Couverture de RJE_HS12

Article de revue

La gestion du risque d’inondation des zones côtières

Pages 155 à 165

Notes

  • [1]
    Le dernier rapport du GIEC en vue du sommet de Durban établit ce lien avec certitude. Rapport publié le 18 novembre 2011, à Kampala. Voir notamment Intergovernmental panel on climate change, ONEP, http://www.ipcc.ch/
  • [2]
    On retiendra là-dessus l’exemple de Morlaix dont le tribunal administratif de Rennes en 1978 a trouvé la cause des inondations dans les déboisements en amont et les constructions intempestives sur les pentes : Décision n° 60-01-02-01 du 7 juin 1978. « Les opérations de remembrement foncier agricole, qui ont pour effet de favoriser le ruissellement de surface et de rendre les crues plus brutales et plus fréquentes, ont été partiellement responsables des inondations subies en février 1974 par la ville de Morlaix. Les habitants des villes sont fondés à demander à l’Etat, en application du principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, l’indemnisation des incidences de ces opérations d’intérêt général ».
  • [3]
    53 morts, 21 départements touchés, 2,379 Mds € de dégâts. Dans le cœur de la zone : les dégâts non assurés sont évalués à 605 Mds € et des dégâts assurés à 780 Mds € soit un total de 1 425,43 M €. 6 000 maisons ont été endommagées, dont 5 000 en Charente-Maritime. Plus de 500 exploitations agricoles, pour une surface de 52 000 hectares, ont été inondées en Charente- Maritime et en Vendée, soit un coût global de 138 M € pour 35 000 sinistres recensés, sur un total de 505 M € d’indemnités versées aux professionnels et collectivités territoriales. Au bilan du 4 mars 2011 : Le montant total des dommages directs est évalué à 2,5 Mds €, dont 1,48 Md € (brut de réassurance) à la charge des assureurs. Bilan réalisé par la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) et le Groupement des entreprises mutuelles d’assurances (Gema) au 31 décembre 2010. Sur les 470 000 sinistres recensés, 35 000 dossiers (7 %) relèvent du régime Cat Nat, mais représentent à eux seuls la moitié des indemnités versées.
  • [4]
    Selon l’article 4 de la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 : « La Caisse centrale de réassurance est habilitée à pratiquer les opérations de réassurance des risques résultant des catastrophes naturelles, avec la garantie de l’Etat ». Le régime légal d’assurance des catastrophes naturelles, dit Cat Nat, issu de L. n° 82-600, 13 juillet 1982 porte sur « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises » (Code des assurances, art. L. 125-1).
  • [5]
    Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA).
    Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC).
    La TASCOM (Taxe sur les surfaces commerciales) est désormais affectée au budget général de l’Etat et attribue des subventions variant de 20 % minimum pour les dépenses d’investissement matériel à 50 % maximum des dépenses de fonctionnement et d’investissement immatériel.
    Les collectivités locales, pour voir couverts leurs dommages non assurables ou les dépenses supplémentaires engagées du fait de la catastrophe, peuvent être aidées par l’Etat selon deux voies : le « fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles » et la « subvention d’équipement aux collectivités locales pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques ».
    L’UE est impliquée à la fois par son fonds d’urgence dit « mesure 126 », par le Fonds de solidarité de l’UE (à partir de 3,5 milliards d’euros de dégâts estimés), par la réaffectation des fonds européens FEDER, FSE.
  • [6]
    Fonds de prévention des risques naturels majeurs créé par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement (JCP G 1995, III, 67289) : préserver les vies humaines par des actions de prévention dont l’évacuation des zones les plus dangereuses grâce à des expropriations.
  • [7]
    Le plan gouvernemental en 2011. 60 actions visant « à mieux maîtriser l’urbanisation dans les zones dangereuses, améliorer la vigilance météo et l’alerte des populations, et renforcer la fiabilité des digues », a expliqué la ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, devant la presse. Il est doté d’un budget de 500 millions d’euros sur la période 2011-2016, prélevé sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier. « On se donne les moyens de tirer toutes les conséquences de la tempête Xynthia », a déclaré la ministre. « Le plan a pour objectif de protéger les populations et de sécuriser l’ensemble du territoire ». Les « moyens mis en œuvre » visent à éviter que ce “drame ne se reproduise’’. La tempête avait relancé le débat sur l’urbanisation du littoral alors que 46 % des communes françaises sont concernées par le risque majeur d’inondation, selon le Service de l’observation et des statistiques de l’environnement. Le plan prévoit donc d’améliorer la gestion des risques avec le développement de plans de prévention des communes du littoral… qui ont fait défaut durant la tempête. Plus de 240 PPR littoraux sont déclarés prioritaires d’ici 2014.
  • [8]
    Loi n° 2010-788, 12 juillet 2010 portant Engagement national pour l’environnement, JO 13 juill. p. 12905 ; JCP A 2011, 2004, Étude J.-P. Brouant.
  • [9]
    « Nous sommes tous là pour les mêmes raisons. Nous possédions des terrains nus rue de la Plage, à Aytré. Après Xynthia, ils sont inconstructibles et invendables, mais l’Etat refuse de nous indemniser parce qu’il s’agit d’espaces non bâtis », résume Milko Mathieux, lui-même dans cette situation. « Je continue à rembourser 1 500 € d’emprunt mensuel pour un terrain dont je ne peux rien faire. Nous vivons une injustice » (membre de l’Association des victimes propriétaires de terrains nus constructibles sur la côte charentaise).
  • [10]
    Source : ENPC /Atelier du changement climatique / Impact des changements climatiques sur les assurances.
    Sophie Charbonnier, Li-Rong-Li et Anthony Briant. 2011. Seuls l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas débattent d’un système à la française. En Espagne et en France, la réassurance est entièrement couverte par l’Etat.
    Mission d’enquête sur le régime d’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles. Ph. Dumas et alii, Rapport particulier sur les régimes « Cat Nat » dans une vingtaine de pays étrangers, Inspection générale des Finances n° 2005-M-020-04, Conseil général des Ponts et Chaussées n° 2004-0304-01, Inspection générale de l’Environnement N° IGE/05/006.
  • [11]
    Le juge administratif montrerait la voie lorsqu’il écarte tout lien automatique entre la délimitation des zones de solidarité et l’expropriation. TA Nantes, 11 janvier 2011, Association de défense des victimes des inondations de La Faute-sur-Mer et des environs et autres, n°1003953.
  • [12]
    L’article L.125-5 du Code de l’environnement prévoit que : « les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques ou un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé…, sont informés par le vendeur ou le bailleur de l’existence des risques visés par ce plan.(…). A cet effet, un état des risques naturels et technologiques est établi à partir des informations mises à disposition par le préfet ». Le décret du 15 février 2005 a précisé les modalités de mise en œuvre de cette information.
  • [13]
    La prévention des risques naturels. Bilan et nouvelles perspectives en droit national et en droit comparé, Colloque de la SFDE, Biarritz 2007 publié par le ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer (www.developpement-durable.gouv.fr).
  • [14]
    En vertu de la loi de 2003 sur les risques majeurs, il faut accélérer l’élaboration par le préfet de département d’un dossier départemental des risques majeurs naturels ou technologiques (DDRM) et par le maire d’un document d’information communal sur les risques majeurs (DICRIM).
  • [15]
    SDIS : Services départementaux d’incendie et de secours.
  • [16]
    Proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine. Sur un texte n° 173 de M. Alain Anziani du 14 décembre 2010 débattu en séance le 22 novembre 2011.
    Voir aussi le débat sur la loi de finances dans la séance du 25 novembre, pour la partie relative au ministère de l’écologie : Le programme 181 « Prévention des risques » sera doté de 312,3 millions d’euros de crédits de paiement, ce qui représente une hausse de 3 % par rapport à 2011[…]. Enfin, la prévention des inondations constituera une priorité en 2012, notamment à travers le plan Submersions rapides, qui sera doté de 500 millions d’euros sur 2011-2016 (site senat.fr/ Compte-rendu des séances).
  • [17]
    Fernand Verger, « Digues et polders littoraux : réflexions après la tempête Xynthia », Physio-Géo [En ligne], Volume 5 | 2011, mis en ligne le 21 juin 2011, Consulté le 26 juin 2011. URL : http://physio-geo.revues.org/1740.
  • [18]
    C. Clus-Auby, R. Paskoff et F. Verger, 2004, Impact du changement climatique sur le patrimoine du Conservatoire du littoral /Scénarios d’érosion et de submersion à l’horizon 2100/ synthèse, http://www.conservatoire-du-littoral.fr

1La fréquence accélérée des événements climatiques nous oblige à prendre le risque d’inondation au sérieux, même en Bretagne où les conditions géoclimatiques déterminent plusieurs zones à risque sur les cours d’eau et le littoral.

2En effet, les rivières bretonnes ont toutes les caractéristiques de cours d’eau de moyenne montagne encaissés dans la pénéplaine en vallées étroites et sinueuses où se sont installées les villes et les ports aux embouchures. Ces embouchures, étroites et dont le sol est imperméabilisé par les zonages urbains, reçoivent des eaux très rapides qui se heurtent à un véritable mur d’eau salée à la marée montante dans nos abers et rias. Le risque d’inondation qui en découle est spatialement très localisé mais il peut être très violent pour des populations concentrées et concerner les villes intérieures qui s’aperçoivent alors qu’elles sont tout aussi littorales que les autres. Le changement climatique se traduit par des événements extrêmes plus fréquents comme le montre les statistiques hivernales de la météo depuis 20 ans [1]. Mais c’est la démographie urbaine en progression en Bretagne qui aggrave l’exposition aux risques. La pression de la demande, l’envolée des prix fonciers, ont fait le reste pour que la gouvernance du territoire se montre laxiste dans la définition des zones constructibles [2] finalement exposées aux risques d’inondation et de submersion marine.

3Toutes ces sources du risque breton peuvent se résumer à la conjonction de deux éléments : l’occupation urbaine des zones littorales et l’étalement urbain dans les vallées.

4D’une manière générale, sur le littoral français c’est l’exposition d’un maximum de biens et de personnes, on parle de 5 millions d’habitants exposés à des risques de plus en plus probables, qui constitue notre problème. La reconquête du trait de côte médiéval par la mer lors de la tempête Xynthia préfigure une situation de laquelle nous aurons de plus en plus de difficultés à nous prémunir. On pourra corriger à la marge, atténuer le risque par des équipements de protection, des règles de sécurité plus drastiques pour les constructions, y compris les existantes, l’obligation de préserver les terres d’épandage et les zones humides, des plans de prévention… Mais cela ne suffira pas pour au moins deux raisons :

  • Le coût économique, foncier, écologique de la prévention ;
  • La permanence du risque et d’événements qui feront perdre la confiance dans les équipements coûteux que l’on aura pu faire.

5Il faudra donc s’habituer à voir la mer reprendre ses droits en beaucoup d’endroits où on croyait l’avoir éloignée pour toujours, même si elle respecte ici et là les points hauts retenus par nos ancêtres comme le montre les photographies aériennes de la côte charentaise après Xynthia. L’aléa naturel s’impose et c’est notre exposition au danger que nous devons gérer.

6Une gestion qui passe par des moyens techniques et économiques, des décisions politiques et des règles juridiques. Théoriquement plusieurs voies se présentent pour gérer le risque.

7La première consiste à indemniser systématiquement les victimes en tablant sur un faible retour des événements. C’est souvent le point de vue des personnes exposées pour qui le caractère exceptionnel et monstrueux de l’événement le rend impossible à l’échelle d’une vie humaine. C’est oublier un peu vite les événements moins importants mais tout aussi destructeurs qui ont pu se produire dans les deux décennies passées comme en 1999 sur la même côte poitevine. Le coût d’événements répétitifs aura un impact important sur la solidarité assurancielle comme l’augmentation des primes en 2012 le démontre.

8La seconde solution consiste, tout au contraire, à faire supporter le coût du risque par les personnes exposées. C’est le modèle anglo-saxon qui évacue sans indemnité certaines installations et qui permet des coûts d’assurance prohibitifs dans les endroits les plus dangereux. En France, le système de solidarité devant les catastrophes naturelles mis en place en 1982 s’appuie, à l’inverse, sur une répartition uniforme des coûts entre tous les assurés avec la garantie de l’Etat actionnaire unique de la Caisse centrale de réassurance (CCR). Système supportable tant que la CCR n’est pas ruinée par la répétition des événements ou par la crise des marchés financiers sur lesquels elle s’est placée.

9Une troisième voie, socialement difficile, consiste à organiser l’évacuation autoritaire mais indemnisée des zones à risque, à créer des équipements protecteurs et à interdire de nouvelles installations. Le coût financier et foncier pour le contribuable est maximal et le coût politique très important.

10Ces trois premières voies de solution cumulent les mêmes inconvénients. A commencer par l’atteinte aux principes d’égalité devant les charges publiques et de solidarité, l’atteinte au droit de propriété, l’atteinte à l’autonomie des collectivités territoriales, des coûts financiers publics prohibitifs si on les compare à la valeur des intérêts mis en défens sur des côtes.

11En effet, le caractère irréaliste et pharaonique du projet d’endigage proposé par le ministre Borloo en 2010 n’aura échappé à personne car nos côtes ne s’appuient pas sur des territoires maritimes au PIB aussi important qu’il peut l’être dans la partie sud des Pays-Bas !

12Resterait alors la solution d’une réforme de la propriété privée pour l’adapter au traitement collectif du risque : expropriations, compensation des interdictions, primes d’assurances différenciées, redéfinition du droit de propriété, taxe foncière augmentée, suppression du caractère automatique de la solidarité nationale lorsque seuls des biens sont en cause… A ce point de l’analyse, il apparaît évident que le problème a des sources multifactorielles et qu’il convient d’y apporter une réponse complexe, d’un dosage variable selon les sites, pour partager la charge le plus équitablement possible entre tous les intérêts impliqués, y compris la solidarité nationale et assurancielle. Si l’on veut espérer accorder les deux points de vue sur ce risque de submersion de la propriété privée et de la puissance publique, il convient d’abord de les analyser successivement.

I – La gestion du risque du point de vue des personnes exposées

13C’est toujours l’assurance qui domine ce point de vue, au détriment de la prévention physique qui supposerait une autre approche du droit de propriété. Or, la solidarité nationale et assurancielle a forcément des limites que l’on pourrait moduler par une plus grande participation des personnes exposées.

14Les statistiques de Xynthia peuvent faire craindre un dépassement des moyens des assurances [3]. La collectivité intervient à la fois par la solidarité des contribuables et celle des assurés ce qui pose le problème du contrôle démocratique des risques pris par certains au dépens des autres.

15Les avantages du système français sont : la solidarité automatique, la rapidité des indemnisations, la garantie de réassurance par l’Etat. Une première prise en charge est donc faite par les fonds de solidarité alimentés par des surprimes aux polices d’assurance. Depuis 1981, le fond Cat Nat [4] couvre essentiellement les dégâts d’inondation et de submersion alors que les contrats de droit commun remboursent mieux les dommages dus au vent et à « la mouille ». Selon la Caisse centrale de réassurance, les fonds propres des assurances et de la réassurance pourront facilement couvrir la totalité des dégâts pour les 21 départements touchés par Xynthia. Mais une répétition des événements pourrait assécher ces fonds et contraindre l’Etat, donc le contribuable, à garantir les réparations. L’augmentation des primes en 2012 est clairement annoncée pour couvrir les dommages dus aux catastrophes.

16Les nombreux fonds de solidarité professionnelle [5] interviennent par le même mécanisme que Cat Nat. Ils ont le défaut de l’accumulation, chacun étant dévolu à une catégorie de victimes, ce qui pose des problèmes de frontières entre dommages réparables et crée un sentiment de garantie absolue qui déresponsabilise les personnes exposées. La zone industrielle de Redon installée sur un marais remblayé n’en est-elle pas le plus bel exemple ?

17Le fonds Barnier créé par la loi sur l’environnement de 1995 [6], intervient par des expropriations préventives et des études et travaux. La proposition que le Fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM) finance le rachat des maisons détruites en zones noires dites désormais « zones de solidarité », met en cause l’esprit même de ce fonds de prévention et pas seulement son équilibre financier puisque le voilà voué à la réparation post-évènementielle. Si 50 % des crédits du fonds, soit 75 millions/an, servent à financer les 500 millions nécessaires au rachat des maisons détruites, ce qui était encore promis par la ministre en octobre 2011 [7], il sera vite asséché ou bien le dédommagement sera très lent.

18Une seconde prise en charge des dégâts relève directement de la solidarité nationale. L’Etat intervient pour les secours, les aides d’urgence, les aides aux collectivités locales et à plus long terme la réparation des dommages par des fonds publics ; il est appuyé par des fonds européens.

19La déclaration de catastrophe naturelle est le déclencheur des deux interventions assurancielle et de solidarité nationale. Les fonds assuranciels qui sont garantis par l’Etat peuvent donc être considérés comme une autre forme de solidarité nationale.

20Au moment où la loi dite Grenelle 2 [8] intègre la directive Inondation, est-ce à la seule solidarité automatique des assurés français de financer tous les engagements de la solidarité nationale alors que l’Etat, les acteurs locaux et le marché immobilier ont une part certaine de responsabilité dans les conséquences de la catastrophe ? En outre, peut-on croire que les annonces politiques pourront éviter quelques contentieux retentissants initiés par des victimes toujours insatisfaites ? C’est déjà le cas des 12 recours de propriétaires de terrains nus inondés et de quelques communes qui se constituent en association de défense [9].

21Mais doit-on aller plus loin en disant que nombre de catastrophes dites naturelles n’ont en rien des causes naturelles ? Lorsqu’une coulée de boue envahit une commune de façon répétée et alors qu’on en connaît la cause toute humaine (déboisements, suppression des talus…), la déclaration Cat Nat, lorsqu’elle devient habituelle, n’a-t-elle pas un objectif de paix sociale évitant de s’attaquer aux raisons techniques du problème et de bousculer quelque rente de situation ? L’exposition volontaire ou inconsciente aux aléas ne donne-t-elle pas un caractère purement humain aux causes de la catastrophe qui se reproduira ?

22Les exemples étrangers nous exposent l’efficacité d’un système de coefficient de risque [10] appliqué aux propriétés exposées. Dans de nombreux pays européens, l’assurance contre les catastrophes naturelles reste facultative. Ainsi, au Japon comme en Californie, elles font l’objet d’un contrat séparé qui ne repose pas sur la notion de solidarité et se fonde sur une évaluation réaliste du risque encouru par la construction. L’exemple libéral britannique montre une préférence marquée pour la prévention avec trois conséquences : des résultats concrets remarquables en prévention, un bon équilibre des comptes de l’assurance mais des primes plus coûteuses pour les assurés les plus exposés, une responsabilisation plus grande des assurés comme des constructeurs et des collectivités locales face à un Etat vigilant.

23Mais en considérant les dimensions particulières du littoral français et sa faiblesse économique relative qui laisse toute la place à l’utilisation résidentielle de l’espace ne devrait-on pas repenser le droit de propriété dans les zones à risque ?

24Ce qui supposerait d’abord de redéfinir le partage de la charge de protection donc de revoir les politiques de protection contre la mer, d’imposer l’adhésion obligatoire à des syndicats de propriétaires, de taxer plus lourdement les transactions et d’intervenir par la fiscalité locale.

25L’exemple britannique pourrait inspirer de telles réflexions. Pour le résumer brièvement, rappelons que dans ce système la couverture de tous les risques est garantie par le secteur des assurances mais que les contrats sont facilement résiliables, les clients très volatils, les primes très modulées et comportant des exclusions pour cause de risque excessif. Les franchises sont très élevées (x 5 pour les biens très exposés) et la modulation des primes, dans une fourchette de 1 à 8, se calcule sur la base d’un zonage fin établi sur les codes postaux. Les pouvoirs publics britanniques n’interviennent ni dans l’assurance, ni dans la réassurance des catastrophes naturelles, ni en forme d’aides financières publiques aux victimes. Mais L’Etat a négocié un moratoire sur les primes pour tenir compte de ses efforts matériels en matière de prévention. La prévention est fondée sur un très puissant contrôle des constructions et des plans d’urbanisme en fonction des risques naturels par un corps d’inspecteurs sous la tutelle d’un ministère chef de file : Departement for Environment, Food and Rural Affairs.

26Un tel modèle est fortement dissuasif de la construction dans les zones les plus exposées. S’il revient à rompre avec notre système de solidarité automatique, l’autre piste de réflexion porte sur une nouvelle délimitation de l’exercice du droit de propriété dans ces zones. Penser à un second régime, particulier, du droit de propriété est largement utopique mais on peut accentuer la relativité de son exercice par les servitudes et la fiscalité, moyens relatifs face à l’absolutisme du droit de propriété mais paradoxalement plus forts que lui car se fondant sur une autre valeur absolue : l’intérêt général. Car il n’y a guère que la sûreté générale des biens et des personnes qui peut constituer une barrière presque aussi absolue à l’exercice imprévoyant de la propriété.

27Cependant le succès des politiques de prévention tient à trois conditions :

  • Une politique ferme de la prévention traduite dans des règlements fonciers incontestables et s’imposant aux propriétaires ;
  • Une maîtrise par l’Etat des conditions locales de la sécurité assumées en partie par les maires. Ce qui suppose un niveau de décision à l’échelle du territoire du risque ;
  • Un inventaire des situations qui ne se confonde pas avec les outils juridiques de gestion du risque. Ne pas rajouter de tels outils mais en clarifier l’emploi.

28Le législateur devrait commencer par rompre le lien automatique entre zonage constructible et plein exercice du droit de propriété [11]. Faire en sorte que la contribution à la sécurité fasse partie du coût foncier et donc du calcul de la rente. Ce qui suppose, au minimum, un emploi ferme de deux techniques existantes : l’obligation mieux sanctionnée d’information des acheteurs par les notaires [12] et la préemption foncière par la collectivité publique. Mais ce ne serait pas suffisant car il conviendrait, dans les zones sensibles où la construction est tolérable, d’ajouter aux règles d’urbanisme des règles de construction strictes contrôlées par l’instructeur du permis de construire avec un quitus à transmettre obligatoirement à son assureur. Ainsi, les mesures de prévention et de sécurité qui ont tant manqué dans les maisons de La Faute-sur-Mer ne seraient plus laissées au choix du maire mais comme une condition absolue de l’octroi du certificat de conformité et de l’assurance de la maison.

29En outre, les assureurs devraient être autorisés à moduler les primes dans ces zones et les communes ou les départements à prélever un impôt foncier spécifique, similaire à la surtaxe sur les PFNB qui doit encourager les propriétaires à densifier, ou encore une taxation de la plus-value sur le premier échange. De tels prélèvements seraient justifiés par les travaux de protection engagés par la collectivité ou par une association forcée de propriétaires chargés de ces travaux dont le propriétaire constructeur serait obligatoirement contributeur.

30Ces mécanismes de partage de la rente foncière n’étant plus liés à la seule réglementation de l’urbanisme qui donne jusqu’ici une sorte de droit de tirage sur la solidarité nationale, diminueraient certainement la pression sur les zones les plus exposées. Mais rien ne sera possible sans la volonté de la puissance publique notamment pour bloquer le développement de la rente immobilière dans les zones à risques.

II – La gestion du risque du point de vue de la puissance publique

31Ce point de vue passe lui aussi par deux chemins, celui de l’optimisation de la sûreté générale et celui de l’aménagement du territoire littoral qui devrait être plus opérationnel en se fondant sur une meilleure intégration des lois qui concernent cet espace particulier [13].

32Il faudrait développer une approche opérationnelle du risque littoral.

33Rappelons que la sécurité des biens et des personnes est un devoir régalien dont la commune partage la charge avec l’Etat.

34La leçon de Xynthia semble avoir été tirée puisque les préfets accélèrent l’élaboration des plans de prévention et que l’étude des futurs plans de gestion des risques d’inondation a été lancée dans les régions les plus menacées. Il faut aussi revoir les systèmes d’alerte et les plans communaux de sauvegarde [14]. Le Sénat proposant d’y intégrer le risque de submersion, de les rendre impératifs et de leur subordonner certaines subventions aux communes. Cela n’aurait pas d’utilité sans une organisation concrète de la prévention par de véritables exercices intercommunaux, dont la maîtrise d’ouvrage devrait être confiée aux SDIS [15], pour intégrer les habitants les plus exposés dans un système d’alerte individuel au-delà de ce qui a été fait ou aurait dû l’être.

35Rappelons que, dans sa proposition de loi débattue le 22 novembre [16] le Sénat veut mieux intégrer les risques de submersion marine dans le schéma départemental d’analyse et de couverture des risques (SDACR).

36Mais la voie la plus efficace est celle de l’aménagement du territoire du risque. C’est ici que nous retrouverons la loi Littoral et le Conservatoire.

37Il ne faut pas surestimer la défense contre la mer par des digues [17], solution souvent dépassée par l’événement. La loi de 1807 et sa mise en œuvre pratique par les lois de Napoléon III créant les associations de propriétaires chargées de construire les digues avaient un objectif agricole. Ces ouvrages sont donc plus utiles à la poldérisation qu’à la défense et ne tiennent pas devant une forte submersion marine. De fait, à peine 20 % du linéaire des digues a pu résister à un événement centennal. En outre, le système de propriété et de gestion de ces digues ne permet ni le bon entretien par les propriétaires, ni l’action concertée des structures intercommunales, ni l’intervention forte des conseils généraux pour les transformer en véritables murs contre la montée des eaux au droit des zones urbaines.

38Il n’est pas certain que le simple transfert des digues aux collectivités locales, notamment les départements, envisagé dans le projet de loi sur les risques de submersion marine, actuellement examiné par le Sénat, soit une solution très efficace. Par exemple, la réalisation de digues envisagées par le département de Charente-Maritime après 1999 attend toujours le moindre commencement de réalisation.

39Il reste alors deux autres moyens d’intervention.

40Tout d’abord, utiliser tous les outils fonciers disponibles pour permettre aux habitants exposés de s’extraire des zones dangereuses et pour créer des zones naturelles jouant le rôle de tampon.

41Il faudrait pour cela coordonner les interventions foncières des SAFER, des départements au titre des ENS et du Conservatoire du littoral. Ce qui éviterait que les propriétaires attendent du conservatoire qu’il achète les terrains les plus proches de la mer pour les protéger par des digues ! Si tous les intervenants fonciers poursuivent le même objectif de recul stratégique, ces demandes n’auront plus lieu d’être.

42Une technique offerte par le droit de l’urbanisme permettrait de résoudre plus rapidement le problème dans les zones inondables ou menacées de submersion marine. Il s’agit de l’opération d’aménagement définie par l’article L 300-1 du Code de l’urbanisme pour sauvegarder ou mettre en valeur le patrimoine bâti ou non bâti et les espaces naturels. Une telle opération pouvant prendre la forme d’une ZAC décidée par le préfet selon les modalités de l’article L. 311-1 du même code. L’expropriation, les acquisitions amiables ou par préemption concertées entre les acteurs, l’utilisation du droit de délaissement permettraient une saisie rapide des parcelles dans le périmètre de danger pour réaliser une digue devant une zone urbaine, avec participation des bénéficiaire comme nous venons de l’évoquer. La zone aménagée serait un vaste espace naturel confié en gestion à un groupement de collectivités finançant leur intervention par une taxe locale du risque.

43Cela ne nous éviterait pas de faire la part de la mer qui tend à reprendre le terrain gagné sur elle. Selon une étude de 2004 [18], à l’horizon 2100, le recul des plages et des falaises pourrait avoir fait perdre au Conservatoire 647 ha, soit 1,2 % de ses biens fonciers actuels et 1 514 ha, soit 1 % de son patrimoine futur. En ce qui concerne la submersion des marais maritimes, 1350 ha, soit 3 % de ses biens actuels et 3 073 ha, soit 2,6 % de son patrimoine futur pourraient être affectés. Mais, si à ces marais maritimes on ajoute les terrains endigués, la surface potentiellement submersible passe à 5 000 ha, soit 10 % de ses biens fonciers actuels et à 30 000 ha, soit 21 % de son patrimoine futur. Ce que l’établissement public ne considère pas forcément comme un risque pour sa mission de conservation de la biodiversité.

44Cependant, il faudra bien qu’il acquière plus en profondeur des espaces à ouvrir à un public qui sera toujours plus friand de l’accès au littoral.

45En appui des outils opérationnels il faut envisager une amélioration des outils réglementaires en intégrant mieux le risque dans la loi Littoral et en concevant les plans de gestion des risques.

46Ce qui commence par une évaluation des coûts de toute nature, financiers, environnementaux, sociaux,… occasionnés par l’organisation de ce recul stratégique y compris celui de la solidarité territoriale contraignant les communes littorales de seconde ligne à accueillir la demande de construction. La loi Littoral devrait avoir un volet d’application sur la profondeur, volet ne concernant pas toutes ses dispositions. Prétendre avoir une politique de gestion de zones côtières conforme aux directives européennes alors que ces communes, qui appartiennent à « l’œkoumène littoral », peuvent encore refuser d’être concernées par la loi Littoral, est un contresens tragique.

47Face à un impératif de sécurité générale, mission régalienne s’il en est et qui s’oppose aux effets anarchiques de la rente foncière, c’est à la loi de définir les périmètres d’intervention, à l’Etat d’orchestrer cette intervention et aux collectivités territoriales de mettre en œuvre les projets. C’est ce que l’on peut attendre de la loi d’urbanisme qui a déjà évolué et de la loi Littoral qu’il faudrait faire évoluer.

48La loi du 12 août 2010, relative à l’engagement national pour l’environnement, intègre la directive de 2007 en rendant obligatoires les PLU intercommunaux dans les zones à risque de submersion et en donnant aux préfets une mission de coordination de l’ensemble des actions publiques avec le pouvoir d’imposer. Selon l’article L. 566-7 du CE, L’autorité administrative arrête, avant le 22 décembre 2015, à l’échelon de chaque bassin ou groupement de bassins, un plan de gestion des risques d’inondation (PGRI) pour les territoires définis par l’inventaire de ces zones (art. L. 566-5).

49Ce PGRI présente un double intérêt opérationnel et réglementaire. D’une part, les travaux prévus par les PGRI ont le caractère de PIG qui s’imposent aux communes et, d’autre part, alors que les PPR avaient le caractère de servitudes annexées aux PLU, le plan approuvé est un document d’urbanisme qui s’impose aux schémas de cohérence territoriale et aux PLU (L. 122-13 du CU).

50Ajoutons que les actuels projets de réforme de l’urbanisme prévoient à la fois, de limiter les possibilités de décisions tacites en zones de PPR en instituant le principe du tacite défavorable pour les permis, sauf si le zonage du PPR en prévoit autrement et d’améliorer la transmission des permis tacites au contrôle de légalité et l’information des usagers sur le délai de déféré préfectoral

51Le 22 novembre dernier, le Sénat a examiné une proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine. L’article 4 du projet propose d’introduire dans le Code de l’urbanisme (art. L. 121-1 et L. 123-1) un principe de « protection des vies humaines face aux risques naturels majeurs » qui serait un objectif obligatoire des documents d’urbanisme. Et son article 5 impose les PPR à ces mêmes documents non plus comme des servitudes annexées mais comme des servitudes d’urbanisme intégrées dans le document.

52Il semble que le législateur soit sur la bonne voie mais d’autres progrès sont nécessaires. En effet, la nouvelle portée donnée aux PPR et l’instauration des PGRI consacrent le risque comme un élément fort de l’aménagement d’un territoire littoral plus large que la stricte définition des communes riveraines de la mer. De vastes bassins d’estuaires sont concernés. La correction des schémas de gestion des eaux en amont des zones côtières sera indispensable pour ne pas compromettre l’efficacité des plans ou faire porter aux seules communes littorales le poids du risque. Les communes arrière-littorales devront accueillir activités et habitats qui ne seront plus possibles dans ce qu’il faudra bien appeler le territoire du risque. Or, la loi Littoral, qui commande actuellement les documents d’urbanisme, n’est pas adaptée à cette nouvelle conception du territoire.

53La loi Littoral peut-elle devenir un outil de protection contre les risques ?

54Elle a institutionnalisé la valeur symbolique, culturelle et politique du littoral. Elle se présente comme une loi de conciliation entre des objectifs d’aménagement qui sont tous consommateurs de l’espace. Ce n’est donc pas une loi de protection et peu de choses sont protégées par elle : la bande des cent mètres et les espaces naturels remarquables. Les autres concepts de la loi sont plus qualitatifs : espaces proches du rivage, capacité d’accueil, qui viennent en débat devant les impératifs de développement et de mise en valeur et ne constituent pas des normes rigides. C’est pourquoi les autres espaces naturels sont d’un usage plus contrôlé que sur un territoire de droit commun mais rien ne s’oppose réellement à la densification des populations, des équipements et des aménagements ce qui est totalement contradictoire avec l’objectif de recul stratégique qui permettra seul la protection contre les évolutions du trait de côte et la montée des eaux.

55Dans la discussion sénatoriale que nous venons d’évoquer, le projet concerne aussi la loi Littoral dont les outils seront mis au service de la protection des populations. Il y est question de définition des capacités d’accueil en fonction des risques, d’ajouter le risque aux motifs d’interdiction de l’extension de l’urbanisation et que le PLU puisse élargir la bande des cent mètres pour y intégrer les zones de risques. Mais cela ne sera efficace qu’à condition de redéfinir l’espace littoral, lieu d’application de la loi, plus largement qu’il ne l’est aujourd’hui. Le risque de submersion marine concerne les cantons littoraux et les bassins d’estuaires de toutes sortes de façons, aussi bien par l’économie du risque que par la répartition des rentes foncières ou la solidarité devant les précautions à prendre. Il faudrait donc que la loi Littoral se rapproche de l’esprit de la loi ENE en faisant du développement durable de l’œkoumène littoral défini par les géographes, le territoire d’application d’une loi qui distinguerait plus clairement ce qui doit être protégé, y compris à l’intérieur et en raison de motifs aussi importants que la protection de la nature, des paysages ou contre les risques et ce qui peut être aménagé selon des principes particuliers aux caractéristiques de cet espace.

56*

57S’il paraît que le législateur avance vers une meilleure intégration du risque dans les lois et procédures qui permettent à l’Etat de mieux anticiper le risque, la résolution des problèmes de responsabilité collective devant le risque et les conséquences de sa réalisation n’ont pas trouvé le dispositif global qui serait nécessaire à tout ce qui s’oppose à la prévention. Une nouvelle loi Littoral est nécessaire mais au terme d’un débat qui éviterait deux écueils de nature politique. Que d’un côté on cesse de croire que tout est possible sur cet espace limité qui ne serait soumis qu’à des risques imaginaires et que de l’autre côté on cesse de penser que la remise d’une loi sur le métier serait forcément une perte pour les défenseurs de l’environnement.


Date de mise en ligne : 13/08/2015

Notes

  • [1]
    Le dernier rapport du GIEC en vue du sommet de Durban établit ce lien avec certitude. Rapport publié le 18 novembre 2011, à Kampala. Voir notamment Intergovernmental panel on climate change, ONEP, http://www.ipcc.ch/
  • [2]
    On retiendra là-dessus l’exemple de Morlaix dont le tribunal administratif de Rennes en 1978 a trouvé la cause des inondations dans les déboisements en amont et les constructions intempestives sur les pentes : Décision n° 60-01-02-01 du 7 juin 1978. « Les opérations de remembrement foncier agricole, qui ont pour effet de favoriser le ruissellement de surface et de rendre les crues plus brutales et plus fréquentes, ont été partiellement responsables des inondations subies en février 1974 par la ville de Morlaix. Les habitants des villes sont fondés à demander à l’Etat, en application du principe d’égalité des citoyens devant les charges publiques, l’indemnisation des incidences de ces opérations d’intérêt général ».
  • [3]
    53 morts, 21 départements touchés, 2,379 Mds € de dégâts. Dans le cœur de la zone : les dégâts non assurés sont évalués à 605 Mds € et des dégâts assurés à 780 Mds € soit un total de 1 425,43 M €. 6 000 maisons ont été endommagées, dont 5 000 en Charente-Maritime. Plus de 500 exploitations agricoles, pour une surface de 52 000 hectares, ont été inondées en Charente- Maritime et en Vendée, soit un coût global de 138 M € pour 35 000 sinistres recensés, sur un total de 505 M € d’indemnités versées aux professionnels et collectivités territoriales. Au bilan du 4 mars 2011 : Le montant total des dommages directs est évalué à 2,5 Mds €, dont 1,48 Md € (brut de réassurance) à la charge des assureurs. Bilan réalisé par la Fédération française des sociétés d’assurances (FFSA) et le Groupement des entreprises mutuelles d’assurances (Gema) au 31 décembre 2010. Sur les 470 000 sinistres recensés, 35 000 dossiers (7 %) relèvent du régime Cat Nat, mais représentent à eux seuls la moitié des indemnités versées.
  • [4]
    Selon l’article 4 de la loi n° 82-600 du 13 juillet 1982 : « La Caisse centrale de réassurance est habilitée à pratiquer les opérations de réassurance des risques résultant des catastrophes naturelles, avec la garantie de l’Etat ». Le régime légal d’assurance des catastrophes naturelles, dit Cat Nat, issu de L. n° 82-600, 13 juillet 1982 porte sur « les dommages matériels directs non assurables ayant eu pour cause déterminante l’intensité anormale d’un agent naturel, lorsque les mesures habituelles à prendre pour prévenir ces dommages n’ont pu empêcher leur survenance ou n’ont pu être prises » (Code des assurances, art. L. 125-1).
  • [5]
    Fonds national de garantie des calamités agricoles (FNGCA).
    Fonds d’intervention pour les services, l’artisanat et le commerce (FISAC).
    La TASCOM (Taxe sur les surfaces commerciales) est désormais affectée au budget général de l’Etat et attribue des subventions variant de 20 % minimum pour les dépenses d’investissement matériel à 50 % maximum des dépenses de fonctionnement et d’investissement immatériel.
    Les collectivités locales, pour voir couverts leurs dommages non assurables ou les dépenses supplémentaires engagées du fait de la catastrophe, peuvent être aidées par l’Etat selon deux voies : le « fonds de solidarité en faveur des collectivités territoriales et de leurs groupements touchés par des catastrophes naturelles » et la « subvention d’équipement aux collectivités locales pour la réparation des dégâts causés par les calamités publiques ».
    L’UE est impliquée à la fois par son fonds d’urgence dit « mesure 126 », par le Fonds de solidarité de l’UE (à partir de 3,5 milliards d’euros de dégâts estimés), par la réaffectation des fonds européens FEDER, FSE.
  • [6]
    Fonds de prévention des risques naturels majeurs créé par la loi n° 95-101 du 2 février 1995 relative au renforcement de la protection de l’environnement (JCP G 1995, III, 67289) : préserver les vies humaines par des actions de prévention dont l’évacuation des zones les plus dangereuses grâce à des expropriations.
  • [7]
    Le plan gouvernemental en 2011. 60 actions visant « à mieux maîtriser l’urbanisation dans les zones dangereuses, améliorer la vigilance météo et l’alerte des populations, et renforcer la fiabilité des digues », a expliqué la ministre de l’Ecologie, Nathalie Kosciusko-Morizet, devant la presse. Il est doté d’un budget de 500 millions d’euros sur la période 2011-2016, prélevé sur le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), dit fonds Barnier. « On se donne les moyens de tirer toutes les conséquences de la tempête Xynthia », a déclaré la ministre. « Le plan a pour objectif de protéger les populations et de sécuriser l’ensemble du territoire ». Les « moyens mis en œuvre » visent à éviter que ce “drame ne se reproduise’’. La tempête avait relancé le débat sur l’urbanisation du littoral alors que 46 % des communes françaises sont concernées par le risque majeur d’inondation, selon le Service de l’observation et des statistiques de l’environnement. Le plan prévoit donc d’améliorer la gestion des risques avec le développement de plans de prévention des communes du littoral… qui ont fait défaut durant la tempête. Plus de 240 PPR littoraux sont déclarés prioritaires d’ici 2014.
  • [8]
    Loi n° 2010-788, 12 juillet 2010 portant Engagement national pour l’environnement, JO 13 juill. p. 12905 ; JCP A 2011, 2004, Étude J.-P. Brouant.
  • [9]
    « Nous sommes tous là pour les mêmes raisons. Nous possédions des terrains nus rue de la Plage, à Aytré. Après Xynthia, ils sont inconstructibles et invendables, mais l’Etat refuse de nous indemniser parce qu’il s’agit d’espaces non bâtis », résume Milko Mathieux, lui-même dans cette situation. « Je continue à rembourser 1 500 € d’emprunt mensuel pour un terrain dont je ne peux rien faire. Nous vivons une injustice » (membre de l’Association des victimes propriétaires de terrains nus constructibles sur la côte charentaise).
  • [10]
    Source : ENPC /Atelier du changement climatique / Impact des changements climatiques sur les assurances.
    Sophie Charbonnier, Li-Rong-Li et Anthony Briant. 2011. Seuls l’Italie, la Belgique et les Pays-Bas débattent d’un système à la française. En Espagne et en France, la réassurance est entièrement couverte par l’Etat.
    Mission d’enquête sur le régime d’indemnisation des victimes de catastrophes naturelles. Ph. Dumas et alii, Rapport particulier sur les régimes « Cat Nat » dans une vingtaine de pays étrangers, Inspection générale des Finances n° 2005-M-020-04, Conseil général des Ponts et Chaussées n° 2004-0304-01, Inspection générale de l’Environnement N° IGE/05/006.
  • [11]
    Le juge administratif montrerait la voie lorsqu’il écarte tout lien automatique entre la délimitation des zones de solidarité et l’expropriation. TA Nantes, 11 janvier 2011, Association de défense des victimes des inondations de La Faute-sur-Mer et des environs et autres, n°1003953.
  • [12]
    L’article L.125-5 du Code de l’environnement prévoit que : « les acquéreurs ou locataires de biens immobiliers situés dans des zones couvertes par un plan de prévention des risques technologiques ou un plan de prévention des risques naturels prévisibles, prescrit ou approuvé…, sont informés par le vendeur ou le bailleur de l’existence des risques visés par ce plan.(…). A cet effet, un état des risques naturels et technologiques est établi à partir des informations mises à disposition par le préfet ». Le décret du 15 février 2005 a précisé les modalités de mise en œuvre de cette information.
  • [13]
    La prévention des risques naturels. Bilan et nouvelles perspectives en droit national et en droit comparé, Colloque de la SFDE, Biarritz 2007 publié par le ministère de l’Ecologie, de l’Energie, du Développement durable et de la Mer (www.developpement-durable.gouv.fr).
  • [14]
    En vertu de la loi de 2003 sur les risques majeurs, il faut accélérer l’élaboration par le préfet de département d’un dossier départemental des risques majeurs naturels ou technologiques (DDRM) et par le maire d’un document d’information communal sur les risques majeurs (DICRIM).
  • [15]
    SDIS : Services départementaux d’incendie et de secours.
  • [16]
    Proposition de loi tendant à assurer une gestion effective du risque de submersion marine. Sur un texte n° 173 de M. Alain Anziani du 14 décembre 2010 débattu en séance le 22 novembre 2011.
    Voir aussi le débat sur la loi de finances dans la séance du 25 novembre, pour la partie relative au ministère de l’écologie : Le programme 181 « Prévention des risques » sera doté de 312,3 millions d’euros de crédits de paiement, ce qui représente une hausse de 3 % par rapport à 2011[…]. Enfin, la prévention des inondations constituera une priorité en 2012, notamment à travers le plan Submersions rapides, qui sera doté de 500 millions d’euros sur 2011-2016 (site senat.fr/ Compte-rendu des séances).
  • [17]
    Fernand Verger, « Digues et polders littoraux : réflexions après la tempête Xynthia », Physio-Géo [En ligne], Volume 5 | 2011, mis en ligne le 21 juin 2011, Consulté le 26 juin 2011. URL : http://physio-geo.revues.org/1740.
  • [18]
    C. Clus-Auby, R. Paskoff et F. Verger, 2004, Impact du changement climatique sur le patrimoine du Conservatoire du littoral /Scénarios d’érosion et de submersion à l’horizon 2100/ synthèse, http://www.conservatoire-du-littoral.fr

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