qui vivent ensemble une même expérience, peut contribuer au développement de la compétence collaborative. En effet, l’étude a permis de montrer que lorsque des professionnels, médecins et infirmiers issus d’un même service, partageaient ce temps particulier de la formation et réfléchissaient ensemble sur leurs manières de communiquer et de travailler ensemble, alors les relations interprofessionnelles évoluaient vers une plus grande confiance l’un en l’autre. La confiance est un déterminant fort de la collaboration, en particulier dans le contexte de l’urgence. La collaboration résulte d’un processus d’interactions entre ces acteurs, au service d’une connaissance mutuelle du champ d’activité de l’autre, et va dans le sens de la complémentarité et du partenariat. Ainsi, ces formations favorisant une meilleure connaissance des contraintes, des modes de fonctionnement et des ressources de l’autre, la simulation en groupe pluriprofessionnel est sans nul doute une modalité pertinente pour optimiser la collaboration.
67De plus, ces formations allant dans le sens d’une vision partagée de la situation-problème et de la construction commune de modèles d’actions, elles sont synonymes d’enrichissement mutuel au service de l’évolution des représentations de chacun, donc de l’apprentissage et du développement des compétences. Enfin, une meilleure connaissance de l’autre étant le terreau de la construction de la confiance, et la confiance permettant de mieux s’appuyer sur l’autre dans une situation difficile, alors, il est raisonnable d’augurer une meilleure efficacité des équipes qui auront été formées ensemble.
68Enfin, si le leadership est une question centrale, il s’avère nécessaire de réfléchir aussi sur le followership, en particulier sur le positionnement des collaborateurs dans le soutien et dans le feedback au leader, ainsi que sur la dynamique d’équipe face à l’erreur. Le positionnement, l’affirmation de soi sont des dimensions à travailler sur un plan à la fois individuel et collectif, et cela est à mettre en lien avec la prévention des erreurs de fixation. C’est peut-être cet axe qu’il conviendrait de développer et d’optimiser en termes d’objectif pédagogique dans les formations par la simulation.
69Pour finir, il semble que le rôle du formateur, et notamment sa posture de médiateur, soit un élément prépondérant pour créer les conditions effectives de l’apprentissage. Il conviendra qu’il développe à son tour des compétences : des compétences en ingénierie pédagogique, en gestion d’environnement dynamique et en conduite de débriefing.
70Cette étude, du fait d’un échantillon trop restreint, ne peut être généralisable. Néanmoins, elle permet de poser les bases d’une réflexion sur la formation interprofessionnelle dans les métiers de la santé. L’analyse multidimensionnelle de la situation de formation, à partir des éclairages théoriques des professionnels de la simulation, des sciences de l’éducation, de la psychologie cognitive, de la psychologie sociale et de l’ergonomie, peut ainsi représenter un intérêt pour les équipes pédagogiques utilisant la simulation dans la formation des professionnels de santé.
Conflits d’intérêts
71L’auteurs ne déclare aucun conflit d’intérêts.
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : collaboration, compétences, simulation en santé, urgence, interprofessionnalité
Mise en ligne 10/07/2014
https://doi.org/10.3917/rsi.117.0033Notes
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[*]
Cet article est issu d’un mémoire de Master 2 Ingénierie pédagogique en formation d’adultes, sous la direction de Philippe Carré, Université Paris 10 Nanterre
-
[1]
En Suisse, les professionnels en formation post graduée de type expertise (ou spécialisations) suivent leur formation tout en étant « en emploi » dans l’unité de soins. Il existe des expertises en soins d’anesthésie, en soins intensifs et en soins d’urgence.
-
[2]
PIC : pression intracrânienne, mesurée à l’aide d’un capteur, permettant d’évaluer le risque d’hypertension intracrânienne et d’engagement cérébral.
-
[3]
« Adré », en jargon médical, signifie adrénaline, drogue vasoactive de l’urgence.
-
[4]
Dans la procédure de massage cardiaque externe, un cycle correspond à 5 fois 30 compressions thoraciques alternant avec 2 insufflations (ventilation) sur une durée de 2 minutes.