ADE, Revue « Umweltrecht in der Praxis » (Droit de l’environnement dans la pratique), n˚ 3/2009, numéro spécial sur la jurisprudence du Tribunal fédéral relative à la législation sur les forêts
1L’association suisse pour le droit de l’environnement (ADE) présente un numéro de la revue « Droit de l’environnement dans la pratique » spécifique à la jurisprudence sur les forêts du Tribunal fédéral et intégralement traduit en français.
2L’étude présente le régime forestier fondé sur une loi fédérale du 4 octobre 1991 et une ordonnance du 30 novembre 1992. Selon une jurisprudence constante, la qualification de forêt repose sur des critères objectifs et extérieurs à l’intention des parties, fondés sur ses fonctions économiques, sociales et environnementales et complétés par des critères quantitatifs relatifs à la surface et à l’âge des boisements. Elle se distingue des jardins, parcs et espaces verts fondés sur un critère intentionnel caractérisé par l’action créatrice de l’homme et dont l’objet vise essentiellement à embellir l’espace, l’absence d’entretien pouvant à terme conduire à une requalification en forêt.
3Le défrichement se présente comme une exception à l’interdiction, conduisant le demandeur à apporter la preuve que le projet répond à un intérêt supérieur à la conservation de la forêt, l’absence de danger sérieux pour l’environnement, la prise en compte de la protection de la nature et du paysage, des principes de proportionnalité et de confiance. Le bénéficiaire s’avère soumis à un principe de reboisement caractérisé par une obligation de compensation. L’application stricte des critères légaux par le Tribunal conduit à une réduction progressive du défrichement passant annuellement de 150 hectares dans les années 1990 à 115 à partir de 2000.
4L’article 17 de la loi introduit l’interdiction de constructions qui compromettraient la destination de la forêt, l’appréciation de la distance s’opérant au cas par cas, selon des critères relatifs à la protection des paysages. La violation des dispositions législatives se traduit par des mesures répressives au bénéfice des cantons, le Tribunal relevant avec résignation l’absence de sanction par les autorités compétentes justifiée par un manque de personnel et de moyens concrets.
5Les travaux révèlent une réduction significative des recours, passant d’une moyenne annuelle de trente jugements à moins de dix ces dernières années. Elle trouve notamment sa cause dans un règlement extra-judiciaire des litiges, les cantons préférant la négociation à la voie juridictionnelle. Ils démontrent l’affirmation progressive d’une jurisprudence saluée pour sa sécurité juridique et un contrôle exigé par la Constitution fédérale. Ils sont complétés par un référencement exhaustif des jugements depuis 2000 et une bibliographie spécifique au droit forestier suisse.
6Christophe KROLIK,
7doctorant au CRIDEAU-OMIJ de Limoges,
8lauréat du prix Alexandre-Kiss de l’IUCN.
Solange TELES DA SILVA, « O direito ambiental internacional », Del Rey Editora, 2009, 140 pages
9« Le droit de l’environnement international » appartient à la collection « Pour comprendre » qui s’apparente aux « Que sais-je ? » français. Cette collection se limite au domaine juridique et nous propose, avec ce manuel, une introduction au droit international de l’environnement.
10L’auteur présente son ouvrage comme une introduction aux bases et aux mécanismes du droit international et met l’accent sur le rôle de ce droit à réguler les activités humaines liées au développement aussi bien dans les pays du Sud que dans les pays du Nord.
11Le livre comporte une bibliographie conséquente ainsi qu’un référentiel pratique des traités internationaux, deux outils intéressants pour ceux qui souhaitent approfondir la matière. La plupart des grands thèmes sont organisés autour de trois titres. Le premier titre présente les éléments fondamentaux du droit international de l’environnement : les sources et les évolutions apportées par les grandes conférences internationales. Le deuxième titre est consacré aux acteurs parmi lesquels sont présentés les acteurs classiques ainsi que d’autres acteurs importants tels que les réfugiés environnementaux, le secteur privé et les peuples indigènes. Enfin, le troisième titre référence les principes confirmés ou en formation, avant d’aborder la question de la dynamique du droit international de l’environnement qui aurait mérité un développement plus conséquent. Nous pourrons aussi regretter l’absence de certains développements concernant par exemple le droit maritime.
12« O direito ambiental internacional » convainc malgré sa taille et se place comme un ouvrage utile pour les lecteurs désirant aborder clairement le droit international de l’environnement.
13Mathieu PAGEAUX,
14doctorant à l’Université de Limoges,
15CRIDEAU-OMIJ EA 3177.
M.-P. CAMPROUX-DUFFRÈNE et M. DUROUSSEAU (dir.), « La protection de la nature 30 ans après la loi du 10 juillet 1976 », Presses Universitaires de Strasbourg 2007, 224 pages
16Cette publication fait suite à une journée d’études organisée par la SFDE avec le Centre de droit de l’environnement de Strasbourg. Si les progrès du droit de la protection de la nature sont réels, le bilan reste mitigé. La loi relative à la protection de la nature consacre une conception novatrice des relations homme - nature et initie ce qui sera considéré comme une spécificité substantielle et procédurale du droit de l’environnement à la recherche de son autonomie : le mécanisme des études d’impact. La protection des espèces et le statut juridique de l’animal restent des domaines ouverts et controversés, malgré les apports du droit communautaire en ce qui concerne les espèces protégées. La protection des espaces, quantitativement en progrès, reste souvent scientifiquement inadéquate tant en ce qui concerne les périmètres protégés que les mesures de protection, sans parler du vide juridique des zones contiguës. L’avenir d’une protection régionalisée avec les réserves naturelles régionales et déconcentrée avec les arrêtés de biotope reste incertain alors qu’il faudrait renforcer les instruments locaux à condition de clairement énoncer les droits et devoirs de chacun.
17Michel PRIEUR.
O. LECUCQ et S. MALJEAN-DUBOIS (dir.), « Le rôle du juge dans le développement du droit de l’environnement », Bruylant, 2008, 384 pages
18Cet ouvrage collectif succédant à un colloque aborde en droit français, en droit comparé (Espagne, Grèce, Portugal), en droit communautaire, en droit européen des droits de l’homme et en droit international le rôle du juge dans le développement du droit de l’environnement. Un ouvrage d’une telle densité était impensable il y a encore quinze ans. On doit admettre aujourd’hui que s’instaurent à la fois une conscience environnementale nouvelle des juges et un dialogue des juges. Les thèmes examinés à travers la jurisprudence des divers niveaux de juridictions sont : le droit de l’homme à l’environnement, le principe d’intégration et le développement durable, la relation commerce et environnement et la protection du milieu marin face à la pêche. En conclusion, le professeur Philippe Billet souligne bien le rôle essentiel de l’interprétation prétorienne, mais relève les limites de l’office du juge liées à l’initiative et à l’imagination des requérants.
19Michel PRIEUR.
N. BELAIDI, « La lutte contre les atteintes globales à l’environnement : vers un ordre public écologique ? », préface J.-Cl. Fritz, Bruylant, 2008, 498 pages
20Ouvrage provocateur et stimulant, la recherche entreprise veut répondre à la question : le droit peut-il réduire les atteintes globales à l’environnement ? Du fait du vaste champ ouvert, on ne s’étonnera pas de trouver des développements, par ailleurs fort intéressants, sur une multiplicité de thèmes divers : le droit à l’environnement, le droit pénal, la responsabilité environnementale, la protection internationale de l’environnement, la diversité culturelle, le principe pollueur-payeur, le patrimoine commun de l’humanité. L’approche est juridique, mais toujours éclairée de façon pluridisciplinaire par des réflexions philosophiques, anthropologiques et écologiques. La présentation du droit international est trop pessimiste à notre goût surtout quand les traités cadre sont présentés et assimilés au droit mou. L’ambition du projet donnait au lecteur l’espoir de se concentrer uniquement sur les atteintes « globales ». On regrettera à ce titre l’absence de développements substantiels sur les catastrophes écologiques et les remèdes du droit international et national en matière de prévention et d’assistance d’urgence.
21Michel PRIEUR.
N. HERVÉ-FOURNEREAU (dir.), « Les approches volontaires et le droit de l’environnement », Presses universitaires de Rennes, 2008, 326 pages
22Résultat d’une approche volontaire et dynamique soutenue par la SFDE, cet ouvrage est le fruit d’un colloque et d’une recherche animée par l’infatigable Nathalie Hervé-Fournereau. On ne peut que recommander vivement sa lecture du fait de la richesse et de la variété des contributions. La richesse de l’ouvrage tient à la diversité des approches en droit international, droit communautaire et droit national. La variété résulte des nombreuses études de cas : construction automobile, éoliennes, téléphonie mobile, travaux publics, agriculture, pêche, transport maritime, étiquetage, commerce équitable, responsabilité sociétale des entreprises, documents d’objectifs Natura 2000, lutte locale contre les pesticides.
23Précédant ou accompagnant le droit de l’environnement, ces approches volontaires ont des histoires et des objectifs difficilement comparables. Un fossé existe entre la volonté de mieux faire que ce que le droit n’impose ou de moins faire que ce que le droit n’impose. Parfois même, il s’agit de contourner sinon de « violer » le droit en se déguisant en « vert ». Aussi le juriste, bien que tenté a priori de condamner ce qui pourrait être une dérégulation ou une violation déguisée du droit, doit-il être attentif aux intentions réelles de ceux qui affichent et organisent leur volontarisme, parfois d’ailleurs faussement volontaire. Mais si les approches volontaires ont pour objectif d’enrichir le droit de l’environnement comme le suggère Gilles Martin dans ses conclusions, en vue de le rendre plus effectif, alors vive les accords volontaires à la condition qu’ils soient de véritables instruments contractuels.
24Michel PRIEUR.
M. AMBROISE-RENDU, « Des cancres à l’Elysée, cinq présidents de la République face à la crise écologique », éditions Jacob-Duvernet 2007, 358 pages
25Voilà un ouvrage passionnant écrit par un connaisseur de l’histoire des politiques de l’environnement car pionnier de la rubrique environnement au quotidien Le Monde. Il présente avec beaucoup de finesse et d’humour les actes environnementaux de chacun des présidents de De Gaulle à Chirac, ainsi que le portrait des hommes et des femmes qui ont fait ou défait les grandes décisions environnementales, que ce soit dans le monde politique ou dans les antichambres du château. Qu’on en juge avec les intitulés des chapitres : « De Gaulle et ses parcs, naturalistes je vous ai compris ; les arbres de Pompidou, l’environnement à la française, un ministère ; les chasses de Giscard, l’enfer des bonnes intentions ; les ortolans de Mitterrand, monter sur la scène internationale ; les paradoxes de Chirac, la maison brûle, regardons ailleurs ». En annexe, on trouve une chronologie des ministres de l’Environnement et une liste de l’œuvre législative, réglementaire de chacun des présidents, le discours de Chicago de Pompidou et celui de Johannesburg de Chirac. Finalement, pour chacun des présidents : trop peu et trop tard. Ce livre est une contribution essentielle à l’histoire du droit de l’environnement.
26Michel PRIEUR.
B. E. HILL, « Environmental justice, legal theory and practice », Environmental law Institute press, Washington DC, 2009, 482 pages
27Cet ouvrage explique en quoi consiste la justice environnementale telle qu’elle a été développée aux Etats-Unis avec l’appui de mouvements sociaux et populaires engagés. Le chapitre 1 cherche à définir le problème : est-ce que les minorités et les pauvres souffrent plus que les autres des atteintes à l’environnement et sont plus exposés aux risques environnementaux ? Le chapitre 2 expose comment le mouvement social a pris forme et s’est organisé et avec quels instruments d’action : recours aux droits de l’homme, négociations, procès. Le chapitre 3 passe en revue les initiatives législatives fédérales et celles des Etats. Le chapitre 4 examine les contributions des pouvoirs exécutifs au niveau fédéral et à celui des Etats. Le chapitre 5 présente le mélange complexe entre droit de l’environnement et droits de l’homme et son évolution dans les contentieux en cours. Le chapitre 6 analyse les efforts des professionnels du droit et des barreaux pour intégrer cette dimension sociale aux litiges environnementaux et comment certaines grosses entreprises polluantes ont accepté de participer au dialogue sur la justice environnementale. Les extraits de textes et de jurisprudence qui accompagnent l’ouvrage en font une source inédite. On se demande pourquoi en France aucun parti, ni aucun mouvement n’a véritablement abordé l’environnement sous cet angle qui est pourtant le troisième pilier du développement durable.
28Michel PRIEUR.
Date de mise en ligne : 13/08/2015.