Notes
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[1]
L’âge légal de la retraite passera progressivement de 65 ans à 67 ans à l’horizon 2035, pour les hommes et les femmes.
- [2]
-
[3]
Les conventions collectives de travail (CCT) sont ici le fruit d’accords intersectoriels et sont conclues au sein du Conseil national du Travail. La convention collective de travail n° 77 (CTT n° 77) délimite les règles d’application de ce crédit-temps, notamment pour les seniors qui disposent d’une réglementation adaptée. Ainsi, à partir de 50 ans, tous les travailleurs peuvent bénéficier soit d’une réduction des prestations de travail à mi-temps, soit d’une réduction des prestations à concurrence d’un cinquième des prestations hebdomadaires de travail à temps plein. Pour ces travailleurs, le crédit-temps n’est pas limité dans le temps et permet ainsi de gérer cette réduction du temps de travail sur une longue période. Une indemnité d’interruption vient compléter le salaire. De plus, ce statut permet au travailleur qui en bénéficie de conserver ses droits sociaux pendant toute la période. Ainsi, concrètement, cela signifie que l’ancien salaire continue d’être la référence en matière de chômage et de droit à la retraite. L’indemnité de maladie, le nombre de jours de vacances, le pécule de vacances sont quant à eux calculés sur la base des prestations de travail à temps partiel.
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[4]
Il s’agit d’une compétence transférée depuis le 1er juillet 2014 aux entités fédérées, et dont les modalités nouvelles restent encore à définir.
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[5]
Ce dispositif mis en place sous le gouvernement Sarkozy s’est vu remplacé dans le cadre du Contrat de Générations mis en œuvre sous le gouvernement de François Hollande.
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[6]
La démarche quantitative a été rendue possible grâce à la participation active du CESI, Service externe de prévention et protection au travail. La démarche qualitative est le fruit d’une initiative propre réalisée dans le cadre de travaux de recherche menés avec les étudiants d’un master en science du travail de l’Université catholique de Louvain.
-
[7]
Le questionnaire a été élaboré par N. Burnay en collaboration avec le partenaire CESI, service externe de prévention et protection au travail. Ce questionnaire, administré en ligne, a été envoyé à différentes entreprises affiliées au CESI, après qu’un premier contact ait été pris avec les entreprises via la médecine du travail.
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[8]
Les entretiens ont été réalisés par les étudiants du master en gestion des ressources humaines à l’UCL, dans le cadre d’un cours de méthodes de recherche en sciences du travail. Ils ont été réalisés entre octobre et décembre 2014.
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[9]
Tableaux de synthèse réalisés par J. Re, étudiante en master de Sciences politiques et administration publique à l’université catholique de Louvain, 2016.
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[10]
Le Comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) a pour mission de proposer et de contribuer à mettre en œuvre les moyens destinés à favoriser le bien-être des travailleurs. Il est composé de représentants du personnel et de l’employeur.
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[11]
Confédérations des syndicats chrétiens.
1Afin d’augmenter la participation toujours faible des travailleurs âgés au marché du travail, la Belgique vient d’adjoindre à ses dispositifs réglementaires, l’obligation pour les entreprises de conclure des plans pour l’emploi des salariés âgés de 45 ans et plus. Après quatre années d’entrée en vigueur, cet article dresse un premier bilan de cette mesure. Il s’appuie sur une enquête par questionnaire adressé aux employeurs et sept études de cas d’entreprises construites à partir de trente-deux interviews d’acteurs. Cette première évaluation rend compte d’une intégration relativement consensuelle du sujet dans l’agenda des négociations en entreprise, mais aussi d’une difficulté de sortir de dispositifs centrés avant tout sur des formes de retrait du marché du travail, à travers notamment une réduction du temps de travail soutenue par les pouvoirs publics. Elle révèle aussi l’absence totale de prise en considération d’une perspective de genre, ceci dès l’élaboration de la convention collective et finalement dans sa mise en œuvre, alors que cette prise en compte devrait s’imposer, ne serait-ce que par le nombre de femmes en activité ainsi que par le caractère pénible des postes qu’elles occupent.
Éléments de contexte et dispositif étudié
2Cette première partie propose des éléments de contexte nécessaires à la bonne compréhension de l’analyse empirique qui sera développée. Un premier point présente les grands traits de l’emploi des seniors en Belgique, en soulignant plus particulièrement la situation spécifique des femmes. Un deuxième point expose les principaux dispositifs réglementaires ciblant l’entreprise. Enfin, un dernier point décrit le dispositif étudié, la convention collective 104, qui enjoint les entreprises à définir des plans pour les travailleurs âgés. Une brève comparaison est établie avec un dispositif français similaire sur de nombreux sujets : les plans et accords sur l’emploi des seniors.
Le contexte belge : la croissance du taux d’emploi des seniors soutenue par les femmes
3La Belgique se caractérise par un faible taux d’emploi des 55 à 64 ans (44 % en 2015, dont 50,5 % pour les hommes et 39,3 % pour les femmes), même si celui-ci est en constante progression depuis quelques années. De 2000 à 2015, il a augmenté pour les deux sexes, mais bien davantage pour les femmes que pour les hommes : 21,3 pts pour les femmes contre 14,1 pts pour les hommes. Cette hausse n’est pas due exclusivement à des politiques de rétention des travailleurs âgés. Elle résulte également de deux autresfacteurs liés au fonctionnement du marché du travail : de manière générale, davantage de femmes sont en emploi et le niveau d’éducation a augmenté. En outre, le taux de participation féminine a été contraint par le relèvement du seuil de l’âge légal de la pension des femmes, passé progressivement de 60 à 65 ans entre 1999 et 2009 [1]. Cette croissance de l’emploi féminin parmi les seniors est importante dans des professions plus pénibles, notamment en fin de carrière : les services aux particuliers (vente, services personnels) et les métiers peu qualifiés.
4Une analyse comparative du vieillissement dans les divers métiers démontre que ces métiers constituent justement le premier « groupe à risque » (Vendramin et Valenduc, 2012). Diverses études nationales évoquent l’hypothèse d’un effet de la contrainte financière dans l’augmentation de l’emploi féminin parmi les seniors. Ainsi, on observe une grande différence de genre entre ceux (souvent celles) qui doivent travailler jusqu’à un âge élevé pour compenser une carrière morcelée ou commencée tardivement et ceux (souvent des hommes) qui peuvent bénéficier de conditions de sortie précoce relativement avantageuses (Vendramin et Valenduc, 2014).
5Selon l’indicateur Eurostat mesurant la durée moyenne de la vie de travail, en 2014, dans les 28 pays de l’Union européenne, la durée moyenne de la vie de travail d’une femme est de 32,7 ans et celle d’un homme de 37,8 ans. En Belgique, elle est respectivement de 30,4 et 34,7 ans. On note cependant que de 2000 à 2014, la durée moyenne de la vie active a augmenté pour les deux sexes, mais beaucoup plus pour les femmes que pour les hommes : 4 ans pour les femmes contre 0,9 an pour les hommes.
6Le marché du travail belge est également caractérisé par une grande proportion de travail à temps partiel, tout au long de la vie professionnelle, en particulier pour les femmes, mais aussi en fin de carrière. La moitié des femmes de plus de 50 ans travaillent actuellement à temps partiel contre 13,3 % des hommes dans la même tranche d’âge. De 2000 à 2015, cette proportion a augmenté pour les deux sexes, mais plus pour les hommes que pour les femmes pour qui le travail à temps partiel était déjà assez fréquent : 4,8 pts pour les femmes contre 7,1 pts pour les hommes.
7Un module spécial de l’enquête sur les forces de travail de 2012 a identifié les principales raisons pour lesquelles les personnes qui sont sorties définitivement de l’emploi ont pris cette décision. Les femmes sont proportionnellement plus nombreuses que les hommes à cesser de travailler pour des problèmes de santé ou d’invalidité (18 % contre 16,1 % pour les hommes), ou des raisons familiales ou de soin (6,5 % contre 2,5 % pour les hommes). Les hommes sont quant à eux plus nombreux que les femmes à cesser de travailler en raison d’arrangements financiers favorables (13,7 % contre 9 % pour les femmes) et parce qu’ils ont atteint l’âge d’admissibilité à une pension (23,5 % contre 20,5 % pour les femmes).
8Si les pouvoirs publics se réjouissent du relèvement du taux d’emploi des seniors, celui-ci demeure cependant encore l’un des plus bas de l’Union européenne. Il résulte d’une culture du retrait anticipé fortement ancrée dans le monde du travail depuis plusieurs décennies en Belgique. En effet, dès le milieu des années 1970, la gestion desrestructurations et des adaptations de l’outil de production a été largement soutenue par des politiques de préretraite qui restent encore très prégnantes dans la manière d’envisager la fin de carrière professionnelle, tant parmi les salariés que parmi les partenaires sociaux (Bredgaard et Troos, 2006 ; Claes, 2012 ; Desmette et Vendramin, 2014).
Des dispositifs réglementaires qui ciblent progressivement l’entreprise
9Depuis le début des années 2000, les différents gouvernements fédéraux et régionaux ont tenté de réformer les politiques d’emploi de manière à accroître l’emploi des seniors et à pérenniser ainsi le système de protection sociale fortement développé en Belgique (Burnay, 2015). Ces nouvelles politiques s’inscrivent dans un référentiel international centré sur le vieillissement actif, défini comme le fait d’aider les personnes âgées à rester aussi longtemps que possible les acteurs de leur propre vie et à contribuer à l’économie et à la société dans la mesure du possible [2]. Le prolongement des carrières professionnelles s’inscrit dans ces préoccupations. En matière d’emploi, en effet, il s’agit de développer des politiques publiques nationales ou régionales de maintien des travailleurs âgés sur le marché du travail, par des mesures incitatives (formations complémentaires, lutte contre les formes de discrimination à l’égard des seniors…) ou répressives (suppression des formules de départs anticipés du marché du travail, pénalités en cas de cessation de l’activité professionnelle avant l’âge de la retraite…). Ainsi, en 2005, le gouvernement fédéral après de longues négociations avec les partenaires sociaux édicte le Pacte de solidarité entre les générations. Ses objectifs sont multiples et cherchent notamment à favoriser une carrière plus longue et à freiner les départs prématurés du marché du travail. Ce durcissement politique de la gestion des fins de carrière ne correspond pas à une volonté de changement dans l’opinion publique, qui ne remet pas en question la solidarité intergénérationnelle, bien au contraire. Les syndicats, très importants en Belgique, ont pesé de tout leur poids pour modérer les réformes voulues par le gouvernement belge. Cependant, on assiste à peu de manifestations publiques au moment du vote : les travailleurs intègrent progressivement l’idée qu’il faudra travailler plus longtemps pour maintenir les acquis sociaux. Ces changements se font donc dans un climat social tendu, où l’opinion publique semble toutefois assez résignée. C’est à travers ce pacte de solidarité entre les générations que se dessine clairement une adhésion aux objectifs du vieillissement actif dans le rapport à l’emploi : fin progressive de la manne des préretraites, lutte contre les discriminations liées à l’âge, renforcement de la formation continue... Les syndicats obtiendront en contrepartie un dispositif de crédit-temps [3] permettant d’alléger les fins de carrière tout en préservant les droits sociaux. Ce dispositif a connu un grand succès (passant de 8591 bénéficiaires en 2002 à 88311 en 2011), ce qui a finalement conduit le gouvernement fédéral à restreindre les conditions d’accès et lesavantages liés à ce type de crédit-temps depuis le 1er janvier 2013. En ce qui concerne les entreprises, le Pacte de solidarité entre les générations n’est pas précisément proactif et novateur. Le principal dispositif prévu repose sur la création du Fonds de l’expérience professionnelle qui peut accorder un soutien financier à des projets soumis par les entreprises demandeuses [4].
10En 2012, dans cette même perspective de réforme de l’emploi en fin de carrière, une convention collective (CCT 104) est signée entre les partenaires sociaux au sein du Conseil national du travail. Elle constitue la dernière pierre à l’édification d’une politique de maintien en emploi des seniors et impose aux entreprises, du secteur privé principalement, de négocier un plan d’action senior. Cette démarche est novatrice dans un contexte législatif jusqu’alors peu contraignant pour les entreprises, bien que cette obligation ne soit pas assortie de sanction en cas de non-respect, contrairement aux plans seniors en France.
11Après quatre années, il est intéressant de dresser un premier bilan de ce nouveau dispositif qui cible les entreprises. Cet article, fondé sur des données encore très exploratoires, tant quantitatives que qualitatives, explique comment les acteurs dans l’entreprise se sont approprié cette convention et ses effets potentiels sur l’emploi des travailleurs âgés, hommes et femmes.
Une convention collective destinée à retenir les salariés
12Le 27 juin 2012, la Convention collective de travail n° 104 (CCT104) est conclue au sein du Conseil national du travail. Elle prévoit l’adoption d’un plan pour l’emploi des plus de 45 ans dans toutes les entreprises privées de plus de 20 travailleurs à partir du 1er janvier 2013. Quelques entreprises du secteur public sont également concernées. La convention a pour objectif de « régler les conditions, procédures et modalités suivant lesquelles un plan pour l’emploi, en vue de maintenir ou d’accroître le nombre de travailleurs de 45 ans et plus dans l’entreprise, doit être établi ». Dans la préparation de ces plans, une procédure d’information et de consultation du conseil d’entreprise est prévue et, le cas échéant, pour les entreprises de plus petite taille, du comité de prévention ou de la délégation syndicale. Le déroulé standard du processus est le suivant : l’employeur propose un plan annuel ou pluriannuel, ensuite, dans un délai de deux mois, les travailleurs et leurs représentants peuvent émettre des avis et des propositions, enfin, deux mois plus tard, l’employeur remet une nouvelle version du plan. Ce dernier doit contenir des mesures adaptées à la situation de l’entreprise, sélectionnées dans un ou plusieurs domaines d’action. Chaque plan doit cibler au minimum une mesure. L’article 4 de la CCT 104 permet que les mesures déjà mises en œuvre au sein de l’entreprise figurent également dans le plan pour l’emploi. La convention propose à titre d’exemple une liste non limitative de sept domaines d’intervention possibles :
- la sélection et l’engagement de nouveaux travailleurs ;
- le développement des compétences et des qualifications des travailleurs, y compris l’accès aux formations ;
- le développement de la carrière et l’accompagnement de la carrière au sein de l’entreprise ;
- les possibilités d’obtenir via une mutation interne une fonction adaptée à l’évolution des facultés et des compétences du travailleur ;
- les possibilités d’adapter le temps de travail et les conditions de travail ;
- la santé du travailleur, la prévention et la possibilité de remédier aux obstacles physiques et psychosociaux entravant le maintien au travail ;
- les systèmes de reconnaissance des compétences acquises.
14Ces domaines s’inscrivent clairement dans une volonté du législateur de développer, dans les entreprises belges, une véritable gestion des âges, entendue comme un sous-système de la gestion des ressources humaines qui correspond à « l’ensemble des décisions et des actions des entreprises impliquant la variable “âge”, qu’elles répondent à des influences externes ou à des influences internes » (Monti, 2003).
15Dès le départ, cette convention ne propose aucune ouverture pour une prise en compte genrée de la problématique du vieillissement au travail. Celle-ci ne se fera pas non plus lors de la mise en œuvre de la convention dans les entreprises.
16Cette convention collective rappelle le dispositif mis en place en France dès 2008 dans le cadre de la loi du 17 décembre 2008 de financement de la Sécurité sociale : les entreprises de plus de 50 salariés devaient avoir négocié un accord sur l’emploi des seniors avant le 1er janvier 2010. À défaut d’accord ou de plan d’action unilatéral en cas d’échec de la négociation ou d’absence de délégués syndicaux, les entreprises devaient payer une pénalité de 1 % de la masse salariale jusqu’à la conclusion de l’accord ou du plan d’action. Les entreprises dont l’effectif était compris entre 50 et 300 salariés pouvaient en être dispensées si un accord de branche avait été conclu [5]. En Belgique, contrairement à ce qui est prévu en France, il n’y a pas de pénalité si l’entreprise ne s’engage pas dans un plan senior.
17En France également, plusieurs recherches ont été menées pour tenter de comprendre comment les entreprises avaient négocié ces accords et ces plans (Claisse, 2011 ; Caron, 2012 ; Dilly et Hanicotte, 2011). Les conclusions de ces enquêtes s’articulent autour de trois constats. Premièrement, les plans et les accords gravitent souvent autour de dispositifs préexistants à la négociation. Tout se passe en effet comme si les entreprises avaient en quelque sorte « recyclé » des pratiques qu’elles avaient déjà mises en œuvre dans leur structure, laissant de côté les pratiques innovantes. Cette forme de « recyclage » des pratiques existantes est également soulignée par Dilly et Hanicotte (2011), auteurs d’une étude similaire menée pour le réseau Aract-Anact. Ils mettent en évidence un deuxième enjeu : les plans et les accords prennent peu en considération les enjeux locaux pour l’entreprise. L’accord semble détaché de son contexte organisationnel. La prise en considération des seniors dépend bien entendu de la capacité à diagnostiquer l’état de l’entreprise aujourd’hui, de manière à anticiper ce qu’elle sera demain. Or, dans la grande majorité des plans, on est face à des seniors « génériques » assortis de mesures pareillement « génériques ». Pourtant, le rapport de la Dares souligne l’intérêt d’asseoir les mesures prises au cœur des dynamiques historiques de l’entreprise. Le troisième constat révèle comment les accords et les plans seniors répondent davantage à une logique curative que préventive, limitant par là les possibilités d’action sur un public plus jeune : l’âge devient alors l’unique variable discriminante pour la mise en œuvre d’actions spécifiques (Dilly et Hanicotte, 2011).
18Selon ces études, la proactivité dont la France a fait preuve dès 2009 n’aboutit donc pas à un changement substantiel dans la prise en considération de l’âge dans les politiques d’entreprise. La mise en œuvre des accords seniors en France laisse dès lors un sentiment d’inaboutissement : les résultats sont modestes, mais les évaluations pointent néanmoins les effets d’apprentissage, un effet positif sur les mentalités et des liens intéressants qui se sont créés entre les politiques de prévention et de gestion des ressources humaines (Caser et al., 2013 ; Ravallec et Vaudoux, 2012 ; Caron et al., 2012). Cet article montre combien la Belgique s’inscrit dans la même perspective et confirme la difficulté et/ou le peu d’enthousiasme des entreprises pour s’emparer de cette problématique.
Présentation du dispositif méthodologique
19Deux démarches empiriques sont mobilisées dans cet article : une enquête par questionnaire et des études de cas d’entreprises. Les deux revêtent un caractère exploratoire. En effet, au moment où celles-ci ont été réalisées, aucune démarche d’évaluation soutenue par les pouvoirs publics n’avait été mise en œuvre, faute d’un accord entre partenaires sociaux au sein du Conseil national du travail (CNT). Ces deux études [6] ont été menées séparément ; elles sont réunies ici, car elles sont les deux seules démarches rigoureuses menées à cette époque pour évaluer comment ce nouveau cadre réglementaire prenait vie dans les entreprises. Ces deux démarches se complètent. En effet, l’enquête donne une estimation de l’ampleur de la diffusion de cette nouvelle convention collective dans les entreprises ciblées. Elle donne aussi un aperçu des thématiques retenues par les entreprises. Mais elle nous dit peu de chose sur le fond des plans, la vision des acteurs et les processus de mise en œuvre. La démarche qualitative apporte ce contenu plus compréhensif qui, malgré la diversité sectorielle, reste cependant limité à sept études de cas. Les deux démarches, qui permettent d’appréhender la manière dont ces plans pour l’emploi des salariés âgés ont pris forme en Belgique, n’avaient pas pour but de développer une perspective de genre. Toutefois, il est apparu intéressant d’examiner en creux comment, de l’élaboration à sa mise en œuvre, un dispositif ciblant l’ensemble des salariés était plus ou moins ouvert à une perspective de genre. Dès le départ, les résultats montreront l’absence d’une quelconque prise en compte de situations différenciées pour les hommes et les femmes et d’une ouverture à des problématiques touchant aux situations féminines.
20L’enquête quantitative repose sur l’envoi d’un questionnaire standardisé [7] auprès de 205 entreprises issues de divers secteurs et situées en Régions wallonne et bruxelloise (diffusion de mars 2015 à septembre 2015). Seules 69 entreprises ont répondu à l’ensemble du questionnaire composé de 20 questions, fermées et ouvertes, relatives à la gestion des âges en entreprise et plus particulièrement à la CCT 104.
Secteurs | Nombre |
Industrie alimentaire | 10 |
Soins de santé et action sociale | 21 |
Industries, production lourde | 11 |
Administration | 2 |
Transports | 1 |
Service public | 2 |
Autre | 22 |
Total | 69 |
21Le second dispositif repose sur une étude qualitative [8] sous forme de 32 entretiens semi-directifs réalisés auprès de 7 entreprises de grande taille situées dans les Régions wallonne et bruxelloise. Ces entreprises appartiennent à différents secteurs de l’économie, certains typiquement masculins, d’autres féminins. La démarche consistait à évaluer ainsi la manière dont les gestionnaires des ressources humaines, les managers ou les directeurs, les représentants syndicaux, les membres d’équipes médicales et les salariés de l’entreprise se sont approprié cette CCT. L’analyse ne porte pas sur les plans ou les projets de plan, mais sur les discours d’une diversité d’acteurs impliqués afin d’évaluer à la fois leur engagement dans le processus et leurs attitudes à l’égard de cette disposition, ainsi que leur vision de la problématique du maintien des salariés âgés en emploi. Le tableau 2 permet de visualiser les types d’entreprises contactées ainsi que les entretiens réalisés.
Études de cas d’entreprises. Composition de l’échantillon
Types d’entreprises étudiées | Hôpital Service de soins à domicile Banque Compagnie d’assurances Enseigne de grande distribution Centre d’appel Entreprise chimique |
Nombre d’entretiens réalisés par catégories | Neuf gestionnaires des ressources humaines Onze représentants syndicaux Quatre membres d’équipes médicales (infirmière psychosociale, médecin) Trois managers/directeurs Cinq salariés âgés de plus de 45 ans |
Études de cas d’entreprises. Composition de l’échantillon
22Ce double dispositif revêt un caractère exploratoire ; il n’a pas vocation à dresser un bilan définitif de la diversité des pratiques et des expériences. La taille de l’échantillon permet toutefois de dégager des conclusions provisoires.
Résultats des deux démarches exploratoires
23Au-delà des divergences méthodologiques et du traitement différencié des données, les deux enquêtes font apparaître des résultats très complémentaires où l’emploi des seniors constitue rarement une préoccupation majeure et où la question spécifique du genre est totalement absente des négociations et des dispositifs adoptés, position finalement identique à celle du législateur en la matière.
Des entreprises peu réceptives à la problématique des travailleurs âgés
24La convention collective 104, telle qu’elle a été conçue, devait permettre aux entreprises de plus de 20 travailleurs d’ouvrir le champ de la négociation sur la problématique des fins de carrière par le déploiement d’un plan senior. Cette politique ne possède cependant aucune référence explicite à une dimension « genre ». Cette question n’est pas à l’ordre du jour chez le législateur lorsqu’il promeut cette convention, même si bien entendu d’autres politiques d’emploi existent à ce sujet. On assiste donc à une séparation des problématiques : d’un côté, on tente d’aménager les fins de carrière, d’un autre, on s’attaque aux sujets de la diversité et de l’égalité des chances entre hommes et femmes. Dès lors, on constate d’emblée un décalage entre les caractéristiques des fins de carrière des hommes et des femmes et la mise en place d’une politique d’emploi de fin de carrière.
25Cette convention collective 104 s’insère dans un contexte général dans lequel très peu d’entreprises développent une véritable politique de gestion des âges. Les actions mises en œuvre relèvent plus souvent de dispositifs ad hoc que de stratégies intégrées et ambitieuses. De plus, les pratiques identifiées dépendent d’une double logique : soit elles entrent dans des dispositifs prédéfinis par les pouvoirs publics par la voie de la législation et des politiques publiques (Bredgaard et Troos, 2006), soit elles répondent à des pratiques organisationnelles visant à résoudre un problème ponctuel au sein d’une entreprise particulière (Hansez et al., 2011). La culture organisationnelle est dès lors peu encline à déployer de véritables plans d’action au profit des seniors. La gestion des fins de carrière constitue rarement un enjeu stratégique de la politique managériale. Les tableaux 3 et 4 reprennent quelques grands enseignements de ce dispositif public mis en œuvre dans ce contexte peu réceptif [9].
Profils des entreprises ayant répondu à l’enquête
Taille de l’entreprise | 20-49 travailleurs | 50-99 travailleurs | 100 travailleurs ou plus | Total |
Avec plan senior | 2 | 8 | 34 | 44 |
Sans plan senior | 7 | 2 | 16 | 25 |
Total | 9 | 10 | 50 | 69 |
Profils des entreprises ayant répondu à l’enquête
Synthèse des principaux enseignements de l’enquête par questionnaire auprès des entreprises. Réponses des entreprises ayant un plan « seniors »
Thématiques | Petites entreprises (< 50 salariés) | Entreprises moyennes (50-99 salariés) | Grandes entreprises (100 salariés et +) |
Échantillon | 2 entreprises | 8 entreprises | 34 entreprises |
Répondants | Représentant de la direction (y compris GRH) | Représentant de la direction (5) Conseiller en prévention (3) | Représentant de la direction (27) Conseiller en prévention (5) Représentant de la délégation syndicale (1) Responsable du développement professionnel (1) |
Le plan répond-il à un besoin de l’entreprise ? | Oui (2) | Non (5) Oui (3) | Non (22) Oui (12) |
Caractère novateur du plan | Repose pour l’essentiel sur des mesures existantes | Repose pour l’essentiel sur des mesures existantes | Repose pour l’essentiel sur des mesures existantes (20) Repose sur des mesures novatrices et existantes (12) Est tout à fait novateur (2) |
Public cible | Ensemble du personnel avec une priorité aux 45 ans et plus | Ensemble du personnel avec une priorité aux 45 ans et plus | Ensemble du personnel avec une priorité aux 45 ans et plus (21) Seulement aux 45 ans et plus (13) |
Thèmes abordés par le plan | Développement des compétences et des qualifications Développement et accompagnement de carrière Adaptation du temps et des conditions de travail Santé et risques psychosociaux | Sélection et engagement (3) Développement des compétences et des qualifications (7) Adaptation du temps et des conditions de travail (4) Santé et risques psychosociaux (5) Développement et accompagnement de carrière (1) Reconnaissance des compétences (1) | Sélection et engagement (15) Développement des compétences et des qualifications (25) Adaptation du temps et des conditions de travail (22) Mutation interne (15) Santé et risques psychosociaux (17) Développement et accompagnement de carrière (10) Reconnaissance des compétences (6) |
Nécessité d’une intervention externe | Oui et non Conseiller en prévention externe | Non (6) Oui (2) : ergonome, organisme de formation | Non (23) : capacité suffisante en interne Oui (11) : fonds sectoriels, association spécialisée dans la problématique, formateurs externes, fournisseurs, kinésithérapeute |
26Le premier enseignement tient à la taille de l’échantillon et au taux de réponse. Ainsi, 205 entreprises ont été contactées directement par l’intermédiaire de la médecine du travail. Ce premier contact permettait d’avertir la direction et les services concernés de l’envoi par mail d’un questionnaire. Malgré cette précaution qui devait garantir un taux de réponse élevé, seules 69 entreprises ont complété le questionnaire dans son intégralité. Parmi elles, seulement 44 possédaient un plan, malgré le caractère obligatoire du dispositif. L’absence de sanction prévue dans la convention explique sans doute largement ce constat.
27Les raisons de ce faible taux de réponse ne sont pas évidentes à interpréter : surcharge de travail, manque de temps, multiplication des sollicitations ou encore manque d’intérêt pour le sujet. Malgré une surreprésentation des petites entreprises lors de l’envoi du questionnaire, seules neuf de moins de 50 personnes ont répondu. C’est aussi parmi les petites entreprises que la proportion de « sans plan » est la plus élevée. De plus, les deux petites entreprises qui se sont dotées d’un plan y ont placé des mesures préexistantes. Le rapport s’inverse dès que l’on franchit la taille de 50 travailleurs dans l’entreprise. Pour ces dernières, les raisons évoquées en cas d’absence de plan senior sont avant tout le manque de temps, le manque de qualification, voire le manque d’intérêt. Cette absence de plan reflète donc moins des problèmes dans la négociation entre les partenaires sociaux que le peu d’espace déployé au sein des entreprises pour développer cette réflexion. Pour les entreprises de plus de 50 personnes également, lorsqu’un plan est adopté, celui-ci repose surtout sur des mesures préexistantes qui sont ramenées à l’intérieur du dispositif. Une réflexion collective ne s’ouvre pas réellement et le plan se décline a minima. Ainsi, dans les deux cas d’entreprises de moins de 50 personnes, il s’agit de l’identification d’un problème particulier qui a permis la réflexion et l’adoption d’un plan.
28Notons par ailleurs que la mesure la plus populaire citée par les répondants est le développement des compétences et des qualifications. Toutefois, derrière cette appellation, on retrouve des mesures autant destinées à l’ensemble du personnel qu’aux travailleurs âgés. Vient ensuite l’adaptation du temps et des conditions de travail qui renvoient directement aux mesures de crédit-temps toujours en vigueur au moment de l’enquête. La diminution du temps de travail en fin de carrière répond en effet non seulement à un souhait des travailleurs, mais aussi bien souvent à une nécessité face à des conditions de travail peu compatibles avec l’avancée en âge (Burnay, 2013). Notons que ce recours au crédit-temps en fin de carrière est davantage utilisé par les hommes que par les femmes, pour des profils peu qualifiés, du travail manuel lourd et des problèmes importants de santé physique (troubles musculosquelettiques). Ces premiers résultats vont être confirmés par le dispositif qualitatif mis en place auprès de sept entreprises.
Regards croisés sur sept expériences en entreprise
29Au-delà de cette première approche, la seconde partie qualitative s’appuie, rappelons-le, sur l’expérience particulière de sept entreprises de grande taille appartenant à des secteurs différents, de manière à couvrir un large éventail de l’activité économique. Dans chacune d’entre elles, quatre à cinq personnes ont été interviewées en veillant à rassembler les points de vue d’acteurs différents. Ceux-ci n’ont pas été choisis en tant que porte-parole officiels ou parce qu’ils étaient les mieux informés, mais plutôt en fonction de leurs disponibilités et de la diversité des acteurs. L’information sur chacun des cas est sans doute incomplète, mais l’ensemble donne néanmoins un portrait pointilliste d’une manière de faire vivre la CCT 104 dans les entreprises. Pour des raisons de confidentialité, les nomsdes entreprises ne sont pas cités. Ces expériences nous informent à la fois sur le processus de mise en œuvre, les effets de contexte et ceux liés aux spécificités des entreprises. Elles nous permettent également de mesurer la plus-value et les limites d’un tel dispositif.
Un engagement surtout formaliste et peu enthousiaste
30L’élaboration de plans pour les travailleurs de plus de 45 ans dans les entreprises en Belgique semble s’inscrire dans des processus relativement consensuels, mais surtout très formels. Le sujet n’est pas conflictuel, mais, en même temps, ne suscite pas un grand enthousiasme, même là où des enjeux de vieillissement se posent fortement (âge moyen élevé, pénibilité physique importante). La CCT 104 n’est guère perçue comme porteuse de nouvelles perspectives, notamment parce que la problématique du vieillissement au travail est essentiellement pensée sous le registre de la pénibilité et dès lors intégrée aux dispositifs relatifs au bien-être. Une bonne collaboration des acteurs a souvent été constatée, aussi parce que les sujets conflictuels ont parfois été « sortis » du plan pour l’emploi qui se rapproche alors d’un inventaire de l’existant.
31La remise d’un plan, qui peut être provisoire, est en bonne partie gérée comme une formalité administrative, parfois à l’initiative de la direction. Dans d’autres cas, on constate une certaine forme de « mise en commission » dans un groupe existant ou créé à cette fin. L’hôpital illustre bien ce risque d’une mise en commission de la problématique des seniors. Le processus d’élaboration du plan démarre par une initiative de la direction. Le plan sera découvert dans le bilan annuel de l’entreprise remis aux partenaires sociaux. À ce moment-là, la délégation syndicale réagit et déclare son souhait de négocier et sa volonté de faire des contre-propositions. Le dossier est alors transféré au groupe « diversité » où se retrouvent représentants de la direction, des syndicats et du département des ressources humaines.
32Il n’y a pas un chemin standard suivi par les entreprises. Pour certaines, il y a d’abord un temps long de consultation et de discussion, pour d’autres, la formalisation du projet est rapide. Souvent, mais pas toujours, les salariés concernés (45 ans et plus) ont été impliqués, via des ateliers, des enquêtes ou des séminaires. Certaines entreprises incluent les salariés dès le début, d’autres viennent vers eux quand tout est bouclé.
33La CCT met en quelque sorte les acteurs de l’entreprise face à une contrainte d’innovation, alors que celles-ci n’ont pas de véritables politiques de gestion des âges. Dès lors, il paraît difficile d’être créatif, de sortir des contraintes réglementaires et de se placer dans une posture prospective. Par conséquent, ces plans pour l’emploi constituent pour l’entreprise une demande d’innovation organisationnelle qu’elles peinent à mettre en œuvre. Un représentant syndical de l’hôpital résume ainsi le diagnostic : « la CCT 104 n’est pas facile à réaliser et surtout, avoir des effets concrets ; je pense que c’est pour cela qu’on cale ». Dans l’entreprise de soins à domicile, le même avis est partagé par l’acteur syndical qui déclare « alléger le travail dans nos types de métiers me paraît irréel ».
34Le cas de la compagnie d’assurances démontre le plus la volonté de « bien faire » des acteurs. L’entreprise a une tradition de dialogue social et pendant quatre mois, des discussions ont été menées entre le responsable des ressources humaines chargé des projets pour les 45 ans et plus et les représentants des syndicats. La mise en œuvre de la CCT a débuté par l’organisation préalable de 10 ateliers avec des salariés concernés. La participation était libre, mais représentative de l’entreprise (équipes, localisations).L’objectif était de connaître les attentes en matière de fin de carrière afin de remotiver les plus âgés. Les représentants syndicaux se sont impliqués dans les ateliers. Les salariés consultés dans le cadre de ces ateliers ont soulevé en priorité des souhaits portant sur la reconnaissance et l’autonomie, des facteurs bien souvent pointés comme cruciaux dans la soutenabilité perçue du travail, mais rarement traités comme tels.
Un accent quasi exclusif sur la pénibilité physique
35Dans l’ensemble des entreprises étudiées, le vieillissement au travail est prioritairement, et parfois exclusivement, envisagé en termes de capacité à résister aux pénibilités physiques propres aux métiers concernés. Or, la principale mesure envisagée dans ce cadre, tant par les pouvoirs publics que par les organisations syndicales, portait sur la réduction du temps de travail en fin de carrière, principalement par le dispositif du crédit-temps. Les analyses effectuées sur les bénéficiaires de cette mesure montraient d’ailleurs combien ces dispositifs contribuaient réellement à un maintien en emploi : la réduction du temps de travail étant affectée à du temps de récupération face aux contraintes de pénibilité. Mais elles pointaient également le caractère hautement genré de ce dispositif : les femmes s’inscrivant dans des logiques de care, dans un régime de division sexuée du travail (Burnay, 2013).
36Par ailleurs, en ramenant la problématique des travailleurs âgés avant tout aux questions de pénibilité, bien souvent déjà traitées par ailleurs, on évite d’ouvrir de nouveaux chantiers, plus innovants ou plus conflictuels. Ainsi, dans les contextes organisationnels où la fin de vie professionnelle n’est pas dominée par des problèmes de pénibilité physique, d’autres points pertinents ont pu émerger : la vision de la carrière, la formation, le transfert de connaissances, les modalités de fin de carrière.
37C’est ce que révèle le cas de la banque qui se caractérise par un personnel dont la moyenne d’âge est plutôt élevée. Mais ici, le sujet principal des discussions en matière de fin de carrière n’est pas la pénibilité physique du travail (les métiers sont différents aussi), mais le maintien des compétences, la formation, les parcours de carrière. La banque est aussi décrite par les acteurs interrogés comme ayant toujours été soucieuse du bien-être de ses salariés et attentive à mettre en œuvre diverses mesures à cette fin, bien avant l’arrivée des obligations liées à la CCT 104. Les représentants syndicaux soulignent d’ailleurs qu’un travail du même type avait été effectué bien avant le plan, celui-ci étant surtout un inventaire de l’existant, sans réelle innovation : « On n’a pas attendu la CCT 104 pour se rendre compte qu’on a une population vieillissante. Il y a des réflexions depuis 2008. Ces réflexions ont mûri gentiment sans faire de grand tralala donc quand la CCT 104 est arrivée, ils ont formalisé tout ce qui avait déjà été mis en place. » Dans ce cas toutefois, la communication autour de la convention a été faite dans un climat émotionnel dominé essentiellement par un plan de diminution de l’emploi et des salaires ; dès lors, elle a été inaudible.
38Quant à l’entreprise chimique étudiée ici, elle semble avoir posé et discuté la problématique de manière plus globale et on observe les prémisses d’une réflexion qui envisage non plus seulement les dernières années de la carrière, mais sa totalité. Cette entreprise se caractérise par du travail posté et par son statut « à risques », ce qui sous-entend une vigilance constante dans le travail, même la nuit. L’âge moyen y est élevé et la réflexion sur les conditions d’une fin de carrière soutenable a été mise à l’agenda bien avant l’entrée en vigueur de la CCT 104. D’ailleurs, des dispositions ont déjà été prises pour alléger le travail en fin de carrière, comme des aménagements du temps de travail, la fin du travail posté à 60 ans et une affectation des anciens pour former les jeunes.
39La médecine du travail a été consultée pour l’élaboration du plan, dans lequel il s’agissait surtout d’intégrer ce qui se faisait déjà. « On n’a pas inventé l’eau chaude ! La CCT n’est pas innovante. » C’est aussi l’avis du représentant des ressources humaines. Pour le médecin du travail, « il ne faut pas que le certificat médical soit la seule issue […] Une grande entreprise a toujours des possibilités de reclassement des personnes quand des soucis de santé se présentent ». Il plaide aussi, comme les autres acteurs interrogés, pour une prise en compte de la pénibilité tout au long de la carrière. « On ne prend pas cette CCT par le bon bout. On attend que les gens soient vieux et après on se demande ce qu’on peut faire pour eux. Pour moi, c’est vraiment la grosse erreur de cette CCT. Il faut que les gens repensent l’intégralité de leur carrière. » Les délégués syndicaux insistent également sur la nécessité de penser l’ensemble de la carrière et de prévenir les effets de l’usure professionnelle. « On ne gère que la fin des carrières, mais les carrières, ça doit être géré du début à la fin […] Il faut une gestion de carrière pour arriver en bon état à la fin de sa vie. »
Une prise de conscience et un apprentissage progressif
40Ces premières évaluations ont montré les limites de tels plans, mais en dépit de résultats peu innovants et de l’enthousiasme modéré, l’obligation d’élaborer ces plans a néanmoins un effet positif sur divers aspects. Elle contribue notamment à créer la conscience d’un collectif « travailleurs âgés » et à sortir d’une gestion des situations au cas par cas pour penser la problématique du vieillissement dans sa globalité. Elle rend visibles les travailleurs âgés, et audibles leurs difficultés et leurs souhaits. Elle permet de mettre des mots sur des situations et rend légitimes l’expression de certaines difficultés et les attentes liées à l’âge. À l’actif de cette convention, on peut dès lors noter un travail d’apprentissage et de sensibilisation, certes lent, mais néanmoins réel ; une sensibilisation à la fois des employeurs et des travailleurs à la nécessité d’avoir une vision plus prospective des carrières. Elle est l’opportunité d’un travail d’information du personnel qui permet d’encourager une participation à la réflexion et à un changement de la culture du départ anticipé. Elle offre l’occasion de s’engager dans des perspectives plus décloisonnées, en associant les acteurs de l’entreprise et en élargissant la manière d’appréhender le vieillissement au travail (Delgoulet et al., 2014).
41Si la CCT permet d’enclencher une dynamique, elle laisse cependant à ce stade le sentiment d’une impuissance relative partagé par tous les acteurs. L’expérience du service de soins à domicile est la plus emblématique d’une démarche collective en panne de solutions. Pour les délégués syndicaux de ce service, la CCT 104 a surtout une dimension symbolique ; elle sensibilise à la problématique et rend visibles les difficultés liées au vieillissement. Elle est perçue comme un moyen permettant d’exprimer sa pénibilité, rendant par là légitime l’expression de difficultés ou d’attentes particulières liées à l’avancée en âge, mais sans véritable pouvoir d’action : « en CPPT [10], nous avons toujours veillé et nous veillons encore à ce que tout problème de bien-être du travailleur soit respecté, que ce soit avec la CCT 104 ou non ».
42Mais la prise de conscience peut aussi être assortie de réserves. Un délégué de l’hôpital met ainsi en évidence le risque potentiel d’assumer l’étiquette de travailleurs âgés :« Les ressources humaines nous ont prétendu que maintenant, tous ceux qui ont plus de 55 ans, ils veulent bien les rencontrer lors d’un rendez-vous pour voir avec les gens ce qu’ils veulent faire pour leur fin de carrière. Ils veulent bien rencontrer les gens, mais dans l’absolu, ils n’ont rien à leur proposer. Le problème, c’est que même si les gens ont mal quelque part ou ont du mal à faire certaines choses au travail, ils ont peur de le dire parce qu’ils se disent que s’ils n’ont plus l’air aptes au travail, ils risquent de se faire licencier. Donc les gens ne sont pas spécialement de bonne volonté pour aller dire aux ressources humaines : “je suis un peu limite, je me rends compte que ça ne va plus très fort”. Parce qu’ils ne savent pas quelle solution on pourrait leur proposer. Et donc de ce fait, ils se disent : “je ne vais quand même pas leur donner un bâton pour me battre”. Donc les gens se retiennent de parler et s’ils sont convoqués, ils diront que pour finir, ça va. »
L’influence de la pyramide des âges
43Plusieurs éléments liés au contexte et à la spécificité des entreprises étudiées influencent la mise en œuvre des plans pour l’emploi des 45 ans et plus. Tout d’abord, la sensibilité à cet enjeu varie selon la pyramide des âges, réelle (ce qu’elle est dans les faits) ou souhaitée (celle que l’on souhaiterait atteindre).
44Il y a d’abord les entreprises qui se caractérisent par une main-d’œuvre âgée et qui n’ont pas comme objectif stratégique de remplacer leur personnel par des effectifs plus jeunes. Dans ces cas-là, la mise en œuvre de la CCT 104 vient formaliser un ensemble de mesures qui existent déjà. Lorsqu’une réflexion a déjà été entamée autour de la problématique des conditions de travail compatibles avec le vieillissement, l’élaboration et la négociation d’un plan pour l’emploi des 45 ans et plus s’inscrit dans la foulée de travaux antérieurs et de mesures déjà en cours. Mais c’est aussi, dans le cas d’une enseigne de grande distribution, l’opportunité de sortir du modèle de la prépension. Pour le département des ressources humaines, cette obligation de conclure un plan pour l’emploi des 45 ans et plus, c’est d’abord une opportunité de sensibilisation à la question des seniors. « Je dirais que c’est un début de prise de conscience sur nos seniors, parce que nous sommes le résultat malheureusement de plusieurs restructurations, donc en général on avait peu ou pas de seniors, parce qu’ils partaient. Au départ quand je suis rentrée il y a 20 ans, y avait la prépension à 50 ans, puis la prépension à 52, puis la prépension à 56, 58, 60. Comme on avait une CCT prépension qui était assez favorable, tout le monde la prenait. » Anticiper le vieillissement au travail est perçu comme une véritable « révolution mentale » et la CCT 104 est considérée comme une opportunité pour changer l’état d’esprit collectif à l’égard du vieillissement au travail. Les responsables des ressources humaines interrogés attirent également l’attention sur la nécessité de penser des dispositifs qui favorisent les seniors, mais sans contraindre les autres groupes d’âge.
45D’autres entreprises se caractérisent à l’inverse par une main-d’œuvre dont l’âge moyen est relativement bas. Dans ce cas, les travailleurs plus âgés et leurs représentants syndicaux se sont emparés de la CCT 104 pour faire reconnaître l’existence de la problématique dans une entreprise au fond peu concernée par la question des travailleurs âgés. Le centre d’appel est le plus caractéristique : un personnel jeune et une volonté de maintenircette jeunesse. La moyenne d’âge de la hiérarchie est également basse. Les salariés âgés sont donc minoritaires. Ils se sont donc saisis de la CCT 104 avec leurs représentants syndicaux pour être plus visibles auprès d’une entreprise qui a peu la culture des négociations, mais où celle-ci s’implémente petit à petit : « Ici avec les élections sociales de mai 2012, il y a vraiment des délégués qui se sont levés pour faire du bon travail. Et donc, là on commence seulement à travailler. Ça veut dire qu’on commence tout doucement aussi à instaurer une culture syndicale. »
46Toutefois, cela reste difficile pour les délégués de porter les enjeux du vieillissement dans une entreprise dominée par la jeunesse et cela génère une sorte de malaise. Selon les délégués, les jeunes ne comprennent pas que c’est aussi pour leur bien-être. « Je pense que l’installation de la CCT va bouleverser tout ce mécanisme et va nous donner plus de sérénité aussi à nous plus âgés. » Cette mise en avant du facteur âge n’est pas toujours bien perçue par les jeunes salariés qui, souvent précarisés, portent des jugements très durs à l’encontre des seniors : « Il faut qu’ils travaillent quand même, mais qu’ils laissent aussi la place aux jeunes (…) Voilà, je ne dis pas qu’il ne faut pas qu’ils travaillent, mais avoir peut-être moins de boulot pour que les jeunes puissent aussi percer. »
47Un troisième cas de figure concerne des entreprises qui ne se distinguent pas par une population salariale particulièrement âgée, mais par l’existence de pénibilités physiques auxquelles les salariés sont confrontés à tous les âges. Pour ces entreprises, les discussions autour du vieillissement introduisent un critère « âge » dans un dossier plus général qui concerne la pénibilité du travail. C’est le cas de l’hôpital où les responsables des ressources diront : « Tout ça, ce sont des choses mises en place bien avant la convention. On n’a pas vraiment besoin d’une convention pour prévoir ce genre de choses dans nos hôpitaux, c’est normal je trouve. » Finalement, la CCT 104 semble complexifier ici des préoccupations qui concernent tout le personnel en introduisant une perspective « vieillissement ».
Les effets du contexte d’implémentation
48Cette convention collective s’impose également dans l’agenda des entreprises et de la négociation dans des contextes bien différents. Dans certaines entreprises, elle s’inscrit dans le rythme quotidien : le business as usual, dans d’autres, elle vient parfois buter contre d’autres objectifs stratégiques contradictoires, comme rajeunir le personnel ou mettre en œuvre une restructuration qui prévoit une diminution de l’emploi. Elle apparaît alors comme périphérique, perturbante ou inutile par rapport aux agendas du moment.
49Dans l’organisme bancaire étudié, l’obligation d’établir un plan pour l’emploi afin de faciliter la rétention des travailleurs plus âgés coexiste avec un plan de restructuration qui vise à diminuer significativement le volume de l’emploi et certains avantages financiers. Dès lors, un plan dont l’ambition est de maintenir les salariés en emploi coexiste avec des incitations fortes à partir, en particulier pour les travailleurs plus âgés. C’est dans ce contexte contradictoire et dans un climat social morose que la CCT 104 tente de s’implémenter. Un représentant syndical résume ainsi la situation : « On vous dit d’un côté, “pour répondre à des obligations légales, on va discuter de votre avenir professionnel” et d’un autre côté, on vous convoque “parce qu’on va liquider 900 personnes et au plus vite vous serez parti au mieux ce sera pour tout le monde”. »Les nouvelles dispositions relatives au crédit-temps fin de carrière se sont également invitées dans les débats autour des plans pour l’emploi des 45 ans et plus. Il semble bien que dans des entreprises où les dispositions d’allégement de la charge de travail en fin de carrière reposaient largement sur le crédit-temps, les nouvelles dispositions entrées en vigueur en janvier 2015 sont venues interférer dans les réflexions et stratégies autour des plans pour l’emploi. En effet, dans l’ensemble des entreprises étudiées, le vieillissement au travail est prioritairement, et parfois exclusivement, envisagé en termes de capacité à résister aux pénibilités physiques propres aux métiers concernés. La première mesure envisagée face à l’insoutenabilité croissante de certaines pénibilités physiques liées au travail (horaires, charges lourdes) est la réduction du temps de travail. Le crédit-temps était alors perçu comme une solution acceptable par toutes les parties concernées.
50Au-delà des contextes organisationnels très différents, l’introduction de la convention collective 104 n’a guère d’effet sur les pratiques déjà existantes. Tout se passe comme si elle prenait place dans des univers formatés qui intègrent dans leur grille d’analyse la question de l’âge au travail sans véritablement questionner la pertinence de la grille elle-même : cette intégration se faisant à l’intérieur de logiques managériales et sociales déjà présentes sans véritablement parvenir à faire bouger les lignes du dialogue social.
Conclusion
51Mise en œuvre sans grand enthousiasme, mais aussi sans confrontation entre les acteurs de l’entreprise, la CCT 104 a produit peu d’effets à court terme. À moyen terme, elle semble cependant contribuer, au niveau de l’entreprise, à un éveil de conscience et au lent démarrage d’une réflexion concertée autour de la question du vieillissement au travail. En revanche, elle n’apporte aucune ouverture à une prise en compte de la problématique du genre.
52Ces premières études de cas ont montré les limites de la démarche, mais, en dépit de résultats peu innovants et d’un enthousiasme modéré, l’obligation d’élaborer un plan pour l’emploi des travailleurs de plus de 45 ans a néanmoins des conséquences constructives sur divers aspects. Elle introduit une perspective d’âge dans les mesures existantes ; elle contribue à créer la conscience d’un collectif « travailleurs âgés » et à sortir d’une gestion des situations au cas par cas pour penser la problématique du vieillissement de manière collective. Par ailleurs, elle rend visibles les travailleurs âgés et audibles leurs difficultés et leurs souhaits. Elle contribue également à sensibiliser à la fois les employeurs et les travailleurs à la nécessité d’avoir une vision plus prospective des carrières. Elle représente aussi l’opportunité d’un travail d’information du personnel qui permet d’encourager la participation de celui-ci à la réflexion et à un changement de la culture du départ anticipé. Enfin, c’est l’opportunité de faire le point sur les pratiques en cours autour des thèmes évoqués dans la CCT. Cette étape peut être un passage qui permet d’aller plus loin dans la réflexion et d’être innovant.
53Mais si la CCT a le mérite de rendre visible un problème, à ce stade, elle semble peu contribuer à sa résolution. Les acteurs en entreprise peinent à dépasser les constats. Dès lors, on observe un sentiment d’impuissance partagé par les acteurs interrogés. Une enquête exploratoire menée par le syndicat CSC [11] fin 2013 (Lepoutre, 2014) auprès des permanents syndicaux qui ont suivi la mise en œuvre de la convention dans les entreprises pointait déjà leur relatif découragement : leur implication n’aboutissant bien souvent qu’à de maigres résultats. Cette difficulté d’élaborer des propositions innovantes rejoint donc les analyses menées en France présentées au début de cet article. L’expérience belge n’étant guère plus concluante.
54Nous terminerons en pointant l’invisibilité des travailleuses âgées et l’absence de perspective de genre dans les cas étudiés en Belgique. Aucun des acteurs interrogés n’a rapporté une éventuelle attention aux spécificités des activités et des parcours des femmes et leurs répercussions sur le vieillissement au travail. Pourtant, l’injonction à travailler plus longtemps occulte des inégalités entre les femmes et les hommes qui sont dues non seulement à une discrimination dans l’emploi, mais aussi à une inégale répartition des charges de la vie quotidienne (Molinié, 2012). Teiger et Vouillot (2013) ont ainsi montré que les hommes et les femmes ne sont jamais exposés à des conditions de travail identiques, même lorsque l’intitulé de leur métier est analogue. En France, par exemple, dans une même catégorie professionnelle les femmes présentent trois fois plus de troubles musculosquelettiques que les hommes (ibid., p. 24). Certaines conditions de travail pénibles sont plus facilement repérables, mesurables, et donc plus « reconnues » (elles sont compensées par des primes, la possibilité de départ anticipé…) et celles-ci concernent le plus souvent les hommes : vibrations, bruit, chaleur, froid, expositions aux toxiques, radiations, charges lourdes, travail de nuit. Tandis que les femmes sont exposées à des risques moins visibles : elles subissent majoritairement la répétitivité, l’impossibilité d’interrompre leur travail, la dépendance au travail effectué en amont, de faibles marges de manœuvre dans la réalisation de leur travail (Caroly et al., 2013, p. 29).
55La perspective de travailler plus longtemps ne peut s’envisager sans prendre en compte les effets à court et à long terme du cumul entre vie professionnelle et vie privée. L’association et les effets réciproques de l’activité et des conditions de travail et les contraintes de l’articulation entre vie professionnelle et vie privée se traduisent à long terme par une dégradation de la santé et une espérance de vie en bonne santé moindre pour les femmes, même si elles ont toujours une plus grande longévité (Teiger et Vouillot, 2013).
56Par ailleurs, les hypothèses positives relatives à un changement dans l’étape de vie après 50 ans – rétrécissement de la taille du ménage, transformation du réseau et des responsabilités familiales – doivent être relativisées. De nombreux auteurs ont ainsi démontré que cette étape n’était pas exempte de charges familiales et limitent notamment l’idée d’une opportunité de seconde carrière pour les femmes (Vendramin, Valenduc, 2014).
57De manière générale, il n’y a pas de sensibilité particulière à la situation des femmes dans le débat public et la concertation sociale autour du vieillissement au travail, ni dans le débat public ni au niveau de l’entreprise. Ce bilan rejoint les conclusions d’Ainsworth (2002) qui, à travers l’analyse de discours sur les travailleurs âgés en recherche d’emploi, montre comment se construit l’invisibilité de l’identité féminine de « travailleuse âgée » en faveur de la promotion d’une identité masculine de travailleur âgé défini comme un groupe défavorisé sur le marché du travail. Cette invisibilité est définie comme une forme de non-reconnaissance culturelle où un groupe est rendu invisible en même temps qu’il est défini et stéréotypé. Ce constat n’est cependant pas propre à la Belgique, il concerne encore de nombreux pays d’Europe…
Bibliographie
Bibliographie
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Mots-clés éditeurs : genre, conditions de travail, gestion des âges, politiques d’emploi
Mise en ligne 12/10/2018
https://doi.org/10.3917/rs1.077.0045Notes
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[1]
L’âge légal de la retraite passera progressivement de 65 ans à 67 ans à l’horizon 2035, pour les hommes et les femmes.
- [2]
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[3]
Les conventions collectives de travail (CCT) sont ici le fruit d’accords intersectoriels et sont conclues au sein du Conseil national du Travail. La convention collective de travail n° 77 (CTT n° 77) délimite les règles d’application de ce crédit-temps, notamment pour les seniors qui disposent d’une réglementation adaptée. Ainsi, à partir de 50 ans, tous les travailleurs peuvent bénéficier soit d’une réduction des prestations de travail à mi-temps, soit d’une réduction des prestations à concurrence d’un cinquième des prestations hebdomadaires de travail à temps plein. Pour ces travailleurs, le crédit-temps n’est pas limité dans le temps et permet ainsi de gérer cette réduction du temps de travail sur une longue période. Une indemnité d’interruption vient compléter le salaire. De plus, ce statut permet au travailleur qui en bénéficie de conserver ses droits sociaux pendant toute la période. Ainsi, concrètement, cela signifie que l’ancien salaire continue d’être la référence en matière de chômage et de droit à la retraite. L’indemnité de maladie, le nombre de jours de vacances, le pécule de vacances sont quant à eux calculés sur la base des prestations de travail à temps partiel.
-
[4]
Il s’agit d’une compétence transférée depuis le 1er juillet 2014 aux entités fédérées, et dont les modalités nouvelles restent encore à définir.
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[5]
Ce dispositif mis en place sous le gouvernement Sarkozy s’est vu remplacé dans le cadre du Contrat de Générations mis en œuvre sous le gouvernement de François Hollande.
-
[6]
La démarche quantitative a été rendue possible grâce à la participation active du CESI, Service externe de prévention et protection au travail. La démarche qualitative est le fruit d’une initiative propre réalisée dans le cadre de travaux de recherche menés avec les étudiants d’un master en science du travail de l’Université catholique de Louvain.
-
[7]
Le questionnaire a été élaboré par N. Burnay en collaboration avec le partenaire CESI, service externe de prévention et protection au travail. Ce questionnaire, administré en ligne, a été envoyé à différentes entreprises affiliées au CESI, après qu’un premier contact ait été pris avec les entreprises via la médecine du travail.
-
[8]
Les entretiens ont été réalisés par les étudiants du master en gestion des ressources humaines à l’UCL, dans le cadre d’un cours de méthodes de recherche en sciences du travail. Ils ont été réalisés entre octobre et décembre 2014.
-
[9]
Tableaux de synthèse réalisés par J. Re, étudiante en master de Sciences politiques et administration publique à l’université catholique de Louvain, 2016.
-
[10]
Le Comité pour la prévention et la protection au travail (CPPT) a pour mission de proposer et de contribuer à mettre en œuvre les moyens destinés à favoriser le bien-être des travailleurs. Il est composé de représentants du personnel et de l’employeur.
-
[11]
Confédérations des syndicats chrétiens.