Couverture de RJE_142

Article de revue

Droit des biotechnologies (janvier-décembre 2013)

Pages 297 à 310

Notes

  • [1]
    F. Ost, « L’accélération du temps juridique » in L’accélération du temps juridique, Publication des Facultés universitaires de St Louis, Bruxelles, p. 8.
  • [2]
    J. Chevallier, « Vers un droit post-moderne ? Les transformations de la régulation juridique », RDP, n° 3, 1998, p. 680.
  • [3]
    E. Brosset, « Le droit de l’Union européenne relatif aux OGM : observations sur la réforme et la résistance du (au) droit », in S. Mahieu et K. Merten-Lentz (Dir.), Sécurité alimentaire, nouveaux enjeux et perspectives, Bruylant, 2013, p. 29-67.
  • [4]
    F. Chateauraynaud, Les OGM entre régulation économique et critique radicale, rapport final du programme ANR, EHESS Paris, www.gspr-ehess.com/documents/rapports/RAP-2010-ANROGM.pdf
  • [5]
    E. Brosset, « Droit et biotechnologies : actualités », Les Cahiers de droit de la santé du sud-est, n° 14, mars 2012. Pour des repères antérieurs, voir C. Noiville, M-A. Hermitte et E. Brosset, Organismes génétiquement modifiés, Fascicule Jurisclasseur Environnement, Fasc. 4100, 5, 2009.
  • [6]
    L. Neyret, Atteintes au vivant et responsabilité civile, LGDJ, 2006, p. VIII.
  • [7]
    Article 2, Convention sur la diversité biologique.
  • [8]
    Voir par exemple en France, la loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 exclusivement relative aux OGM.
  • [9]
    Voir par exemple les risques du point de vue de la diversité génétique et du contrôle par les autorités nationales et des communautés locales des activités de recherche du prospecteur.
  • [10]
    Songeons que les premières directives visaient, dès 1990, l’ensemble des OGM, quelles que soient leurs destinations finales, définis comme tout « organisme dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ».
  • [11]
    Directive du 12 mars 2001, JO L 106, p. 1
  • [12]
    Règlement du 22 septembre 2003, JO L 268, p. 1.
  • [13]
    En France, plusieurs maires ont ainsi invoqué leurs pouvoirs de police pour justifier l’adoption d’arrêtés interdisant sur le territoire communal les essais en plein air de plantes génétiquement modifiées. Fluctuante à l’origine, la jurisprudence s’est peu à peu stabilisée et le juge a systématiquement annulé ces arrêtés au motif que le régime d’autorisation administrative de la dissémination volontaire d’un organisme génétiquement modifié relève de la compétence exclusive du Ministre de l’agriculture et que le maire ne saurait, en l’absence de péril imminent, s’immiscer dans l’exercice de cette police spéciale. Voir notamment CE, 24 septembre 2012, Cne Valence, n° 342990, JurisData n° 2012-021153 ; RD rur. 2012, étude 14, obs. C. Hermon ; Environnement et dév. durable, 2012, comm. 92, obs. P. Trouilly ; La Semaine juridique Administration et Collectivités territoriales, n° 1, 7 janvier 2013, obs. Ph. Billet.
  • [14]
    CJUE, 6 septembre 2012, Pionner Hi Bred Italia Srl Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali, aff. C-36/11, non encore publié.
  • [15]
    Pts 72 et 73 : « Il convient de constater d’emblée que, ainsi que le soulignent le gouvernement espagnol et la Commission, l’article 26 bis de la directive 2001/18 ne prévoit qu’une faculté pour les États membres d’introduire des mesures de coexistence. Dès lors, dans l’hypothèse où un État membre s’abstiendrait de toute action en ce domaine, une interdiction de mise en culture d’OGM pourrait se prolonger indéfiniment dans le temps et constituer un moyen de contournement des procédures prévues aux articles 34 du règlement n° 1829/2003 ».
  • [16]
    CJUE, 18 juill. 2013, Commission c/ Pologne, aff. C-313/11, Europe n° 10, octobre 2013, comm. 397, obs. S. Roset.
  • [17]
    Voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2010, Commission/Malte, C508/08, Rec. p. I-10589, point 21.
  • [18]
    CJCE, 9 décembre 2008, Commission c/ France, aff. C-121/07, Rec. p-I-9159.
  • [19]
    Article 265 TFUE : toute personne physique ou morale peut saisir le juge de l’Union pour faire grief à l’une des institutions d’avoir manqué de lui adresser un acte autre qu’une recommandation ou un avis.
  • [20]
    Affaire T-164/10.
  • [21]
    Il s’agit de maïs portant le gène cry1F qui confère une résistance à certains insectes lépidoptères ravageurs, comme la pyrale de maïs et la sésamie.
  • [22]
    Les étapes précédentes étaient les suivantes : notification de la demande par Pionner en 2001 auprès de l’autorité compétente espagnole ; rapport d’évaluation favorable de l’autorité en 2003 ; objections de certains États membres entre 2003 et 2004 ; avis de l’EFSA (2005 et 2006) ; 2009 : convocation du comité de réglementation.
  • [23]
    La Commission a en effet avancé deux arguments qui n’ont pas prospéré : 1/ il s’agissait d’éviter un blocage de la procédure (cependant, en cas de rejet du Conseil, la procédure prévoit un retour devant la Commission, pt 54) ; 2/ il s’agissait d’attendre la prise de fonction du nouveau collège des Commissaires (cependant, l’invitation à agir a été envoyée deux mois après la prise de fonction, pt 56).
  • [24]
    Ici s’ajoutait une interrogation liée au fait que la Commission devait « proposer » sans tarder ce qui était susceptible d’être interprété comme un acte préparatoire d’une décision insusceptible comme tel de faire l’objet d’un recours, en carence comprise. Cependant, en application d’une jurisprudence antérieure, le Tribunal admet la recevabilité dans le cas où la prise de position constitue « le préalable nécessaire au déroulement d’une procédure devant déboucher sur un acte juridique » ce qui était le cas ici puisque sans proposition, aucune décision finale concernant la mise sur le marché ne peut être adoptée (pt 32).
  • [25]
    Ordonnance, 4 septembre 2009, Pioneer Hi-Bred International c/ Commission, aff. T-139/07, non publiée au Rec.
  • [26]
    Est recommandée la plantation de lignes de bordure non transgéniques en tant que zones refuges pour les espèces cibles, ce qui réduirait également l’exposition des mauvaises herbes se trouvant à la limite des champs (et donc celles des lépidoptères non-cibles) au pollen provenant du maïs Bt.
  • [27]
    Pt 71.
  • [28]
    Conformément à sa jurisprudence passée : CJCE, 18 novembre 1999, Pharos c/ Commission, aff. C-151/98 P, Rec. P. I-8157.
  • [29]
    En effet, aucune majorité qualifiée n’a été atteinte le 11 février 2014 pour ou contre cette proposition. Concrètement, 19 États membres ont voté contre cette proposition (dont la France, la Hongrie, l’Irlande, les Pays-Bas…), trois ont voté pour et six se sont abstenus (dont l’Allemagne, le Portugal, la République tchèque et la Belgique).
  • [30]
    Voir l’article 30-2 de la directive 2001/18 et l’article 35-2 du règlement n° 1829/2003 qui renvoient tous deux à l’article 5 de la décision 1999/468 du 28 juin 1999 fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23) telle que modifiée par la décision 2006/512 du Conseil du 17 juillet 2006 (JO L 200, p. 11). En cas d’avis négatif émis par le comité de représentants permanents sur la proposition de mesure de la Commission ou de l’absence de vote de la part de ce comité, la Commission ne peut prendre de décision ; elle a au contraire l’obligation de soumettre une proposition au Conseil. Ce n’est que si le Conseil n’a pas statué ou n’a pas indiqué qu’il s’opposait à la proposition, et ce par deux fois, que la décision pourra être arrêtée par la Commission.
  • [31]
    Il s’agit du comité réglementaire sur la dissémination d’OGM dans l’environnement pour la directive 2001/18 et du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé pour le règlement n° 1829/2003.
  • [32]
    Affaire T-240/10.
  • [33]
    Il s’agissait de deux décisions, une décision 2010/135/UE concernant la mise sur le marché de la pomme de terre à des fins industrielles (pour l’obtention d’un amidon particulier) et de la décision 2010/136/UE concernant la mise sur le marché d’aliments pour animaux à partir de cette pomme de terre.
  • [34]
    Pt 85.
  • [35]
    Il s’agit d’un règlement en application du règlement (CE) n° 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil et modifiant les règlements de la Commission (CE) n ° 641/2004 et (CE) n ° 1981/2006, JO L 157 du 8 juin 2013, p. 1-48.
  • [36]
    C. Noiville, « Du juge guide au juge arbitre ? Le rôle du juge face à l’expertise scientifique dans le contentieux de la précaution », in E. Truilhé-Marengo (Dir.), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, 2011, p. 51-99.
  • [37]
    Affaire T-240/10.
  • [38]
    Pt 96.
  • [39]
    Pour d’autres illustrations : E. Brosset, « L’expert, l’expertise et le juge de l’Union européenne » in E. Truilhé-Marengo (Dir.), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, 2011, p. 247- 280.
  • [40]
    « Les conclusions de l’avis consolidé de l’EFSA de 2009 sur lesquelles se fondent les propositions modifiées, mettant d’avantage en exergue l’incertitude scientifique (« pas complètement compris », « limitations », « incertitudes », « improbable ») et les dangers (« cause de préoccupation mondiale ») que les conclusions de l’avis de l’EFSA de 2005 (« aucune raison de supposer », « ne poserait aucun risque supplémentaire », « aucun risque significatif », « aucun effet préjudiciable pour l’environnement n’a été observé ou ne serait probable ») (…) » (pt 98).
  • [41]
    n° 358103, 358615, 359078.
  • [42]
    CJUE, 8 septembre 2011, Monsanto SAS et autres contre Ministre de l’Agriculture et de la Pêche, non encore publié. E. Juet, « Produits OGM existants et mesures nationales d’urgence », Revue de droit rural, 2012 n° 406 p. 30-31 ; H. Delzangles, « Nouvelles précisions de la CJUE sur la législation européenne relative aux OGM », Revue juridique de l’environnement 2012, p. 83-87.
  • [43]
    CE, 28 novembre 2011, Société Monsanto SAS et autres, n° 313605 et autres et n° 312921.
  • [44]
    L’article 23 de la directive 2001/18 ouvre directement, pour les États membres, la possibilité in extremis de ne pas appliquer ou d’appliquer partiellement la décision d’autorisation communautaire. L’autorité compétente est en principe tenue de délivrer le consentement écrit permettant la mise sur le marché du produit. Toutefois, si elle dispose entre-temps de nouveaux éléments d’information qui l’amènent à considérer que le produit peut présenter un risque pour la santé humaine et l’environnement, elle n’est pas tenue de donner son consentement.
  • [45]
    Pour la directive, l’existence « d’informations nouvelles ou complémentaires, devenues disponibles après que l’autorisation ait été donnée » et conduisant à penser que l’OGM présente un risque peut permettre de justifier le recours à cette clause. Sur la base de ces informations obligatoirement postérieures à la délivrance de l’autorisation, l’État membre doit toutefois avoir des raisons « précises » de suspecter des risques sanitaires ou environnementaux.
  • [46]
    Conseil d’État, 28 mai 2011, Société Monsanto SAS et autres, n° 312921.
  • [47]
    Suite à l’annulation, la France avait adressé à la Commission européenne le 20 février 2012 une lettre lui demandant explicitement de prendre une mesure de suspension de la culture du maïs. Une fois cette demande effectuée et sans réponse, le 16 mars 2012, le ministre de l’Agriculture interdisait par arrêté la culture du maïs.
  • [48]
    Le Conseil d’État, dans l’arrêt, utilise en effet une formulation propre qui est l’exacte reprise de l’article 34 énonçant que le Ministre n’a pas démontré l’existence d’un risque « important mettant en péril de façon manifeste l’environnement ». Il est possible d’y voir ici une interprétation plus restrictive que ce qui est prévu par le droit de l’Union qui n’évoque pas cette « mise en péril »…
  • [49]
    Dans un avis du 8 décembre 2011, l’Autorité européenne de sécurité des aliments avait en effet admis qu’une pratique intensive de la culture de maïs génétiquement modifié était susceptible de donner lieu au développement d’une résistance chez les insectes cibles et à la réduction des populations de certaines espèces de lépidoptères. Elle avait souligné toutefois que des mesures de gestion du risque appropriées (par exemple l’utilisation de zones-refuges de maïs non génétiquement modifié) pourraient permettre de diminuer ces risques et dans ces conditions, le maïs génétiquement modifié MON 810 n’est pas susceptible de soulever davantage de préoccupations pour l’environnement que le maïs conventionnel. Cependant, la Commission européenne n’avait pas, à la suite de l’avis, imposé la mise en œuvre de mesures de gestion telles que celles préconisées par cet avis.
  • [50]
    A. Rouyère, « L’exigence de précaution saisie par le juge. Réflexions inspirées par quelques arrêts récents du Conseil d’État », RFDA, 2000, p. 278 ; C. Cans, « Le principe de précaution, nouvel élément du contrôle de légalité », RFDA, 1999, p. 759.
  • [51]
    CE, 24 février 2006, Fédération des syndicats agricoles, M.O.D.E.F., n° 274458, 274459.

1Remarques liminaires. Tout commencement mérite explications. La première d’entre elles consiste à justifier la chronique. Est-ce utile de répéter que « l’emballement de la temporalité juridique [1] est un phénomène d’ensemble en droit et d’ajouter combien il l’est particulièrement en droit de l’environnement ? Confronté au rythme de la science, le droit de l’environnement est en effet tout à la fois un droit d’anticipation qui cherche à régir des situations non encore survenues et qui ne surviendront peut-être jamais, mais aussi, un « droit réflexif » [2] fréquemment amendé au gré des circonstances. Admettons toutefois que la réforme est dans « l’ADN » [3] du droit des biotechnologies à propos duquel les actualités, législatives ou judiciaires, sont permanentes. Et pour cause, cela est connu, la question des biotechnologies a été rapidement au cœur d’un conflit sourd et le droit fonctionne « comme ressource et comme objet de la lutte » [4]. Il est donc utile, en ce domaine, au-delà d’analyses approfondies, de faire régulièrement à un tour d’horizon. Parce qu’il faut bien déterminer un début, ce tour d’horizon commencera à l’année 2013, renvoyant aux études [5] qui ont précédé cette date pour d’autres références.

2Le périmètre de la chronique devait également être délimité. Précisons que le droit des biotechnologies est envisagé comme une simple division utile du droit, sans considération d’un débat - pourtant intéressant, mais bien trop vaste pour la présente chronique- relatif à l’autonomisation de ce droit et plus largement du droit du vivant [6]. En son sein, doit être isolé un îlot qui constituera principalement l’objet de la chronique, celui du droit des organismes génétiquement modifiés. Objet d’un nombre impressionnant de définitions, la biotechnologie peut être définie comme visant « toute application technologique qui utilise des systèmes biologiques, des organismes vivants ou des dérivés de ceux-ci, pour réaliser ou modifier des produits ou des procédés à usage spécifique » [7]. La biotechnologie prend successivement la forme d’une « invention » issue de la recherche puis celle d’un « produit » destiné à la commercialisation. Or, si le cycle de la technologie fait apparaître un continuum, le droit les distingue clairement, traitant d’un côté la question de la brevetabilité des inventions biotechnologiques pour ensuite ordonner la dissémination et mise sur le marché des organismes génétiquement modifiés [8]. De plus, eu égard au point de mire de la protection de l’environnement, l’invention et la délivrance éventuelle d’un brevet (qui n’implique en aucun cas l’autorisation d’exploiter la technique ou le produit breveté), sans être totalement déconnecté [9], suscitent des questions moindres qui ne seront donc pas intégrées dans la chronique. Pour finir, s’agissant du droit des OGM, le périmètre s’étendra fréquemment au droit européen et international. Et pour cause, la coopération internationale et l’harmonisation par le droit de l’Union européenne ont été tout à fait précoces et vastes en ce domaine [10]. Au passage, deux textes, véritables murs porteurs de ce droit des OGM, seront abondamment cités dans le cadre de cette chronique : il s’agit, d’une part, de la directive 2001/18 relative à la dissémination volontaire d’OGM dans l’environnement [11] et, d’autre part, du règlement 1829/2003 concernant les denrées alimentaires et aliments pour animaux génétiquement modifiés [12].

3L’année 2013. Cette année, le droit des OGM a été en grande partie rythmé par des décisions judiciaires, provenant souvent mais pas exclusivement de la Cour de Justice de l’Union européenne (CJCE). Ces jurisprudences ont concerné principalement le processus d’autorisation de mise sur le marché à des fins ou non de mises en culture, non seulement la procédure de délivrance même de l’autorisation, mais aussi, de manière imbriquée celle relative à l’utilisation des clauses de sauvegarde aux fins de suspendre l’application de l’autorisation précédemment délivrée. Elles ont d’abord permis de confirmer la rigueur du juge de l’Union européenne à propos des mesures nationales de sauvegarde et de leur validité (I). Elles ont ensuite, ce qui est plus nouveau, apporté des précisions à l’endroit de la Commission européenne et de ses obligations dans la procédure de délivrance des AMM (II). Elles ont enfin prolongé une - désormais traditionnelle- interrogation quant à l’évaluation des risques et conjointement quant à l’office des juges dans les contextes de précaution et d’évaluations scientifiques divergentes (III).

I – Confirmation : la stricte validité des mesures nationales de sauvegarde

4La résistance à la dissémination d’OGM est ancienne. Émanant des particuliers ou des autorités locales [13], cette résistance -le plus souvent en marge de la légalité- a été largement relayée par les gouvernements qui ont régulièrement adopté des mesures de sauvegarde visant à suspendre l’application des autorisations délivrées au plan communautaire. Face à ce phénomène d’ampleur, lorsque la CJUE a finalement été saisie, il n’est pas étonnant qu’elle ait tenté de contenir l’ampleur de ces demandes de différenciation, suivant une interprétation rigoureuse, parfois excessivement, à l’égard des possibilités ouvertes par le droit de l’Union à la faveur des États.

5L’ordonnance du 8 mai 2013, Giorgio Fidenato en atteste à nouveau, répétant un raisonnement déjà tenu l’année auparavant. La question préjudicielle portait sur l’interprétation de l’article 26 bis intitulé « Mesures visant à éviter la présence accidentelle d’OGM » de la directive 2001/18/CE et ce, dans le cadre d’une procédure pénale engagée contre M. Fidenato dans laquelle il lui est reproché d’avoir mis en culture certaines variétés de maïs génétiquement modifiés sans avoir obtenu au préalable l’autorisation prévue par la législation italienne. L’autorisation non obtenue par M. Fidenato était prescrite à l’article 1er, paragraphe 2, du décret législatif n° 212/2001 et conçue comme une mesure postérieure et distincte de l’autorisation de mise en circulation et de commercialisation des variétés de maïs génétiquement modifiées en cause (le maïs MON 810) délivrée au plan communautaire et transcrite en Italie par l’inscription de ce type de semences génétiquement modifiées au catalogue commun. La question était la suivante : l’article 26 bis de la directive 2001/18 doit-il être interprété en ce sens qu’il permet à un État membre de s’opposer à la mise en culture d’un OGM en prévoyant l’obtention d’une autorisation nationale additionnelle en tant que mesure de coexistence visant à éviter la présence accidentelle d’OGM dans d’autres cultures ?

6Cette question n’était aucunement nouvelle. Une question très similaire avait en effet déjà été posée à la Cour et avait débouché sur l’arrêt Pionner du 6 septembre 2012 [14]. Dans ce cas, il s’agissait d’un litige opposant Pioneer Hi Bred Italia Srl au ministère des Politiques agricoles, alimentaires et forestières italien au sujet de la légalité d’une note de ce dernier informant Pioneer que, dans l’attente de l’adoption, par les régions, de règles propres à assurer la coexistence des cultures conventionnelles, biologiques et génétiquement modifiées, il ne pouvait instruire sa demande d’autorisation de mise en culture des hybrides de maïs génétiquement modifiés, dérivés du maïs MON 810, déjà inscrits au catalogue commun. Nonobstant la différence formelle entre la note et le décret, la question était substantiellement la même : un État pouvait-il s’opposer à la mise en culture sur son territoire d’un OGM en se fondant sur l’article 26 bis qui prévoit la faculté pour l’État membre d’adopter des mesures de coexistence ? En vertu de l’article 99 du règlement de procédure de la Cour, lorsqu’une question posée à titre préjudiciel est identique ou très proche d’une question sur laquelle la Cour a déjà statué, la Cour peut, à tout moment, décider de statuer par voie d’ordonnance motivée, ce qu’elle a fait.

7Logiquement, la conclusion de la Cour est identique à celle de l’affaire Pioneer. Dans cet arrêt, la Cour avait jugé que l’article 26 bis ne peut donner lieu qu’à des restrictions, voire à des interdictions géographiquement délimitées, en tant que mesures de coexistence effectivement adoptées dans le respect de la finalité de celles-ci et ne permet pas à un État membre de s’opposer de manière générale à la mise en culture sur son territoire d’OGM tels que des variétés du maïs MON 810. La même position est répétée dans l’ordonnance. Parce que l’article 26 bis ne permet pas à un État membre de s’opposer d’une façon générale à la mise en culture sur son territoire de tels OGM, il ne permet pas l’instauration d’une procédure nationale d’autorisation supplémentaire. Dans ces deux affaires, la Cour souligne finalement l’impossibilité pour un État de s’opposer à la mise en culture sur son territoire de tels OGM en se fondant sur d’autres dispositions que la clause de sauvegarde qui, sésame, ne doit en aucun cas être « contournée » [15].

8Remarquons que cette position de rigueur n’est pas forcément toujours à la défaveur des États et l’arrêt de la Cour du 18 juillet 2013, Commission c/ Pologne[16] en témoigne. Une loi polonaise sur les aliments pour animaux adoptée le 22 juillet 2006 prévoit que la production, la mise sur le marché et l’utilisation dans l’alimentation animale d’aliments pour animaux génétiquement modifiés sont interdites, sous peine d’amende. La date d’entrée en vigueur de l’interdiction a été reportée, par voie de modification législative, au 1er janvier 2013. Toutefois, dès 2006, après avoir pris connaissance de la loi, la Commission, considérant que le seul fait de l’adoption et de la publication de l’interdiction litigieuse constituait une infraction au droit de l’Union, dans la mesure où elle affectait la libre commercialisation, la circulation et l’utilisation des aliments pour animaux déjà approuvés, est entrée en contact avec la Pologne. N’étant pas satisfaite des réponses de la Pologne, la Commission lui a finalement, le 23 octobre 2007, adressé un avis motivé l’invitant à prendre les mesures nécessaires pour se conformer à ses obligations, puis a saisi la Cour.

9Dans l’arrêt, la Cour va toutefois rejeter le recours et condamner la Commission aux dépens. Sans aucunement apprécier le fond, la Cour va simplement considérer, en application stricte de sa jurisprudence constante, que ladite disposition ne peut constituer l’objet du recours. Le raisonnement est très simple. La Cour a itérativement considéré que l’existence d’un manquement doit être appréciée en fonction de la situation de l’État membre telle qu’elle se présente au terme du délai fixé dans l’avis motivé. Or, il est indéniable qu’au terme dudit délai, l’interdiction litigieuse n’était pas en vigueur.

10Certes, la Cour avait déjà, sur le modèle de sa jurisprudence en matière de transposition de directives, imposé aux États membres de s’abstenir d’adopter des réglementations susceptibles de produire des effets négatifs contraires aux objectifs du droit de l’Union même avant leur entrée en vigueur [17]. Il s’agit d’ailleurs d’une application logique du principe de loyauté consacré à l’article 4, paragraphe 3, premier alinéa, TUE. Force est, cependant, de constater que la Commission n’a avancé aucun moyen à l’appui de cette obligation ni d’ailleurs invoqué le principe de coopération loyale et la Cour, conformément à sa jurisprudence constante, n’a pas ajouté d’office l’examen de ces arguments de fond.

11Si, donc les manquements sont répétés en la matière et ont amené des jugements sévères de la Cour [18], la condamnation ne peut être « anticipative » et précéder l’entrée en vigueur d’une disposition litigieuse ! Ou autrement dit le zèle de la Commission européenne pour faire cesser les manquements au droit de l’Union ne peut en aucun cas justifier un non-respect des conditions du recours en manquement.

II – Précision : les obligations de la commission européenne dans la procédure d’autorisation de mise sur le marché

12Tout est affaire, on l’a vu, de tempo. Cela ne vaut pas seulement à propos des mesures nationales de sauvegarde, mais également dans le cadre de la procédure même de délivrance de l’autorisation de mise sur le marché. En effet, si la lenteur a pu être précédemment recommandée, dans une autre affaire, elle a également été sanctionnée comme en témoigne le l’arrêt de constatation en carence de la Commission [19] prononcé par le Tribunal de l’Union le 26 septembre 2013 dans l’affaire Pioneer c/ Commission[20].

13Selon les termes de la directive 2001/18, la Commission est obligée, en application de la procédure dite de comitologie, de soumettre une proposition de décision, en premier lieu au comité de réglementation puis, en cas d’absence de majorité qualifiée, de la transférer « sans tarder » au Conseil. Or, en l’espèce, dans le cadre de la procédure de délivrance de la décision d’autorisation ou non de la mise sur le marché pour la culture d’un maïs génétiquement modifié 1507 [21], à l’issue de la réunion du comité qui avait démontré un vif désaccord entre les représentants des États [22], la Commission n’avait pas, pendant plusieurs nombreux mois, saisi le Conseil. Certes, l’expression « sans tarder » ne détermine pas de manière précise un délai et laisse à la Commission une certaine marge de manœuvre pour considérer les lignes d’action possible. Cependant, ici le comportement de la Commission a été jugé dilatoire et tout à fait excessif.

14Il faut dire que les éléments étaient nombreux en défaveur de la Commission. D’abord, un délai de 120 jours est prévu par la directive 2001/18 pour l’adoption d’une décision définitive concernant une demande de mise sur le marché. Or, il avait déjà largement expiré à la date de l’invitation à agir de l’entreprise Pioneer, soit douze mois après la date de la réunion du comité de réglementation. Ensuite, pendant cette période la Commission n’avait sollicité aucun nouvel avis scientifique et pour cause, le motif du report était en parti politique ce que la Commission a d’ailleurs tenté, en vain, de justifier [23]. Logique, le constat de carence n’en demeure pas moins tout à fait remarquable, remarquable d’abord en tant que tel. Les recours en carence sont en effet peu nombreux et échouent souvent au stade de la recevabilité puisqu’il faut démontrer une obligation d’agir [24] que la moindre réaction institutionnelle peut faire disparaître. D’ailleurs ici, la convocation par la Commission de la réunion du comité de réglementation avait, un temps, fait cesser la situation de carence [25]. Le constat est aussi remarquable au fond. Par cet arrêt, le juge rappelle en effet à l’endroit de la Commission -qui avait jusque-là modelé la procédure en fonction des contextes politiques- son obligation d’agir dans un délai raisonnable.

15Certes, ce rappel est conforme au libellé de la directive. Cependant, il est ferme, voire même quelque peu abrupt au point qu’il ne s’articule pas toujours bien avec le doute scientifique. Il faut en effet admettre, pour une part, que le retard était lié à des interrogations scientifiques à propos de l’OGM. D’ailleurs, la Commission avait fait finalement plusieurs demandes d’avis à l’Autorité européenne de sécurité des aliments sur le fondement desquels elle avait invité la requérante à modifier sa notification et à adapter son plan de surveillance (notamment pour proposer des mesures d’atténuation des risques pour les insectes lépidoptères non-cibles) [26]. Or, en réponse, le Tribunal considère que, même si « les OGM constituent un domaine de recherche en permanente évolution » et qu’« il ne fait pas doute que de nouvelles informations scientifiques sont susceptibles d’apparaître à l’avenir », « la Commission ne saurait, de manière dilatoire, multiplier les demandes d’avis à l’EFSA dans l’attente de nouvelles données scientifiques et justifier ainsi son défaut de transmettre la proposition au Conseil » [27]. Les circonstances de l’espèce (7 demandes d’avis qui plus est seulement a posteriori de l’invitation à agir) expliquent sans doute la fermeté du Tribunal. Si la Commission avait, prétextant un dossier sensible et complexe, sollicité juste après la réunion du comité un (seul) nouvel avis scientifique, la Cour aurait été plus positive, à coup sûr [28]. Il n’empêche, l’arrêt paraît retirer la possibilité pour la Commission de faire plusieurs demandes d’avis scientifiques et donc de laisser vivre le débat scientifique gelant pour un temps la décision politique. Elle n’a d’ailleurs pas plus les moyens d’imposer au notifiant, en cas d’informations nouvelles disponibles sur les risques pour la santé humaine ou l’environnement, une modification de sa notification, avant la délivrance de l’autorisation écrite. Elle dispose uniquement de la possibilité de proposer la non-délivrance de l’autorisation de mise sur le marché. Ce n’est pourtant pas le choix qui a été fait dans ce dossier puisqu’à la suite de l’arrêt du Tribunal et sur le fondement des avis réunis, la Commission a proposé, sous réserve de respecter les recommandations en matière de plantations, de délivrer ladite autorisation. Le Conseil ayant échoué à réunir la majorité qualifiée [29], elle devrait adopter sous peu sa proposition, même si, en l’absence de délai imposé, elle devrait attendre un peu.

16Au-delà des délais, le respect de la procédure implique également le respect des compétences de chacun dans la procédure applicable à la délivrance de l’autorisation. Or, par elle-même complexe, la procédure applicable, dite de comitologie, l’est dans le domaine des OGM plus encore du fait de l’effet conjugué de la procédure choisie, la plus lourde (la procédure dite de réglementation) [30] et des réguliers désaccords politiques. La conséquence est qu’un nombre substantiel de dossiers s’est soldé par une absence de majorité qualifiée (en faveur ou en défaveur) au sein des comités des représentants [31] comme au Conseil. Or, en ce cas, la position de la Commission est délicate : certes, juridiquement, lorsque Conseil n’a pas adopté de décision ou indiqué qu’il s’opposait à la proposition de décision, celle-ci est arrêtée par la Commission. Toutefois, d’un point de vue politique, le doit-elle alors même que tous les États étaient en profond et durable désaccord ?

17Dans ce débat, l’arrêt du Tribunal rendu le 13 décembre 2013, Hongrie c/ Commission européenne[32], rendu en réponse à un recours en annulation formé par la Hongrie à propos de deux décisions de la Commission relatives à la mise sur le marché d’une pomme de terre génétiquement modifié [33], est précieux. D’abord parce que pour la première fois, le juge a annulé des décisions d’AMM et précisément pour violation de la procédure. Ensuite parce que le Tribunal a, pour ce faire, tranché au préalable une question institutionnelle d’importance s’agissant de l’équilibre des compétences entre les autorités en charge de la délivrance des autorisations de mise sur le marché, en particulier entre la Commission et le Conseil (et donc les États). D’ailleurs, introduit par la Hongrie, le recours en annulation a vu l’intervention de quatre États supplémentaires pendant la procédure en soutien.

18L’affaire a pour origine les désaccords à propos des risques suscités par la pomme de terre Amflora, plus précisément ici par le gène marqueur de résistance aux antibiotiques (MRA) inséré dans chacune des pommes de terre pour tracer la modification génétique principale. Toute la discussion scientifique était de savoir si ce gène faisait partie de la catégorie des gènes MRA dangereux en ce qu’il peut entraîner une résistance à des antibiotiques qui ont une pertinence thérapeutique ou si la résistance concerne des antibiotiques ayant une pertinence thérapeutique mineure. En fonction, assurément, les risques pour la santé humaine et l’environnement ne sont pas les mêmes. Or, ici, deux agences, l’Agence européenne de sécurité des aliments et l’Agence européenne des médicaments n’avaient pas eu des conclusions identiques. En toute logique, sur ce terreau, les États avaient échoué à se mettre d’accord, au stade des comités comme de celui du Conseil. La Commission, constatant en effet une « incohérence » et souhaitant « éviter toute ambiguïté », donna mandat à l’Autorité européenne de sécurité des aliments pour préparer un second avis consolidé notamment eu égard à la déclaration de l’Agence européenne du médicament. Dans ce deuxième avis, l’Autorité, tout en reconnaissant que les antibiotiques en cause étaient d’une importance thérapeutique élevée voire critique, a maintenu sa position initiale, c’est-à-dire l’improbabilité des effets préjudiciables pour la santé humaine et l’environnement (sur le fondement de l’absence de démonstration du transfert du gène des plantes aux bactéries de l’environnement). Sur la base de cet avis consolidé, la Commission a finalement adopté les deux décisions d’autorisation en ne retournant pas une seconde fois ni devant les comités ni éventuellement devant le Conseil.

19L’interrogation à la base du recours était la suivante : la Commission était-elle obligée de saisir à nouveau le comité ? On mesure bien l’enjeu institutionnel qui se profile ici. Pour répondre, il s’agissait de savoir in fine si la proposition de décision adoptée par la Commission seule était ou non identique à celle déjà produite avant l’avis consolidé et soumise au comité. Or, la réponse n’était pas évidente car si la partie normative était identique (une proposition d’autorisation) ; le préambule (la motivation), du fait de l’évolution du fondement scientifique, était différent. Réitérant une jurisprudence constante selon laquelle le dispositif d’un acte doit être lu à la lumière des motifs, le Tribunal, au terme d’une comparaison scrupuleuse des avis, va conclure que l’avis consolidé constitue une nouvelle évaluation de fond et non une simple confirmation de pure forme. En conséquence, au vu des nouveaux éléments scientifiques, « il n’était donc pas exclu que les membres des comités pussent revoir leur position et réunir une majorité qualifiée pour ou contre les projets de mesures ». « Le résultat de la procédure aurait pu être substantiellement différent » [34]. Partant de là, l’issue s’imposait : la Commission a violé ses obligations procédurales et ses deux décisions sont pour cette raison déclarées nulles.

III – Interrogation : évaluation des risques, office du juge

20L’un des sésames pour l’obtention d’une autorisation est évidemment l’évaluation des risques à propos de l’OGM dont la dissémination est envisagée. En matière d’OGM comme dans bien d’autres domaines, c’est à celui qui sollicite une autorisation de mise sur le marché de réaliser ou de faire réaliser à ses frais une évaluation de son produit, évaluation déterminée par les informations qui doivent obligatoirement être versées dans la notification et vérifiée ensuite par les instances publiques d’expertise. De ce point de vue d’ailleurs, l’adoption du Règlement d’exécution n ° 503/2013 de la Commission du 3 avril 2013 relatif aux demandes d’autorisation de denrées alimentaires et d’aliments pour animaux génétiquement modifiés[35] est importante. Il répond à une demande des États qui, constatant que la grande majorité des demandes actuelles concerne des plantes génétiquement modifiées, pour lesquelles l’expérience acquise est suffisante, souhaitaient que soient prévues de manière plus complète et systématique les informations à fournir dans la demande d’autorisation. L’un de ses apports principaux du règlement est qu’il impose des analyses de toxicologie subchroniques (consistant à administrer oralement la plante à des rongeurs pendant 90 jours). Pourtant, les avis étaient partagés sur la nécessité d’imposer de telles analyses à toutes les plantes ou uniquement, à titre complémentaire, à celles pour lesquelles des incertitudes étaient constatées durant l’évaluation de la sécurité. Toutefois, pour améliorer la confiance des consommateurs, il a été décidé de demander l’indication d’études de ce type dans toutes les demandes relatives à des plantes génétiquement modifiées. Le règlement est intéressant également en ce qu’il contraint désormais les notifiants à mettre à disposition des autorités compétentes l’ensemble des données brutes produites au cours de leurs évaluations et à le faire sous une forme électronique exploitable. L’application du règlement a toutefois été reportée, pour les demandes d’autorisation déposées six mois après l’entrée en vigueur du règlement soit à compter du 8 décembre 2013. Il a été également prévu que les prescriptions relatives aux essais par alimentation d’animaux devront être revues pour la fin de 2015 au plus tard eu égard à l’expérience acquise.

21Les juges, en charge du contrôle des décisions adoptées, sont nécessairement confrontés aux évaluations des risques. Et ils n’hésitent pas très régulièrement à sortir de leur traditionnelle réserve [36] et in fine à arbitrer entre plusieurs interprétations scientifiques. Les arrêts de 2013 le confirment. Cela ressort d’abord de l’arrêt déjà mentionné du Tribunal de l’Union du 13 décembre 2013 Hongrie c/ Commission européenne[37]. L’un des intérêts de l’arrêt, long et technique, est que, pour trancher la question de la violation de la procédure et de l’identité des propositions de la Commission, le Tribunal est allé bien au-delà d’une approche purement formaliste, opérant en effet une lecture détaillée des différents avis scientifiques pour en conclure, sans complexe, que le second avis possède des « différences majeures » avec les avis antérieurs et constitue une « nouvelle évaluation de fond » [38]. Ce faisant, l’arrêt atteste d’un certain point de vue de l’incursion régulière du juge de l’Union sur le terrain de l’expertise scientifique [39]. Remarquons toutefois que le Tribunal prend soin de rappeler qu’il ne lui revient pas de se prononcer sur le bien-fondé des évaluations des risques effectuées dans chacun de ces avis. Remarquons également que la comparaison est globalement très sémantique, le juge expurgeant simplement les termes qui, dans l’avis, semblent indiquer une plus grande incertitude scientifique [40].

22La tendance concerne aussi les juges nationaux. L’arrêt du Conseil d’État du 1er août 2013, Association générale des producteurs de maïs (AGPM) et autres[41] concluant à l’annulation de l’arrêté du 16 mars 2012 suspendant la mise en culture des variétés de semences de maïs génétiquement modifié MON 810, permet de l’illustrer vivement.

23Rappelons que la saga judicaire à propos de ce maïs est ancienne et que l’arrêt fait suite à d’autres arrêts précédents à propos du même maïs. Le ministre de l’agriculture avait en effet, par des arrêtés du 5 décembre 2007 et du 13 février 2008, suspendu puis interdit la mise en culture des variétés de semences de ce maïs et le Conseil d’État avait déjà, en s’appuyant sur la réponse donnée par la CJUE à titre préjudiciel [42], annulé ces arrêtés [43]. Ces précédents sont essentiels pour saisir l’arrêt en cause car ils ont permis de confirmer les conditions procédurales dans lesquelles un État peut adopter des mesures conservatoires. La question pouvait se poser car le maïs MON 810 était dans une situation spécifique : autorisé pour la première fois en 1998, au titre de la directive 90/220, le renouvellement de cette autorisation avait été demandé par la société Monsanto, titulaire de l’autorisation, au titre du règlement n° 1829/2003, renouvellement dans l’attente duquel, conformément au règlement, l’autorisation existante continue à produire ses effets. Quel était donc le texte de référence pour un État membre qui souhaitait, pendant cette période, adopter, à l’instar de la France, une mesure de sauvegarde ?

24C’est en substance la question préjudicielle qui avait été posée à la CJUE par le Conseil d’État français. Une telle précision, a priori uniquement procédurale, ne l’était pas tout à fait. En effet, le libellé des deux textes, s’agissant des mesures de sauvegarde, n’est pas le même. Sous l’empire du règlement, les conditions sont en effet plus serrées. D’abord, les autorités nationales ne peuvent pas suspendre la culture du maïs sur le territoire national sans avoir demandé, au préalable, à la Commission d’adopter elle-même des mesures d’urgence. Certes, les États peuvent prendre des mesures conservatoires lorsque la Commission n’a pas agi alors que la gravité du risque d’atteintes à la santé humaine ou à l’environnement l’exigeait. Toutefois, il ne s’agit ici que d’une possibilité subsidiaire et donc incomparablement plus encadrée que celle établie par la directive [44]. L’autre différence est relative à la nature du risque. Les États, lorsque la Commission n’a pas agi, peuvent, d’une manière subsidiaire, adopter des mesures conservatoires ; mais ils devront démontrer l’existence d’un risque « grave » établi « de toute évidence » pour la santé humaine, animale ou pour l’environnement ce qui est plus restrictif que les « raisons précises » de suspecter un risque sanitaire et environnemental [45]. Or, la Cour va conclure, en se limitant d’ailleurs à l’argument -pour le moins expéditif- de la notification, à l’applicabilité du règlement n° 1829/ 2003 et donc de son article 34. Dans le premier arrêt du Conseil d’État, c’est la première condition, tout à fait procédurale, l’absence de saisine de la Commission, qui avait débouché sur l’annulation du Conseil d’État [46]. Dans le cadre de ce second recours, le Ministre s’étant conformé à la procédure [47], c’est logiquement, la seconde qui est en cause.

25La question au fond posée au Conseil d’État était la suivante : l’arrêté était-il justifié par un risque grave et évident pour la santé et l’environnement ? La réponse du Conseil d’État est négative : selon lui, le Ministre a commis une erreur manifeste d’appréciation en estimant que l’existence d’un tel risque était caractérisée et justifiait la mesure de suspension litigieuse. Au-delà de la reformulation – discutable [48]- du libellé du règlement, l’essentiel est que le Conseil d’État n’a pas hésité ici à arbitrer entre les interprétations scientifiques confirmant la tendance déjà mentionnée. Après avoir relaté le contenu des avis et études publiées, il considère, sans complexe, que les risques potentiels identifiés ne présentent pas selon lui un caractère de gravité alors même qu’a priori une autre interprétation était tout à fait envisageable [49]. L’extension du contrôle sur les faits scientifiques, quoique masquée sous les apparences d’un contrôle classique - comme ici, celui de l’erreur manifeste d’appréciation -, est ici indéniable. On se contentera de conclure que cette extension n’est ni nouvelle [50], y compris dans le domaine des OGM [51], ni tout à fait illogique.

Notes

  • [1]
    F. Ost, « L’accélération du temps juridique » in L’accélération du temps juridique, Publication des Facultés universitaires de St Louis, Bruxelles, p. 8.
  • [2]
    J. Chevallier, « Vers un droit post-moderne ? Les transformations de la régulation juridique », RDP, n° 3, 1998, p. 680.
  • [3]
    E. Brosset, « Le droit de l’Union européenne relatif aux OGM : observations sur la réforme et la résistance du (au) droit », in S. Mahieu et K. Merten-Lentz (Dir.), Sécurité alimentaire, nouveaux enjeux et perspectives, Bruylant, 2013, p. 29-67.
  • [4]
    F. Chateauraynaud, Les OGM entre régulation économique et critique radicale, rapport final du programme ANR, EHESS Paris, www.gspr-ehess.com/documents/rapports/RAP-2010-ANROGM.pdf
  • [5]
    E. Brosset, « Droit et biotechnologies : actualités », Les Cahiers de droit de la santé du sud-est, n° 14, mars 2012. Pour des repères antérieurs, voir C. Noiville, M-A. Hermitte et E. Brosset, Organismes génétiquement modifiés, Fascicule Jurisclasseur Environnement, Fasc. 4100, 5, 2009.
  • [6]
    L. Neyret, Atteintes au vivant et responsabilité civile, LGDJ, 2006, p. VIII.
  • [7]
    Article 2, Convention sur la diversité biologique.
  • [8]
    Voir par exemple en France, la loi n° 2008-595 du 25 juin 2008 exclusivement relative aux OGM.
  • [9]
    Voir par exemple les risques du point de vue de la diversité génétique et du contrôle par les autorités nationales et des communautés locales des activités de recherche du prospecteur.
  • [10]
    Songeons que les premières directives visaient, dès 1990, l’ensemble des OGM, quelles que soient leurs destinations finales, définis comme tout « organisme dont le matériel génétique a été modifié d’une manière qui ne s’effectue pas naturellement par multiplication et/ou par recombinaison naturelle ».
  • [11]
    Directive du 12 mars 2001, JO L 106, p. 1
  • [12]
    Règlement du 22 septembre 2003, JO L 268, p. 1.
  • [13]
    En France, plusieurs maires ont ainsi invoqué leurs pouvoirs de police pour justifier l’adoption d’arrêtés interdisant sur le territoire communal les essais en plein air de plantes génétiquement modifiées. Fluctuante à l’origine, la jurisprudence s’est peu à peu stabilisée et le juge a systématiquement annulé ces arrêtés au motif que le régime d’autorisation administrative de la dissémination volontaire d’un organisme génétiquement modifié relève de la compétence exclusive du Ministre de l’agriculture et que le maire ne saurait, en l’absence de péril imminent, s’immiscer dans l’exercice de cette police spéciale. Voir notamment CE, 24 septembre 2012, Cne Valence, n° 342990, JurisData n° 2012-021153 ; RD rur. 2012, étude 14, obs. C. Hermon ; Environnement et dév. durable, 2012, comm. 92, obs. P. Trouilly ; La Semaine juridique Administration et Collectivités territoriales, n° 1, 7 janvier 2013, obs. Ph. Billet.
  • [14]
    CJUE, 6 septembre 2012, Pionner Hi Bred Italia Srl Ministero delle Politiche agricole alimentari e forestali, aff. C-36/11, non encore publié.
  • [15]
    Pts 72 et 73 : « Il convient de constater d’emblée que, ainsi que le soulignent le gouvernement espagnol et la Commission, l’article 26 bis de la directive 2001/18 ne prévoit qu’une faculté pour les États membres d’introduire des mesures de coexistence. Dès lors, dans l’hypothèse où un État membre s’abstiendrait de toute action en ce domaine, une interdiction de mise en culture d’OGM pourrait se prolonger indéfiniment dans le temps et constituer un moyen de contournement des procédures prévues aux articles 34 du règlement n° 1829/2003 ».
  • [16]
    CJUE, 18 juill. 2013, Commission c/ Pologne, aff. C-313/11, Europe n° 10, octobre 2013, comm. 397, obs. S. Roset.
  • [17]
    Voir, en ce sens, arrêt du 28 octobre 2010, Commission/Malte, C508/08, Rec. p. I-10589, point 21.
  • [18]
    CJCE, 9 décembre 2008, Commission c/ France, aff. C-121/07, Rec. p-I-9159.
  • [19]
    Article 265 TFUE : toute personne physique ou morale peut saisir le juge de l’Union pour faire grief à l’une des institutions d’avoir manqué de lui adresser un acte autre qu’une recommandation ou un avis.
  • [20]
    Affaire T-164/10.
  • [21]
    Il s’agit de maïs portant le gène cry1F qui confère une résistance à certains insectes lépidoptères ravageurs, comme la pyrale de maïs et la sésamie.
  • [22]
    Les étapes précédentes étaient les suivantes : notification de la demande par Pionner en 2001 auprès de l’autorité compétente espagnole ; rapport d’évaluation favorable de l’autorité en 2003 ; objections de certains États membres entre 2003 et 2004 ; avis de l’EFSA (2005 et 2006) ; 2009 : convocation du comité de réglementation.
  • [23]
    La Commission a en effet avancé deux arguments qui n’ont pas prospéré : 1/ il s’agissait d’éviter un blocage de la procédure (cependant, en cas de rejet du Conseil, la procédure prévoit un retour devant la Commission, pt 54) ; 2/ il s’agissait d’attendre la prise de fonction du nouveau collège des Commissaires (cependant, l’invitation à agir a été envoyée deux mois après la prise de fonction, pt 56).
  • [24]
    Ici s’ajoutait une interrogation liée au fait que la Commission devait « proposer » sans tarder ce qui était susceptible d’être interprété comme un acte préparatoire d’une décision insusceptible comme tel de faire l’objet d’un recours, en carence comprise. Cependant, en application d’une jurisprudence antérieure, le Tribunal admet la recevabilité dans le cas où la prise de position constitue « le préalable nécessaire au déroulement d’une procédure devant déboucher sur un acte juridique » ce qui était le cas ici puisque sans proposition, aucune décision finale concernant la mise sur le marché ne peut être adoptée (pt 32).
  • [25]
    Ordonnance, 4 septembre 2009, Pioneer Hi-Bred International c/ Commission, aff. T-139/07, non publiée au Rec.
  • [26]
    Est recommandée la plantation de lignes de bordure non transgéniques en tant que zones refuges pour les espèces cibles, ce qui réduirait également l’exposition des mauvaises herbes se trouvant à la limite des champs (et donc celles des lépidoptères non-cibles) au pollen provenant du maïs Bt.
  • [27]
    Pt 71.
  • [28]
    Conformément à sa jurisprudence passée : CJCE, 18 novembre 1999, Pharos c/ Commission, aff. C-151/98 P, Rec. P. I-8157.
  • [29]
    En effet, aucune majorité qualifiée n’a été atteinte le 11 février 2014 pour ou contre cette proposition. Concrètement, 19 États membres ont voté contre cette proposition (dont la France, la Hongrie, l’Irlande, les Pays-Bas…), trois ont voté pour et six se sont abstenus (dont l’Allemagne, le Portugal, la République tchèque et la Belgique).
  • [30]
    Voir l’article 30-2 de la directive 2001/18 et l’article 35-2 du règlement n° 1829/2003 qui renvoient tous deux à l’article 5 de la décision 1999/468 du 28 juin 1999 fixant les modalités de l’exercice des compétences d’exécution conférées à la Commission (JO L 184, p. 23) telle que modifiée par la décision 2006/512 du Conseil du 17 juillet 2006 (JO L 200, p. 11). En cas d’avis négatif émis par le comité de représentants permanents sur la proposition de mesure de la Commission ou de l’absence de vote de la part de ce comité, la Commission ne peut prendre de décision ; elle a au contraire l’obligation de soumettre une proposition au Conseil. Ce n’est que si le Conseil n’a pas statué ou n’a pas indiqué qu’il s’opposait à la proposition, et ce par deux fois, que la décision pourra être arrêtée par la Commission.
  • [31]
    Il s’agit du comité réglementaire sur la dissémination d’OGM dans l’environnement pour la directive 2001/18 et du comité permanent de la chaîne alimentaire et de la santé pour le règlement n° 1829/2003.
  • [32]
    Affaire T-240/10.
  • [33]
    Il s’agissait de deux décisions, une décision 2010/135/UE concernant la mise sur le marché de la pomme de terre à des fins industrielles (pour l’obtention d’un amidon particulier) et de la décision 2010/136/UE concernant la mise sur le marché d’aliments pour animaux à partir de cette pomme de terre.
  • [34]
    Pt 85.
  • [35]
    Il s’agit d’un règlement en application du règlement (CE) n° 1829/2003 du Parlement européen et du Conseil et modifiant les règlements de la Commission (CE) n ° 641/2004 et (CE) n ° 1981/2006, JO L 157 du 8 juin 2013, p. 1-48.
  • [36]
    C. Noiville, « Du juge guide au juge arbitre ? Le rôle du juge face à l’expertise scientifique dans le contentieux de la précaution », in E. Truilhé-Marengo (Dir.), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, 2011, p. 51-99.
  • [37]
    Affaire T-240/10.
  • [38]
    Pt 96.
  • [39]
    Pour d’autres illustrations : E. Brosset, « L’expert, l’expertise et le juge de l’Union européenne » in E. Truilhé-Marengo (Dir.), La relation juge-expert dans les contentieux sanitaires et environnementaux, La Documentation française, 2011, p. 247- 280.
  • [40]
    « Les conclusions de l’avis consolidé de l’EFSA de 2009 sur lesquelles se fondent les propositions modifiées, mettant d’avantage en exergue l’incertitude scientifique (« pas complètement compris », « limitations », « incertitudes », « improbable ») et les dangers (« cause de préoccupation mondiale ») que les conclusions de l’avis de l’EFSA de 2005 (« aucune raison de supposer », « ne poserait aucun risque supplémentaire », « aucun risque significatif », « aucun effet préjudiciable pour l’environnement n’a été observé ou ne serait probable ») (…) » (pt 98).
  • [41]
    n° 358103, 358615, 359078.
  • [42]
    CJUE, 8 septembre 2011, Monsanto SAS et autres contre Ministre de l’Agriculture et de la Pêche, non encore publié. E. Juet, « Produits OGM existants et mesures nationales d’urgence », Revue de droit rural, 2012 n° 406 p. 30-31 ; H. Delzangles, « Nouvelles précisions de la CJUE sur la législation européenne relative aux OGM », Revue juridique de l’environnement 2012, p. 83-87.
  • [43]
    CE, 28 novembre 2011, Société Monsanto SAS et autres, n° 313605 et autres et n° 312921.
  • [44]
    L’article 23 de la directive 2001/18 ouvre directement, pour les États membres, la possibilité in extremis de ne pas appliquer ou d’appliquer partiellement la décision d’autorisation communautaire. L’autorité compétente est en principe tenue de délivrer le consentement écrit permettant la mise sur le marché du produit. Toutefois, si elle dispose entre-temps de nouveaux éléments d’information qui l’amènent à considérer que le produit peut présenter un risque pour la santé humaine et l’environnement, elle n’est pas tenue de donner son consentement.
  • [45]
    Pour la directive, l’existence « d’informations nouvelles ou complémentaires, devenues disponibles après que l’autorisation ait été donnée » et conduisant à penser que l’OGM présente un risque peut permettre de justifier le recours à cette clause. Sur la base de ces informations obligatoirement postérieures à la délivrance de l’autorisation, l’État membre doit toutefois avoir des raisons « précises » de suspecter des risques sanitaires ou environnementaux.
  • [46]
    Conseil d’État, 28 mai 2011, Société Monsanto SAS et autres, n° 312921.
  • [47]
    Suite à l’annulation, la France avait adressé à la Commission européenne le 20 février 2012 une lettre lui demandant explicitement de prendre une mesure de suspension de la culture du maïs. Une fois cette demande effectuée et sans réponse, le 16 mars 2012, le ministre de l’Agriculture interdisait par arrêté la culture du maïs.
  • [48]
    Le Conseil d’État, dans l’arrêt, utilise en effet une formulation propre qui est l’exacte reprise de l’article 34 énonçant que le Ministre n’a pas démontré l’existence d’un risque « important mettant en péril de façon manifeste l’environnement ». Il est possible d’y voir ici une interprétation plus restrictive que ce qui est prévu par le droit de l’Union qui n’évoque pas cette « mise en péril »…
  • [49]
    Dans un avis du 8 décembre 2011, l’Autorité européenne de sécurité des aliments avait en effet admis qu’une pratique intensive de la culture de maïs génétiquement modifié était susceptible de donner lieu au développement d’une résistance chez les insectes cibles et à la réduction des populations de certaines espèces de lépidoptères. Elle avait souligné toutefois que des mesures de gestion du risque appropriées (par exemple l’utilisation de zones-refuges de maïs non génétiquement modifié) pourraient permettre de diminuer ces risques et dans ces conditions, le maïs génétiquement modifié MON 810 n’est pas susceptible de soulever davantage de préoccupations pour l’environnement que le maïs conventionnel. Cependant, la Commission européenne n’avait pas, à la suite de l’avis, imposé la mise en œuvre de mesures de gestion telles que celles préconisées par cet avis.
  • [50]
    A. Rouyère, « L’exigence de précaution saisie par le juge. Réflexions inspirées par quelques arrêts récents du Conseil d’État », RFDA, 2000, p. 278 ; C. Cans, « Le principe de précaution, nouvel élément du contrôle de légalité », RFDA, 1999, p. 759.
  • [51]
    CE, 24 février 2006, Fédération des syndicats agricoles, M.O.D.E.F., n° 274458, 274459.
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