Notes
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Plusieurs passages de cet article ont été publiés dans mon livre, Home in the World, Sounds and Symmetries of Belonging, 2010.
1 – De la Filiation à L’Affiliation
1En anglais le mot « filiation » est rarement utilisé en comparaison avec le mot « affiliation », qui indique un lien plus intime et plus personnel qu’en français. « Filiation » (du latin « filius », « enfant ») désigne la relation de parent à enfant. Le mot « affiliation » a plusieurs significations, mais souvent se comprend comme « besoin d’une personne à se sentir impliquée et appartenir à un groupe social » (Wikipedia 2012). Ce n’est que ces dernières années que la filiation est devenue un sujet d’étude pour les anthropologues de langue anglaise qui se sont penchés sur la complexité de la lignée familiale, les droits de succession et les règles d’affiliation concernant l’inclusion ou l’exclusion du groupe. Dans de nombreuses sociétés indigènes, la filiation familiale et l’affiliation collective étaient presque confondues (Scheffler 2001, p.20). Bien sûr, ces traditions sont encore visibles aujourd’hui. Lorsque vous êtes né, vous êtes aussi devenu membre d’une culture, d’une classe sociale et d’une nation. L’objectif principal de ce papier est d’étudier la dynamique reliant la filiation avec l’affiliation – une dynamique qui crée des conflits inévitables concernant l’autonomie et la dépendance.
2Entendue psychologiquement la filiation est une sorte de mi-parcours entre le besoin inné d’attachement et le besoin acquis d’appartenance à un groupe. Il exprime le besoin humain d’appartenir et d’être contenu par un contexte intime, familial, qui renforce le sens d’identité et prépare la personne à sa participation au groupe. Le psychanalyste et observateur d’enfant, Joseph Lichtenberg, décrivant les systèmes innés de motivation, n’utilise pas le mot « filiation », mais il envisage l’affiliation comme une extension de la nécessité de l’attachement, qui se manifeste déjà dans l’attachement à la famille comme groupe unifié (Lichtenberg 1989, p.118).
3Au cours du développement de l’enfant les sentiments de filiation se déplacent sur les traditions socioculturelles qui façonnent l’identité, jusqu’à être consciemment vécus durant la période de latence, comme l’ethno-psychanalyste Mario Erdheim (1993, p.134) le souligne :
Dans la période de latence, l’enfant intériorise une relation à des objets qui est spécifique à son patrimoine ethnique, ce qui est déterminé dans cette période étant la façon dont on se déplace et se comporte, quelle tendance ou quel goût suivre, quel genre de nourriture est dégueulasse et quels enfants avec qui jouer et avec qui ne pas jouer.
5À la différence d’Erdheim, Lichtenberg souligne les aspects positifs de l’appartenance de groupe pendant cette période. Le besoin de plaisir, d’intimité et de partage des sentiments peut s’exprimer dans un destin suffisamment contenant, par exemple dans une équipe ou par l’appartenance à un club (Lichtenberg 1989, p.116). Le besoin d’appartenir à un groupe peut se réaliser avec plus ou moins de gratification. Une femme, qui appartenait à une église, un parti politique et aux ‘Alcooliques Anonymes’ (AA) m’a une fois dit que c’était les ‘AA’ qui était le groupe le plus enrichissant, parce que les membres du groupe partageaient des sentiments plus profonds. L’affiliation ne devient dangereuse que si lui sont adjoints des motifs basés sur la haine, l’exclusion, le bouc émissaire, comme dans certains groupes fondamentalistes. Dans nos sociétés contemporaines toutes sortes de conflits surgissent dès que l’on se retrouve pris dans la tension entre le besoin de relations intimes (tel qu’il s’exprime dans les schémas de filiation) et la nécessité de participer à des groupes sociaux plus larges (telle qu’elle se révèle dans les modes d’affiliation). À chaque étape de transition de la filiation à l’affiliation, il y a des conflits inévitables entre besoin de dépendance et nécessité d’autonomie.
6J’ai été exposé à ce genre de conflit, dans ma jeunesse. Je suis né dans une vieille famille anglo-irlandaise qui, traditionnellement, soutenait la couronne anglaise, et pourtant j’ai appartenu à une terre et un peuple qui n’était décidément pas britannique. Un conflit entre une filiation familiale et une affiliation collective était inévitable. Je l’ai vécu à l’âge de douze ans, quand j’ai été envoyé pendant un an dans une école dirigée par les « durs » « Presentation Brothers » (similaire aux « Christian Brothers » maintenant bien connus pour l’abus des enfants innocents), afin d’apprendre la langue irlandaise. Les jeux habituels des écoliers, pendant la récréation du matin, étaient des bagarres entre les Anglais et les Irlandais. Étant l’un des garçons les moins populaires — mon accent n’était pas typiquement irlandais — j’étais désigné comme membre de « l’armée britannique », qui était inévitablement battue par les autres garçons représentant l’« IRA ».
7Ce n’est que plus tard que j’ai pu construire un pont entre la filiation à une famille qui avait perdu ses privilèges, et dont la parole et les intérêts portaient sur l’hippodrome, les terrains de golf, ou les cocktails mondains, et une affiliation qui dépassait les limites étroites de mon foyer. Je suis reconnaissant à des écrivains et poètes, Yeats, Joyce, Heaney, qui ont retravaillé l’ancien héritage celtique d’Irlande en le replaçant dans le contexte contemporain. L’appartenance ethnique ou nationale se différencie au fur et à mesure que l’on fait la part de ce qui appartient aux parents, à la culture et à la religion.
8Le célèbre intellectuel palestinien Edward Saïd a eut une enfance similaire. Petit, il devait se soumettre à ses parents qui n’avaient de cesse d’imposer à leurs enfants les codes, coutumes et comportements conventionnels. Enfant et jeune homme il se sentait perdu, confus et souvent en proie à un profond sentiment d’insécurité. Il parle de son début de vie comme d’une lutte entre une identité artificielle, imposée par ses parents, et le sentiment d’un moi profond, largement en dormance et rarement accessible, sauf dans les moments de lutte ou d’exclusion (Saïd 2000, p.165). Sa biographie reste un récit émouvant d’un homme qui vivait dans un foyer bien établi à l’extérieur, mais où quelque chose manquait : une terre d’origine d’une nation et de son peuple. Ses parents avaient refoulé la perte de la Palestine en adoptant les normes occidentales, empêchant ainsi leur fils de construire une appartenance à son identité culturelle profondément liée à sa nation et à son peuple.
9Le travail de Saïd fut de rendre consciente son affiliation à sa nation, affiliation refoulée qui subsistait dans la profondeur de son âme. Rien de tel avec Eva Hoffman. En tant que Juive qui avait grandi dans l’après-guerre en Pologne, elle a été exposée à un contexte culturel très libéral. Elle décrit ses relations authentiques avec de nombreux types de personnes et de lieux, des relations créées par son vrai soi et non par une autorité extérieure. L’attitude libérale de sa famille a soutenu son autonomie et l’a encouragée à apprécier les divers peuples et cultures, lui permettant de développer des modèles authentiques d’affiliation. Elle avait conscience que sa filiation en Pologne n’était pas un paradis, mais son expatriation vers le Canada et les Etats-Unis aurait pu le lui faire ressentir ainsi, si elle n’avait pas réussi à intégrer ses premiers souvenirs de filiation polonaise dans le contexte de sa nouvelle vie (Hoffman 1990, p.211).
2 – Filiation et Attachement
10Les origines de la filiation et de l’affiliation sont enracinées dans les fondations profondes de notre âme. Notre besoin inné d’attachement motive la création des structures de nos premiers sentiments de filiation. L’attachement est un système de survie, génétiquement déterminé, dont le développement dépend des relations avec les objets du monde extérieur. Dès les premiers mois de vie, les nourrissons cherchent la proximité de la mère pour être apaisés et protégés de tout danger. Dans les liens d’attachements sécurisants le comportement, les émotions, les perceptions et les sensations corporelles de l’enfant se reflètent dans les expressions des yeux, de la voix et du corps de l’adulte. Si, au début, la dyade parent / enfant est suffisamment harmonieuse, alors les structures et fonctions du cerveau du nourrisson se développent afin que l’esprit puisse apprécier et évaluer les relations affectives, accéder à une résilience intérieure dans l’adversité et, à travers la mémoire, développer un sens de soi stable dans le temps pour finalement créer un récit cohérent sur soi et le monde (Siegel 1999, p.4-5).
11D’un point de vue psychologique, nous trouvons les premières racines de la « filiation » dans quelques très vifs souvenirs d’enfance. Si un attachement sécurisant a été atteint, nous mémorisons un sentiment d’appartenance et de dépendance de parents aimants, dans un monde lui-même vécu comme sûr et sécurisé. Des souvenirs de filiation peuvent nous frapper à un niveau sensoriel : une image, une odeur, un son, ou le goût d’un aliment préféré. Ce ne sont pas simplement des impressions fugaces, mais elles sont intégrées dans des circonstances particulières, qui se répètent, ce qui nous relie à notre histoire familiale et sociale et fournit une base à la formation de notre identité. Christian Von Krockow (1992 pp.8-10) estime que nous n’oublierons jamais notre maison d’enfance, car on l’imagine comme un monde qui est resté le même. Eva Hoffman (1990, pp.5-6) décrit la maison d’enfance perdue dans sa Pologne natale. Elle se souvient du bourdonnement des tramways à Cracovie, et du sentiment que son foyer était un monde où tout est sûr, immuable et prévisible.
12Pour la plupart des gens le sentiment de filiation se nourrit de l’attachement intime pour les parents, les nounous, la famille ou les proches. L’âme a besoin de la filiation et ce besoin révèle une plasticité remarquable, qui s’étend même au-delà d’une personne, famille, clan ou nation. Certaines personnes, par exemple, le trouvent dans l’attachement à un animal préféré. Une femme l’a trouvé dans une écurie. Elle avait un lien plus intense avec son cheval qu’avec ses parents. Il y a des récits de filiation qui ne décrivent ni des personnes, ni des lieux, mais ce par quoi ce sentiment a émergé. Ce peut être un beau morceau de musique, une peinture, une icône, un mythe, un instant de rapport affectif profond. Jung (1973 p.25) décrit cela dans « Ma Vie » quand il raconte son premier souvenir d’enfance : « Je vois le soleil scintiller à travers les feuilles et les fleurs des arbres. Tout est splendide, coloré, magnifique. » Il venait de se réveiller dans sa voiture d’enfant. L’artiste de cabaret bien connu, Georg Kreisler, a affirmé un jour qu’il pouvait bien vivre sans avoir un foyer. Kreisler a vécu dans plusieurs pays, mais il n’a appartenu à aucun d’entre eux. Pour Kreisler son « chez soi » était la langue allemande, la musique et des amis. Certains peuvent dire qu’ils ont cultivé un profond sentiment de filiation par rapport aux ancêtres, avec ceux des êtres chers qui sont morts avant eux ou avec un être divin.
Filiation et Attachement : Les ruptures dans la Cohérence
13Cependant, dès le début de la vie nous rencontrons également des ruptures qui menacent le confort de ce doux refuge. Elles agissent comme catalyseur pour l’autonomie et l’indépendance. Elles font partie d’un développement normal et ne seront pas nuisibles si elles sont reflétées par un environnement empathique. Nous avons déjà l’expérience d’une rupture de sécurité quand nous avons été bannis des eaux utérines réconfortantes. Une autre phase de l’exil peut être vécue dans le processus de sevrage. Elle est suivie par le processus de la « séparation-réunion » de l’enfant, tel que décrit par Margaret Mahler (1985, pp.109-111). Selon elle, l’enfant qui est capable de tolérer la représentation contradictoire de lui-même comme dépendant et indépendant de ceux qui prennent soin de lui, peut consolider tout à la fois son sens de soi et l’image intériorisée de l’autre — formation de la personnalité et permanence de l’objet — au cours de la troisième année de vie. Notre capacité à former des relations matures est un processus qui dépend largement de la tenue d’une tension entre dépendance et autonomie. A ce stade de la vie, nous pouvons dire que « la filiation », qui suppose la constance de l’objet, peut être clairement différenciée de l’instinct d’attachement. Une filiation mature est enracinée dans une dynamique entre dépendance et autonomie.
14Les conflits entre la formation des premiers sentiments d’attachement et la filiation à une famille sont particulièrement évidents dans les cas d’adoption. Les enfants adoptés portent en eux une vie d’exil forcé. Dans la plupart des cas leur soif d’appartenance n’a pu être que partiellement satisfaite.
15Un père de deux enfants adoptés, originaires d’Amérique centrale, m’a dit qu’il ne pouvait pas comprendre pourquoi ses enfants ont toujours été déprimés en hiver. La famille vivait dans les Alpes suisses. Chaque hiver, le paysage était recouvert par une épaisse couche de neige. J’ai suggéré qu’il pourrait les emmener au jardin botanique de Zurich. À notre grande surprise, les enfants ont savouré le climat chaud et humide des grandes serres de ce jardin. Chaque week-end d’hiver, ils pouvaient à peine attendre pour y retourner. Ils n’ont plus été déprimés. Le climat tropical des jardins botaniques doit avoir correspondu à un patrimoine de leurs ancêtres, transmettant un sentiment de filiation construit au décours des innombrables générations qui ont vécu dans les climats tropicaux d’Amérique centrale.
16Dans un autre cas d’adoption, une jeune femme souffrait d’une dépression inexplicable avec de longues périodes de pleurs. Elle était habituellement une personne sociable, joviale et bien intégrée dans la société suisse. J’ai été surpris quand elle m’a raconté certains raptus hautement agressifs et destructeurs, suivis d’une dépression avec un retrait total, rompant tout contact avec les autres. Cela survenait quand il y avait un changement dans sa vie, par exemple la fin d’une relation, ce qui implique généralement un déménagement. Ce ne fut qu’après qu’elle m’ait rapporté un rêve répétitif de son enfance sur « l’autre mère », que nous avons pu commencer à parler longuement de son adoption. Elle avait été séparée de sa mère biologique d’origine latine dés sa naissance, et elle semblait être très heureuse dans sa famille adoptive en Suisse. Elle était convaincue que la dépression n’avait rien à voir avec son adoption. Malheureusement, il n’y avait aucun espoir d’entrer en contact avec ses parents biologiques, malgré des tentatives répétées de le faire. Ses dépressions sont devenues moins fortes, mais seulement après qu’elle ait reconnu et pris la valeur de son tempérament plus sombre, passionné et agressif, comme une « identité sans paroles » qui, jusqu’alors, lui avait été déniée dans sa vie extérieure.
17Son sens d’elle-même ne pouvait plus être uniquement « suisse », mais devait inclure le tempérament d’une culture latine réprimée. Elle ne pouvait plus prendre son identité pour acquise, mais a dû la recréer activement. Son récit de vie a gagné en consistance et continuité par la reconnaissance de ce que Schechter et Bertocci (1990, p.69) appellent « les ruptures de cohérence ». En acceptant ce paradoxe, elle a pu reconnaître non seulement une « ressemblance », mais aussi une « différence » radicale dans ses liens avec sa famille d’adoption. Lentement, elle a appris à tenir la tension entre le besoin de dépendance et le besoin d’autonomie - un monde, dont elle dépendait, était articulé et vrai, et un autre, qui se manifestait dans les rêves et des mouvements passionnels débordants, lui était inconnu et sans parole. Il lui faudra probablement une vie entière pour tenir ces deux mondes dans un équilibre gérable.
18On trouve aussi des ruptures de cohérence (dissonance marquée) dans les schèmes d’attachement insécurisé. Ils émergent entre besoin d’attachement et besoin d’autonomie, et peut compromettre la filiation et l’affiliation, créant de l’instabilité conflictuelle dans les relations, et influençant la structure entière du sentiment d’appartenance avec l’environnement familial, social et culturel (OPD 2001, p.34). Ce fut l’une des principales conclusions d’un projet de recherche allemand, projet commun à différentes écoles de psychodynamique (OPD), qui soutient que les conflits entre autonomie et dépendance sont au cœur de la plupart des problèmes psychologiques. Selon les auteurs de ce projet, un esprit mature doit être flexible, et peut ainsi résoudre les inévitables conflits qui surgissent entre autonomie et dépendance (OPD 2001, p.90).
3 – Filiation et Affiliation
19Les deux vignettes suivantes soulignent l’importance des modèles distinctifs de filiation et d’affiliation. Les conflits non résolus concernant la filiation peut bloquer l’affiliation, comme des rencontres ingérables avec l’affiliation peuvent blesser une filiation authentique.
a – Lorsqu’une filiation déplacée bloque l’affiliation
20Hans avait servi son entreprise pendant de nombreuses années. Il aimait le travail et se sentait profondément affilié avec ses collègues. Un jour, il surprit une conversation entre les riches propriétaires de son cabinet dont il soupçonnait l’intention de le licencier. Il a été rassuré de comprendre que ce n’était pas le cas, mais une dépression s’installa, dont il ne pouvait pas se débarrasser. Après, il s’est plaint d’un poids dans la poitrine. Je lui ai demandé de se concentrer sur cette région. Une image d’une boule rouge est apparue. Il s’en est suivi des conversations entre lui et la boule. Des images du passé sont remontées à la surface. Enfin le souvenir d’un événement particulier est devenu conscient.
21Jeune homme, il est tombé amoureux d’une fille d’une famille riche. Il n’avait pas les moyens suffisants pour subvenir aux besoins de sa compagne et il a été rejeté par sa famille. Cet incident a été un événement très douloureux pour Hans parce que sa famille d’origine possédait autrefois une grande richesse en Europe de l’Est et elle a tout perdu pendant la Seconde Guerre mondiale. Il a effacé et oublié l’incident. Dans la discussion qui a suivi, il est devenu clair que depuis ce temps là, sa croyance en l’amour ainsi que sa confiance en son travail avaient gravement souffert. La boule rouge dans la poitrine contenait son récit de vie. La perte de la richesse et de sa maison familiale, qui contenait beaucoup de traces de la filiation, a été réactivée lorsque la riche famille de sa petite amie l’a renvoyé. Les sentiments intimes de la filiation ont été bloqués et ne pouvaient pas se couler dans une affiliation positive avec les collègues de son cabinet. La découverte du lien entre sa dépression, sa richesse perdue et l’amour rejeté lui a apporté un soulagement. L’affiliation à son entreprise a pris un nouveau sens et il a pu lâcher une attitude vigilante qui toujours prévoyait le pire.
22Une telle rupture de cohérence est évidente dans la vignette suivante qui souligne l’importance des modèles distinctifs de filiation et d’affiliation dans une famille. Elle montre que des expériences d’affiliation difficilement gérables peuvent blesser une filiation authentique.
b – Lorsque l’affiliation remplace la filiation
23Milena, une femme d’Europe de L’Est, a souffert de crises d’angoisse et de manque de concentration (ADD). Un jour, elle a apporté en analyse le rêve suivant qu’elle pensait lié à sa plainte.
J’ai vu une petite poupée debout devant le radiateur de la maison de mes parents, juste sous le robinet de contrôle. Elle portait un châle à la mode russe traditionnelle. Une fuite d’eau du robinet coulait sur sa tête. J’étais anxieuse pour elle. J’ai demandé à mon père d’arrêter l’eau. Peut-être qu’il a fait quelque chose, peut-être qu’il n’a rien fait. Soudain, la poupée est devenue une petite fille. Sa tête s’élargissait de plus en plus. Je me sentais anxieuse et j’ai commencé à pleurer. Je me suis réveillée en pleurant de désespoir.
Associations
25Le rêve renvoie à l’époque où le pays de Milena était sous le contrôle de l’Union soviétique. Le radiateur était dans la maison de ses parents. Parfois, il était si chaud que ça lui faisait mal si elle le touchait. La rêveuse se souvint que le système de chauffage de toute la ville tombait en panne deux ou trois fois par an. La mère de Milena avait une position importante d’enseignante à Moscou. Elle apportait ce genre de poupée à sa fille quand elle revenait de la ville. Milena était heureuse de recevoir ces cadeaux. Maintenant, elle voit ce don comme une compensation pour avoir été placée chez des parents de remplacement ou laissée seule avec son père. Elle a été envahie d’une profonde tristesse en se rappelant la longue absence de sa mère. Milena a décrit son père comme un homme très distant.
Commentaire
26J’ai d’abord pensé que le rêve disait quelque chose de la relation de Milena avec la mère. Le radiateur pourrait symboliser la relation qui pourrait donner de la chaleur, mais avec une fuite, ce qui implique que l’affection de sa mère n’était pas constante. Milena se sentait souvent comme une poupée sans défense ; elle était entièrement dépendante de ses parents, mais aussi abandonnée par eux. Cette interprétation a semblé fonctionner, mais nous sentions tous les deux qu’elle ne rendait pas compte de l’intensité de l’affect du rêve. Pourquoi la tête de la rêveuse devenait-elle de plus en plus grande ?
27N’étant pas en mesure d’avancer plus, j’ai décidé de méditer et de laisser mon esprit vagabonder (attention non dirigée de Freud). Je me suis remémoré un voyage à Moscou, donnant des conférences et passant la nuit avec un professeur d’université. C’était l’automne et je me souviens encore de la météo glaciale. Le système de chauffage de la ville n’était pas allumé. Mon hôte était très en colère contre l’autorité centrale de la ville, seule à décider de la mise en marche du chauffage urbain. Apres cette rêverie j’ai compris les conditions habituelles de chauffage pour la plupart des gens en Europe de l’Est, notamment dans la ville de Milena.
28Sortant de cette rêverie, j’ai dit à la rêveuse : « Le système de chauffage symbolise le contrôle du système par le gouvernement central soviétique. » Ma conjecture a induit une réponse immédiate. Milena s’est souvenue des querelles terribles entre ses parents à propos du parti communiste pendant son enfance. Sa mère était communiste, son père ne l’était pas. À chaque panne du système de chauffage les querelles éclataient. Cela terrifiait Milena. Elle ne pouvait pas comprendre ce que voulaient ses parents. Elle se sentait impuissante, perdait son pouvoir de concentration, et sentait sa tête enfler de plus en plus.
29Une grande partie de l’insécurité de Milena et de ses difficultés de concentration pouvaient maintenant être reliée aux conflits parentaux. Les arguments des parents pour ou contre le système communiste ont pris une intensité émotionnelle qui terrifiait la jeune Milena. Dans de tels moments, un complexe prenait possession de ses parents : la mère défendait le système communiste avec une attitude rigide, le père le détestait. Tous deux perdaient tout sens de la modération et omettaient de prendre soin de leur fille effrayée. Une affiliation politique, qui régissait alors l’Europe de l’Est, se déversait sur la tête de Milena, détruisait son sentiment de filiation, et contrôlait la vie émotionnelle de sa famille. Cela fut particulièrement tragique, au regard du fait que le foyer est le domaine d’Hestia, la déesse grecque qui ne participe jamais à la guerre. Le système soviétique bannit Hestia et la chaleur de la filiation que la déesse du foyer représentait.
4 – Filiation et Affiliation dans le Transfert
30Dans le transfert, nous rencontrons les multiples visages de la filiation qui reflètent la maturation de l’enfant intérieur qui sommeillent dans l’âme du client adulte. Grâce à un processus de filiation, l’analyste peut devenir mère ou père de cet enfant. Le timing du rôle symbolique des parents est crucial : être un miroir comme une mère, différencier et fixer des limites comme un père. Dans cet espace interactif de récits imaginaires et mutuels de « parent-enfant », se trouve impliquée une profonde affinité personnelle et collective. Dans le transfert le client éprouve ce qu’est être partenaire en présence d’un autre. Il s’engage dans un travail de reconstruction de l’image de soi à travers la relation avec l’analyste.
31Ceci, bien sûr, n’est pas facile. Ayant été une fois abandonné, l’enfant intérieur se sent doublement négligé quand l’analyste va en vacances, ou quand un processus est soudainement interrompu car l’heure est finie, ou lorsque l’analyste donne plus d’attention à une autre famille que « l’enfant adopté » dans l’analyse. Une fois, une cliente a été bouleversée de me voir porter une cravate. Elle sentait que toute mon identité avait changé et je n’étais plus le même, « un père tolérant » en qui elle pouvait avoir confiance. J’étais devenu un « directeur de banque suisse », quelqu’un qui veut obtenir son argent, comme la plupart des hommes qu’elle connaissait. J’ai dû approcher le « directeur de banque » d’une manière non défensive, afin de l’aider à comprendre pourquoi une telle figure se constellait. Les projections négatives ne peuvent pas être mises au rebut, et même un « directeur d’une banque suisse » doit avoir le droit de participer à l’espace contenant de l’analyse.
32L’empathie ne peut pas recréer une relation idéale « parent/enfant ». Selon Joseph Lichtenberg (1983, p.226) elle sert principalement comme moyen d’éprouver, comprendre et partager le sens de ces expériences avec le client adulte. Ainsi la dyade est triangulée par le cadre des compétences professionnelles de l’analyste et des normes de ses affiliations collégiales. La relation analytique peut être structurée par des schémas de filiation, mais ces modèles sont intégrés dans le contexte d’une communauté professionnelle d’affiliation.
33Le passage de la filiation à l’affiliation dans le transfert peut devenir particulièrement significatif vers la fin d’une analyse intense. Cela est devenu évident pour moi au travers d’un rêve d’une patiente, qui avait développé un fort transfert envers moi comme « père attentionné et sensible ». Ses sentiments filiaux ont réparé l’abandon, la trahison et la violence dont elle avait souffert avec ses parents. Lorsque vint le temps de mettre fin à l’analyse, elle eut peur. Le rêve suivant lui est venu en aide.
Je me retrouve dans un paysage verdoyant. Sur une colline, je vois une école. Je vois des étudiants entrer dans cette maison et je sais que je suis invitée à entrer aussi. Pour une raison quelconque, je décide de ne pas y aller. Je suis assise sur l’herbe verte du matin pour voir ce qui va arriver. Comme je suis assise là, je peux ressentir de la joie et de la liberté. À la fin de la matinée, je vois que l’instituteur est mon analyste, qui dit maintenant au revoir aux élèves. J’ai de nouveau décidé de ne pas aller à l’école. J’ose faire quelque chose de nouveau et je vais à vélo. Sur mon chemin, je garde un œil sur l’école, mais alors je dois me concentrer pour pédaler en montée et je la perds de vue. Pendant un moment j’ai un sentiment d’insécurité et d’impuissance, mais alors je décide de continuer et je deviens vraiment curieuse de savoir ce qui viendra ensuite. Maintenant je me sens vraiment libre et heureuse. Dans le même temps, je sais que l’école sera toujours là et je peux toujours y retourner si besoin.
35Le rêve reflète un modèle de comportement de l’enfance. Comme nous l’avons vu dans les observations de Margaret Mahler, l’enfant, lors de la séparation d’avec la mère, adopte un modèle de séparation-réunion afin qu’il puisse être sûr que la mère continue d’exister même quand elle n’est plus visible. Ici l’équilibre entre l’autonomie et la dépendance indique une phase préparatoire pour affronter les séparations ultérieures. Le rêve a offert à cette cliente une histoire archétypale qui l’aida à survivre des séparations – probablement une histoire déjà présente dans les premières années de sa vie.
36On peut se demander pourquoi une école ? Peut-être cette image exprime une perception inconsciente de l’analyse comme étant influencée et façonnée par une école, et non simplement une répétition des filiations familiales antérieures. La relation analytique réelle pourrait régresser à la dyade, mais pour l’analyste elle est toujours triangulaire. Les analystes ne doivent pas se retirer dans l’isolement, mais ils doivent maintenir l’affiliation collégiale, ce qui permet à leur travail d’être reflété, critiqué, et soutenu par leurs pairs. Un analyste peut offrir un espace aux sentiments de filiation dans le transfert mais, en lui, ces sentiments sont intégrés dans le cadre d’une affiliation professionnelle. Le rêve a aidé la patiente à prendre conscience de ce niveau de notre relation professionnelle, ainsi que de son besoin d’autonomie, rendant ainsi la fin de l’analyse gérable.
5 – Filiation et Affiliation en dehors de l’Analyse
37J’ai tenté de décrire certaines des tensions qui surgissent quand filiation et affiliation s’entrecroisent. Dans ma propre vie, comme en particulier dans celle des enfants adoptés, les modèles biologiques et psychologiques de l’attachement sont souvent en conflit avec les sentiments de filiation ou d’affiliation qui émergent au décours de l’existence. Il importe toujours de respecter les nécessités de la dépendance et du besoin d’autonomie, afin d’éviter la dissociation de ces forces. Les théoriciens de l’attachement nous alertent sur les dangers des comportements intrusifs des parents qui peuvent induire des modèles relationnels ambivalents. Ces modèles d’insécurités ont tendance à être rigides et inflexibles, empêchant l’autonomie et les liens d’appartenance plus émotionnels avec une personne ou avec un groupe. Le travail attentif sur la filiation dans le transfert et le contre-transfert permet au client de passer d’une relation dyadique à une relation triangulaire - d’une prédominance de filiation à une relation affiliée avec l’analyste.
38On peut espérer qu’une analyse puisse aider le client à créer, enrichir et différencier ses sentiments de filiation dans les amitiés ou les relations intimes en dehors de l’analyse. Des nouvelles relations affiliées pourraient aussi se développer entre « personnes analysées », parfois lâches et sporadiques, parfois dans des rencontres régulières plus profondes ou, dans le cas des candidats à la formation, dans une affiliation collégiale mature. En ce qui concerne le premier cas, j’ai souvent été impressionné par la richesse des liens qui apparaissent entre les personnes analysées. Une amitié ou même un mariage peut être né ou être renouvelé quand les gens découvrent une nouvelle profondeur à leur existence commune. Jung avait espéré que les clubs psychologiques permettraient d’atteindre ces objectifs, en plus de servir l’importance sociale de sa psychologie qui par ailleurs a une tendance à surestimer l’individualité. Il a fondé le premier club à Zürich, mais celui-ci était en grande partie centré sur sa personne. Kenneth Eisold (2001) a écrit au sujet de la rivalité qui est apparue entre ceux qui ont vu la psychologie jungienne principalement comme un programme d’individuation et un développement spirituel et ceux qui avaient besoin d’un Institut pour la formation professionnelle formelle. L’importance des clubs ne doit pas être sous-estimée, mais elle a été éclipsée par les instituts de formation.
39En 2005, l’affiliation collégiale de l’Institut Jung de Zürich a subi une rupture après une longue période de conflits non résolus. L’organisation de cette communauté, initialement créée par Jung était antidémocratique et autoritaire. Jolanda Jacobi l’appela un modèle stalinistique (Bair, p. 532). D’une certaine manière, cela a bien fonctionné comme une monarchie bienveillante, mais est tombé en panne une fois que le conseil d’administration a perdu contact avec la base. Cela a été un choc pour beaucoup, ne pouvant plus s’identifier avec la direction de l’Institut. Ainsi a commencé un long processus de séparation de leur famille professionnelle. Face à l’impuissance à apporter des réformes, une décision mûrit pour mettre en place un deuxième Institut de formation, basé sur des principes démocratiques, qui a conféré un pouvoir de vote aux membres individuels. La crise a effectivement renforcé le sentiment d’appartenance à cette nouvelle communauté.
40Pourquoi est-ce arrivé ? A travers l’œuvre du sociologue Ferdinand Tonnies, et celle de l’analyste Jungien Fred Plaut, on trouve une explication raisonnable pour mieux comprendre l’organisation structurale de l’Institut de Zürich qui a créé une telle affiliation problématique. Tönnies (pp. 2-3), fait la distinction importante entre deux modèles d’affiliation : Celle d’une communauté et celle d’une société. L’organisation d’une communauté est plus ancienne, tribale et découle plus d’affiliations affectives, souvent créées par l’allégeance à une puissante figure charismatique, alors que l’appartenance à une société est plus impersonnelle et publique, fondée sur un contrat qui définit les droits et devoirs de chaque membre.
41Dans l’histoire de la psychologie des profondeurs, Freud et Jung ont créé des communautés d’allégeance fondées sur un ordre de préséance. Les membres du cercle intime de Freud ont choisi de porter un anneau comme signe de fidélité et d’allégeance à leur maître. Selon une collègue, Sonja Marjasch, les disciples de Jung riaient ou tenaient leur pipe comme lui. De la même façon, la prolongation d’une loyauté irréfléchie envers un ancien analyste peut provenir d’un transfert non résolu, et indiquer un lien social dans lequel la filiation a tendance à dominer celle d’affiliation.
42Fred Plaut, s’appuyant sur les travaux de Norbert Elias, a affirmé que l’affiliation mature exige un équilibre entre un « nous identité » et un « Je identité », à savoir entre les identifications filiales avec des collègues ou des groupes dans une communauté (la filiation), et les normes et les idéaux impersonnels d’une société qui délimitent l’espace pour rendre plus conscients les droits et les devoirs d’un individu (affiliation). Il est important que ni l’un ni l’autre de ces pôles ne domine. Ils doivent permettre à chaque individu de définir son identité dans une communauté. “No we-identity no roots, no I-identity no individuality.” (Plaut, 1993, p. 223)
43Au moment du conflit de l’Institut Jung, il semblait qu’il existait un écart implacable entre les deux formes d’affiliation : la structure hiérarchique de la communauté et la structure démocratique d’une société. Mon intention dans cet article est moins de me concentrer sur un Institut particulier que sur l’affiliation comme une structure psychologique interne. Je crois que les trois modèles façonnent activement la vie de nos instituts : filiation au sens étroit, comme dans le cas d’un transfert non résolu ; affiliation dans une communauté qui ressemble symboliquement un modèle antérieur de la filiation d’une famille ; et affiliation avec une société définie par l’appartenance à un groupe régi par des règles impersonnelles. Tous trois correspondent avec la nécessité intérieure d’appartenir à une famille, une communauté et une société. Et lorsqu’une de ces structures est réprimée, comme dans les conflits de pouvoir, ils ont tendance à fonctionner de façon destructrice. Des complexes sont activés, des transferts non résolus émergent, les projections s’épanouissent et la communication se décompose. Au moment du conflit de l’Institut Jung on pouvait entendre les parties adverses, se rejetant les uns les autres avec des termes tels que « anarchistes », « la chorale de l’indigné » ou « la sorcière ». Une appellation collective est toujours un moyen efficace pour rejeter un ennemi.
44Nous avons tous besoin d’un sentiment d’appartenance. Comme notre travail est souvent façonné sur les dyades analytiques, des loyautés anciennes ou nouvelles s’enflamment dans notre vie institutionnelle qui brouille les frontières entre la filiation et l’affiliation. Une loyauté filiale envers un individu ou un groupe ne devrait pas empêcher la loyauté envers le travail de l’organisation dans son ensemble. Afin de résoudre les conflits inévitables, notre collègue, Claire Allphin, suggère l’importance de mettre au point un code éthique et social afin de gérer l’agression de manière constructive, par exemple :
- Parler ouvertement avec ceux dont vous vous méfiez.
- Être prêt à clarifier des informations et confronter ouvertement des problèmes.
- Sélectionner les collègues à élire non par loyauté, mais plutôt sur leur capacité à servir.
6 – Pour conclure
45Je réalise que je n’ai traité que d’une petite partie de ce thème, qui a évidemment une portée sociale beaucoup plus large, comme par exemple en ce qui concerne la migration et l’intégration sociale. Là, les forces de l’autonomie et de la dépendance sont en interaction permanente, parfois sous forme de conflits qui peuvent traverser plusieurs générations. Je terminerai, cependant, avec une référence aux relations de filiation et d’affiliation qui se sont établies parmi les peuples aborigènes d’Australie. Diane Bell, dans son livre, Daughters of the Dreaming (Bell 1983, p.25), décrit la période d’attente nécessaire avant de pouvoir commencer ses recherches sur les secrets tribaux de la femme aborigène. C’est seulement après qu’elle ait été intégrée dans les « relations de peau (skin relations) » – comme mère de A., fille de B, tante de C., cousine de D. – que les femmes ont pu lui parler de leurs mystères tribaux. Elles purent communiquer leurs secrets les plus profonds une fois la parenté établie, à la fois symbolique et réelle.
46Il est peut-être trop simple d’établir un parallèle entre le transfert dans l’analyse et la parenté non-sanguine des peuples aborigènes d’Australie. Cependant, il est possible que la même source archétypale soit activée dans les deux cultures. Transfert dans l’analyse et filiation et affiliation du peuple indigène de l’Australie peuvent pointer sur un besoin fondamental de l’âme humaine. Jung a compris cette source de transfert lorsqu’il a écrit :
47Dans la mesure en effet où le phénomène de transfert n’est encore rien d’autre qu’une projection, il crée tout autant de division que de lien. Mais l’expérience montre que même la dissolution de la projection ne brise pas une certaine forme de lien qui existe dans le transfert, car, derrière lui, il y a un facteur instinctuel de très haute importance, la libido de parenté. (1944, p.95)
48On peut se demander si la tentative d’un analyste d’entrer en relation avec le client dans le cadre du transfert représente une version moderne du modèle de l’âge de pierre ? Nous découvrons dans l’analyse que les gens sont prêts à parler de leurs secrets les plus profonds seulement après qu’une certaine forme d’attachement authentique ait pu être établie. Les femmes autochtones de l’Australie semblent avoir atteint un équilibre mature entre l’intimité des relations de filiation et l’inclusion ou l’exclusion sociale des relations d’affiliation. Aujourd’hui la réalisation d’une société moderne nécessite une étape supplémentaire si l’on veut garantir une égalité qui respecte les différences entre les membres individuels. La souveraineté ne doit pas être la propriété d’un personnage charismatique, mais doit être incluse dans les droits impersonnels démocratiques de chaque membre d’une société. J’espère que les points dont j’ai parlé aujourd’hui peuvent être un indicateur utile pour étudier la dynamique reliant la filiation avec l’affiliation.
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Mots-clés éditeurs : appartenance à un groupe, adoption, transfert, attachement, filiation, affiliation, autonomie, dépendance
Date de mise en ligne : 19/08/2013
https://doi.org/10.3917/rpa.001.0011Notes
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Plusieurs passages de cet article ont été publiés dans mon livre, Home in the World, Sounds and Symmetries of Belonging, 2010.