Le 13 février 2019, le Parlement européen a adopté une résolution « sur le recul des droits des femmes et de l’égalité hommes-femmes dans l’Union ». À la suite d’un rapport de la commission des droits de la femme et de l’égalité des genres (FEMM) sur la situation en Autriche, Hongrie, Italie, Pologne, Roumanie et Slovaquie, ce texte définit le « recul » (ou backlash dans la version en anglais) comme « une résistance à un changement social progressiste, une régression en matière de droits acquis ou le maintien d’un statuquo inégalitaire ». Dans le même état d’esprit, le média en ligne britannique OpenDemocracy a lancé en 2017 le projet « Tracking the backlash », qui regroupe des articles d’investigation sur les atteintes aux droits des femmes et des personnes LGBTI dans le monde. En Belgique francophone aussi, cette mise en récit devient de plus en plus fréquente pour comprendre les oppositions actuelles, notamment en relation avec le mouvement Me Too.
Dans ces différents exemples, le terme backlash, souvent traduit par « retour de bâton », propose un cadre d’analyse pour examiner l’offensive conservatrice qui sévit actuellement en Europe et ailleurs. Celui-ci semble même être devenu une des mises en récit les plus courantes pour appréhender ce qui se passe aujourd’hui dans des contextes pourtant très différents. Malgré le succès et l’attrait évidents de cette perspective, je souhaite attirer l’attention des universitaires, des observateur·rices et des praticien·nes sur les risques et les limites que comprend celle-ci et sur ce qu’elle nous empêche de voir ou de penser…