Notes
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[1]
Selon certains observateurs, 90 % des négociations en vue d’un élargissement de l’Union européenne ont lieu entre les États membres existants de l’Union (A. Landau, « Negotiating the enlargement », Negotiating European Union, P. W. Meerts and F. Cede (eds), Basingstoke, 2004, p. 208).
-
[2]
Cet article est issu des recherches menées dans le cadre de ma thèse de doctorat à l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève. Ces recherches reposent sur une collection aussi exhaustive que possible des interventions publiques des chefs d’État ou de gouvernement français, allemand et britannique de 1997-2004, que j’ai ensuite mises en relation avec d’autres sources disponibles pour la période en question, notamment différents documents des institutions européennes, des rapports Eurobaromètre, et des articles de presse (K. Milzow, National Interests and European Integration : Discourse and Politics (1997-2004), Institut de hautes études internationales et du développement, 2007).
-
[3]
Ce point est peu contesté parmi les auteurs s’inspirant d’approches discursives, qui mettraient en avant que le discours politique est intéressant en tant que tel et que son rapport à ce que pense l’orateur n’est pas central à leur analyse (O. Waever, « Discursive approaches », European Integration Theory, A. Wiener and T. Diez (eds), Oxford, 2004, p. 199 ; H. Sjursen, « Why expand ? The question of legitimacy and justification in the EU’s enlargement policy », Journal of Common Market Studies, vol. 40 (3), p. 496 ; F. Schimmelfennig, « The community trap : Liberal norms, rhetorical action and the eastern enlargement of the European Union », The Politics of European Union Enlargement, Theoretical approaches, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), London, 2005, p. 157).
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[4]
Selon Alain Guggenbühl, le Conseil européen fonctionne comme lien entre la gouvernance européenne et l’opinion publique (A. Guggenbühl, « Cookbook of the presidency of the European Union », Negotiating European Union, P. Meerts and F. Cede (eds), op. cit., p. 174. Cette visibilité particulière du Conseil européen justifie également l’accent sur le niveau des chefs d’État ou de gouvernement.
-
[5]
La conceptualisation précise de l’impact de ces normes et valeurs et de leur relation à l’identité européenne varie selon les auteurs. Cf., par exemple, U. Sedelmeier, « Eastern enlargement : Risk, rationality and role-compliance », The Politics of European Union Enlargement, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), op. cit., p. 123 ; U. Sedelmeier, Constructing the Path to Eastern Enlargement, The Uneven Policy Impact of EU Identity, Manchester, 2005, p. 55, 76 ; K. Fierke, A. Wiener, « Constructing institutional interests : EU and NATO enlargement », EUI Working Papers, RSC, No 1999/14, Florence, 1999 ; F. Schimmelfennig, « The community trap », op. cit., p. 142-143.
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[6]
Par exemple, M. Zaborowski, Germany, Poland and Europe, Conflict, Co-operation and Europeanisation, Manchester, 2004, p. 143.
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[7]
Chancelier allemand jusqu’en octobre 1998.
-
[8]
H. Kohl, Düsseldorf – Amerikanische Handelskammer in Deutschland, 25 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 36, 12 mai 1997 ; H. Kohl, Bonn – Empfang anlälich des 65. Geburtstages des Präsidenten des Deutschen Industrie- und Handelstages Hans Peter Stihl, 22 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 36, 12 mai 1997 ; cf. également K. Kinkel, Bucarest – Rumänisches Parlament, 30 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 37, 14 mai 1997.
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[9]
J. Chirac, L. Jospin, Amsterdam – Conférence de presse conjointe, 18 juin 1997, site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse.
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[10]
H. Kohl, Luxembourg – Edmond Israel Stiftung, 17 septembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 79, 7 octobre 1997 ; H. Kohl, Bundestag, 12 novembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 91, 17 novembre 1997.
-
[11]
K. Kinkel, Lübeck – Kaufmannschaft zu Lübeck, 4 septembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 71, 10 septembre 1997 ; K. Kinkel, Bundestag, 11 décembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 100, 15 décembre 1997.
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[12]
L’élargissement devait être un sujet majeur à l’ordre du jour étant donné que le Conseil européen avait indiqué dès 1995 que le processus d’élargissement pouvait débuter six mois après la conclusion de la conférence intergouvernementale débutant en 1996 (Conseil européen, Conclusions du Conseil européen de Madrid, 16 décembre 1995, Bulletin of the European Union, 12-1995, I . 25).
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[13]
M. Zaborowski, Germany, Poland and Europe, op. cit., p. 111, 140, 144.
-
[14]
J. Chirac, L. Jospin, J.-M. Aznar, Salamanque – Conférence de presse conjointe, 2 décembre 1997, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse.
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[15]
J. Chirac, Vienne – Chambre économique fédérale d’Autriche, 12 février 1998, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations.
-
[16]
J. Chirac, BBC1 – Entretien avec « Breakfast with Frost », 14 juin 1998, Site web de l’Élysée, Interventions, Interviews, articles de presse et interventions télévisées.
-
[17]
Parmi les acteurs favorables à l’élargissement, ils citent en particulier les fonctionnaires de la Direction générale I de la Commission européenne responsable pour les relations externes de l’Union, ainsi que certains États membres, notamment l’Allemagne (U. Sedelmeier, Constructing the Path to Eastern Enlargement, op. cit., p. 60 ; F. Schimmelfennig, « The community trap », op. cit., p. 142, 157).
-
[18]
G. Schröder, Bundestag – Regierungserklärung, 10 novembre 1998, Bulletin der Bundesregierung, no 74, 11 novembre 1998 ; G. Schröder, Bundestag – Avant le Conseil européen de Vienne, 10 décembre 1998 ; G. Schröder, La Haye – Stiftung zum Erhalt von Nieuwspoort, 19 janvier 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 4, 25 janvier 1999.
-
[19]
G. Schröder, Bundestag – Regierungserklärung, 10 novembre 1998 ; op. cit., G. Schröder, Bundestag – Avant le Conseil européen de Vienne, 10 décembre 1998, op. cit.
-
[20]
Cité dans « Deutschland pocht auf gerechteren EU-Beitrag. Signal zum Beginn der Präsidentschaft. Schröder, Schäuble, Stoiber und Herzog fordern niedrigere Nettozahlungen », Süddeutsche Zeitung, 4 janvier 1999.
-
[21]
« Der Mann der Milliarden », Der Spiegel, 1/1999, 4 janvier 1999.
-
[22]
Notamment par Wolfgang Schäuble, le chef de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et par Edmund Stoiber, qui deviendra le candidat chrétien-démocrate à la Chancellerie lors des élections de 2002 (« Deutschland pocht auf gerechteren EU-Beitrag », op. cit.). Il mérite d’être relevé que cela indique que le nouveau Chancelier poursuivit là une ligne engagée par le gouvernement de Kohl dès 1997, et que son ton n’exprime donc pas une transition fondamentale de la politique allemande suivant le changement de gouvernement.
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[23]
Cf., par exemple, M. Stürmer, « Kann die deutsche Auenpolitik leisten, was ihr 1999 aufgegeben ist ? », Welt am Sonntag, 3 janvier 1999 ; C. Rath, « Herz in der Brieftasche », Taz, Die Tageszeitung, 3 janvier 1999 ; ou J. Docquiert, « Financement de l’Union : l’Europe hésite entre rigueur et réformes », Les Échos, 8 janvier 1999.
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[24]
G. Schröder, La Haye – Stiftung zum Erhalt von Nieuwspoort, 19 janvier 1999, op. cit.
-
[25]
Ainsi qu’à Malte.
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[26]
Conseil européen, conclusions du Conseil européen d’Helsinki, 10-11 décembre 1999, Bulletin of the European Union, 12-1999, I . 3 . 5.
-
[27]
P. Ludlow, The Making of the New Europe, Brussels, 2003, p. 33.
-
[28]
Cf. J. Chirac, Cologne – Conférence de presse, 20 juin 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse ; J. Chirac, Élysée – Conférence des Ambassadeurs, 26 août 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse ; J. Fischer, Strasbourg – Parlement européen, 21 juillet 1999, Bulletin der Bundesregierung, Nr. 45, 22 juillet 1999 ; M. J. Baun, A Wider Europe, The Process and Politics of European Union Enlargement, Oxford, 2000, p. XVII, 120-131 ; P. Ludlow, The Making of the New Europe, op. cit., p. 29-30 ; L. Skålnes, « Geopolitics and the eastern enlargement of the European Union », The Politics of European Union Enlargement, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), op. cit., p. 214.
-
[29]
G. Schröder, Hannover – Messe, 18 avril 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 21, 27 avril 1999.
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[30]
J. Chirac, Cologne – Conférence de presse, 20 juin 1999, op. cit.
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[31]
G. Schröder, Bundestag, 20 avril 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 17, 20 avril 1999 ; G. Schröder, Tag der Deutschen Einheit 1999. Festakt in Wiesbaden, 3 octobre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 62, 6 octobre 1999 ; G. Schröder, Bundestag, 3 décembre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 85, 8 décembre 1999.
-
[32]
G. Schröder, Genshagen – Colloque franco-allemand, 25 septembre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 66, 13 octobre 1999 ; G. Schröder, Baden-Baden – Mitgliederversammlung des Verbandes der Chemischen Industrie, 8 octobre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 74, 2 novembre 1999.
-
[33]
J. Chirac, Élysée – Conférence des Ambassadeurs, 26 août 1999, op. cit.
-
[34]
Par exemple, J. Chirac, Strasbourg, 14 décembre 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations ; J. Chirac, Paris – Allocution lors de la présentation des vœux du corps diplomatique, 4 janvier 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990 ; ou J. Chirac, Versailles, 14 juin 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
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[35]
J. Chirac, Strasbourg, 14 décembre 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations.
-
[36]
Cf., par exemple, J. Chirac, Élysée – Dîner offert en l’honneur du président de la République de Pologne et de Mme Aleksander Kwasniewski, 15 mai 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
-
[37]
« Frieden, Freiheit, Stabilität und Wohlstand » (G. Schröder, Bundestag, 3 décembre 1999, op. cit.).
-
[38]
« Ausgeprägtes Interesse » et un « wirklich ureigenes Interesse » ; « es ist nicht nur das allgemeine politische Interesse am gemeinsamen Haus Europa (...) sondern es besteht vor allen Dingen ein eminentes wirtschaftliches Interesse an der Entwicklung der Märkte » ; « endlich einmal unter dem Aspekt des wirtschaftlichen Interesses diskutiert werden » ; « ein ökonomisches nationales Interesse an einer zügigen Ost-Erweiterung » (G. Schröder, Berlin – Absatzkonferenz Neue Länder, 4 septembre 2000, Bulletin der Bundesregierung, no 53-3, 4 septembre 2000).
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[39]
« Im nationalen Interesse Deutschlands » ; « aus wohlverstandenem Eigeninteresse » (G. Schröder, Bundestag, 28 novembre 2000, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden).
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[40]
G. Schröder, Technische Universität Cottbus, 7 juillet 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
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[41]
La libre circulation des travailleurs fut la préoccupation principale des États membres existants de l’Union. Les pays candidats quant à eux demandèrent des périodes transitoires notamment par rapport à la législation environnementale ou à la vente de terrain à des nationaux d’autres États membres.
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[42]
G. Schröder, Regierungserklärung zu den Ergebnissen des Europäischen Rates in Nizza vor dem Deutschen Bundestag, 19 janvier 2001, Bulletin der Bundesregierung, no 6-2, 19 janvier 2000 ; G. Schröder, Internationales Bertelsmann Forum, 19 janvier 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Ver. di (Vereinte Dienstleistungsgewerkschaft), 21 mars 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Meisterfeier der Handwerkskammer, 25 mars 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, SPd Bundestagsfraction, 3 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
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[43]
G. Schröder, Oberpfalz – Regionalkonferenz, 18 décembre 2000, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
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[44]
P. Ludlow, The Making of the New Europe, op. cit., p. 57-58.
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[45]
G. Schröder, Technische Universität Cottbus, 7 juillet 2001, op. cit.
-
[46]
J. Chirac, Riga – Discours lors du dîner offert par le Premier ministre letton, M. Andris Berzins et de la rencontre avec les communautés d’affaires française et lettone, 27 juillet 2001, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
-
[47]
G. Schröder, Bundestag, 21 juin 2001, Bulletin der Bundesregierung, no 42-3, 22 juin 2001.
-
[48]
G. Schröder, Hannover-Messe, 22 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Freie Presse Chemnitz – Interview, 2 mai 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Interviews.
-
[49]
G. Schröder, SPd Bundestagsfraction, 3 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
-
[50]
« Der Erweiterungsprozess kann insgesamt nur gelingen wenn er auch künftig die Unterstützung der Menschen in unserem Land findet » et que « eine für beide Seiten auskömmliche Lösung der Arbeitnehmerfreizügigkeit spielt hierbei eine Schlüsselrolle » (G. Schröder, Bundestag, 21 juin 2001, op. cit.).
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[51]
Voir l’annexe, p. 90.
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[52]
Commission européenne, Rapport Eurobaromètre Standard 54, automne 2000, avril 2001 ; Commission européenne, Rapport Eurobaromètre Standard 61, printemps 2004, juillet 2004, p. 39, 42, 43.
1Une partie importante des négociations visant à élargir l’Union européenne se déroule entre, et au sein, des États membres existants de l’Union, qui doivent approuver l’ouverture des négociations d’adhésion et en déterminer les délais, mais également adopter des positions communes quant aux conditions matérielles de l’adhésion de nouveaux membres [1]. Par l’analyse des interventions publiques des chefs d’État ou de gouvernement allemands et français, Helmut Kohl, Gerhard Schröder et Jacques Chirac, et de leurs déclarations sur les plus récents élargissements vers l’est de l’Union européenne, cet article tente d’éclairer davantage cette dimension interne des négociations d’élargissement. Mettant l’évolution des interventions en rapport avec l’évolution des événements liés à l’élargissement, la contribution s’interroge sur le rôle du discours officiel et explore dans quelle mesure son étude peut contribuer à l’analyse de l’avancement des négociations et des dynamiques du processus d’élargissement [2].
2Il est certes vrai que le discours politique officiel ne reflète pas directement, en toute probabilité, les pensées des hommes politiques [3]. Toutefois il exprime ce que veut faire entendre un gouvernement ou une personnalité politique à un moment donné. Ainsi, il peut refléter l’évolution des enjeux et des priorités politiques et être indicatif du cours des événements. Une certaine régularité dans l’évolution des interventions de Kohl, Schröder et Chirac étudiées ici indique que leurs discours s’inscrivent dans leurs stratégies de négociation et de légitimation concernant l’élargissement. Cela suggère que le discours politique constitue une partie intégrante de leur politique d’élargissement et qu’il peut donc ajouter une dimension supplémentaire à l’histoire du processus d’élargissement.
3Une approche discursive permet notamment d’intégrer l’opinion publique dans l’analyse de négociations menées à huis clos. Les interventions publiques des chefs d’État ou de gouvernement, avant tout leurs conférences de presse suivant les Conseils européens, figurent en effet au centre de l’attention médiatique et créent ainsi un lien entre des négociations secrètes et le public [4], au sein des quinze États membres de l’Union, mais aussi dans les pays candidats. Cela réintroduit également les attentes des pays candidats dans l’analyse de négociations conduites parmi les Quinze. D’ailleurs, les interventions publiques étudiées formulent fréquemment des sentiments d’identification avec et de responsabilité envers les pays d’Europe centrale et orientale. Ainsi, elles offrent un point de départ pour explorer le rôle de normes et de valeurs européennes, souvent cités comme éléments clés favorisant l’élargissement [5]. La contribution tente de montrer qu’en tant qu’intermédiaire entre les négociateurs, différents groupes d’intérêt, l’opinion publique et les pays candidats, et en présence d’une interaction complexe entre questions de principe, de délais et de modalités matérielles, le rôle du discours politique n’est pas neutre. Il peut faciliter la défense de priorités nationales ou la conciliation d’intérêts différents, mais également limiter les options politiques viables.
4De l’ouverture des négociations d’adhésion à leur conclusion, l’article suit les discours officiels allemands et français afin d’illustrer leur rôle d’interface entre différentes audiences et différents enjeux politiques et de montrer qu’ils peuvent jeter un éclairage nouveau sur l’avancement du processus d’élargissement. Pour illustrer les stratégies discursives à l’œuvre, l’accent est placé en particulier sur trois moments clés du processus d’élargissement. D’abord la période s’étendant de l’ouverture des négociations d’adhésion avec les premiers pays candidats suivant le Conseil européen de Luxembourg de décembre 1997 jusqu’au Conseil européen de Berlin de mars 1999. Ce dernier émit une série de questions budgétaires liées à l’élargissement. Ensuite, l’intervalle entre le Sommet de Berlin et le Conseil européen d’Helsinki en décembre 1999, moment clé du processus d’élargissement puisque c’est à ce moment que les négociations furent étendues de six à douze pays candidats. Enfin, la négociation de mesures transitoires à l’application de l’acquis communautaire en 2000 et 2001, avec en particulier le Conseil européen de Göteborg de juin 2001 lors duquel les Quinze adoptèrent une position commune quant aux mesures transitoires à la libre circulation des travailleurs.
L’OUVERTURE DES NEGOCIATIONS D’ADHESION
5La question d’un éventuel élargissement vers l’est de l’Union européenne surgit au début des années 1990, après la chute des régimes communistes des pays d’Europe centrale et orientale. Lors d’un Sommet tenu à Copenhague en 1993, le Conseil européen s’exprima pour la première fois favorablement à un élargissement vers l’est, tout en définissant des conditions précises pour l’adhésion de nouveaux États membres. Quatre ans plus tard, lors du Conseil européen de Luxembourg de décembre 1997, souvent considéré comme un tournant du processus d’élargissement [6], les chefs d’État et de gouvernement décidèrent d’ouvrir les négociations d’adhésion avec une première série de six pays candidats : l’Estonie, la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovénie, ainsi que Chypre. L’analyse des interventions publiques de Chirac et de Kohl [7] confirme le rôle clé du Sommet de Luxembourg et peut contribuer à la compréhension de la transition qu’il engendra.
6Avant Luxembourg, jusqu’au milieu de l’année 1997, les références à l’élargissement dans les interventions de Kohl et de Chirac restaient vagues, idéalistes et souvent déconnectées de la réalité politique. Le chancelier allemand et le président français affirmaient leur soutien à un élargissement qui allait « réunir l’Europe », sans toutefois insister beaucoup sur les détails pratiques de l’adhésion de nouveaux États membres. Quand ils se référaient aux préparatifs concrets pour l’élargissement, leur discours était souvent peu réaliste. Dès avril 1997, Kohl présentait l’élargissement comme une conséquence automatique du Conseil européen d’Amsterdam prévu pour juin 1997, alors qu’il n’était pas du tout certain que les chefs d’États parviennent à réaliser les réformes institutionnelles de l’agenda, que de nombreux États membres considéraient comme condition essentielle à l’ouverture des négociations d’adhésion [8]. Alors que le traité d’Amsterdam ne résolvait effectivement pas entièrement les questions institutionnelles, Chirac déclara que le traité permettrait de recevoir déjà deux, trois, quatre pays supplémentaires dès 2000, 2001 ou 2002, en précisant toutefois que rien ne pressait. Dans la même intervention, il poursuivait en effet que « ce sont des choses qu’il faut faire d’ailleurs par étapes » et qu’il ne fallait pas « confondre hâte et précipitation » [9].
7Cet idéalisme distant disparut dès l’automne 1997, quand les discours officiels allemands et français devinrent plus sobres, avec un accent accru sur les coûts financiers et institutionnels de l’élargissement. La transition vers les réalités et les difficultés matérielles de l’élargissement apparut en premier dans le discours allemand. Dès septembre 1997, Kohl lia l’élargissement à la problématique de l’Agenda 2000, un document publié par la Commission en juillet 1997 contenant des propositions pour la perspective financière de 2000-2006 et des propositions de réformes des deux politiques les plus coûteuses, la politique agricole commune et les fonds structurels [10]. Dans ce contexte, Helmut Kohl et son ministre des Affaires étrangères Klaus Kinkel soulignèrent que l’élargissement demanderait beaucoup d’efforts à l’Union européenne et qu’il faudrait que les arrangements budgétaires deviennent plus équitables [11]. Dans un État membre généralement favorable à l’élargissement, cette transition vers les aspects matériels et les coûts de l’élargissement ne signifie pas un retournement de la ligne politique favorable à l’élargissement, mais suggère au contraire qu’à l’approche du Sommet de Luxembourg qui devait décider de l’ouverture des négociations d’adhésion [12], l’élargissement était perçu de plus en plus comme une réalité politique imminente. Cette hypothèse est confirmée par des changements institutionnels, notamment une réorganisation des responsabilités pour l’élargissement de la Politische Abteilung du ministère des Affaires étrangères allemand vers le Département des Affaires européennes et une technocratisation au niveau du personnel [13], qui renforcèrent la réorientation des aspects idéels de l’élargissement vers ses modalités matérielles.
8Peu après, une transition similaire apparut dans les interventions de Jacques Chirac. Quelques jours avant le Conseil de Luxembourg, lors d’une conférence de presse à Salamanque, le président français expliqua qu’il comprenait les craintes de l’Espagne quant à sa position dans l’Union après l’élargissement et précisa qu’il ne saurait lui-même accepter une Europe qui remettrait en cause les intérêts de la France [14]. Si Chirac continua à exposer les bénéfices idéels de l’élargissement, il resta presque entièrement silencieux sur de potentiels avantages matériels. Une exception, un discours à la Chambre économique fédérale d’Autriche lors duquel il demanda aux entrepreneurs présents de saisir les opportunités créées par l’élargissement [15], confirme la règle. En effet, l’exemple incite à se demander pourquoi Chirac ne transmit pas ce même message aux entreprises françaises. Lors d’un entretien accordé au programme Breakfast with Frost de la BBC, lorsqu’on lui demanda s’il trouvait l’élargissement motivant ou s’il le voyait comme un problème, il répondit « les deux », mais cita des facteurs motivants exclusivement politiques. L’élargissement était pour lui « motivant parce que les pays candidats sont depuis si longtemps désireux d’être complètement européens ; ils connaissent une situation si mauvaise depuis tant d’années. Ils sont des frères pour les Quinze et nous leur ouvrons les bras. C’est une famille qui se retrouve. C’est donc très motivant ». Quant aux problèmes cités, ils étaient exclusivement matériels : l’élargissement « est aussi un problème bien sûr parce que leurs économies ne sont pas au même niveau que la plupart des autres et il nous faut les aider. Nous devons faire des réformes » [16].
9L’accent soudain placé sur les coûts de l’élargissement par Kohl et Chirac au moment du Conseil européen de Luxembourg et à l’approche des négociations sur l’Agenda 2000, lorsque s’ajouta à la question du principe d’un élargissement vers l’est le problème des modalités matérielles de l’adhésion de nouveaux États membres, suggère que le discours officiel ne fut pas sans lien avec l’évolution des événements et des enjeux politiques. Au contraire, les chefs d’État et de gouvernement alternèrent entre accents idéels et matérialistes pour améliorer leur position de négociation. Cela indique que Kohl et Chirac n’hésitèrent pas à s’opposer à ce que Franz Schimmelfennig ou Ulrich Sedelmeier appellent « action rhétorique » : l’appel à des normes européennes impliquant une responsabilité envers les pays d’Europe centrale et orientale afin de promouvoir l’élargissement en réduisant au silence les opposants. Selon Schimmelfennig et Sedelmeier, cette « action rhétorique » aurait facilité la décision d’aller de l’avant avec l’élargissement malgré son coût et les difficultés politiques qu’il allait inévitablement engendrer [17]. L’accent sur les aspects matériels de l’élargissement apparent dans les interventions de Kohl et de Chirac révèle que l’action rhétorique par rapport à l’élargissement fut plus diverse que ne le suggèrent Schimmelfennig ou Sedelmeier.
10La multiplicité des enjeux et des discours transparaît également dans les interventions de Gerhard Schröder qui arriva à la chancellerie en octobre 1998. Dans un premier temps, Schröder sembla suivre Chirac et Kohl dans leur double accent sur les bénéfices idéels et les coûts matériels de l’élargissement. Il décrivit l’importance historique de l’unification européenne [18] et la responsabilité particulière de l’Allemagne envers les pays d’Europe centrale et orientale [19], mais insista également sur le fait que les coûts de l’élargissement devaient être partagés de façon équitable. En janvier 1999, Schröder alla même jusqu’à menacer que s’il s’avérait impossible de résoudre les questions financières, l’élargissement devrait être repoussé [20]. Cette position très ferme répondit à des demandes articulées dans les médias [21] et par l’opposition [22]. En Allemagne comme à l’étranger, l’intransigeance de Schröder rencontra toutefois aussi rapidement des critiques. Surtout dans le contexte de la présidence allemande du Conseil de l’Union européenne du premier semestre de 1999, le chancelier se vit reprocher son ton agressif et son accent sur les intérêts allemands qui, selon les critiques, ne représentaient pas la position allemande de façon constructive et ne correspondaient pas aux demandes particulières de la présidence de l’Union [23].
11À la fin de janvier 1999, Schröder réagit à ces critiques en mettant en avant les avantages économiques et stratégiques d’un élargissement vers l’est et en soulignant également l’intérêt que l’Allemagne pourrait tirer d’un tel élargissement [24]. Accentuer les avantages que l’Allemagne pouvait espérer de l’élargissement n’était toutefois pas moins délicat pour Schröder qu’insister sur les demandes financières allemandes. Et non seulement parce que cela rendait le chancelier vulnérable aux critiques d’une opposition demandant plus de fermeté, mais également parce que cela pouvait affaiblir sa position de négociation au niveau européen, surtout envers Chirac, qui continuait à mettre en avant les difficultés de l’élargissement et les craintes françaises à ce sujet. Pour réconcilier les différentes demandes publiques et l’optimisation de ses objectifs dans les négociations de l’Agenda 2000, Schröder semble avoir opté pour le silence. En effet, il ne mentionna quasiment plus l’élargissement de la fin de janvier 1999 jusqu’au Conseil européen de Berlin des 24 et 25 mars qui devait conclure les négociations sur l’Agenda 2000.
12Par la suite, les enjeux et les discours liés à l’élargissement furent compliqués encore davantage par la réapparition de questions concernant le principe de l’élargissement vers l’est, qui ne disparurent pas entièrement avec l’ouverture des négociations d’adhésion. La partie suivante tente de montrer que l’interaction entre questions de principe et les modalités pratiques de l’élargissement, elle aussi reflétée dans le discours politique, peut apporter des renseignements supplémentaires sur l’évolution du processus d’élargissement et contribuer à la compréhension de son avancement.
DE BERLIN A HELSINKI : L’ELARGISSEMENT PREND FORME
13Dans les mois suivant le Conseil européen de Berlin, le processus d’élargissement connut un progrès particulièrement spectaculaire. Dès décembre 1999, lors du Conseil européen d’Helsinki, les chefs d’État et de gouvernement décidèrent d’ouvrir les négociations d’adhésion avec tous les pays candidats d’Europe centrale et orientale, étendant ainsi le processus à la Bulgarie, la Lettonie, la Lituanie, la Roumanie et la Slovaquie [25]. Le Conseil européen convint également que l’Union elle-même ferait en sorte d’être prête pour l’adhésion de nouveaux États membres dès fin 2002 [26].
14Les résultats du Conseil européen d’Helsinki sont d’autant plus surprenants que l’accord de Berlin sur l’Agenda 2000, jugé dans tous les cas insuffisant par de nombreux observateurs, ne prévoyait en fait un élargissement qu’à six nouveaux États membres [27]. Pourtant, l’accord d’Helsinki ne semble pas avoir été trop difficile à atteindre. Non seulement le ton des discours officiels sur l’élargissement à l’approche du Sommet manifesta peu d’inquiétudes et fut relativement enthousiaste, mais les chefs d’État et de gouvernement parvinrent même à convenir de l’essentiel des questions à l’agenda dès octobre, lors du Sommet de Tampere. Se pose alors la question de savoir comment des décisions aussi fondamentales quant au développement du processus d’élargissement purent être prises si rapidement et, du moins en apparence, sans trop de difficultés.
15De nombreux auteurs, ainsi que les chefs d’État et de gouvernement eux-mêmes, mettent en avant l’expérience des tensions et de la guerre au Kosovo [28]. Pourtant la séquence temporelle de ces arguments, et leur interaction avec l’évolution des événements, nuancent cette interprétation. En effet, les tensions du Kosovo montaient depuis 1998 et atteignirent leur sommet au Conseil européen de Berlin de mars 1999, qui coïncida avec le début de l’opération militaire de l’OTAN en ex-Yougoslavie. À ce moment, cependant, ni Schröder ni Kohl ne mentionnèrent les événements au Kosovo dans le contexte de leurs références à l’élargissement, alors même qu’avec l’Agenda 2000, des décisions cruciales concernant l’élargissement étaient à l’ordre du jour du Sommet de Berlin. La question du Kosovo n’apparut dans les interventions sur l’élargissement que plus tard, à la mi-avril 1999 pour Schröder [29] et seulement fin juin pour Chirac [30].
16Il ne s’agit pas ici de contester entièrement l’impact que la guerre au Kosovo a pu jouer, mais de nuancer son rôle en tentant de comprendre comment le Kosovo devint un enjeu des discours sur l’élargissement au cours de l’été 1999 mais pas auparavant. Dans ce contexte, l’analyse des interventions de Schröder et de Chirac peut apporter quelques éclaircissements. En effet, elle révèle un climat discursif particulier, peu préoccupé et relativement idéaliste, spécifique à l’intervalle entre les Sommets de Berlin et d’Helsinki.
17Précisément au moment du Conseil de Berlin, Chirac et Schröder renoncèrent à mettre en avant les aspects matériels de l’élargissement pour se concentrer sur sa dimension idéelle. Cette transition fut particulièrement apparente dans les interventions de Schröder. Alors que le chancelier se référa régulièrement aux avantages économiques de l’élargissement et aux intérêts allemands dans l’élargissement avant Berlin et de nouveau après Helsinki, durant la période intermédiaire, les intérêts allemands dans l’élargissement n’apparurent que dans trois de ses 24 interventions au sujet de l’élargissement, et il n’y a qu’une seule référence aux bénéfices économiques [31]. Comme Schröder ne mentionna pas non plus les coûts matériels de l’élargissement, son discours fut, entre Berlin et Helsinki, entièrement centré sur la dimension idéelle. Immédiatement après le Sommet d’Helsinki, les discours officiels de Schröder, mais également de Chirac, sont marqués par un autre tournant, avec un retour distinct aux considérations matérielles et à un enthousiasme plus prudent.
18Les interventions de Chirac et Schröder semblent marquées par l’évolution, au fil du temps, des enjeux soulevés par le processus d’élargissement. À la suite du Conseil européen de Berlin, les deux hommes insistèrent sur le fait que l’accord sur l’Agenda 2000 avait résolu les aspects budgétaires de l’élargissement et argumentèrent qu’il s’agissait dès lors de passer à l’agenda institutionnel, notamment à la Conférence intergouvernementale (CIG) prévue pour répondre aux questions laissées ouvertes par le traité d’Amsterdam [32]. Cette argumentation peut s’expliquer par les priorités politiques du moment. Ainsi Schröder avait intérêt à mettre en valeur l’accord de Berlin conclu sous la présidence allemande de l’Union européenne. Quant a Chirac, il avait réussi à préserver l’essentiel de la politique agricole commune malgré la perspective de l’élargissement, et n’avait donc pas intérêt à rouvrir le débat budgétaire. D’autre part, l’accent sur la transition vers l’agenda institutionnel a pu être renforcé par le Conseil européen de Cologne de juin 1999, qui fixa les délais pour la CIG de 2000 : un autre succès pour la présidence allemande, et un privilège pour la France, étant donné que c’est sous sa Présidence au deuxième semestre de l’année 2000 qu’était prévue la conclusion de la CIG.
19Cette apparente solution des questions budgétaires et la transition aux questions institutionnelles semblent, au cours de l’été 1999, avoir créé un climat propice au progrès du processus d’élargissement. Même Chirac devint plus positif envers l’élargissement quand l’agenda institutionnel de la CIG apparut à l’ordre du jour. Au lieu d’insister sur le fait que l’élargissement était conditionné par une réforme institutionnelle, comme il l’avait fait jusque-là, il demanda comment « conjuguer élargissement et approfondissement ». Ajoutant que « il reviendra à la présidence française de l’Union de tout faire pour conclure la réforme des institutions » [33], Chirac confirma que la présidence française et son potentiel de prestige et de leadership ne furent pas sans impact sur le changement du ton de son discours sur l’élargissement.
20On peut remarquer qu’il s’agit là d’un mécanisme essentiellement discursif, puisque les questions institutionnelles divisaient déjà fortement les opinions à l’été 1999. Au niveau budgétaire aussi, l’accord de Berlin ne constituait pas une solution à long terme. Immédiatement après le Conseil européen d’Helsinki, le retour à un ton plus sobre indique que les craintes par rapport aux implications matérielles de l’élargissement reprirent le dessus. Entre Berlin et Helsinki, les questions de principe liées à l’envergure et aux délais de l’élargissement semblent cependant avoir créé une période transitoire, propice à un discours idéaliste qui engageait peu, mais également peu critique avant que les problèmes institutionnels n’arrivent véritablement sur le devant de la scène. Ce climat fut favorable à une extension et à une accélération du processus d’élargissement.
21Il est intéressant de noter que ce discours idéaliste et souvent un peu vague reproduisait les discours de la période précédant le Sommet de Luxembourg de 1997 et suggère donc un certain parallèle entre Luxembourg et le Conseil européen d’Helsinki. Cette similitude est confirmée par l’évolution des interventions suivant les deux Sommets, marquée dans les deux cas par un retour aux considérations matérielles et à un enthousiasme plus prudent. Mettant en valeur les parallèles entre Luxembourg et Helsinki, l’analyse des discours officiels allemands et français fait apparaître que la reconnaissance du principe d’un élargissement vers l’est gagne à être analysée comme un processus qui s’étend au-delà de l’ouverture des négociations avec les premiers pays candidats. À la suite de l’ouverture des négociations d’adhésion, cela débouche sur une alternance entre questions de principe, de délai et d’envergure d’une part, et de questions de modalités budgétaires et institutionnelles d’autre part. Reflété par des transitions très distinctes dans l’évolution des interventions de Berlin à Helsinki, ce jeu entre principe et modalités matérielles peut contribuer à éclairer la dynamique exceptionnelle du processus d’élargissement au cours de l’année 1999.
VERS LA LEGITIMATION DE L’ELARGISSEMENT
22Traçant l’évolution des interventions de Schröder et de Chirac au.delà d’Helsinki, l’analyse confirme que le Sommet marqua, comme Luxembourg, un tournant important dans le processus d’élargissement. D’une part, les conclusions du Conseil européen d’Helsinki furent citées jusqu’à la fin des négociations d’adhésion avec les dix premiers pays candidats en 2002 pour appuyer une conclusion rapide du processus d’élargissement. De façon plus subtile et plus fondamentale, l’évolution des interventions de Chirac et de Schröder indique que le Conseil d’Helsinki marqua une transition dans l’évolution de leurs perceptions de l’avancement du processus élargissement. Depuis le début de l’année 2000, l’alternance entre discours idéels et discours matérialistes qui accompagnaient le marchandage au niveau européen fut en effet remplacée par une évolution plus permanente des discours qui semble s’inscrire dans des efforts de légitimation nationale. Cette orientation vers les opinions politiques domestiques suggère qu’avec l’accord d’Helsinki, Chirac et Schröder réévaluèrent l’état du processus d’élargissement et lui attribuèrent dès lors une réalité plus imminente.
23Dans ce contexte, les discours de Chirac et de Schröder se développèrent toutefois dans des directions diamétralement opposées. Chirac, qui avait adopté un discours plus positif et plus concret entre Berlin et Helsinki, retourna dès le lendemain du Conseil d’Helsinki vers un discours plus abstrait et distant. S’il reprit à cette période une formule de Bronislaw Geremek, selon laquelle « les Européens doivent désormais apprendre à réconcilier leur histoire et leur géographie » [34], il garda néanmoins une distance prudente par rapport à l’élargissement en l’assimilant à un rêve presque impossible. Évitant de mentionner les avantages matériels potentiels, il préféra présenter l’élargissement comme un devoir et un défi. Devant le Parlement européen par exemple, il dit que « le chantier que nous avons engagé à Helsinki est nécessaire », mais parle aussi d’un « défi (...) considérable » [35]. Dans ce contexte, l’élargissement apparaît comme un fardeau plus qu’une opportunité. Même l’approche de la CIG et de la présidence française ne raviva son discours sur l’élargissement que de façon intermittente, durant quelques mois entre février et août 2000 [36]. Depuis août 2000, au cours même de la présidence française, il mentionna de moins en moins fréquemment l’élargissement et ne sembla pas disposé à l’évoquer afin de souligner l’urgence d’un accord institutionnel à Nice. Cette perte progressive d’enthousiasme pour l’élargissement se poursuivit après la présidence française. Les interventions contenant des références à l’élargissement diminuèrent régulièrement, jusqu’à atteindre leur plus bas niveau au moment de l’adhésion des premiers pays d’Europe centrale et orientale. De mai à juin 2004, c’est-à-dire au cours des deux mois avant et après l’élargissement, Chirac ne se référa à l’élargissement que trois fois, en comparaison avec dix-sept références pour Schröder, alors même que le nombre total d’interventions faites par Chirac était plus élevé.
24Suivant le Conseil d’Helsinki, le discours officiel de Schröder s’était en effet développé en une campagne d’envergure pour la légitimation de l’élargissement. Tout en maintenant son accent sur la dimension idéelle, il recommença à souligner fortement les avantages matériels de l’élargissement. Les premiers signes de cette évolution apparurent juste avant le Conseil d’Helsinki, dans un discours prononcé devant le Bundestag, quand Schröder expliqua que l’élargissement assurerait « la paix, la liberté, la stabilité et la prospérité » [37]. Alors que Schröder avait déjà souvent utilisé l’argument selon lequel l’élargissement apporterait la paix, la liberté et la stabilité, la notion de prospérité était nouvelle. C’est à partir d’Helsinki que le chancelier l’intégra régulièrement dans son discours. La campagne de Schröder pour la promotion de l’élargissement prit toute son envergure à la fin de 2000, lorsque plusieurs interventions cumulèrent les références aux intérêts promus par l’élargissement. Lors d’une conférence sur la promotion des États est-allemands, les Neue Länder, Schröder dit que l’élargissement présentait pour l’Allemagne un « intérêt prononcé » et un « intérêt vraiment propre ». Quelques lignes plus tard, il répéta encore, cette fois-ci de façon un peu plus détaillée, qu’il « ne s’agissait pas seulement d’un intérêt général politique en une maison commune européenne (...) mais qu’il existe avant tout un intérêt économique éminent dans le développement des marchés » des pays d’Europe centrale et orientale. Il ajouta encore que l’élargissement devait « être enfin considéré sous l’aspect des intérêts économiques », pour finir en disant que l’Allemagne avait « un intérêt économique national dans un élargissement rapide vers l’est » [38].
25Au moment de craintes et de réticences croissantes quant aux conséquences de l’élargissement dans l’opinion publique allemande, surtout dans les régions frontalières avec les pays candidats où Schröder prononça son discours, cette intervention indique que Schröder choisit de s’attaquer à une opinion publique domestique vacillante. Sa détermination à cet égard persista même à l’approche du Conseil européen de Nice de décembre 2000, alors que la question des réformes institutionnelles avait refroidi considérablement le climat au sein de l’Union européenne. Début décembre, une intervention de Schröder devant le Bundestag contenait onze références à l’intérêt allemand dans l’élargissement. Le chancelier se référa encore à deux reprises aux « intérêts nationaux allemands » dans ce domaine, ainsi qu’aux « intérêts propres bien compris » de l’Allemagne, à ses intérêts politiques et économiques, et aux intérêts des régions frontalières [39].
26Soulignant tant les avantages idéels que matériels d’un élargissement vers l’est, Schröder ne fut pas loin d’argumenter que l’élargissement vers l’est servait tout le monde pour toutes sortes de raisons. D’autant plus qu’il commença également à décrire l’élargissement comme une situation win-win, bénéficiant tant aux pays candidats qu’aux États membres de l’Union [40]. L’élément intéressant de ce discours quelque peu naïf est que Schröder parvint à le maintenir même au moment de difficultés importantes dans les négociations d’adhésion. Cela apparaît très clairement quand, suivant l’adoption du traité de Nice, la question de mesures transitoires à l’application de l’acquis communautaire arriva au premier plan de l’agenda des chefs d’État et de gouvernement. Une roadmap pour la négociation des périodes transitoires, proposée par la Commission, fut adoptée par le Conseil européen de Nice. Notamment la question de la libre circulation des travailleurs [41] souleva des craintes et des désaccords importants, tant parmi les Quinze qu’entre l’Union et les pays candidats.
27Les mesures transitoires tenaient particulièrement à cœur au chancelier Schröder et prirent rapidement une ampleur majeure dans son discours [42]. Quelques jours après le Conseil européen de Nice, pendant un voyage en Bavière, il présenta ce qu’il appela un Fünf-Punkte-Programm demandant des mesures flexibles pour limiter la libre circulation des travailleurs pendant une période maximale de sept ans, ainsi que des mesures pour limiter la libre circulation des services dans certains secteurs spécifiques, notamment la construction et l’artisanat [43]. Les pays candidats, qui percevaient la libre circulation des travailleurs comme raison d’être de l’UE, furent extrêmement froissés. Exclus, ils se considérèrent traités comme membres de seconde classe. La présidence suédoise de l’UE du premier semestre de 2001 fut tout aussi irritée. Elle voulait en effet définir des délais pour la clôture des négociations d’adhésion, un objectif qui se trouva mis en péril par la question des mesures transitoires. La présidence suédoise réagit avec une campagne média, qui culmina par un article publié dans le Financial Times accusant Schröder en particulier et d’autres hommes politiques en général d’essayer de repousser l’élargissement [44].
28L’action rhétorique suédoise se ressentit immédiatement dans les interventions de Schröder et de Chirac. Schröder répondit en renforçant encore son accent sur les avantages politiques de l’élargissement, introduisant notamment une argumentation nouvelle selon laquelle l’inclusion des pays d’Europe centrale et orientale dans l’UE constituait un devoir envers de futures générations [45]. Quant à Chirac, qui avait presque cessé de se référer à l’élargissement, son discours aussi regagna – du moins temporairement – de l’élan. En juillet 2001, à Riga, il discuta même de façon détaillée du commerce déjà créé par les accords d’association conclus avec les pays d’Europe centrale et orientale et précisa qu’il attendait de l’élargissement un « surcroît de dynamisme » [46]. Alors que ses rares références à l’élargissement avaient jusqu’au Conseil de Göteborg perdu presque tout contenu – quand il mentionnait l’élargissement Chirac se contentait de dire qu’il allait promouvoir la paix et la démocratie en Europe – ce nouvel accent sur les bénéfices matériels de l’élargissement témoigne de l’impact de l’action rhétorique suédoise.
29Au niveau événementiel aussi, le processus d’élargissement sembla regagner de l’élan à cette époque. En effet, les conclusions du Sommet de Göteborg précisaient que si les négociations continuaient à un rythme comparable, les premiers pays candidats devraient être prêts à conclure les négociations jusqu’à fin 2002 et pouvoir adhérer à temps pour les élections au Parlement européen de 2004. Six mois plus tard, en décembre 2001 à Laeken, le Conseil européen accepta l’opinion de la Commission selon laquelle dix des États candidats pourraient être prêts pour l’adhésion en 2004. On pourrait donc conclure que l’action rhétorique suédoise avait atteint ses objectifs. Toutefois, Schröder aussi obtint ce qu’il recherchait, notamment une période transitoire maximale de sept ans avant l’application du principe de la libre circulation des travailleurs. Il n’est alors pas surprenant que Schröder ait qualifié l’Accord de Göteborg de « victoire allemande » [47].
30L’analyse des interventions du chancelier suggère qu’il avait bien préparé son terrain. Tout en soulignant les avantages tant matériels qu’idéels de l’élargissement, il avait ancré la question des périodes transitoires dans cette affirmation des bénéfices de l’élargissement. Ainsi il expliqua par exemple que les mesures transitoires permettraient à l’Allemagne de maximiser les avantages de l’élargissement tout en en minimisant les risques [48]. À une autre occasion, il précisa que le voisinage des pays d’Europe centrale et orientale aurait de toute façon été problématique pour le marché du travail allemand, mais qu’avec l’élargissement, et les mesures transitoires, il serait possible de transformer le problème en opportunité [49]. Liant ainsi les bénéfices de l’élargissement aux périodes transitoires, Schröder ne généra pas seulement une attente de mesures transitoires dans le public allemand, mais rendit le soutien à l’élargissement de l’opinion allemande conditionnel à l’obtention des mesures demandées dans son Fünf-Punkte-Programm. Ainsi, il força ses partenaires européens à choisir entre accepter les demandes allemandes ou risquer un fort sentiment anti-élargissement dans l’opinion allemande.
31Le chancelier ne fut pas loin de reconnaître lui-même l’accent très public qu’il mettait sur les mesures transitoires comme partie intégrante de sa stratégie de négociation. Suivant le Conseil de Göteborg, il expliqua en effet que « le processus d’élargissement ne peut réussir que s’il continue à avoir le soutien des hommes et des femmes dans notre pays » et que « une solution équitable quant à la libre circulation des travailleurs est essentielle dans ce contexte » [50]. Au Sommet de Göteborg, on se trouva donc en présence de deux formes d’action rhétorique contradictoires. Alors que la présidence suédoise tenta d’accélérer la conclusion des négociations d’adhésion en étouffant les craintes et réticences exprimées, Schröder renforça sa position de négociation quant aux conditions matérielles de l’élargissement en introduisant l’opinion publique allemande à la table de négociation.
32Il est intéressant de noter que l’association entre les mesures transitoires et les bénéfices de l’élargissement permit à Schröder d’appuyer sa stratégie de négociation tout en adoptant un discours très positif sur l’élargissement. Ainsi il put préserver le soutien public allemand pour l’élargissement. En effet, les sondages indiquent que le soutien allemand à l’élargissement augmenta fortement au cours de l’année 2001 [51]. En France, à l’inverse, les attitudes favorables à l’élargissement étaient en déclin continu depuis 1998. Considérant que Chirac ne cessait de faire référence aux coûts de l’élargissement et au devoir de l’UE d’accueillir de nouveaux États membres ceci n’est guère surprenant. Si l’accent sur les coûts de l’élargissement a pu renforcer la position de négociation française à l’occasion, par exemple, des négociations de l’Agenda 2000, elle se révéla donc moins efficace à long terme. L’on pourrait même argumenter que les taux d’approbation très faibles de l’élargissement ont pu influencer le résultat du référendum sur le traité constitutionnel de 2005 ; un résultat qui a compliqué, peut-être même affaibli, la position de la France dans l’UE depuis. Dans ce contexte, le discours de Schröder, qui parvint à défendre les priorités allemandes sans s’aliéner l’opinion nationale, tout en se protégeant des arguments de ceux qui, au niveau européen, lui reprocheraient un manque d’enthousiasme initial pour l’élargissement, est d’autant plus remarquable.
33Toutefois, même Schröder ne parvint pas à maintenir indéfiniment le soutien public allemand pour l’élargissement, qui diminua très distinctement à partir de 2002. Le point faible de l’argumentation de Schröder est qu’elle reste fortement fondée sur les bénéfices matériels de l’élargissement et sur la promotion de l’intérêt national allemand. Au fur et à mesure que la date de l’élargissement approcha, l’opinion allemande douta toutefois de plus en plus de la plus-value matérielle de l’élargissement. Cela apparaît d’un rapport Eurobaromètre spécial de 2002 qui montre que les craintes relatives à l’élargissement furent particulièrement importantes en Allemagne et qu’elles étaient de nature avant tout économique. Les bénéfices escomptés, à l’inverse, étaient politiques et sécuritaires et ne parvinrent pas à rassurer le public allemand [52]. Dans ce contexte, Schröder, qui avait ancré sa campagne pour l’élargissement dans la promesse d’avantages matériels, n’avait plus de ressources argumentatives. Cela suggère que les contraintes extraordinaires placées sur la solidarité intra-européenne par l’élargissement vers les pays d’Europe centrale et orientale désarmèrent du moins temporairement les légitimations habituelles du processus d’intégration européenne.
CONCLUSION
34Si le discours politique ne peut pas résoudre les tensions fondamentales sous-jacentes au processus d’intégration européenne et à son élargissement, cette analyse suggère qu’il peut néanmoins, dans une certaine mesure, faciliter l’équilibre entre la défense d’intérêts nationaux et l’adhésion aux idéaux de l’intégration européenne, tout en contribuant à légitimer le projet européen aux opinions publiques nationales. Cela suggère que le discours politique est loin d’être aléatoire ou insignifiant. D’ailleurs, un degré important de régularité dans l’évolution des interventions étudiées montre qu’il s’intègre dans les stratégies de négociation et de légitimation. S’articulant directement autour des étapes clés de la négociation, l’évolution des interventions peut être indicative de transitions dans le processus d’élargissement. Elle signale notamment le rôle crucial joué par les Conseils européens de Luxembourg et d’Helsinki en 1997 et 1999, ainsi qu’un certain parallèle entre les deux Sommets, qui marquèrent tous deux une étape supplémentaire dans l’acceptation du principe d’un élargissement vers l’est de l’Union européenne. L’analyse indique également que le discours officiel peut être révélateur de l’évolution des enjeux et des priorités politiques. Ainsi l’interaction entre les arguments fondés sur les avantages matériels de l’élargissement et ceux articulés autour de sa dimension idéelle fait apparaître un jeu complexe entre le principe d’un élargissement vers l’est, la question de ses délais et celle de ses modalités budgétaires ; un jeu qui peut contribuer à la compréhension de l’avancement du processus d’élargissement. À l’approche du Sommet de Göteborg, par exemple, l’interaction entre Schröder, l’accent mis sur les mesures transitoires et l’action rhétorique de la présidence suédoise suggère que si le jeu entre questions de principe et modalités matérielles a pu enraciner, voire accélérer le principe d’un élargissement vers l’est, elle n’a pas forcément joué en faveur des États candidats pour ce qui est des conditions matérielles de leur adhésion à l’Union européenne.
Annexe
Notes
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[1]
Selon certains observateurs, 90 % des négociations en vue d’un élargissement de l’Union européenne ont lieu entre les États membres existants de l’Union (A. Landau, « Negotiating the enlargement », Negotiating European Union, P. W. Meerts and F. Cede (eds), Basingstoke, 2004, p. 208).
-
[2]
Cet article est issu des recherches menées dans le cadre de ma thèse de doctorat à l’Institut de hautes études internationales et du développement de Genève. Ces recherches reposent sur une collection aussi exhaustive que possible des interventions publiques des chefs d’État ou de gouvernement français, allemand et britannique de 1997-2004, que j’ai ensuite mises en relation avec d’autres sources disponibles pour la période en question, notamment différents documents des institutions européennes, des rapports Eurobaromètre, et des articles de presse (K. Milzow, National Interests and European Integration : Discourse and Politics (1997-2004), Institut de hautes études internationales et du développement, 2007).
-
[3]
Ce point est peu contesté parmi les auteurs s’inspirant d’approches discursives, qui mettraient en avant que le discours politique est intéressant en tant que tel et que son rapport à ce que pense l’orateur n’est pas central à leur analyse (O. Waever, « Discursive approaches », European Integration Theory, A. Wiener and T. Diez (eds), Oxford, 2004, p. 199 ; H. Sjursen, « Why expand ? The question of legitimacy and justification in the EU’s enlargement policy », Journal of Common Market Studies, vol. 40 (3), p. 496 ; F. Schimmelfennig, « The community trap : Liberal norms, rhetorical action and the eastern enlargement of the European Union », The Politics of European Union Enlargement, Theoretical approaches, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), London, 2005, p. 157).
-
[4]
Selon Alain Guggenbühl, le Conseil européen fonctionne comme lien entre la gouvernance européenne et l’opinion publique (A. Guggenbühl, « Cookbook of the presidency of the European Union », Negotiating European Union, P. Meerts and F. Cede (eds), op. cit., p. 174. Cette visibilité particulière du Conseil européen justifie également l’accent sur le niveau des chefs d’État ou de gouvernement.
-
[5]
La conceptualisation précise de l’impact de ces normes et valeurs et de leur relation à l’identité européenne varie selon les auteurs. Cf., par exemple, U. Sedelmeier, « Eastern enlargement : Risk, rationality and role-compliance », The Politics of European Union Enlargement, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), op. cit., p. 123 ; U. Sedelmeier, Constructing the Path to Eastern Enlargement, The Uneven Policy Impact of EU Identity, Manchester, 2005, p. 55, 76 ; K. Fierke, A. Wiener, « Constructing institutional interests : EU and NATO enlargement », EUI Working Papers, RSC, No 1999/14, Florence, 1999 ; F. Schimmelfennig, « The community trap », op. cit., p. 142-143.
-
[6]
Par exemple, M. Zaborowski, Germany, Poland and Europe, Conflict, Co-operation and Europeanisation, Manchester, 2004, p. 143.
-
[7]
Chancelier allemand jusqu’en octobre 1998.
-
[8]
H. Kohl, Düsseldorf – Amerikanische Handelskammer in Deutschland, 25 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 36, 12 mai 1997 ; H. Kohl, Bonn – Empfang anlälich des 65. Geburtstages des Präsidenten des Deutschen Industrie- und Handelstages Hans Peter Stihl, 22 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 36, 12 mai 1997 ; cf. également K. Kinkel, Bucarest – Rumänisches Parlament, 30 avril 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 37, 14 mai 1997.
-
[9]
J. Chirac, L. Jospin, Amsterdam – Conférence de presse conjointe, 18 juin 1997, site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse.
-
[10]
H. Kohl, Luxembourg – Edmond Israel Stiftung, 17 septembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 79, 7 octobre 1997 ; H. Kohl, Bundestag, 12 novembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 91, 17 novembre 1997.
-
[11]
K. Kinkel, Lübeck – Kaufmannschaft zu Lübeck, 4 septembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 71, 10 septembre 1997 ; K. Kinkel, Bundestag, 11 décembre 1997, Bulletin der Bundesregierung, no 100, 15 décembre 1997.
-
[12]
L’élargissement devait être un sujet majeur à l’ordre du jour étant donné que le Conseil européen avait indiqué dès 1995 que le processus d’élargissement pouvait débuter six mois après la conclusion de la conférence intergouvernementale débutant en 1996 (Conseil européen, Conclusions du Conseil européen de Madrid, 16 décembre 1995, Bulletin of the European Union, 12-1995, I . 25).
-
[13]
M. Zaborowski, Germany, Poland and Europe, op. cit., p. 111, 140, 144.
-
[14]
J. Chirac, L. Jospin, J.-M. Aznar, Salamanque – Conférence de presse conjointe, 2 décembre 1997, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse.
-
[15]
J. Chirac, Vienne – Chambre économique fédérale d’Autriche, 12 février 1998, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations.
-
[16]
J. Chirac, BBC1 – Entretien avec « Breakfast with Frost », 14 juin 1998, Site web de l’Élysée, Interventions, Interviews, articles de presse et interventions télévisées.
-
[17]
Parmi les acteurs favorables à l’élargissement, ils citent en particulier les fonctionnaires de la Direction générale I de la Commission européenne responsable pour les relations externes de l’Union, ainsi que certains États membres, notamment l’Allemagne (U. Sedelmeier, Constructing the Path to Eastern Enlargement, op. cit., p. 60 ; F. Schimmelfennig, « The community trap », op. cit., p. 142, 157).
-
[18]
G. Schröder, Bundestag – Regierungserklärung, 10 novembre 1998, Bulletin der Bundesregierung, no 74, 11 novembre 1998 ; G. Schröder, Bundestag – Avant le Conseil européen de Vienne, 10 décembre 1998 ; G. Schröder, La Haye – Stiftung zum Erhalt von Nieuwspoort, 19 janvier 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 4, 25 janvier 1999.
-
[19]
G. Schröder, Bundestag – Regierungserklärung, 10 novembre 1998 ; op. cit., G. Schröder, Bundestag – Avant le Conseil européen de Vienne, 10 décembre 1998, op. cit.
-
[20]
Cité dans « Deutschland pocht auf gerechteren EU-Beitrag. Signal zum Beginn der Präsidentschaft. Schröder, Schäuble, Stoiber und Herzog fordern niedrigere Nettozahlungen », Süddeutsche Zeitung, 4 janvier 1999.
-
[21]
« Der Mann der Milliarden », Der Spiegel, 1/1999, 4 janvier 1999.
-
[22]
Notamment par Wolfgang Schäuble, le chef de l’Union chrétienne-démocrate (CDU) et par Edmund Stoiber, qui deviendra le candidat chrétien-démocrate à la Chancellerie lors des élections de 2002 (« Deutschland pocht auf gerechteren EU-Beitrag », op. cit.). Il mérite d’être relevé que cela indique que le nouveau Chancelier poursuivit là une ligne engagée par le gouvernement de Kohl dès 1997, et que son ton n’exprime donc pas une transition fondamentale de la politique allemande suivant le changement de gouvernement.
-
[23]
Cf., par exemple, M. Stürmer, « Kann die deutsche Auenpolitik leisten, was ihr 1999 aufgegeben ist ? », Welt am Sonntag, 3 janvier 1999 ; C. Rath, « Herz in der Brieftasche », Taz, Die Tageszeitung, 3 janvier 1999 ; ou J. Docquiert, « Financement de l’Union : l’Europe hésite entre rigueur et réformes », Les Échos, 8 janvier 1999.
-
[24]
G. Schröder, La Haye – Stiftung zum Erhalt von Nieuwspoort, 19 janvier 1999, op. cit.
-
[25]
Ainsi qu’à Malte.
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[26]
Conseil européen, conclusions du Conseil européen d’Helsinki, 10-11 décembre 1999, Bulletin of the European Union, 12-1999, I . 3 . 5.
-
[27]
P. Ludlow, The Making of the New Europe, Brussels, 2003, p. 33.
-
[28]
Cf. J. Chirac, Cologne – Conférence de presse, 20 juin 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse ; J. Chirac, Élysée – Conférence des Ambassadeurs, 26 août 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Conférences et points de presse ; J. Fischer, Strasbourg – Parlement européen, 21 juillet 1999, Bulletin der Bundesregierung, Nr. 45, 22 juillet 1999 ; M. J. Baun, A Wider Europe, The Process and Politics of European Union Enlargement, Oxford, 2000, p. XVII, 120-131 ; P. Ludlow, The Making of the New Europe, op. cit., p. 29-30 ; L. Skålnes, « Geopolitics and the eastern enlargement of the European Union », The Politics of European Union Enlargement, F. Schimmelfennig and U. Sedelmeier (eds), op. cit., p. 214.
-
[29]
G. Schröder, Hannover – Messe, 18 avril 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 21, 27 avril 1999.
-
[30]
J. Chirac, Cologne – Conférence de presse, 20 juin 1999, op. cit.
-
[31]
G. Schröder, Bundestag, 20 avril 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 17, 20 avril 1999 ; G. Schröder, Tag der Deutschen Einheit 1999. Festakt in Wiesbaden, 3 octobre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 62, 6 octobre 1999 ; G. Schröder, Bundestag, 3 décembre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 85, 8 décembre 1999.
-
[32]
G. Schröder, Genshagen – Colloque franco-allemand, 25 septembre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 66, 13 octobre 1999 ; G. Schröder, Baden-Baden – Mitgliederversammlung des Verbandes der Chemischen Industrie, 8 octobre 1999, Bulletin der Bundesregierung, no 74, 2 novembre 1999.
-
[33]
J. Chirac, Élysée – Conférence des Ambassadeurs, 26 août 1999, op. cit.
-
[34]
Par exemple, J. Chirac, Strasbourg, 14 décembre 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations ; J. Chirac, Paris – Allocution lors de la présentation des vœux du corps diplomatique, 4 janvier 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990 ; ou J. Chirac, Versailles, 14 juin 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
-
[35]
J. Chirac, Strasbourg, 14 décembre 1999, Site web de l’Élysée, Interventions, Discours et déclarations.
-
[36]
Cf., par exemple, J. Chirac, Élysée – Dîner offert en l’honneur du président de la République de Pologne et de Mme Aleksander Kwasniewski, 15 mai 2000, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
-
[37]
« Frieden, Freiheit, Stabilität und Wohlstand » (G. Schröder, Bundestag, 3 décembre 1999, op. cit.).
-
[38]
« Ausgeprägtes Interesse » et un « wirklich ureigenes Interesse » ; « es ist nicht nur das allgemeine politische Interesse am gemeinsamen Haus Europa (...) sondern es besteht vor allen Dingen ein eminentes wirtschaftliches Interesse an der Entwicklung der Märkte » ; « endlich einmal unter dem Aspekt des wirtschaftlichen Interesses diskutiert werden » ; « ein ökonomisches nationales Interesse an einer zügigen Ost-Erweiterung » (G. Schröder, Berlin – Absatzkonferenz Neue Länder, 4 septembre 2000, Bulletin der Bundesregierung, no 53-3, 4 septembre 2000).
-
[39]
« Im nationalen Interesse Deutschlands » ; « aus wohlverstandenem Eigeninteresse » (G. Schröder, Bundestag, 28 novembre 2000, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden).
-
[40]
G. Schröder, Technische Universität Cottbus, 7 juillet 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
-
[41]
La libre circulation des travailleurs fut la préoccupation principale des États membres existants de l’Union. Les pays candidats quant à eux demandèrent des périodes transitoires notamment par rapport à la législation environnementale ou à la vente de terrain à des nationaux d’autres États membres.
-
[42]
G. Schröder, Regierungserklärung zu den Ergebnissen des Europäischen Rates in Nizza vor dem Deutschen Bundestag, 19 janvier 2001, Bulletin der Bundesregierung, no 6-2, 19 janvier 2000 ; G. Schröder, Internationales Bertelsmann Forum, 19 janvier 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Ver. di (Vereinte Dienstleistungsgewerkschaft), 21 mars 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Meisterfeier der Handwerkskammer, 25 mars 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, SPd Bundestagsfraction, 3 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
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[43]
G. Schröder, Oberpfalz – Regionalkonferenz, 18 décembre 2000, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
-
[44]
P. Ludlow, The Making of the New Europe, op. cit., p. 57-58.
-
[45]
G. Schröder, Technische Universität Cottbus, 7 juillet 2001, op. cit.
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[46]
J. Chirac, Riga – Discours lors du dîner offert par le Premier ministre letton, M. Andris Berzins et de la rencontre avec les communautés d’affaires française et lettone, 27 juillet 2001, Déclarations françaises de politique étrangère depuis 1990.
-
[47]
G. Schröder, Bundestag, 21 juin 2001, Bulletin der Bundesregierung, no 42-3, 22 juin 2001.
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[48]
G. Schröder, Hannover-Messe, 22 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden ; G. Schröder, Freie Presse Chemnitz – Interview, 2 mai 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Interviews.
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[49]
G. Schröder, SPd Bundestagsfraction, 3 avril 2001, Site web de la Bundesregierung, Reden/Interviews, Reden.
-
[50]
« Der Erweiterungsprozess kann insgesamt nur gelingen wenn er auch künftig die Unterstützung der Menschen in unserem Land findet » et que « eine für beide Seiten auskömmliche Lösung der Arbeitnehmerfreizügigkeit spielt hierbei eine Schlüsselrolle » (G. Schröder, Bundestag, 21 juin 2001, op. cit.).
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[51]
Voir l’annexe, p. 90.
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[52]
Commission européenne, Rapport Eurobaromètre Standard 54, automne 2000, avril 2001 ; Commission européenne, Rapport Eurobaromètre Standard 61, printemps 2004, juillet 2004, p. 39, 42, 43.