Couverture de RJE_101

Article de revue

Installations classées

Pages 119 à 131

Notes

  • [*]
    Voir également infra observations de R. Schneider, p. 155 et 159.
  • [1]
    Le Gouvernement a mis en place en 2002 un programme d’action visant à la réduction des risques, impliquant la vérification de leur acceptabilité au cas par cas, par la réalisation de mesures comparatives entre installations similaires. La révision des études de dangers s’intègre dans cette démarche préventionniste. Chacun des 672 établissements Seveso à hauts risques a fait l’objet d’une inspection approfondie en 2002, en particulier sur les systèmes de gestion de la sécurité. La circulaire D 09000651, qui fixe les thèmes d’actions nationales de l’inspection des installations classées et de la sécurité industrielle pour l’année 2009, réaffirme le caractère essentiel d’une politique sécuritaire efficace et conforme aux objectifs définis par le Grenelle de l’environnement.
  • [2]
    La gestion du retour d’expérience, c’est-à-dire les leçons à retenir des accidents industriels, est l’une des pièces motrices du dispositif de prévention des risques. Le bureau d’analyse des risques et pollutions industrielles (BARPI) du ministère gère la base de données ARIA, accessible au public sur Internet, qui répertorie les accidents industriels en France et dans le monde.
  • [3]
    Il convient de se référer à la définition donnée par l’article 2 de l’arrêté du 10 mai 2000, modifié par celui du 29 septembre 2005 : il s’agit d’« un événement tel qu’une émission, un incendie ou une explosion d’importance majeure résultant de développements incontrôlés survenus au cours de l’exploitation, entraînant, pour les intérêts visés au L. 511-1 du Code de l’environnement, des conséquences graves, immédiates ou différées et faisant intervenir une ou plusieurs substances ou des préparations dangereuses ».
  • [4]
    Voir recommandation de l’INRS R428, p. 3-4, où se trouve exposé l’examen d’accidents catastrophiques survenus lors de transports ou dans des stockages de nitrate d’ammonium ou d’engrais à base de nitrate d’ammonium.
  • [5]
    Le 21 septembre 2001 au matin, une explosion s’est produite dans le hangar 221 de l’usine AZF de Toulouse, qui contenait environ 300 tonnes de nitrate d’ammonium déclassé. Indépendamment des dégâts matériels importants, on déplore 31 morts, près de 8 000 blessés dont certains très graves.
  • [6]
    Complétant le dispositif issu de la loi sur les installations classées du 19 juillet 1976 concernant toute activité ou nuisance pour l’environnement, la transcription de la directive Seveso II dans l’ordonnancement juridique national s’est faite notamment au travers des textes suivants : décret no 2000-258 du 20 mars 2000 modifiant le décret no 77-1133 du 21 septembre 1977 (JO du 22 mars 2000) ; arrêté du 10 mai 2000 relatif à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses présentes dans certaines catégories d’installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation (JO du 20 juin 2000), modifié par l’arrêté du 29 septembre 2005 (JO no 234 du 7 octobre 2005).
  • [7]
    Elle fabriquait de l’acide sulfurique destiné aux poudreries et à l’industrie du papier, du sulfate d’alumine pour le papier et le traitement de l’eau, et toute une série d’engrais phosphatés pour l’agriculture.
  • [8]
    Par l’arrêté préfectoral du 31 octobre 1991.
  • [9]
    L’arrêté du 10 mai 2000 renforce les exigences en matière d’étude de dangers et prescrit le recensement régulier des substances ou préparations dangereuses susceptibles d’être présentes dans l’établissement (règle d’addition de substances ou de préparations dangereuses). La circulaire du 10 mai 2000 relative à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses présentes dans certaines catégories d’installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation (application de la directive Seveso II) vise à en clarifier les innovations auprès des autorités préfectorales.
  • [10]
    Article L. 514-1 du Code de l’environnement.
  • [11]
    Communiqué de presse, cabinet du préfet de Bordeaux, le 1er juillet 2002.
  • [12]
    Jugement du 3 juillet 2003.
  • [13]
    Arrêt du 3 juillet 2006.
  • [14]
    Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, avait demandé « solennellement la fermeture de cette sœur jumelle de l’usine AZF ».
  • [15]
    L’article 2 dudit arrêté dispose : il s’agit de « l’ensemble des dispositions mises en œuvre par l’exploitant au niveau de l’établissement, relatives à l’organisation, aux fonctions, aux procédures et aux ressources de tout ordre ayant pour objet la prévention et le traitement des accidents majeurs ».
  • [16]
    « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature et de l’environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ».
  • [17]
    C. cass., crim., 21 février 2006, no 05-82.232, publié au Bulletin.
  • [18]
    Mais dans ce cas, pour que la circulaire soit légale, il faut qu’elle ait été prise dans les mêmes formes qu’un arrêté ministériel : CE, 25 septembre 1992, nos 88141, 91714, 109386, Union des industries chimiques.
  • [19]
    Loi no 2000-321 du 12 avril 2000 (JO du 13 avril 2000). Elle comporte des dispositions générales qui trouvent à s’appliquer dans la législation des installations classées. Celles-ci figuraient déjà pour nombre d’entre elles dans le décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l’administration et les usagers.
  • [20]
    CAA Douai, 6 décembre 2001, Société SMEG, no 99DA11366.
  • [21]
    Sous l’empire de l’article 8 du décret du 28 novembre 1983, la jurisprudence avait admis que la mise en demeure pouvait intervenir sans que l’intéressé n’ait eu à bénéficier de ladite procédure contradictoire : CAA Nancy, 11 décembre 1997, Société SRPB Vycone, no 93NC00818 ; CAA Nantes, 16 décembre 1998, Dulière, no 96NT00872.
  • [22]
    CE, 9 juillet 2007, Ministère de l’Ecologie et du Développement durable c/ Société coopérative agricole X, no 288376.
  • [23]
    L’arrêt du 3 juillet 2006 de la CAA de Bordeaux est donc annulé : « qu’il en résulte que la cour administrative d’appel de Bordeaux (…) devait regarder comme inopérant le moyen soulevé devant elle par la société Soferti tiré de ce que la mise en demeure du préfet aurait méconnu la procédure prévue à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, en accueillant un tel moyen, la Cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit ».
  • [24]
    Voir également CAA Bordeaux, 18 octobre 2005, Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement c/ Coopérative agricole Vienne-Anjou-Loire ; CAA Douai, 30 novembre 2006, SAS ICI C et P FRANCE, no 06DA00013.
  • [25]
    BO Ministère de l’Equipement, no 598-98/14 du 10 août 1998.
  • [26]
    C. cass., crim., 21 février 2006, op. cit. Elle en arrive à reconnaître qu’à la lumière des faits, « le délai supplémentaire de cinq jours qui a été laissé par ledit arrêté du 26 septembre 2001 n’était pas irréalisable ».
  • [27]
    En voici un extrait : « objet : entrée en vigueur des dispositions Seveso 2 : complétude des études de dangers (…) suite à votre déclaration établie au titre des articles 3 et 10 de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, il s’avère que le recensement des substances ou préparations dangereuses susceptibles d’être présentes dans votre établissement de Bordeaux range ce dernier dans la catégorie des établissements visés aux paragraphes 1, 2, 3 de l’arrêté ministériel précité (établissement comprenant au moins une installation soumise à autorisation avec servitude d’utilité publique) ; incombe donc à l’exploitant "1. de définir une politique de prévention des accidents majeurs et de mettre en place un système de gestion de la sécurité selon les dispositions de l’annexe III de l’arrêté ; 2. de compléter les études de dangers en incluant le document exposant la politique de prévention des accidents majeurs et le document décrivant le système de gestion de la sécurité ; 3. de fournir les études de dangers complétées des mesures d’organisation et de gestion pertinentes pour la prévention des accidents majeurs". En pratique, ces objectifs vous conduiront à établir ou compléter les études de dangers pour : 1. les installations de l’établissement, qui bien que soumises à autorisation et contenant des substances dangereuses, ne disposent pas d’études de dangers ; 2. les parties d’installations nouvellement couvertes par la notion d’établissement (…) ; 3. les installations existantes dont les études de dangers antérieures vous paraissent insuffisantes au regard des dispositions de la circulaire ministérielle du 10 mai 2000 (…) ».
  • [28]
    BO Ministère de l’Equipement, op. cit.
  • [29]
    TA Nancy, 20 avril 1993, Société Munch-Sartec c/ Ministère de l’Environnement, no 921360.
  • [30]
    TA Rouen, 27 novembre 1998, Commune de Dieppe, nos 981013 et 981014.
  • [31]
    Il s’agit de déterminer les responsabilités de Serge Biechlin, ancien directeur d’AZF, et de la société Grande-Paroisse, exploitant de l’usine et filiale du groupe Total, pour homicides involontaires, blessures involontaires, destructions et dégradations involontaires par l’effet d’une explosion ou d’un incendie et d’infractions au Code du travail.
  • [32]
    Le tribunal correctionnel de Toulouse a placé le 26 février 2009 le groupe Total et son ancien P-DG Thierry Desmarets parmi les prévenus, en réponse à la demande de citation directe d’une vingtaine de parties civiles.
  • [33]
    Cette notion module l’étendue du pouvoir des autorités de polices administratives, qu’elles soient générales ou spéciales. Voir par exemple, concernant la police des édifices menaçant ruine, la police générale du maire en vertu de l’article L. 2212-2-5o du Code général des collectivités territoriales.
  • [34]
    Le « préventeur » ne connaît pas, à l’heure actuelle, de définition « officielle » bien qu’il soit un acteur clé de la prévention. Il s’adresse aux responsables en soulignant les aspects bénéfiques de la prévention pour le fonctionnement général de l’entreprise. Il aide au déploiement d’une démarche professionnelle de prévention, sur le fondement de l’obligation générale de sécurité qui incombe à l’employeur. Il doit le conduire à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs, conformément aux exigences légales et réglementaires en vigueur (le nouveau Code du travail, applicable depuis le 1er mai 2008, a créé une nouvelle partie IV relative à la santé et à la sécurité au travail ; voir art. L. 4121-1 et s.).
  • [35]
    Circulaire du 25 mars 1993, ministre du Travail.
  • [36]
    « Ensemble des sciences et des techniques qui étudient les risques naturels ou technologiques pour essayer d’établir des règles de prévention », 2005, éditions Larousse.
  • [37]
    C. cass., op. cit., : « qu’enfin si les causes de l’explosion de Toulouse n’étaient pas connues, on savait par Didier X… que des ammonitrates provenant de l’usine AZF se trouvaient en stock sur le site de la SNC Soferti ; que le simple principe de précaution associé au caractère récent de l’événement toulousain justifiait dès lors la prise de l’arrêté préfectoral critiqué ».
  • [38]
    2 949 plaignants, une salle de 65 m2, un coût de huit millions d’euros, le procès s’annonce démesuré.
  • [39]
    L’avocat des deux prévenus du procès AZF, Me Soulez-Larivière, fustige la thèse officielle de l’accident industriel et espère que le procès démontrera qu’ils « disent la vérité ».
  • [40]
    Tel n’est malheureusement pas le cas au sein de l’Union européenne : en effet, la Commission européenne a engagé une procédure en manquement à l’encontre de dix Etats membres qui n’ont pas transposé la directive relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution qui conditionne, depuis le 30 octobre 1999, l’ouverture de toute nouvelle installation à une autorisation d’exploiter de la part des autorités nationales. On peut relever plus de 4 000 installations industrielles exploitées en Europe sans autorisations adéquates.
  • [41]
    Eric Naim-Gesbert, « Droit, expertise et société du risque », Revue du droit public, 1er janvier 2007 no 1, p. 33.
  • [42]
    Plusieurs thèses de l’explosion ont déjà été invoquées (attentat, l’étincelle électrique fatale, piste du gaz). Quelle sera celle retenue au final, après expertises et contre-expertises ? Le constat est que l’enquête a été orientée vers l’accident chimique au détriment de toutes les autres pistes.
  • [43]
    Y. Gaudemet, « Les méthodes du juge administratif », Paris, LGDJ, 1972, p. 47.
Arrêté de mise en demeure d’achever des études de danger en quatre jours.
Irrégularité du fait de la brièveté du délai.
Arrêté de suspension du fonctionnement d’une installation classée utilisant du nitrate d’ammonium.
Situation de péril grave et imminent.
Régularité de l’arrêté malgré l’irrégularité de la décision à l’origine de la suspension.

Conseil d’Etat, 14 novembre 2008, Ministre de l’Ecologie et du Développement durable, no 297275

1Vu le pourvoi, enregistré le 8 septembre 2006 au secrétariat du contentieux du Conseil d’Etat, présenté par le ministre de l’Ecologie et du Développement durable ; le ministre de l’Ecologie et du Développement durable demande au Conseil d’Etat d’annuler l’arrêt du 3 juillet 2006 par lequel la cour administrative d’appel de Bordeaux a annulé, à la demande de la société Soferti, d’une part, le jugement du 3 juillet 2003 du tribunal administratif de Bordeaux, d’autre part, l’arrêté du 26 septembre 2001 du préfet de la Gironde mettant en demeure cette société de respecter avant le 1er octobre 2001 les dispositions de l’article 8.1 de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, ainsi que, par voie de conséquence, l’arrêté du 12 octobre 2001 portant suspension du fonctionnement des installations classées autorisées comprenant des substances dangereuses relevant de l’une des rubriques de la nomenclature figurant à l’annexe 1 de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, et a condamné l’Etat à verser à la société Soferti la somme de 3 500 c au titre de l’article L. 761-1 du Code de justice administrative ; (...)

2Considérant que l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, relatif à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses présentes dans certaines catégories d’installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation, a été pris sur la base de l’article 7 de la loi du 19 juillet 1976, ultérieurement codifié à l’article L. 512-5 du Code de l’environnement, qui permet au ministre chargé de l’environnement, après consultation des ministres intéressés et du Conseil supérieur des installations classées, de fixer des règles générales et prescriptions techniques applicables aux installations soumises à autorisation ; que selon les prescriptions issues de l’article 8-1 de cet arrêté ministériel : « les études de dangers définies à l’article 3-5 du décret du 21 septembre 1977 susvisé décrivent, dans un document unique à l’établissement ou dans plusieurs documents se rapportant aux différentes installations concernées, les mesures d’ordre technique propres à réduire la probabilité et les effets des accidents majeurs ainsi que les mesures d’organisation et de gestion pertinentes pour la prévention de ces accidents et la réduction de leurs effets » ; que, dès lors que, comme il en avait le pouvoir en vertu du second alinéa de l’article 7 de la loi du 19 juillet 1976, le ministre avait rendu les prescriptions de l’article 8-1 applicables aux installations existantes soumises à autorisation, ces prescriptions, bien que non incluses dans l’arrêté préfectoral d’autorisation de l’installation, avaient le caractère de « conditions imposées à l’exploitant » au sens de l’article L. 514-1 du Code de l’environnement ; qu’il en résulte que la cour administrative d’appel de Bordeaux, dès lors qu’elle n’avait ni retenu un moyen tiré de l’absence de bien-fondé des prescriptions édictées par l’article 8-1, ni constaté leur observation par l’exploitant, devait regarder comme inopérant le moyen soulevé devant elle par la société Soferti tiré de ce que la mise en demeure du préfet aurait méconnu la procédure prévue à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que par suite, en accueillant un tel moyen, la cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit ; (…)

3Sur la légalité de l’arrêté de mise en demeure du 26 septembre 2001 :

4(…) Considérant toutefois que, lorsqu’un manquement à l’application des conditions prescrites à une installation classée a été constaté, la mise en demeure prévue par les dispositions rappelées ci-dessus a pour objet, en tenant compte des intérêts qui s’attachent à la fois à la protection de l’environnement et à la continuité de l’exploitation, de permettre à l’exploitant de régulariser sa situation dans un délai déterminé, en vue d’éviter une sanction pouvant aller jusqu’à la suspension du fonctionnement de l’installation ; qu’il incombe donc à l’administration, pour donner un effet utile à ces dispositions, de prescrire dans la mise en demeure un délai en rapport avec les mesures à prendre par l’exploitant ; qu’il résulte de l’instruction que l’arrêté du 26 septembre 2001 prescrivait à l’exploitant d’avoir achevé en quatre jours les études de danger requises par l’article 8-1 de l’arrêté du 10 mai 2000 ; que la nature des études en cause rendait matériellement impossible la mise en œuvre d’une telle prescription dans un tel délai ; que, par suite, la société Soferti est fondée à soutenir que la mise en demeure édictée par l’arrêté du 26 septembre 2001 est irrégulière et à en demander pour ce motif l’annulation ;

5Sur la légalité de l’arrêté du 12 octobre 2001 :

6Considérant qu’il résulte de l’instruction que la suspension de l’activité prononcée par l’arrêté attaqué a été motivée par le danger immédiat que constituait, eu égard à la localisation de la société, la poursuite de son exploitation sans que l’on dispose d’une étude des dangers actualisée ; qu’un très grave accident venait d’intervenir quelques jours plus tôt sur le site de la société Grande-Paroisse, à Toulouse, impliquant du nitrate d’ammonium technique, et qu’un produit de même nature, en provenance de l’usine de Toulouse, était utilisé par la société Soferti sur son site de Bordeaux ; qu’en l’absence de connaissance des causes de l’accident de Toulouse, et en l’absence des études de dangers concernant l’exploitation de Bordeaux, qui auraient permis d’en mesurer les risques, la continuation du fonctionnement des installations exploitées par la société Soferti sur son site de Bordeaux, impliquant directement le produit en cause, créait une situation de péril grave et imminent ; que par suite, les moyens tirés de ce que la décision ordonnant la suspension du fonctionnement de ces installations serait intervenue à la suite d’une mise en demeure irrégulière, et à la suite d’une consultation irrégulière du comité départemental d’hygiène, sont inopérants ;

7Considérant qu’il résulte de ce qui précède que la société Soferti n’est fondée à demander la réformation du jugement du tribunal administratif de Bordeaux du 3 juillet 2003 qu’en tant qu’il a rejeté sa demande tendant à l’annulation de l’arrêté du 26 septembre 2001 ; (…)

8Décide :

9Article premier. – L’arrêt du 3 juillet 2006 de la cour administrative de Bordeaux est annulé.

10Art. 2. – L’arrêté du 26 septembre 2001 du préfet de la Gironde est annulé.

11Art. 3. – Le jugement du 3 juillet 2003 du tribunal administratif de Bordeaux est réformé en ce qu’il a de contraire à la présente décision.

Note [*] : Nitrate d’ammonium et ICPE : vers un contrôle « précautionneux » du juge

12L’arrêt du Conseil d’Etat du 14 novembre 2008 conforte, dans une large mesure, l’action conduite par le Gouvernement pour le renforcement de la sécurité industrielle en France [1]. La logique du dispositif de prévention des risques, fondée sur la connaissance par le retour d’expérience [2], trouve toute son application concrète dans notre espèce. Plusieurs événements dramatiques, pouvant conduire à des accidents majeurs [3], ont périodiquement mis en évidence la grande dangerosité des stockages de nitrate d’ammonium [4] : l’explosion de l’usine AZF, le 21 septembre 2001, en est la triste illustration [5].

13L’analyse prétorienne souligne clairement, pour les exploitants des installations les plus dangereuses [6], l’obligation de mettre en œuvre des démarches efficaces d’identification des risques, afin de veiller au maintien de la sécurité dans la durée. Il importe de fixer des mesures visant à les supprimer ou, tout au moins, à en limiter les conséquences. L’inspection des installations classées est donc là pour s’en assurer.

14On peut aisément comprendre le déroulement de l’affaire compte tenu de la nature de l’établissement visé. Sont concernés dans notre espèce les activités de la société Soferti Bordeaux [7], classée Seveso 2 – appartenant, comme l’usine AZF de Toulouse, à TotalFinaElf – et dont le fonctionnement avait été autorisé 10 ans plus tôt [8]. Sa localisation géographique est particulièrement sensible puisqu’elle se situe sur la rive droite de la Garonne, dans la zone portuaire bordelaise, à proximité des deux sites Seveso les Docks pétroliers d’Aquitaine et l’usine Simorep-Michelin.

15A la suite du recensement [9] des substances et préparations dangereuses présentes sur le site qui fut réalisé par la direction régionale de l’industrie, de la recherche et de l’environnement en novembre 2000, l’autorité préfectorale demanda à la société défenderesse, en date du 5 février 2001, de lui produire un état des études de dangers existantes et de se conformer aux exigences réglementaires nouvelles. Après une mise en demeure – non respectée – en date du 26 septembre 2001 adressée à la société Soferti aux fins de se soumettre aux prescriptions de l’article 8-1 de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000 avant le 1er octobre 2001, le préfet de Gironde décida de suspendre le fonctionnement de l’usine. L’arrêté du 12 octobre 2001 en ordonne la fermeture, sur le fondement de « l’inobservation des conditions imposées à l’exploitant » [10]. La reprise de l’un de ses ateliers fut accordée le 23 novembre 2001, « les autres activités suspendues demeuraient soumises à la production d’une étude de dangers globale et à sa validation par l’inspection des installations classées de la DRIRE Aquitaine. L’exploitant avait pu remettre, fin décembre 2001, l’ensemble des études de dangers relatives à son établissement puis, dans les mois suivants, les résultats d’une tierce expertise réalisée par l’Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) » [11]. Le 3 juillet 2002, la reprise de l’ensemble des activités de la société Soferti fut autorisée sous réserve du respect d’un plan d’action se composant de 71 mesures d’amélioration de la sécurité devant être mises en place jusqu’en août 2002.

16Afin d’annuler les deux arrêtés préfectoraux de mise en demeure et de suspension – infirmant ainsi le jugement du tribunal administratif de Bordeaux [12] qui avait rejeté la demande d’annulation de ladite société –, la cour administrative d’appel de Bordeaux [13] s’est fondée sur l’absence de procédure contradictoire lors de la mise en demeure, en méconnaissance des dispositions relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations.

17L’arrêt du Conseil d’Etat, du 14 novembre 2008, fait suite à la contestation de ladite décision par le ministre en charge de l’écologie, en reconnaissant le bien-fondé de la mesure de suspension invoquée, nonobstant l’illégalité de l’arrêté de mise en demeure. Il conforte, dans une large mesure, la « logique de précaution » utilisée par les autorités et qui s’avère prioritaire face au constat tiré de l’irrégularité de la décision à l’origine de la suspension.

18L’explosion de l’usine la Grande-Paroisse fait office d’expérience. La prudence extrême est donc de rigueur. En effet, la catastrophe du 21 septembre 2001 demeure encore, à l’heure actuelle, une énigme. Ce constat justifie amplement la fermeture temporaire de sa « sœur jumelle », l’établissement Soferti [14]. En dépit d’une instruction qui a duré plus de 5 ans, « l’incertitude des connaissances scientifiques » n’est toujours pas levée concernant les causes de l’accident de Toulouse.

19L’arrêt de la Haute Assemblée, bien plus qu’un simple contrôle de légalité des arrêtés susvisés, entend tirer les leçons d’une tragique expérience en mettant un terme à une bataille, tant juridique que politique, destinée à faire triompher la logique sécuritaire et à résorber des situations héritées du passé.

I – L’analyse tirée de la légalité de l’arrêté de mise en demeure : « la fin justifie-t-elle les moyens » ?

20Compte tenu de son activité de stockage d’engrais nitratés, l’établissement Soferti Bordeaux s’est trouvé soumis aux dispositions de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, pris pour la transposition de la directive no 96/82/CE du 9 décembre 1996, concernant la maîtrise des dangers liés aux accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses. L’article 8-1 dudit arrêté définit de nouvelles exigences en matière d’étude de dangers, dont l’article 9-2-2-1 en prévoit l’application à compter du 3 février 2001 aux établissements existants. Il incombe à l’industriel de définir sa politique de prévention des accidents majeurs et d’expliquer de manière synthétique le système de gestion de la sécurité [15] nouvellement mis en place. Ces analyses devront être établies pour l’ensemble des installations d’un même établissement. Il est donc clairement entendu que, conformément à l’article 4-6 de l’arrêté susvisé, « tout au long de la vie de l’installation, l’exploitant veille à l’application de la politique de prévention des accidents majeurs et s’assure du maintien du niveau de maîtrise du risque ».

21Document de référence permanent, l’étude de dangers constitue, pour l’administration et l’exploitant lui-même, un outil fondamental de maîtrise des risques à la source. En vertu de l’article L. 512-1 du Code de l’environnement, elle vise à définir les risques auxquels l’installation peut exposer, directement ou indirectement, les intérêts visés à l’article L. 511-1 [16] du Code de l’environnement en cas d’accident. Son contenu doit être en relation avec l’importance des risques engendrés par l’installation. Elle se doit de déterminer les mesures propres à réduire la probabilité et les effets des accidents envisagés, compte tenu de l’état des connaissances et de la vulnérabilité de l’environnement de l’installation. Elle vise à justifier que le projet permet d’atteindre, dans des conditions économiquement acceptables, un niveau de risque aussi bas que possible.

22Notre espèce n’est qu’une illustration, au demeurant classique, des procédés de contrôle prévus par le Code de l’environnement en matière de décisions administratives individuelles prises en application de la législation des installations classées. Il s’agit, dans le cadre de l’article L. 514-6 du Code de l’environnement, d’un recours de plein contentieux objectif, qui obéit à des règles de procédure particulières et qui donne au juge de larges pouvoirs.

23La base juridique des prescriptions de fonctionnement se trouve dans les articles

24L. 512-1, L. 512-3, L. 512-5, L. 512-9 et L. 512-10 du Code de l’environnement. Elles sont destinées à garantir la protection des intérêts énumérés à l’article

25L. 511-1 et fixent les moyens d’intervention en cas de sinistre et les procédés d’analyse et de contrôle.

26L’article L. 514-1 du Code de l’environnement permet au préfet de mettre en demeure l’exploitant de satisfaire aux conditions qu’elles imposent dans un délai déterminé, après que l’inspecteur des installations classées en ait constaté l’inobservation dans un rapport. Dans notre espèce, un procès-verbal d’infraction fut transmis à la préfecture ainsi qu’au parquet aux fins de poursuites pénales. C’est ainsi que les deux ordres de juridiction eurent à apprécier la légalité desdits arrêtés, amenant ainsi la Cour de cassation [17] à se positionner de façon plus sévère face au contrevenant.

27L’analyse prétorienne nous éclaire sur plusieurs points décisifs qui conditionnent la légalité du contrôle de police effectué par les autorités déconcentrées : le contenu extensif de la notion de prescriptions imposées à l’exploitant, le caractère inopérant des débats contradictoires avant toute mise en demeure préfectorale et l’appréciation objective des délais de mise en demeure constituent les trois points de notre analyse.

28Sur le caractère extensif de la notion de prescriptions imposées à l’exploitant :

29L’arrêt du Conseil d’Etat réaffirme, dans une large mesure, l’étendue du contrôle de police administrative du ministre de l’Environnement en matière d’installations classées soumises à autorisation. L’article L. 512-5 du Code de l’environnement l’autorise à fixer par arrêtés « les règles générales et les prescriptions techniques » visant les installations classées soumises à autorisation. Elles visent « à prévenir et à réduire les risques d’accident ou de pollution de toute nature susceptibles d’intervenir ainsi que les conditions d’insertion dans l’environnement de l’installation et de remise en état du site après arrêt de l’exploitation ». Ces arrêtés s’imposent de plein droit aux installations nouvelles.

30Les prescriptions particulières aux installations hautement dangereuses en constituent un exemple. Ainsi, l’arrêté du 10 mai 2000, pris dans les formes dudit article, fixe les dispositions organisationnelles applicables aux installations classées soumises à autorisation relevant de la directive Seveso II. Comme il en avait le pouvoir en vertu du second alinéa de l’article 7 de la loi du 19 juillet 1976, le ministre avait rendu, dans notre espèce, les prescriptions de l’article 8-1 applicables aux installations existantes soumises à autorisation.

31La mise en demeure contestée repose sur leur inobservation.

32La question tirée de la recevabilité des circulaires ministérielles fut déjà l’occasion, pour le juge, de poser les bases d’une jurisprudence extensive qui confirme le large pouvoir du ministre chargé des installations classées à prendre des règles générales [18]. Il semblait donc logique que le Conseil d’Etat reconnaisse que la mise en demeure puisse concerner non seulement les prescriptions spéciales imposées au fonctionnement de l’installation par l’arrêté d’autorisation, mais également les règles générales définies postérieurement à la délivrance de cette autorisation pour la catégorie d’installations classées dont elle fait partie.

33Sur l’application de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leur relation avec l’administration :

34L’article 24 de la loi du 12 avril 2000 [19], relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, prévoit que les décisions individuelles qui doivent être motivées en application de la loi du 11 juillet 1979 ne peuvent être prises – sauf cas d’urgence – qu’après que la personne intéressée ait été mise à même de présenter des observations écrites ou orales. La question soulevée est de savoir si ce principe trouve à s’appliquer dans notre cas d’espèce, la mise en demeure prévue à l’article 514-1 du Code de l’environnement étant une décision individuelle devant être motivée en droit et en fait [20]. Reste donc à la Haute Juridiction le soin de préciser si, en vertu de l’article 24 de la loi du 12 avril 2000, la mise en demeure adressée à l’exploitant de se conformer aux prescriptions éludées doit être ou non précédée d’une procédure contradictoire [21].

35Le Conseil d’Etat réaffirme une fois de plus [22] le pouvoir du préfet d’édicter une mise en demeure de satisfaire aux prescriptions exigées dans un délai déterminé, sans avoir à procéder à une nouvelle appréciation de la violation déjà constatée par l’inspecteur des installations classées. Il met ainsi fin [23] à l’argument admis par les tribunaux [24] selon lequel la mise en demeure exige au préalable que la personne intéressée ait été mise à même de présenter des observations par application de l’article 24 de la loi susvisée. Dès lors, la société Soferti ne pouvait se prévaloir dudit principe du contradictoire, le préfet ne pouvant, de plus, revenir sur l’appréciation de l’inspecteur des installations classées établie au préalable.

36Sur la légalité de l’arrêté de mise en demeure du 26 septembre 2001 :

37On peut noter l’intention de la Haute Juridiction de rappeler, une fois de plus, les objectifs visés par la mise en place des procédures de contrôle : « la mise en demeure prévue par les dispositions rappelées ci-dessus a pour objet, en tenant compte des intérêts qui s’attachent à la fois à la protection de l’environnement et à la continuité de l’exploitation, de permettre à l’exploitant de régulariser sa situation dans un délai déterminé, en vue d’éviter une sanction pouvant aller jusqu’à la suspension du fonctionnement de l’installation ».

38Les mesures administratives ne sont donc pas systématiques, l’option souhaitable étant de les éviter. C’est de l’inaction fautive de l’exploitant que découle la sanction, le préfet ayant le choix entre la consignation, les travaux d’office et la suspension afin de parer à des situations irrégulières. Elles font suite à une mise en demeure laissée sans résultat malgré le caractère justifié et matériellement réalisable des prescriptions administratives : la question du délai d’exécution est donc décisive.

39Par la circulaire en date du 18 juin 1998 [25], après avoir constaté des situations insatisfaisantes quant à l’utilisation de la mise en demeure prévue par l’article 23 de la loi du 19 juillet 1976, le ministre chargé de l’environnement a jugé bon d’éclairer la question du délai imparti aux exploitants pour le respect des prescriptions qui leur incombent.

40Le délai de mise en demeure doit-il être calculé ipso jure en fonction de la durée prévisible des travaux nécessaires pour la mise en conformité ?

41En posant la nécessité de fixer de « brefs délais d’exécution », l’autorité centrale en vient à dénier tout lien entre le délai fixé par l’arrêté et le temps réel nécessaire à une mise en conformité effective. Cette position, défendue par la Chambre criminelle de la Cour de cassation [26], s’oppose à l’appréciation qui sera faite en l’espèce par la Haute Juridiction. Au « délai - ultime avertissement » utilisé par les juridictions répressives est privilégié ici le « délai - nouvelle chance ». Il s’agit là d’une position bien clémente envers le défendeur qui pourtant n’ignorait rien de ses obligations sécuritaires. En effet, conformément aux éléments mentionnés par la Chambre criminelle à l’occasion des poursuites pénales engagées contre lui, un courrier de la DRIRE [27] attirant son attention sur la nécessité de se mettre en conformité fut établi dès le 5 février 2001. Partant de ce constat, « s’il est exact qu’en ce domaine la logique et la jurisprudence imposent que les prescriptions fixées par les arrêtés initiaux ou complémentaires soient réalisables dans leurs contenus et leurs délais, il ne serait pas rationnel que le délai retenu dans la mise en demeure, qui n’a pas pour objet de modifier les conditions d’exploitation ni les délais de mise en conformité, prenne une seconde fois la durée de réalisation des travaux » [28].

42La contraction entre les deux jurisprudences est significative. Le juge administratif considère que le délai de mise en demeure doit être corrélatif aux mesures à prendre par l’exploitant. Ce principe fut déjà rappelé par le tribunal administratif qui sanctionne toute mise en demeure devant être exécutée « immédiatement » [29], mais qui considère comme suffisant le délai de quinze jours visant à produire un échéancier des travaux à réaliser [30]. La mise en demeure préfectorale constitue un préalable au prononcé d’une sanction qui doit pouvoir être évitée par une régularisation ou des propositions d’échéances. Dans notre espèce, est considérée comme « matériellement impossible » la réalisation des mesures exigées dans les quatre jours suivants la notification, eu égard à « la nature des études en cause ». Ce constat, significatif de l’irrégularité de la mise en demeure, justifie dès lors l’annulation de l’arrêté du 26 septembre 2001. Les effets de cette annulation restent cependant réduits puisque l’illégalité constatée n’aura finalement pas d’influence sur le bien-fondé de la mesure de suspension.

II – Sur la légalité de la mesure de suspension administrative : la justification tirée du retour d’expérience

43Le traumatisme causé par l’explosion de la Grande-Paroisse à Toulouse est lourd de conséquences. Alors que s’est ouvert le 23 février 2009 le procès en correctionnel de son dirigeant [31] et du groupe Total [32], un bilan s’impose sur l’après AZF et notamment sur l’appréciation jurisprudentielle du caractère justifié des dispositions prises en urgence.

44La décision de la Haute Assemblée s’explique dans une large mesure par son caractère volontairement « précautionneux » : eu égard à la dangerosité du nitrate d’ammonium, des incidences négatives d’AZF, de l’impact politique et médiatique de l’affaire, rien n’aurait pu éviter la fermeture temporaire du site. Comment laisser en activité l’établissement Soferti, filiale à 100 % de Grande-Paroisse SA, dont l’activité consiste en l’exploitation de plusieurs ateliers permettant de produire des engrais complexes et phosphatés, alors que la réduction du risque après analyse des études de danger s’était avérée insuffisante ?

45Placé dans son contexte, l’arrêté de suspension était plus que justifié : l’inaction de l’Etat aurait été dénoncée dans le cas contraire par les élus et les associations. En effet, au lendemain de la catastrophe de Toulouse, le conseil municipal de Bordeaux unanime avait voté la proposition du maire RPR, Alain Juppé, de suspension de l’activité industrielle et de délocalisation de la société Soferti en estimant qu’une « telle activité ne correspondait plus à l’évolution de l’agglomération ». Les dirigeants de TotalFinaElf n’envisageant pas cette possibilité, Christian Fremont, le préfet d’Aquitaine, ne pouvait qu’étudier une suspension provisoire de l’activité. « Les dirigeants ont simplement remis une étude partielle de leur activité » avait-il déclaré au cours d’une conférence de presse. Il était donc impératif qu’ils « mettent à profit la durée de la suspension pour faire un réel état des lieux sur ses activités et sur la localisation des produits utilisés » devait-il ajouter.

46L’évolution du droit reste conditionnée à l’efficacité des moyens d’identification du risque, indissociable du progrès scientifique. La notion de « retour d’expérience », l’existence du fichier communautaire des accidents majeurs constituent des éléments déterminants lors de la prise de décision publique. Seul le savoir éclaire le pouvoir. La décision de la Haute Assemblée en est l’illustration.

47L’appréciation de la légalité de la mesure de suspension contestée est l’occasion pour le juge de tirer les leçons du passé, le constat de « l’urgence de la situation » se justifiant par les similitudes – bien défavorables à l’exploitant ! – constatées entre l’établissement Soferti et l’usine AZF tristement célèbre.

48L’analyse prétorienne fondée sur l’exigence d’un « péril grave et imminent » :

49Le constat tiré de l’existence d’un péril grave et imminent « légalise » dans une large mesure le pouvoir de décision du préfet en matière de police. Il s’agit de la situation dans laquelle un établissement, de par la nature de ses activités, constitue une menace qui pourrait compromettre la sécurité ou qui, d’une façon générale, n’offre pas les garanties exigées de sureté publique : c’est donc l’urgence de la situation qui requiert l’adoption de mesures provisoires et proportionnées aux circonstances de l’espèce.

50Nous abordons là un domaine bien connu des tribunaux administratifs où il s’agit de justifier dans tous les cas l’adoption d’une mesure d’urgence [33] aux fins d’éviter une catastrophe. Il incombe au juge de vérifier si la prise en compte des risques a bien donné lieu à toutes les diligences nécessaires. Le constat d’« urgence » se doit d’être précisé autant que possible, car il constitue une source évidente de contestation. Il cristallise le « péril grave et imminent » dont les impacts sur la société peuvent s’avérer considérables.

51Chez les « préventeurs » [34], le terme « danger » désigne les caractéristiques intrinsèques d’une chose pouvant créer des dommages. Le risque traduit quant à lui la rencontre d’enjeux avec un danger : il génère une menace qui compromet la sécurité des personnes, des biens, de l’environnement. Transposés au droit de la police administrative spéciale, les termes « danger », « péril », associés à l’adjectif « grave », suggèrent déjà le pire sur une échelle de gravité. L’accent est donc mis sur l’importance particulière des conséquences. L’absence de maîtrise ou de connaissance est un facteur supplémentaire qui contribue à l’amplifier.

52Pour autant, un danger reconnu grave en soi ne suffit pas à justifier la prise de mesures dérogatoires aux principes de droit commun : il nécessite une démarche prospective. Sa dimension sera différente selon l’horizon temporel considéré. Seule l’imminence de sa survenance sera prise en compte. Sera donc considérée comme « péril grave et imminent », la situation où le « risque est susceptible de se réaliser brusquement et dans un délai rapproché » [35] : l’imminence n’est pas seulement la probabilité, mais la proximité de la réalisation du dommage.

53La reconnaissance du « péril imminent » implique la prise en compte de nombreux éléments indissociables. En effet, bien que l’approche sécuritaire de l’installation elle-même soit essentielle au regard d’une analyse cyndinique [36] que traduit l’étude de dangers, la proximité entre les installations dangereuses et le tissu urbain – la faute à qui ? – traduit les limites de la règlementation des installations classées à résorber les situations héritées du passé.

54L’appréciation in concreto de la notion de « péril grave et imminent » :

55La reconnaissance d’un « danger immédiat » s’apprécie in concreto, prenant en considération l’intégralité des conjonctures qui conditionnent la vulnérabilité des enjeux humains, matériels, environnementaux. Sa définition exacte n’est pas intrinsèque au texte juridique mais dépend bien évidemment de son contexte. L’appréciation du « péril grave et imminent » nécessite une analyse prévisionnelle de la situation. Il convient de mesurer les risques de survenance du dommage, son importance et ses caractéristiques. Une première analyse est donc menée de manière objective, compte tenu des données actuelles des sciences et des techniques. Cette analyse objective permet, après une étude urbanistique appropriée, d’envisager et de mettre en place des dispositifs de prévention. L’étude de danger en constitue l’outil de référence puisqu’elle quantifie les risques et justifie les mesures de réduction de ces risques prises par le chef d’établissement exploitant les installations dangereuses.

56Toutefois, afin d’apprécier le caractère approprié des mesures administratives, la situation doit être analysée d’une manière subjective. En effet, il faudra rechercher si le préfet avait toutes les raisons de penser que laisser fonctionner l’établissement était dangereux. Cette appréciation doit tenir compte des connaissances techniques et scientifiques du moment, mais également des données propres de l’établissement : sa localisation géographique, la nature des substances utilisées, les accidents déjà constatés en son sein et par des activités similaires dans la région. Ces éléments combinés permettent la concordance entre l’adoption de mesures d’urgence et la menace d’un péril proche.

57Le Conseil d’Etat a, en l’état de l’instruction et après une analyse in concreto, estimé que l’urgence existait bel et bien. Il s’attache à vérifier que la mesure prise est en adéquation avec les objectifs visés. L’arrêté de suspension est ainsi reconnu légal puisqu’il s’avère nécessaire.

58Bien évidemment, la fermeture temporaire de l’installation aurait pu se révéler inadéquate et de ce fait illégale si « l’imminence du péril » n’était pas reconnue, malgré le caractère incomplet de l’étude de danger. Mais tel n’est pas le cas en l’espèce. La réalité du risque est reconnue a posteriori puisqu’il existe déjà des antécédents, traumatisants pour la société civile. L’accent est mis sur la dangerosité du nitrate d’ammonium, cause de l’explosion de l’usine AZF. Ce constat suffit à convaincre le juge de la gravité de laisser fonctionner en l’état un établissement de ce type, « eu égard à la localisation de la société ». Il en vient de ce fait à apprécier les conséquences d’un mode d’urbanisation anarchique, qui a longtemps satisfait aux ambitions foncières, négligeant les espaces de sécurité pour de nombreuses entreprises à risques.

59Ainsi, la position du juge, au demeurant classique, se dénote pourtant par sa prise de conscience que le risque improbable peut se produire. Puisque l’accident de Toulouse a entraîné un grand débat national sur les risques industriels, une référence directe à ladite catastrophe se trouve justifiée : « qu’un très grave accident venait d’intervenir quelques jours plus tôt sur le site de la société Grande-Paroisse, à Toulouse, impliquant du nitrate d’ammonium technique, et qu’un produit de même nature, en provenance de l’usine de Toulouse, était utilisé par la société Soferti sur son site de Bordeaux ». Sans pour autant se référer explicitement au principe de précaution [37], le Conseil d’Etat souligne « l’absence de connaissance des causes de l’accident de Toulouse » afin de constater l’incertitude scientifique touchant les causes d’explosion du nitrate d’ammonium. Il ne nous reste plus qu’à espérer que le procès [38] tant attendu de la catastrophe de 2001, qui s’est ouvert le 23 février 2009 devant les caméras, lèvera le voile sur les causes de l’accident [39] qui constituent, encore aujourd’hui, une énigme.

60L’arrêt rendu le 14 novembre 2008 par le Conseil d’Etat est une nouvelle pierre à l’édifice par lequel le juge fixe l’étendue du contrôle des autorités de police spéciale en matière d’installations classées, tout en rappelant que la sévérité est de mise pour les activités les plus dangereuses [40]. Il se réfère pour cela à un standard à la résonance moderne, l’état des connaissances scientifiques à un moment donné, afin de donner tout son sens au principe de précaution : « si le droit ne peut se fonder sur un risque purement hypothétique, il doit considérer le risque présumé, établi sur des données scientifiques fiables, claires, objectives, même en l’absence de certitude scientifique absolue » [41]. Le juge en vient alors à fixer la mesure des risques acceptables ou non pour notre société civile, déterminant ainsi sa propre vérité en référence à une expertise scientifique bien souvent controversée.

61Le « plus jamais cela » qui raisonne dans nos esprits, au moment où s’ouvre à Toulouse le procès de la vérité [42], nous éclaire sur la logique prétorienne en matière de contrôle des établissements Seveso. L’essentiel vise à tirer les leçons du passé afin de ne plus revivre le drame d’un accident technologique. La fin sécuritaire demeure prioritaire – sans pour autant le justifier – sur la légalité des mesures de contrôle utilisées. Une nouvelle fois, la Haute Juridiction entend donner à son jugement une « apparente objectivité pour ne traduire en fait » [43] que ses propres préférences.


Mise en ligne 13/08/2015

Notes

  • [*]
    Voir également infra observations de R. Schneider, p. 155 et 159.
  • [1]
    Le Gouvernement a mis en place en 2002 un programme d’action visant à la réduction des risques, impliquant la vérification de leur acceptabilité au cas par cas, par la réalisation de mesures comparatives entre installations similaires. La révision des études de dangers s’intègre dans cette démarche préventionniste. Chacun des 672 établissements Seveso à hauts risques a fait l’objet d’une inspection approfondie en 2002, en particulier sur les systèmes de gestion de la sécurité. La circulaire D 09000651, qui fixe les thèmes d’actions nationales de l’inspection des installations classées et de la sécurité industrielle pour l’année 2009, réaffirme le caractère essentiel d’une politique sécuritaire efficace et conforme aux objectifs définis par le Grenelle de l’environnement.
  • [2]
    La gestion du retour d’expérience, c’est-à-dire les leçons à retenir des accidents industriels, est l’une des pièces motrices du dispositif de prévention des risques. Le bureau d’analyse des risques et pollutions industrielles (BARPI) du ministère gère la base de données ARIA, accessible au public sur Internet, qui répertorie les accidents industriels en France et dans le monde.
  • [3]
    Il convient de se référer à la définition donnée par l’article 2 de l’arrêté du 10 mai 2000, modifié par celui du 29 septembre 2005 : il s’agit d’« un événement tel qu’une émission, un incendie ou une explosion d’importance majeure résultant de développements incontrôlés survenus au cours de l’exploitation, entraînant, pour les intérêts visés au L. 511-1 du Code de l’environnement, des conséquences graves, immédiates ou différées et faisant intervenir une ou plusieurs substances ou des préparations dangereuses ».
  • [4]
    Voir recommandation de l’INRS R428, p. 3-4, où se trouve exposé l’examen d’accidents catastrophiques survenus lors de transports ou dans des stockages de nitrate d’ammonium ou d’engrais à base de nitrate d’ammonium.
  • [5]
    Le 21 septembre 2001 au matin, une explosion s’est produite dans le hangar 221 de l’usine AZF de Toulouse, qui contenait environ 300 tonnes de nitrate d’ammonium déclassé. Indépendamment des dégâts matériels importants, on déplore 31 morts, près de 8 000 blessés dont certains très graves.
  • [6]
    Complétant le dispositif issu de la loi sur les installations classées du 19 juillet 1976 concernant toute activité ou nuisance pour l’environnement, la transcription de la directive Seveso II dans l’ordonnancement juridique national s’est faite notamment au travers des textes suivants : décret no 2000-258 du 20 mars 2000 modifiant le décret no 77-1133 du 21 septembre 1977 (JO du 22 mars 2000) ; arrêté du 10 mai 2000 relatif à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses présentes dans certaines catégories d’installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation (JO du 20 juin 2000), modifié par l’arrêté du 29 septembre 2005 (JO no 234 du 7 octobre 2005).
  • [7]
    Elle fabriquait de l’acide sulfurique destiné aux poudreries et à l’industrie du papier, du sulfate d’alumine pour le papier et le traitement de l’eau, et toute une série d’engrais phosphatés pour l’agriculture.
  • [8]
    Par l’arrêté préfectoral du 31 octobre 1991.
  • [9]
    L’arrêté du 10 mai 2000 renforce les exigences en matière d’étude de dangers et prescrit le recensement régulier des substances ou préparations dangereuses susceptibles d’être présentes dans l’établissement (règle d’addition de substances ou de préparations dangereuses). La circulaire du 10 mai 2000 relative à la prévention des accidents majeurs impliquant des substances ou des préparations dangereuses présentes dans certaines catégories d’installations classées pour la protection de l’environnement soumises à autorisation (application de la directive Seveso II) vise à en clarifier les innovations auprès des autorités préfectorales.
  • [10]
    Article L. 514-1 du Code de l’environnement.
  • [11]
    Communiqué de presse, cabinet du préfet de Bordeaux, le 1er juillet 2002.
  • [12]
    Jugement du 3 juillet 2003.
  • [13]
    Arrêt du 3 juillet 2006.
  • [14]
    Alain Juppé, alors maire de Bordeaux, avait demandé « solennellement la fermeture de cette sœur jumelle de l’usine AZF ».
  • [15]
    L’article 2 dudit arrêté dispose : il s’agit de « l’ensemble des dispositions mises en œuvre par l’exploitant au niveau de l’établissement, relatives à l’organisation, aux fonctions, aux procédures et aux ressources de tout ordre ayant pour objet la prévention et le traitement des accidents majeurs ».
  • [16]
    « Sont soumis aux dispositions du présent titre les usines, ateliers, dépôts, chantiers et, d’une manière générale, les installations exploitées ou détenues par toute personne physique ou morale, publique ou privée, qui peuvent présenter des dangers ou des inconvénients soit pour la commodité du voisinage, soit pour la santé, la sécurité, la salubrité publiques, soit pour l’agriculture, soit pour la protection de la nature et de l’environnement, soit pour la conservation des sites et des monuments ainsi que des éléments du patrimoine archéologique ».
  • [17]
    C. cass., crim., 21 février 2006, no 05-82.232, publié au Bulletin.
  • [18]
    Mais dans ce cas, pour que la circulaire soit légale, il faut qu’elle ait été prise dans les mêmes formes qu’un arrêté ministériel : CE, 25 septembre 1992, nos 88141, 91714, 109386, Union des industries chimiques.
  • [19]
    Loi no 2000-321 du 12 avril 2000 (JO du 13 avril 2000). Elle comporte des dispositions générales qui trouvent à s’appliquer dans la législation des installations classées. Celles-ci figuraient déjà pour nombre d’entre elles dans le décret du 28 novembre 1983 concernant les relations entre l’administration et les usagers.
  • [20]
    CAA Douai, 6 décembre 2001, Société SMEG, no 99DA11366.
  • [21]
    Sous l’empire de l’article 8 du décret du 28 novembre 1983, la jurisprudence avait admis que la mise en demeure pouvait intervenir sans que l’intéressé n’ait eu à bénéficier de ladite procédure contradictoire : CAA Nancy, 11 décembre 1997, Société SRPB Vycone, no 93NC00818 ; CAA Nantes, 16 décembre 1998, Dulière, no 96NT00872.
  • [22]
    CE, 9 juillet 2007, Ministère de l’Ecologie et du Développement durable c/ Société coopérative agricole X, no 288376.
  • [23]
    L’arrêt du 3 juillet 2006 de la CAA de Bordeaux est donc annulé : « qu’il en résulte que la cour administrative d’appel de Bordeaux (…) devait regarder comme inopérant le moyen soulevé devant elle par la société Soferti tiré de ce que la mise en demeure du préfet aurait méconnu la procédure prévue à l’article 24 de la loi du 12 avril 2000 ; que, par suite, en accueillant un tel moyen, la Cour a entaché son arrêt d’une erreur de droit ».
  • [24]
    Voir également CAA Bordeaux, 18 octobre 2005, Ministère de l’Aménagement du Territoire et de l’Environnement c/ Coopérative agricole Vienne-Anjou-Loire ; CAA Douai, 30 novembre 2006, SAS ICI C et P FRANCE, no 06DA00013.
  • [25]
    BO Ministère de l’Equipement, no 598-98/14 du 10 août 1998.
  • [26]
    C. cass., crim., 21 février 2006, op. cit. Elle en arrive à reconnaître qu’à la lumière des faits, « le délai supplémentaire de cinq jours qui a été laissé par ledit arrêté du 26 septembre 2001 n’était pas irréalisable ».
  • [27]
    En voici un extrait : « objet : entrée en vigueur des dispositions Seveso 2 : complétude des études de dangers (…) suite à votre déclaration établie au titre des articles 3 et 10 de l’arrêté ministériel du 10 mai 2000, il s’avère que le recensement des substances ou préparations dangereuses susceptibles d’être présentes dans votre établissement de Bordeaux range ce dernier dans la catégorie des établissements visés aux paragraphes 1, 2, 3 de l’arrêté ministériel précité (établissement comprenant au moins une installation soumise à autorisation avec servitude d’utilité publique) ; incombe donc à l’exploitant "1. de définir une politique de prévention des accidents majeurs et de mettre en place un système de gestion de la sécurité selon les dispositions de l’annexe III de l’arrêté ; 2. de compléter les études de dangers en incluant le document exposant la politique de prévention des accidents majeurs et le document décrivant le système de gestion de la sécurité ; 3. de fournir les études de dangers complétées des mesures d’organisation et de gestion pertinentes pour la prévention des accidents majeurs". En pratique, ces objectifs vous conduiront à établir ou compléter les études de dangers pour : 1. les installations de l’établissement, qui bien que soumises à autorisation et contenant des substances dangereuses, ne disposent pas d’études de dangers ; 2. les parties d’installations nouvellement couvertes par la notion d’établissement (…) ; 3. les installations existantes dont les études de dangers antérieures vous paraissent insuffisantes au regard des dispositions de la circulaire ministérielle du 10 mai 2000 (…) ».
  • [28]
    BO Ministère de l’Equipement, op. cit.
  • [29]
    TA Nancy, 20 avril 1993, Société Munch-Sartec c/ Ministère de l’Environnement, no 921360.
  • [30]
    TA Rouen, 27 novembre 1998, Commune de Dieppe, nos 981013 et 981014.
  • [31]
    Il s’agit de déterminer les responsabilités de Serge Biechlin, ancien directeur d’AZF, et de la société Grande-Paroisse, exploitant de l’usine et filiale du groupe Total, pour homicides involontaires, blessures involontaires, destructions et dégradations involontaires par l’effet d’une explosion ou d’un incendie et d’infractions au Code du travail.
  • [32]
    Le tribunal correctionnel de Toulouse a placé le 26 février 2009 le groupe Total et son ancien P-DG Thierry Desmarets parmi les prévenus, en réponse à la demande de citation directe d’une vingtaine de parties civiles.
  • [33]
    Cette notion module l’étendue du pouvoir des autorités de polices administratives, qu’elles soient générales ou spéciales. Voir par exemple, concernant la police des édifices menaçant ruine, la police générale du maire en vertu de l’article L. 2212-2-5o du Code général des collectivités territoriales.
  • [34]
    Le « préventeur » ne connaît pas, à l’heure actuelle, de définition « officielle » bien qu’il soit un acteur clé de la prévention. Il s’adresse aux responsables en soulignant les aspects bénéfiques de la prévention pour le fonctionnement général de l’entreprise. Il aide au déploiement d’une démarche professionnelle de prévention, sur le fondement de l’obligation générale de sécurité qui incombe à l’employeur. Il doit le conduire à prendre toutes les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé des travailleurs, conformément aux exigences légales et réglementaires en vigueur (le nouveau Code du travail, applicable depuis le 1er mai 2008, a créé une nouvelle partie IV relative à la santé et à la sécurité au travail ; voir art. L. 4121-1 et s.).
  • [35]
    Circulaire du 25 mars 1993, ministre du Travail.
  • [36]
    « Ensemble des sciences et des techniques qui étudient les risques naturels ou technologiques pour essayer d’établir des règles de prévention », 2005, éditions Larousse.
  • [37]
    C. cass., op. cit., : « qu’enfin si les causes de l’explosion de Toulouse n’étaient pas connues, on savait par Didier X… que des ammonitrates provenant de l’usine AZF se trouvaient en stock sur le site de la SNC Soferti ; que le simple principe de précaution associé au caractère récent de l’événement toulousain justifiait dès lors la prise de l’arrêté préfectoral critiqué ».
  • [38]
    2 949 plaignants, une salle de 65 m2, un coût de huit millions d’euros, le procès s’annonce démesuré.
  • [39]
    L’avocat des deux prévenus du procès AZF, Me Soulez-Larivière, fustige la thèse officielle de l’accident industriel et espère que le procès démontrera qu’ils « disent la vérité ».
  • [40]
    Tel n’est malheureusement pas le cas au sein de l’Union européenne : en effet, la Commission européenne a engagé une procédure en manquement à l’encontre de dix Etats membres qui n’ont pas transposé la directive relative à la prévention et à la réduction intégrées de la pollution qui conditionne, depuis le 30 octobre 1999, l’ouverture de toute nouvelle installation à une autorisation d’exploiter de la part des autorités nationales. On peut relever plus de 4 000 installations industrielles exploitées en Europe sans autorisations adéquates.
  • [41]
    Eric Naim-Gesbert, « Droit, expertise et société du risque », Revue du droit public, 1er janvier 2007 no 1, p. 33.
  • [42]
    Plusieurs thèses de l’explosion ont déjà été invoquées (attentat, l’étincelle électrique fatale, piste du gaz). Quelle sera celle retenue au final, après expertises et contre-expertises ? Le constat est que l’enquête a été orientée vers l’accident chimique au détriment de toutes les autres pistes.
  • [43]
    Y. Gaudemet, « Les méthodes du juge administratif », Paris, LGDJ, 1972, p. 47.
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