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Article de revue

Promotion de la santé et formation infirmière, quels défis ? Cas de l'infirmière dans une haute école de sante (HES). Suisse

Pages 120 à 129

Notes

  • [1]
    Déclaration commune des ministres européens de l’éducation - 19 juin 1999 – Bologne. Ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie - Archives 1997 - 1999. 12-10-99..
  • [2]
    Haute Ecole de Santé
  • [3]
    Haute Ecole domaine santé Arc.
  • [4]
    Ces informations sont extraites des brochures d’information de la HES-So et de La HEds ARC.
  • [5]
    La praticienne ou le praticien formateur-trices. Abréviation PF.
  • [6]
    Ecole de santé.
  • [7]
    Infirmière nouvellement diplômées.
  • [8]
    Le terme de « salutogénèse » se compose du mot latin salus, salutis = santé et du mot grec génésis = origine. La salutogénèse pose la question de l’origine de la santé.
  • [9]
    Le terme se compose de deux mots grecs : pathein = souffrir et génésis = origine. La pathogénèse pose la question de l’origine de la maladie.
Ce texte a fait l’objet d’une présentation orale lors des JE 2011

1Le changement du statut de l’infirmier-ère en Suisse Romande en 2000, vers un niveau tertiaire, universitaire, suite aux accords de Bologne [1] et la déclinaison de neuf compétences infirmières dont la troisième centrée en grande partie sur la promotion de la santé du patient n’est pas sans corrélation avec la charte d’Ottawa de 1986. Dans cette charte, l’attention est mise sur la contribution de tous les partenaires socio-sanitaires et politiques. Elle l’est également sur la réorientation des services de santé ce qui exige une attention accrue à l’égard de la recherche sanitaire, ainsi que des changements au niveau de l’éducation et de la formation professionnelle.

2De même en 1989, l’OMS déclarait que les infirmiers- ères étaient en position idéale pour assurer un leadership au sein de ce mouvement. Car, l’infirmier-ère occupe une position privilégiée pour intervenir en matière de promotion de la santé en lien avec sa proximité au contact fréquent et étroit avec le patient et son entourage.

3Les attentes de rôle de la profession infirmière, les changements de son statut et le rôle que lui confère le nouveau programme de formation HES [2] en tant qu’« agent réflexif » de la santé, ont été la base de notre intérêt et de nos questionnements. Dans un premier temps, l’objectif de cette étude est d’explorer les conceptions des étudiant-e-s en fin de formation et leurs difficultés dans le champ de la promotion de la santé. Dans un second temps, l’objectif consiste à trouver des pistes d’amélioration à envisager au niveau de la formation professionnelle tertiaire en alternance.

Les enjeux professionnels que la recherche explore

Quels enjeux pour quelle santé ?

4Les enjeux pour la profession semblent être très importants. D’une part, la profession vit des changements paradigmatiques et statutaires exceptionnels qui exige de l’infirmier-ère une pratique réflexive et active afin de promouvoir et d’accompagner le patient dans la gestion de sa santé. D’autre part, sur le plan de la santé publique et d’après l’OMS en 2009 on peut noter que malgré le progrès de la médecine, les maladies chroniques demeurent encore une des causes principales de mortalité et de morbidité. Ainsi plusieurs facteurs y sont associés à ceux liés aux comportements à risque, comme les addictions, la sédentarité, les infections sexuelles et les mauvaises conduites alimentaires.

5Cette réalité ne peut que renforcer la nécessité de travailler activement en amont de la maladie. Il devient donc nécessaire de renforcer les programmes d’éducation pour la santé par un professionnel compétent, formé à la complexité et à l’approche globale de la santé, afin d’agir efficacement avec la population dans des programmes qui ne soient pas dirigés exclusivement vers les modifications des comportements seulement, vu que les résultats de ceux-ci sont très limités. (1)

Evolution et changements de la profession infirmière

6Le métier d’infirmier - ère en Suisse et en Europe en général, subit depuis quelques années une série de changements dans le programme de formation et dans le statut professionnel. L’identité de l’infirmier- ère est en transformation, en mutation. Du rôle délégué, de la praticienne exécutrice, au rôle autonome et à l’émergence de « sciences infirmières », les mécanismes qui influencent la construction de cette identité se complexifient.

Le contexte

7Or, le système de formation professionnelle suisse a subi des réformes globales, suite auxquelles une nouvelle structure plus élevée s’est créée : The Universities of Applied Sciences de Suisse Occidentale, la HES-SO. Ouverte en 1998, la HES-SO constitue le plus vaste réseau de formation professionnelle supérieure de Suisse.

8La HEdS-Arc [3] (notre lieu de travail, et lieu de notre recherche) représente un des 6 sites de la filière soins infirmiers de la HES-SO. Le diplôme HES délivré par cette Haute Ecole est un bachelor en soins infirmiers qui est un titre de niveau universitaire obtenu après trois ans d’études à temps plein et équivaut à 180 crédits ECTS. Il est reconnu par la Confédération, légalement protégé et euro-compatible. Cette formation est conçue autours de l’alternance théorie/pratique, à travers des enseignements sous formes modulaires. Celle-ci vise le développement de compétences professionnelles décrites dans un référentiel. [4] Les personnes étudiantes sont accompagnées par les praticiens et praticiennes formateurs-trices HES (PF) [5], qui sont titulaires d’un diplôme professionnel reconnu correspondant à la filière de l’étudiant-e encadré-e et qui jouent un rôle clé dans cette alternance organisée et évolutive.

9Tous ces changements interviennent dans un climat tendu entre la Suisse allemande, qui a gardé en grande partie le niveau de formation ES [6], et la Suisse Romande, qui a adopté partout les nouvelles formations bachelor en soins infirmiers. Cette dernière a déposé le projet de master en soins infirmiers qui a pu être finalement autorisé sous essai et a vu le jour à la rentrée 2009-2010. Ces dispositions pourraient amener la formation infirmière à se placer sur le même niveau que les métiers d’ingénieur et/ou de l’économie et comporte une reconnaissance sociale et salariale du métier d’infirmier-ère.

Problématique

10D’après nos premiers constats en tant que professeure chargée d’enseignement, nous avons pu constater la complexité de l’enseignement en matière de promotion de la santé et du rôle professionnel attendu. Ces difficultés se heurtent également à la complexité de l’alternance et l’apprentissage sur les lieux de stages où selon notre enquête exploratrice, l’activité infirmière en promotion de la santé s’est avérée compromise et demeure dans ces balbutiements. De plus l’analyse de plusieurs revues de littérature sur le sujet ont relevé que l’approche de la promotion de la santé dans certains programmes de formation reste floue et difficile à identifier. Certains étudiants relèvent le rôle des lieux de la pratique comme défavorisant.

11Se référant à nos questionnements en lien direct avec la professionnalisation des futur-e-s infirmier-e-s en promotion de la santé et le développement de cette compétence décrite dans le référentiel de la formation HES, notre question de recherche s’est précisée de la manière suivante : Au terme d’une formation tertiaire en alternance en soins infirmiers, quelles conceptions a l’infirmier-ère nouvellement diplômé-e (IND) [7] HES de la promotion de la santé ?

Cadre de référence

12Dans celui-ci sont inclus plusieurs concepts centraux tels que le concept de la promotion de la santé, la réflexivité, la professionnalisation, l’alternance, le rôle autonome relationnel.

Méthodologie

13Cette recherche se veut qualitative, inductive et « compréhensive » dans le sens où la recherche qualitative souligne l’interdétermination du savoir et son interprétabilité d’une part et d’autre part la mise en avant du sujet en tant qu’acteur social, centré sur son vécu et l’interprétation qu’il a de ce vécu. Cette approche a l’avantage de s’ajuster aux caractéristiques et à la complexité des phénomènes humains et sociaux car la subjectivité du chercheur et du sujet est mise en valeur dans le but d’élaborer une connaissance holistique de la réalité (2).

Public cible

14Dans cette recherche, nous nous sommes concentrées sur l’étudiant-e en fin de formation lui-même en tant qu’acteur-trice impliqué directement dans un processus de professionnalisation en alternance, à travers lequel il a conçu une représentation de la promotion de la santé et a pu se frotter de près ou de loin à son exercice et être confronté à ses pairs. Pour ce faire, nous avons choisi les options suivantes : Faire l’état des lieux des représentations mentales et conceptions des étudiant-e-s finalistes à ce sujet et comprendre leurs pratiques, stratégies et difficultés.

15Pour accéder au premier objet de notre recherche nous avons fais le choix de faire des entretiens semi-directifs avec huit étudiant-e-s après le terme de leurs formations, donc nouvellement diplômé-e-s (IND) HES. Afin d’explorer les pratiques, stratégies et difficultés de l’étudiant-e, nous avons décidé de conduire avec elles un entretien compréhensif en groupe au sujet d’une expérience qu’ils-elles ont réalisé en suivant différents projets de santé communautaire dans le canton de Neuchâtel.

L’analyse des résultats

16Nous avons choisi l’analyse de contenu comme moyen de compréhension, car le discours de par sa nature fondamentale, est étroitement indicatif des pensées d’un individu et de ses valeurs. Selon Foucault (3), les discours ne sont pas formés de mots, mais de structures des connaissances, de réclamations et des pratiques par lesquelles nous comprenons, expliquons et décidons des choses et exerçons un contrôle. L’analyse a été effectuée sur le corpus, c.à.d. sur l’ensemble des discours produits par les IND. Ces contenus ont été retranscrits intégralement. L’analyse produite concerne exclusivement les écrits et se centre sur l’analyse du contenu. A travers l’analyse de tout le matériel empirique récolté dans les entretiens et dans l’analyse compréhensif en groupe nous pouvons dresser le bilan suivant :

17Des confusions demeurent importantes dans la définition du concept de promotion de la santé, notamment avec celui de prévention ou d’éducation thérapeutique. Tandis qu’une approche par la globalité est bien ancrée et représentée comme référence spontanée des personnes interviewées. Une identification de la salutogénèse [8] comme modèle explicatif de la promotion de la santé reste fragile et illustré parfois par d’autres modèles plutôt imprégnés de celui de la pathogénèse [9]. La plupart des interviews ne comportaient pas de définition de la promotion de la santé ; parmi les autres, les définitions ne se réfèrent pas à celle classique de la charte d’Ottawa, mais plutôt aux notions de processus, de bien-être et de qualité de vie.

18Quant au rôle infirmier dans la promotion de la santé, les personnes interviewées considèrent celui-ci comme très important et est décrit comme rôle autonome et réflexif. Celles-ci éprouvent de la difficulté à l’identifier clairement dans les lieux de la pratique, et pensent qu’il n’est pas transmis en premier par leurs référentes, contrairement au rôle délégué technique qui est mis en avant selon une approche purement curative. D’après les témoignages des IND, l’émergence de la pratique infirmière en promotion de la santé reste encore absente et tributaire de leur charge de travail.

19Concernant l’expérience de stage, celle-ci apparaît positive pour confronter les personnes à leurs représentations et essayer spontanément des démarches de promotion de la santé, même si les référentes n’agissent pas dans cette discipline en tant que modèle clair et explicite. Les avis sont presque unanimes pour dire que l’expérience de stage n’était pas formatrice en promotion de la santé. Le/la praticien-ne formateur-trice (PF) reste très absent dans les témoignages recueillis, tandis que la socialisation des futur-e-s infirmier-ère-s apparaît clairement comme exclusive en milieu hospitalier.

20Concernant la formation en école, elle apparaît comme source d’ouverture d’esprit et sensibilisatrice aux problèmes socio-sanitaires. Les personnes pensent que leurs enseignements en école les ont bien préparées à exercer la promotion de la santé. L’approche par la complexité se reflète fortement et semble être très ancrée. Un décalage important théorie - pratique est relevé par ailleurs par les personnes et malgré une bonne préparation, l’enseignement reste en majorité abstrait et très théorique.

21Les compétences identifiées par les personnes interviewées pour exercer la promotion de la santé sont relationnelles, organisationnelles, managériales, analytiques et réflexives, tandis que le référentiel de compétences de la formation HES n’est pas cité par les personnes comme référence. La compétence liée à la recherche ne semble pas être identifiée pour l’exercice de cette pratique en promotion de la santé. Par contre, une posture éducative constructiviste et une position d’égal à égal sont présentées par la majorité comme étant les bases de l’intervention infirmière en promotion de la santé auprès des personnes et les composantes d’un contrat réflexif semblent être incontournables à la réussite de cette pratique. Ceci en référence à Schön : « pour évoluer dans un contrat réflexif, il va lui falloir abandonner son sacro-saint pouvoir et accepter de partager le contrôle de l’interaction avec le client » (4).

22Concernant la réflexivité des personnes interviewées, celle-ci est bien citée comme exercice collectif en équipe surtout en ce qui concerne la réflexion sur et après l’action. D’autre part, la réflexivité comme exercice individuel ne paraît pas courante. La notion d’auto-évaluation semble être absente des discours enregistrés. Les personnes relèvent l’influence des référentes dans l’encadrement et expriment avoir subi des pressions de la part de leurs pairs sur les lieux de stages en lien avec les changements identitaires importants de la profession. Quant à la difficulté de la réflexion en action. Elle est expliquée par le manque de recul devant les situations en lien avec la difficulté du soin relationnel, compétence non identifiée comme évidente chez les référentes elles-mêmes, d’après les dires des IND. Tout comme le souligne Day en citant Eraut (1995) « … récemment, des critiques ont fusé sur la notion de « réflexion-en-action », considérée comme impossible en pratique parce qu’elle ne laisse pas un temps suffisant pour un niveau de conscience » (5).

23En somme, en examinant les conceptions des IND au sujet de la promotion de la santé nous parvenons à la conclusion qui nous permet de dire que la professionnalisation des futur-e-s infirmiers- ères HES en promotion de la santé est encore « hésitante et fragile ». Car les formes « habituelles » de professionnalisation des individus comme le souligne Wittorski (6), correspondent aux situations fréquemment rencontrées par les sujets en formation. Celles-ci sont en lien avec plusieurs facteurs complexes, parmi lesquels la formation en école, qui même jugée satisfaisante, ne peut pas à elle seule suffire à apporter les apprentissages nécessaires à cette professionnalisation. Le terrain de formation pratique apparaît en somme, comme « non satisfaisant » dans ce champ spécifique et soumis à plusieurs contraintes politiques, économique et identitaires importantes.

24Suite à ces constats, nous nous posons la question si cette alternance pratique, n’est pas en crise pour plusieurs facteurs conceptuels, épistémiques, organisationnels et politiques ? Sommes-nous en Ecole dans des temporalités très différentes du terrain ? Et comment optimiser alors ces rapports de partenariat afin de les rendre convenables ?

L’articulation empirique de cette recherche avec les autres

25En faisant les liens entre les résultats de notre propre recherche et ceux des données des revues de littérature mentionnées au début de ce résumé, nous pouvons relever les éléments suivants :

26Par rapport à la revue de littérature de McDonald (7), les compétences infirmières identifiées pour exercer la promotion de la santé recoupent celles identifiées par les IND. On parle de compétences relationnelles, de la relation d’aide et du management, et de compétences analytiques et réflexives. Mais contrairement à ces résultats, notre échantillon semble très satisfait de sa formation en école et pendant que le premier se trouve centré sur le modèle biomédical, les IND, reconnaissent plutôt le modèle global comme une référence première. On retrouve le même résultat à ce sujet dans une étude comparative où les pratiques des étudiant-e-s du projet 2000 au Royaume-Uni sont analysé, ceux-ci semblent, comme nos IND, très favorables à l’exercice de la promotion de la santé, et reconnaissent les facteurs psychologiques comme jouant un rôle très important et à prendre en compte, mais par contre se disent moins satisfaits de leur formation en école.

27Quant à la revue de littérature de Whitehead (8) nous retrouvons la même confusion des IND entre l’éducation thérapeutique et la promotion de la santé, ainsi leurs pratiques sont influencées par celle de leurs référentes, tout en mettant en exergue que les IND HES ont signalé avoir fait des initiatives et proposé des actions de promotion de la santé malgré le fait que leurs référentes n’exercent pas de telles actions. Nous retrouvons également dans la recherche de Poskiparta (9) le même constat concernant la définition du concept qui demeure vague et manque d’exemples concrets dans la formation, qui reste bien abstraite et théorique.

La modélisation du projet - actions et recommandations (modèle 1)

28Afin d’améliorer le niveau de professionnalisation des étudiant-e-s HES dans le champ de la promotion de la santé et de faciliter l’émergence de l’implication de celles-ci dans leur pratique, une modélisation complexe est proposée. En lien avec l’enchevêtrement des facteurs et les multi-dimensionnalités des conditions favorables à l’émergence de la pratique infirmière en promotion de la santé, nous avons envisagé d’élaborer un projet global sur plusieurs niveaux complexes.

*Modèle 1

Les principaux constats de la recherche, les axes généraux du développement de cette pratique à différents niveaux et les attentes formulées et recommandations en faveur d’une professionnalisation infirmière confirmée en promotion de la santé selon différentes temporalités nécessaires au changement

*Modèle 1

Les principaux constats de la recherche, les axes généraux du développement de cette pratique à différents niveaux et les attentes formulées et recommandations en faveur d’une professionnalisation infirmière confirmée en promotion de la santé selon différentes temporalités nécessaires au changement

- Au niveau macro (niveau de la politique nationale et cantonale)

29Une volonté politique claire à subventionner et soutenir les projets de promotion de la santé est donc incontournable. Cela signifie concrètement que la rédaction de nouvelles lois sur la promotion de la santé nécessitera la mise en place d’un vaste projet de législation, afin de combiner les principes nouveaux et existants de promotion de la santé. Car au cours des 5 dernières années seulement, ces coûts ont progressé de près de 22%, alors que d’après la statistique financière des collectivités publiques de l’Office fédéral de la statistique, la part des dépenses de prévention et de promotion de la santé représentait à peine plus de 2% de l’ensemble des coûts de la santé ces dernières années. Ce qui montre le peu de place qu’occupe la promotion de la santé dans les projets et décisions actuels. Il sera donc recommandé de :

  • S’impliquer dans une politique de soins de santé en assurant un positionnement organisationnel à travers des mandats explicites assurant une place à la promotion de la santé au sein du continuum d’intervention.
  • Renforcer la reconnaissance de la profession en appuyant la formation en soutenant sa tertiairisation et en finançant la recherche en sciences infirmières.
  • Instaurer des instruments de mesures convenables de la charge de travail infirmier afin de rendre visible et valoriser le rôle professionnel notamment le relationnel.
  • Encourager la diffusion de résultats de recherche auprès des assureurs afin d’encourager ces derniers à financer les démarches de promotion de la santé.

- Au niveau méso (niveau institutions de formations Ecole-Terrain)

La formation pratique

30Pour la formation pratique, les recommandations sont de :

  • Développer les conceptions d’une alternance et d’un partenariat efficace en modélisant l’ingénierie de l’alternance avec les institutions de formation pratique et en diversifiant le cursus de stage. Tout comme souligne Clénet (11), qu’un des enjeux posé à « l’alternance est bien sa capacité, en tant que système de formation, à favoriser, à provoquer, à suggérer, des changements chez les sujets en formation ».
  • Appuyer le travail des PF (praticien formateur) : en accompagnant les décalages théories-pratiques et en renforçant les compétences des référentes de stage, personnes impliquées directement sur les lieux de stage. Car selon Clénet, « être partenaire, c’est probablement quelque part partager des pouvoirs et pour cela la communication est nécessaire pour que les partenaires s’enrichissent mutuellement » (12).

La formation en école

31Pour la formation pratique, les recommandations sont de :

  • Repenser le dispositif de formation en augmentant les périodes allouées à l’enseignement des savoirs issus du champ de la promotion de la santé. En favorisant l’évaluation formative et sommative des compétences en lien avec ce champ spécifique. Et en favorisant l’imprégnation plus précoce des étudiant-e-s dans le champ de la santé communautaire.
  • Accompagner les décalages théories-pratiques en école au retour de stage.
  • Renforcer la formation des professeur-e-s à la pratique réflexive, à la recherche et à la promotion de la santé pour former.

Liens entre acteurs (modèle 2)

32Nous avons illustré dans ce modèle les cinq composantes identifiées qui sont complémentaires et interdépendantes. Au centre, tous les acteurs groupés sont mis en interactions les un-e-s avec les autres. La récursivité du modèle en question appuie le besoin de soutenir les échanges entre les acteurs-trices autour des cinq composantes du développement de la pratique de la promotion de la santé. Ces liens pourront se renforcer à travers 2 démarches :

  • Consolider le partenariat du futur : Soignant-e-s, enseignant-e-s et chercheurs-euses, doivent forger ensemble un nouveau futur pour la profession infirmière où la promotion de la santé serait une valeur aussi forte que la gestion de la maladie.
  • Identifier et mobiliser d’autres acteurs : Ces acteurs (professeurs, chercheurs, infirmières référentes, praticiens formateurs, cliniciens…) pourraient contribuer à créer des contextes favorables à cette transition identitaire et travailler étroitement avec les missions des services de soins.

* Modèle 2

Les liens entre acteurs et interactions avec les différents niveaux pour une professionnalisation confirmée en promotion de la santé

* Modèle 2

Les liens entre acteurs et interactions avec les différents niveaux pour une professionnalisation confirmée en promotion de la santé

- Au niveau micro (niveau de l’enseignement auprès des étudiants) (modèle 3 et 4)

33Dans ce chapitre nous développons une modélisation de l’enseignement de la promotion de la santé qui pourrait être des hypothèses d’actions afin de permettre une compréhension qui prenne en compte l’étudiant-e et ses conceptions personnelles ainsi que celles du milieu dans lequel il évolue.

* Modèle 3

Les méthodes d’enseignements pour un apprentissage convenable de la promotion de la santé

* Modèle 3

Les méthodes d’enseignements pour un apprentissage convenable de la promotion de la santé

* Modèle 4

Vision d’une modélisation de l’enseignement de la promotion de la santé au niveau micro à partir d’une reliance entre différentes approches et acteurs

* Modèle 4

Vision d’une modélisation de l’enseignement de la promotion de la santé au niveau micro à partir d’une reliance entre différentes approches et acteurs

Améliorer les méthodes d’enseignements

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  • Enseigner en reliance avec le terrain : Passer des savoirs abstraits décontextualisés à un apprentissage ancré dans la pratique.
  • S’appuyer sur le constructivisme pour former : Considérer l’apprenant comme maître de son apprentissage. Pour apprendre, il transforme la nouveauté et l’exprime dans ses propres termes. Dans cette approche, le formateur-trice perd de son pouvoir en faveur du sujet qui apprend à prendre lui-même le pouvoir de son apprentissage (13).
  • Développer des compétences d’écoute, d’accompagnant réflexif, complexifié et contextualisé : Adopter une attitude d’empathie et comprendre ce que l’autre projette et où il se trouve dans son processus d’apprentissage propre. Et comme selon Clénet  : « Il s’agit plutôt de réinventer des formes ouvertes et souples, susceptibles d’accompagner les sujets dans leurs situations et aider ainsi l’émergence des formes propres aux sujets » (14).
  • Ecouter la subjectivité et les conceptions des étudiant-e-s : Ecouter l’étudiant et l’aider à déconstruire pour construire un savoir. Car si l’apprenant-e décode son monde au travers de ses propres conceptions, il en découle que son apprentissage (et donc l’appropriation et l’intégration d’un nouveau savoir) doivent prendre place dans et à travers ses conceptions propres (15).

Modéliser le concept de promotion de la santé

35

  • Concevoir des modèles d’action concrets : en concevant des méthodes et des modèles d’action dans ce champ spécifique, et de les ancrer dans le dispositif de formation avec une intention intelligible.
  • Travailler sur un modèle de la complexité : en reformant la pensée (16) et de l’instituer dans l’enseignement
  • Viser les trois axes : éducation thérapeutique, promotion et prévention ; car comme l’éducation thérapeutique est une approche novice, celle-ci pourrait être éventuellement une passerelle à la promotion de la santé (17).

Travailler sur la réflexivité des étudiant-e-s et des enseignant-e-s

36

  • Approfondir l’analyse réflexive avant et après les périodes de stage : afin d’offrir à chacun un espace où il pourrait exprimer ces doutes, ses peurs, ses ambivalences et verbaliser ses propres modes de pensée et de décision.
  • Inclure une pratique réflexive dans l’enseignement : Afin de former les étudiant-e-s à la réflexivité, mieux vaudrait que les formateurs-trices et les conseillers-ères pédagogiques se situent dans cette orientation (18).
  • Développer un enseignement opérationnel en lien avec le référentiel de compétences : Cela pourrait alors offrir à chaque étudiant-e en principe, de meilleures chances de relier les savoirs à des pratiques sociales, donc de saisir leur portée et leur sens (19).
Ce projet a fait l’objet d’une première consultation récursive sur le terrain, suite à laquelle nous avons identifié des leviers et des limites. Parmi les leviers, nous distinguons les processus favorisant la professionnalisation des étudiant-e-s HES dans le champ de la promotion de la santé, qui sont des défis stimulant la réflexion en équipe et un meilleur rééquilibrage des approches pédagogiques et didactiques

37Cette recherche et ce projet constitueront sans doute à l’avenir un premier matériel empirique utile pour réfléchir sur la problématique plus en profondeur et à plusieurs niveaux complexes. Nous entrevoyons comme pistes potentielles de recherche, l’analyse du programme d’études et la clarification de l’enseignement de la promotion de la santé. Une autre piste future consisterait à déterminer plus précisément les obstacles et les ressources inhérents aux lieux de la pratique : explorer l’implication des PF et des infirmier-ère-s référent-e-s de stages dans la promotion de la santé et analyser les liens avec l’encadrement des étudiant-e-s infirmier-ère-s HES et par la suite, leur professionnalisation dans le champ de la promotion de la santé.

38Du point de vue des perspectives pratiques qui pourraient constituer un levier et un vrai défi pour le futur de la formation infirmière HES dans le domaine de la promotion de la santé plusieurs pistes sont proposées. Parmi celles-ci, la création de nouveaux partenariats avec d’autres Hautes Ecoles au niveau national et international, ou encore la mise en place de réseaux régionaux de soutien à la promotion de la santé avec les professionnels du canton.

Bibliographie

Références bibliogaphiques

  • 1
    Godin G, Côté F. Le changement planifié des comportements liés à la santé. Pratiques en santé communautaire. Montréal Les éditions de la Chenelière Carroll G ; 2006. p. 129-40.
  • 2
    Anadon M, Guillemette F. La RQ est-elle nécessairement inductive ? Recherche Qualitatives ;2007 (5(Hors série)) : 26.
  • 3
    Foucault M. Surveiller et punir. Paris : Gallimard ; 1975.
  • 4
    Schön D. Le praticien réflexif, à la recherche de savoir caché dans l’agir professionnel. Paris : Les Editions LOGIQUES ; 1994.
  • 5
    Day C. Développement professionnel et pratique réflexive : finalités, processus et Partenariats. Carrefours de l’éducation2001 ; 12 (Université de Picardie Jules Verne).
  • 6
    Wittorski R. Professionnalisation et développement professionnel. L’Harmattan ; 2007.
  • 7
    McDonald E. The role of Project 2000 educated nurses in health promotion within the hospital setting. Nurse Education Today1998 ; 18 : 213-20.
  • 8
    Whitehead D. Reviewing health promotion in nursing education. New Zealand In Nurse Education Today 2007 ; 27 : 225-37.
  • 9
    Poskiparta M, Limatainen L, Sjögren A. Health promotion in the curricula and teaching of two polytechnics in Finland. Nurse Education Today 2000 ; 20 : 629-37.
  • 10
    Beaudet N, Bisaillon A, Boisvert N, Boyer D, De Villers L, Garceau-Brodeur M-H, et al. La pratique infirmière de promotion de la santé et de prévention en CSSS, mission CLSC. De la volonté à la réalité… In : synthèse R, editor. Québec. : Jo Anne Simard ; 2008.
  • 11
    Clénet J. L’ingénierie des formations en alternance. Paris : L’Harmattan ; 2002.
  • 12
    Clénet J, Gérard C. Partenariat et alternance en éducation. Paris : L’Harmattan ; 1994.
  • 13
    Meirieu P. La pédagogie entre le dire et le faire. Issy-les-Moulineaux : ESF éditeur ; 2007.
  • 14
    Clénet J. La production des compétences : paradoxes et complexité des actions humaines. Colloque International de l’Université d’Oran Es-Senia : « Formation, production de compétences et GRH : Quelles perspectives ? » 2005.
  • 15
    Giordan A. Complexité et Apprendre, Formations Professionnelles et Entreprises Apprenantes In : Clénet J, Poisson D, editors. Complexité de la formation et formation à la complexité. Paris L’Harmattan ; 2005.
  • 16
    Morin E. La pensée complexe une pensée qui se pense. In : Morin E, Le Moigne J-L, editors. L’intelligence de la complexité. Paris : l’Harmattan ; 1999.
  • 17
    Gagnayre R, D’Ivernois J-F. L’éducation thérapeutique : une passerelle vers la promotion de la santé. adsp 2003 ; 43.
  • 18
    Perrenoud P. Mettre la pratique réflexive au centre du projet de formation. Cahiers Pédagogiques. 2001 Janvier 2001. 390 : 42-5.
  • 19
    Perrenoud P. L’approche par compétences, une réponse à l’échec scolaire ? Montréal : AQPC Réussir au collégial. Actes du Colloque de l’association de pédagogie collégiale ; 2000.

Notes

  • [1]
    Déclaration commune des ministres européens de l’éducation - 19 juin 1999 – Bologne. Ministère de l’éducation nationale, de la recherche et de la technologie - Archives 1997 - 1999. 12-10-99..
  • [2]
    Haute Ecole de Santé
  • [3]
    Haute Ecole domaine santé Arc.
  • [4]
    Ces informations sont extraites des brochures d’information de la HES-So et de La HEds ARC.
  • [5]
    La praticienne ou le praticien formateur-trices. Abréviation PF.
  • [6]
    Ecole de santé.
  • [7]
    Infirmière nouvellement diplômées.
  • [8]
    Le terme de « salutogénèse » se compose du mot latin salus, salutis = santé et du mot grec génésis = origine. La salutogénèse pose la question de l’origine de la santé.
  • [9]
    Le terme se compose de deux mots grecs : pathein = souffrir et génésis = origine. La pathogénèse pose la question de l’origine de la maladie.
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