Notes
-
[1]
Voir Claudie Bernard, Le Passé recomposé : le roman historique du xixe siècle, Paris, Hachette supérieur, 1996.
-
[2]
Le terme de « littérature panoramique » vient de Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, Paris, Payot, 1982 (p. 55-62). Ce rapprochement fait l’objet d’un travail plus récent, en particulier : Nathalie Preiss, Les Physiologies en France au xixe siècle, Mont-de-Marsan, Éditions InterUniversitaires, 1999 ; Ségolène Le Men, « La “littérature panoramique” dans la genèse de La Comédie humaine : Balzac et Les Français peints par eux-mêmes », L’Année balzacienne, 2002, p. 73-100 ; Judith Lyon-Caen, « Le romancier, lecteur du social dans la France de la monarchie de Juillet », Revue d’histoire du xixe siècle, 2002, p. 15–32.
-
[3]
Dominique Massonnaud, Faire vrai. Balzac et l’invention de l’œuvre-monde, Genève, Droz, 2014.
-
[4]
Pour une discussion plus ample de la visée épique des cycles romanesques, voir Thomas Conrad, Poétique des cycles romanesques. De Balzac à Volodine, Paris, Classiques Garnier, à paraître.
-
[5]
Roland Barthes, La Préparation du roman, Nathalie Léger (éd.), Paris, Seuil, 2003, p. 248.
-
[6]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 18-19. L’édition citée est celle de la Pléiade, Pierre-Georges Castex (dir.), 12 vol., Paris, Gallimard, 1976-1981.
-
[7]
Dominique Massonnaud, ouvr. cité, p. 379-417.
-
[8]
Éric Bordas parle d'« assimilation explicitée du particulier vers le général » et d’une « subordination de la doxa à la fiction » (Discours et Détours. Pour une stylistique de l’énonciation romanesque, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1997, p. 206 et suiv.).
-
[9]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 18.
-
[10]
Balzac, Illusions perdues, la Comédie humaine, t. V, p. 460.
-
[11]
Balzac, Préface de la 1re édition des Employés, La Comédie humaine, t. VII, p. 882.
-
[12]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 10.
-
[13]
Balzac, Séraphîta, La Comédie humaine, t. XI, p. 784.
-
[14]
Balzac, Séraphîta, ibid., p. 727.
-
[15]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 11.
-
[16]
Victor Hugo, « Sur Walter Scott. À propos de Quentin Durward », Œuvres complètes. Critique, Paris, Laffont, « Bouquins », 1985, p. 147.
-
[17]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 10.
-
[18]
Très significativement, dès l’Avertissement du Gars, le projet de roman médiéval annoncé par Balzac est mentionné comme étant laissé provisoirement de côté au profit de cette histoire « contemporaine ».
-
[19]
Balzac, préface de la première édition d’Une Fille d’Ève, La Comédie humaine, t. II, p. 264-265.
-
[20]
Toutefois, s’il est vrai que la notion de « travail épique » permet de repenser l’épopée ancienne, elle ne cherche pas à définir l’épopée en tant que telle, par un travail spécifiquement épique qui s’opposerait aux procédures littéraires en général. On ne croira donc pas y trouver une « essence » de l’épopée, et encore moins une catégorie de l’épique qu’on pourrait ensuite retrouver ailleurs. En revanche, abandonner l’équivalence entre épique et caractère non-problématique permet de repérer l’épique dans le roman sans qu’il y soit forcément « dégradé », ironique, « impossible », etc.
-
[21]
Ethel Preston, Recherches sur la technique de Balzac. Le retour systématique des personnages dans La Comédie humaine, Genève-Paris, Slatkine, 1984, p. 31-34. Boris Lyon-Caen distingue les modalités de la « mention » et de la « référenciation » (Balzac et la comédie des signes, Saint-Denis, PUV, 2006, p. 265-267).
-
[22]
Balzac, Le Cabinet des Antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 1008.
-
[23]
Alain, Avec Balzac, p. 13-118 dans Balzac, Paris, Gallimard, 1999, p. 59.
-
[24]
Ibid., p. 58.
-
[25]
Félicien Marceau, Balzac et son monde, Paris, Gallimard, 1955.
-
[26]
Balzac, préface de la 1re édition du Cabinet des Antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 960.
-
[27]
Balzac, préface de l’édition Dumont d’Illusions perdues, La Comédie humaine, t. V, p. 119.
-
[28]
Ces termes viennent de la fameuse lettre du 26 octobre 1834 à Mme Hanska : « Aussi, dans les Études de mœurs sont les individualités typisées ; dans les Études philosophiques sont les types individualisés. » (Lettres à madame Hanska, Roger Pierrot (éd.), Paris, Laffont, 1990, t. I, p. 204). Au lieu d’opposer le type et l’individu, Balzac préfère souligner le processus qui va d’un pôle à l’autre. Les études les plus récentes distinguent à juste titre la typisation de la simple abstraction généralisante : c’est une concentration de traits singuliers saillants (voir Jacques Neefs, « Gestes, tournures, postures », p. 159-167 dans Balzac, L’Aventure analytique, Claire Barel-Moisan et Christelle Couleau (dir.), Saint-Cyr-sur-Loire, C. Pirot, 2009). Le type combine donc généralité et singularité, au point de pouvoir désigner un individu unique aussi bien qu’une catégorie générale (voir Nathalie Preiss, ouvr. cité, p. 59-60).
-
[29]
Nicole Mozet, Introduction au Cabinet des antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 947.
-
[30]
Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, La Comédie humaine, t. VI, p. 495.
-
[31]
Boris Lyon-Caen, ouvr. cité, p. 266.
-
[32]
Balzac, César Birotteau, La Comédie humaine, t. VI, p. 221.
-
[33]
Ibid., p. 58.
-
[34]
Ibid., p. 153.
-
[35]
Ibid., p. 210.
-
[36]
Ibid.
-
[37]
Ibid., p. 241.
-
[38]
Ibid., p. 81.
-
[39]
31 fois d’après Fernand Lotte (« Le “retour des personnages” dans La Comédie humaine », L’Année balzacienne, 1961, p. 234).
-
[40]
Les « vainqueurs » du retour des personnages, en nombre d’apparitions (indicateur certes assez superficiel des modalités de leur retour) ne sont pas loin d’être aussi les vainqueurs de La Comédie humaine, pour le meilleur et pour le pire : Nucingen revient 31 fois, Bianchon 29, de Marsay 27, Rastignac 25 (voir Fernand Lotte, art. cité).
-
[41]
Balzac, Ursule Mirouët, La Comédie humaine, t. III, p. 783.
-
[42]
Alain, ouvr. cité, p. 81.
-
[43]
Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, La Comédie humaine, t. VI, p. 851.
-
[44]
Ibid., p. 651-652.
-
[45]
Balzac, Le Contrat de mariage, La Comédie humaine, t. III, p. 580.
-
[46]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 19.
-
[47]
Aristote, Poétique, trad. J. Hardy, Paris, Gallimard, 1996, 1456a, p. 113
-
[48]
Ibid., 1450b-1451a, p. 91.
1 La vocation totalisante de La Comédie humaine n’est pas une ambition isolée. La critique, en particulier les dernières années, a bien montré qu’elle se rattache à plusieurs traditions, littéraires ou scientifiques (écriture de l’histoire [1], « littérature panoramique [2] », histoire naturelle, genre des mémoires [3], etc.) qui ont toutes en commun de proposer une synthèse de l’hétérogène dans le cadre de projets d’accumulation et de mise en ordre des faits et des idées. La Comédie humaine s’inscrit de ce fait dans plusieurs lignées d’ensembles « sériels », « cycliques », à parution échelonnée, etc.
2 On s’intéresse ici à deux de ces modèles, ou plutôt à deux visées de ces modèles, qui définissent la forme de La Comédie humaine. En tant qu’ensemble romanesque, celle-ci s’inscrit au croisement de deux paradigmes : celui d’une somme de savoirs, renvoyant à l’activité cognitive du lecteur, et celui d’un cycle épique, invoquant l’unité concrète du monde qu’il représente.
3 Pour autant, l’articulation de ces deux modèles ne va pas de soi. Le modèle encyclopédique renvoie à la sphère discursive et à une mise en texte des savoirs ; le modèle épique renvoie à la fiction, et concerne la mise en contact des récits de La Comédie humaine par des phénomènes de transfictionnalité qui instaurent un univers fictionnel unique, où s’inscrit une action collective de la société [4]. L’interférence de ces deux modèles pourrait être repérée à tous les niveaux de l’écriture. On s’intéressera plus particulièrement au traitement du personnage selon deux modalités divergentes et simultanées : d’un côté, l’élaboration du personnage comme type, selon une visée encyclopédique ; de l’autre, sa constitution en tant que personnage reparaissant, assurant l’unité épique du cycle.
L’encyclopédie des discours et l’épopée des récits
4 Barthes range La Comédie humaine dans le fantasme du « Livre-Somme », compris comme « somme de savoirs : encyclopédie transcendée par un sens qu’on donne au monde [5] ». On peut en effet considérer La Comédie humaine comme une accumulation encyclopédique de connaissances, de faits, d’idées, de discours hétérogènes se renvoyant les uns aux autres. Balzac assume lui-même dans l’Avant-propos à La Comédie humaine ce projet sous le nom d'« histoire des mœurs », se faisant le « peintre […] des types humains, le conteur des drames de la vie intime, l’archéologue du mobilier social, le nomenclateur des professions, l’enregistreur du bien et du mal », et affirmant :
J’ai tâché de donner une idée des différentes contrées de notre beau pays. Mon ouvrage a sa géographie comme il a sa généalogie et ses familles, ses lieux et ses choses, ses personnes et ses faits ; comme il a son armorial, ses nobles et ses bourgeois, ses artisans et ses paysans, ses politiques et ses dandies, son armée, tout son monde enfin [6]!
6 Le modèle de l’unité de la Comédie humaine, en ce sens, est encyclopédique, c’est-à-dire qu’il se rattache aux grands discours de savoir disponibles, à l’époque de Balzac, pour ordonner, classer, penser le réel. La critique, tout particulièrement dans les dernières années, s’est attachée à repérer ces grands modèles discursifs, qui échappent à l’histoire littéraire traditionnelle, soit qu’ils dépendent du domaine habituellement réservé à l’histoire des sciences, soit qu’ils soient rattachés à la sphère « infra-littéraire » du journalisme et de la « littérature industrielle ». C’est le cas de l’histoire naturelle, dont Balzac se réclame explicitement, à travers les figures tutélaires de Buffon, Cuvier, et Geoffroy Saint-Hilaire, et qui n’est pas une simple caution de son œuvre romanesque mais un modèle sérieux de son entreprise [7]. C’est aussi le cas de la littérature panoramique : les « physiologies » sont un paradigme de l’écriture « analytique » de Balzac, qui mêle observation, classification et humour.
7 L’unité de La Comédie humaine, envisagée sous cet angle, est d’ordre cognitif. La fiction romanesque se met au service d’une strate discursive [8]. Le type est l’expression la plus visible de cette visée encyclopédique. Le terme revient quatre fois dans l’Avant-propos, et détermine apparemment l’ensemble de la démarche des Études de mœurs :
Ce n’était pas une petite tâche que de peindre les deux ou trois mille figures saillantes d’une époque, car telle est, en définitif, la somme des types que présente chaque génération et que la Comédie Humaine comportera [9].
9 Parallèlement à ce modèle encyclopédique, La Comédie humaine se rattache à une autre tradition, celle de l’épopée. L’épopée, caractérisée en effet par son ampleur et son action collective, est aussi un paradigme de totalisation, de synthèse de l’hétérogène. Il arrive à Balzac de capter la légitimité culturelle de l’épopée au profit de ses romans, mais toujours en y ajoutant une nuance de dérision : le roman est selon Blondet dans Illusions perdues une « épopée amusante [10] » ; Rabelais, modèle crucial de Balzac, est l’auteur d’une « épopée satirique [11] ». Même s’il loue Walter Scott d’avoir inclus dans le roman « le merveilleux et le vrai, ces éléments de l’épopée [12] », c’est plutôt au niveau de l’ensemble de La Comédie humaine que cette comparaison garde toute sa force.
10 Elle est ainsi sous-jacente à la métaphore architecturale qu’emploie parfois Balzac à propos de La Comédie humaine, en l’associant au poème épique :
Le poème de Dante Alighieri fait à peine l’effet d’un point, à qui veut se plonger dans les innombrables versets à l’aide desquels Swedenborg a rendu palpables les mondes célestes, comme Beethoven a bâti ses palais d’harmonie avec des milliers de notes, comme les architectes ont édifié leurs cathédrales avec des milliers de pierres [13].
12 Comme on le voit, l’ambition épique est liée avant tout à une évaluation quantitative : l’épique est du côté du sublime et de l’élévation, mais aussi des « innombrables versets », des « milliers de notes », et enfin des « milliers de pierres » de la construction monumentale. Dans la dédicace de Séraphîta, Balzac évalue son œuvre à l’aune du poème épique :
Madame, voici l’œuvre que vous m’avez demandée […]. Ne m’avez-vous pas ordonné cette lutte, semblable à celle de Jacob, en me disant que le plus imparfait dessin de cette figure par vous rêvée, comme elle le fut par moi dès l’enfance, serait encore pour vous quelque chose ? Le voici donc, ce quelque chose. Pourquoi cette œuvre ne peut-elle appartenir exclusivement à ces nobles esprits préservés, comme vous l’êtes, des petitesses mondaines par la solitude ? Ceux-là sauraient y imprimer la mélodieuse mesure qui manque et qui en aurait fait entre les mains d’un de nos poètes la glorieuse épopée que la France attend encore. Ceux-là l’accepteront de moi comme une de ces balustrades sculptées par quelque artiste plein de foi, et sur lesquelles les pèlerins s’appuient pour méditer la fin de l’homme en contemplant le chœur d’une belle église [14].
14 Séraphîta n’est certes pas la « glorieuse épopée » attendue, indique Balzac, mais un « quelque chose » indéterminé, auquel il manque en tout cas la « mélodieuse mesure » du vers. L’indétermination sauve en un sens la visée épique : celle-ci est moins disqualifiée que suspendue. La métaphore de la « balustrade » à la fin de la dédicace, ramène en effet l’image de la grande unité architecturale, avec d’autant plus de force qu’elle dénie au roman toute autonomie : une « balustrade », architecturalement, n’est pas autonome, et suppose la totalité où elle s’insère et qu’elle permet de contempler, la « belle église » dont elle fait partie. C’est alors La Comédie humaine elle-même qui est désignée indirectement comme une épopée en chantier.
15 On sait que Balzac a envisagé très tôt une Histoire de France pittoresque inspirée de Scott. Cet objectif est encore indiqué dans l’Avant-propos de 1842 même s’il ne correspond plus à l’œuvre finalement écrite : « relier ses compositions l’une à l’autre de manière à coordonner une histoire complète, dont chaque chapitre eût été un roman, et chaque roman une époque [15] ». L’héritage scottien, surtout réinterprété dans le sens d’une vaste histoire de France unifiée, est bel et bien épique. C’est ainsi que Hugo qualifiait d’ailleurs en 1823 les romans de Scott : « les romans épiques de Scott [sont] comme une transition de la littérature actuelle aux romans grandioses, aux grandes épopées en vers ou en prose que notre ère poétique nous promet et nous donnera [16] ». Balzac ne dit pas autre chose lorsqu’il fait de Scott un « trouveur (trouvère) moderne » qui donne au roman « une allure gigantesque [17] ».
16 Que ce projet historique « chronologique » (un livre par époque) soit finalement abandonné ne signifie pas l’abandon de la dimension épique. C’est elle qui explique le cadre essentiellement national privilégié par Balzac : l’histoire naturelle devient histoire d’une nation. Centrée sur la France, La Comédie humaine peine à sortir de ses frontières : l’avortement des Scènes de la vie militaire, censées montrer la France « se portant à l’étranger », en est le symptôme le plus clair. Peu de récits se passent dans un pays étranger sans que celui-ci ne soit déréalisé ou fantasmé. La visée épique se tourne en revanche vers le présent [18], avec une conséquence majeure sur l’organisation de l’œuvre :
Il n’y a rien qui soit d’un bloc en ce monde, tout y est mosaïque. Vous ne pouvez raconter chronologiquement que l’histoire du temps passé, système inapplicable à un présent qui marche. L’auteur a devant lui pour modèle le dix-neuvième siècle, modèle extrêmement remuant et difficile à faire tenir en place [19].
18 En passant du « passé absolu » des règnes anciens au « présent qui marche », d’une histoire orientée vers une fin connue à la confusion problématique de l’époque contemporaine, Balzac ne renonce-t-il pas à l’épique ? Au contraire, Balzac est peut-être au plus près de l’ambition des épopées anciennes. Le travail de Florence Goyet a bien montré que l’épopée ancienne n’est pas la célébration univoque d’un ordre social consensuel, mais une tentative de « penser sans concepts » des situations de chaos politique, où un ordre ancien est mort et les valeurs nouvelles encore à naître. Dans cette perspective, il est impossible de faire de l’épique le domaine du non-problématique. Et l’on pourrait alors être tenté de parler d’un « travail épique » de La Comédie humaine, œuvre située précisément dans le moment de crise et d’indécision politique ouvert par 1789 [20].
Listes, séries et cercles
19 Ces deux modèles restent concurrents, non seulement au niveau du projet global de La Comédie humaine, mais aussi au niveau des personnages, et même de procédés d’écriture tout à fait localisés. On connaît le procédé propre à Balzac qui consiste à passer en revue ses personnages reparaissants, sous des prétextes et des modalités diverses [21]. Le retour des personnages y est clairement employé dans une intention « typisante », comme on le voit dans cet exemple tiré du Cabinet des Antiques, énumérant les jeunes gens rencontrés par Victurnien d’Esgrignon à son arrivée à Paris :
Pour son malheur, il tomba dans le monde des roués Parisiens, des de Marsay, des Ronquerolles, des Maxime de Trailles, des des Lupeaulx, des Rastignac, des Vandenesse, des Ajuda-Pinto, des Beaudenord, et des Manerville [22].
21 Les personnages se rassemblent ici en fonction de leur similarité. Ils forment une série qui vaut moins par les éléments individuels que par la figure composite qui en émerge : le type du « roué Parisien », commodément nommé ici, mais que le lecteur de La Comédie humaine aurait pu inférer des exemples rassemblés ici, à partir des traits de ces personnages : jeunes hommes, élégants, ambitieux, sans scrupule. Chaque individu apparaît comme une variation sur le type, une inflexion singulière d’une fonction générale (et en cela, à son tour, « typique »). La série de noms décline ainsi les « variétés biologiques d’un type social [23] » :
Il me semble que Balzac a conçu ses héros en masse. Par exemple de Marsay tout seul ne pouvait être inventé, mais bien dans une série où il y a d’Arthez, de Marsay, Rastignac, Rubempré, Z. Marcas […]. Que signifient ces types alignés, sinon une fonction de société ? Comme le naturaliste aligne les canards ou les pinsons ; alors on ne s’étonne d’aucun ; la raison d’être de chacun est qu’il achève les autres [24].
23 Aussi l’un des effets majeurs du procédé est de susciter chez le lecteur la volonté de classement. Félicien Marceau répartit le « monde » de Balzac en séries de types : « les lions », « les femmes », « les jeunes filles », etc [25]. Il suit en cela les suggestions de Balzac, qui recommande au lecteur de confronter les types similaires :
Le comte d’Esgrignon est la contrepartie de Rastignac, autre type du jeune homme de province, mais adroit, hardi, qui réussit là où le premier succombe [26].
25 Ailleurs, il fait remarquer « la superposition du caractère de Rastignac qui réussit à celui de Lucien qui succombe [27] ». La lecture devient une activité de comparaison, c’est-à-dire une recherche des ressemblances (qui constituent le type) et des différences (qui le déclinent). Le type est ce va-et-vient entre généralité et particularité : le lecteur situe les personnages le long d’un axe paradigmatique, depuis les « types individualisés » jusqu’aux « individualités typisées [28] ». Il s’agit bien de reconstituer, au-delà de la fiction, un ordre discursif et classificatoire. « Cette technique de différenciation des individus à l’intérieur d’une même catégorie », écrit Nicole Mozet, « est peut-être, plus encore que la réapparition des personnages, le procédé de base de La Comédie humaine [29] ».
26 Mais considérons à présent une autre liste, dont l’effet est assez différent. C’est encore un dîner :
La baronne [de Nucingen] invita donc l’illustre Desplein à dîner pour pouvoir faire une consultation malgré le malade, car Nucingen disait se porter à merveille. Keller, Rastignac, de Marsay, du Tillet […] furent priés à ce dîner, ainsi que le comte de Gondreville, beau-père de François Keller, le chevalier d’Espard, des Lupeaulx, le docteur Bianchon, celui de ses élèves que Desplein aimait le plus, Beaudenord et sa femme, le comte et la comtesse de Montcornet, Blondet, mademoiselle des Touches et Conti ; puis enfin Lucien de Rubempré pour qui Rastignac avait, depuis cinq ans, conçu la plus vive amitié [30].
28 Cette fois, la liste n’affiche pas une homogénéité ni une ressemblance : il ne s’agit pas d’une « série » de types similaires. Elle rassemble deux médecins (Desplein et son élève Bianchon), trois banquiers (Nucingen, Keller, du Tillet), cinq « lions » (Rastignac, de Marsay, Rubempré, des Lupeaulx, Beaudenord), des artistes et des littérateurs (Blondet, Félicité des Touches, Conti), et la noblesse d’Empire (le glorieux général de Montcornet ; l’opportuniste Gondreville). Le fonctionnement des personnages reparaissants ne constitue pas ici de type cohérent.
29 Il n’empêche que cette liste signifie. S’il n’est pas familier de l’univers balzacien, le lecteur se contentera d’y voir une miniature du tout-Paris, ce qui est suffisant. Le lecteur balzacien y verra des ouvertures sur d’autres romans, des éclats mémoriels issus de Béatrix, du Père Goriot, de César Birotteau, d’Une ténébreuse affaire, etc. La liste est alors l’occasion, non plus d’un parcours paradigmatique dans un espace discursif de comparaison et de variation, mais d’un parcours syntagmatique à travers l’espace fictionnel des récits de La Comédie humaine, retracés à grands traits par la mémoire. Ce lecteur pourra du même coup s’interroger sur la réunion de ces personnages.
30 Le mélange de ces invités est plausible, mais s’en apercevoir exige un travail de déchiffrement, tout aussi actif que l’était la comparaison des types. La présence des banquiers chez le banquier Nucingen est attendue, mais le reste ? C’est Keller qui amène son beau-père Gondreville ; c’est Desplein qui justifie la présence de Bianchon, qui est d’ailleurs l’ami de Rastignac (voir Le Père Goriot, Étude de femme, L’Interdiction) ; Rastignac lui-même peut être justifié par Bianchon mais surtout par Delphine de Nucingen, sa maîtresse (depuis Le Père Goriot), comme elle l’a été de de Marsay. C’est lui qui amène Rubempré. Blondet a de son côté une liaison du même genre avec Mme de Montcornet. Félicité des Touches est la maîtresse de Conti. La présence de Beaudenord, des Lupeaulx, Conti, sans être immédiatement perceptible, peut faire écho à un dîner d’Illusions perdues où ils sont déjà aux côtés de Nucingen, Rastignac et Blondet (Illusions perdues, V, 454). Quoi qu’il en soit, la liste n’est pas ici une « série » de types mais un « cercle » d’alliés, rattachés les uns aux autres par des relations d’affaires, d’amitié, ou d’amour. Une liste de ce genre est, pour qui s’y attarde, un « concentré de narrativité [31] ». Ces personnages tiennent les uns aux autres par leur contiguïté sociale et narrative : par métonymie, si l’on veut, plutôt que par métaphore. Leur énumération met en évidence leur appartenance à un même espace fictif : en montrant concrètement l’interconnexion des personnages et en poussant le lecteur à parcourir mentalement une partie du réseau de La Comédie humaine, elle manifeste momentanément l’existence d’une entité immatérielle : la société. Le retour des personnages imprègne ainsi le roman d’une dimension collective, proprement épique.
31 Série ou cercle, encyclopédie ou épopée, ces deux dimensions sont en fait toujours peu ou prou présentes dans les listes de La Comédie humaine. Telle réception chez les Grandlieu dans Splendeurs et misères des courtisanes, où s’assemblent « les Grandlieu, les Navarreins, les Lenoncourt » (trois familles ducales) et « la jolie baronne de Macumer (née Chaulieu), la duchesse de Maufrigneuse, madame d’Espard, madame de Camps, mademoiselle des Touches, alliée aux Grandlieu qui sont de Bretagne », décline le type de la « noblesse du faubourg Saint-Germain ». Mais à un second niveau, l’homogénéité même de la liste nous montre déjà plus qu’un type social : soudée par les alliances matrimoniales que le texte tient à indiquer, cette noblesse forme un cercle social fermé impénétrable, un bloc compact faisant obstacle aux ambitions de Lucien. Elle est animée d’une volonté collective : résister aux intrusions extérieures, conserver son pouvoir. En quelques lignes, un arrière-plan épique se dessine derrière ce salon : l’antagonisme entre les forces sociales à la veille de 1830.
Grandeur et ampleur
32 Le retour des personnages, on le voit, n’est pas de même nature que la répétition (et la variation) des types. Le personnage reparaissant est une force active dans la fiction ; d’où la dimension épique du procédé.
33 Le rôle de Nucingen en tant que type du banquier illustre bien cette dimension épique du retour des personnages, malgré le statut certes peu héroïque du personnage. Comme toujours, la position de Nucingen est précisée par son insertion dans une série d’autres banquiers reparaissants. Nucingen est le type du banquier, et il est aussi un type de banquier parmi d’autres (du Tillet, les frères Keller, l’honnête Mongenot, le moins prestigieux Palma, etc.). Du Tillet le présente comme « le prince de la haute banque, car les Keller ne sont que des pygmées auprès du baron de Nucingen [32] ». Cette comparaison aux autres types produit ici un effet de grandissement épique : Nucingen devient un « prince » et un géant, par rapport aux « pygmées » qui l’entourent. La série des types devient une hiérarchie des puissances.
34 « Il eût été Law, s’il n’était pas Nucingen », ajoute du Tillet pour faire bonne mesure. Il est vrai que Balzac n’hésite pas à jouer du grandissement épique en proposant de tels rapprochements avec des personnages historiques ou des héros épiques. La tension vers l’épique n’exclut pas la retombée ironique : c’est le cas pour les allusions à Napoléon multipliées dans César Birotteau (« César eut l’honneur de lutter contre Napoléon sur les marches de Saint-Roch [33] »). En plus de Birotteau lui-même, dont le prénom est tout un programme impérial, Gaudissart a « un geste digne de Napoléon, son idole [34] » et François Keller jette à Birotteau « un regard qui lui traversa la tête, un regard napoléonien [35] ». Mais ces rapprochements sont toujours réversibles dans le rire : « L’imitation du regard de Napoléon était un léger ridicule que se permettaient alors quelques parvenus qui n’ont même pas été le billon de leur empereur [36]. »
35 Remise ainsi dans son contexte, la mention du « grand Nucingen, le Napoléon de la finance [37] », après cette série d’allusions très calculées, perd sa transparence. Faut-il y voir un grandissement épique, ou un autre trait ironique ? Difficile en définitive de savoir si ces comparaisons grandissent ou rapetissent leur comparé… Ou doit-on comprendre que contrairement à tous ces faux Napoléon, Nucingen, qui pendant tout le roman est loin au-dessus de la mêlée, est bel et bien le successeur de l’empereur ? Après tout, le narrateur semble bel et bien remotiver la comparaison entre Birotteau et Napoléon par un véritable projet d’épopée bourgeoise :
César Birotteau, qui devait se considérer comme étant à l’apogée de sa fortune, prenait ce temps d’arrêt comme un nouveau point de départ. Il ne savait pas […] ce principe qui doit dominer la politique des nations aussi bien que celle des particuliers : Quand l’effet produit n’est plus en rapport direct ni en proportion égale avec sa cause, la désorganisation commence […]. Les plus grands événements se résument dans une idée. Troie et Napoléon ne sont que des poèmes. Puisse cette histoire être le poème des vicissitudes bourgeoises auxquelles nulle voix n’a songé, tant elles semblent dénuées de grandeur, tandis qu’elles sont au même titre immenses : il ne s’agit pas d’un seul homme ici, mais de tout un peuple de douleurs [38].
37 La grandeur épique de Nucingen est en tout cas confirmée, par son mode d’insertion dans le réseau des personnages de La Comédie humaine, plus que par ces comparaisons ambiguës. Nucingen présente en effet la particularité d’être le personnage le plus reparaissant (en nombre d’occurrences) de La Comédie humaine [39]. On ne saurait sous-estimer l’effet de cette dimension quantitative du retour de personnages. Le nombre de ses apparitions fait de Nucingen un personnage gigantesque. Non pas certes par ses qualités individuelles, qui ne sont exceptionnelles que dans un domaine spécialisé, mais par son omniprésence ; non pas par la grandeur de sa personnalité, mais par l’ampleur de son action. Omniprésent, quoique le plus souvent en tant que personnage d’arrière-plan, Nucingen agit sur l’ensemble de l’univers de La Comédie humaine. On voit ici ce qui distingue le type récurrent (série de plusieurs personnages similaires) et le personnage reparaissant (reprise d’un personnage identique) : si la banque est aussi bien représentée par du Tillet, les Keller, ou par Nucingen, le pouvoir de la banque, lui, c’est-à-dire sa concentration, ne peut précisément être représenté que par l’omniprésent Nucingen, devenu l’incarnation de l’argent roi. Il en va de même pour Rastignac, dont on peut s’étonner qu’il ne fasse pas l’objet d’une suite, après le fameux défi du Père Goriot. Mais le succès de Rastignac se mesure précisément à la dispersion de sa présence sur toute la surface de la Comédie humaine [40], qui représente exactement l’omniprésence sociale de celui qui a « réussi ».
38 Ce retour-dispersion est une caractéristique du procédé balzacien, qui ne donne que rarement le devant de la scène au même personnage : le personnage principal d’un roman devient personnage secondaire dans les autres.
39 Il s’agit dans ces réapparitions discrètes d’arrière-plan de faire sentir, autour de chaque destin individuel, la présence des autres destins : les romans individuels font tous signe vers un mouvement historique commun, vers leur appartenance commune à une même « toile humaine [41] ». Cette interdépendance des personnages balzaciens est un procédé épique, qui, à un niveau plus fondamental que les comparaisons épiques plus ou moins ironiques, matérialise ce qu’Alain appelle la « présence cosmique » de l’univers balzacien :
L’événement est toujours événement, c’est-à-dire forme enlacée ou accrochée à d’autres formes et à toutes. D’où cette présence cosmique, qui solidifie les moindres nouvelles. […] Remarquez que nos romans les plus étendus grandissent à partir d’un centre, et prolifèrent comme des familles ; au lieu que les personnages balzaciens même accessoires existent déjà ; leur esquisse est comme la couverture d’un roman déjà existant ; c’est la masse du monde qui les pousse [42].
Le monstre épique
41 La classification des Études de mœurs en six groupes de Scènes est pensée sur le modèle d’une classification d’histoire naturelle, les trois mille « types » de la société contemporaine prenant place dans des « galeries » d’exposition. Le retour des personnages fait un peu vaciller cette image – ne serait-ce que parce que Balzac n’y range pas directement des personnages, mais bel et bien des romans, qui mettent en scène d’innombrables personnages. Les « divisions si naturelles » des Études de mœurs sont donc, par la force des choses, extrêmement poreuses. Le meilleur exemple est sans doute Vautrin, que Balzac compare dans Splendeurs et misères des courtisanes à « une espèce de colonne vertébrale qui, par son horrible influence, relie pour ainsi dire Le Père Goriot à Illusions perdues, et Illusions perdues à cette Étude [43] ». Au lieu que Vautrin soit une « espèce sociale » épinglée dans le tableau du naturaliste à une place fixée, il devient une « colonne vertébrale » qui traverse toute la classification : les Scènes de la vie privée (Le Père Goriot), les Scènes de la vie de province (Illusions perdues), les Scènes de la vie parisienne (Splendeurs et misères des courtisanes). Ainsi, en même temps que les catégories classent le vivant, le vivant anime les catégories, les soude les unes aux autres en un monstrueux organisme.
42 On retrouve la même image monstrueuse lorsque de Marsay, autre « monstre » de La Comédie humaine, présente à Paul de Manerville le réseau de ses influences politiques à la fin du Contrat de mariage :
Voici Ronquerolles ministre d’État et du conseil privé. Martial de La Roche-Hugon est ambassadeur, il nous apporte en dot le maréchal duc de Carigliano et tout le croupion de l’Empire qui s’est soudé si bêtement à l’échine de la Restauration. Serizy mène le conseil d’État où il est indispensable. Grandville tient la magistrature à laquelle appartiennent ses deux fils ; les Grandlieu sont admirablement bien en cour ; Féraud est l’âme de la coterie Gondreville, bas intrigants qui sont toujours en haut, je ne sais pourquoi. Appuyés ainsi, qu’avons-nous à craindre ? Nous avons un pied dans toutes les capitales, un œil dans tous les cabinets, et nous enveloppons l’administration sans qu’elle s’en doute [44].
44 Les personnages forment un grand organisme monstrueux au service des ambitions de de Marsay : chimère qui réunit « l’échine de la restauration », le « croupion de l’empire », « un pied dans toutes les capitales, un œil dans tous les cabinets », sorte de serpent géant qui « envelopp[e] l’administration ». Cette image est en somme la conclusion politique du roman, qui multipliait les allusions à demi ironiques (mais à demi seulement) à l’univers épique. L’affrontement des deux notaires Mathias et Solonet, « Achille et Nestor [45] », lors de la négociation du contrat de mariage symbolisait en effet l’affrontement social entre les forces de dispersion et les forces de concentration.
45 C’est que les Études de mœurs ne sont pas une collection de drames individuels mais un « drame social [46] ».
47 On retrouve dans ces images l’hésitation d’Aristote devant l’épopée, cherchant d’un côté à la penser par référence à la tragédie dont elle est censée partager l’unité narrative, et admettant de l’autre que sa longueur brise plus ou moins radicalement cette même unité : « un ensemble épique – j’entends par là un ensemble de fables multiples [47] ». L’étendue épique pose problème et tend vers le monstrueux :
La beauté réside dans l’étendue et dans l’ordre, et c’est pour cela qu’un bel animal ne peut être ni extrêmement petit (car la vue est confuse quand elle ne dure qu’un moment presque imperceptible), ni extrêmement grand (car dans ce cas on ne l’embrasse pas du regard, mais au contraire l’unité et la totalité échappent à la vue du spectateur ; qu’on imagine par exemple un animal qui aurait des milliers de stades de longueur…) […] de même pour les fables il faut une certaine étendue, telle cependant que la mémoire puisse aisément la saisir [48].
49 L’œuvre trop étendue est un monstre esthétique, sorte de serpent long de « milliers de stades ». Sans doute parce que sa « colonne vertébrale » est démesurément étendue sur plusieurs histoires, comme l’est celle de La Comédie humaine.
Notes
-
[1]
Voir Claudie Bernard, Le Passé recomposé : le roman historique du xixe siècle, Paris, Hachette supérieur, 1996.
-
[2]
Le terme de « littérature panoramique » vient de Walter Benjamin, Charles Baudelaire. Un poète lyrique à l’apogée du capitalisme, Paris, Payot, 1982 (p. 55-62). Ce rapprochement fait l’objet d’un travail plus récent, en particulier : Nathalie Preiss, Les Physiologies en France au xixe siècle, Mont-de-Marsan, Éditions InterUniversitaires, 1999 ; Ségolène Le Men, « La “littérature panoramique” dans la genèse de La Comédie humaine : Balzac et Les Français peints par eux-mêmes », L’Année balzacienne, 2002, p. 73-100 ; Judith Lyon-Caen, « Le romancier, lecteur du social dans la France de la monarchie de Juillet », Revue d’histoire du xixe siècle, 2002, p. 15–32.
-
[3]
Dominique Massonnaud, Faire vrai. Balzac et l’invention de l’œuvre-monde, Genève, Droz, 2014.
-
[4]
Pour une discussion plus ample de la visée épique des cycles romanesques, voir Thomas Conrad, Poétique des cycles romanesques. De Balzac à Volodine, Paris, Classiques Garnier, à paraître.
-
[5]
Roland Barthes, La Préparation du roman, Nathalie Léger (éd.), Paris, Seuil, 2003, p. 248.
-
[6]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 18-19. L’édition citée est celle de la Pléiade, Pierre-Georges Castex (dir.), 12 vol., Paris, Gallimard, 1976-1981.
-
[7]
Dominique Massonnaud, ouvr. cité, p. 379-417.
-
[8]
Éric Bordas parle d'« assimilation explicitée du particulier vers le général » et d’une « subordination de la doxa à la fiction » (Discours et Détours. Pour une stylistique de l’énonciation romanesque, Toulouse, Presses universitaires du Mirail, 1997, p. 206 et suiv.).
-
[9]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 18.
-
[10]
Balzac, Illusions perdues, la Comédie humaine, t. V, p. 460.
-
[11]
Balzac, Préface de la 1re édition des Employés, La Comédie humaine, t. VII, p. 882.
-
[12]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 10.
-
[13]
Balzac, Séraphîta, La Comédie humaine, t. XI, p. 784.
-
[14]
Balzac, Séraphîta, ibid., p. 727.
-
[15]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 11.
-
[16]
Victor Hugo, « Sur Walter Scott. À propos de Quentin Durward », Œuvres complètes. Critique, Paris, Laffont, « Bouquins », 1985, p. 147.
-
[17]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 10.
-
[18]
Très significativement, dès l’Avertissement du Gars, le projet de roman médiéval annoncé par Balzac est mentionné comme étant laissé provisoirement de côté au profit de cette histoire « contemporaine ».
-
[19]
Balzac, préface de la première édition d’Une Fille d’Ève, La Comédie humaine, t. II, p. 264-265.
-
[20]
Toutefois, s’il est vrai que la notion de « travail épique » permet de repenser l’épopée ancienne, elle ne cherche pas à définir l’épopée en tant que telle, par un travail spécifiquement épique qui s’opposerait aux procédures littéraires en général. On ne croira donc pas y trouver une « essence » de l’épopée, et encore moins une catégorie de l’épique qu’on pourrait ensuite retrouver ailleurs. En revanche, abandonner l’équivalence entre épique et caractère non-problématique permet de repérer l’épique dans le roman sans qu’il y soit forcément « dégradé », ironique, « impossible », etc.
-
[21]
Ethel Preston, Recherches sur la technique de Balzac. Le retour systématique des personnages dans La Comédie humaine, Genève-Paris, Slatkine, 1984, p. 31-34. Boris Lyon-Caen distingue les modalités de la « mention » et de la « référenciation » (Balzac et la comédie des signes, Saint-Denis, PUV, 2006, p. 265-267).
-
[22]
Balzac, Le Cabinet des Antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 1008.
-
[23]
Alain, Avec Balzac, p. 13-118 dans Balzac, Paris, Gallimard, 1999, p. 59.
-
[24]
Ibid., p. 58.
-
[25]
Félicien Marceau, Balzac et son monde, Paris, Gallimard, 1955.
-
[26]
Balzac, préface de la 1re édition du Cabinet des Antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 960.
-
[27]
Balzac, préface de l’édition Dumont d’Illusions perdues, La Comédie humaine, t. V, p. 119.
-
[28]
Ces termes viennent de la fameuse lettre du 26 octobre 1834 à Mme Hanska : « Aussi, dans les Études de mœurs sont les individualités typisées ; dans les Études philosophiques sont les types individualisés. » (Lettres à madame Hanska, Roger Pierrot (éd.), Paris, Laffont, 1990, t. I, p. 204). Au lieu d’opposer le type et l’individu, Balzac préfère souligner le processus qui va d’un pôle à l’autre. Les études les plus récentes distinguent à juste titre la typisation de la simple abstraction généralisante : c’est une concentration de traits singuliers saillants (voir Jacques Neefs, « Gestes, tournures, postures », p. 159-167 dans Balzac, L’Aventure analytique, Claire Barel-Moisan et Christelle Couleau (dir.), Saint-Cyr-sur-Loire, C. Pirot, 2009). Le type combine donc généralité et singularité, au point de pouvoir désigner un individu unique aussi bien qu’une catégorie générale (voir Nathalie Preiss, ouvr. cité, p. 59-60).
-
[29]
Nicole Mozet, Introduction au Cabinet des antiques, La Comédie humaine, t. IV, p. 947.
-
[30]
Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, La Comédie humaine, t. VI, p. 495.
-
[31]
Boris Lyon-Caen, ouvr. cité, p. 266.
-
[32]
Balzac, César Birotteau, La Comédie humaine, t. VI, p. 221.
-
[33]
Ibid., p. 58.
-
[34]
Ibid., p. 153.
-
[35]
Ibid., p. 210.
-
[36]
Ibid.
-
[37]
Ibid., p. 241.
-
[38]
Ibid., p. 81.
-
[39]
31 fois d’après Fernand Lotte (« Le “retour des personnages” dans La Comédie humaine », L’Année balzacienne, 1961, p. 234).
-
[40]
Les « vainqueurs » du retour des personnages, en nombre d’apparitions (indicateur certes assez superficiel des modalités de leur retour) ne sont pas loin d’être aussi les vainqueurs de La Comédie humaine, pour le meilleur et pour le pire : Nucingen revient 31 fois, Bianchon 29, de Marsay 27, Rastignac 25 (voir Fernand Lotte, art. cité).
-
[41]
Balzac, Ursule Mirouët, La Comédie humaine, t. III, p. 783.
-
[42]
Alain, ouvr. cité, p. 81.
-
[43]
Balzac, Splendeurs et misères des courtisanes, La Comédie humaine, t. VI, p. 851.
-
[44]
Ibid., p. 651-652.
-
[45]
Balzac, Le Contrat de mariage, La Comédie humaine, t. III, p. 580.
-
[46]
Balzac, « Avant-propos », La Comédie humaine, t. I, p. 19.
-
[47]
Aristote, Poétique, trad. J. Hardy, Paris, Gallimard, 1996, 1456a, p. 113
-
[48]
Ibid., 1450b-1451a, p. 91.