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SUR LES FONDEMENTS DE LA PSYCHOLOGIE ANALYTIQUE, Les conférences Tavistock, C. G. JUNG. Traduction française par Cyrille Bonamy et Viviane Thibaudier 2011, Albin Michel, Paris
1La lecture de la traduction en français des conférences qui se sont déroulées sur cinq soirées, fin 1935 à la Tavistock clinic à Londres, nous rendent présent un Jung didactique, vivant, dans la présentation de ses concepts théoriques, illustrés par de nombreux exemples cliniques et des références culturelles impressionnantes.
2Et même si, dans la dernière conférence sur le transfert (sujet demandé par les auditeurs et que Jung n’avait pas prévu de traiter en tant que tel) transparaît un peu de la lourdeur d’un cours théorique, celle-ci témoigne de la profondeur des recherches théoriques de Jung sur le fonctionnement psychique, tel qu’il le concevait en 1935.
31935 c’est aussi l’année la publication de « La dialectique du moi et de l’inconscient » (écrit en 1928), d’un article sur « des archétypes de l’inconscient collectif » (Les racines de la conscience), du commentaire psychologique du Bardo Thodol, de deux articles sur la psychothérapie (La guérison psychologique), puis en fin d’année d’un article sur « l’esprit immortel de l’homme », thèmes de ces ouvrages que l’on retrouve dans les conférences.
4Il y aborde en effet sa conception de la conscience et de l’inconscient dont celle-ci est issue ; il précise son point de vue, différent de celui de Freud (dont les anglais étaient bien sûr plus proches), précise le type de liens du conscient et de l’inconscient au moi, notre complexe « le plus intime et le plus cher », aux contours flous. Il décrit les fonctions que la conscience utilise pour s’orienter vers le monde exopsychique (pensée – sentiment – sensation – intuition), leur organisation par rapport au moi, dont dérivent les différents types psychologiques, puis les fonctions moins connues (car peu développées par la suite ?) pour s’orienter vers le monde endopsychique (la mémoire, les composantes subjectives des fonctions, les émotions et les affects, l’irruption).
5Il traite d’abord de l’inconscient et de la première des trois méthodes permettant d’y accéder : celle des associations, à travers des cas cliniques vivants et qu’il présente avec un esprit très scientifique. Suit sa conception de deux inconscients : l’un personnel et qui peut devenir conscient et l’autre collectif à jamais inconscient et régulé par les archétypes. Par des exemples vivants (la roue solaire) il cherche à convaincre son auditoire de l’existence de cet inconscient collectif et de l’importance de la vie des archétypes dans le quotidien des peuples, dans celui des conflits et des guerres (évoquant une menace en Allemagne en cette année 1935). Il en déduit un schéma de la sphère psychique. Introduisant, à partir de ses découvertes sur les associations, sa notion des complexes qui viennent les perturber, il insiste sur leur plus ou moins grande autonomie, notamment dans les psychoses et sur l’illusion de l’unité de la conscience et du complexe moi.
6Avant d’aborder sa deuxième méthode d’accès à l’inconscient : les rêves, il fait allusion aux tests d’association dans la famille. Jung ne fut-il pas le premier à mettre en évidence ces liens psychiques inconscients familiaux qui nous semblent si familiers aujourd’hui ?
7C’est à travers un exemple clinique très vivant d’un homme pris de vertiges, dont trois rêves (Jung insiste sur les séries) mettant en scène une position héroïque et une lutte magique contre le dragon révèlent une ambition démesurée par rapport à ses origines, que Jung précise sa pratique de l’utilisation des rêves et sa position différente de celle de Freud. Les associations ne lui servent, dit-il, qu’à établir le contexte du rêve et il ne recherche pas le complexe lui-même comme le fait Freud en poussant les associations mais ce que l’inconscient fait du complexe à travers le rêve, qui n’est pas, pour lui, un déguisement de désirs incompatible avec le conscient, mais un texte que nous ne comprenons pas, à déchiffrer.
8Devant ce public, Jung va insister pour considérer la fonction du rêve, d’une autre façon que celle théorisée par Freud. Il démontre sa qualité naturelle, son rôle compensateur, sa fonction d’autorégulation de notre système psychique. Son immense culture lui permet d’illustrer ses propos en référence aux mythes, tel celui du serpent, symbole de danger mais aussi de guérison, gardien du trésor et trésor lui-même. Il introduit par là sa conception de la quête de l’union des opposés, chemin vers celle d’entièreté sous l’égide d’un centre qui n’est plus le moi, mais le soi. A travers les images archétypiques qui nous relient à l’humanité en nous, Jung précise sa notion de collectif, avec sa valeur thérapeutique ; car l’accès au collectif libère de la honte et permet de récupérer de l’énergie. Ses exemples et ses références aux mythes antiques sont toujours une mine de savoir et de découvertes.
9Tout l’essentiel de la mise en place de sa théorisation du psychisme, on le voit, est abordée dans ces quelques conférences et ceci sans lourdeur ni académisme, avec un ton toujours vivant et documenté.
10Jung devait, dans la dernière conférence, continuer à présenter ses méthodes d’exploration de l’inconscient par le rêve et l’imagination active et ainsi, « si les auditeurs avaient été plus patients, à traiter du transfert » ; mais il accepta néanmoins de terminer sur cette question plus « concrète » et moins « théorique ». C’est pourtant à un véritable cours que les participants vont assister, avec trois « chapitres » : définition-étiologie-thérapie.
11En le définissant comme un cas particulier de projection automatique et spontanée des contenus subjectifs sur un objet, ici le thérapeute, le transfert donne une objectivité à l’objet et plonge le sujet dans le monde de l’illusion. Jung va insister sur le fait que cette illusion peut atteindre le thérapeute, car il est forcément, par contagion, touché par l’émotion du patient et doit l’accepter (avait-il entrevu ce qui se dit aujourd’hui des neurones miroirs ?). L’émotion faisant partie du transfert, le divan « freudien »n’est pas forcément pertinent et la différence de traitement de l’émotion, selon les types de fonctionnement psychique, demandera au thérapeute un travail adapté : « il faut répondre aux gens dans leur fonction principale », sinon, ils peuvent, au moins dans un premier temps, ne rien entendre.
12A cause du risque qu’analysant et thérapeute soient soumis à la même inconscience, (avec la constellation tant des contenus de l’inconscient personnel que des archétypes) créant cette participation qu’il nommera plus tard mystique et qu’il assimile au contre-transfert de Freud, à cause des projections réciproques qui ligotent les deux protagonistes, Jung insiste, devant ce public averti, sur la nécessaire analyse des thérapeutes, non évidente à l’époque.
13Dans la partie concernant l’étiologie du transfert, Jung précise son caractère spontané « comme un coup foudre », parfois même avant la première séance. Pendant l’analyse, face aux difficultés de communication, le transfert s’installera des deux côtés, par compensation, notamment avec certain sujets aux complexes particuliers. L’inconscience étant mutuelle et la contamination obligatoire, le transfert pour Jung, au moins à cette époque et, contrairement à Freud, n’est qu’un obstacle : « On ne guérit pas grâce à lui mais malgré lui ». Le transfert n’est pas le mécanisme qui permet de faire sortir le matériel, le rêve y suffit ; et il n’est pas nécessaire de susciter le transfert. D’autant plus que des projections de nature archétypiques sont toujours possibles, mettant le thérapeute aux prises avec la puissance des archétypes, celui du sauveur notamment.
14Il termine cette partie très dense avec la thérapie du transfert : comment le résoudre, arriver à se rendre compte de la valeur subjective des contenus personnels, « jusqu’à la nursery », et impersonnels, avec les effets magiques et sidérants de ceux-ci, toujours projetés, sur les rites, les religions (Jung fait encore état à ce propos de son immense culture). C’est toute la valeur subjective des images que Jung invite, à la différence de Freud, à travailler ; le contenu ne peut pas disparaître car il fait partie de la structure de l’individu, c’est l’acte de projeter qui est interrogé. Cela lui permet de parler des religions (Psychologie et religion sera publié en 1940) et des grandes forces collectives en action en cette période après la guerre de 14/18. Ce travail précise-t-il, est difficile, car il faut trouver un contenant aux images impersonnelles, par une technique particulière et s’y relier, afin de situer le centre de gravité à l’intérieur du soi. Le temps lui manque pour parler de ce centre non moi – le soi – et de l’intérêt à se pencher, à ce sujet, sur les écrits alchimiques qu’il travaille par ailleurs. Cette question du transfert, en travail chez Jung en 1935, aboutira à la publication de La psychologie du transfert, dix ans plus tard.
15Le vivant de ces conférences se retrouve bien entendu dans les échanges avec les participants. Les nombreuses questions par rapport à Freud permettent à Jung de préciser ses points de vue. D’autres interventions lui donnent l’occasion de développements inédits à l’époque comme l’idée de la névrose en tant que tentative de guérison ou l’effet symbolique de l’objectivation des images en imagination active. Il introduira la question téléologique, la synchronicité et le lien corps-esprit en évoquant la différence entre orient et occident qu’il développera dans les années suivantes. Il termine par une très belle démonstration d’une interprétation de dessins.
16Ainsi dans ces conférence, la plupart des conceptions fondamentales de Jung, déjà assises ou en devenir sont abordées par lui et à travers les questions de participants. Qui veut découvrir Jung y trouve l’essentiel, qui connaît Jung trouve un plaisir certain à cette présentation claire, riche et surtout très vivante.
17Maryse Paulin-Mahieux
C. G. JUNG- A BIOGRAPHY IN BOOKS, Sonu SHAMDASANI W.W. Norton, New York, 2012
18Remarque introductive : l’auteur rappelle qu’il y a à Zurich deux bibliothèques remarquables, celle de Martin Bodmer et celle de C.G. Jung.
19« Dans la vie d’un bibliophile, les rencontres avec les livres sont des moments clés, des moments de convergence du hasard et du destin ».
20L’auteur reprend le rêve récurrent de 1920, rêve d’une bibliothèque inconnue, qui deviendra réalité et souligne qu’elle deviendra aussi une porte d’entrée pour les rêves dans la mesure où les visions de Jung, les images étranges et bizarres que présentent les livres d’alchimie, réapparaissent spontanément dans nos rêves. Il propose et nous propose une promenade à travers la bibliothèque de Jung en suivant la trace des rencontres cruciales de Jung avec les livres.
21Enfant, déjà, Jung était avide de lecture, à la recherche du sens et du sens du « religieux ». Sur le chemin de l’école il rêvait d’habiter un château dans lequel se trouverait une bibliothèque fascinante recélant toute la connaissance de ce qu’il importait de connaître.
22Adolescent, il lit Homère et Virgile dans le texte. A la suggestion de sa mère il lit Goethe – Faust sera une expérience centrale, qui le conduit aux philosophes : Schopenhauer, Kant, Von Hartmann, (idée d’un inconscient en continuelle évolution), C.G. Carus (l’inconscient est premier – La conscience naît de l’inconscient – Il est trans-individuel et collectif). Jung dira à plusieurs reprises que sa conception de l’inconscient ne vient pas de Freud mais de Von Hartmann et Schopenhauer. Il lit aussi les poètes, Hölderlin, Schiller puis rencontre Nietzsche qui l’enthousiasme, surtout Zarathoustra (ce qu’il appelle ‘sa personnalité no2’ est identifiée à Zarathoustra).
23A la fin du XIXe siècle le spiritisme se développe et prend essor dans toute l’Europe et l’Amérique. Jung s’immerge dans cette littérature, entre autres Swedenborg et Carl du Prel. Celui-ci réfléchit sur le sens philosophique et psychologique des phénomènes spirites et sur les rêves « comme représentations symboliques de la psyché » et souligne leur forme dramatique et leur pouvoir de guérison. A l’époque des séances spirites avec sa cousine Hélène Preiswerk, Jung lit et lui fait lire Justine Kerner, qui les influencera tous deux.
24Trente cinq ans plus tard Jung donnera un cours sur l’histoire de la psychologie à L’Institut Fédéral Suisse de Technologie. Il reviendra sur tous ces auteurs et occupera nombre de séances sur les contributions des patients – Frederica Hauffe (‘The Seeress of Prevorst’ (1845) par Justine Kerner), clairvoyante, par exemple.
251900. Jung prend un poste au Burghölzli. Ses lectures changent ; il se plonge dans la psychiatrie, « pour me familiariser avec la mentalité psychiatrique » dit il.
26A ce moment là, sous l’influence de P. Janet, une approche plus dynamique de la psychologie se développe dans un double mouvement : l’étude de la pathologie pour éclairer et comprendre mieux la psychologie générale et utiliser les découvertes faites pour soigner les troubles mentaux.
27En cette année 1900 paraît le livre de T. Flournoy Des Indes à la planète Mars, qui ébranle le monde psychologique et devient tout de suite un bestseller. Jung est enthousiasmé et frappé par l’importance que Flournoy donne à « l’imagination créative subconsciente ». Il reconnaitra plus tard avoir adopté cette notion de T. Flournoy.
28En 1902 Jung présente sa thèse de psychiatrie Sur la psychologie et pathologie des phénomènes occultes réinterprétée et organisée suivant les idées de Janet et Flournoy. Il envoie sa thèse à Flournoy, qui en fait l’éloge : c’est une première reconnaissance importante. Jung quitte alors le Burghölzli pour aller travailler à Paris avec Janet, qui travaille alors à comparer les émotions chez les individus sains et les individus malades. C’est à son retour au Burghölzli que Jung travaille sur les expériences d’association de mots, expériences qui le conduiront à une psychologie générale des complexes. Et en 1907 paraît Psychologie de la Démence Précoce. Il y reprend, à la manière de Flournoy, l’histoire d’une de ses patientes, Babeth Staub. Ses premiers repères en psychiatrie sont clairement Janet et Flournoy. En 1906 il entre en contact avec Freud mais Freud n’occupe pas toute la place. Jung a déjà ses maitres, ses réflexions et ses idées. Freud et lui ont en commun le désir de fonder une thérapie scientifique basée sur la nouvelle psychologie et l’investigation en profondeur des vies individuelles.
29Le Burghölzli, avec Bleuler et Jung, devient le centre du mouvement psychanalytique.
301908 : Fondation du Jahrbuch (revue annuelle de recherches en psychanalyse et psychopathologie)
311910 : Création de l’Association Internationale de Psychanalyse, avec Jung comme président.
32En 1908 c’est aussi la construction de la maison de Küsnacht, au bord du lac de Zurich, avec la bibliothèque rêvée dont Jung dessine les plans et surveille de près les travaux. Il fait graver à l’entrée de la maison l’inscription : ‘Vocatus adque non vocatus deus aderit’.
33En 1925 cette inscription sera reprise dans son exlibris avec le dessin du blason de la famille, cadeau pour ses 50 ans.
34« Le seuil de la maison devient aussi le seuil du livre » dit Shamdasani.
35En 1909 Jung quitte le Burghölzli et développe sa propre clientèle et ses recherches. La fin du 19è voit se multiplier les traductions et les ouvrages en ethnologie, études comparées des religions, mythologie. La bibliothèque s’enrichit, Jung lit : folklore, mythologie, religion … On passe d’une attention centrée sur l’individu à l’histoire culturelle qui donne sens à l’évolution de la psychologie individuelle.
36Les auteurs qui alimentent alors sa réflexion : G. F. Creuzer : images et métaphores sont les premiers éléments du symbolisme, source de toute expression. Pas de psychologie sans étude de la mythologie et de l’histoire.
37A Dieterich : La liturgie mithraïque vient comme un support et renforcement de ce qui est au cœur de la vision de Jung : les motifs mythologiques anciens peuvent resurgir spontanément chez les malades. Ce qui sera conceptualisé en archétypes de l’inconscient collectif.
38L. Lévy-Bruhl et sa loi de participation mystique. Jung y voit aussi (en référence à sa propre expérience enfant avec le petit bonhomme dans le plumier – churinga des primitifs australiens) l’existence et la preuve d’un composant atemporel de l’âme, des idées universelles partagées par tous.
39De J. Burckhardt, il reprend l’Urbild, l’image primordiale et l’importance de nombreux mythes, en plus d’Œdipe, le mythe du héros entre autres.
40Mais que faire avec tout ce matériau ? Comment le présenter ? Jung se sert du texte de ‘Miss’ Miller Quelques moments de l’imagination créative inconsciente / Quelques faits d’imagination subconsciente. Ancienne élève de T. Flournoy, elle lui envoie ce texte interprété selon ses théories pour le soutenir lorsqu’il est attaqué par les spirites. Pour Jung c’est un exemple type de l’émergence de fantasmes mythiques chez un individu de notre époque. Cela donnera Les Métamorphoses de l’âme et ses symboles. On y retrouve ses lectures, le mythe du héros, la fonction de l’inceste etc. Livre foisonnant, qui montre combien les mythes sont des symboles de la libido et correspondent aux complexes chez l’individu.
41Dans cette vision de Jung de la réémergence spontanée des images primordiales se cache un profond paradoxe, dit S.Shamdasani. Pour les reconnaître il faut une culture humaniste classique large et profonde et la thèse de Jung contredit les termes mêmes de l’humanisme classique : la source des images se trouve dans l’âme individuelle.
42Puis ses lectures s’orientent vers La Renaissance Orientale. Dès la fin du XVIIIe, on commence à traduire les textes philosophiques, religieux et littéraires de l’Inde, ce qui ouvre à un humanisme universel : W. Jones, ainsi que Anquetil Duperon qui traduit les Upanishads, travaux qui selon Jung « apportent l’esprit oriental à l’Occident ». Et la bibliothèque s’enrichit. Pour Jung la découverte de l’esprit oriental est un chapitre central dans la « découverte » de l’inconscient. Et il interprète les textes orientaux selon ses découvertes, son expérience et sa pensée pour décrire un processus psychologique et répondre à ses questions. Il s’approprie l’esprit oriental, le fait sien, y développe son imaginaire. Tout ce matériel n’a pas qu’un intérêt d’érudit pour Jung mais « pénétra même ses fantasmes intérieurs » nous dit S. Shamdasani.
43Jung comprend que Les Métamorphoses sont une projection de ses propres fantasmes, qu’il n’a rien expliqué, qu’il ne sait toujours pas quel est son mythe. C’est alors qu’il se met à l’étude de ses propres fantasmes, avec sérieux et application, à partir de décembre 1913. Il fait ce travail très régulièrement et, consciemment, y entre comme dans un théâtre dont il est acteur. Une bonne partie de ces fantasmes proviennent directement de ses lectures, souligne Shamdasani. Sans être très sûr de ce qu’il faisait, Jung essayait de trouver le langage approprié à l’expression de ses visions et de son expérience propre de l’âme et du divin. Il se débat avec ses rêves qui lui font rechercher dans son histoire où est la faille. Il continue parallèlement à développer ses théories et à les exposer : conférence sur les Types psychologiques, hystérie et schizophrénie au congrès de Munich en 191 3. Conférence sur les rêves où il critique la théorie freudienne du rêve en 1914. En Avril 1914 il démissionne de sa fonction de président de l’Association Internationale de Psychanalyse et de son poste de conférencier à la faculté de médecine de Zurich.
44Doutes, retrait et pourtant affirmation : en juillet 1914 l’Association Psychanalytique de Zurich vote la séparation d’avec l’Association Internationale et se donne le nom d’Association de Psychologie Analytique.
45Le 1er août la guerre est déclarée. Jung comprend alors que ses rêves et fantasmes n’étaient pas que personnels, mais préscience d’un évènement collectif ; et il reprend ses fantasmes pour voir s’il y a des correspondances entre eux et les évènements collectifs. Dans cette période, il relit Dante (La divine Comédie), Zarathoustra « qui donne sa structure et son style à Liber Novus » dit Shamdasani qui ajoute : « Liber Novus est une tentative de donner forme à une cosmologie individuelle. Le thème général du livre montre comment Jung regagne son âme et surmonte le malaise contemporain de l’aliénation spirituelle ».
46Cela suppose ou conduit au Sacrificium Intellectus. C’est à dire que cela l’amène à redonner de l’importance aux contes et à la littérature (on y trouve toute la dynamique psychique à l’œuvre). Cela transforme sa façon de lire, de comprendre et le conduit à une étude neuve des symboles.
47Liber Novus, c’est donc un retour plus objectif sur le temps des fantasmes, cela correspond à une crise du langage et accompagne une quête de la meilleure expression pour parler de l’âme. Plutôt que de vouloir à tout prix donner une description objective des phénomènes psychiques, Jung évoque ses expériences par des images et personnifie le langage. L’amplification – c’est la méthode de la philologie – utilisée pour les rêves devient pour Jung une technique qui lui est propre. Il se sert aussi de la littérature pour expliciter ses idées : Nerval, Joyce, Hesse, Meyrink. Pour Jung, l’artiste vrai est un médium qui donne voix et forme aux images primordiales.
48En 1924 Le secret de La Fleur d’Or de R. Wilhem lui permet de parler de ce qu’il a expérimenté et découvert en 1913 et de donner quelques résultats essentiels de ses recherches. « Plutôt que de révéler toute son expérience propre ou des cas de patients, Jung utilise les ressemblances avec les textes chinois pour en parler. Cette méthode allégorique deviendra sa forme préférée pour en parler » (Shamdasani). L’intérêt de Jung pour l’étude de la pensée orientale se poursuit mais devient secondaire quand il rencontre l’alchimie.
49La « chasse au trésor » : Au milieu du XIXe siècle, deux livres réveillent l’intérêt général pour l’alchimie, ceux de M. Atwood et E. A. Hitchcock. Tous deux soulignent que « l’homme est le sujet de l’alchimie, le vrai laboratoire ». Tous deux soulignent l’aspect philosophique et religieux de l’alchimie. Jung connaissait ces livres et les œuvres de Silberer qui propose de lire les textes alchimiques comme des rêves. En 1915, T. Flournoy donnait un cours sur les sciences occultes pour « justement se pencher sur ce qui n’a pas été étudié par la science » et pourtant c’est après la rencontre avec le texte de La Fleur d’Or que Jung commence sa bibliothèque de textes alchimiques, celle du rêve de 1920 : « J’y découvris une bibliothèque merveilleuse provenant pour sa plus grande part du XVIe et XVIIe siècle. Il y avait aux murs de gros in-folio reliés en peau de porc. Certains d’entre eux étaient ornés de gravures sur cuivre de nature étrange et d’images représentant des symboles singuliers comme je n’en avais jamais vu » (Ma vie p. 235). Il lui fallut encore deux ans pour y regarder de plus près et s’y plonger. Il y met alors le même acharnement que lorsqu’il recopiait dans ses cahiers. Le premier tome, de 1935 et paru en 1936, s’appelle Chasse au Trésor. Le travail et les recherches de Jung sur l’alchimie ne sont pas académiques ; c’est un outil, une façon de présenter sa conception du processus d’individuation et sa représentation du symbole. De fait le référant réel de son travail sur l’alchimie c’est le symbolisme du processus d’individuation (et non l’alchimie médiévale en soi) et sa clé pour lire ces textes, c’est sa propre expérience comme elle est présentée dans Liber Novus. Les alchimistes s’occupaient de ce qui était exclu par l’Église, ce qui permet à Jung de prouver que ce dans quoi il s’est engagé dépasse sa personne, ses patients et a un sens historique et culturel beaucoup plus large. L’alchimie est une rencontre centrale car elle donne à Jung la base historique qui lui manquait, le pont historique entre la gnose et la psychologie de l’inconscient. « Il a accompli sa descente, il a choisi de ne pas publier Liber Novus » dit Shamdasani ; et Jung dit : « Cela m’a pris quasiment 45 ans pour distiller dans le chaudron de mon travail scientifique les choses dont j’ai fait l’expérience et que j’ai écrites à ce moment là ». Il en résultera 4 livres : Paracelse (1942), Psychologie et Alchimie (1944), Psychologie du Transfert (1946) et Mysterium Conjunctionis (1955/56).
50Paracelse : ce sont deux essais écrits à l’occasion du 400ème anniversaire de Paracelse. C’est le seul livre entièrement consacré à l’étude des écrits d’un auteur. Paracelse est pour Jung un maitre spirituel et chef de la lignée Goethe-Nietzsche. Il est « le pionnier de notre psychologie de l’inconscient ». Il est d’avant le schisme entre science et religion, savoir et foi, et un exemple de la synthèse que lui, Jung, voudrait créer sous une forme moderne.
51A partir de 1930 Jung cherche comment et où présenter ses idées enracinées dans une base historique. Deux lieux rendent ce projet possible. Il reprend en 1933, après 20 ans d’interruption, les conférences puis les cours ; en 1935 il aura un poste de professeur à l’Institut Fédéral Suisse de Technologie où il présente une vue d’ensemble de l’histoire de la psychologie moderne et surtout une étude comparative du processus d’individuation : les yogas sutras de Patanjali, les exercices spirituels d’Ignace de Loyola, la méditation bouddhiste, l’alchimie occidentale.
52Et il participe aux conférences d’Eranos crées en 1933 par Olga Fröbe-Kapteyn. Un lieu centré sur la rencontre Orient/Occident à travers l’histoire des religions et les cultures. Il y rencontre des spécialistes, H. Corbin, Heinrich R. Zimmer, G. Tucci, M. Eliade, P. Radin … donnant lieu à des publications interdisciplinaires ou des introductions de Jung à certains écrits, ce qui élargit le public de lecteurs. « C’est le seul lieu où les questions concernant l’humanité comme un tout sont discutées par les représentants de différents pays » écrit-il dans une circulaire au club de Psychologie Analytique de Zurich pour souligner l’importance de ce lieu et de ces conférences.
53On retrouve ce paradoxe : à la fois Jung demande à ses lecteurs et aux analystes une immense culture et en même temps insiste sur l’émergence spontanée des images en dehors de tout savoir. Et ses lecteurs sont en très grand nombre en dehors des lecteurs académiques.
54Le travail sur l’alchimie s’accompagne inévitablement d’une recherche sur le symbolisme chrétien : recherches sur l’histoire des symboles de Transformation dans la Messe – La Psychologie de l’Idée de Trinité – et une réflexion sur la religion, réflexion qui s’enrichit et se complexifie avec le temps. Le développement d’une psychologie de la religion pourrait guérir la faille entre science et religion dans le monde moderne.
55Puis des livres : Aïon. Contribution au symbolisme du Soi : Étude de la figure du Christ, incomplète dit Jung. Il y manque la question du mal. En réponse vient alors Réponse à Job : incarnation progressive de la figure divine, nécessité de la « christification », remplacement d’un dieu unilatéral par un dieu qui inclut le mal. Réponse à Job est une démonstration psychothéologique et historique de ces thèmes. Le « devenir conscient » que représente l’individuation représente la création devenant consciente d’elle-même à travers l’individu.
56« C’est cela, le sens du ‘service de Dieu’, c’est à dire du service que l’homme peut rendre à Dieu, afin que la lumière naisse des ténèbres, afin que le créateur prenne conscience de sa création et que l’homme prenne conscience de lui-même. Tel est le but, ou un but, qui intègre l’homme à la création de façon sensée et qui confère un sens à celle-ci. C’est là un mythe explicatif qui a grandi en moi au cours des décennies » (Ma vie p. 385/86).
57Un dernier paragraphe et une dernière photo, celle de la bibliothèque de M. Bodmer (quelques unes des premières éditions des œuvres de Jung) qui disait de sa bibliothèque : « La Bodmériana n’est pas une simple bibliothèque mais un musée de documents qui retracent l’histoire de l’esprit humain ; c’est un lieu où la quête de l’homme sur lui-même devient visible » (cité par Charles Mela (2005) Légendes des siècles. Regard sur une collection légendaire : La Fondation Martin Bodmer, Editions du Cercle d’Art, Paris).
58A la mort de Jung l’inscription : vocatus atque non vocatus deus aderit est gravée sur sa tombe. A l’entré de la maison, dans les livres de la bibliothèque, sur la tombe. Jung continue de vivre et de nous donner une nouvelle conception du livre à travers ses livres.
59Ce livre a été pour moi une vraie rencontre. Je m’y promène depuis des mois, et j’ai eu envie de partager cette promenade à travers la bibliothèque de Jung proposée par S. Shamdasani. Pour moi, elle est pleine d’enseignements et d’éclaircissements. Le livre est beau dans sa forme, son papier, les photos de manuscrits et d’éditions originales. La langue, érudite précise est élégante. Le guide qui nous conduit le fait avec clarté et profondeur. Qu’il soit remercié.
60Catherine LOVERING
LIENS SEPARATIONS TRANSFORMATIONS, Cahiers Jungiens de Psychanalyse n° 137, mai 2013
61Ce Cahier commence par un article de Jung : « La synchronicité en temps que principe des rapports acausaux », article qui réunit une traduction anglaise et une traduction française, publié à l’origine dans l’ouvrage commun de C.G. Jung et Wolfgang Pauli : Naturerklärung und Psyche.
62« J’ai eu connaissance par le journal » synchronicité et actualités, Florent Serina
63L’auteur, historien de la psychologie, s’appuie sur les études et commentaires de Shamdasani, revient sur les rêves de Jung de 1913 et juin 1914 sur les commentaires que celui-ci en fait dans le séminaire de 1925, dans le Livre Rouge et sur certains entretiens (avec Mircea Eliade) pour mener sa réflexion sur la synchronicité, le personnel et le collectif.
64« Jung réalise que ses visions ne le concernent pas personnellement mais sont des prémonitions du drame qui se joue en Europe ». Il cite aussi Jung : « L’esprit des profondeurs veut que cette guerre soit comprise comme une dissension de la propre nature de chaque homme ». Il cite Barbara Hannah qui dit avoir remarqué que Jung semble retrouver une certaine paix intérieure alors que le conflit mondial prend fin et y voit un effet de synchronicité. Délire d’interprétation ou « sympathie entre les choses » ? Jung développera alors ce qui sera la dernière partie de son œuvre, l’idée d’un « unus mundus » comme « aspect de l’unité de l’être ». En 1954, interrogé au cours d’une discussion sur les risques d’une guerre atomique au club de Zürich, Jung répond : « je crois que cela dépend des gens : combien en est-il qui peuvent supporter la tension des contraires à l’intérieur d’eux-mêmes ? »
65Sa réponse montre que Jung « appréhende toujours les évènements collectifs à l’aune de la vie intérieure des individus », dit Florent Sérina
LA VALLÉE OÙ POUSSENT LES ÂMES, Viviane Thibaudier
66Deux réflexions posent les bases de son article :
- notre façon de regarder le monde nous est renvoyée en écho par le monde ainsi regardé, et colore la compréhension que finalement nous en avons. C’est l’exemple du verre à moitié vide ou à moitié plein, nous propose l’auteure.
- la topographie du paysage dans lequel on a vécu s’est réfléchie en nous (caverne de Platon). « Une manière probablement inconsciente qu’a l’homme de s’identifier à la géomorphologie du lieu où il a séjourné pendant son enfance et son jeune âge ». A propos de deux exemples de patients, elle nous dit que c’est un socle vital et à l’image de cette géomorphologie qui leur permet « de se relier aux fondements mêmes de leur être en résonnance avec l’impact profond que la nature a eu sur le cours de la vie et des choses ».
67Puis elle reprend l’exemple de Jung. Géographie : homme des frontières, « Jung a passé les vingt premières années de sa vie à la frontière et au bord de l’eau ». Il a été vécu comme un personnage dérangeant, marginal, controversé ; il a été soumis à des diagnostics psychiatriques sévères. Et pourtant ces personnes inclassables, appelées borderline sont pour Jung « une richesse potentielle, une condition même de l’évolution ». S’il a pu tenir cette position, c’est que lui-même se situe à la frontière et que « l’au-delà des limites est un territoire à la fois angoissant et attirant et qu’il ne faut en aucun cas négliger ».
68L’auteure montre que Jung a su instinctivement (intuition ?) se situer dans « le vide médian » des maîtres du Tao, « au lieu même de l’entrecroisement et de l’interpénétration du Yin et du Yang, qui […] permet dans une interaction créative au Deux de se dépasser pour faire naître le Trois ». On est très proche de la dynamique psychique telle que l’a postulée Jung.
69L’auteure conclut sur le danger d’une pensée « à tiroirs » qui fige la relation et la dynamique psychique intérieure et elle termine par un beau poème de Lao Tseu.
ENTRE CHIEN ET LOUP, LES PERSONNALITÉS BORDERLAND, Jerome S. Bernstein
70Le cœur de mon travail, dit l’auteur, c’est l’évolution de la conscience et plus particulièrement la conscience border land. Sa théorie est la suivante : toutes les cultures ont un mythe fondateur. Pour la culture occidentale, c’est le récit biblique, le paradis. Le moment où Adam et Eve mordent la pomme est celui de la naissance de la conscience réflexive qui amène la sortie, la perte du jardin d’Eden ; ce qui entraine la coupure d’un lien psychique vivant avec la nature et dans l’évolution de la civilisation une perte progressive d’esprit et de lien au sacré.
71A travers le travail avec certains patients et une écoute « nouvelle », l’auteur explore les pôles positifs et négatifs du trauma. Le trauma constelle l’archétype de l’initiation au sacré ; il porte atteinte à la dimension numineuse du Soi. Pour les patients, cette reconnaissance (par eux et par le thérapeute) d’une dimension sacrée apporte sens et apaisement. « J’ai besoin d’un projet » dit l’un d’eux, ce que le thérapeute traduit par « j’ai besoin de faire l’expérience de ma part sacrée ».
LANGUE MATER – LANGUE AMÈRE, Brigitte Allain-Dupré
72L’auteure nous fait partager une promenade-rêverie, ou le travail de la pensée rêvante (J.B. Pontalis) entre L’enfant qui voulait dormir de A. Applefeld et « Fils de Personne », enfant adopté venu de loin, d’une autre culture et d’une autre langue, rencontré en thérapie. L’auteure se promène dans les questions d’Applefeld sur la langue maternelle comme racine, origine, sur la fidélité par la langue aux siens disparus, sur la place de la langue nouvelle, l’hébreu est ses effets positifs et négatifs ; sur l’angoisse de perte d’identité (changement de prénom) et la reconstruction d’une même/autre grâce à l’écriture et/ou le récit de son histoire. Applefeld a écrit des livres après avoir dit dans L’enfant qui voulait dormir que « s’il parvenait à écrire un jour (il) mêlerait la musique intérieure de sa mère à son écriture ». Ce que comprend aussi « Fils de Personne » grâce aux récits de sa famille adoptive sur leur attente de lui et les récits partagés : « Donc il existe un berceau pour l’humanité ? Et aussi une langue de naissance pour Lucy … Et aussi pour moi ? »
73C’est le récit comme vecteur de transmission d’une filiation qui est au cœur de cette promenade-rêverie.
LETTRES DE RUPTURE, Marie Goudot, écrivain
74Une fantaisie littéraire sur l’écrivain américain Hawthorne, à partir de ses écrits, carnets, contes, rêves et souvenirs d’enfance. Rupture avec l’héritage familiale, la lignée familiale le conduit à changer de nom : Hathorne devient Hawthorne, « le nom des aïeux flanqué d’une excroissance ! Ils comprendront ».
75Rupture avec l’héritage littéraire, « ses écrits ne peuvent être en continuité avec l’ancien monde, écrire un texte qui fera blêmir les ancêtres ».
76Une fantaisie vive, complexe et profonde sur le besoin de rupture pour avoir une chance de se trouver et être soi.
LE SOI TISSÉ, Catherine Briand
77L’auteure nous fait partager une expérience et un cheminement très personnels : comment un rêve surgit « du plus profond de soi » et une attention et présence soutenues au processus inconscient ont donné le jour à un processus créatif personnel et le mènent jusqu’à en faire un processus thérapeutique pour d’autres. « En quête permanente de sens, non sans retranchements, effrois et détours, j’ai effectué le voyage incessant dans “le temps des autres” de mes lignées, mettant à jour entre deux séances les fantômes emmêlés de mes tissages familiaux » et « ce travail textile est né de mon désir de créer une expression tissée nouvelle en partage ».
78L’auteure propose un atelier de tissage, dans une association de femmes en majorité d’origine subsaharienne. Mais dans leur culture, le tissage est réservé aux hommes. Alors ce sera le filet de pêche (tissage avec ses origines bretonnes). Elles s’embarquent alors dans des voyages immobiles et imaginaires, sans idée de la destination finale.
79Les matériaux, bouts de fil, dentelles, rubans « réveillent des souvenirs enfouis en chacune de nous. Nul n’est à l’abri d’une émotion … Les mailles du filet sont autant de fenêtres qui s’ouvrent sur nos ressentis, nos iles intérieures ». La parole se tisse pendant que les mains travaillent. « Les mots donnent forme et le récit prend corps ». Il y a tissage de lien, reconnaissance, appartenance, alliance. « Le tissage invisible se fait, pénètre par les oreilles et aussi par le cœur ».
NO LIFE, Christine Fouchard
80« No life » définit globalement une personne passionnée, puis les « accros », les « addict », jusqu’à conduire à l’isolement, l’exclusion volontaire de la vie sociale, pouvant même aboutir à une solitude extrême, à une négligence corporelle, à l’oubli des besoins vitaux.
81En général, ces personnes ne demandent pas d’aide, ne se plaignent pas ; c’est l’entourage qui s’inquiète. L’auteur nous fait partager cette inquiétude, ses questions, ses difficultés rencontrées dans un cas de prise en charge d’une femme « no life », Anna. Et la charge sera lourde, c’est un travail de réanimation, de remise en vie. « Cette rencontre exigea de moi, d’emblée, une participation active et très personnelle, d’abord essayer de créer un contact émotionnel et (pour cela) vivre pendant longtemps un excès d’émotion à sa place ». Il faut restaurer le temps humain, sortir du monde des possibles pour en actualiser quelques uns. L’analyste sera aidée par les rêves de la patiente, rêves d’une grande intensité émotionnelle et par les sensations qu’ils réveillent. « Souffrance, puis chaleur, puis pesanteur, puis temps, ont été les phases successives de son installation dans le monde des vivants ».
AMÉLIE, TRANSFERT OU LIEN ?, Christiane Fonseca
82L’auteure se questionne sur ce qui est lien et ce qui est transfert à l’occasion de la thérapie d’une petite fille, Amélie.
83Enfant difficile, instable, agressive et pourtant avide de reconnaissance, toujours entre séduction, agressivité, fuite. Transfert ou lien ? Le transfert implique projection et déplacement, « une condition privilégiée de formation de la fonction symbolique » souligné par André Virel à propos de la Psychologie du transfert de Jung. Le lien est plus organique, davantage lié au corps : il implique l’attachement et peut devenir adhésif.
84L’auteure nous présente de façon détaillée et très vivante le cheminement de la thérapie ; comment Amélie utilisait le lien transférentiel pour évoluer, selon ses possibilités en même temps qu’elle l’attaquait jusqu’à une rupture brutale, soudaine. Difficile à vivre pour la thérapeute. « Le lien, souvent adhésif, s’est distendu d’un seul coup. Amélie est passé d’un extrême à l’autre, du tout au rien ». Sentiment d’impuissance, d’être « laissée tomber », retour et réflexion sur le travail. Comment la destructivité d’Amélie pourra-t-elle trouver une issue positive ? Elle a rompu le lien, « comme s’il devenait trop pesant, au lieu de l’aider à développer sa liberté intérieure ».
FRÈRES ET SŒURS – POUR LE MEILLEUR ET POUR LE PIRE, Lisbeth von Benedek
85Les relations fraternelles ont leur propre dynamique. Elles sont essentielles à la construction de l’identité, nous renvoient « une image à la fois du semblable et de l’autre », poussent à la différenciation.
86La jalousie, d’après Wallon, aide à sortir de la confusion de l’identité. L’auteure nous parle du lien que crée partager les mêmes parents, de la complexité de ce lien à la fois horizontal (fratrie) et vertical (parents). La relation fraternelle serait un précurseur précoce de la différenciation entre soi et l’autre. Le complexe fraternel est l’un des organisateurs inconscients du lien, de tout lien. Il est peut-être le précurseur des figures de l’ombre ; il permet aussi de découvrir la complicité, une forme d’intimité, l’amour ambivalent et érotisé, l’alliance et la solidarité. Il est, pour Jung, une entité psychique autonome qui contient toutes les expériences de l’autre (semblable, aimé, haï, envié, double etc.). Les expériences vécues au sein de la fratrie participent à la constitution de soi.
LA MORT COMME SIGNIFIANT DE RUPTURE, UNE LECTURE DES RACINES DU DÉSACCORD ENTRE FREUD ET JUNG, Rodrigo Barros Gewehr
87L’auteur reprend de près certaines lettres de la correspondance Freud/Jung et souligne à la fois la passion, la curiosité et la recherche partagées, et dès la première lettre de Freud à Jung, un désaccord. Jung y propose le terme de psycho synthèse, en face et en complément du terme psychanalyse, terme qui annonce ou sous entend l’idée de finalité. Il parlera plus tard, avec l’assurance venue, « des formes de représentations indépendantes du sujet », de « l’inconscient comme élément autonome, siège d’un savoir collectif, de la synchronicité, de l’idée d’une préscience de l’inconscient. » L’auteur suggère que le motif fondamental du désaccord entre Freud et Jung se trouve dans leur vision de la nature de la psyché. Le rejet par Freud de l’idée de « psycho synthèse » est le point d’ancrage du signifiant « mort » ; au-delà des différences d’interprétation et des croyances, « il y a quelque chose de très profond qui les sépare qui concerne le plan épistémologique voire même ontologique ». La mort serait le signifiant de l’impossible rencontre.
S’ATTACHER À FAIRE CE QUI VIENT À L’ESPRIT, Flore Delapalme
88Une phrase simple, une petite phrase, amplifiée par l’exemple de Tom, 5 ans. « J’ai une idée », dit-il. L’idée s’est emparée de Tom en même temps qu’il l’a saisie et s’est « mis en mouvement pour en délivrer le fruit sur le tapis ». L’auteure continue avec Jung retrouvant l’énergie de l’enfant de 10 ans et ses jeux. L’émotion qui le saisit lui fait comprendre qu’il doit renouer avec « l’enfant qui s’adonnait aux jeux de son âge ». Le jeu, comme le vit l’enfant, nécessaire, sérieux, concentré, guidé et répété sans se lasser jusqu’à la première incarnation. Le jeu, « acte de foi qui ne doute pas pour mettre en œuvre sans tarder ce qui vient à l’esprit (éprouvé, sensations, émotions …). Le jeu, « qui permet à l’enfant de prendre possession de lui-même ; il s’y livre comme si sa vie en dépendait ».
89C’est ce que fait Jung à 40 ans, après réticence et répulsion. « Il a remis son cœur d’enfant à l’ouvrage et se laisse guider par ses directives », nous dit l’auteure. Elle ajoute que c’est une position qui demande de se borner à soi-même, de ne s’attendre à rien, passage obligé pour capter, peut-être, « ce secret qui est sien ».
90Ce Cahier contient deux autres articles :
91Préface à une nouvelle traduction en chinois de l’Essai sur le don de Marcel Mauss, Alain Caillé
92L’agencement de soi dans la relation – une vision interpersonnelle du self, Jean Knox
93Pour cet article, voir ci-dessous le texte de François Martin-Vallas.
94Catherine LOVERING
L’AGENCEMENT DE SOI DANS LA RELATION : UNE VISION INTERPERSONNELLE DU SELF, Jean Knox, Cahiers Jungiens de Psychanalyse n° 137, mai 2013
95Voilà un papier aussi intéressant que critiquable, ce qui, de mon point de vue, en fait toute la qualité. Jean Knox y poursuit sa réflexion, qui, je crois, ne l’a jamais lâchée, sur le développement du petit humain, puis de l’adulte qu’il devient. Elle s’appuie, pour ce faire, sur les données les plus récentes de la psychologie développementale et des neurosciences et invite ainsi le lecteur à la suivre en des terres inconnues du plus grand nombre de ceux qui pratiquent, ou plus simplement sont intéressés, par la psychologie analytique.
96Il y a deux difficultés majeures à la lecture de cet article. Tout d’abord les épistémologies respectives des neurosciences d’une part et des approches psychanalytiques – où j’inclus la psychologie analytique – d’autre part sont profondément différentes, ce qui fait de toute comparaison entre les constructions théoriques des unes et des autres une entreprise extrêmement risquée. J’y reviendrai. La seconde difficulté réside dans l’impossible traduction, en français, du mot self. La traductrice de Knox le note bien, et d’emblée, mais ne peut, évidemment, dans une simple note de bas de page, en exposer toute la complexité. La langue française dispose, en effet, de deux mots, moi et soi, là où l’anglais n’en n’a qu’un seul, self. Ainsi self peut, selon le contexte, être traduit aussi bien par moi ou soi, sachant que même parfaitement adaptée au contexte la traduction ne peut jamais rendre compte de ce qui apparaît au francophone comme une certaine indétermination de la langue anglaise. Il en est d’ailleurs de même des concepts jungiens de Moi et de Soi, qui sont, en anglais, Self ou Ego d’une part, et Self d’autre part. L’indétermination est là encore présente.
97Au-delà de cette difficulté que nul ne peut résoudre, si ce n’est en tronquant artificiellement l’anglais de l’une ou l’autre de ses résonnances sémantiques (ce qu’évite la traduction proposée par les Cahiers), reste la question des rapports possible de la psychanalyse et des neurosciences. Ici Knox prend le parti de les opposer plutôt que de les laisser dialoguer, et c’est là l’essentiel de ma critique. En effet il est difficile au lecteur de la suivre dans les critiques qu’elle adresse à la psychanalyse, ne sachant pas très bien si ces critiques s’adressent spécifiquement à ce qu’elle appelle la « psychanalyse traditionnelle », où s’il faut les entendre à l’adresse de toute forme de psychanalyse, jungienne en particulier. Il y a pourtant, dans les données neuroscientifiques et développementales sur lesquelles elle s’appuie, de nombreux éléments qui semblent valider l’approche jungienne de la psychanalyse.
98L’idée d’un self non-unitaire, mais plutôt dialogique, ne doit-elle pas être mise en perspective avec le concept jungien des complexes ? Idem pour : « l’inconscient et le self ne sont pas unitaires. Ils sont divisés en groupement d’expériences partagées de ‘soi avec l’autre’. » Il semble bien, en effet, que la théorie jungienne des complexes psycho-affectifs et de la dissociabilité psychique soit de plus en plus confirmée par les neurosciences cognitives. Quant à l’idée développementale d’un self dialogique, n’est-elle pas présente dans ce que Fordham a décrit du processus de dé-intégration et ré-intégration du soi primaire ? Cela se retrouve aussi dans l’alternance interactionnelle que Knox nous expose si clairement ici.
99Mais peut-être mon étonnement a-t-il été le plus important à lire, sous la plume de Knox, sa description et critique du thérapeute « écran vierge », ce thérapeute qui retient toute manifestation affective visible par le patient. Elle en décrit les effets potentiellement dévastateurs, et ne se réfère à aucun moment à Jung et au choix qu’il fit de maintenir un dispositif en face à face afin, précisément, que ses patients puissent avoir accès aux manifestations affectives lisibles sur son visage. Il en est de même quand elle parle de « L’idée que les patients ne se connaissent pas et que l’analyste est en meilleure position pour comprendre ce qui se joue au niveau inconscient …», position que Jung a maintes fois dénoncée.
100L’ensemble peut ainsi donner à penser au lecteur de cet article que l’auteur ne s’adresse pas à lui, mais bien plutôt à une espèce de psychanalyste rigide et dogmatique bien éloigné de la position que Jung nous invite à prendre et tenter de conserver dans notre fauteuil d’analyste. Et s’il nous arrive, évidemment, d’être parfois tels que Knox décrit le psychanalyste, ce n’est alors pas l’effet d’une théorie inadéquate, mais d’une dynamique transférentielle à laquelle l’analyste, pas plus que l’analysant, ne peut échapper. Et ce n’est alors pas une modification de ses connaissances qui aidera l’analyste, mais bien l’analyse elle-même de son contre-transfert.
101Mais ces critiques ne témoignent-elles pas aussi du fait que cet article a stimulé ma pensée ? Sa lecture dérange – elle m’a en tout cas dérangé – mais attend-on uniquement d’une lecture psychanalytique qu’elle nous confirme dans ce qu’on sait déjà, ou qu’elle se limite à mettre en forme des idées que l’on a du mal à construire ? Je ne crois pas. Il importe aussi que certains articles puissent nous déranger, jusque et y compris dans nos « évidences » les plus fortes, c’est-à-dire les endroits de nos pensées où ce sont les pensées qui s’imposent à nous, et non nous qui les pensons. Cet objectif est là parfaitement atteint, pour moi en tout cas, ce pourquoi je remercie son auteur et recommande fortement sa lecture.
102François MARTIN-VALLAS
JOURNAL OF ANALYTICAL PSYCHOLOGY, Vol 58 – avril 2013
103Presqu’un quart des pages de ce numéro concernent un séminaire présenté par Jung à Eranos en 1943 et dont le sujet était les mythes solaires, représentés en particulier dans l’art cartographique d’Opicinus de Canistris (c.1296-1352). Ce séminaire est resté inédit pendant de nombreuses années ; toutefois certaines notes prises par une élève de Jung, Alwine von Keller (1878-1965) ont été retrouvées dans les archives d’Eranos, et éditées en 2007 en italien, et en 2010, partiellement, en anglais. Cette fois il s’agit de notes bien plus exhaustives que les précédentes, notes qui nous permettent un aperçu plus complet de ce que Jung a pu présenter à son auditoire. Elles proviennent d’un autre de ses élèves, Rivkah Schärf Kluger, et sont commentées dans l’article suivant, par Ricardo Bernardini, Gian Piero Quaglino et Augusto Romano. Ce dernier article est particulièrement intéressant car non seulement il nous parle du sujet que traitait Jung – les mythes solaires – mais aussi il nous présente le contexte du séminaire dans l’ensemble du cadre du symposium dont le thème était « Hélios », tout en nous expliquant d’autres particularités de ce travail de Jung par rapport aux évènements de sa vie au moment de la rencontre à Eranos.
104Le très intéressant article de Warren Colman se trouve traduit en français dans ce numéro de la RPA, alors à nous de le découvrir plus aisément !
105A Structural-phenomenological typology of mind-matter correlations de Harald Atmanspacher et Wolfgang Fach, n’est pas pour les timides. Une solide aisance en philosophie et dans les complexités de la physique quantique sont de rigueur pour naviguer au fil des pages difficiles de cet article pourtant passionnant. Un commentaire de David Tresan suit l’article et nous aide beaucoup à pénétrer plus en avant dans le sujet.
106Nous n’aurons jamais fini d’explorer la théorie jungienne des archétypes, il y a tant d’approches pour entrer dans le sujet. Les avancés dans les recherches – que ce soit du côté des neurosciences ou du côté des sciences humaines – ouvrent sans cesse de nouvelles perspectives pour explorer l’archétype. Témoins les trois derniers articles de ce numéro. Ritske Rensma se donne comme objectif d’explorer – et de soutenir sa thèse de – si oui ou non Jung était Lamarckien, c’est à dire si Jung croyait, oui ou non, que les traits acquis pouvaient être héréditaires. Ses recherches par rapport à cette question dans toute l’œuvre de Jung sont impressionnantes et ses arguments sont convaincants. A mon avis, la réponse « oui » ou « non » à la question posée n’est pas d’une importance capitale. Par contre, ce qui est fort intéressant dans la discussion tourne autour de l’archétype lui-même, ses origines, sa nature et la dynamique qui en découlent dans la vie psychique de tout un chacun.
107Les deux derniers articles concernent aussi l’archétype, et constituent une sorte de dialogue – très riche et vivant – autour de l’article publié dans le JAP en avril 2012 par Christian Roesler Are archetypes transmitted more by culture than biology ? Questions arising frome conceptualizations of the archetype. Dans son commentaire, François Martin-Vallas prévient contre une définition univoque et trop logique d’archétype, précisant que Jung lui-même en avait proposé de nombreuses, parfois en contradiction les unes avec les autres. Il précise que Jung ne travaillait n’avait encore à sa disposition ni le concept d’« émergence » ni celui de « complexité », notions qui nous donnent la possibilité de considérer autrement les contradictions apparentes dans ses définitions de la notion d’archétype. F. Martin-Vallas propose que ces concepts incitent à mieux tenir compte de toute la complexité de la vie psychique. Christian Roesler répond par un net refus de cette argumentation, et essaie de reformuler sa position en reprenant et réfutant point par point les arguments de F. Martin-Vallas. Oserais-je dire que l’oreille américaine qui est la mienne entend dans cet échange d’importantes différences culturelles dans la manière même d’avancer dans le processus de pensée et de théorisation. Toutefois, l’échange est fort intéressant et il nous encourage et nous aide à continuer à réfléchir aux archétypes.
108L’un des grands mérites du Journal est d’ouvrir de tels échanges, tout comme le propose la RPA [1].
109En septembre 2013, le JAP se félicite du succès de la IXème conférence internationale du Journal of Analytical Psychology qui avait eu lieu à Boston, aux Etats-Unis, au mois d’avril. Commence, avec ce numéro, la publication d’un certain nombre des présentations qui s’y sont entendues. L’équipe éditoriale observe que l’ensemble des articles ici reflète bien le thème de la conférence : Attachment and Inter-subjectivity in the Therapeutic Relationship – Attachement et intersubjectivité dans la relation thérapeutique – en explorant la question de l’attitude analytique, ou plutôt de l’attitude de l’analyste. D’entrée de jeu, deux commentaires cliniques de Michael Fordham, jusqu’ici inédits, sont présentés et commentés en détail par Elizabeth Urban. Elle les situe dans l’évolution du travail clinico-théorique de Fordham et, dans son commentaire, dégage une question fondamentale posée par l’auteur, implicitement dans le premier récit et explicitement dans le second : « Que fait-il, au fond, l’analyste ? »
110Ensuite nous lisons trois articles qui ont fait l’objet de présentations à la conférence du JAP à Boston, de Jean Knox, Warren Colman et Elizabeth Urban. Chaque auteur, à sa façon, explore ce thème de la relation transférentielle, plus particulièrement du côté du contre-transfert et de l’attitude de l’analyste.
111Le dernier article de ce numéro, On the Analysis of Cheating de Barry Miller, est une exploration très intéressante de la ‘tromperie’ comme mécanisme psychologique. D’emblée, l’auteur « cadre » la notion de tromperie, la caractérisant comme intrinsèquement, ou par définition, liée à la sexualité et à l’érotisme. La première partie de l’article nous propose plusieurs idées assez discutables – d’où leur intérêt – par exemple, l’auteur écrit que « la tromperie fait partie de l’expérience de tout un chacun … elle est une dynamique essentielle dans le développement de l’humain », ce qui le conduit vers l’hypothèse que le désinvestissement de la libido par rapport à un objet et son réinvestissement vers un nouvel objet, constituent une « tromperie ». D’où la question qu’il pose : est-ce qu’une mère qui investit libidinalement son nouveau-né ne « trompe » pas son aîné ? L’aîné, dit-il, se sentira « trompé » par cette « infidélité » de la part de sa mère. « Nous nous engageons dans une tromperie lorsque … nous retirons notre libido (d’un objet) et la réinvestit dans un autre objet, voire en nous-mêmes » (p. 533). Ces considérations, comme d’autres, me semblent être parfois presque des généralisations difficilement défendables. Elles sont toutefois très bien « défendues » par la présentation clinique élaborée par l’auteur. Le cas clinique principal ainsi qu’un deuxième cas présenté plus succinctement, explorent en profondeur ce qu’il décrit comme la « nature archétypale » de la tromperie. La discussion du cas expose la manière dont son patient, qui trompe sa femme et ensuite sa compagne, peut être considéré et compris dans un processus d’individuation. B. Miller propose que le patient s’engage dans la tromperie dans un mouvement de séparation où il se débat, et où la tromperie est « utile sinon essentielle comme mécanisme ». Bien entendu, ici nous sommes au cœur d’une considération de l’« attitude de l’analyste », au cœur du transfert-contre-transfert, et au plus loin de toute considération collective ou sociale de la tromperie exposée par l’auteur au début de son article. Je ne suis pas aussi certaine que Barry Miller que la tromperie soit aussi constante dans la vie humaine, mais en tant que psychanalystes, nous pouvons, je crois, dire que nous la rencontrons très – voire extrêmement – fréquemment dans nos cabinets. D’où l’importance et l’intérêt de cet article.
112Leslie de GALBERT
Notes
-
[1]
Voir le forum http://revue-pa.forumactif.org/