Couverture de RJE_203

Article de revue

Collectivités territoriales et environnement 2019

Pages 577 à 589

Notes

1L’année 2019 ancre toujours un peu plus la transition énergétique et la lutte contre le réchauffement climatique dans les territoires, en renforçant le rôle des collectivités territoriales dans leur mise en œuvre, comme l’atteste l’adoption de la loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat [1], et de la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM). Ce renforcement s’effectue néanmoins d’une manière peu linéaire, comme le montre l’incessante réforme de la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI) d’une part, et de celle de l’eau et de l’assainissement d’autre part, depuis 2015 jusqu’à 2019, et sans doute au-delà.

2Développer les réponses locales constitue ainsi pour les pouvoirs publics l’une des voies à suivre pour faire face à « l’urgence écologique et climatique » (I.), comme le manifeste la remise à plat des mobilités dans les territoires (II.), l’ancrage territorial de l’Office français de la biodiversité (III.), ou l’actualisation de la Trame verte et bleue et des nouveaux schémas d’aménagement (IV.). Ces réponses émergent cependant parfois laborieusement. C’est aussi ce que montre le nouvel épisode du transfert de l’eau et de l’assainissement aux communautés de communes (V.), les derniers ajustements pour la gestion des milieux aquatiques et préventions des inondations (VI.) ou la question de la mobilisation des opérateurs de la restauration collective contre le gaspillage alimentaire (VII.).

I – Développer les réponses locales à « l’urgence écologique et climatique »

3La loi n° 2019-1147 du 8 novembre 2019 relative à l’énergie et au climat, relie l’ensemble des objectifs de « la politique énergétique nationale » à la nécessité de « répondre à l’urgence écologique et climatique » (art. L. 100-4, C. de l’énergie) au niveau national comme au niveau local, ainsi qu’est chargé de l’analyser le Haut conseil pour le climat (HCC), depuis son installation le 27 novembre 2018, sur la base d’une organisation précisée par le décret n° 2019-439 du 14 mai 2019 [2].

4Qualifié d’« organisme indépendant » par la loi (art. 10), le HCC est en effet chargé de remettre chaque année au Premier ministre un rapport rendant compte du respect de la trajectoire de baisse des émissions de gaz à effet de serre, eu égard aux budgets carbone, mais aussi de la mise en œuvre et de l’efficacité des politiques et mesures décidées par l’État et les collectivités locales pour réduire les émissions de gaz à effet de serre, réduire l’empreinte carbone et développer l’adaptation au changement climatique (art. L. 132-4.-I. C. env.).

5L’évaluation de la contribution des réponses locales ou territoriales à « l’urgence écologique et climatique », se traduit également dans la loi (art. 68), par l’obligation faite au Gouvernement, deux ans après sa promulgation, de remettre au Parlement un rapport concernant la contribution des plans climat-air-énergie territoriaux (PCAET) et des schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADDET) aux politiques de transition écologique et énergétique. Ce rapport doit notamment comparer cette contribution aux objectifs nationaux et aux orientations nationales inscrits dans la programmation pluriannuelle de l’énergie et la stratégie nationale bas-carbone.

6Les plus grandes collectivités territoriales et leurs groupements doivent déjà établir, depuis 2010, un bilan d’émissions de gaz à effet de serre (art. L. 229-25 C. env.) qui peut contribuer à éclairer le HCC comme le Gouvernement. La loi du 8 novembre 2019 en précise le régime (art. 28) : les régions, les départements, les métropoles, les communautés urbaines, les communautés d’agglomération et les communes ou communautés de communes de plus de 50 000 habitants ainsi que les autres personnes morales de droit public employant plus de deux cent cinquante personnes, couverts par un PCAET, peuvent intégrer ce bilan, et leur plan de transition, dans le PCAET.

7Au-delà de l’évaluation ou de la planification, plusieurs dispositions du texte incitent les collectivités territoriales compétentes à développer le recours aux énergies renouvelables dans les projets de construction qu’elles autorisent ou conduisent, quand la loi ne le leur impose pas.

8Ainsi, l’article 44 ajoute une dérogation à l’interdiction de construire dans la marge de recul instituée par la loi Barnier de 1995. L’objectif est de permettre l’installation de centrales de production d’énergie solaire sur les parcelles déclassées, les aires de repos, de service et celles de stationnement du réseau routier (art. L. 111-7 C. urb.).

9Dans le même sens, l’article 47 prévoit que les nouvelles constructions (locaux à usage industriel ou artisanal, entrepôts, hangars non ouverts au public…) de plus de 1000 m2 d’emprise au sol, soumises à une autorisation d’exploitation commerciale, ainsi que les parcs de stationnement couverts accessibles au public, doivent intégrer, sur au moins 30 % de la toiture du bâtiment ou de l’ombrière surplombant le parking, un « système de végétalisation basé sur un mode cultural garantissant un haut degré d’efficacité thermique et d’isolation et favorisant la préservation et la reconquête de la biodiversité », ou un procédé de production d’énergies renouvelables, ou encore tout autre dispositif aboutissant au même résultat, sauf impossibilité constatée par l’autorité compétente en matière d’urbanisme.

10De plus, l’article 35 de la loi introduit à l’article L. 515-16-1 du Code de l’environnement une procédure dérogatoire favorisant l’implantation d’installations de production d’énergie renouvelable suivant laquelle le représentant de l’État dans le département peut, après avis de la commune et de l’EPCI concernés, accorder des dérogations aux interdictions et prescriptions fixées par les plans de prévention des risques technologiques pour permettre l’implantation de telles installations.

11La loi ouvre par ailleurs (art. 14) aux « autorités organisatrices de réseaux publics de distribution d’électricité » la possibilité de recevoir des aides pour réaliser, dans les communes rurales, des « opérations de maîtrise de la demande d’électricité, de production d’électricité par des énergies renouvelables et d’autres actions innovantes concourant à l’atteinte des objectifs de la politique énergétique », lorsqu’elles permettent d’éviter des extensions ou des renforcements de réseaux. Des aides peuvent aussi être accordées pour réaliser des « opérations exceptionnelles (…) qui concourent à la transition énergétique, présentent un caractère innovant et répondent à un besoin local spécifique » (art. L. 2224-31, CGCT).

12Il peut en résulter, en référence à la directive (UE) 2019/944 du Parlement européen et du Conseil du 5 juin 2019 concernant des règles communes pour le marché intérieur de l’électricité et modifiant la directive 2012/27/UE, l’émergence de « communautés d’énergie renouvelable », ou de « communautés énergétiques citoyennes », que la loi se charge de définir (art. 40 du texte modifiant l’art. L. 211-3-2 du Code de l’énergie) et dont peuvent être membres des collectivités territoriales ou leurs groupements.

II – La remise à plat des mobilités dans les territoires

13L’adoption de la loi énergie et climat, précède de peu en 2019, celle de la loi sur les mobilités. Le lien entre les transports et le climat n’est plus à démontrer. Avec 24 % des émissions, le secteur du transport est le premier secteur émetteur de gaz à effet de serre [3]. C’est pourquoi, afin de réduire les émissions de ces gaz, l’objectif d’une neutralité carbone des transports terrestres d’ici 2050 est désormais inscrit dans la loi n° 2019-1428 du 24 décembre 2019 d’orientation des mobilités (LOM) [4]. La notion de « mobilité » remplace ici celle de « transport » et manifeste ce faisant un changement de paradigme sur la manière dont les pouvoirs publics entendent rendre compte des politiques de déplacement, y compris au niveau local, et de leur impact sur l’environnement.

14En effet, le lien entre mobilité, climat et collectivités territoriales n’est plus à faire non plus. C’est pourquoi, la transition énergétique occupe une place importante dans la loi, tout comme les collectivités territoriales pour sa mise en œuvre, notamment en matière d’investissement.

15Ainsi, le nouvel article L. 1111-3 du Code des transports dispose que « dans la programmation des infrastructures, sont pris en compte différents enjeux », dont « la lutte contre le changement climatique et la pollution atmosphérique et sonore ainsi que de la protection de la biodiversité ». Ce faisant, il confie aux intercommunalités et aux régions, une fonction étendue d’autorités organisatrices de mobilités (AOM), chargées de concilier l’ensemble de ces objectifs.

A – Les autorités organisatrices de mobilité (AOM)

16Les communautés d’agglomération, les communautés urbaines, les métropoles et la métropole de Lyon demeurent, dans la loi LOM, autorités organisatrices de la mobilité (auparavant autorité organisatrice des transports) et obligatoirement compétentes en ce domaine conformément au dispositif mis en place par les lois Chevènement de 1999 et MAPTAM de 2014.

17Les communautés de communes pouvaient, avant l’entrée en vigueur de la loi LOM, exercer tout ou partie de la compétence d’organisation de la mobilité au titre de leurs compétences facultatives. La loi leur demande désormais de statuer sur une éventuelle prise de compétence avant le 31 mars 2021, pour un exercice effectif au 1er juillet 2021 (art. L. 1231-1 C. des transports). En cas d’absence de transferts de compétences aux communautés de communes au 1er juillet 2021, ou sur demande acceptée d’une commune qui n’exerce pas cette compétence, la région se substituera néanmoins à elles, l’Ile-de-France constituant un cas particulier en la matière (art. L. 1241-1).

18Être autorité organisatrice de mobilités signifie notamment organiser des services réguliers ou à la demande de transport public de personnes, organiser des services relatifs aux mobilités actives ou contribuer au développement de ces mobilités. Les mobilités actives sont définies à l’article L. 1271-1 du même Code, et désignent l’ensemble des modes de déplacement pour lesquels la force motrice humaine est nécessaire, avec ou sans assistance motorisée, et notamment la marche à pied et le vélo.

19Les AOM assurent la planification, le suivi et l’évaluation de leur politique de mobilité, et associent à l’organisation des mobilités l’ensemble des acteurs concernés. Ainsi, elles « contribuent aux objectifs de lutte contre le changement climatique, la pollution de l’air, la pollution sonore et l’étalement urbain » (L. 1231-1-1, C. transp.). La région, en plus d’être le cas échéant AOM « locale », exerce le rôle d’autorité organisatrice de la mobilité régionale (art. L. 1231-3).

B – Le plan de mobilité

20La planification passe par l’adoption d’un plan de mobilité (PDM) par les AOM, qui remplace au 1er janvier 2021 les anciens plans de déplacement urbain (PDU, art. L. 1214-1 C. transp.). Le PDM n’est cependant obligatoire que dans les ressorts territoriaux des AOM inclus dans les agglomérations de plus de 100 000 habitants mentionnées à l’article L. 221-2 du Code de l’environnement.

21Le plan de mobilité détermine les principes régissant l’organisation de la mobilité et vise à contribuer à la diminution des émissions de gaz à effet de serre liées au secteur des transports, Des évaluations et des calculs des émissions de gaz et de polluants atmosphériques générées par les déplacements à l’intérieur du ressort territorial de l’autorité organisatrice compétente, sont réalisés à l’occasion de l’élaboration ou de la révision d’un plan de mobilité (article L. 1214-8-1 C. env.)

C – Le développement du vélo et des « mobilités actives »

22Le plan de mobilité comprend un volet relatif à la continuité et à la sécurisation des itinéraires cyclables et piétons (art. L. 1214-2-1 C. env.). Ce volet définit également les principes de localisation des zones de stationnement des vélos à proximité des gares, des pôles d’échanges multimodaux et des entrées de ville situés dans le ressort territorial. Il définit aussi les outils permettant d’accroître les informations à destination des piétons et des cyclistes, notamment la mise en place d’une signalétique favorisant les déplacements à pied, et ce autant pour l’environnement que pour la santé publique.

23L’objectif du législateur est ainsi de « mettre les mobilités actives », au cœur des mobilités quotidiennes, que le vélo incarne. La loi promeut donc la mise en œuvre d’un plan vélo, avec l’objectif de tripler la part modale du vélo, en passant de 3 à 9 %, et d’en faire une solution de transport à part entière dans les déplacements, d’ici 202 4 [5].

24À ce propos la loi fixe l’obligation de réaliser des itinéraires cyclables en cas de travaux sur des voies urbaines ou interurbaines. Elle prévoit également la réalisation d’un « schéma national des véloroutes et voies vertes ». Selon le nouvel article L. 154-1 du Code de la voirie routière, les véloroutes sont des itinéraires continus destinés à faciliter la circulation des cyclistes sur de moyennes et longues distances. Elles ont notamment pour support des voies appartenant au domaine public ou privé de l’État, de ses établissements publics ainsi que des collectivités territoriales et de leurs groupements compétents en matière de voirie. Elles peuvent déboucher sur un pôle d’échange multimodal dans lequel les collectivités territoriales sont incitées à mettre en place des emplacements de stationnement sécurisés (art. L. 1272-2 C. transp.).

25Enfin, la loi (art. L. 3261-3-1 C. trav.) instaure un « forfait mobilités durables » pour les employeurs dont les modalités seront fixées par décret. Ce forfait remplace l’indemnité kilométrique vélo. Il permet aux employeurs de verser jusqu’à 400 euros par an aux salariés pour leurs trajets domicile-travail réalisés à vélo ou en covoiturage. Les collectivités territoriales, en tant qu’employeur, devront le proposer.

D – Le développement des véhicules électriques ou à faibles émissions de gaz à effet de serre

26De nombreuses dispositions du texte ont vocation à favoriser le développement de l’usage des véhicules électriques, pour lequel les EPCI compétents, notamment en tant qu’AOM, ou les autorités organisatrices d’un réseau public de distribution d’électricité, sont incités à élaborer un « schéma directeur de développement des infrastructures de recharge ouvertes au public pour les véhicules électriques et les véhicules hybrides rechargeables » dans le cadre prévu à l’article L. 334-7 du Code de l’énergie.

27Selon cet article, ce schéma définit les priorités de l’action des autorités locales afin de parvenir à une offre de recharge suffisante pour les véhicules électriques et hybrides rechargeables pour le trafic local et le trafic de transit. L’article L. 1214-2 du Code des transports précise que le plan de mobilité peut tenir lieu de schéma directeur de développement des infrastructures de recharges.

28La loi prévoit également d’imposer de nouvelles acquisitions de véhicules « à faibles émissions de gaz à effet de serre et de polluants atmosphériques » aux collectivités territoriales et à leurs groupements (art. L. 224-7 C. env.), dont la nature doit être précisée par décret.

E – Des zones à faibles émissions (ZFE) dans les collectivités

29La loi modifie enfin les dispositions de l’article L. 2213-4-1 du CGCT pour permettre au maire ou au président d’un EPCI de créer des « zones à faibles émissions mobilité » (ZFE) en remplacement des anciennes « zones à circulation restreinte ». L’instauration de ces zones est rendue obligatoire avant le 31 décembre 2020, lorsque le territoire de la commune ou de l’EPCI compétent dépasse régulièrement les normes de qualité de l’air mentionnées à l’article L. 221-1 du Code de l’environnement. L’accès à ces zones est alors réservé aux véhicules les moins polluants et repose sur le système de vignettes Crit’air (voir art. L. 318-1 Code de la route).

F – Le « droit de vivre dans un environnement sonore sain »

30En lien avec les nuisances engendrées par les mobilités, la loi ajoute enfin un article L. 571-1, A, dans le Code de l’environnement, qui dispose que « l’État et ses établissements publics, les collectivités territoriales et leurs établissements publics, ainsi que les personnes privées concourent, chacun dans son domaine de compétence et dans les limites de sa responsabilité, à une politique dont l’objectif est la mise en œuvre du droit reconnu à chacun de vivre dans un environnement sonore sain ». Cette action d’intérêt général consiste à prévenir, surveiller, réduire ou supprimer les pollutions sonores et à préserver la qualité acoustique. La préservation de l’environnement ne se réduit pas ainsi à la transition écologique ou à la lutte contre l’effet de serre.

III – L’ancrage territorial de l’Office français de la biodiversité

31La loi n° 2019-773 du 24 juillet 2019 [6] a créé l’Office français de la biodiversité (OFB) qui résulte de la fusion de l’Agence française pour la biodiversité et de l’Office national de la chasse et de la faune sauvage. S’agissant des collectivités territoriales, selon l’article L. 131-9 du Code de l’environnement, l’intervention de l’Office français de la biodiversité porte sur l’ensemble des milieux terrestres, aquatiques et marins du territoire métropolitain, des collectivités régies par l’article 73 de la Constitution, des collectivités de Saint-Martin et de Saint-Pierre-et-Miquelon ainsi que des Terres australes et antarctiques françaises. Il peut aussi mener, dans le cadre de conventions, des actions à Saint-Barthélemy, dans les îles Wallis et Futuna, en Polynésie française ainsi qu’en Nouvelle-Calédonie ou dans ses provinces, à la demande de ces collectivités.

32L’OFB et les collectivités territoriales coordonnent leurs actions dans les domaines d’intérêt commun. Les régions ou les collectivités exerçant les compétences des régions et l’OFB peuvent ainsi mettre en place conjointement, dans le cadre d’une convention signée entre les parties, des agences régionales de la biodiversité auxquelles peuvent notamment s’associer les départements et les collectivités territoriales exerçant les compétences des départements.

33Le décret n° 2019-1580 du 31 décembre 2019 relatif à l’OFB [7] en fixe les modalités d’organisation et de fonctionnement. Il dispose notamment (art. 1er et art. R. 131- 27 C. env.) qu’il s’agit un établissement public à caractère administratif, dont le conseil d’administration est composé de 43 membres, dont 3 représentants des comités de bassin ainsi que 3 représentants des collectivités territoriales et de leurs groupements. Le premier président élu fait partie de collège local, étant par ailleurs vice-président du conseil régional de Bretagne, chargé de l’environnement, de la biodiversité, de l’eau et du climat. Le directeur de l’Office, est quant à lui nommé par le président de la République, dans le cadre de la procédure prévue à l’article 13 de la Constitution.

IV – La trame verte et bleue et les nouveaux schémas d’aménagement

34La loi n° 2010-788 du 12 juillet 2010, dite « Grenelle II », a défini la Trame verte et bleue et identifié trois niveaux d’échelles et d’actions emboîtés : le niveau national, où se fixent les orientations, le niveau régional, avec la co-élaboration par la Région et l’État du schéma régional de cohérence écologique (SRCE) et le niveau local, avec la prise en compte du SRCE par les documents de planification (SCoT, PLU et cartes communales…).

35Le décret n° 2019-1400 du 17 décembre 2019 [8] actualise les orientations nationales – et leurs déclinaisons locales – pour la préservation et la remise en bon état des continuités écologiques, notamment pour prendre en compte les schémas régionaux d’aménagement, de développement durable et d’égalité des territoires (SRADETT), issus de la loi NOTRe, en 2015. Son annexe en particulier, reprécise ce que sont les orientations nationales, en rappelant que « la Trame verte et bleue respecte le principe de subsidiarité et s’appuie sur une gouvernance partagée, à l’échelle des territoires (3.4) et que la mise en œuvre de la démarche Trame verte et bleue s’effectue dans le respect du principe de subsidiarité. Elle précise encore que le SRADDET, prévu aux articles L. 4251-1 et suivants du CGCT, est un schéma dit « intégrateur » puisqu’il rassemble les politiques sectorielles qui relèvent de la compétence de la région, à savoir, l’implantation des différentes infrastructures d’intérêt régional, le désenclavement des territoires ruraux, l’habitat, la gestion économe de l’espace, l’intermodalité et le développement des transports, la maîtrise la valorisation de l’énergie, la lutte contre le changement climatique, la pollution de l’air, la protection et la restauration de la biodiversité, ainsi que la prévention et la gestion des déchets. La compétence d’élaboration du SRADDET comprend ainsi la protection et la restauration de la biodiversité, et aussi la déclinaison régionale de la politique trame verte et bleue.

36Les enjeux de continuités écologiques doivent aussi être intégrés dans le schéma d’Aménagement Régional (SAR) des collectivités d’outre-mer relevant de l’article 73 de la Constitution. On rappellera que pour les collectivités françaises d’outre-mer, le SAR est l’outil principal de planification de l’aménagement du territoire, en ce qu’il fixe les priorités de développement, de protection du territoire et de mise en valeur de ce territoire et du patrimoine naturel, historique, matériel, culturel et humain. Son régime a été modifié par l’ordonnance n° 2019-1170 du 13 novembre 2019 relative au régime juridique du schéma d’aménagement régional [9]. Elle introduit une nouvelle rédaction de l’article L. 4433-7 du CGCT, dans une version applicable au 1er mars 2020, qui dispose que les régions de Guadeloupe et de La Réunion, les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique et le Département de Mayotte, élaborent un schéma d’aménagement régional qui fixe les orientations fondamentales à moyen terme en matière de développement durable, de mise en valeur du territoire et de protection de l’environnement, eu égard aux objectifs assignés à l’action des collectivités publiques en matière d’urbanisme.

V – Eau et assainissement : ultimes rebondissements ?

37Le petit cycle de l’eau n’est pas un long fleuve tranquille pour le législateur. La loi NOTRe, du 7 août 2015, a en effet rendu obligatoire le transfert des compétences « eau » et « assainissement », des communes aux communautés de communes et aux communautés d’agglomération, au 1er janvier 2020, les communautés urbaines et les métropoles exerçant déjà ces compétences à titre obligatoire.

38La loi du 3 août 2018 relative à la mise en œuvre du transfert des compétences « eau » et « assainissement » aux communautés de communes (CC) a cependant aménagé les modalités du transfert des compétences à ces communautés, sans remettre en cause le caractère obligatoire de celui-ci, néanmoins reporté, au plus tard, au 1er janvier 2026. L’article 1er de cette loi avait en effet introduit un mécanisme de minorité de blocage permettant le report du transfert obligatoire des compétences « eau » et/ou « assainissement » aux CC jusqu’au 1er janvier 2026, si 25 % des communes membres représentant 20 % de la population intercommunale s’opposaient à ce transfert avant le 1er juillet 2019. Cette faculté était réservée aux CC n’exerçant pas, à titre optionnel ou facultatif, les compétences « eau » et/ou « assainissement », à l’exception du service public d’assainissement non collectif.

39La loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019, dite « engagement et proximité » aménage encore le dispositif. Son article 14 étend en effet la minorité de blocage à tous les cas d’exercice partiel de la ou des compétences, y compris au plan géographique, au sein des communautés de communes. Néanmoins, la loi prévoit que lorsqu’il y a eu activation du pouvoir d’opposition, les communes peuvent toujours décider de transférer librement en tout ou partie les compétences « eau » et/ou « assainissement » à leur EPCI à fiscalité propre par délibérations concordantes dans les conditions du droit commun, en application des dispositions de l’article L. 5211-17 du CGCT, sans que la minorité de blocage puisse y faire obstacle. En revanche, la loi ne permet aucun report pour les communautés d’agglomération dans l’exercice à titre obligatoire des compétences eau et assainissement.

40Par ailleurs, pour ce qui concerne la mise en œuvre, les communautés de communes et d’agglomération peuvent désormais déléguer par convention tout ou partie des compétences « eau », « assainissement des eaux usées » et « gestion des eaux pluviales urbaines » à une commune ou à un syndicat infracommunautaire existant au 1er janvier 2019, quand ils sont inclus en totalité dans le périmètre de l’EPCI concerné, qui demeure responsable de la compétence déléguée.

41Le conseil communautaire statue dans ce cas sur la demande de délégation émise par la commune dans un délai de trois mois à compter de la délibération de la commune et motive tout refus éventuel. La délégation s’opère en outre par convention entre les parties prenantes, c’est-à-dire l’EPCI compétent d’un côté, en tant qu’autorité délégante, la commune ou le syndicat infracommautaire existant au 1er janvier 2019 de l’autre, en tant qu’autorité délégataire.

42S’il s’agit d’un transfert par une commune de la totalité de la compétence « eau » à un EPCI à fiscalité propre, celle-ci est désormais tenue par la loi de transmettre le schéma de distribution d’eau potable mentionné à l’article L. 2224-7-1 du CGCT ainsi qu’un état financier de l’exercice de la compétence. Dans l’hypothèse où ce schéma n’existerait pas, il ne serait alors pas transféré. Son élaboration relèverait dès lors de l’EPCI à fiscalité propre, titulaire de la compétence.

43Enfin, l’article 14 de la loi du 27 décembre 2019 dispose que le mécanisme de « représentation-substitution », prévu au IV de l’article 5216-7 du CGCT, est étendu à la gestion des eaux pluviales urbaines pour les communautés d’agglomération qui pourront ainsi se substituer à leurs communes membres au sein des syndicats exerçant cette compétence, au même titre que pour les compétences « eau » et « assainissement des eaux usées ».

VI – Nouveaux ajustements pour la gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations (GEMAPI)

44Le grand cycle de l’eau fait lui aussi l’objet d’ajustements continuels, depuis la création de la compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations » (GEMAPI) par les lois MAPTAM et NOTRe, au profit des intercommunalités. Celles-ci peuvent néanmoins confier, par transfert ou par délégation, l’exercice de cette compétences à des groupements, les établissements publics territoriaux de bassin (ETPB) et les établissements publics d’aménagement et de gestion de l’eau (EPAGE), dont le régime est « ajusté » par le décret n° 2019-926 du 2 septembre 2019 [10], par modification de l’article R. 213-49 du Code de l’environnement. Ce dernier prévoyait, notamment, deux séries de dispositions, en ses I et II, que viennent compléter celles introduites par le décret.

45En premier lieu, le I de l’article R. 213-49 énonçait les critères que doit respecter la délimitation par le préfet coordonnateur de bassin du périmètre d’intervention de l’EPTB ou de l’EPAGE. Le décret ajoute un « I bis », qui définit les missions d’un ETPB sur le territoire d’une collectivité non adhérente, lequel peut établir, sur le territoire de cette collectivité et avec elle, dans la mesure où elle exerce en tout ou partie les missions relatives à la compétence en matière de GEMAPI, des conventions de délégation (art. L. 213-12 C. env.). Il peut aussi produire les avis requis sur les projets ayant une incidence sur la ressource en eau. De plus, cet établissement peut mener des missions de coordination, d’animation, d’information et de conseil à l’échelle du bassin ou du sous-bassin hydrographique et, enfin, définir « un projet d’aménagement d’intérêt commun » (art. L. 213-12 C. env.).

46En second lieu, le II de l’article R. 213-49 énonçait diverses règles de procédure en cas de demande de délimitation du périmètre d’intervention d’un EPTB ou d’un EPAGE, auxquelles le décret apporte trois séries de précisions. D’abord, l’article R. 213-49 prévoyait que la demande de délimitation du périmètre d’intervention de l’EPTB ou de l’EPAGE devait être accompagnée d’un projet de statut et de tout justificatif permettant au préfet coordonnateur de bassin de s’assurer du respect des critères mentionnés au I.

47Le nouveau décret précise le contenu de ce projet de statut, qui « indique notamment chacune des missions ou, le cas échéant, chacune des parties des missions relevant de la compétence de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations […], qui sont exercées par transfert et celles qui peuvent faire l’objet d’une délégation ». Ensuite, l’article R. 213-49 prévoyait que dans le cas où, pour un même bassin, sous bassin ou groupement de sous-bassins hydrographiques, des demandes concurrentes (cas de superposition entre deux périmètres d’intervention d’EPTB ou entre deux périmètres d’intervention d’EPAGE) seraient présentées, le préfet coordonnateur de bassin engagerait une concertation entre les collectivités concernées ou leurs groupements en vue de parvenir à une candidature unique.

48Le nouveau décret précise que la durée de cette concertation ne peut excéder six mois et que, à l’issue de ce délai, si la concertation n’a pas permis d’aboutir à une candidature unique, le préfet coordonnateur de bassin désigne, par décision motivée, le candidat retenu. Enfin, le nouveau décret précise les prérogatives du préfet lorsqu’un EPTB ou un EPAGE n’est plus conforme aux critères.

49Deux décrets apportent encore en 2019 des précisions sur l’exercice de la GEMAPI. Le premier est le décret n° 2019-715 du 5 juillet 2019 [11] relatif aux plans de prévention des risques concernant les « aléas débordement de cours d’eau et submersion marine ». Il a pour objet de définir les modalités de qualification des aléas « débordement de cours d’eau et submersion marine », les règles générales d’interdiction et d’encadrement des constructions, dans les zones exposées aux risques définies par les plans de prévention des risques naturels prévisibles, en application du VII de l’article L. 562-1 du Code de l’environnement. Le second est le décret n° 2019-895 du 28 août 2019 [12] portant diverses dispositions d’adaptation des règles relatives aux ouvrages de prévention des inondations. Ce dernier apporte, à l’issue du retour d’expérience d’une première année d’exercice de la compétence GEMAPI, des adaptations aux règles censées garantir l’efficacité de ces ouvrages, pour faciliter la mise en œuvre de la réglementation par les autorités compétentes.

VII – Les opérateurs locaux de la restauration collective contre le gaspillage alimentaire

50Depuis la loi du 11 février 2016 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire, dite loi Garot, l’État, les établissements publics et les collectivités territoriales sont dans l’obligation de lutter contre le gaspillage alimentaire « dans les services de restauration collective dont ils ont la charge ». L’ordonnance n° 2019-1069 du 21 octobre 2019 relative à la lutte contre le gaspillage alimentaire [13], étend cette obligation « à l’ensemble des opérateurs de la restauration collective privée », soit environ 250 opérateurs.

51Mais d’autres dispositions concernent les collectivités territoriales en tant qu’opérateurs de la restauration collective. Ceux-ci ont en effet désormais « l’interdiction de rendre les invendus alimentaires encore consommables impropres à la consommation » sous peine d’une amende de 3 750 euros, « qui peut être assortie de la peine complémentaire d’affichage ou de diffusion par voie de presse » (art. L. 541-15-5 C. env.). En présence de tels « invendus », les opérateurs de la restauration collective, préparant plus de 3 000 repas par jour (au niveau d’une cuisine centrale) et ceux de l’industrie agroalimentaire réalisant un chiffre d’affaires annuel supérieur à 50 millions d’euros, sont désormais dans l’obligation de « proposer une convention aux associations habilitées d’aide alimentaire pour le don de denrées consommables et non vendues » et de réaliser un diagnostic préalable, dans un délai d’un an à compter de la publication de l’ordonnance. La convention est facultative au-dessous du seuil des 3 000 repas par jour (art. 3).

52Enfin, l’article 1er de l’ordonnance impose à ces opérateurs de rendre publics leurs engagements en faveur de la lutte contre le gaspillage alimentaire à compter du 1er janvier 2020 (art. L. 541-15-6-1 C. env.)


Mots-clés éditeurs : biodiversité, climat, communauté d’énergie renouvelable, autorité organisatrice de mobilités, eau et assainissement, gaspillage alimentaire, GEMAPI, énergie

Date de mise en ligne : 14/10/2020

Notes

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