Introduction
1Autour de la fin de vie de l’enfant, la parole s’est libérée avec l’arrivée des psychologues dans les équipes hospitalières néonatales dans les années 1990. L’expression des parents sur leur vécu difficile a été entendue et a encouragé le développement de pratiques davantage en accord avec leurs besoins, valorisant notamment leur place auprès de leur enfant. Les professionnels de santé ont pu aussi être entendus pour faire face à l’intolérable et aux non-dits. Les professionnels des unités de soins et les formateurs ont reconsidéré leur approche sous l’impulsion de nouveaux textes législatifs. Celle-ci est désormais centrée sur les soins palliatifs et donc le temps de la fin de vie, le deuil périnatal et non plus seulement sur la mort de l’enfant. Aujourd’hui, une démarche palliative périnatale est reconnue. Quelle place lui accorde-t-on en formation de puéricultrice ? Qu’en pensent les apprenants et les jeunes diplômées ? Cet article propose un focus sur ces questions. Les enjeux liés à la refonte du diplôme d’infirmière puéricultrice seront aussi explorés ainsi que les perspectives pour la formation sur cette thématique.
Enquête : le point de vue des apprenants
Méthode
2Une enquête par questionnaire en ligne (disponible sur demande par mail à l’auteure) a ciblé la promotion 2016 – 2017 d’infirmières puéricultrices, six mois après sa sortie de formation, et la promotion 2017 – 2018 à mi-formation, soit un échantillon de 60 étudiantes issues de l’institut de formation de Rennes (le déterminant féminin sera retenu tout au long de cet article même si trois étudiants étaient de sexe masculin, soit 5 % de l’échantillon). La moitié a exercé en tant qu’infirmière avant d’entrer en formation spécialisée (expérience pouvant aller de deux mois à quelques années).
Résultats
3Quarante-quatre personnes, soit 73 % des étudiantes sollicitées, ont répondu à l’enquête.
4Les résultats des deux groupes interrogés étant similaires, ils ont été regroupés dans l’analyse. Vingt-quatre (55 %) répondantes ont rencontré une situation de soins palliatifs avec un enfant en tant qu’infirmière ou étudiante infirmière avant leur entrée en formation spécialisée. Vingt-huit (63 %) qualifient cet accompagnement réalisé auprès de l’enfant et sa famille comme plutôt satisfaisant ou satisfaisant. Pourtant, 32 (73 %) se sont senties plutôt peu compétentes, voire pas du tout compétentes en dépit d’une formation initiale en soins palliatifs adultes en institut de formation en soins infirmiers. Dans ce contexte, 34 (77 %) estiment avoir plutôt su gérer leurs émotions.
Aujourd’hui après la formation
5Dix-neuf (43 %) des répondantes appréhendent un peu moins cette situation professionnelle, et plus de la moitié (25, soit 57 %) quoique inexpérimentées identifient de nouvelles ressources et compétences dans l’accompagnement familial. Elles reconnaissent les apports en psychologie et l’éthique comme des enseignements socles dans la compréhension de la démarche palliative en périnatalité.
6Les étudiantes rapportent dans ce sondage que ce sont les séances d’analyses de pratiques animées par les formateurs qui les ont le plus aidées à progresser dans ces situations. Le raisonnement clinique avec l’analyse de la situation, la recherche d’hypothèses, l’identification des priorités et l’élaboration du projet de soins/de vie individualisé est également reconnu comme contributif au développement de la compétence. Une meilleure connaissance des partenaires (interprofessionnalité, équipe ressource régionale en soins palliatifs pédiatriques [ERRSPP]) mais aussi l’analyse de situations concrètes en groupe et la formation en communication thérapeutique y trouvent aussi selon elles toute leur place.
Rédaction du mémoire
7La rédaction du mémoire est citée comme une opportunité d’approfondissement de la démarche palliative en périnatalité ou des soins palliatifs chez l’enfant. Dix-huit étudiantes ont choisi ce sujet dans les huit dernières années. Les thèmes sont en lien avec l’accompagnement des parents, la communication des parents avec la fratrie, la gestion des émotions soignantes, la juste distance professionnelle. De nouveaux sujets émergent comme le positionnement de la puéricultrice en réunion collégiale.
Stage
8En stage, parmi celles qui ont pris soin d’un enfant en soins palliatifs, 19 (42 %) ont bénéficié d’un encadrement par leur référent et l’équipe. Huit (19 %) n’ont pas été accompagnées dans la situation rencontrée. Il aurait été intéressant de pouvoir décrire les raisons pour lesquelles les étudiantes ne se sont pas senties accompagnées. En l’absence de données, nous ne pouvons qu’émettre des hypothèses : le professionnel référent de l’enfant se sentait-il suffisamment sécurisé pour accepter l’observation d’une étudiante avec les questionnements qui s’ensuivent sur sa pratique ?
9Si la formation de puéricultrice a pour objectif de favoriser la gestion par les étudiantes des situations palliatives, elle ne permet pas d’appréhender totalement le décès inopiné d’un enfant. Il s’agit bien entendu ici d’une problématique différente des soins palliatifs, où l’équipe a le temps de réfléchir, d’anticiper et de cheminer. Cette situation brutale, toujours ressentie comme extrêmement violente, suppose cohésion et échanges au sein de l’équipe pour accompagner la famille. Un débriefing rassemblant les acteurs concernés peut être organisé pour permettre l’expression de chacun et la prise en compte des émotions.
10Les étudiantes formulent des propositions pour enrichir la séquence sur le deuil et les soins palliatifs en formation : scénario en séance de simulation en santé, lectures d’articles, cas concrets et retours d’expérience en petits groupes avec des formateurs, groupe de paroles avec la psychologue.
Discussion
La formation actuelle d’infirmière puéricultrice : une pédagogie innovante
11Fondé sur l’alternance entre les apprentissages théoriques et cliniques, le projet pédagogique organisé sur 12 mois de formation vise à former des praticiens réflexifs. Des outils permettant le questionnement sont utilisés. Pour s’adapter aux nouveaux profils d’apprenants de « la génération Y », l’équipe a choisi une pédagogie innovante. Plusieurs approches sont privilégiées :
- la simulation en santé, encouragée depuis 2010 par la HAS [1], est fondée sur l’apprentissage expérientiel et la pratique réflexive. Elle permet également de réaliser une action d’évaluation et d’amélioration des pratiques ;
- la classe inversée modifie les rôles traditionnels d’apprentissage : le support de cours est déposé en amont sur la plateforme numérique ; un temps présentiel permet ensuite une médiation entre enseignant et étudiants pour répondre aux questions et reprendre les points essentiels ;
- les séances d’analyses de pratiques professionnelles jalonnent le cursus tout au long de l’année sur six demi-journées, en groupe de 15 personnes, avec le formateur. Elles permettent d’analyser des situations réelles rencontrées en stage et de développer de nouvelles compétences en élargissant la pensée grâce au conflit cognitif généré par les échanges entre pairs, de faire évoluer les représentations. Les compétences émotionnelles sont aussi prises en compte ;
- l’e-learning favorise l’autoformation sur des temps choisis par l’étudiant ;
- les concepts et pratiques professionnelles sont travaillés en présentiel en groupe d’étudiants. Ils construisent eux-mêmes leurs savoirs et développent ainsi de l’autonomie. Avec l’étude de vidéos et de témoignages pour comprendre le parcours de soins du prématuré et identifier le vécu parental, l’étudiante peut se projeter dans son futur rôle, construire sa posture soignante et élaborer un accompagnement personnalisé. La puéricultrice accueille les parents en néonatologie et favorise leur parentalité auprès de l’enfant en initiant la « connaissance mutuelle » qui participe au processus d’attachement. De cet attachement va naître « la consolidation des habiletés parentales, de la croissance et le développement favorables de l’enfant […] ainsi que le bonding, l’attachement, lien durable qui persiste malgré la séparation » [2]. L’intégration des enjeux liés aux soins de développement et du programme NIDCAP (Newborn Individualized Developmental Care and Assessment Program) permet de valoriser un parent corégulateur et partenaire des soins. Bienveillance, écoute, empathie, douceur, l’emploi de mots justes, l’encouragement à prendre soin du bébé, à l’envelopper, le câliner… participent à la création du lien indéfectible parent – enfant. De cet attachement résultent des émotions qui émergeront tout au long de leur vie. La puéricultrice soutient la parentalité et participe à « construire l’histoire commune qui sera précieuse dans le temps du deuil » [3].
13En lien avec l’évolution médicale pas toujours favorable du prématuré, elle peut à un moment du parcours de soins être sollicitée pour participer à la réunion collégiale. La connaissance du cadre législatif, éthique et déontologique sur lequel s’appuie la démarche palliative néonatale permet à l’étudiante de s’approprier les enjeux du contexte de soins. Des cas concrets proposés en cours par un pédiatre expert en éthique permettent d’analyser des situations complexes et d’intégrer la démarche palliative.
Module d’enseignement de soins palliatifs en médecine périnatale
14Le module d’enseignement de soins palliatifs en médecine périnatale proposé actuellement à Rennes compte 7 h 30 d’apports théoriques. Il comprend la description des bases de la réflexion éthique en médecine (1 h) avec, en particulier, les quatre principes de Beauchamp et Childress [4] qui, sans avoir de valeur universelle, sont un outil pratique et simple d’analyse des situations marquées par une tension éthique. Il s’agit d’une grille de raisonnement souvent utilisée par les médecins lors des réunions collégiales, et il est essentiel que les puéricultrices se l’approprient pour pouvoir intervenir et exprimer leur opinion. L’analyse de ces quatre principes permet aussi d’emblée d’en montrer les limites quand on discute le problème de l’autonomie chez le nouveau-né et le problème de l’autonomie des parents dans les décisions concernant leur nouveau-né. La reconnaissance du rôle des émotions du soignant dans l’identification des tensions éthiques est soulignée.
15Ce module aborde ensuite le problème de l’obstination déraisonnable et des soins palliatifs chez le nouveau-né en explicitant le cadre légal et son évolution (loi Leonetti et loi Claeys-Leonetti ainsi que leurs décrets d’application [1 h]) puis passe en revue les situations issues du diagnostic anténatal, les situations d’extrême prématurité et les situations d’arrêt ou de limitation des thérapeutiques en unité de néonatalogie ou de réanimation (2 h). La place des parents dans la décision est spécifiquement abordée, en particulier en étudiant la jurisprudence récente. Les problématiques spécifiques de l’arrêt de nutrition et hydratation artificielles et de la sédation profonde et continue maintenue jusqu’au décès sont détaillées sans occulter les conflits éthiques existant autour de leur application en période néonatale. Une part importante est accordée à l’organisation pratique des soins palliatifs en salle de naissance et en unité d’hospitalisation des nouveau-nés (qu’il s’agisse de la maternité, d’une unité parents – enfants, d’une unité de soins intensifs ou de réanimation néonatale). La place de la puéricultrice y est bien sûr abordée, en insistant sur la « juste place » à trouver à côté des parents qui souhaitent aujourd’hui être acteurs de soins. L’enseignement est fondé sur les textes officiels, les recommandations des sociétés savantes et les publications des équipes travaillant sur la démarche palliative en médecine périnatale. L’intérêt d’une anticipation collective des situations programmées est souligné, qu’il s’agisse des situations malformatives dépistées par le diagnostic anténatal ou des situations de fin de vie en néonatalogie ; les limites de l’anticipation, l’incertitude sont abordées en tant que moteur de l’imaginaire maternel et parental [5]. L’impact des cultures et des religions est abordé spécifiquement sous plusieurs aspects : l’implicite est souvent lié à la culture en place, les parents de cultures différentes doivent arriver à expliciter leurs souhaits, les soignants doivent faciliter cette expression ; l’écueil serait d’idéaliser le respect des cultures, et il faut sans cesse veiller à retourner au sens et à la loi pour envisager les possibles.
16L’accent est mis aussi sur le repérage des différentes temporalités : enfant, parents, soignants, médecins ; il est fréquent que les infirmières puéricultrices des services de médecine ou de réanimation néonatale soient les « lanceurs d’alerte » d’un risque d’obstination déraisonnable du fait de leur proximité et du temps passé avec l’enfant, des conditions variées d’observations faites pendant le sommeil ou le repos et aussi lors des stimulations inévitables en situation de réanimation. Les médecins, davantage centrés sur leurs problématiques spécifiques, vont peu à peu s’interroger sur le risque d’obstination déraisonnable, parfois en décalage avec les infirmières. De nombreuses publications ont montré que ce décalage de temporalité peut être la cause de conflits internes dans les équipes. Il est souhaitable que les puéricultrices apprennent à faire valoir leur point de vue et leurs inquiétudes et à développer leurs arguments pour être entendues par les médecins. Il est probable que toute l’équipe gagnerait à connaître et reconnaître ce phénomène somme toute courant dans les services ; l’équipe y gagnerait certainement en cohésion et en efficacité [6]. Une réflexion est initiée également sur la place de la culpabilité maternelle, voire parentale et sur la culpabilité-miroir des soignants au moment de discuter d’une limitation ou d’un arrêt des thérapeutiques. Les problématiques liées à la fratrie et à la nécessaire inscription du nouveau-né dans l’histoire familiale sont également abordées dans une démarche de prévention des deuils pathologiques. Enfin est abordé le soutien institutionnel aux équipes et aux personnels en difficulté face à la mort et à l’accompagnement palliatif. Dans un deuxième temps, après avoir laissé aux étudiantes le temps d’intégrer les apports théoriques, des cas cliniques sont analysés et discutés en groupe (2 h).
17Tout cela s’intègre dans une vision plus large grâce aux apports des psychologues.
18L’enseignement en psychologie (15 h) favorise l’appropriation des différents mécanismes psychiques liés au désir d’enfant, à la grossesse, à la construction de l’attachement, aux interactions précoces, à la prématurité, à la séparation, au handicap, au deuil néonatal.
19La démarche palliative est aussi abordée par deux puéricultrices (DIU en soins palliatifs), exerçant l’une comme coordinatrice au sein du réseau ERRSPP et l’autre en onco-hématologie pédiatrique. Elles partagent leur expertise et leur expérience auprès de la promotion dans l’accompagnement de l’enfant, des familles et des équipes (3 h 30). Les situations traumatiques en réanimation sont appréhendées avec un psychologue en fin de formation (2 h).
Stage
20Le stage quant à lui est un terrain d’apprentissage essentiel et valorisé. Les étudiantes, acteurs de leur formation, définissent leur parcours de stage. Le partenariat avec les acteurs de terrain s’illustre sur les temps cliniques en stage avec les référents ou tuteurs, mais aussi avec le projet d’éducation à la santé. Les étudiantes, par groupe de deux à cinq, vont conduire une enquête à partir d’une problématique de santé soumise par l’unité et confronter la réalité des usagers et des équipes afin d’envisager une amélioration des pratiques professionnelles. Les résultats obtenus sont communiqués au cours d’une réunion à des représentants de l’équipe pluridisciplinaire. Ainsi, l’ERRSPP de Bretagne a proposé en 2016 une thématique sur la continuité du projet de soins auprès d’un enfant en soins palliatifs, explorée sur les deux antennes bretonnes par le biais d’entretiens auprès de parents et des professionnels.
21La démarche palliative en médecine périnatale se construit donc sur le terrain et à l’école avec des approches plurielles et complémentaires. L’enquête a montré une satisfaction globale des étudiantes au niveau de la formation théorique. Les demandes d’amélioration exprimées portent sur l’analyse des pratiques, l’étude de dossiers cliniques et toutes actions permettant d’augmenter l’assurance et la confiance en soi dans les situations liées à la mort.
Perspectives liées à la réingénierie et à « l’universitarisation » des formations en santé
22Pour s’aligner sur la déclaration de Bologne de 1999, la France s’est engagée à réformer les formations paramédicales. L’objectif visé est de faciliter la libre circulation en Europe des étudiants et professionnels avec des équivalences de diplôme et de faciliter les passerelles entre métiers en reconnaissant les acquis. Des crédits européens (ECTS) sont obtenus lors des validations d’unités d’enseignements (UE) dans un schéma universitaire licence – master – doctorat.
23L’objectif à plus long terme est aussi de constituer un corps d’enseignants-chercheurs en sciences infirmières, discipline reconnue au Canada, en Suisse et en Belgique aujourd’hui absente en France, mais qui se profile néanmoins avec l’annonce récente d’ouverture de sections universitaires en sciences infirmières [7].
24Cette réforme s’est mise en œuvre en 2009 pour la formation infirmière avec une équivalence de grade licence au terme des trois années de formation. Un changement de paradigme s’est opéré. Le savoir, le savoir-faire, le savoir-être et l’apprentissage de tâches dans une pédagogie centrée sur le modèle laissent place au développement de compétences. Tardif définit la compétence comme « un savoir agir complexe prenant appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations » [8]. La capacité à raisonner, à émettre des hypothèses et à poser un jugement clinique infirmier dans une situation est au cœur du dispositif. Les connaissances s’articulent autour de situations emblématiques pour prendre sens. Les analyses de pratiques professionnelles régulières favorisent quant à elles la prise de recul et l’interpellation dans la situation vécue. Elles permettent d’interroger les faits, les pratiques, mais aussi ses certitudes, ses émotions… de trouver ainsi de nouvelles pistes d’intervention possibles.
25Dans ce nouveau programme, les étudiants infirmiers bénéficient d’une réelle formation en soins palliatifs de 50 heures (UE 4.7 au semestre 5) auxquelles s’ajoutent les enseignements en soins relationnels, en psychologie, en sociologie, en anthropologie, en éthique, en déontologie, en pharmacologie (Arrêté du 31 juillet 2009 relatif au diplôme d’État d’infirmier).
Pour la formation spécialisée d’infirmière puéricultrice
26Même si l’arrêté ancien de formation de 1983 n’évoquait pas les soins palliatifs dans le programme, cet enseignement est dispensé depuis de nombreuses années dans les 34 instituts français qui forment près de 1 000 puéricultrices chaque année. On recense 20 699 puéricultrices en activité sur le territoire. Près de 60 % d’entre elles sont hospitalières (DRESS, 2016). La future maquette du référentiel de formation des puéricultrices est en cours de supervision à la Direction générale de l’offre de soins (DGOS). Elle harmonise les contenus identifiés dans l’UE spécifiquement dédiée aux soins palliatifs et fin de vie de l’enfant. La démarche palliative en périnatalité y est inscrite. Cette UE fera l’objet d’une évaluation et d’obtention de crédit. Un groupe de travail issu du comité d’entente des écoles préparant aux métiers de l’enfance (CEEPAME) a participé activement à la construction de ce référentiel en concertation avec les acteurs de terrain (dont, l’Association nationale des puéricultrices diplômées d’État [ANPDE]) pour être au plus près des compétences attendues au regard des activités actuelles. La réingénierie du diplôme des puéricultrices s’annonce pour la rentrée de septembre 2019 (quatre semestres universitaires annoncés avec un grade de master 2 demandé). Cette avancée majeure dans les programmes témoigne d’une professionnalisation reconnue et nécessaire autour de la démarche palliative en périnatalité pour permettre un véritable accompagnement des futurs parents et de l’enfant nouveau-né. Celui-ci ne s’improvise pas si l’on veut offrir aux parents un espace de respect du choix, un soutien dans la construction du lien de l’enfant né ou à naître, un cheminement favorable au deuil à la suite duquel les parents pourront continuer à vivre avec le souvenir de cet enfant inscrit dans la famille.
27Réinterroger sa pratique d’infirmière et apprendre auprès de pairs et d’experts en formation spécialisée de puéricultrice (ou en formation continue) est incontournable pour développer de nouvelles compétences spécifiques auprès de l’enfant en fin de vie pour qu’il soit apaisé, accompagné dignement dans une vision humaniste et respectueuse, avec ses parents entendus, guidés et soutenus dans ce moment tout à fait singulier que constitue la perte d’un enfant.
Quels changements envisager dans la formation d’infirmière puéricultrice ?
28Une approche philosophique va enrichir le parcours proposé sur la filière rennaise à partir de la rentrée 2018. Un projet émerge par ailleurs en simulation en santé autour de la construction d’un scénario d’une réunion collégiale. La simulation est propice pour travailler l’identité et le positionnement professionnel. En effet, il ne suffit pas d’avoir les éléments d’analyse, encore faut-il pouvoir les argumenter librement au sein du groupe dans ces situations. En simulation, il est décrit que « le transfert de l’apprentissage opère idéalement en situation proche du réel », dans un environnement néanmoins sécurisé par le formateur. Les « savoirs académiques se transforment ainsi en savoirs professionnels » [9]. De plus, une expérimentation d’enseignement par la simulation en interprofessionnalité réalisée entre étudiants infirmiers et internes de médecine générale, autour du raisonnement clinique en situation d’incertitude, a montré qu’il est possible de former ensemble des apprenants issus de filières différentes en santé avec un retour tout à fait probant et une haute satisfaction des formés [10].
29L’interprofessionnalité engagée en formation de puéricultrice serait alors perçue comme un réel enjeu devant permettre de changer les représentations autour de la fin de vie de l’enfant en période néonatale et de favoriser une coopération plus efficiente entre les différents acteurs dans les unités de soins au service de l’enfant et sa famille.
30Liens d’intérêts : Les auteurs déclarent ne pas avoir de lien d’intérêt.
Bibliographie
Références
- 1. Haute Autorité de santé (2012) Guide de bonnes pratiques en matière de simulation en santé. https://www.has-sante.fr/portail/jcms/c_930641/fr/simulation-en-sante
- 2. Bell L, Goulet C, St-Cyr Tribble D, et al (1996) Une analyse du concept d’attachement parents – enfants. Recherche en soins infirmiers 46 : 5 – 13
- 3. Bétrémieux P (2016) Des « soins palliatifs » à la « démarche palliative. In : Bétrémieux P (ed) La démarche palliative en médecine périnatale. wwww.relations-médicales.com, pp 25
- 4. Beauchamp TL, Childress JL (1994) Principles of biomedical ethics. Oxford University Press, New York, Oxford, 4e éd
- 5. Bétrémieux P, Huillery ML (2016) Anticipation et incertitude dans les situations où des malformations à fort potentiel létal sont diagnostiquées avant la naissance : l’enjeu des soins palliatifs. Médecine palliative – Soins de support – Accompagnement – Éthique 15 (6) : 309 – 13
- 6. Bétrémieux P, Huillery ML (2016) Prise en compte des différentes temporalités dans les situations de soins palliatifs en réanimation néonatale. In : Bétrémieux P (ed) La démarche palliative en médecine périnatale. wwww.relations-médicales.com, pp 392 – 403
- 7. Le Bouler S (2018) L’universitarisation des formations en santé, XVes Journées nationales d’étude du CEEPAME, communication Paris, 7 juin
- 8. Tardif J (2006) L’évaluation des compétences ; documenter le parcours de développement. Chenelière Éditions, Montréal
- 9. Pelaccia T (2018) Le raisonnement clinique, conférence dans le cadre de la simulation en santé. IFCS, Rennes, 15 juin
- 10. Renaut P, Mancheron P, Leduc V, et al (2014) L’apprentissage par la simulation : une méthode au service de la collaboration interprofessionnelle en santé. Soins Cadres 92 : S10 – S14