Notes
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[1]
L’Osservatore Romano, édition française, 16 avril 2015, p. 10.
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[2]
Son titre : Nach dem Forschungsstand in der Wissenschaft stelle die aramäisch-assyrische Bevölkerung eine weitere Opfergruppe dieses Völkermordverbrechens dar.
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[3]
Joseph Yacoub, « Les regrets du Bundestag », L’Orient-Le Jour, 10 juin 2016. Le titre de la résolution est : Erinnerung und Gedenken an den Völkermord an den Armenier und anderen christlichen Minderheiten in den Jahren 1915 und 1916.
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[4]
J. Yacoub, Qui s’en souviendra ? 1915 : le génocide assyro-chaldéen-syriaque, Paris, Éditions du Cerf, 2014 ; id., Babylone chrétienne. Géopolitique de l’Église de Mésopotamie, Paris, Desclée de Brouwer, 1996.
-
[5]
Rev. John Stewart, Nestorian Missionnay Enterprise. The story of a Church on fire, Édimbourg, Inde, Madras, T. et T. Clark, 1928.
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[6]
J. Yacoub, Babylone chrétienne…, op. cit. ; id., Menaces sur les chrétiens d’Irak, Chambray-lès-Tours, Éd. CLD, mars 2003, ouvrage traduit en italien au terme d’une remise à jour : I Cristiani d’Iraq, Milan, Jaca Book, 2006.
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[7]
L’histoire religieuse de cette communauté, de son droit canonique et de son expansion missionnaire en Asie est l’objet d’une littérature relativement riche en langue française. Entre autres : Cardinal Eugène Tisserant, « Nestorienne (l’Église) », Dictionnaire de Théologie Catholique (ci-après : DTC), Paris, Letouzey et Ané, 1931, t. IX, col. 157-323 ; Jean Dauvillier, « Chaldéen (Droit) », Dictionnaire de droit canonique (ci-après : DDC), Paris, Letouzey et Ané, 1942, t. III, col. 292-388.
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[8]
Le sous-titre du livre du professeur Abraham Yohannan (1853-1925), un Assyrien d’Ourmiah, The Death of a Nation or The Ever-Persecuted Assyrians or Nestorian Christians (New York et Londres, G. P. Putnam, 1916), est significatif à cet égard, de même que celui du pasteur Joel Warda, The flickering light of Asia or the Assyrian Nation and Church (publié à compte d’auteur, 1924).
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[9]
J. Yacoub, Year of the Sword, Hurst, Londres, 2016, pp. 101-113.
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[10]
J. Yacoub, « La Perse au commencement du christianisme oriental », L’Orient-Le Jour, Beyrouth, 29 juillet 2016. Sur la géographie et l’histoire du Hakkari : Jean Maurice Fiey, « Proto-histoire chrétienne du Hakkari turc », L’Orient syrien, vol. 9, Paris, 1964, pp. 443-472 ; Michel Chevalier, Les Montagnards chrétiens du Hakkari et du Kurdistan septentrional, Paris, Publications du département de géographie de l’université de Paris-Sorbonne, 1985.
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[11]
Terme signifiant en arabe « calamité », « catastrophe ». Les Arabes de Palestine l’utilisèrent également plus tard pour désigner la victoire israélienne et leur exode de 1948.
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[12]
Joseph Naayem, Les Assyro-Chaldéens et les Arméniens massacrés par les Turcs, Paris, Bloud et Gay, 1920.
-
[13]
Deacon James Isha Barcham, Excerpts from the Assyrian History, Chicago, Alpha Graphic, 2013, (en araméen oriental ou soureth) ; J. Yacoub, « Après 1915, les drames se succèdent », Perspectives et Réflexions, n° 3, 2015, Œuvre d’Orient, Paris, pp. 103-129.
-
[14]
Yonan H. Shahbaz, The Rage of Islam. An account of the massacre of Christians by the Turks in Persia, Philadelphie, The Judson Press, octobre 1918, pp. 57-58.
-
[15]
1919, s. éd., Beyrouth, 504 p. Préface en français.
-
[16]
Ouvrages de Lepsius : Bericht über die Lage des ArmenischenVolkes in der Türkei, 1916 (édition française : Rapport secret sur les massacres d’Arménie : 1915-1916, préface de Paul Thibaud, Paris, Payot, 1987, NDLR), et Deutschland und Armenien 1914-1918. Sammlung diplomatischer Aktenstücke (1919).
-
[17]
Georges-Henri Ruyssen (dir.), La Questione Armena, vol. IV, 1908-1925, Lilamé, Documenti dell’Archivio Segreto Vaticano, 2015, Pontificio Istituto Orientale, Rome, pp. 177-187. Ce travail considérable en sept volumes, élaboré à partir des archives du Vatican, jette un bon éclairage sur la tragédie assyro-chaldéenne.
-
[18]
Idem. Titre du rapport : Über die Lage der Katholischen Armenier in der Türkei.
-
[19]
André Mandelstam, Le Sort de l’Empire ottoman, Lausanne, Paris, Payot, 1917.
-
[20]
Les Extravagances bolchéviques et l’épopée arménienne en Transcaucasie en 1918, Paris, Albin Michel, 1918, rééd. avec des annexes par Le Cercle d’Écrits Caucasiens, Paris, 2009 ; L’Établissement des Assyriens. Une œuvre humanitaire et d’apaisement, Genève, SDN, 1935 (en français et en anglais).
-
[21]
Quelques retours de réfugiés assyriens sont cependant intervenus à Ourmiah en 1922.
-
[22]
A. Yohannan, The Death of a Nation or The Ever-Persecuted Assyrians or Nestorian Christians, PhD, New York et Londres, G. P. Putnam’s sons, 1916, 170 p., p. 5. Citation traduite de l’anglais par la rédaction.
-
[23]
Le Comité suisse de l’Œuvre de secours 1915 aux Arméniens publie en effet Quelques documents sur le sort des Arméniens en 1915-2016, dont les deux premiers fascicules sont l’œuvre d’Allemands habitant la Turquie qui « ne peuvent être suspectés de partialité ni en faveur des Arméniens, ni contre les Alliés de la Turquie ». Le troisième fascicule contient un rapport adressé « aux représentants du peuple allemand » par le Dr. Martin Niepage, maître supérieur à l’école allemande d’Alep.
-
[24]
Ce journal de 51 pages est publié à Chicago par The Woman’s Presbyterian Board of Missions of the Northwest.
-
[25]
William W. Rockwell, The Pitiful Plight of the Assyrian Christians in Persia and Kurdistan, described from the reports of eye-witnesses, American Committee for Armenian and Syrian Relief, 1916, 72 p.
-
[26]
Cette organisation devient le Near East Relief en août 1919 (NDLR)
-
[27]
« The total of Armenian and Syrian dead », Current history Magazine, New York, New York Times Company, Times Square, pp. 337-338. Citation traduite de l’anglais par la rédaction.
-
[28]
La Croix a titré le samedi 29 août 1896 sur les « Massacres en Turquie », et reproduit une lettre de Salamas (Perse) datée du 21 juillet 1896, publiée dans Les Missions catholiques. Un missionnaire lazariste y fournissait des détails pitoyables sur la situation des chrétiens qui tentaient d’échapper aux bandes kurdes armées qui saccageaient leurs villages.
-
[29]
Sur cette œuvre française fondée par Mgr Lavigerie : Hervé Legrand et Giuseppe Maria Croce (dir.), L’Œuvre d’Orient. Solidarités anciennes et nouveaux défis, Paris, Cerf, 2010.
-
[30]
Cette organisation patriotique, fondée au début de l’année 1915 avec l’assentiment du cardinal archevêque de Paris, Léon-Adolphe Amette (1850-1920), a pour mission de lutter contre la propagande allemande parmi les chrétiens à l’étranger.
-
[31]
Jacques Rhétoré, Les Chrétiens aux bêtes, Souvenirs de la guerre sainte proclamée par les Turcs contre les Chrétiens en 1915 ; Hyacinthe Simon, Mardine. La ville héroïque. Autel et tombeau de l’Arménie (Asie Mineure) durant les massacres de 1915 ; Marie-Dominique Berré, Massacres de Mardin, ont été réunis par Jean-François Colosimo (présentation de), in Nous avons vu l’enfer. Trois Dominicains témoins directs du génocide des Arméniens, Paris, Éd. du Cerf, Paris, 2015.
-
[32]
Paru chez Bloud & Gay. Archives lazaristes, Dossier 137h, 101 p., et C 137g 2 I. b-3, 185 p. (texte polycopié).
-
[33]
« Une conférence sur les souffrances des Assyro-Chaldéens », L’Asie française, août-novembre 1919, Paris, pp. 238-242.
-
[34]
Op. cit. La version anglaise intitulée Shall this Nation Die? New York, Chaldean Rescue, 1921) est étoffée par deux contributions, dont celle du Père Gabriel Oussani, un chaldéen du séminaire catholique Saint-Joseph à Dunwoodie près de New York : An Historical Essay (daté du 1er octobre 1920). Il insiste dans son introduction sur les massacres de 1915 commis par les Turcs et les Kurdes, estimant que les Assyro-Chaldéens avaient souffert autant, sinon davantage, que les Arméniens.
-
[35]
Sur Joseph Naayem : Joseph Yacoub, « Joseph Naayem (1888-1964), témoin oculaire majeur du génocide assyro-chaldéen et arménien » introduction au livre de J. Naayem, Les Assyro-Chaldéens et les Arméniens massacrés par les Turcs, Paris, réédition Le Cercle d’écrits caucasiens, 2016, pp. 3-11.
-
[36]
Jean Gorek de Kerboran était un intellectuel engagé au service de sa communauté. Il a entretenu une large correspondance avec des dirigeants politiques et retracé l’histoire de son peuple dans des conférences données notamment à l’Institut catholique de Paris et dans des articles parus dans L’Asie française.
-
[37]
Shall this Nation Die?, op. cit., p. XI. Citations traduites de l’anglais par la rédaction.
-
[38]
Philips Price, « War and massacres in North-West Persia. 30 000 Kurds descend from the hills into the plain. The first story of the prolonged reign of terror at Urumiah », et Randall Cantuar, archevêque de Canterbury, « The distress among the Assyrian Christians », Manchester Guardian, 28 octobre 1915 ; ce dernier quotidien publie les 5 et 19 novembre 1915 deux lettres de Paul Shimmon, le représentant personnel du patriarche assyrien, Mar Benyamin Shimoun, sur le sort des Assyriens : « The massacres in Persia. Present position of the Christians » (n° du 5 novembre), et « The murder of a nation » (n° du 19 novembre). Le mensuel arménien Ararat, organe de l’Association des Arméniens de Londres, publie également un article du même Paul Shimmon en novembre 1915.
-
[39]
Rencontre synodale tenue tous les dix ans par l’Église anglicane qui réunit l’ensemble des évêques de la communion anglicane autour de l’archevêque de Canterbury. La première assemblée eut lieu en 1867.
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[40]
www.anglicancommunion.org. Traduit de l’anglais par la rédaction.
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[41]
J. Yacoub, Qui s’en souviendra ?..., op. cit., pp. 107-110.
-
[42]
Mgr Malké a été béatifié le samedi 29 août 2015 à Deir Charfé (Harissa) au Liban par le patriarche syriaque catholique Ignatius Youssef III, à la suite du décret du pape François du 8 août le reconnaissant officiellement comme martyr.
-
[43]
Claire Weibel Yacoub, op. cit., pp. 174-175.
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[44]
André Mandelstam, op. cit. ; Basile Nikitine, « Une petite nation victime de la guerre : Les Chaldéens », Revue des sciences politiques, Paris, Félix Alcan, 1921, t. XLIV, pp. 602-625 ; Joseph-Thomas Delos, « Les Assyriens d’Irak et la Société des Nations », Revue générale de droit international public (ci-après : RGDIP), juillet-août 1934, Paris, Pedone, pp. 460-495 ; Louis Le Fur, « L’affaire de Mossoul », RGDIP, tiré à part, Paris, Pedone, 1927.
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[45]
Les Carnets du cardinal Alfred Baudrillart (1er janvier 1919-31 décembre 1921), texte présenté, établi et annoté par Paul Christophe, Paris, Éditions du Cerf, 2000, pp. 175, 203, 206, 357, 365, 519-520, 533, 933.
-
[46]
« Les revendications des Assyro-Chaldéens », L’Asie française, février-juillet 1919, pp. 190-192 ; « Les revendications des Assyro-Chaldéens », id., mars 1920, pp. 92-93.
-
[47]
Joseph Yacoub, « La Question assyro-chaldéenne, les puissances européennes et la Société des Nations », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 151, juillet 1988, pp. 103-120 ; Claire Weibel Yacoub, Le Rêve brisé des Assyro-Chaldéens. L’introuvable autonomie, Paris, Éditions du Cerf, 2011, pp. 113-182.
-
[48]
Ce général, né au Hakkari, décoré de la Croix de guerre (décret du 4 février 1921), est mort à Saint-Jory, près de Toulouse.
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[49]
Né au Hakkari et décédé au Liban.
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[50]
Née à Kotchanès, au Hakkari, Bet Mar Shimoun est décédée à Turlock en Californie. Sur Surma Khanum : Claire Weibel Yacoub, Surma l’Assyro-Chaldéenne (1883-1975). Dans la tourmente de Mésopotamie, Paris, L’Harmattan, 2007.
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[51]
L’établissement des Assyriens. Une œuvre humanitaire et d’apaisement (The Settlement of the Assyrians. A work of Humanity and Appeasement), brochure bilingue (français et anglais, 49 p.), préparée par la section d’information, op. cit., p. 3.
-
[52]
Sur Benoît XV et l’Empire ottoman : Francis Latour, « Le Saint-Siège et l’Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale », Transversalités, n° 61, janvier-mars 1997, pp. 261-274 ; Yves Chiron, Benoît XV. Le pape de la paix, Paris, Perrin, 2014, pp. 176-182.
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[53]
Annales de la Congrégation de la Mission, t. 84, 1919, pp. 509-514.
-
[54]
Fernando Filoni, L’Église dans la terre d’Abraham, Paris, Éditions du Cerf, 2009. Ce livre est la traduction de la première édition italienne parue en 2006. Ce livre a été, une fois mis à jour, réédité en italien sous le titre La Chiesa in Iraq. Storia, sviluppo e missione, dagli inizi ai nostri giorni, Rome, Libreria Editrice Vaticana, 2015.
-
[55]
Archivio Storico Italiano, 1918, vol. 608, Rub. 126, n° 82036.
-
[56]
Par une lettre datée du 16 août 1918.
-
[57]
Ce missionnaire était venu à Mossoul en 1884 enseigner au séminaire syro-chaldéen Saint-Jean. Supérieur de la mission dominicaine de 1908 à 1922, déporté à Mardin par les autorités ottomanes pendant toute la durée de la guerre, il y est témoin des massacres perpétrés dans cette ville.
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[58]
Archives secrètes du Vatican, Segreteria di Stato, Archivio Storico della Sezione per i rapporti con gli Stati, Stati Ecclesiastici, 1919, rubr.12 fascc. 1, lettre de Bagdad de Mar Emmanuel II Thomas au cardinal Gasparri, 17 février 1919, p. 114.
-
[59]
Ibid., lettre de de Mgr Thomas Bajari au pape Benoit XV, Constantinople, 9 juillet 1919, p. 131.
-
[60]
Le Petit Parisien, 3 avril 1919.
Une reconnaissance tardive
1 Longtemps ignoré, et moins étudié que le génocide arménien auquel il se rattache, le génocide assyro-chaldéen-syriaque a reçu depuis peu la reconnaissance du Saint-Siège et de l’Allemagne. Dans une homélie prononcée à Rome, le dimanche 12 avril 2015, le pape François déclare en effet :
Notre humanité, affirmait le pape [Jean-Paul II et Karékin II, Déclaration commune, Etchmiadzin, 27 septembre 2001], a vécu, le siècle dernier, trois grandes tragédies inouïes : la première est celle qui est généralement considérée comme « le premier génocide du xx e siècle » ; elle a frappé votre peuple arménien – première nation chrétienne – avec les Syriens catholiques et orthodoxes, les Assyriens, les Chaldéens et les Grecs. Des évêques, des prêtres, des religieux, des femmes, des hommes, des personnes âgées et même des enfants et des malades sans défense ont été tués [1].
3 À la même époque, le processus de reconnaissance s’enclenche en Allemagne avec une proposition de loi du parti socialiste Die Linke présentée le 16 mars 2015 : sur la base des dernières recherches scientifiques, celle-ci cite les populations araméennes et assyriennes comme étant d’autres victimes du crime de génocide [2]. Et lors de l’examen du texte, plusieurs députés, toutes tendances politiques confondues, mentionnent parmi les massacres perpétrés par les autorités ottomanes ceux commis contre les Assyriens, les Chaldéens et les Araméens. Un peu plus d’un an plus tard, le 2 juin 2016, le Bundestag adopte, à une quasi-unanimité, une résolution qui reconnaît le génocide (Völkermord) commis par l’Empire ottoman en 1915 à l’encontre des Arméniens mais aussi des Araméens, des Assyriens et des Chaldéens [3]. Du reste, dès le 23 avril 2015, lors d’une cérémonie religieuse commémorant à Berlin le centenaire du massacre des Arméniens, Joachim Gauck, alors président de la République d’Allemagne, avait utilisé le terme de Völkermord en référence au sort subi par toutes ces populations.
4 Cette double reconnaissance a littéralement exhumé des oubliettes de l’histoire le génocide assyro-chaldéen-syriaque et grec, « Seyfo », en araméen, mais il reste du chemin à parcourir pour que cet événement tragique entre dans la conscience universelle.
Qui sont les assyro-chaldéens ?
5 Bien moins connus que les Arméniens qui les appellent Aïssors ou Assoris, nommés Suriyani par les Turcs, les Assyro-Chaldéens, également désignés comme des Assyriens, Chaldéens, Syriaques, Nestoriens, Jacobites ou Araméens, se considèrent comme apparentés aux peuples assyrien, babylonien, chaldéen et araméen de l’antique Mésopotamie, entre le Tigre et l’Euphrate, dont l’histoire remonte à plus de 5 000 ans [4]. Leurs différentes dénominations résultent de divisions principalement religieuses remontant aux premiers siècles de l’ère chrétienne et aux conciles d’Éphèse (431) et de Chalcédoine (451), qui semblent n’avoir plus lieu d’être aujourd’hui puisque prévalent désormais dans leur sein la collaboration et l’œcuménisme. Cette minorité moyen-orientale, privée d’un État protecteur depuis les chutes de Ninive et de Babylone (612 et 539 av. J.-C.), se singularise par sa langue, le syriaque ou araméen, et son appartenance obstinée à un christianisme autochtone et apostolique, doté de son droit canonique propre.
6 Après la perte de leur État et l’avènement du christianisme, l’Église devient le protecteur de ce peuple, et son ciment. Moyennant certaines limites, l’Empire ottoman reconnaissait ses différentes composantes comme des millet, c’est-à-dire des « nations » administrées par leurs Églises. Ces chrétiens orientaux appartenaient pour la plupart soit à l’ancienne Église de l’Orient, dite improprement « nestorienne », soit à l’Église syriaque orthodoxe d’Antioche et de tout l’Orient, dite « jacobite », si prospères autrefois sur l’ensemble du continent asiatique, l’une et l’autre autochtones et apostoliques. L’Église de l’Orient étendait son influence de la Méditerranée orientale à Pékin au xii e siècle et comptait environ 60 millions de fidèles [5]. Aujourd’hui encore, l’Église de l’Orient et l’Église syriaque orthodoxe sont présentes dans l’État de Kérala, en Inde du Sud. Leurs dogmes et leurs rites diffèrent mais, ethniquement, leurs membres estiment appartenir au même peuple mésopotamien. Connus pour leurs écoles et leurs académies (Édesse, Nisibe…), leurs traductions du grec et leurs monastères, dotés de leur ecclésiologie et de leurs liturgies propres, ces chrétiens ont produit une littérature abondante, tant religieuse que profane, en langue syriaque ou araméenne ainsi qu’en arabe et en persan [6].
7 À compter du xvi e siècle, les deux Églises-mères, l’Église de l’Orient et l’Église syriaque orthodoxe d’Antioche, connaissent des scissions internes qui engendrent des ruptures et donnent naissance à des Églises séparées, qui s’unissent à Rome. Tel fut le cas, en 1553, de l’Église d’Orient « nestorienne » qui donna naissance à l’Église chaldéenne de Babylone, ainsi que de l’Église syriaque orthodoxe qui vit naître en 1783 l’Église syriaque catholique, mais leurs premiers liens avec Rome remontent en fait au xiii e siècle. En outre, depuis 1835, sous l’influence des missionnaires américains et britanniques, ce peuple compte des protestants (pentecôtistes, baptistes, presbytériens…) et des proches de l’Église anglicane [7].
8 La fierté d’être un peuple aux racines lointaines, toujours vivace dans l’imaginaire assyro-chaldéen, se traduit dans les titres mêmes des ouvrages consacrés au génocide de 1915-1918 [8]. Soulignons qu’en utilisant la dénomination d’« Assyriens chrétiens », les récits contemporains consacrés aux massacres et les ouvrages qui s’y rapportent associent les appartenances religieuse et nationale.
9 Installés de façon ancestrale sur les marches des Empires ottoman et perse, une zone hautement stratégique, les Assyro-Chaldéens ont été périodiquement exposés au cours de leur longue histoire à des persécutions souvent dramatiques. L’Église de l’Orient de Mésopotamie et l’Église syriaque orthodoxe d’Antioche eurent à subir des massacres et toutes sortes d’avanies de la part des Romains, des Perses, mais aussi des Byzantins, des Mongols et des Turcs, en 1895-1896 en particulier, en attendant d’autres conquérants. Les auteurs qui décrivent les massacres de 1915 font souvent des parallèles avec les souffrances endurées par cette communauté au cours des siècles passés [9]. À la veille de la Première Guerre mondiale, ces populations vivaient principalement au sud et sud-est de la Turquie (régions d’Hakkari, Bohtan, Tour Abdin, Midyat, Mardin, Diarbékir, Nisibine, Ourfa…), au nord-ouest de l’Iran (province d’Azerbaïdjan occidental, Ourmiah et Salamas), en Irak du nord (région de Mossoul, province de Ninive), à Bagdad et à Kirkouk, dans le Caucase et en Russie. Malgré l’oppression et les persécutions, cette nation autochtone a marqué fortement son territoire ainsi qu’en témoignent la toponymie comme d’innombrables éléments à caractère culturel, architectural et religieux. Cette terre était parsemée de nombreuses églises où l’on parlait l’araméen [10].
La grande guerre et le génocide de 1915
10 Du fait du génocide, 1915, « année de l’épée » en araméen, restera, pour les Assyro-Chaldéens, l’année de la « catastrophe », la Nakba [11]. On dispose sur cette tragédie méconnue d’une documentation abondante et digne de foi attestant que ces massacres relèvent bien de ce que la Convention de l’ONU du 9 décembre 1948 a qualifié de « génocide ».
11 Les massacres se déroulent dans un périmètre très vaste : en Anatolie orientale, en Perse et dans la province de Mossoul, d’octobre 1914 à juillet 1918, dans des conditions et dans des lieux identiques à ceux où périssent les Arméniens. Dans les deux cas, les nationalistes turcs visaient à éliminer les groupes non-turcs et non-musulmans de zones géographiques trop sensibles sous le prétexte fallacieux de déloyauté, en les exterminant, en les dispersant ou en les déportant, et ainsi à homogénéiser et « turquifier » l’Empire. Nombreux sont les témoignages qui accusent le gouvernement et les autorités turques, régionales ou locales. De fait, des analogies frappantes entre tous les faits rapportés montrent que ces massacres ont été systématiquement préparés, froidement concertés et organisés par les autorités ottomanes contre les Arméniens et les autres chrétiens sans distinction ; ils n’eurent en rien un caractère isolé ou incontrôlé [12].
12 Les troubles commencent le 1er octobre 1914 sur les deux versants de la montagne qui sépare la Turquie de la Perse, dans le sandjak (arrondissement) de Hakkari du côté turc ainsi que du côté persan, un mois avant que la Turquie ne déclare la guerre à la Russie [13]. Des forces turco-kurdes, équipées de munitions allemandes, descendent ce jour-là des collines du district persan de Tergavar, aux confins de la Turquie, pour brûler et piller les villages chrétiens de Mavana, Kourana et Baloulan. La population cherche alors refuge à Ourmiah. Pour Yonan Shahbaz, un témoin oculaire qui se trouvait alors dans le village de Goetapa, les Turcs ont délibérément organisé cette expédition dans le but de chasser les Russes de l’Azerbaïdjan iranien et d’en prendre possession [14]. Du côté turc, les Kurdes, appuyés par les Turcs, se livrent à des attaques simultanées dans les cazas (districts) de Gavar, d’Albaq et de Shemsdinan, au nord-ouest de Hakkari, en octobre-novembre 1914. Minoritaires dans ces districts, les Arméniens sont également touchés.
13 Mais c’est en 1915 que des centaines de milliers de personnes sont massacrées, les maisons pillées, des filles enlevées. D’autres meurent de privations, de soif, de faim, de misère, d’inanition, de surmenage, d’épuisement ou de maladies sur les routes de l’exode et de la déportation. Ce génocide physique est accompagné de la spoliation des terres et des biens ainsi que d’atteintes graves au patrimoine culturel. Des monuments historiques sont détruits et laissés à l’abandon, des églises profanées et des écoles démolies. Des bibliothèques contenant des livres et de manuscrits rares furent dévastées, à l’instar de celles du diocèse chaldéen de Séert, des villages des districts de Salamas et d’Ourmiah et des monastères syriaques de Tour Abdin. Au total, plus de 400 églises et couvents furent ruinés dont, en Anatolie, plus de 156 églises et monastères syriaques. Dépossédés d’une grande partie de leurs lieux de mémoire et de leur patrimoine culturel, les assyro-Chaldéens ont donc été victimes d’une forme d’« ethnocide ».
14 En dépit des dénégations des autorités turques, une riche documentation couvre, au jour le jour et localité par localité, l’ensemble du drame. La véracité des témoignages contemporains les plus autorisés en diverses langues (français, anglais, allemand, russe, arabe, syriaque, classique, oriental ou occidental…) ne fait aucun doute. Isaac Armalé (1879-1956), prêtre syriaque catholique de Mardin, savant spécialiste des manuscrits syriaques de Deir Charfé (Mont-Liban), témoin oculaire de la tragédie, a laissé par exemple un volumineux ouvrage en arabe intitulé Les Calamités des chrétiens [15]. La plupart des témoins cependant sont des missionnaires occidentaux de diverses confessions religieuses se trouvant sur place, des journalistes, des diplomates et les patriarches des différentes Églises.
15 Ainsi l’exposé des motifs (Begründung) de la proposition de loi relative à la reconnaissance du génocide arménien présentée au Bundestag en 2015 ne se fait-elle pas faute d’évoquer des personnalités allemandes qui ont fourni des informations détaillées sur les massacres et les déportations, dont le théologien Johannes Lepsius, le président de la mission allemande (Deutsche Mission) [16]. Des rapports du député au Reichstag Matthias Erzberger de 1903 à 1918, au retour d’un voyage en Turquie du 5 au 13 février 1916, mentionnent explicitement les Chaldéens et les Syriaques parmi les chrétiens persécutés [17]. Son premier mémorandum décrit la situation dramatique des chrétiens dans le vilayet de Diarbékir, les villes de Severek, Mardin et Djéziret, ainsi que dans les diocèses de Séert et d’Ourfa [18]. Le juriste russe francophone et très bon connaisseur de l’Empire ottoman, André Mandelstam, évoque lui aussi le petit peuple nestorien qui « a souffert des mains des assassins jeunes-turcs un martyre approchant celui des Arméniens [19] ».
16 Le 31 juillet 1918 débute le dernier chapitre du génocide : l’effroyable exode des Assyro-Chaldéens d’Ourmiah en Perse vers Hamadan en Irak où les troupes britanniques les installent. On dispose, à ce propos, d’un ouvrage d’Henry Barby, témoin oculaire des événements sur le front du Caucase et d’Azerbaidjan, et d’un rapport de la Société des Nations (SDN) [20].
17 Au lendemain de la tragédie de 1915-1918, une partie de la population s’est trouvée contrainte d’émigrer vers le Caucase (Azerbaidjan, Arménie, Géorgie), la Russie (Moscou, Saint-Pétersbourg, Krasnodar…), l’Irak, la Syrie (les provinces de Djézireh et d’Alep) et le Liban (Beyrouth, Metn, Zahlé), ou encore aux États-Unis, au Canada, en Amérique du Sud (Argentine, Brésil) et en Europe. En 1918, le Hakkari et le Tour Abdin, situés en Turquie, sont vidés de leur population chrétienne, ainsi que la région d’Ourmiah-Salamas en Iran [21].
Appels à l’opinion publique (1915-1935)
18 Les autorités du Reich, allié de la Turquie, ont contrecarré la diffusion des témoignages de sources allemandes. Il en est allé autrement dans les pays de l’Entente où les récits des horreurs commises contre les Assyro-Chaldéens ont suscité une certaine émotion et sympathie. Il est difficile cependant de mesurer leur portée dans l’opinion, sans compter que, comme le soulignent certains auteurs, celle-ci tend à confondre Assyro-Chaldéens et Arméniens, dont le sort est davantage médiatisé. Dans sa thèse éditée en septembre 1916, Abraham Yohannan, Assyrien d’Ourmiah et lecturer à l’université de Columbia, souligne par exemple que :
Les persécutions et les souffrances subies de temps à autre par les Nestoriens sont semblables à celles endurées par les Arméniens et les Juifs, et leur traitement par des nations hostiles est identique. Des problèmes rencontrés par les Arméniens et les Juifs, on entend cependant parler très souvent, tandis que l’on ne montre presque aucun intérêt aux Nestoriens de Perse et de Turquie, en raison, probablement, de leur petit nombre et de leur manque de porte-parole littéraires [22].
20 La tragédie des Assyro-Chaldéens fit, malgré tout, l’objet de publications et eut des échos dans la presse. Quelques exemples de cette littérature montrent que si, certaines sources allemandes se sont frayé un chemin via la Suisse [23], les milieux chrétiens jouèrent un rôle prépondérant dans la diffusion de cette information.
21 Aux États-Unis, le New York Times publie dès avril 1915 des lettres de missionnaires presbytériens américains présents sur les lieux, tels William A. Shedd, et met l’accent sur l’urgence d’une aide humanitaire pour les rescapés. Mary Schauffler Platt a édité cette même année sous le titre The War Journal of a Missionnary in Persia le récit d’une missionnaire presbytérienne américaine, qui assista aux événements d’Ourmiah entre janvier et mai 1915 [24]. Outre la thèse déjà citée d’Abraham Yohannan, William W. Rockwell, professeur de théologie à l’Union Theological Seminary de New York, est l’auteur en 1916 de l’ouvrage, The Pitiful Plight of the Assyrian Christians in Persia and Kurdistan, described from the reports of eye- witnesses, édité par l’American Committee for Armenian and Syrian Relief (ACASR) dont l’auteur est membre. Ce comité, formé en 1915 par des personnalités que les atrocités et les massacres d’Anatolie orientale ont indigné, est particulièrement actif parmi tous ceux qui soutiennent aux États-Unis à la fois les causes arménienne et assyro-chaldéenne pendant la guerre [25]. Il fournit, à compter de novembre 1915, des secours auxquels contribue la Fondation Rockefeller [26]. Rockwell publie en outre un article sur la question dans un magazine new-yorkais en novembre 1916 :
Les Arméniens, écrit-il, ne sont pas les seuls infortunés ; les Syriens eux-aussi ont été décimés. Il y a beaucoup de sortes de Syriens chrétiens. Certains vivaient près de la frontière persane et dans l’ancienne Assyrie où on les appelait Nestoriens ou Assyriens chrétiens. Certains de ceux qui vivaient au nord de Mossoul ont été massacrés. Les montagnards nestoriens qui, selon les chiffres que j’extrais d’une brochure actuellement sous presse, déclaraient avant la guerre être 90 000, durent se battre pour sortir de Perse à l’automne 1915. Notre comité a nourri en novembre et décembre 1915 pas moins de 30 000 de ces réfugiés de Turquie, en plus d’un nombre égal de chrétiens misérables dont les foyers se trouvaient du côté perse de la frontière. […]. Avant la guerre, il y avait entre 160 000 et 200 000 Syriens chrétiens (incluant des Nestoriens, des Uniates catholiques romains, des Protestants et quelques communautés éparses de Jacobites) vivant dans la région du Tigre, sans compter Diarbékir, dans les montagnes du Kurdistan et dans la Perse du nord-ouest (Adarbaijan). Ils ont péri en grand nombre, mais personne ne sait combien exactement. Pendant l’occupation turque d’Ourmiah (2 janvier-20 mai 1915), 4 000 sont morts de faim et d’épidémies dans la ville et 1 000 furent tués dans les villages des environs. C’est un épisode marquant sur le long rouleau de la mort en Perse [27].
23 En France, Le Petit Journal, Le Petit Parisien, Le Matin, le Journal, Le Figaro, Le Temps, L’Humanité, La Presse, Le Gaulois qui, pour certains, avaient déjà rendu compte des massacres de 1895-1896 [28], relatent ceux de 1915 presque au moment où les faits se produisent et lancent des appels à l’aide en faveur des Assyro-Chaldéens. Mais ce sont surtout la presse et des ecclésiastiques catholiques qui s’efforcent d’alerter l’opinion publique. La Croix en particulier. Ce quotidien, organe des Assomptionnistes, publie le compte rendu d’une conférence sur les massacres de 1915 contre les Arméniens et les Chaldéens d’Arménie et de Perse à la Société de géographie de Paris lors d’une séance présidée par l’académicien et historien Frédéric Masson (1847-1923) ; l’abbé Lagier, le directeur de L’Œuvre d’Orient, qui a ouvert à Paris une souscription en faveur des victimes, participe à cette manifestation [29]. À en croire la conclusion de cet article, l’auditoire « a été vivement ému par la parole des deux conférenciers ». Le journal titre le 19 avril 1916 sur les « Massacres de chrétiens en Turquie et en Perse ». Le 27 mars 1917, il lance un appel en faveur des Syro-Chaldéens catholiques et reproduit une lettre de Mgr Eugène Manna, l’évêque chaldéen de Van, au cardinal archevêque de Paris, Léon-Adolphe Amette, ainsi que la réponse de ce dernier. Le 21 juin 1916, Le Journal publie un long papier titré « Le Journal en Arménie. Deux millions de cadavres ! ». Henry Barby y décrit des massacres planifiés et réalisés de façon organisée sur la base d’informations fournies en mai 1916 par le dominicain Bernard Goormachtig, installé à Van. Le 25 juillet 1916, Le Gaulois publie en « une » un article de Frédéric Masson à nouveau, intitulé « Ce qui vient de Chaldée ». « Un peuple, écrit-il, petit par les débris, immense par les gloires qu’il assume ou qu’il rappelle, le peuple chaldéen a presque entièrement péri sans que l’Europe s’émût et sans que nul y prît intérêt. » De son côté, l’abbé Eugène Griselle (1861-1923), le secrétaire général du Comité catholique de propagande française à l’étranger que préside le très influent Mgr. Alfred Baudrillart (1859-1942), recteur de l’Institut catholique de Paris (1907-1942) et membre de l’Académie française, publie en mars 1917 Syriens et Chaldéens, leurs martyres, leurs espérances, 1914-1917, où il décrit largement les massacres et donne la parole à des prélats Assyro-Chaldéens [30].
24 D’une manière générale, les milieux catholiques français disposent à l’époque d’une vaste documentation provenant de missionnaires lazaristes, dominicains, capucins, des filles de la Charité, des sœurs franciscaines de l’Immaculée Conception de Lons-le-Saunier et de l’Œuvre d’Orient, témoins directs ou ayant recueilli des témoignages sur place. Ainsi Jacques Rhétoré, Hyacinthe Simon et Marie-Dominique Berré, trois dominicains présents à Mardin au moment des massacres [31]. Les numéros des Annales de la Congrégation de la Mission des années de 1915 à 1919 sont particulièrement éclairants et les archives lazaristes recèlent deux documents dignes d’intérêt : Événements vécus et relatés par sœur Marie de Lapeyrière, qui rend compte des événements survenus en Perse en 1918-1919 ; Mémoires d’un missionnaire en Perse (Iran). Le récit des événements terribles vécus par lui, en particulier durant la grande guerre 1914-1918 du Père Pierre Franssen (1881-1959) [32].
25 Ces échos ne s’arrêtent pas avec la guerre. La Presse du 4 mai 1919 annonce une conférence de l’abbé J. Naayem pour le mardi 6 mai au Cercle catholique des étudiants de Paris « sur les massacres et déportations des Assyro-Chaldéens en Mésopotamie […] ignorés en France ». L’Asie française, l’un des organes du « parti colonial », rend compte d’une conférence donnée au siège parisien du Comité de l’Asie Française, 30 mai 1919, par Naayem :
Là, comme partout, déclare l’orateur, la Turquie du Comité Union et Progrès a voulu faire disparaître par la violence les éléments allogènes qu’elle était incapable d’assimiler. On commença par désarmer les soldats assyro-Chaldéens qui se trouvaient au front. On en fit des bataillons spéciaux de travail employés sur les routes et aux tranchées. Beaucoup de ces hommes ainsi ramenés à l’arrière furent « supprimés ». Les autorités locales se chargèrent de désarmer la population civile. On exigea un certain nombre d’armes et les habitants des villages qui ne pouvaient les fournir furent torturés, souvent d’une façon infernale […] [33].
27 Le personnage de Joseph Naayem (1888-1964) et son livre, Les Assyro-Chaldéens et les Arméniens massacrés par les Turcs, publié en français à Paris en 1920, traduit en anglais et publié à New York en 1921, méritent une mention particulière [34]. Témoin oculaire majeur des massacres de 1915 auxquels il a échappé de justesse, cet Assyro-Chaldéen francophone et officier de l’instruction publique est un ancien aumônier des prisonniers de guerre français et britanniques en Turquie [35]. Naayem se trouvait au printemps 1915 dans sa paroisse d’Ourfa, ville où cohabitaient paisiblement jusque-là Assyro-Chaldéens et Arméniens. Il y constate dès le mois de mars 1915 que « des convois de déportés composés de femmes, d’enfants et de vieillards arrivaient […] dans un état pitoyable » et que « tous les jours dix à quinze personnes mouraient ». Plus tard, les Turcs s’en prennent à sa propre famille, assassinant son père, selon Naayem. Menacé lui-même de mort, il s’échappe d’Ourfa en août 1915 déguisé en Bédouin et rejoint Alep. Là, au début de novembre 1915, le patriarche chaldéen, Mar Joseph Emmanuel II Thomas (1900-1947), l’envoie à Istanbul, muni d’un laissez-passer du gouverneur d’Alep, pour servir d’aumônier aux prisonniers de guerre alliés. Il doit cette nomination au pape Benoît XV qui, « après plusieurs mois de pourparlers, avait obtenu du gouvernement turc que des prêtres puissent aller dans le camp des prisonniers » où jusque-là « des prêtres chaldéens seuls, étaient admis ». À son arrivée à Constantinople, le ministère turc de la Guerre lui délivre des papiers officiels et, le 15 décembre 1915, il part pour Afioun-Kara-Hissar, un camp de concentration pour les prisonniers français, anglais et russes. Avec ce livre, unique aussi bien par les faits rapportés que par la richesse des illustrations et les photos des personnes entendues sous serment par l’auteur, l’abbé Naayem a légué à l’histoire un rare recueil de dépositions faites par des victimes de sévices et des survivants des génocides assyro-chaldéen et arménien et consignées sur place.
28 Dans un article intitulé « La Perse. Persécution de 1918, massacres », La Semaine religieuse de Paris du 16 juillet 1921 relève pour sa part :
[En] Perse, le christianisme est florissant surtout dans les milieux urbains, ruraux, au centre des montagnes qui entourent Ourmiah, Salamas, Khoï, Sauldouz, etc. Il y a là des églises anciennes fondées au temps de l’hérésie nestorienne. Les chrétiens avaient fait de ce pays une oasis religieuse. Dans la seule ville d’Ourmiah, il existait cinq imprimeries (une catholique, une protestante américaine, une anglicane, une orthodoxe et une nestorienne) qui publiaient journaux, revues, ouvrages religieux, etc., dans les diverses langues française, anglaise, russe, perse, arménienne, chaldéenne. Les bibliothèques renfermaient de précieux manuscrits anciens en syro-chaldéen. […] Toutes ces richesses ont été dispersées par la persécution. […].
30 La Croix du 28 mars 1923 rend compte en « une » d’une conférence donnée au grand amphithéâtre de l’Institut catholique de Paris le 21 février par un Assyro-Chaldéen du village de Kerboran du Tour Abdin, professeur de mathématiques et de sciences et secrétaire général du Comité national assyro-chaldéen, Jean Gorek de Kerboran [36]. Le titre mentionne en outre une conférence précédente du même orateur, le 17 mars, sur les origines du peuple assyro-chaldéen. Par ailleurs, le quotidien publie le 14 février 1923, derechef en première page, un papier de R. Le Cholleux sur les Assyro-Chaldéens, intitulé « Une “nation” opprimée par l’islam » ; il y rappelle que les Grecs et les Arméniens « n’[étaie]nt pas les seuls sur qui p[e]s[ait] lourdement le joug ottoman », ajoutant : « Et sur ce sol couvert des vestiges d’un illustre passé, gisent des myriades d’innocents tombés sans défense ! »
31 On sait que le vicomte James Bryce (1838-1922), éminent historien et homme politique britannique, ancien ambassadeur de Grande-Bretagne aux États-Unis, fut à l’origine, avec l’historien Arnold Joseph Toynbee, du célèbre Blue Book intitulé The Treatment of Armenians in the Ottoman Empire. Le 23 juillet 1920, il préface l’édition anglaise du livre de l’abbé Naayem, Shall this Nation die ? Dénonçant le caractère prémédité des massacres, J. Bryce, bon connaisseur de la question arménienne, y évoque aussi le sort des Assyro-Chaldéens :
Ce furent les souffrances des Arméniens qui attirèrent principalement l’attention en Grande-Bretagne et en Amérique parce qu’ils étaient les plus nombreux dans les ordres ecclésiastiques, et que ce massacre fut réalisé à une grande échelle. Mais les petites communautés, telles que les Églises nestorienne et assyro-chaldéenne furent tout autant victimes du plan destiné à extirper la chrétienté, racines et rameaux, bien que les Turcs ne se soient jamais aventurés à prétendre que ces communautés aient donné motif à critiques.
Dans ce présent volume, poursuit lord Bryce, nous présentons un récit explicite et saisissant de cruautés perpétrées de façon similaire sur des membres de l’Église assyro-chaldéenne, dont la moitié environ, hommes, femmes et enfants, périrent entre les mains de meurtriers et de détrousseurs turcs [37].
33 De fait, à compter d’octobre 1915, on s’intéresse en Grande-Bretagne au génocide des Arméniens comme à celui des autres chrétiens de l’Empire ottoman. Les journaux britanniques, tels que Manchester Guardian et Times, titrent en octobre et novembre sur les massacres de Perse et l’hécatombe des nestoriens [38]. En 1920, la Conférence anglicane de Lambeth, que préside l’archevêque de Canterbury, Randall Davidson, exprime sa solidarité avec les Arméniens, les Assyriens et les Syriaques jacobites et dénonce les persécutions qu’ils ont subies lors de la Grande Guerre [39]. Sa résolution finale porte que :
La Conférence exprime sa sincère sympathie aux chrétiens Arméniens, Assyriens et Syriens jacobites pour les persécutions qu’ils ont été appelés à subir, déplorant avec indignation les terribles massacres qui eurent lieu dans leurs rangs avant et pendant la Grande Guerre ; et elle prie intensément pour que, dans la réorganisation politique de l’Orient, un gouvernement juste, de liberté et contre l’oppression puisse voir le jour à l’avenir [40].
L’action diplomatique auprès des alliés après la guerre : une suite de déceptions
35 Dans ce contexte, les élites religieuses et politiques assyro-chaldéennes ont pensé, la guerre terminée, pouvoir tirer parti du climat favorable aux « nationalités ». Toutefois elles étaient divisées politiquement, notamment sur la désignation d’une puissance tutélaire, le tracé des frontières du futur État et le nom à lui attribuer. Aussi s’empressent-elles auprès des chancelleries occidentales (France, Grande-Bretagne, États-Unis, Saint-Siège) en ordre dispersé, alors que les concurrences nationalitaires entre Arabes, Kurdes, Arméniens et Assyro-Chaldéens ne jouent pas en leur faveur.
36 C’est ainsi que, de 1918 à 1925, une série de mémorandums et de démarches souligne devant les instances internationales les souffrances et les pertes subies par le peuple assyro-chaldéen durant la guerre, son histoire, ses singularités nationales et religieuses, ses revendications. L’abbé Joseph Ghanima par exemple, vicaire patriarcal chaldéen et futur patriarche de cette Église, exprime depuis Mossoul au consul de France à Bagdad, le 29 août 1919, sa gratitude pour l’aide financière que la France « a bien voulu accorder en faveur de nos pauvres Chaldéens de la dépendance d’Ammadéah ». La Croix du 12 janvier 1920 signale l’arrivée à Paris, le 9 janvier 1920, du patriarche chaldéen catholique, Mar Joseph Emmanuel II Thoma (1900-1946), venant de Rome pour quelques jours afin de prendre contact avec les autorités religieuses et politiques ; il est accompagné de Mgr Pierre Aziz, évêque de Salamas, qui a miraculeusement échappé aux massacres, et de ses deux secré-taires. À Londres, où est créé un comité de soutien, le Patriarche expose, le 7 mars 1920, sous les voûtes de la cathédrale de Westminster, la misère du peuple assyro-chaldéen. L’abbé Joseph Naayem, envoyé par Mgr Suleiman Sabbagh, l’évêque de Diarbékir, Mgr Jacques Manna, l’évêque chaldéen de Van, et le lazariste Abel Zaya, futur évêque chaldéen d’Ourmiah, pour ne citer que ces trois noms, se rendent également à Paris et à Londres pour plaider la cause de leur peuple et solliciter une assistance humanitaire auprès des autorités politiques et religieuses anglicanes et catholiques britanniques [41]. Quant à Joseph Naayem, il fait un séjour de six mois en Amérique, où il forme un comité de secours analogue à celui fondé dans la capitale britannique, le Chaldean Relief Committee. Dans un document détaillé, le patriarche syriaque catholique, Ignace Ephrem II Rahmani (1898-1929), un grand ami de la France, souligne que des milliers de ses fidèles, parmi lesquels l’évêque de Djéziret, Mgr Flavien Michel Malké (1858-1915), ont disparu dans presque tous les diocèses de son patriarcat [42]. Le patriarche chaldéen remet un rapport le 29 janvier 1920 à Alexandre Millerand, le président du Conseil français [43]. Le savant Mor Ephrem Barsoum (1887-1957), futur patriarche de l’Église syriaque orthodoxe, a également adressé à Paris et à Londres divers notes circonstanciées sur les pertes subies par sa communauté.
37 D’une façon générale, Mgr. Ignace Ephrem II Rahmani, l’abbé Joseph Naayem, Mar Emmanuel II Thomas, et J. Gorek de Kerboran multiplient les efforts pour rencontrer ou contacter les personnalités politiques et religieuses des pays vainqueurs : les Français Stéphen Pichon, Alexandre Millerand, Raymond Poincaré, Georges Clemenceau, Aristide Briand, Paul Deschanel, l’archevêque de Paris, le cardinal Léon-Adolphe Amette, Mgr Alfred Baudrillart, ; les Britanniques Lord Curzon, Lloyd George, l’archevêque de Canterbury, Randall Davidson ; le président américain Woodrow Wilson. Outre les Russes André Mandelstam et Basile Nikitine, les grands juristes spécialistes du droit international, Joseph-Thomas Delos et Louis Le Fur se penchent aussi sur le sort des Assyro-Chaldéens [44], sans oublier l’historien britannique Arnold Toynbee, dont le Blue Book paraît à Londres en 1916. Mgr. Alfred Baudrillart a reçu à plusieurs reprises en 1919, 1920 et 1921 Mgr. Ephrem II Rahmani, l’abbé Joseph Naayem, Mgr. Emmanuel II Thomas et Gorek de Kerboran et aida ces personnalités dans leurs démarches auprès des autorités politiques (Pichon, Clemenceau…) [45]. Les résultats, néanmoins, furent décevants.
38 Pas moins de sept délégations sont présentes à Paris lors de la Conférence de la Paix en 1919, tandis que onze mémorandums, œuvres des divers représentants assyro-chaldéens sont envoyés au secrétariat de la Conférence. Tous disent combien le peuple assyro-chaldéen aspire à la création d’un État doté de frontières ambitieuses, revendication qu’ils justifient par l’horreur des exactions commises et la production de statistiques sur les disparus et les réfugiés. Mais, comme on l’a dit, les avis divergent fondamentalement sur la puissance tutélaire et sur un éventuel mandat exercé par la SDN. Certains, les catholiques, sont favorables à un mandat français, alors que les Assyriens nestoriens et les protestants penchent pour un mandat britannique ou américain [46]. Inutile de dire que ces désaccords, parfois très vifs, affaiblissent leur cause devant les Alliés [47]. Pleins d’espoirs malgré tout, des délégués affluent de Turquie, de Perse, du Caucase, de Mésopotamie, de Syrie et des États-Unis à la Conférence de la paix, puis – la question du sort de l’Empire ottoman n’étant toujours pas réglée ̶ aux conférences de Sèvres (1920) et de Lausanne (1923), à l’instar du général Agha Pétros Ellof (1880-1932), commandant en chef des troupes assyro-chaldéennes pendant la Grande Guerre sur le front turco-persan [48], de Malek Cambar, un leader politique important à cette époque [49], de Paul Shimmon, de Surma Khanum et de Bet Mar Shimoun (1883-1975), la sœur du patriarche de l’Église apostolique assyrienne de l’Orient (« nestorien »), Mar Benyamin Shimoun, assassiné près de Salmas en Iran en 1918 [50].
39 Ces efforts ont abouti néanmoins à une certaine reconnaissance de l’identité assyro-chaldéenne par le traité de Sèvres. Signé le 10 août 1920 entre les puissances victorieuses, alliées et associées d’une part, et la Turquie vaincue d’autre part, ce traité démantèle l’ex-Empire ottoman. Dans son article 62 qui prévoit, à l’initiative de la France et de l’Angleterre, une autonomie locale pour les Kurdes, il est fait en effet référence aux Assyro-Chaldéens : « Ce plan, stipule le texte, devra comporter des garanties complètes pour la protection des Assyro-Chaldéens et autres minorités ethniques ou religieuses dans l’intérieur de ces régions ». Depuis 1919, les documents produits par les défenseurs de la cause assyro-chaldéenne avaient largement circulé et les activités de leurs organisations ̶ notamment celles du Conseil national assyro-chaldéen de Constantinople, organisme d’obédience catholique que dirigent deux avocats, Saïd A. Namek et Rustem Nedjib ̶ et les démarches de Surma Khanum et Paul Shimmon, Agha Pétros et Malek Cambar avaient conféré une certaine visibilité à la question assyro-chaldéenne. Mais, du fait des victoires des troupes kémalistes en Turquie et de la lassitude des pays vainqueurs, ce traité et, avec lui, le plan d’autonomie du Kurdistan deviennent caduques. Les nouvelles dispositions du traité de Lausanne passé par les Alliés avec la Turquie kémaliste le 23 juillet 1923, oublieux des Arméniens comme des Assyro-Chaldéens, annulent celles du traité de Sèvres adoptées trois ans plus tôt.
40 Tout aussi décevantes s’avèrent, en 1925, les négociations pour établir le tracé de la frontière entre l’Irak et la Turquie. Ankara parvint en effet à conserver la région stratégique du Hakkari, tout en refusant de laisser les montagnards assyro-chaldéens, contraints de se réfugier en Irak en août 1918, regagner leurs foyers.
41 À l’instar des Kurdes et des Arméniens, les Assyro-Chaldéens furent donc abandonnés à leur sort et les appels adressés à la Société des nations (SDN) à partir de 1920 n’y changèrent rien. Amer, Malek Cambar prend à partie la Cour internationale de Justice de La Haye, le 25 septembre 1925 : « Pourquoi les conférences réunies jusqu’à ce jour, qui ont fait rendre justice à tous les petits peuples opprimés, n’ont-elles pas entendu la voix du peuple assyro-chaldéen plusieurs fois millénaire, et qui a été si malheureux ? » Deux lettres adressées par Gorek de Kerboran au Conseil de la SDN dénoncent, les 16 avril et 10 août de cette même année, « l’œuvre de destruction systématique poursuivie par la Turquie au Kurdistan » où les autorités locales « agissent par ordre d’Angora [Ankara] ». L’Union catholique d’études internationales, fondée en Suisse en 1920 avec le soutien du Saint-Siège, soumet aussi en 1925, au Conseil de la SDN et à sa Commission internationale d’enquête sur la frontière très contestée entre l’Irak et la Turquie, une déposition de l’abbé assyro-chaldéen Paulus Bédaré, du district de Zakho en Irak du nord, qui dénonce la situation dramatique des réfugiés assyro-chaldéens déportés dans cette zone après avoir été chassés de Turquie. En 1935, l’organisation internationale publie tout de même une brochure officielle qui salue la pérennité du peuple assyrien, rappelle les massacres subis pendant la Grande Guerre et souligne son attachement à son héritage :
Communauté lointaine, peu nombreuse, sans aucun rôle – au point que jusqu’au xix e siècle, l’Occident en avait oublié l’existence – les Assyriens n’ont jamais connu, semble-t-il, le bonheur des « peuples sans histoire ». Leur pauvreté ne les a préservés ni de l’invasion, ni de l’agression ; leur petit nombre ne les a pas sauvés des dissensions intérieures. Pendant des siècles, ils ont vécu en marge de l’Histoire, et, tout en supportant les fardeaux, ils n’en ont connu ni les gloires ni les récompenses. Pourtant, ce peuple, sans biens, sans union, sans chefs, s’est transmis de génération en génération ses traditions et possessions ancestrales – l’héritage immatériel d’un vieux nom, la succession effective, d’une Église autrefois puissante [51].
Le saint-siège : un rôle humanitaire
43 Bien renseignées par les missionnaires, les autorités religieuses américaines, britanniques et françaises ne sont pas restées insensibles, de leur côté, au sort fait aux Assyro-Chaldéens. Le Saint-Siège ne pouvait se désintéresser du sort de ces chrétiens d’Orient, dont une partie est rattachée à Rome. Comme indiqué précédemment, les liens des Églises orientales avec Rome remontent à 1553, année marquant la naissance du catholicisme oriental. Depuis, le Saint-Siège a toujours été attentif à ces Églises, en particulier sous les pontificats de Benoît XIV (1740-1758) et de Léon XIII (1878-1903), non sans tentatives de latinisation, il est vrai. Le pape Benoît XV (1914-1922) marque à son tour sa sollicitude aux chrétiens d’Orient en fondant le 1er mai 1917 un dicastère spécial pour les chrétiens orientaux, La congrégation pour l’Église orientale, et, la même année, l’Institut pontifical oriental de recherches et d’études supérieures pour la formation du clergé oriental. Le 5 octobre 1920, il déclare saint Ephrem (306-373) docteur de l’Église universelle.
44 Les archives du pontificat de Benoît XV au Vatican témoignent de l’excellence de l’information sur le génocide dont ont disposé le Pape et son secrétaire d’État, le cardinal Pietro Gasparri, ainsi que les cardinaux Nicolo Marini, secrétaire de la Congrégation pour l’Église orientale, et les préfets successifs de la congrégation de Propaganda Fide – Mario Gotti, Domenico Serafini d’août 1916 à 1918, et Willem Van Rossum à partir de 1918. Elles recèlent en effet des sources inestimables, à commencer par les correspondances et les rapports adressés par Mgr. Angelo Dolci (1871-1939), diplomate et délégué apostolique à Constantinople de 1914 à 1922, aux hautes instances vaticanes [52]. Des articles paraissent dans L’Osservatore Romano, notamment en avril 1916. Dès le 29 octobre 1918, le Dr Harry Packard, un médecin américain qui travaillait à l’hôpital de la mission presbytérienne d’Ourmiah, envoie aussi au Pape, depuis Tabriz en Iran, un rapport sur les massacres et les pillages commis cette année-là par les Turcs et les Kurdes, notamment à la mission des lazaristes [53]. Début 1919, le très actif patriarche chaldéen catholique, Emmanuel II Thomas, lui adresse, ainsi qu’aux autorités de Paris et de Londres, un rapport détaillé recensant l’ensemble des pertes subies par l’Église chaldéenne durant la guerre. Venu de Bagdad à Rome en janvier 1920 avant de gagner les capitales française et britannique, il décrit, dans une lettre du 6 juillet 1920, les malheurs de son Église et de son peuple :
Depuis cinq ans, j’assiste avec une amertume indicible à toutes sortes de misères, aux massacres de mes enfants et à la ruine d’une grande partie de ce Patriarcat et de ses œuvres. Pour mon malheur, j’ai vu, pendant ces cinq terribles années, six de mes évêques massacrés avec plus de cinquante prêtres et cinquante mille fidèles, qui laissent après eux le spectacle navrant de leurs foyers ruinés, d’un grand nombre d’orphelins, pour la plupart dispersés parmi les Kurdes et en partie réfugiés à Mossoul, avec des milliers de réfugiés, réduits malgré mes efforts à la dernière misère.
46 De même, dans un ouvrage récent fondé sur les archives de la nonciature apostolique à Bagdad, l’ancien nonce apostolique en Irak (2001-2006), le cardinal Fernando Filoni, préfet de la Congrégation de Propaganda Fide, cite plusieurs documents importants [54]. Parmi eux, une lettre-témoignage de Mgr Jacques-Émile Sontag, un lazariste alsacien, délégué apostolique en Perse et archevêque latin d’Ispahan, au cardinal Serafini, préfet de cette congrégation ; celle-ci, datée du 8 mars 1918, est envoyée d’Ourmiah où il est établi et où il est assassiné en juillet suivant, au moment même où l’évêque chaldéen de la ville, le savant et linguiste Mar Thomas Audo (Alqosh 1854-Ourmiah 1918), y est martyrisé. Le 23 septembre 1918, le cardinal Gasparri annonce ainsi sa mort, apprise par un télégramme du ministre de France à Téhéran, Lecomte, reçu le 9 septembre, au cardinal Van Rossum, alors préfet de la Congrégation Propaganda Fide :
Ai douleur informer votre Éminence de la mort glorieuse du délégué apostolique Mgr. Sontag massacré à Ourmia avec missionnaire Dinkha et partie communauté catholique 27 juillet par Kurdes indigènes et Turki. Stop. Information non officielle mais très probable assure que Lazaristes Lhotellier et Mirazis auraient été également martyrisés à Khosrava avec toute population catholique [55].
48 Toujours au cardinal Van Rossum, le cardinal Gasparri avait annoncé peu auparavant l’assassinat du patriarche nestorien Mar Benyamin Shimoun par les Kurdes le 20 juin 1918 [56]. F. Filoni publie encore un rapport du dominicain français François-Dominique Berré sur les massacres de Mardin le 15 janvier 1919 [57], des extraits des « Mémoires sur les massacres survenus dans les diocèses de Salamas et d’Ourmiah » de Mgr Pierre Aziz, évêque chaldéen de Salamas en Iran, et les lettres de Mgr. Addaï Scher, évêque chaldéen de Séert, savant renommé, lui-même martyrisé en 1915, au délégué apostolique, le carmélite déchaux Jean de la Sainte-Famille (Drure de son nom), sur la situation tragique des chrétiens de son diocèse, déjà victimes de massacres les 16 mars 1905 et 14 novembre 1906. « Mon diocèse, écrit-il, va bientôt être désert. […] Mon diocèse est en agonie. »
49 À l’instigation de Benoît XV, Mgr. Angelo Dolci tenta, grâce à ses contacts multiples dans les milieux dirigeants ottomans, de conjurer les massacres, mais sans succès. Impuissant à prévenir la catastrophe, le Vatican suivit avec attention la situation et chercha à venir en aide à cette chrétienté meurtrie sur les plans humanitaire et spirituel. Il distribue des aides financières, plus particulièrement aux Églises chaldéenne et syriaque catholique, pendant et après la guerre. Ainsi, dans une lettre du 17 février 1919, le patriarche chaldéen, Emmanuel II Thomas, écrit-il de Bagdad au secrétaire d’État Gasparri : « J’ai l’honneur de vous informer que, depuis une semaine seulement, par la délégation de Syrie, j’ai reçu les allocations des séminaristes syro-chaldéens et les 10 000 livres italiennes données par Sa Sainteté pour être distribuées aux pauvres de Mossoul, catholiques et dissidents [58]. » De même, le 9 juillet 1919, le vicaire général du patriarcat chaldéen de Constantinople, Mgr Thomas Bajari, adresse de vifs remerciements à Benoît XV : « Nous pouvons vous certifier, très Saint Père, que les veuves et orphelins chaldéens qui seront soulagés par vos bienfaits ne cesseront de bénir votre nom, ainsi que la sainte Église catholique au sein de laquelle ils sont nés et mourront [59]. »
50 Le cardinal Gasparri a aussi exprimé son soutien à la cause assyro-chaldéenne sur le plan politique. Lors d’un entretien accordé par le cardinal à l’envoyé spécial du quotidien français Le Petit Parisien à Rome, le journaliste Maurice Prax demande au secrétaire d’État du Saint-Siège son sentiment sur les revendications des Assyro-Chaldéens qui sollicitent de la Conférence de la Paix « qu’un petit État chrétien soit constitué en Haute-Mésopotamie, entre Diarbékir et Mossoul [60] ». « Oui, certes, répond le cardinal. Je viens de recevoir le président de la délégation assyro-chaldéenne [en l’occurrence du Conseil national assyro-chaldéen de Constantinople, d’obédience catholique]. Assyriens et Chaldéens ne veulent point davantage de l’islamisme arabe que de l’islamisme turc. Nous ne pouvons que suivre favorablement les démarches qu’ils ont entreprises. » De fait, le Vatican, qui n’a pu obtenir d’être partie invité à participer à la Conférence de la Paix, ne pouvait guère que « suivre » les événements sans pouvoir peser sur eux.
51 Comme toutes les années, le 24 avril 2017, la communauté assyro-chaldéenne a commémoré de par le monde, avec les Arméniens, le 102e anniversaire du génocide de 1915. La mémoire reste vive et fidèle. Comme nous l’avons constaté, il existe de nombreuses archives et une documentation abondante et en plusieurs langues sur le sujet, ainsi que sur le contexte régional et international dans lequel le drame s’est déroulé. De nouvelles publications ne cessent d’apporter de nouveaux éclairages sur l’histoire de l’Empire ottoman et du Moyen Orient. Cet article fut l’occasion de montrer que ce drame a suscité une action internationale de l’Église surtout, qui n’obtint, certes, pas grands résultats mais qui mériterait d’être explorée plus avant, d’autant que la reconnaissance du génocide des Assyro-Chaldéens est aujourd’hui en marche.
Notes
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[1]
L’Osservatore Romano, édition française, 16 avril 2015, p. 10.
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[2]
Son titre : Nach dem Forschungsstand in der Wissenschaft stelle die aramäisch-assyrische Bevölkerung eine weitere Opfergruppe dieses Völkermordverbrechens dar.
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[3]
Joseph Yacoub, « Les regrets du Bundestag », L’Orient-Le Jour, 10 juin 2016. Le titre de la résolution est : Erinnerung und Gedenken an den Völkermord an den Armenier und anderen christlichen Minderheiten in den Jahren 1915 und 1916.
-
[4]
J. Yacoub, Qui s’en souviendra ? 1915 : le génocide assyro-chaldéen-syriaque, Paris, Éditions du Cerf, 2014 ; id., Babylone chrétienne. Géopolitique de l’Église de Mésopotamie, Paris, Desclée de Brouwer, 1996.
-
[5]
Rev. John Stewart, Nestorian Missionnay Enterprise. The story of a Church on fire, Édimbourg, Inde, Madras, T. et T. Clark, 1928.
-
[6]
J. Yacoub, Babylone chrétienne…, op. cit. ; id., Menaces sur les chrétiens d’Irak, Chambray-lès-Tours, Éd. CLD, mars 2003, ouvrage traduit en italien au terme d’une remise à jour : I Cristiani d’Iraq, Milan, Jaca Book, 2006.
-
[7]
L’histoire religieuse de cette communauté, de son droit canonique et de son expansion missionnaire en Asie est l’objet d’une littérature relativement riche en langue française. Entre autres : Cardinal Eugène Tisserant, « Nestorienne (l’Église) », Dictionnaire de Théologie Catholique (ci-après : DTC), Paris, Letouzey et Ané, 1931, t. IX, col. 157-323 ; Jean Dauvillier, « Chaldéen (Droit) », Dictionnaire de droit canonique (ci-après : DDC), Paris, Letouzey et Ané, 1942, t. III, col. 292-388.
-
[8]
Le sous-titre du livre du professeur Abraham Yohannan (1853-1925), un Assyrien d’Ourmiah, The Death of a Nation or The Ever-Persecuted Assyrians or Nestorian Christians (New York et Londres, G. P. Putnam, 1916), est significatif à cet égard, de même que celui du pasteur Joel Warda, The flickering light of Asia or the Assyrian Nation and Church (publié à compte d’auteur, 1924).
-
[9]
J. Yacoub, Year of the Sword, Hurst, Londres, 2016, pp. 101-113.
-
[10]
J. Yacoub, « La Perse au commencement du christianisme oriental », L’Orient-Le Jour, Beyrouth, 29 juillet 2016. Sur la géographie et l’histoire du Hakkari : Jean Maurice Fiey, « Proto-histoire chrétienne du Hakkari turc », L’Orient syrien, vol. 9, Paris, 1964, pp. 443-472 ; Michel Chevalier, Les Montagnards chrétiens du Hakkari et du Kurdistan septentrional, Paris, Publications du département de géographie de l’université de Paris-Sorbonne, 1985.
-
[11]
Terme signifiant en arabe « calamité », « catastrophe ». Les Arabes de Palestine l’utilisèrent également plus tard pour désigner la victoire israélienne et leur exode de 1948.
-
[12]
Joseph Naayem, Les Assyro-Chaldéens et les Arméniens massacrés par les Turcs, Paris, Bloud et Gay, 1920.
-
[13]
Deacon James Isha Barcham, Excerpts from the Assyrian History, Chicago, Alpha Graphic, 2013, (en araméen oriental ou soureth) ; J. Yacoub, « Après 1915, les drames se succèdent », Perspectives et Réflexions, n° 3, 2015, Œuvre d’Orient, Paris, pp. 103-129.
-
[14]
Yonan H. Shahbaz, The Rage of Islam. An account of the massacre of Christians by the Turks in Persia, Philadelphie, The Judson Press, octobre 1918, pp. 57-58.
-
[15]
1919, s. éd., Beyrouth, 504 p. Préface en français.
-
[16]
Ouvrages de Lepsius : Bericht über die Lage des ArmenischenVolkes in der Türkei, 1916 (édition française : Rapport secret sur les massacres d’Arménie : 1915-1916, préface de Paul Thibaud, Paris, Payot, 1987, NDLR), et Deutschland und Armenien 1914-1918. Sammlung diplomatischer Aktenstücke (1919).
-
[17]
Georges-Henri Ruyssen (dir.), La Questione Armena, vol. IV, 1908-1925, Lilamé, Documenti dell’Archivio Segreto Vaticano, 2015, Pontificio Istituto Orientale, Rome, pp. 177-187. Ce travail considérable en sept volumes, élaboré à partir des archives du Vatican, jette un bon éclairage sur la tragédie assyro-chaldéenne.
-
[18]
Idem. Titre du rapport : Über die Lage der Katholischen Armenier in der Türkei.
-
[19]
André Mandelstam, Le Sort de l’Empire ottoman, Lausanne, Paris, Payot, 1917.
-
[20]
Les Extravagances bolchéviques et l’épopée arménienne en Transcaucasie en 1918, Paris, Albin Michel, 1918, rééd. avec des annexes par Le Cercle d’Écrits Caucasiens, Paris, 2009 ; L’Établissement des Assyriens. Une œuvre humanitaire et d’apaisement, Genève, SDN, 1935 (en français et en anglais).
-
[21]
Quelques retours de réfugiés assyriens sont cependant intervenus à Ourmiah en 1922.
-
[22]
A. Yohannan, The Death of a Nation or The Ever-Persecuted Assyrians or Nestorian Christians, PhD, New York et Londres, G. P. Putnam’s sons, 1916, 170 p., p. 5. Citation traduite de l’anglais par la rédaction.
-
[23]
Le Comité suisse de l’Œuvre de secours 1915 aux Arméniens publie en effet Quelques documents sur le sort des Arméniens en 1915-2016, dont les deux premiers fascicules sont l’œuvre d’Allemands habitant la Turquie qui « ne peuvent être suspectés de partialité ni en faveur des Arméniens, ni contre les Alliés de la Turquie ». Le troisième fascicule contient un rapport adressé « aux représentants du peuple allemand » par le Dr. Martin Niepage, maître supérieur à l’école allemande d’Alep.
-
[24]
Ce journal de 51 pages est publié à Chicago par The Woman’s Presbyterian Board of Missions of the Northwest.
-
[25]
William W. Rockwell, The Pitiful Plight of the Assyrian Christians in Persia and Kurdistan, described from the reports of eye-witnesses, American Committee for Armenian and Syrian Relief, 1916, 72 p.
-
[26]
Cette organisation devient le Near East Relief en août 1919 (NDLR)
-
[27]
« The total of Armenian and Syrian dead », Current history Magazine, New York, New York Times Company, Times Square, pp. 337-338. Citation traduite de l’anglais par la rédaction.
-
[28]
La Croix a titré le samedi 29 août 1896 sur les « Massacres en Turquie », et reproduit une lettre de Salamas (Perse) datée du 21 juillet 1896, publiée dans Les Missions catholiques. Un missionnaire lazariste y fournissait des détails pitoyables sur la situation des chrétiens qui tentaient d’échapper aux bandes kurdes armées qui saccageaient leurs villages.
-
[29]
Sur cette œuvre française fondée par Mgr Lavigerie : Hervé Legrand et Giuseppe Maria Croce (dir.), L’Œuvre d’Orient. Solidarités anciennes et nouveaux défis, Paris, Cerf, 2010.
-
[30]
Cette organisation patriotique, fondée au début de l’année 1915 avec l’assentiment du cardinal archevêque de Paris, Léon-Adolphe Amette (1850-1920), a pour mission de lutter contre la propagande allemande parmi les chrétiens à l’étranger.
-
[31]
Jacques Rhétoré, Les Chrétiens aux bêtes, Souvenirs de la guerre sainte proclamée par les Turcs contre les Chrétiens en 1915 ; Hyacinthe Simon, Mardine. La ville héroïque. Autel et tombeau de l’Arménie (Asie Mineure) durant les massacres de 1915 ; Marie-Dominique Berré, Massacres de Mardin, ont été réunis par Jean-François Colosimo (présentation de), in Nous avons vu l’enfer. Trois Dominicains témoins directs du génocide des Arméniens, Paris, Éd. du Cerf, Paris, 2015.
-
[32]
Paru chez Bloud & Gay. Archives lazaristes, Dossier 137h, 101 p., et C 137g 2 I. b-3, 185 p. (texte polycopié).
-
[33]
« Une conférence sur les souffrances des Assyro-Chaldéens », L’Asie française, août-novembre 1919, Paris, pp. 238-242.
-
[34]
Op. cit. La version anglaise intitulée Shall this Nation Die? New York, Chaldean Rescue, 1921) est étoffée par deux contributions, dont celle du Père Gabriel Oussani, un chaldéen du séminaire catholique Saint-Joseph à Dunwoodie près de New York : An Historical Essay (daté du 1er octobre 1920). Il insiste dans son introduction sur les massacres de 1915 commis par les Turcs et les Kurdes, estimant que les Assyro-Chaldéens avaient souffert autant, sinon davantage, que les Arméniens.
-
[35]
Sur Joseph Naayem : Joseph Yacoub, « Joseph Naayem (1888-1964), témoin oculaire majeur du génocide assyro-chaldéen et arménien » introduction au livre de J. Naayem, Les Assyro-Chaldéens et les Arméniens massacrés par les Turcs, Paris, réédition Le Cercle d’écrits caucasiens, 2016, pp. 3-11.
-
[36]
Jean Gorek de Kerboran était un intellectuel engagé au service de sa communauté. Il a entretenu une large correspondance avec des dirigeants politiques et retracé l’histoire de son peuple dans des conférences données notamment à l’Institut catholique de Paris et dans des articles parus dans L’Asie française.
-
[37]
Shall this Nation Die?, op. cit., p. XI. Citations traduites de l’anglais par la rédaction.
-
[38]
Philips Price, « War and massacres in North-West Persia. 30 000 Kurds descend from the hills into the plain. The first story of the prolonged reign of terror at Urumiah », et Randall Cantuar, archevêque de Canterbury, « The distress among the Assyrian Christians », Manchester Guardian, 28 octobre 1915 ; ce dernier quotidien publie les 5 et 19 novembre 1915 deux lettres de Paul Shimmon, le représentant personnel du patriarche assyrien, Mar Benyamin Shimoun, sur le sort des Assyriens : « The massacres in Persia. Present position of the Christians » (n° du 5 novembre), et « The murder of a nation » (n° du 19 novembre). Le mensuel arménien Ararat, organe de l’Association des Arméniens de Londres, publie également un article du même Paul Shimmon en novembre 1915.
-
[39]
Rencontre synodale tenue tous les dix ans par l’Église anglicane qui réunit l’ensemble des évêques de la communion anglicane autour de l’archevêque de Canterbury. La première assemblée eut lieu en 1867.
-
[40]
www.anglicancommunion.org. Traduit de l’anglais par la rédaction.
-
[41]
J. Yacoub, Qui s’en souviendra ?..., op. cit., pp. 107-110.
-
[42]
Mgr Malké a été béatifié le samedi 29 août 2015 à Deir Charfé (Harissa) au Liban par le patriarche syriaque catholique Ignatius Youssef III, à la suite du décret du pape François du 8 août le reconnaissant officiellement comme martyr.
-
[43]
Claire Weibel Yacoub, op. cit., pp. 174-175.
-
[44]
André Mandelstam, op. cit. ; Basile Nikitine, « Une petite nation victime de la guerre : Les Chaldéens », Revue des sciences politiques, Paris, Félix Alcan, 1921, t. XLIV, pp. 602-625 ; Joseph-Thomas Delos, « Les Assyriens d’Irak et la Société des Nations », Revue générale de droit international public (ci-après : RGDIP), juillet-août 1934, Paris, Pedone, pp. 460-495 ; Louis Le Fur, « L’affaire de Mossoul », RGDIP, tiré à part, Paris, Pedone, 1927.
-
[45]
Les Carnets du cardinal Alfred Baudrillart (1er janvier 1919-31 décembre 1921), texte présenté, établi et annoté par Paul Christophe, Paris, Éditions du Cerf, 2000, pp. 175, 203, 206, 357, 365, 519-520, 533, 933.
-
[46]
« Les revendications des Assyro-Chaldéens », L’Asie française, février-juillet 1919, pp. 190-192 ; « Les revendications des Assyro-Chaldéens », id., mars 1920, pp. 92-93.
-
[47]
Joseph Yacoub, « La Question assyro-chaldéenne, les puissances européennes et la Société des Nations », Guerres mondiales et conflits contemporains, n° 151, juillet 1988, pp. 103-120 ; Claire Weibel Yacoub, Le Rêve brisé des Assyro-Chaldéens. L’introuvable autonomie, Paris, Éditions du Cerf, 2011, pp. 113-182.
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[48]
Ce général, né au Hakkari, décoré de la Croix de guerre (décret du 4 février 1921), est mort à Saint-Jory, près de Toulouse.
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[49]
Né au Hakkari et décédé au Liban.
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[50]
Née à Kotchanès, au Hakkari, Bet Mar Shimoun est décédée à Turlock en Californie. Sur Surma Khanum : Claire Weibel Yacoub, Surma l’Assyro-Chaldéenne (1883-1975). Dans la tourmente de Mésopotamie, Paris, L’Harmattan, 2007.
-
[51]
L’établissement des Assyriens. Une œuvre humanitaire et d’apaisement (The Settlement of the Assyrians. A work of Humanity and Appeasement), brochure bilingue (français et anglais, 49 p.), préparée par la section d’information, op. cit., p. 3.
-
[52]
Sur Benoît XV et l’Empire ottoman : Francis Latour, « Le Saint-Siège et l’Empire ottoman pendant la Première Guerre mondiale », Transversalités, n° 61, janvier-mars 1997, pp. 261-274 ; Yves Chiron, Benoît XV. Le pape de la paix, Paris, Perrin, 2014, pp. 176-182.
-
[53]
Annales de la Congrégation de la Mission, t. 84, 1919, pp. 509-514.
-
[54]
Fernando Filoni, L’Église dans la terre d’Abraham, Paris, Éditions du Cerf, 2009. Ce livre est la traduction de la première édition italienne parue en 2006. Ce livre a été, une fois mis à jour, réédité en italien sous le titre La Chiesa in Iraq. Storia, sviluppo e missione, dagli inizi ai nostri giorni, Rome, Libreria Editrice Vaticana, 2015.
-
[55]
Archivio Storico Italiano, 1918, vol. 608, Rub. 126, n° 82036.
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[56]
Par une lettre datée du 16 août 1918.
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[57]
Ce missionnaire était venu à Mossoul en 1884 enseigner au séminaire syro-chaldéen Saint-Jean. Supérieur de la mission dominicaine de 1908 à 1922, déporté à Mardin par les autorités ottomanes pendant toute la durée de la guerre, il y est témoin des massacres perpétrés dans cette ville.
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[58]
Archives secrètes du Vatican, Segreteria di Stato, Archivio Storico della Sezione per i rapporti con gli Stati, Stati Ecclesiastici, 1919, rubr.12 fascc. 1, lettre de Bagdad de Mar Emmanuel II Thomas au cardinal Gasparri, 17 février 1919, p. 114.
-
[59]
Ibid., lettre de de Mgr Thomas Bajari au pape Benoit XV, Constantinople, 9 juillet 1919, p. 131.
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[60]
Le Petit Parisien, 3 avril 1919.