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Article de revue

La spécification en droit pénal est-elle en voie de disparaître ?

(Regard sur la loi n˚ 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté)

Pages 677 à 698

Notes

  • [1]
    Le code de la santé publique contient 44 articles utilisant ce mode d'incrimination par effet de redondance. Par exemple, l'art. L. 1133-1 ne fait que reprendre, à l'identique, l'art. 226-25 C. pén. tandis que l'art. L. 1272-4 reprend quant à lui la substance de l'art. 511-5 C. pén.
  • [2]
    À quelques exceptions près telles que la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse ou encore l'ord. n° 45-174 du 2 févr. 1945 sur l'enfance délinquante.
  • [3]
    Par dérogation aux dispositions de l'art. 76 C. pr. pén. avant que celles-ci ne soient modifiées par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 ayant généralisé la mise en échec de la condition tenant au consentement préalable de l'intéressé à la perquisition domiciliaire, pour les nécessités de l'enquête préliminaire relative à un délit puni d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à 5 ans.
  • [4]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a autorisé les perquisitions et visites domiciliaires en dehors des heures légales prévues à l'art. 59 C. pr. pén. (C. pr. pén., art. 706-28).
  • [5]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a élevé la durée globale de la garde à vue à 48 heures en cas d'infractions en matière de stupéfiants (C. pr. pén., art. 706-29, abrogé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004).
  • [6]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a créé l'art. 706-32 C. pr. pén. (abrogé depuis par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004) dont l'al. 2 permettait, notamment, aux enquêteurs (officiers ou agents de police judiciaire) d'acquérir, de détenir, de transporter ou de livrer des stupéfiants.
  • [7]
    C. pr. pén., art. 706-80 (éd. 2017).
  • [8]
    C. pr. pén., art. 706-81 à 706-87 (éd. 2017).
  • [9]
    C. pr. pén., art. 706-95 (éd. 2017).
  • [10]
    Art. 706-96 à 706-102 (éd. 2017).
  • [11]
    C. pr. pén., art. 706-103 (éd. 2017).
  • [12]
    C. pr. pén., art. 706-88 et 706-88-1 (éd. 2017).
  • [13]
    C. pr. pén., art. 706-89 à 706-94 (éd. 2017).
  • [14]
    Cette nouvelle forme de spécification à l'intérieur même du domaine de la criminalité organisée a été décidée (En ce sens : loi n° 2015-993 du 17 août 2015) en raison de la déclaration d'inconstitutionnalité de l'ancien 8 bis de l'art. 706-73 C. pr. pén. qui permettait une garde à vue de 96 heures pour des faits d'escroquerie commis en bande organisée (En ce sens : Cons. const. 9 oct. 2004, n° 2004-420/421, QPC).
  • [15]
    C. pr. pén., art. 706-102-1 à 706-102-9 (éd. 2017).
  • [16]
    C. pr. pén., art. 706-87-1 (éd. 2017).
  • [17]
    C. pr. pén., art. 706-95-4 à 706-95-10 (éd. 2017).
  • [18]
    C. pr. pén., art. 706-95-1 à 706-95-3 (éd. 2017).
  • [19]
    C. pr. pén., art. 706-106 (éd. 2017) lequel réserve les opérations de « coup d'achat » à la constatation des délits en matière d'armes et de produits explosifs visés à l'art. 706-73 12° C. pr. pén.
  • [20]
    L'art. 706-28 C. pr. pén. fait référence aux dispositions de l'art. 59 C. pr. pén. qui elles-mêmes prennent appui sur celles de l'art. 56 C. pr. pén. dont l'alinéa 1er prévoit in fine que « si la perquisition est effectuée aux seules fins de rechercher et de saisir des biens dont la confiscation est prévue par les cinquième et sixième alinéas de ce même article, elle doit être préalablement autorisée par le procureur de la République ».
  • [21]
    L'art. 706-32 C. pr. pén. créé par la loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 en vue d'autoriser les opérations d'infiltration, spécialement dans le domaine des trafics de stupéfiants, avait, dans un premier temps, été abrogé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 pour que sa substance soit plus largement mobilisable dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée (C. pr. pén., art. 706-81 à 706-87).
  • [22]
    C. pr. pén., art. 706-81, al. 2.
  • [23]
    C. pr. pén., art. 706-82, al. 1er, 1°.
  • [24]
    C. pr. pén., art. 706-82, al. 1er, 2°.
  • [25]
    C. pr. pén., art. 706-32, al. 1er, 1°.
  • [26]
    C. pr. pén., art. 706-32, al. 1er, 2°.
  • [27]
    Il s'agit de l'aversion pour les personnes transsexuelles ou transgenres.
  • [28]
    C. pén., art. 132-8 à 132-16-5.
  • [29]
    C. pén., art. 132-79.
  • [30]
    Plusieurs qualités de l'agent ou de la victime aggravent la commission d'une infraction. C'est, par exemple, le cas de la répression du meurtre qui est aggravée lorsqu'il a été commis par le conjoint, le concubin ou le partenaire de la victime ou, inversement, lorsqu'il a été commis sur un mineur de 15 ans, un ascendant légitime ou naturel, le père ou la mère adoptifs, une personne vulnérable (en raison de l'âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse), un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire (police nationale, douanes, administration pénitentiaire) ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles (ou un agent exerçant pour le compte d'un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d'habitation), un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire, un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs ou toute personne chargée d'une mission de service public, un professionnel de santé, un témoin, une victime ou une partie civile (v. C. pén., art. 221-4).
  • [31]
    Il s'agit, par exemple, de l'usage ou de la menace d'une arme (C. pén., art. 132-75), de l'effraction (C. pén., art. 132-73), de l'escalade (C. pén., art. 132-74).
  • [32]
    Le code pénal retient parfois comme cause d'aggravation le fait que l'infraction ait été commise dans un « lieu accueillant du public » (ex : C. pén., art. 225-2), un « local d'habitation », un « lieu utilisé ou destiné à l'entrepôt de fonds, valeurs, marchandises ou matériels », un « lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs » (ex : C. pén., art. 311-4) ou encore dans un « lieu classifié au titre du secret de la défense nationale » (ex : C. pén., art. 322-3).
  • [33]
    À ce titre, la code pénal retient la circonstance de bande organisée, définie à l'art. 132-71, ainsi que la pluralité d'agents (dans ce cas la circonstance aggravante tient à ce que l'infraction a été commise « par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice, sans qu'elles constituent une bande organisée. V. par ex. : C. pén., art. 311-4 1°, 225-12-6 7°, 225-12-9 7°) et la dissimulation volontaire de tout ou partie du visage (ex : C. pén., art. 222-12 15°, 311-4 10°, 312-2 4°, 322-3 7°).
  • [34]
    Il est possible d'évoquer les mobiles d'intimidation et de représailles toutes les fois où la loi aggrave la répression d'une infraction commise au préjudice d'un témoin, d'une victime ou de la partie civile en vue d'empêcher la dénonciation des faits, la plainte ou la déposition en justice ou d'y riposter lorsque cette dernière est effective (v. par ex. : C. pén., art. 322-3 4° et 222-10 5°).
  • [35]
    Ce type de mobile se caractérise par le fait qu'une infraction ait été commise contre une personne dans le but de la contraindre à contracter un mariage ou à conclure une union, ou encore en raison de son refus de contracter un mariage ou une union (v. par ex. : C. pén., art. 221-4 10°, 222-3 6° bis, 222-8 6° bis).
  • [36]
    Expression préférée au simple terme de « race » par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017.
  • [37]
    Expression préférée à celle d'« identité sexuelle » par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017.
  • [38]
    C. pén., art. R. 624-3.
  • [39]
    C. pén., art. R. 624-4.
  • [40]
    C. pén., art. R. 625-7.
  • [41]
    Il s'agit précisément de la section 3 du chapitre 2 du titre 3 du livre 1er de la partie législative du code pénal.
  • [42]
    Par exemple, le mobile de racisme était prévu pour n'aggraver que le meurtre (C. pén., art. 221-4 6°), les tortures et actes de barbarie (C. pén., art. 222-3 5° bis), les violences (C. pén., art. 222-8 5° bis, 222-10 5° bis, 222-12 5° bis, 222-13 5° bis), les menaces (C. pén., art. 222-18-1), les atteintes à l'intégrité d'un cadavre (C. pén., art. 225-18), le vol (C. pén., art. 311-4 9°), l'extorsion de fond (C. pén., art. 312-2 3°) et les destructions, dégradations ou détériorations (C. pén., art. 322-2 et 322-8 3°).
  • [43]
    Les art. 132-76 et 132-77 C. pén. consacrent la méthode de l'aggravation générale par paliers dont le premier concerne l'infraction punie de trois ans d'emprisonnement au plus. Il convient donc d'en déduire que l'ensemble des délits punis d'un emprisonnement allant de deux mois à trois ans est concerné par le premier palier sans que l'aggravation puisse s'appliquer en deçà, c'est-à-dire ni aux délits non punis d'emprisonnement ni aux contraventions.
  • [44]
    C'est le cas, d'une part, des délits de discrimination incriminés par les art. 225-1 et 432-7 C. pén., et ce pour l'ensemble des circonstances aggravantes prévues par les art. 132-76 et 132-77 C. pén., ainsi que, d'autre part, du harcèlement sexuel prévu par l'art. 222-33 C. pén. lequel présente par nature un caractère sexiste voire homophobe ou transphobe (ne sont alors visés que les circonstances aggravantes prévues à l'art. 132-77 C. pén.).
  • [45]
    C. pén., art. R. 624-1.
  • [46]
    Ex. : C. pén., art. 311-4 s.
  • [47]
    La qualité de conjoint, de concubin ou de partenaire lié par un pacte civil de solidarité est une circonstance aggravante spéciale pour les infractions prévues par les art. 221-4 9°, 222-3 6°, 222-8 6°, 222-10 6°, 222-12 6°, 222-13 6°, 222-14, 222-18-3, 222-24 11°, 222-28 7° et 222-33-2-1 C. pén. Le mobile nuptial aggrave quant à lui les seules infractions prévues par les articles 221-4 10°, 222-3 6° bis, 222-12 6° bis et 222-13 6° bis C. pén.
  • [48]
    Parmi les mobiles discriminatoires, il est courant d'établir une dichotomie entre les critères directement discriminants qui sont aujourd'hui évoqués en groupe au sein des dispositions des art. 132-76 et 132-77 C. pén. et les critères indirectement discriminants tenant à la qualité de conjoint, de concubin ou de partenaire lié par un pacte civil de solidarité ainsi qu'au mobile nuptial. Ces derniers, évoqués par les dispositions générales de l'art. 132-77 C. pén. n'en restent pas moins des critères appréhendés de manière spécifique, c'est-à-dire pour une liste d'infractions.
  • [49]
    C. pén., art. 221-4 9°.
  • [50]
    C. pén., art. 132-77, al. 1er.
  • [51]
    Loi n° 72-546 du 1er juill. 1972 relative à la lutte contre le racisme.
  • [52]
    Loi n° 2004-1486 du 30 déc. 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.
  • [53]
    V. art. R. 624-3 (diffamation non publique à caractère discriminatoire), R. 624-4 (injure non publique à caractère discriminatoire) et R. 625-7 (provocation non publique à la discrimination, à la haine ou à la violence présentant un caractère raciste, antisémite, xénophobe, homophobe, handiphobe, sexiste, transphobe) du code pénal.
  • [54]
    Le texte vise à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe.
  • [55]
    Le texte a été adopté en faveur d'un renforcement de la sécurité intérieure et contient, à ce titre, des dispositions en faveur de la lutte contre l'homophobie.
  • [56]
    Les deux textes visés posent, communément, une aggravation pour les motifs discriminatoires qu'ils entendent combattre, pour les infractions définies par les art. 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 C. pén.
  • [57]
    Le mobile homophobe n'est pas en mesure d'aggraver, selon la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, les destructions, dégradations et détériorations de bien appartenant à autrui, visées par les art. 322-2, 322-3 et 322-8 C. pén. alors que cette possibilité est prévue pour les mobiles racistes, antisémites et xénophobes, et ce par la loi n° 2003-88 du 3 févr. 2003.
  • [58]
    Le mobile raciste était, dès avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 qui l'a généralisé, prévu à l'art. 311-4 C. pén. en tant que circonstance aggravante du vol, ce qui n'était en revanche pas prévu pour les destructions, dégradations et détériorations de bien appartenant à autrui lorsqu'elles ne présentent pas de danger pour les personnes (C. pén., art. 322-1 s.). On notera que les destructions, dégradations et détériorations d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes (C. pén., art. 322-6) étaient quant à elles susceptibles d'être aggravées lorsqu'elles ont été commises à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la personne propriétaire ou utilisatrice du bien à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (C. pén., art. 322-8 3° dans sa version antérieure à la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017).
  • [59]
    Le sexisme arbore plusieurs définitions. Selon A. Michel, « le sexisme est une attitude ou une action qui diminue, exclut, sous-représente et stéréotype des personnes sur la base de leur sexe […]. C'est une orientation qui défavorise un sexe en faveur de l'autre », in Non aux stéréotypes : vaincre le sexisme dans les manuels scolaires et les livres pour enfants, Paris, UNESCO, 1986. Selon P. Bourdieu, « le sexisme est un essentialisme ; comme le racisme, il vise à imputer des différences sociales instituées à une nature biologique fonctionnant comme une essence dont se déduisent implacablement tous les actes de la vie », in La domination masculine, Paris, Seuil, coll. Liber, 1998.
  • [60]
    V. J. Dechepy-Tellier, La mobilisation utilitariste de la loi pénale : l'exemple de la lutte contre les violences conjugales, in Les sources du droit dans les pays européens et francophones, Mare et Martin, Droit et Science politique, J. Leroy, D. Piatek et P. Szwedo (dir.), 2017, p. 231 à 244.
  • [61]
    Notons que les plans précédents mettaient davantage l'accent sur les violences subies plus que sur le mobile sexiste qui en représente la raison, étant entendu qu'il cause un nombre et des formes d'atteintes bien plus larges : « Plan global de lutte contre les violences faites aux femmes. 10 mesures pour l'autonomie des femmes » 2005/2007 ; « Douze objectifs pour combattre les violences faites aux femmes » - 2e plan global triennal - 2008/2010 ; « Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes » 2011/2013 ; « 4e plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes » 2014/2016.
  • [62]
    Sexuelles, physiques ou psychologiques.
  • [63]
    Afin de labelliser les initiatives se plaçant dans la lutte contre le sexisme, une plateforme a été élaborée : www.sexismepasnotregenre.gouv.fr.
  • [64]
    Les stéréotypes de genre peuvent, pour leur part, être définis comme des croyances sur les caractéristiques généralement associées aux femmes, d'un côté, et aux hommes, de l'autre.
  • [65]
    Le critère « sexe » a toujours fait partie de ceux permettant la constitution matérielle des discriminations incriminées par les art. 225-1 s. C. pén.
  • [66]
    Depuis la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, préc..
  • [67]
    C. pén., art. R. 624-3, al. 2.
  • [68]
    C. pén., art. R. 624-4, al. 2.
  • [69]
    Les dispositions de l'art. 132-77 C. pén. ont été créées par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003.
  • [70]
    L'identité de genre est une notion qui, avant d'être érigée en circonstance aggravante générale par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017, avait été utilisée comme critère constitutif de l'élément matériel des discriminations des art. 225-1 s. C. pén., et ce depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-547 du 18 nov. 2016. Par ce biais, le législateur a entendu viser le genre auquel une personne est susceptible de s'identifier, peu important le fait qu'il corresponde ou non au sexe indiqué sur les registres de l'état civil ou aux différentes expressions de l'appartenance au sexe masculin ou au sexe féminin.
  • [71]
    Le transsexualisme se caractérise par une opposition entre le sexe anatomique, chromosomique et hormonal, d'une part, et le sexe psychologique et psycho-social, d'autre part.
  • [72]
    La non-binarité de genre, plus connue sous l'expression anglo-saxonne genderqueer, désigne une identité de genre qui n'est ni masculine, ni féminine. L'identité de genre peut alors être faite de multiples genres ou donner lieu à des chevauchements d'expressions de l'appartenance à l'un et l'autre des sexes.
  • [73]
    On note ici une utilisation consciente du système des présomptions de fait.
  • [74]
    V. J. Dechepy-Tellier, Analyse genrée des délits d'injures et de diffamations publiques, in S. Hennet-Vauchez, M. Pichard, D. Roman (dir.), La loi et le genre, CNRS 2014. 659 à 676.
  • [75]
    V. art. 48 1° à 6° de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse. À noter que le désistement du plaignant arrête la poursuite lorsque celle-ci est commencée - art. 49 du texte.
  • [76]
    Le délai de prescription de l'action publique est, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017, de 20 ans pour les crimes (C. pr. pén., art. 7) et de 6 ans pour les délits (C. pr. pén., art. 8).
  • [77]
    Crim. 13 nov. 1962, Bull. crim. n° 316.
  • [78]
    La chambre criminelle a précisé que « s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée. Encourt, dès lors, la censure l'arrêt qui requalifie d'office des faits poursuivis sous la qualification de banqueroute en abus de biens sociaux, sans que le prévenu n'ait été invité à s'expliquer sur cette modification », Crim. 16 mai 2001, Gaz. Pal. 2002, II, p. 1200 et 1201, note Monnet.
  • [79]
    V. art. 50 et 53 de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse.
  • [80]
    La chambre criminelle a rappelé que « selon les art. 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, en matière de délit de presse, l'acte initial de poursuite fixe définitivement la nature et l'étendue de la poursuite quant aux faits et à leur qualification. Il s'en déduit que la juridiction saisie n'est pas autorisée à substituer à la qualification de droit commun adoptée par la partie poursuivante une qualification empruntée à la loi sur la liberté de la presse », Crim. 6 févr. 1990, Bull. crim. n° 64, p. 170.
  • [81]
    Crim. 17 juin 2008, Bull. crim. n° 153.
  • [82]
    Crim. 16 mars 1948, Gaz. Pal. 1948, I, p. 196.
  • [83]
    Crim. 18 mai 1954, JCP 1954. II. n° 8292, obs. Chavanne.
  • [84]
    Il n'est pas question de tolérer une transformation d'une injure en diffamation et inversement.
  • [85]
    Notons que la solution posée, dans un premier temps, pour les injures l'a ensuite été pour les diffamations. V. en ce sens Crim. 8 avr. 2008, Bull. crim. n° 94.
  • [86]
    Le nouveau texte vise l'ensemble des mobiles discriminatoires aggravant la répression des provocations à la discrimination, à la haine et à la violence (art. 24, al. 7 et 8 de la loi du 29 juill. 1881), des diffamations publiques (art. 32, al. 2 et 3 de la loi du 29 juill. 1881) et des injures publiques (art. 33, al. 3 et 4 de la loi du 29 juill. 1881). Ces mobiles sont, rappelons-le, l'origine ; l'appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ; le sexe ; l'orientation sexuelle ; l'identité de genre et le handicap.
  • [87]
    Avis sur le projet de loi « Égalité et citoyenneté », JO du 28 janv. 2017, texte n° 67, spéc. n° 63.
  • [88]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 1er.
  • [89]
    L'ensemble du régime de droit commun de la prescription de l'action publique des art. 7 à 9-3 C. pr. pén. est applicable aux crimes, délits et contraventions relevant de la matière militaire - CJM, art. L. 212-37 à L. 212-39.
  • [90]
    Loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017, art. 3. À noter que les contraventions douanières sont soumises à un délai de prescription dérogatoire de trois ans (C. douanes, art. 351, al. 2).
  • [91]
    Définis comme « ceux qui ont pour objet de constater une infraction, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs » (Crim. 9 mai 1936). Précisément, les actes d'instruction regroupent non seulement les actes de la phase d'instruction préparatoire mais également ceux de l'enquête policière ayant pour objet de constater les infractions, de rechercher les preuves et de parvenir à la manifestation de la vérité (V. Crim. 15 avr. 1937, Cardi ; Crim. 7 déc. 1966, Bull. crim. n° 284).
  • [92]
    V. C. pr. pén., art. 7 avant la réforme opérée par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017. V. également : C. pr. pén., art. 9-2 créé par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017.
  • [93]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 1er pour les délits de presse ; CJM, art. L. 212-37 avant la réforme opérée par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017.
  • [94]
    Crim. 10 oct. 2012, n° 11-85.585 ; contra : Crim. 9 déc. 1911, Bull. crim. n° 974.
  • [95]
    Dans un premier temps, les demandes de renseignements du parquet n'étaient interruptives de prescription qu'autant qu'elles étaient destinées aux enquêteurs de la police judiciaire (Crim. 16 mai 1973, Bull. crim. n° 224) ou aux agents des douanes (Crim. 18 sept. 2002, n° 01-87.048). Dans un second temps, la jurisprudence ne s'est attachée qu'à la finalité de l'acte - à savoir la recherche et la découverte d'une infraction pénale - pour ne prêter plus aucunement attention à la qualité du destinataire de la demande de renseignements (Crim. 20 févr. 2002, Bull. crim. n° 42 ; contra : Crim. 3 févr. 1977, Bull. crim. n° 45).
  • [96]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 2. La précision qu'il comporte date de l'entrée en vigueur de la loi n° 93-2 du 4 janv. 1993.
  • [97]
    Crim. 16 sept. 2017, n° 13-85.457, D. 2014. 1879 ; AJ pénal 2015. 51, obs. N. Verly.
  • [98]
    Adoptée avant la loi n° 2004-1486 du 30 déc. 2004 ayant ajouté les critères de sexe, d'orientation sexuelle et de handicap parmi les mobiles discriminatoires aggravant les provocations, diffamations et injures publiques, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 ne concernait alors que les provocations, diffamations et injures publiques commises en raison de l'appartenance ou de la non-appartenance de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.
  • [99]
    Circulaire du 20 avr. 2017 de présentation des dispositions de droit pénal ou de procédure pénale de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, p. 10.
  • [100]
    Fruit de l'adoption de la loi n° 92-683 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal, de la loi n° 92-684 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes, de la loi n° 92-685 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les biens et de la loi n° 92-686 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre la nation, l'État et la paix publique. L'injure non publique était, auparavant, constitutive d'une contravention de la première classe et incriminée à l'art. R. 26 11° du code pénal (ancien).
  • [101]
    C. pr. pén., art. 524 s.
  • [102]
    Crim. 7 mai 1975, Bull. crim. n° 119 ; Crim. 15 janv. 1998, n° 96-84.832, Bull. crim. n° 21 ; D. 1998. 101 ; Dr. pénal 1998, comm. 62, obs. Véron. Contra : Paris, 1re ch. B, 13 mars 1998, Gaz. Pal. 1998. 2, somm., 554.
  • [103]
    Crim. 18 mai 1954 préc. (injure) ; Crim. 8 avr. 2008 préc. (diffamation).
  • [104]
    La loi nouvelle a créé l'article 65-3 de la loi du 29 juill. 1881 identifiant les infractions soumises au délai d'un an et non au délai de trois mois.
  • [105]
    Circ. CRIM. 04-16-E8, 14 mai 2004, Bull. off. Min. just. n° 95, § 1.3.1.
  • [106]
    Crim., 23 mai 2006, Dr. pénal 2006, comm. 110, obs. Véron.
  • [107]
    Crim. 7 juin 2006, Bull. crim. n° 162.
  • [108]
    Depuis l'entrée en vigueur du décr. n° 2017-1230 du 3 août 2017, les provocations, diffamations et injures non publiques présentant un caractère raciste ou discriminatoire sont devenues des contraventions de la 5e classe. En outre, la liste des peines complémentaires encourues en raison de leur commission a été allongée (V. C. pén., art. R. 625-8-2).

1La spécification consiste à désigner, à identifier des choses particulières. L'opération implique un travail de sélection d'éléments parmi un ensemble appréhendé comme objet d'étude, afin d'en extraire une certaine quotité en raison de ses spécificités propres lesquelles sont alors à la fois reconnues et considérées. La spécification reconnaît ce qu'une chose, un événement, une situation, un comportement ou une notion a de spécifique, et ce dans le but de lui corréler, si besoin, une place, des effets ou un statut en adéquation avec sa particularité. En droit, la spécification génère une dichotomie bien connue des juristes entre le droit commun et les règles dérogatoires.

2En droit pénal, la spécification est, plus qu'une tendance qui s'installe, une méthode de travail empruntée par un législateur davantage soucieux de répondre à des besoins, ponctuellement et par secteurs, plutôt que de repenser l'entier système de production de la norme. Une telle méthode éclate les droits pénaux de fond et de forme suivant deux procédés affectant le moment de la création des lois pénales nouvelles.

3Le premier consiste à dévier les voies naturelles d'intégration de ces règles au sein des codes « pénal » et de « procédure pénale », censés contenir le droit pénal commun et être une référence en termes d'accès à la connaissance de l'interdit, pour leur préférer des codes « techniques » dont le nombre ne cesse d'augmenter.

4Le second ne court-circuite pas l'intégration des règles nouvelles au sein des codes « pénal » et de « procédure pénale », mais formalise une spécification par redondance ou par confusion. La spécification par redondance est reconnaissable à l'emploi de la formule « Comme il est dit à l'article [untel] du code pénal ci-après reproduit », au sein d'un code spécial. Ce modus operandi est d'ailleurs l'une des spécificités apparentes du code de la santé publique [1]. La spécification par confusion consiste à intégrer des règles spécifiques au sein d'un code intégrant, pour l'essentiel, le droit commun d'une matière. Elle est aujourd'hui l'une des principales caractéristiques du code de procédure pénale qui, bien qu'ayant vocation à absorber l'entier droit pénal procédural sans souffrir du même éparpillement que le droit pénal substantiel [2], accuse une spécification grandissante en son sein. D'aucuns savent en effet que son Livre IV représente un « code dans le code » puisqu'y sont à la fois compilées et développées les « quelques procédures particulières » constituant un corpus de règles de droit ayant fait l'objet d'une spécification.

5Ce mouvement touche particulièrement les actes d'administration de la preuve que le législateur a, dans un premier temps, pioché dans le répertoire de droit commun afin de leur conférer une efficacité qu'il a mise en adéquation avec les particularités du type de criminalité à combattre. C'est ainsi, par exemple, que la loi n° 86-1020 du 9 septembre 1986 a autorisé, lors d'une enquête préliminaire, les perquisitions sans l'assentiment préalable de l'intéressé [3] ainsi que les gardes à vue de 96 heures maximum, en matière d'actes de terrorisme. Le législateur a, dans un second temps, non plus seulement pris appui sur le répertoire de droit commun, mais reconnu des moyens propres à lutter de manière ad hoc contre certaines formes de criminalités. La loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 en constitue un exemple typique puisque, bien qu'elle renforce le pouvoir coercitif des perquisitions [4] et de la garde à vue [5] connues du droit pénal commun procédural, elle crée et encadre les infiltrations réalisées par des officiers ou agents de police judiciaire à l'occasion de trafic de stupéfiants dans le but de constituer des preuves et de capter les produits dudit trafic [6].

6Bien plus emblématique du mouvement décrit, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 produit une spécification sans précédent, et qui se fait ascendante depuis, au sein du code de procédure pénale. La lutte contre la criminalité organisée continue en effet de produire un fractionnement des règles de la procédure pénale en dégageant une substance infractionnelle pour la soumettre à un répertoire d'actes d'administration de la preuve, garant d'une plus grande efficacité de l'enquête, que celle-ci soit d'ailleurs policière ou judiciaire. Dès son entrée en vigueur, le 1er octobre 2004, la loi dite « Perben II » a autorisé l'utilisation de la surveillance nationale [7], de l'infiltration [8], des interceptions de correspondances émises par la voie des télécommunications [9], des sonorisations et des fixations d'images de certains lieux ou véhicules [10], des mesures conservatoires [11] ainsi que des régimes de garde à vue [12] et de perquisitions dérogatoires [13] pour les infractions organisées par nature ou par réalisation visées par les articles 706-73 et, suivant les conditions plus strictes posées par celui-ci, 706-74 du code de procédure pénale. Aujourd'hui, la substance du premier donne d'ailleurs lieu à un nouveau fractionnement afin de faire échapper la matière infractionnelle visée par l'article 706-73-1 du code de procédure pénale aux gardes à vue de 96 heures [14].

7Un tel mouvement n'a eu de cesse par la suite d'être amplifié, comme en témoignent la loi n° 2011-267 du 14 mars 2011 permettant la captation des données informatiques [15], la loi n° 2014-1353 du 13 novembre 2014 officialisant l'utilisation de l'enquête sous pseudonyme [16] ou encore, plus récemment, la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 autorisant autant le recueil des données techniques de connexion [17], que l'accès aux correspondances stockées [18], qu'à des opérations de « coup d'achat » à l'occasion des circulations d'armes, de munitions et d'explosifs [19].

8La spécification grandissante qui a trait à la criminalité organisée opacifie les règles de la procédure pénale française puisqu'elle donne naissance tant à des « dérogations gigognes », qu'à des « dérogations miroirs ».

9Les « dérogations gigognes » sont générées dès qu'il existe un enchevêtrement entre les règles spéciales afférentes à deux luttes croisées, au moins, contre certaines formes de criminalité. L'article 706-73 3° du code de procédure pénale, concernant la criminalité organisée, contient par exemple la référence aux crimes et délits de trafic de stupéfiants prévus par les articles 222-34 à 222-40 du code pénal. Or, ces mêmes infractions sont par ailleurs touchées par les dispositions légales, plus spécifiques encore, des articles 706-26 à 706-33 du code de procédure pénale. Cette méthode implique nécessairement une lecture et un emploi, en deux temps, des lois pénales applicables auxdits trafics. Englobés, d'abord, dans l'enceinte de la criminalité organisée, les trafics de stupéfiants offrent un accès, pour les enquêteurs et magistrats concernés, à l'ensemble du répertoire intensifié et ajouté prévu par les articles 706-80 à 706-103 du code de procédure pénale, suivant des règles variables selon la nature du cadre de leur intervention. Réglementés, ensuite, par des dispositions censées leur être propres, les trafics de stupéfiants sont constatés, poursuivis, instruits et jugés sous réserve de l'application des règles du Titre XVI du Livre IV du code de procédure pénale, dont le contenu est quantitativement bien plus maigre que celui relatif à la criminalité organisée.

10De près, cette ultra-spécification donne des résultats peu satisfaisants en termes de compréhension du droit pénal de forme. Pris dans l'énergie de la lutte spécifique contre la criminalité organisée, les trafics de stupéfiants objets d'une enquête de police ou d'une instruction peuvent donner lieu à des perquisitions de nuit, suivant les conditions posées par les articles 706-89 à 706-94 du code de procédure pénale. Concomitamment pris dans l'énergie de la lutte ultra-spécifique contre les trafics de stupéfiants, ces derniers peuvent pareillement conduire à des perquisitions de nuit, suivant les termes de l'article 706-28 du code de procédure pénale. Loin d'être fâcheusement redondantes, ces différentes dispositions impliquent une articulation qui peut sembler malaisée. En effet, l'article 706-28 n'a trait qu'aux perquisitions effectuées « à l'intérieur des locaux où l'on use en société de stupéfiants ou dans lesquels sont fabriqués, transformés ou entreposés illicitement des stupéfiants », et ce sans qu'il s'agisse de locaux d'habitation. Pour leur part, les articles 706-89 à 706-94 du même code s'appliquent à tout local, y compris lorsqu'il sert d'habitation.

11Néanmoins, si l'article 706-28 du code de procédure pénale n'implique pas que les officiers de police judiciaire, agissant dans le cadre d'une enquête de flagrance et procédant à une perquisition de nuit, obtiennent l'autorisation préalable du procureur de la République lorsque les investigations sont menées à titre probatoire et non, uniquement, confiscatoire [20] ; l'autorisation du juge des libertés et de la détention prise sur requête du procureur de la République devient nécessaire dès que l'acte est mené sur le fondement de l'article 706-89 du code de procédure pénale. Tout est, alors, question d'identification du lieu clos où est censée avoir lieu la perquisition.

12Les « dérogations miroirs » se produisent dès qu'un seul et même acte d'administration de la preuve pénale est mobilisable sur la base de deux fondements différents, applicables aux mêmes infractions, et qui posent les mêmes conditions préalables à l'utilisation régulière de l'acte considéré. Ce ne sont que les modalités de mise en œuvre de l'acte ainsi que les finalités poursuivies qui divergent, selon qu'il est utilisé sur l'un ou l'autre des deux fondements légaux. Par exemple, si la loi n° 92-1336 du 16 décembre 1992 a permis aux officiers et agents de police judiciaire d'infiltrer des réseaux de trafiquants de stupéfiants et, à cette occasion, d'acquérir, de détenir, de transporter ou de livrer ce type de produits illicites ; la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 avait abrogé les présentes dispositions [21] en vue de les généraliser dans le cadre, plus vaste, de la criminalité organisée, sous la forme officielle d'une « infiltration ».

13Au passage, le législateur avait souligné le fait que « L'infiltration consiste, pour un officier ou un agent de police judiciaire spécialement habilité dans des conditions fixées par décret et agissant sous la responsabilité d'un officier de police judiciaire chargé de coordonner l'opération, à surveiller des personnes suspectées de commettre un crime ou un délit en se faisant passer, auprès de ces personnes, comme un de leurs coauteurs, complices ou receleurs. » [22]. En outre, lors de sa mise à exécution, l'opération autorisait les personnes infiltrées autant à « acquérir, détenir, transporter, livrer ou délivrer des substances, biens, produits, documents ou informations tirés de la commission des infractions ou servant à la commission de ces infractions » [23], qu'à « utiliser ou mettre à disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication. » [24]. L'absorption de la substance de l'ancien article 706-32 du code de procédure pénale apparaissait ici nettement.

14 Une telle généralisation, au seul sein des règles dérogatoires, n'a cependant pas résisté à l'appel d'une nouvelle ultra-spécification propre à la lutte contre les trafics de stupéfiants. La loi n° 2007-297 du 5 mars 2007 a effectivement rétabli l'article 706-32 du code de procédure pénale, non avec un contenu identique à son ancienne version, mais seulement pour permettre aux officiers et agents de police judiciaire, autorisés préalablement par le procureur de la République, à « acquérir des produits stupéfiants » [25] et, en vue de cette acquisition, à « mettre à la disposition des personnes se livrant à ces infractions des moyens de caractère juridique ou financier ainsi que des moyens de transport, de dépôt, d'hébergement, de conservation et de télécommunication. » [26]. Par ce biais, le législateur a isolé une opération de « coup d'achat » de stupéfiants qu'il a extraite de la mise en œuvre d'une infiltration, plus longue et de plus grande envergure. Une telle extraction n'est toutefois nullement un obstacle à ce qu'un coup d'achat de stupéfiants se produise à l'occasion d'une opération d'infiltration.

15Cette forme de « dérogations miroirs » n'a aucune utilité au regard des conditions préalables à son application puisqu'autant le coup d'achat de stupéfiants autonome que le coup d'achat réalisé à l'occasion d'une infiltration, commandent l'autorisation du procureur de la République ab initio. En conséquence, l'intérêt de l'ultra-spécification réside essentiellement en chacune des finalités poursuivies. Le coup d'achat de stupéfiants autonome permet la captation rapide des produits dans le but d'endiguer les effets du trafic tandis que le coup d'achat inséré dans une opération globale d'infiltration, participe à une surveillance de longue haleine d'un trafic, en vue de le démanteler.

16Dans ce contexte législatif enclin à la démultiplication des spécifications en droit pénal, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté se positionne à contre-courant. Adopté pour améliorer la lutte contre les discriminations, le texte comporte plusieurs dispositions modifiant le code pénal, le code de procédure pénale et la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse. Le sens pris par ces modifications est intéressant, notamment, en ce qu'il tend à dé-spécifier certains pans du droit pénal jusqu'alors simplement spécifiques ou franchement dérogatoires. Le combat mené en faveur de l'égalité réelle entre les citoyens, en tenant compte d'indicateurs tels que leur sexe, leur identité de genre, leur orientation sexuelle ou encore leur origine, ouvre ici la perspective d'une égalité du traitement juridique applicable. L'analyse de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 révèle en effet l'existence de deux mouvements concomitants.

17Le premier consiste à généraliser certaines circonstances aggravant la commission d'infractions, c'est-à-dire à dé-spécifier ou non-spécifier cette technique typique de la fabrication du droit pénal de fond (I). Le second affaiblit, pour sa part, l'intensité du caractère dérogatoire de certaines règles de droit pénal de forme prévues par la loi du 29 juillet 1881, et ce en vue d'améliorer et faciliter la répression des provocations à la haine, à la discrimination ou à la violence, des diffamations et des injures publiques à caractère discriminatoire (II).

I - La généralisation de circonstances aggravantes

18La commission d'une infraction pénale ne repose pas toujours sur la seule conscience de réaliser l'incrimination telle que celle-ci est typiquement prévue par le texte de référence. L'auteur est, bien souvent, inspiré d'idées, de croyances ou d'états de volonté variés qui vont justifier, de son point de vue, la perpétration de telle infraction à l'encontre de telle(s) personne(s), institution(s) ou structure(s). Il est animé d'un mobile, variable par nature, auquel par principe le droit pénal reste indifférent afin de concentrer la responsabilité sur un seuil minimal et commun aux individus, autrement dit une faute de base, qui écarte les aspects très concrets des motifs du crime. Si tel est le principe, la richesse des mobiles n'est pas totalement occultée.

19La spécification est effectivement à l'œuvre sur les mobiles après qu'une opération de sélection parmi la somme qu'ils représentent a été effectuée. C'est par ce biais qu'un mobile déterminé peut charger plus lourdement la preuve pénale à rapporter en exigeant un dol spécial, c'est-à-dire une intention plus affinée que les simples conscience et volonté de transgresser l'interdit pénal, ou encore venir aggraver la répression d'infractions entièrement constituées.

20Appréhendé comme une circonstance aggravante, un mobile précis peut être spécifiquement attaché à quelques infractions ciblées par le législateur ou être prévu indifféremment, sans prêter attention à la nature de l'infraction commise ou tentée. Bouleversant la méthode largement usitée avant son entrée en vigueur, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté se veut symptomatique de la tendance à la dé-spécification et à la non-spécification du droit pénal de fond, qu'elle entame sur les circonstances aggravantes prévues par les articles 132-76 et 132-77 du code pénal. Alors qu'ils ont été insérés au sein de notre droit pénal pour n'aggraver qu'une liste d'infractions, les mobiles de racisme et d'homophobie sont généralisés. Il s'agit d'une dé-spécification (A). Quant au mobile de sexisme qui vient d'intégrer le droit pénal commun, il n'est nullement corrélé à une quelconque liste d'infractions. Il s'agit d'une non-spécification (B).

A - La dé-spécification des mobiles de racisme, d'homophobie et de transphobie [27]

21Plusieurs circonstances viennent se greffer à la commission d'une infraction afin d'élever le maximum légal de la peine encourue. Parmi elles, une dichotomie est classiquement établie entre la récidive légale [28] et l'emploi d'un moyen de cryptologie [29] vus comme des circonstances aggravantes générales, applicables à toutes les infractions lorsque les conditions de leur caractérisation sont remplies, et les autres circonstances, bien plus nombreuses, qui ne s'attachent spécifiquement qu'aux infractions ou groupes d'infractions auxquels le législateur les a identifiées. Ces dernières peuvent être liées autant à la personne [30], qu'au moyen utilisé [31], qu'au lieu [32] de l'infraction, qu'aux modalités d'action [33] ou qu'au but poursuivi par l'auteur.

22À ce dernier sujet, le législateur appréhende trois types de mobiles, à savoir ceux reposant sur une discrimination entre les personnes ou groupes de personnes, les mobiles d'intimidation et de représailles [34] ainsi que le mobile nuptial [35]. Les mobiles discriminatoires sont de loin les plus développés. Ils reposent, subjectivement, sur le sentiment de supériorité ressenti par l'auteur des faits et qui le conduit à hiérarchiser entre eux les individus ou groupes d'individus. L'autre est dominé sciemment parce qu'il est, paraît être ou représente, ce que n'est pas, ce que ne paraît pas ou ce que ne représente pas le modèle estimé comme dominant. Le sujet animé de cet état d'esprit catégorise, classifie, qualifie sa victime selon un critère discriminant qui représente pour lui la raison de son passage à l'acte. L'égalité réelle est niée afin de lui préférer une hiérarchie de principe, laquelle valorise certains paramètres participant à la constitution de l'identité des personnes jugées supérieures à certaines autres. Parmi les nombreux paramètres susceptibles d'être à l'œuvre, le législateur retient aujourd'hui la « prétendue race » [36], l'« ethnie », la « nation », la « religion », le « sexe », l'« orientation sexuelle », l'« identité de genre » [37], l'« origine » et le « handicap ». L'attention qu'il porte à chacun diverge toutefois.

23Seuls certains de ces mobiles discriminatoires sont en effet censés faire l'objet d'une définition légale intégrant le Livre 1er du code pénal dédié aux « Dispositions générales ». Ils prennent place, précisément, aux articles 132-76 et 132-77 du code pénal dont la lettre vient d'être modifiée par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, et qui ne mentionnent pas les notions d'« origine » et de « handicap ». Celles-ci ne se retrouvent donc que de manière épisodique pour aggraver tout spécialement les diffamations [38], injures [39] et provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence à l'égard d'une personne ou d'un groupe de personnes [40], lorsqu'elles ne sont pas publiques. De près, cette différence de traitement n'a en réalité pas trait au travail d'explicitation des données propres à chacun de ces mobiles. Les dispositions des articles 132-76 et 132-77 du code pénal incluses dans une section 3 intitulée « De la définition de certaines circonstances entraînant l'aggravation, la diminution ou l'exemption des peines » [41] ne définissent pas, mais listent simplement certains des mobiles discriminatoires. En outre, avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, ces mobiles ne pouvaient être retenus que « Dans les cas prévus par la loi », puisque-là était la formule introductive des articles 132-76 et 132-77 code pénal [42]. Curieusement, les dispositions générales du code pénal incorporaient en leur sein le principe de spécialité, rendant les mobiles discriminatoires visés inaptes à produire un quelconque effet de droit en dehors des souhaits du législateur. L'effet de la généralité se cantonnait, dans ces circonstances, à l'amélioration de la visibilité des mobiles que le législateur avait choisi d'exposer fièrement en tête du code.

24Modifiés, de manière considérable, par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, les articles 132-76 et 132-77 du code pénal accueillant la plupart des mobiles discriminatoires, ont bousculés la méthode jusqu'alors employée et ont commencé à donner un sens à la section 3 susvisée, et qui les contient. La formule introductive faisant référence au principe de spécialité écartée, le législateur a entamé un effort de généralisation des circonstances aggravantes tenant au mobile discriminatoire de l'auteur. Désormais, la « prétendue race », l'« ethnie », la « nation », la « religion », l'« orientation sexuelle » et l'« identité de genre » sont susceptibles d'être retenues par les juges en tant que causes d'aggravation de la peine pour tout crime et tout délit puni d'emprisonnement [43]. Une telle généralisation ne conduit néanmoins pas à une dé-spécification totale des mobiles discriminatoires. Plusieurs raisons expliquent cet effet limité.

25La première tient au fait que les mobiles discriminatoires peuvent servir non pas à aggraver la commission d'une infraction, mais à participer à la constitution d'une infraction [44]. La deuxième part du constat selon lequel, limitée aux crimes et délits punis d'emprisonnement, la généralisation opérée n'éradique pas la spécification qui touche les discours discriminatoires non publics puisque ceux-ci continuent de constituer des contraventions, définies par le pouvoir réglementaire. Dans le même ordre d'idées, la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 ne change pas la logique répressive touchant spécifiquement les violences sans incapacité totale de travail ou avec une telle incapacité restant inférieure ou égale à huit jours, lesquelles sont constitutives de délits, et non simplement de contraventions [45], lorsqu'elles sont commises dans l'une, au moins, des circonstances visées à l'article 222-13 du code pénal dont font parties les mobiles ici étudiés.

26La troisième, certainement plus contestable, tente d'éviter une « aggravation millefeuille » consistant à superposer des circonstances aggravantes pour une même situation infractionnelle, afin d'élever progressivement la peine encourue [46]. Le législateur opère donc une confusion des mobiles discriminatoires et empêche le cumul entre le sexisme, l'homophobie et la transphobie, d'une part, et les qualités de conjoint, de concubin ou de partenaire lié par un pacte civil de solidarité ainsi que le mobile nuptial, d'autre part. Ces dernières situations, prises en compte de manière spécifique par la loi pénale [47], restent semble-t-il les seules à pouvoir être retenues par le juge pour aggraver la peine encourue pour chacune des infractions concernées, même si l'un des mobiles visés à l'article 132-77 du code pénal est susceptible d'être caractérisé. Il en résulte que la spécification l'emporte sur l'effort de généralisation et amène à hiérarchiser, entre eux, les mobiles discriminatoires [48]. Ainsi, parce que le meurtre est aggravé par le fait qu'il a été commis « par le conjoint ou le concubin de la victime ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité » [49], il ne peut l'être respectivement en raison du fait qu'il ait été « précédé, accompagné ou suivi de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui soit portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime ou d'un groupe de personnes dont fait partie la victime à raison de son sexe, son orientation sexuelle ou identité de genre vraie ou supposée, soit établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une de ces raisons » [50].

27Or, si une juridiction, d'instruction ou de jugement, est saisie de faits de meurtre qui ne sont pas, en réalité, imputables au conjoint, au concubin ou au partenaire de la victime, est-elle en mesure de retenir le mobile sexiste, homophobe ou transphobe, nettement établi quant à lui, pour faire encourir la réclusion criminelle à perpétuité à l'auteur ?

28Une réponse négative paraît s'imposer. La volonté du législateur est d'exclure l'application de l'article 132-77 du code pénal toutes les fois où la qualité de conjoint, de concubin ou de partenaire est déjà prise en compte, de manière abstraite, en tant que circonstance aggravante. En conséquence, la coexistence des méthodes de spécification et de généralisation en vient à fragiliser considérablement la performance de la répression des infractions présentant un caractère directement ou indirectement discriminatoire. Ce caractère se trouve être en effet désactivé toutes les fois où la prévision spécifique de l'un des mobiles indirectement discriminatoires, alors qu'il ne peut être concrètement caractérisé, exclut les mobiles directement discriminatoires prévus pour toute infraction. Afin que ces effets contestables soient empêchés, il serait bien plus judicieux que les articles 132-76 et 132-77 du code pénal accueillent l'ensemble des critères discriminants en vue de produire, de manière égalitaire et homogène, une aggravation par paliers qui prenne appui sur la gravité intrinsèque du comportement à punir. Une telle modification aurait raison des dispositions de l'article 132-80 du code pénal, actuellement en vigueur pour aggraver les crimes et délits commis par le conjoint, le concubin ou le partenaire lié à la victime par un pacte civil de solidarité, et qui ne s'appliquent que « dans les cas respectivement prévus par la loi ou le règlement ». Il est en effet curieux que des dispositions générales du droit pénal français continuent de légitimer et de générer une spécification…

29La quatrième tient enfin à ce que le législateur a souhaité respecter l'autonomie et la primauté accordées aux lois spéciales par rapport au droit pénal commun. D'aucuns savent effectivement que la liberté d'expression accuse des limites qui prennent la forme d'incriminations identifiées dans la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, figure emblématique du phénomène de spécification ici étudié. Or, le présent texte a été modifié à maintes reprises en vue d'y voir figurer de nouvelles circonstances aggravantes parmi lesquelles sont apparus les mobiles de racisme, d'antisémitisme et de xénophobie [51] avant que le législateur n'entende lutter, bien plus tard, contre le sexisme, l'homophobie et la haine des personnes handicapées [52]. Est ainsi mise en œuvre, par ce biais, une lutte spécifique contre les discours discriminatoires qui donne lieu à un développement du nombre des critères discriminants, et ce certainement par souci d'adaptation de la réponse pénale aux revendications sociétales favorables aux traitements égalitaires. Les mœurs évoluant continuellement, leur mutation entraîne de nouvelles exigences quant à la teneur des discours publics. Maîtriser cette teneur revient à éviter, autant que faire se peut, des retombées néfastes en termes de délinquance.

30En effet, l'expression individuelle ou collective, qu'elle prenne la forme extériorisée de paroles, d'écrits, d'images ou d'actes de toute autre nature, est un moyen de diffuser des idées. Or, toute idée peut, une fois divulguée, être acceptée, accréditée, reprise et partagée par d'autres, donnant ainsi lieu à un phénomène d'imitation, déformant parfois l'idée première. L'imitation, pour sa part, finit par banaliser l'idée qui sous-tend les discours et comportements par ce qu'elle devient courante, acceptée par un nombre toujours plus important de personnes. En droit pénal, lorsque l'idée se positionne contre une valeur sociale jugée essentielle - telle que l'égalité -, elle est combattue par le processus d'incrimination lequel tente d'éviter le comportement jugé contraire à l'ordre social, car sa démultiplication renverrait justement à cette banalisation de l'idée. Il n'est alors pas anodin de voir être diversifiés, au sein de la loi du 29 juillet 1881, des mobiles discriminatoires cherchant à condamner pour toutes et tous, tout discours public visant à hiérarchiser entre eux des individus égaux.

31Cette méthode d'élaboration de la loi pénale de fond consiste donc, ni plus ni moins, qu'à nier toute vitrine aux idées porteuses d'un message discriminatoire en identifiant le meilleur outil de répression. La loi du 29 juillet 1881 s'est donc imposée comme le premier instrument utilisé pour la lutte contre le mobile de racisme, car elle se positionne en tant que modérateur de l'expression humaine, cause d'expansion de la criminalité. Dans ces conditions, il est opportun de maintenir les effets propres à ce texte afin qu'il conserve sa fonction essentielle d'endiguement des phénomènes de propagande et d'imitation.

32Cette spécification bienvenue n'a pas, néanmoins, résisté à la reconnaissance des mobiles discriminatoires, en tant que circonstances aggravantes, au sein du code pénal. Ces mobiles, étudiés en dehors de l'aggravation spécifique des discours non publics qui a suivi la politique poursuivie quant à l'évolution de la loi du 29 juillet 1881 [53], ont commencé à investir notre code pénal à partir de la loi n° 2003-88 du 3 février 2003 [54] et de celle n° 2003-239 du 18 mars 2003 [55]. Le législateur a effectivement fait le choix d'indiquer les listes d'infractions pour lesquelles les nouvelles circonstances aggravantes de racisme, d'antisémitisme, de xénophobie et d'homophobie peuvent être désormais retenues. Dès lors, si les atteintes graves aux personnes, auxquelles le corps social se montre très réceptif, ont été intégrées auxdites listes [56], seules quelques atteintes aux biens ont été identifiées comme susceptibles d'être causées en raison des idées racistes, antisémites ou xénophobes de l'auteur [57].

33Toutefois, si la visibilité et le retentissement sociétal d'une infraction peuvent être des critères de priorisation des actions à mener en politique pénale, leur observation génère nécessairement des inégalités de traitement entre les victimes ayant un même intérêt lésé par une infraction et subissant les effets d'une même pensée discriminatoire. C'est ainsi qu'en présence d'une telle spécification, la victime d'un vol, animé par des considérations racistes, ne voit pas sa situation être considérée pénalement de la même manière que s'il avait été question d'une dégradation de bien, ne présentant pas de danger pour les personnes, accomplie dans le même état d'esprit [58].

34La généralisation des circonstances aggravantes visées aux articles 132-76 et 132-77 du code pénal, qui étaient jusqu'alors d'application spécifique, représente une avancée certaine pour l'égalité réelle des citoyens puisqu'elle gomme, au moins abstraitement, toute différence de traitement par rapport aux comportements discriminatoires dont ils peuvent être les cibles.

35C'est peut-être d'ailleurs cette aspiration de la société à l'égalité réelle qui a conduit le législateur à ne pas spécifier la circonstance aggravante de sexisme qu'il vient d'intégrer au code pénal.

B - La non-spécification du mobile de sexisme [59]

36Alors que la lutte contre l'homophobie a commencé à investir le champ du droit pénal sous la forme d'une circonstance aggravante susceptible d'élever le quantum de la peine encourue, pour certaines infractions uniquement, par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003 ; le combat mené à l'encontre des comportements sexistes s'est fait d'abord plus discret avant d'être nettement densifié.

37Du point de vue des politiques publiques, un premier plan global et triennal de lutte contre les violences faites aux femmes, adopté le 24 novembre 2004, a effectivement débuté une sensibilisation d'ampleur de la société civile et des principaux acteurs des politiques publiques afin de prévenir les violences au sein du couple, améliorer leur dépistage et apporter des solutions qui tiennent compte des spécificités de leur situation pour les victimes. Ses reconductions n'ont ensuite jamais entamé la détermination des gouvernements à améliorer et à développer les dispositifs mis en œuvre, notamment grâce à une évaluation des retombées générées par les plans précédents [60]. Le dernier plan triennal, feuille de route de la période 2017-2019, interpelle d'ailleurs quant à son intitulé, lequel met directement, et pour la première fois, l'accent sur le sexisme : « Le sexisme tue aussi - 5e plan de mobilisation et de lutte contre toutes les violences faites aux femmes 2017/2019 - Sexisme pas notre genre ! » [61]. Cette évolution traduit un changement de paradigme dans la lutte contre les violences faites aux femmes puisqu'il est désormais question, quelles que soient leurs formes [62], de les inscrire dans un continuum provoqué par cette seule et même idéologie qu'est le sexisme. Il n'est alors pas étonnant de remarquer que ce 5e plan triennal s'est inscrit pleinement dans le plan d'actions et de mobilisation contre le sexisme lancé, seulement, le 8 septembre 2016 [63].

38Du point de vue juridique, la lutte contre le sexisme, lequel peut être défini comme une idéologie se fondant sur l'adhésion à des croyances discriminatoires fondées sur le critère du sexe et s'appuyant sur des stéréotypes de genre [64], a débuté, en dehors de la constitution matérielle des discriminations [65], de par la reconnaissance de nouveaux mobiles susceptibles d'aggraver la répression des discours publics constitutifs d'infractions à la loi sur la liberté de la presse. La loi n° 2004-1486 du 30 décembre 2004 a effectivement permis l'aggravation des diffamations et injures publiques commises envers les particuliers ainsi que des provocations à la haine, à la violence ou aux discriminations lorsqu'elles sont commises à raison du sexe, de l'orientation sexuelle ou du handicap de la victime. Dès lors, si l'orientation sexuelle désignant l'attrait d'une personne vers une ou plusieurs personnes de sexe identique ou opposé au sien constituait déjà un mobile saisi par le droit commun pour aggraver certaines infractions [66], le sexe ne s'était pas vu, jusqu'alors, accordé les mêmes effets de droit. Une telle méthode a d'emblée rendu spécifique le combat contre le sexisme, en plaçant précisément celui-ci dans l'objectif de maîtrise des discours attentatoires aux valeurs sociales fondamentales afin d'éviter les phénomènes d'entraînement et d'imitation. Certes, les diffamations [67] et injures non publiques [68] présentant un caractère raciste ou discriminatoire, constituant des contraventions de 4e classe, avaient été aggravées pour les mêmes motifs par le décret n° 2005-284 du 25 mars 2005 alors qu'elles étaient incriminées par le droit commun. Cependant, une telle situation n'était pas due à la volonté d'intégrer le mobile sexiste au régime de répression de droit commun, mais seulement à l'observation, certainement contestable, d'un principe de solidarité des règles applicables aux diffamations et injures que leur commission présentât ou non la condition de publicité. Il a fallu attendre les avancées portées par la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 pour que le sexe figure parmi les critères discriminants visés par les règles générales de l'article 132-77 du code pénal. Néanmoins, plutôt que de suivre la méthode traditionnelle consistant à reconnaître un nouveau mobile discriminatoire parmi les dispositions générales du code pénal tout en en spécifiant les sphères d'application concrète, le sexisme, créé en tant que circonstance aggravante en droit commun n'a pas, d'emblée, été directement spécifié. Une telle manière de procéder n'avait pourtant rien d'habituel. L'identité sexuelle, appréhendée comme cause d'aggravation à partir de l'entrée en vigueur de la loi n° 2012-954 du 6 août 2012, avait fait l'objet d'une double spécification. D'abord, insérée à la loi du 29 juillet 1881, elle était spécifique aux infractions de presse. Ensuite, bien qu'identifiée dans les dispositions générales de l'article 132-77 du code pénal, elle ne pouvait venir aggraver que « les cas prévus par la loi », c'est-à-dire une liste précise d'infractions.

39La loi nouvelle étudiée formalise, en définitive, une globalisation des mobiles visés à l'article 132-77 du code pénal, laquelle touche autant le sexisme à peine créé, que l'orientation sexuelle prévue depuis l'entrée en vigueur du texte [69] et l'identité de genre [70] vraie ou supposée, venue remplacer la notion d'« identité sexuelle ». Plus explicite que les expressions précédemment utilisées, l'identité de genre vraie ou supposée marque plus clairement le fait que la circonstance aggravante joue en cas de transphobie. L'évolution ainsi consacrée permet au droit pénal de protéger l'auto-détermination de genre, incluant le transsexualisme [71] et la non-binarité de genre [72].

40Au-delà de la mutation de la sémantique qu'elle produit, la généralisation des mobiles discriminatoires présente une portée symbolique de taille puisque, en filigrane, l'égalité formelle est consacrée. Celle-ci vient du fait que la globalisation d'une circonstance aggravante met immédiatement fin au traitement différencié des victimes des effets d'un même mobile discriminatoire. La spécificité de l'intention de l'auteur est condamnée, sans devoir nécessairement passer par le détour de la qualification pénale arrêtée en rapport aux spécificités de la situation considérée. C'est dire qu'il est des idées qui doivent être combattues, en elles-mêmes, à partir de l'instant où elles motivent la commission d'un crime ou d'un délit. Les lacunes de la répression par spécification sont ici comblées et c'est la vigueur du principe d'égalité qui s'en trouve renforcée.

41L'enthousiasme de mise reste néanmoins terni par les difficultés ancrées de la répression effective des comportements à visée discriminatoire. Bien qu'en prise nécessaire avec l'esprit humain, l'intention véritable, le droit pénal ne peut voir sa performance et son autorité être abandonnées aux aléas et imprécisions de la preuve de l'élément moral de l'infraction, surtout lorsque celui-ci est affiné soit par la mutation de l'exigence traditionnelle d'un dol général en dol spécial, soit par la caractérisation d'une circonstance aggravante tenant au mobile particulier de l'auteur des faits. Évitant une définition subjective des circonstances aggravantes visées à l'article 132-77 du code pénal modifié, le législateur en prévoit la constitution effective lorsque l'infraction « est précédée, accompagnée ou suivie de propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature qui portent atteinte à l'honneur ou à la considération de la victime » à raison de l'un des critères discriminatoires visés par le texte. Ce sont alors les données objectives qui entourent la commission de l'infraction qui permettent d'établir la circonstance aggravante. La matérialité, tangible, du crime ou du délit, est un moyen d'extraire ladite circonstance quitte, par ce biais, à négliger les données psychologiques, psycho-sociales et psychiques de l'auteur, par nature très difficiles à sonder [73]. Ce modus operandi élude la question de l'adhésion de l'auteur aux idées apparemment exprimées, tout en respectant la perception du caractère discriminatoire du comportement subi par la victime.

42En outre, même si la perception objective du caractère discriminatoire est préférée à l'intention véritable, celle-ci est tout de même, dans l'esprit de la loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017, une possible cause autonome d'aggravation. L'article 132-77 du code pénal prévoit effectivement le jeu de l'aggravation en cause lorsque les propos, écrits, images, objets ou actes de toute nature « établissent que les faits ont été commis contre la victime pour l'une [des raisons discriminatoires] ». C'est dire que les juridictions sont appelées à rechercher la présence de l'intention discriminatoire de l'auteur en dehors des seules données précédant, accompagnant ou suivant la perpétration des faits. Il en résulte que les stéréotypes, notamment de genre, qui investissent le discours habituel de l'auteur, sont susceptibles de conduire à l'aggravation de la peine encourue en cas de passage à l'acte, motivé par lesdits stéréotypes.

43 La globalisation générée par la loi nouvelle représente, à n'en pas douter, une avancée notable dans la lutte en faveur de l'égalité réelle. Cantonnée, longtemps, à quelques infractions et, surtout, aux délits de presse, cette lutte devrait, lorsqu'elle donnera lieu à des applications jurisprudentielles bien plus nombreuses, révéler et condamner des stéréotypes encore bien présents dans certains esprits. Le contentieux propre aux infractions de presse, dont l'étude en avait révélé l'incapacité à esquisser le mobile sexiste et à éliminer efficacement les stéréotypes de genre [74], devrait être nourri des enseignements tirés du contentieux global. Une pédagogie de l'égalité résultera, le moment venu, du recours massif au droit commun.

44 Un tel résultat pourrait d'ailleurs être également constaté en matière d'infractions de presse où le rapprochement avec les règles de poursuite de droit commun, déverrouille ce contentieux spécifique jusqu'alors très contraignant.

II - L'affaiblissement du caractère dérogatoire de la poursuite des provocations, diffamations et injures présentant un caractère discriminatoire

45La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 fragilise considérablement les particularités, pourtant notables, du régime juridique de la répression des délits de presse, spécialement pour les provocations, diffamations et injures, tel qu'il est institué à titre dérogatoire au droit commun procédural, par la loi du 29 juillet 1881. Ce texte est traditionnellement vu comme une manière d'équilibrer le droit fondamental à la liberté d'expression et ses limites nécessaires, ce qui se traduit par des conditions d'engagement des poursuites pensées pour être draconiennes. Des règles spécifiques sont effectivement posées en vue de rendre autant l'initiative des poursuites que le formalisme à la base de celles-ci, nettement plus exigeantes que s'il s'était agi d'une infraction de droit commun.

46Du côté de l'initiative des poursuites, c'est le principe d'opportunité qui est d'abord entamé. La plainte préalable de la victime n'est pas, en principe, une condition de l'exercice de l'action publique par son titulaire principal, le ministère public. Ce dernier jouit la plupart du temps d'une liberté qui l'autorise à engager d'office des poursuites, sans devoir prêter attention aux initiatives des tiers ayant un intérêt à protéger. Ce principe est néanmoins renversé en matière de diffamations et injures puisque la plainte de l'intéressé est spécifiquement érigée en condition de la poursuite [75].

47C'est ensuite le temps des poursuites qui est spécifiquement aménagé. L'article 65 alinéa 1er de la loi du 29 juillet 1881 dispose en effet que « L'action publique et l'action civile résultant des crimes, délits et contraventions prévus par la présente loi se prescriront après trois mois révolus, à compter du jour où ils auront été commis ou du jour du dernier acte d'instruction ou de poursuite s'il en a été fait ». Partant, la prescription trimestrielle ici instituée en tant que principe, oblige les victimes de diffamations et injures à réagir rapidement après la commission des faits grâce à leur plainte, si elles souhaitent obtenir la réaction des juridictions pénales. Ce temps abrégé s'écarte d'autant plus aujourd'hui du droit commun, que les délais de prescription y afférents viennent d'être doublés dans les matières correctionnelle et criminelle [76].

48Du côté du formalisme à la base des poursuites, les exigences de forme posées spécifiquement pour la poursuite des infractions de presse appellent le ministère public, rédacteur d'un réquisitoire introductif et la partie civile, auteure d'une citation directe, à faire preuve de clarté et de minutie. Trois indications doivent, à peine de nullité, figurer dans l'acte à l'origine des poursuites. Les propos tenus et pour lesquels la poursuite est visée doivent être à la fois articulés - c'est-à-dire spécifiés tels qu'ils ont été proférés -, qualifiés - ce qui oblige le poursuivant à faire le choix de la qualification qu'il estime être en adéquation avec les faits - et juridiquement fondés - autrement dit être rattachés au texte d'incrimination dont l'indication précise figure dans l'acte de poursuite -. Ces formalités sont redoutables en ce qu'elles rendent intangible l'objet de la poursuite et ouvrent, en cas de discordance entre les propos, la qualification retenue et le texte d'incrimination choisi, la possibilité pour le prévenu de demander l'annulation de cette poursuite. Couplées à la prescription abrégée, ces règles spécifiques empêchent toute poursuite nouvelle une fois l'annulation de la première consommée puisque la prescription aura eu alors le temps de produire son effet extinctif.

49Cette spécification dense et exigeante qui préside à la loi du 29 juillet 1881 accuse toutefois un net déclin, en lien avec le renforcement progressif de la lutte pour l'égalité réelle. La balance d'antan, voulue en faveur de la préservation de la liberté d'expression plutôt que pour ses limites nécessaires, ne se situe plus dans les mêmes termes aujourd'hui qu'au temps de l'indifférence du droit envers les discours présentant un caractère discriminatoire. Les évolutions du droit pénal contemporain menées pour assurer une lutte renforcée contre, notamment, les diffamations et injures présentant un caractère sexiste ou homophobe, ont produit une mutation du régime dérogatoire initial en corps de règles de droit « quasi-commun ». Ce phénomène touche d'ailleurs, concomitamment, le régime dérogatoire apparent - celui des provocations, diffamations et injures publiques - (A), et le régime dérogatoire caché - celui des provocations, diffamations et injures non publiques - (B) lorsque ces infractions sont commises à raison d'un critère discriminant prévu par la loi.

A - La mutation du régime dérogatoire apparent : le cas des provocations, diffamations et injures publiques à caractère discriminatoire

50La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 revient en partie sur les spécificités d'ordre procédural qui touchaient, jusqu'à son entrée en vigueur, la poursuite des provocations, diffamations et injures publiques à caractères raciste, antisémite, xénophobe, sexiste, homophobe ou encore transphobe. Le nouveau texte produit deux effets importants qui contribuent à rapprocher, un peu plus, les modalités de poursuite spécifiques à ces infractions de presse des règles suivies en droit commun. Le premier effet consiste à mettre fin à la cristallisation de la qualification juridique donnée aux faits par l'auteur de l'acte de poursuite (1). Le second effet représente, quant à lui, une dé-spécification partielle du régime de la prescription de l'action publique attaché aux seules infractions en cause (2).

1 - La fin de la cristallisation de la qualification juridique des faits

51L'identification de l'infraction est incontournable en droit pénal de fond, car elle permet autant de vérifier la réunion des éléments matériel et moral que de déterminer les sanctions applicables. Elle l'est encore en droit pénal de forme puisqu'elle produit des conséquences sur l'administration de la preuve, les modalités de jugement et le régime d'exécution des peines. Tenu au devoir de qualifier les faits, le juge doit précisément retenir la bonne qualification c'est-à-dire celle qui se trouve être en adéquation aux données de la situation appréciée. Cette quête de l'adéquation explique le fait que les juges du fond saisis ne soient pas liés, en principe, par les termes de l'acte de saisine, quand bien même ce dernier précise le texte semblant incriminer les faits objets de ladite saisine. Il leur appartient de « restituer même d'office aux faits leur véritable qualification » [77]. Par cette formule, ils sont obligés, afin de faire une application plus exacte de la loi pénale, de modifier la qualification envisagée dans l'acte de saisine si celle-ci s'avère être erronée ou inadaptée. Libres de modifier la qualification pénale pour des raisons de mise en adéquation aux prévisions légales, les juges du fond ne sont néanmoins jamais en droit d'examiner d'autres faits que ceux dont ils sont saisis. En outre, l'évolution de la qualification pénale doit être conciliée avec l'impératif de préservation de l'exercice concret des droits de la défense [78].

52Cette malléabilité de la qualification pénale est toutefois écartée en matière de presse puisque c'est un principe inverse de cristallisation de ladite qualification qui est observé [79]. Celui-ci conduit à figer la qualification des faits telle qu'elle est spécifiée par l'auteur de la saisine du juge pénal et à bloquer toute tentative de requalification. L'hermétisme est de rigueur dès que l'une des incriminations spécifiques à la loi du 29 juillet 1881 est en cause. Il est ainsi exclu de requalifier un délit de droit commun en infraction de presse [80], de requalifier une infraction de presse déterminée en une autre infraction de presse [81] ou encore de requalifier une infraction de presse en infraction de droit commun [82].

53Ces solutions ont toutefois décliné, dans un premier temps, suite au souhait d'articuler entre elles les injures et diffamations publiques, incriminées par la loi spéciale sur la liberté de la presse, et les injures et diffamations publiques, incriminées quant à elles par le droit commun. La Cour de cassation a décidé en effet d'admettre que l'interdiction de disqualifier « ne saurait empêcher le tribunal ou la cour d'appel, saisis d'une poursuite en injure publique, de statuer sur le même fait, lorsqu'il résulte des débats que ce fait, en raison de l'absence de publicité dégénère en une contravention d'injure non publique ; qu'au contraire, ils en ont le devoir, lorsque le renvoi n'est demandé par aucune des parties » [83]. L'élément de publicité, qui ne change pas l'identité des faits [84], mais leur portée, a été un premier moyen, d'origine jurisprudentielle, pour éviter l'annulation de l'acte d'assignation en tant qu'effet de la cristallisation, pourtant de principe, de la qualification pénale des comportements constitutifs de limites à la liberté d'expression [85].

54La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 poursuit cette tendance. Elle crée un nouvel article 54-1 au sein de la loi du 29 juillet 1881 qui autorise la requalification, entre eux, des faits de provocations, de diffamations et d'injures publiques lorsqu'ils sont commis envers une personne ou un groupe de personnes en raison d'un critère hiérarchisant et, par-là, discriminatoire [86]. Il s'agit, plus précisément, d'une éviction des spécificités procédurales prévues aux articles 50 et 53 de la même loi qui, pourtant, participent activement à l'intensification du caractère dérogatoire des règles qui y sont posées. Aussi, en mettant fin à cet obstacle de taille, le législateur en vient à rapprocher la poursuite des provocations, diffamations et injures publiques visées des règles du droit commun. C'est une partie de la loi du 29 juillet 1881 qui se généralise, entamant ainsi l'autonomie de son régime juridique due justement à son caractère dérogatoire. Cette évolution n'avait pourtant pas été avalisée par la Commission Nationale Consultative des Droits de l'Homme qui y avait vus autant le « risque de faire perdre à cette grande loi son âme et sa raison d'être », qu'une entrave considérable à l'exercice effectif des droits de la défense [87]. Actée et entrée en vigueur, la possibilité pour les juges du fond saisis de faits de provocations, de diffamations ou d'injures publiques présentant un caractère discriminatoire de les requalifier, ne vaut néanmoins qu'autant que la qualification nouvelle, qui altère l'identité choisie par l'auteur de la poursuite, n'est autre qu'une provocation, une diffamation ou une injure publiques, incriminées par la loi du 29 juillet 1881.

55La requalification reste interdite soit dès que le juge est saisi d'une qualification de droit commun alors qu'il estime que les faits sont en réalité constitutifs d'une provocation à la haine, à la discrimination ou à la violence, d'une diffamation ou d'une injure publiques fussent-elles commises en raison d'un mobile discriminatoire ; soit dès que l'objet de la poursuite est l'une de ces dernières infractions alors qu'il s'agit d'une qualification de droit commun, même animée dudit mobile.

56D'envergure limitée, l'évolution discutée affaiblit tout de même nettement le degré de spécification depuis longtemps reconnu à la poursuite des infractions de presse. Le mouvement décrit est d'autant plus sérieux qu'il reconsidère également le régime juridique de la prescription de l'action publique.

2 - La dé-spécification partielle du régime de la prescription de l'action publique

57L'importance de la liberté d'expression dans une société démocratique est telle que les limites nécessaires qui lui sont apportées commandent une réaction véloce de la personne ou du représentant du corps ayant subi les effets d'un exercice abusif de cette liberté. Le régime juridique de la prescription de l'action publique est en effet entièrement dérogatoire, s'agissant des crimes, des délits et des contraventions prévus par la loi du 29 juillet 1881.

58S'agissant du quantum du délai applicable, il est de trois mois révolus sans prêter attention à la gravité intrinsèque du comportement punissable [88]. L'entrée en vigueur de la loi n° 2017-242 du 27 février 2017 portant réforme de la prescription en matière pénale n'a d'ailleurs aucunement entamé la spécification du régime de la prescription des infractions de presse, et ce alors que le texte fait correspondre les délais de prescription de droit commun avec ceux applicables en matière d'infractions militaires [89] et aux délits douaniers [90]. Une telle correspondance n'a néanmoins rien de novateur puisque ces infractions voyaient déjà leur régime de prescription de l'action publique être calqué sur le droit commun. La spécification n'a jamais, en ces cas, été à l'œuvre.

59Concernant, cette fois, la typologie des actes interruptifs de prescription de la poursuite des infractions de presse, la loi du 29 juillet 1881 la détache un peu plus aujourd'hui du droit commun. Les actes de poursuite et d'instruction [91] représentent autant en droit commun [92] qu'en droit spécial [93], la cause première d'interruption de la prescription. Cependant, si, en droit commun, ces notions ont été appréhendées largement de manière à y inclure, notamment, les instructions et mandements aux officiers de police judiciaire [94] et les demandes de renseignements [95], le législateur ferme les frontières des mêmes notions dès qu'il est question d'infractions de presse. Les réquisitions aux fins d'enquête sont, seules, causes d'interruption du cours de la prescription, si elles remplissent les conditions d'articulation et de qualification des faits abordées précédemment [96]. Dès lors, des actes d'investigations mis en œuvre en dehors de telles réquisitions n'interrompent pas la prescription de l'action publique pour des faits de diffamation [97].

60Ces règles spécifiques de poursuites n'ont néanmoins pas résisté à la volonté de tordre leur rigueur afin de rendre moins ardue la répression des provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence, des diffamations et des injures publiques, dès qu'elles sont commises en raison d'un motif discriminatoire. La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 a effectivement créé un nouvel article 65-3 au sein de la loi sur la liberté de la presse afin de porter à un an, le délai de prescription applicable à ces comportements [98], avant que ces dispositions ne soient modifiées en vue d'en élargir l'application lorsque d'autres mobiles discriminatoires sont établis. Restant de faible envergure, puisqu'un tel délai était deux fois inférieur à celui applicable alors aux délits de droit commun, la spécification propre à la loi du 29 juillet 1881 n'était pas remise en cause.

61Un basculement important vient toutefois de se produire avec l'entrée en vigueur de la loi égalité et citoyenneté. Celle-ci ajoute un second alinéa à l'article 65-3 de la loi de 1881, lequel dispose désormais que « Pour [les délits prévus par l'art. 65-3 al. 1er ], le deuxième alinéa de l'article 65 n'est pas applicable ». Il est, par ce biais, mis un terme aux limitations des causes d'interruption prévues, en principe, pour les infractions de presse dès qu'il s'agit d'un délit discriminatoire. La prescription de l'action publique « pourra donc être interrompue conformément aux règles de droit commun, qui figurent désormais, depuis la loi du 27 février portant réforme de la prescription en matière pénale, dans l'article 9-2 du code de procédure pénale » [99]. Plus concrètement, les réquisitions aux fins d'enquête adressées par le parquet n'ont plus besoin, en la matière, d'articuler et de qualifier les faits ; et les actes réalisés par les enquêteurs en rapport avec la commission vraie ou supposée d'un délit de presse discriminatoire deviennent interruptifs de prescription.

62Il s'opère ici une dé-spécification très nette du droit de la presse, laquelle se place en faveur d'une meilleure homogénéisation entre le droit spécial et le droit commun quant aux notions centrales en termes de poursuite. Éprise de la lutte en faveur de l'égalité réelle entre les individus, la loi du 29 juillet 1881 en vient progressivement à contenir des règles de droit quasi-commun.

63Cette évolution, qui dynamise le pouvoir d'attraction du droit commun, est d'autant plus remarquable qu'elle touche également, ouvertement, le régime dérogatoire caché : celui des provocations, diffamations et injures non publiques incriminées par le code pénal.

B - La mutation du régime dérogatoire caché : le cas des provocations, diffamations et injures non-publiques à caractère discriminatoire

64Les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence, les diffamations ainsi que les injures non publiques ne sont pas incriminées par la loi du 29 juillet 1881 sur la liberté de la presse, mais par le code pénal. Cette dichotomie, qui n'a pas été revue au moment de la confection du code pénal actuel [100], semble indiquer une scission des régimes juridiques applicables, laquelle tiendrait compte de la publicité donnée au comportement illicite. Cependant, si d'aucuns pouvaient s'attendre à ce que les règles simplifiées de poursuite devant le tribunal de police soient applicables à ces infractions d'expression non publique [101], la chambre criminelle en a décidé autrement en les ayant soumises au régime, plus strict, de la loi du 29 juillet 1881 [102]. L'objectif poursuivi vise à unifier les règles de la poursuite afin que les infractions de police, moins graves que les délits de presse, soient paradoxalement plus simples à punir. Il en résulte immédiatement des conséquences sur la poursuite des infractions en cause. Elle doit en effet se conformer aux règles dérogatoires exposées précédemment qui, spécialement, obligent l'auteur de l'acte de saisine à articuler et à qualifier les faits tout en indiquant le fondement de la poursuite, et ce de manière à cristalliser la qualification juridique et à empêcher la requalification judiciaire. En outre, le délai de droit commun, établi à un an et qui n'a d'ailleurs pas été revu par la récente réforme de la prescription de l'action publique, est écarté au profit d'un temps plus court de trois mois. Le régime dérogatoire caché derrière une intégration, de pure façade, aux incriminations prévues par le code pénal, est rapidement apparu.

65Cet état du droit n'a également pas résisté aux effets de la lutte en faveur de l'égalité réelle entre les individus. Là encore, le rapprochement avec les règles de poursuite de droit commun a avancé progressivement.

66Dans un premier temps, la jurisprudence a pris le pas d'affaiblir la rigueur de la cristallisation des faits, en rendant subsidiaires les qualifications d'injure ou de diffamation non publiques, à celles d'injure et de diffamation publiques pourtant visées dans l'acte de saisine du juge [103].

67Dans un second temps, s'est posée la question de savoir si l'allongement du délai de prescription pour les provocations, diffamations et injures publiques à caractère discriminatoire devait également s'appliquer aux mêmes comportements, non publics. La loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 avait en effet porté à un an le délai de prescription des infractions de presse commises envers une personne ou un groupe de personnes à raison « de leur origine ou de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée » [104]. Plus tard, la loi n° 2014-56 du 27 janvier 2014 avait élargi l'application de la prescription annale aux provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence, aux diffamations et injures publiques commises envers les particuliers « à raison de leur sexe, de leur orientation sexuelle ou de leur handicap ». Prenant acte de la jurisprudence de la chambre criminelle de la Cour de cassation en matière d'infractions d'expression non publiques, la circulaire de présentation des innovations propres à la loi du 9 mars 2004 admettait l'application du nouveau délai de prescription à ces dernières [105]. L'homogénéisation des régimes juridiques était donc de mise.

68Malgré la clarté de la position ministérielle, la chambre criminelle a manifestement refusé de soumettre les infractions de police présentant un caractère discriminatoire à des règles de prescription identiques aux délits de presse animés du même mobile [106], et ce en maintenant la soumission des premières aux règles spéciales de prescription édictées à l'article 65 de la loi du 29 juillet 1881 [107]. La condition de publicité en venait, par ce biais, à retrouver un intérêt sous l'angle, non pas de l'ensemble des règles de la poursuite, mais, uniquement, quant au délai de prescription à observer.

69La loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 a mis fin à la présente jurisprudence. Elle crée effectivement un nouvel article 65-4 au sein de la loi sur la liberté de la presse lequel dispose que « Les articles 54-1 et 65-3 et le dernier alinéa de l'article 55 sont applicables aux contraventions prévues par le code pénal réprimant les faits prévus aux septième et huitième alinéas de l'article 24, aux deuxième et troisième alinéas de l'article 32 et aux troisième et quatrième alinéas de l'article 33 lorsque ces faits ne sont pas commis publiquement. ».

70Ce changement notable revient autant à autoriser la requalification judiciaire des faits désignés dans l'assignation, qu'à soumettre désormais les provocations à la discrimination, à la haine ou à la violence, les diffamations et injures non publiques présentant un caractère raciste ou discriminatoire à la prescription annale, qu'à étendre les actes interruptifs de la prescription pour ces mêmes faits par une exclusion de l'application de la limitation visée à l'article 65 al. 2 de la loi étudiée.

71Le droit dérogatoire caché touchant les infractions de police des articles R. 625-7 à R. 625-8-2 du code pénal [108] se rapproche ainsi à grands pas des règles de poursuite de droit commun, en témoigne, essentiellement leur soumission à un délai de prescription devenu identique à celui prévu par l'article 9 du code de procédure pénale.

72L'étude menée démontre une force d'attraction certaine, à la faveur du droit commun, jugé plus apte à mener des luttes ciblées pour lesquelles une recherche de résultats fait ouvertement partie des objectifs explicites affichés par le gouvernement. L'adage speciala generalibus derogant qui commande de privilégier la règle spéciale par rapport à la règle générale ne vaut que le temps où la spécification offre une raison d'être réelle à la règle.

73À défaut, le droit commun en vient à être reconsidéré non plus pour apporter des solutions non expressément fournies par le droit dérogatoire, mais pour généraliser le message porté par la loi nouvelle et multiplier les retombées sociétales.


Date de mise en ligne : 01/04/2019

https://doi.org/10.3917/rsc.1704.0677

Notes

  • [1]
    Le code de la santé publique contient 44 articles utilisant ce mode d'incrimination par effet de redondance. Par exemple, l'art. L. 1133-1 ne fait que reprendre, à l'identique, l'art. 226-25 C. pén. tandis que l'art. L. 1272-4 reprend quant à lui la substance de l'art. 511-5 C. pén.
  • [2]
    À quelques exceptions près telles que la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse ou encore l'ord. n° 45-174 du 2 févr. 1945 sur l'enfance délinquante.
  • [3]
    Par dérogation aux dispositions de l'art. 76 C. pr. pén. avant que celles-ci ne soient modifiées par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 ayant généralisé la mise en échec de la condition tenant au consentement préalable de l'intéressé à la perquisition domiciliaire, pour les nécessités de l'enquête préliminaire relative à un délit puni d'une peine d'emprisonnement égale ou supérieure à 5 ans.
  • [4]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a autorisé les perquisitions et visites domiciliaires en dehors des heures légales prévues à l'art. 59 C. pr. pén. (C. pr. pén., art. 706-28).
  • [5]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a élevé la durée globale de la garde à vue à 48 heures en cas d'infractions en matière de stupéfiants (C. pr. pén., art. 706-29, abrogé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004).
  • [6]
    La loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 a créé l'art. 706-32 C. pr. pén. (abrogé depuis par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004) dont l'al. 2 permettait, notamment, aux enquêteurs (officiers ou agents de police judiciaire) d'acquérir, de détenir, de transporter ou de livrer des stupéfiants.
  • [7]
    C. pr. pén., art. 706-80 (éd. 2017).
  • [8]
    C. pr. pén., art. 706-81 à 706-87 (éd. 2017).
  • [9]
    C. pr. pén., art. 706-95 (éd. 2017).
  • [10]
    Art. 706-96 à 706-102 (éd. 2017).
  • [11]
    C. pr. pén., art. 706-103 (éd. 2017).
  • [12]
    C. pr. pén., art. 706-88 et 706-88-1 (éd. 2017).
  • [13]
    C. pr. pén., art. 706-89 à 706-94 (éd. 2017).
  • [14]
    Cette nouvelle forme de spécification à l'intérieur même du domaine de la criminalité organisée a été décidée (En ce sens : loi n° 2015-993 du 17 août 2015) en raison de la déclaration d'inconstitutionnalité de l'ancien 8 bis de l'art. 706-73 C. pr. pén. qui permettait une garde à vue de 96 heures pour des faits d'escroquerie commis en bande organisée (En ce sens : Cons. const. 9 oct. 2004, n° 2004-420/421, QPC).
  • [15]
    C. pr. pén., art. 706-102-1 à 706-102-9 (éd. 2017).
  • [16]
    C. pr. pén., art. 706-87-1 (éd. 2017).
  • [17]
    C. pr. pén., art. 706-95-4 à 706-95-10 (éd. 2017).
  • [18]
    C. pr. pén., art. 706-95-1 à 706-95-3 (éd. 2017).
  • [19]
    C. pr. pén., art. 706-106 (éd. 2017) lequel réserve les opérations de « coup d'achat » à la constatation des délits en matière d'armes et de produits explosifs visés à l'art. 706-73 12° C. pr. pén.
  • [20]
    L'art. 706-28 C. pr. pén. fait référence aux dispositions de l'art. 59 C. pr. pén. qui elles-mêmes prennent appui sur celles de l'art. 56 C. pr. pén. dont l'alinéa 1er prévoit in fine que « si la perquisition est effectuée aux seules fins de rechercher et de saisir des biens dont la confiscation est prévue par les cinquième et sixième alinéas de ce même article, elle doit être préalablement autorisée par le procureur de la République ».
  • [21]
    L'art. 706-32 C. pr. pén. créé par la loi n° 92-1336 du 16 déc. 1992 en vue d'autoriser les opérations d'infiltration, spécialement dans le domaine des trafics de stupéfiants, avait, dans un premier temps, été abrogé par la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 pour que sa substance soit plus largement mobilisable dans le cadre de la lutte contre la criminalité organisée (C. pr. pén., art. 706-81 à 706-87).
  • [22]
    C. pr. pén., art. 706-81, al. 2.
  • [23]
    C. pr. pén., art. 706-82, al. 1er, 1°.
  • [24]
    C. pr. pén., art. 706-82, al. 1er, 2°.
  • [25]
    C. pr. pén., art. 706-32, al. 1er, 1°.
  • [26]
    C. pr. pén., art. 706-32, al. 1er, 2°.
  • [27]
    Il s'agit de l'aversion pour les personnes transsexuelles ou transgenres.
  • [28]
    C. pén., art. 132-8 à 132-16-5.
  • [29]
    C. pén., art. 132-79.
  • [30]
    Plusieurs qualités de l'agent ou de la victime aggravent la commission d'une infraction. C'est, par exemple, le cas de la répression du meurtre qui est aggravée lorsqu'il a été commis par le conjoint, le concubin ou le partenaire de la victime ou, inversement, lorsqu'il a été commis sur un mineur de 15 ans, un ascendant légitime ou naturel, le père ou la mère adoptifs, une personne vulnérable (en raison de l'âge, d'une maladie, d'une infirmité, d'une déficience physique ou psychique ou d'un état de grossesse), un magistrat, un juré, un avocat, un officier public ou ministériel, un militaire de la gendarmerie nationale, un fonctionnaire (police nationale, douanes, administration pénitentiaire) ou toute autre personne dépositaire de l'autorité publique, un sapeur-pompier professionnel ou volontaire, un gardien assermenté d'immeubles ou de groupes d'immeubles (ou un agent exerçant pour le compte d'un bailleur des fonctions de gardiennage ou de surveillance des immeubles à usage d'habitation), un enseignant ou tout membre des personnels travaillant dans les établissements d'enseignement scolaire, un agent d'un exploitant de réseau de transport public de voyageurs ou toute personne chargée d'une mission de service public, un professionnel de santé, un témoin, une victime ou une partie civile (v. C. pén., art. 221-4).
  • [31]
    Il s'agit, par exemple, de l'usage ou de la menace d'une arme (C. pén., art. 132-75), de l'effraction (C. pén., art. 132-73), de l'escalade (C. pén., art. 132-74).
  • [32]
    Le code pénal retient parfois comme cause d'aggravation le fait que l'infraction ait été commise dans un « lieu accueillant du public » (ex : C. pén., art. 225-2), un « local d'habitation », un « lieu utilisé ou destiné à l'entrepôt de fonds, valeurs, marchandises ou matériels », un « lieu destiné à l'accès à un moyen de transport collectif de voyageurs » (ex : C. pén., art. 311-4) ou encore dans un « lieu classifié au titre du secret de la défense nationale » (ex : C. pén., art. 322-3).
  • [33]
    À ce titre, la code pénal retient la circonstance de bande organisée, définie à l'art. 132-71, ainsi que la pluralité d'agents (dans ce cas la circonstance aggravante tient à ce que l'infraction a été commise « par plusieurs personnes agissant en qualité d'auteur ou de complice, sans qu'elles constituent une bande organisée. V. par ex. : C. pén., art. 311-4 1°, 225-12-6 7°, 225-12-9 7°) et la dissimulation volontaire de tout ou partie du visage (ex : C. pén., art. 222-12 15°, 311-4 10°, 312-2 4°, 322-3 7°).
  • [34]
    Il est possible d'évoquer les mobiles d'intimidation et de représailles toutes les fois où la loi aggrave la répression d'une infraction commise au préjudice d'un témoin, d'une victime ou de la partie civile en vue d'empêcher la dénonciation des faits, la plainte ou la déposition en justice ou d'y riposter lorsque cette dernière est effective (v. par ex. : C. pén., art. 322-3 4° et 222-10 5°).
  • [35]
    Ce type de mobile se caractérise par le fait qu'une infraction ait été commise contre une personne dans le but de la contraindre à contracter un mariage ou à conclure une union, ou encore en raison de son refus de contracter un mariage ou une union (v. par ex. : C. pén., art. 221-4 10°, 222-3 6° bis, 222-8 6° bis).
  • [36]
    Expression préférée au simple terme de « race » par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017.
  • [37]
    Expression préférée à celle d'« identité sexuelle » par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017.
  • [38]
    C. pén., art. R. 624-3.
  • [39]
    C. pén., art. R. 624-4.
  • [40]
    C. pén., art. R. 625-7.
  • [41]
    Il s'agit précisément de la section 3 du chapitre 2 du titre 3 du livre 1er de la partie législative du code pénal.
  • [42]
    Par exemple, le mobile de racisme était prévu pour n'aggraver que le meurtre (C. pén., art. 221-4 6°), les tortures et actes de barbarie (C. pén., art. 222-3 5° bis), les violences (C. pén., art. 222-8 5° bis, 222-10 5° bis, 222-12 5° bis, 222-13 5° bis), les menaces (C. pén., art. 222-18-1), les atteintes à l'intégrité d'un cadavre (C. pén., art. 225-18), le vol (C. pén., art. 311-4 9°), l'extorsion de fond (C. pén., art. 312-2 3°) et les destructions, dégradations ou détériorations (C. pén., art. 322-2 et 322-8 3°).
  • [43]
    Les art. 132-76 et 132-77 C. pén. consacrent la méthode de l'aggravation générale par paliers dont le premier concerne l'infraction punie de trois ans d'emprisonnement au plus. Il convient donc d'en déduire que l'ensemble des délits punis d'un emprisonnement allant de deux mois à trois ans est concerné par le premier palier sans que l'aggravation puisse s'appliquer en deçà, c'est-à-dire ni aux délits non punis d'emprisonnement ni aux contraventions.
  • [44]
    C'est le cas, d'une part, des délits de discrimination incriminés par les art. 225-1 et 432-7 C. pén., et ce pour l'ensemble des circonstances aggravantes prévues par les art. 132-76 et 132-77 C. pén., ainsi que, d'autre part, du harcèlement sexuel prévu par l'art. 222-33 C. pén. lequel présente par nature un caractère sexiste voire homophobe ou transphobe (ne sont alors visés que les circonstances aggravantes prévues à l'art. 132-77 C. pén.).
  • [45]
    C. pén., art. R. 624-1.
  • [46]
    Ex. : C. pén., art. 311-4 s.
  • [47]
    La qualité de conjoint, de concubin ou de partenaire lié par un pacte civil de solidarité est une circonstance aggravante spéciale pour les infractions prévues par les art. 221-4 9°, 222-3 6°, 222-8 6°, 222-10 6°, 222-12 6°, 222-13 6°, 222-14, 222-18-3, 222-24 11°, 222-28 7° et 222-33-2-1 C. pén. Le mobile nuptial aggrave quant à lui les seules infractions prévues par les articles 221-4 10°, 222-3 6° bis, 222-12 6° bis et 222-13 6° bis C. pén.
  • [48]
    Parmi les mobiles discriminatoires, il est courant d'établir une dichotomie entre les critères directement discriminants qui sont aujourd'hui évoqués en groupe au sein des dispositions des art. 132-76 et 132-77 C. pén. et les critères indirectement discriminants tenant à la qualité de conjoint, de concubin ou de partenaire lié par un pacte civil de solidarité ainsi qu'au mobile nuptial. Ces derniers, évoqués par les dispositions générales de l'art. 132-77 C. pén. n'en restent pas moins des critères appréhendés de manière spécifique, c'est-à-dire pour une liste d'infractions.
  • [49]
    C. pén., art. 221-4 9°.
  • [50]
    C. pén., art. 132-77, al. 1er.
  • [51]
    Loi n° 72-546 du 1er juill. 1972 relative à la lutte contre le racisme.
  • [52]
    Loi n° 2004-1486 du 30 déc. 2004 portant création de la haute autorité de lutte contre les discriminations et pour l'égalité.
  • [53]
    V. art. R. 624-3 (diffamation non publique à caractère discriminatoire), R. 624-4 (injure non publique à caractère discriminatoire) et R. 625-7 (provocation non publique à la discrimination, à la haine ou à la violence présentant un caractère raciste, antisémite, xénophobe, homophobe, handiphobe, sexiste, transphobe) du code pénal.
  • [54]
    Le texte vise à aggraver les peines punissant les infractions à caractère raciste, antisémite ou xénophobe.
  • [55]
    Le texte a été adopté en faveur d'un renforcement de la sécurité intérieure et contient, à ce titre, des dispositions en faveur de la lutte contre l'homophobie.
  • [56]
    Les deux textes visés posent, communément, une aggravation pour les motifs discriminatoires qu'ils entendent combattre, pour les infractions définies par les art. 221-4, 222-3, 222-8, 222-10, 222-12 et 222-13 C. pén.
  • [57]
    Le mobile homophobe n'est pas en mesure d'aggraver, selon la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, les destructions, dégradations et détériorations de bien appartenant à autrui, visées par les art. 322-2, 322-3 et 322-8 C. pén. alors que cette possibilité est prévue pour les mobiles racistes, antisémites et xénophobes, et ce par la loi n° 2003-88 du 3 févr. 2003.
  • [58]
    Le mobile raciste était, dès avant l'entrée en vigueur de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 qui l'a généralisé, prévu à l'art. 311-4 C. pén. en tant que circonstance aggravante du vol, ce qui n'était en revanche pas prévu pour les destructions, dégradations et détériorations de bien appartenant à autrui lorsqu'elles ne présentent pas de danger pour les personnes (C. pén., art. 322-1 s.). On notera que les destructions, dégradations et détériorations d'un bien appartenant à autrui par l'effet d'une substance explosive, d'un incendie ou de tout autre moyen de nature à créer un danger pour les personnes (C. pén., art. 322-6) étaient quant à elles susceptibles d'être aggravées lorsqu'elles ont été commises à raison de l'appartenance ou de la non-appartenance, vraie ou supposée, de la personne propriétaire ou utilisatrice du bien à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée (C. pén., art. 322-8 3° dans sa version antérieure à la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017).
  • [59]
    Le sexisme arbore plusieurs définitions. Selon A. Michel, « le sexisme est une attitude ou une action qui diminue, exclut, sous-représente et stéréotype des personnes sur la base de leur sexe […]. C'est une orientation qui défavorise un sexe en faveur de l'autre », in Non aux stéréotypes : vaincre le sexisme dans les manuels scolaires et les livres pour enfants, Paris, UNESCO, 1986. Selon P. Bourdieu, « le sexisme est un essentialisme ; comme le racisme, il vise à imputer des différences sociales instituées à une nature biologique fonctionnant comme une essence dont se déduisent implacablement tous les actes de la vie », in La domination masculine, Paris, Seuil, coll. Liber, 1998.
  • [60]
    V. J. Dechepy-Tellier, La mobilisation utilitariste de la loi pénale : l'exemple de la lutte contre les violences conjugales, in Les sources du droit dans les pays européens et francophones, Mare et Martin, Droit et Science politique, J. Leroy, D. Piatek et P. Szwedo (dir.), 2017, p. 231 à 244.
  • [61]
    Notons que les plans précédents mettaient davantage l'accent sur les violences subies plus que sur le mobile sexiste qui en représente la raison, étant entendu qu'il cause un nombre et des formes d'atteintes bien plus larges : « Plan global de lutte contre les violences faites aux femmes. 10 mesures pour l'autonomie des femmes » 2005/2007 ; « Douze objectifs pour combattre les violences faites aux femmes » - 2e plan global triennal - 2008/2010 ; « Plan interministériel de lutte contre les violences faites aux femmes » 2011/2013 ; « 4e plan interministériel de prévention et de lutte contre les violences faites aux femmes » 2014/2016.
  • [62]
    Sexuelles, physiques ou psychologiques.
  • [63]
    Afin de labelliser les initiatives se plaçant dans la lutte contre le sexisme, une plateforme a été élaborée : www.sexismepasnotregenre.gouv.fr.
  • [64]
    Les stéréotypes de genre peuvent, pour leur part, être définis comme des croyances sur les caractéristiques généralement associées aux femmes, d'un côté, et aux hommes, de l'autre.
  • [65]
    Le critère « sexe » a toujours fait partie de ceux permettant la constitution matérielle des discriminations incriminées par les art. 225-1 s. C. pén.
  • [66]
    Depuis la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003, préc..
  • [67]
    C. pén., art. R. 624-3, al. 2.
  • [68]
    C. pén., art. R. 624-4, al. 2.
  • [69]
    Les dispositions de l'art. 132-77 C. pén. ont été créées par la loi n° 2003-239 du 18 mars 2003.
  • [70]
    L'identité de genre est une notion qui, avant d'être érigée en circonstance aggravante générale par la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017, avait été utilisée comme critère constitutif de l'élément matériel des discriminations des art. 225-1 s. C. pén., et ce depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2016-547 du 18 nov. 2016. Par ce biais, le législateur a entendu viser le genre auquel une personne est susceptible de s'identifier, peu important le fait qu'il corresponde ou non au sexe indiqué sur les registres de l'état civil ou aux différentes expressions de l'appartenance au sexe masculin ou au sexe féminin.
  • [71]
    Le transsexualisme se caractérise par une opposition entre le sexe anatomique, chromosomique et hormonal, d'une part, et le sexe psychologique et psycho-social, d'autre part.
  • [72]
    La non-binarité de genre, plus connue sous l'expression anglo-saxonne genderqueer, désigne une identité de genre qui n'est ni masculine, ni féminine. L'identité de genre peut alors être faite de multiples genres ou donner lieu à des chevauchements d'expressions de l'appartenance à l'un et l'autre des sexes.
  • [73]
    On note ici une utilisation consciente du système des présomptions de fait.
  • [74]
    V. J. Dechepy-Tellier, Analyse genrée des délits d'injures et de diffamations publiques, in S. Hennet-Vauchez, M. Pichard, D. Roman (dir.), La loi et le genre, CNRS 2014. 659 à 676.
  • [75]
    V. art. 48 1° à 6° de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse. À noter que le désistement du plaignant arrête la poursuite lorsque celle-ci est commencée - art. 49 du texte.
  • [76]
    Le délai de prescription de l'action publique est, depuis l'entrée en vigueur de la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017, de 20 ans pour les crimes (C. pr. pén., art. 7) et de 6 ans pour les délits (C. pr. pén., art. 8).
  • [77]
    Crim. 13 nov. 1962, Bull. crim. n° 316.
  • [78]
    La chambre criminelle a précisé que « s'il appartient aux juges répressifs de restituer aux faits dont ils sont saisis leur véritable qualification, c'est à la condition que le prévenu ait été mis en mesure de présenter sa défense sur la nouvelle qualification envisagée. Encourt, dès lors, la censure l'arrêt qui requalifie d'office des faits poursuivis sous la qualification de banqueroute en abus de biens sociaux, sans que le prévenu n'ait été invité à s'expliquer sur cette modification », Crim. 16 mai 2001, Gaz. Pal. 2002, II, p. 1200 et 1201, note Monnet.
  • [79]
    V. art. 50 et 53 de la loi du 29 juill. 1881 sur la liberté de la presse.
  • [80]
    La chambre criminelle a rappelé que « selon les art. 50 et 53 de la loi du 29 juillet 1881, en matière de délit de presse, l'acte initial de poursuite fixe définitivement la nature et l'étendue de la poursuite quant aux faits et à leur qualification. Il s'en déduit que la juridiction saisie n'est pas autorisée à substituer à la qualification de droit commun adoptée par la partie poursuivante une qualification empruntée à la loi sur la liberté de la presse », Crim. 6 févr. 1990, Bull. crim. n° 64, p. 170.
  • [81]
    Crim. 17 juin 2008, Bull. crim. n° 153.
  • [82]
    Crim. 16 mars 1948, Gaz. Pal. 1948, I, p. 196.
  • [83]
    Crim. 18 mai 1954, JCP 1954. II. n° 8292, obs. Chavanne.
  • [84]
    Il n'est pas question de tolérer une transformation d'une injure en diffamation et inversement.
  • [85]
    Notons que la solution posée, dans un premier temps, pour les injures l'a ensuite été pour les diffamations. V. en ce sens Crim. 8 avr. 2008, Bull. crim. n° 94.
  • [86]
    Le nouveau texte vise l'ensemble des mobiles discriminatoires aggravant la répression des provocations à la discrimination, à la haine et à la violence (art. 24, al. 7 et 8 de la loi du 29 juill. 1881), des diffamations publiques (art. 32, al. 2 et 3 de la loi du 29 juill. 1881) et des injures publiques (art. 33, al. 3 et 4 de la loi du 29 juill. 1881). Ces mobiles sont, rappelons-le, l'origine ; l'appartenance ou la non-appartenance à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée ; le sexe ; l'orientation sexuelle ; l'identité de genre et le handicap.
  • [87]
    Avis sur le projet de loi « Égalité et citoyenneté », JO du 28 janv. 2017, texte n° 67, spéc. n° 63.
  • [88]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 1er.
  • [89]
    L'ensemble du régime de droit commun de la prescription de l'action publique des art. 7 à 9-3 C. pr. pén. est applicable aux crimes, délits et contraventions relevant de la matière militaire - CJM, art. L. 212-37 à L. 212-39.
  • [90]
    Loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017, art. 3. À noter que les contraventions douanières sont soumises à un délai de prescription dérogatoire de trois ans (C. douanes, art. 351, al. 2).
  • [91]
    Définis comme « ceux qui ont pour objet de constater une infraction, d'en rassembler les preuves et d'en rechercher les auteurs » (Crim. 9 mai 1936). Précisément, les actes d'instruction regroupent non seulement les actes de la phase d'instruction préparatoire mais également ceux de l'enquête policière ayant pour objet de constater les infractions, de rechercher les preuves et de parvenir à la manifestation de la vérité (V. Crim. 15 avr. 1937, Cardi ; Crim. 7 déc. 1966, Bull. crim. n° 284).
  • [92]
    V. C. pr. pén., art. 7 avant la réforme opérée par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017. V. également : C. pr. pén., art. 9-2 créé par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017.
  • [93]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 1er pour les délits de presse ; CJM, art. L. 212-37 avant la réforme opérée par la loi n° 2017-242 du 27 févr. 2017.
  • [94]
    Crim. 10 oct. 2012, n° 11-85.585 ; contra : Crim. 9 déc. 1911, Bull. crim. n° 974.
  • [95]
    Dans un premier temps, les demandes de renseignements du parquet n'étaient interruptives de prescription qu'autant qu'elles étaient destinées aux enquêteurs de la police judiciaire (Crim. 16 mai 1973, Bull. crim. n° 224) ou aux agents des douanes (Crim. 18 sept. 2002, n° 01-87.048). Dans un second temps, la jurisprudence ne s'est attachée qu'à la finalité de l'acte - à savoir la recherche et la découverte d'une infraction pénale - pour ne prêter plus aucunement attention à la qualité du destinataire de la demande de renseignements (Crim. 20 févr. 2002, Bull. crim. n° 42 ; contra : Crim. 3 févr. 1977, Bull. crim. n° 45).
  • [96]
    Loi du 29 juill. 1881, art. 65, al. 2. La précision qu'il comporte date de l'entrée en vigueur de la loi n° 93-2 du 4 janv. 1993.
  • [97]
    Crim. 16 sept. 2017, n° 13-85.457, D. 2014. 1879 ; AJ pénal 2015. 51, obs. N. Verly.
  • [98]
    Adoptée avant la loi n° 2004-1486 du 30 déc. 2004 ayant ajouté les critères de sexe, d'orientation sexuelle et de handicap parmi les mobiles discriminatoires aggravant les provocations, diffamations et injures publiques, la loi n° 2004-204 du 9 mars 2004 ne concernait alors que les provocations, diffamations et injures publiques commises en raison de l'appartenance ou de la non-appartenance de la victime à une ethnie, une nation, une race ou une religion déterminée.
  • [99]
    Circulaire du 20 avr. 2017 de présentation des dispositions de droit pénal ou de procédure pénale de la loi n° 2017-86 du 27 janv. 2017 relative à l'égalité et à la citoyenneté, p. 10.
  • [100]
    Fruit de l'adoption de la loi n° 92-683 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions générales du code pénal, de la loi n° 92-684 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les personnes, de la loi n° 92-685 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre les biens et de la loi n° 92-686 du 22 juill. 1992 portant réforme des dispositions du code pénal relatives à la répression des crimes et délits contre la nation, l'État et la paix publique. L'injure non publique était, auparavant, constitutive d'une contravention de la première classe et incriminée à l'art. R. 26 11° du code pénal (ancien).
  • [101]
    C. pr. pén., art. 524 s.
  • [102]
    Crim. 7 mai 1975, Bull. crim. n° 119 ; Crim. 15 janv. 1998, n° 96-84.832, Bull. crim. n° 21 ; D. 1998. 101 ; Dr. pénal 1998, comm. 62, obs. Véron. Contra : Paris, 1re ch. B, 13 mars 1998, Gaz. Pal. 1998. 2, somm., 554.
  • [103]
    Crim. 18 mai 1954 préc. (injure) ; Crim. 8 avr. 2008 préc. (diffamation).
  • [104]
    La loi nouvelle a créé l'article 65-3 de la loi du 29 juill. 1881 identifiant les infractions soumises au délai d'un an et non au délai de trois mois.
  • [105]
    Circ. CRIM. 04-16-E8, 14 mai 2004, Bull. off. Min. just. n° 95, § 1.3.1.
  • [106]
    Crim., 23 mai 2006, Dr. pénal 2006, comm. 110, obs. Véron.
  • [107]
    Crim. 7 juin 2006, Bull. crim. n° 162.
  • [108]
    Depuis l'entrée en vigueur du décr. n° 2017-1230 du 3 août 2017, les provocations, diffamations et injures non publiques présentant un caractère raciste ou discriminatoire sont devenues des contraventions de la 5e classe. En outre, la liste des peines complémentaires encourues en raison de leur commission a été allongée (V. C. pén., art. R. 625-8-2).

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