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Article de revue

Évolution dans l'organisation de la science politique : la dimension internationale

Pages 189 à 203

Notes

  • [*]
    Cet article est basé sur Coakley et Trent (2000). L’auteur est reconnaissant de leurs commentaires sur des versions antérieures de l’article à Asher Arian, Klaus von Beyme, Robert E. Goodin, Serge Hurtig, Hans-Dieter Klingemann, Jean Laponce, Theodore J. Lowi, Richard L. Merritt et Guillermo O’Donnell.
  • [1]
    Une analyse critique des ouvrages existants serait déplacée ici mais, outre les autres travaux cités dans le présent article, un certain nombre d’études très vivantes de l’histoire de la discipline – et d’études de ces études – ont été publiées ; pour des exemples d’analyses approfondies et remarquablement complémentaires, voir Farr (1988), Dryzek et Léonard (1988), et Viltard (1999), qui lui-même s’appuie largement sur Farr, Dryzek et Léonard (1995).
  • [2]
    Pour des rapports sur l’état de la science politique en Europe durant la période allant jusqu’à 1996, voir Durand et Quermonne (1996).
  • [3]
    Ce dernier organisme a été reconstitué en 1978 sous le nom de Policy Studies Institute.
  • [4]
    Chiffres établis à partir de la liste des rapports dans unesco (1950a, p. 658-662).
  • [5]
    La liste des présidents fait clairement ressortir l’étendue de la domination occidentale au cours des premières années, mais cela devait ensuite changer : Quincy Wright (États-Unis, 1949-1952), William A. Robson (Royaume-Uni, 1952-1955), James K. Pollock (États-Unis, 1955-1958), Jacques Chapsal (France, 1958-1961), D. N. Chester (Royaume-Uni, 1961-1964) ; Jacques Freymond (Suisse, 1964-1967) ; Carl J. Friedrich (États-Unis, 1967-1970) ; Stein Rokkan (Norvège, 1970-1973) ; Jean Laponce (Canada, 1973-1976) ; Karl Deutsch (États-Unis, 1976-1979) ; Candido Mendes (Brésil, 1979-1982) ; Klaus von Beyme (Allemagne, 1982-1985) ; Kinhide Mushakoji (Japon, 1985-1988) ; Guillermo O’Donnell (Brésil, 1988-1991) ; Carole Pateman (États-Unis/Royaume-Uni, 1991-1994) ; Jean Leca (France, 1994-1997) ; Theodore J. Lowi (États-Unis, 1997-2000) ; Dalchoong Kim (Corée, 2000-2003), Max Kaase (Allemagne, 2003-).
  • [6]
    Un seul de ces congrès (Moscou, 1979) a fait l’objet d’une étude scientifique détaillée (Merritt et Hanson, 1989).

Introduction

1Le xxe siècle a été décrit comme « le siècle des sciences sociales » – l’époque où cette branche du savoir a atteint sa pleine maturité intellectuelle et reçu une large reconnaissance politique et institutionnelle (Wagner, 1999). De fait, les dernières années du siècle ont donné l’occasion d’effectuer de vastes bilans des développements intervenus dans les différentes sciences sociales à un moment où un certain nombre d’organismes internationaux représentant des branches de ces sciences, comme l’économie, la science politique et la sociologie, célébraient leur 50e anniversaire. Le Conseil international des sciences sociales a atteint la même étape en 2002 (voir Platt, 1999 ; Coakley et Trent, 2000 ; Platt, 2000).

2Cette conjonction de célébrations n’était pas fortuite. Si nous remontons jusqu’à la naissance de chacune de ces organisations, nous nous trouvons à la fin des années 1940, dans le monde dévasté de l’après-guerre. Et pourtant cette sombre période a été marquée par un élan idéaliste dont il serait difficile de retrouver le pendant dans les décennies suivantes. La jeune unesco, animée d’un optimisme évangélique quant à l’aptitude du savoir à améliorer le sort de l’humanité, a entrepris de servir de sage-femme, pour ne pas dire de parent, à toute une série de nouvelles organisations internationales savantes et les a nourries pendant des années jusqu’à ce qu’elles soient capables de survivre de manière autonome.

3L’objet du présent article est d’étudier les origines de la création de l’un de ces organes, l’Association internationale de science politique (aisp). Plutôt que de se limiter à l’histoire institutionnelle de cet organisme, il s’attache à un certain nombre d’aspects plus larges du contexte entourant sa naissance. Il commence par placer la fondation de l’aisp sous trois éclairages assez différents : celui de l’évolution intellectuelle de la discipline, celui de son accès progressif à la reconnaissance en tant que matière d’étude universitaire, et celui du développement et de la consolidation d’organismes professionnels savants (ces derniers étant de deux types : les associations nationales de science politique directement intéressées à la création de l’aisp et les unions académiques internationales qui servaient de modèles). L’article examine ensuite les facteurs conduisant à la fondation de l’aisp, puis évoque brièvement l’évolution de ses structures institutionnelles et l’élargissement du champ des activités parrainées par elle.

L’évolution de la discipline de la science politique

4Les histoires de la science politique ne manquent jamais de souligner les racines anciennes de la discipline. Par exemple, dans les différentes éditions de l’ouvrage classique de Georges Sabine History of Political Theory, le gros du volume est consacré à la période 1500-1900, mais le reste du livre traite principalement des périodes anciennes et médiévales plutôt que du xxe siècle (Sabine, 1963). Même si nous regardons, au-delà des limites de la pensée politique, vers l’étude empirique des phénomènes politiques, la profondeur de l’héritage antique apparaît clairement : un aperçu succinct de l’histoire de la science politique, publié récemment et faisant autorité, commence, comme on pouvait s’y attendre, à Platon et Aristote (Almond, 1996).

5Malgré l’héritage intellectuel impressionnant et le puissant impact de la tradition philosophique politique, le développement d’une science politique du genre de celle qui nous est familière est certainement un phénomène moderne [1]. Jusqu’à une date avancée du xxe siècle, l’identité de la discipline demeure incertaine et son statut universitaire est sujet à des remises en question d’intensité variable dans les différentes régions du monde. Vers la fin des années 1940, la position de la science politique n’était toujours pas parfaitement assurée. Une étude contemporaine estimait que les diverses traditions nationales formaient cinq grands groupes (Salvadori, 1950, p. 7-9 ; Royanna, 1950, p. 314-315, 318) :

  • l’approche américaine, caractérisée par l’ouverture aux méthodes des autres sciences sociales et notamment de la psychologie, qui opérait à cette époque sa transition de l’institutionnalisme au behaviourisme (États-Unis, Moyen-Orient et certaines parties de l’Asie comme la Chine) ;
  • l’approche britannique, ancrée dans la philosophie morale, mais affirmant lentement son indépendance (Royaume-Uni et la plupart des pays du Commonwealth, y compris l’Inde) ;
  • l’approche française, enracinée dans la tradition du droit romain (France, Europe méditerranéenne et Amérique latine) ;
  • l’approche allemande, dérivée du droit constitutionnel et administratif et évoluant vers une étude systématique de l’État (Allemagne, Autriche et certains pays adjacents comme les Pays-Bas et la Scandinavie, Japon) ;
  • l’approche soviétique, caractérisée par le mode d’analyse marxiste-léniniste et voyant pour l’essentiel dans la science politique une branche de la sociologie ancrée dans l’économie politique (Union soviétique et autres pays sous influence communiste).
Si cette typologie, comme la plupart des généralisations, simplifie à l’excès la réalité, elle revêt une importance particulière du fait des circonstances dans lesquelles elle a été élaborée (une vaste étude, parrainée par l’unesco, des méthodes de la science politique, cf. plus loin). Il est pourtant clair que, même à l’époque, il existait des différences très fortes à l’intérieur de la plupart de ces groupes de pays. Les exemples pourraient être multipliés, mais pour nous limiter à des personnalités qui devaient s’illustrer dans l’aisp pendant ses premières années, il serait difficile d’imaginer Kenneth Wheare et Maurice Duverger se conformant confortablement aux caractéristiques respectives des traditions britanniques ou françaises et la typologie ne tient pas non plus compte de la tradition française de la géographie politique représentée par André Siegfried, ni de l’héritage de Max Weber dans la sociologie politique allemande. Par contraste, l’approche soviétique se voit reconnaître une place dans la discipline qui, même si cela anticipait opportunément la perspective intégratrice qui devait être celle de l’aisp quant aux limites de son champ d’action, a été ultérieurement mise en question par de nombreux spécialistes de la science politique.

6Depuis les années 1950, convergence mondiale et développement rapide de la discipline ont été les traits marquants de l’histoire de la science politique. La classification établie par David Easton des étapes par lesquelles la science politique américaine est passée du xixe siècle aux années 1960 avait une application plus large ; effectivement, il est probable que certains des courants dont le règne était depuis longtemps passé aux États-Unis ont continué d’exercer une influence notable dans d’autres parties du monde, jusque dans les dernières décennies du xxe siècle. Il s’agit de : l’universalisme, c’est-à-dire l’étude de la politique comme faisant partie de la philosophie morale universelle ; le légalisme, ou étude de l’État comme structure essentiellement juridique (et donc centrée sur l’analyse des constitutions et des normes juridiques) ; le réalisme, qui met l’accent sur la pratique réelle de la vie politique plutôt que sur les structures formelles ; le behaviourisme, qui met l’accent sur une nouvelle forme de réalité appréhendée, non seulement par l’étude des institutions, mais aussi en utilisant des connaissances provenant d’autres disciplines comme la psychologie et la sociologie (Easton, 1968). Des analyses plus récentes signaleraient, bien entendu, toute une série d’approches postbehaviouristes, voire d’autres perspectives sur l’histoire de la discipline (Almond, 1990 ; Almond, 1996 ; Finifter, 1993).

7Il est donc probable que le chemin suivi par la science politique américaine a tracé l’itinéraire emprunté par la discipline dans les autres régions du monde. Dans une étude de référence portant sur la science politique dans le monde au début des années 1980, il était noté que les politistes demeuraient encore massivement concentrés en Amérique du Nord (15 à 16 000 personnes), l’Europe occidentale se situant loin derrière (environ 2 500 personnes) ; la discipline était sérieusement sous-développée dans les autres régions du monde (Andrews, 1982b). L’opinion a néanmoins été émise que les sciences sociales en Europe, loin d’être un appendice des sciences sociales américaines, ont connu une évolution distincte dans la période d’après-guerre en suivant fréquemment une voie qui divergeait de l’évolution aux États-Unis (ou même constituait une réaction à cette évolution) (Martinotti, 1999). Dans le cas de la science politique, la réaction institutionnelle contre les États-Unis a peut-être été d’autant plus prononcée que la dette intellectuelle était substantielle : la science politique européenne a gagné de vitesse les autres sciences sociales avec la création très précoce d’une communauté de spécialistes de cette science, création qui procédait dans une large mesure d’une volonté d’affirmer l’autonomie européenne dans la discipline. Cela tenait partiellement aux circonstances politiques liées à l’expansion et au renforcement de la Communauté européenne et de l’Union européenne ; toutefois, l’une des premières expressions de ladite volonté est née d’une initiative de scientifiques européens doués de perspicacité. Il s’agit du lancement en 1970 du Consortium européen de recherche politique, qui a une vocation interuniversitaire [2] (Newton, 1991).

8Cet exposé illustre, bien entendu, la domination de l’Occident dans l’évolution de la science politique, caractéristique que mettent en lumière les grandes enquêtes sur la discipline (unesco, 1950a ; Barents, 1961 ; Waldo, 1975 ; Andrews, 1982a ; Easton, Gunnell et Graziano, 1991 ; Goodin et Klingemann, 1996). On ne doit toutefois pas l’interpréter comme excluant la possibilité de variantes se distinguant de ces approches dans certains pays, même si des savants non occidentaux comme Ibn Khaldun ne figurent pas dans les histoires courantes de la science politique. On peut citer comme exemples l’étude des anciens textes hindous en Inde (Appadorai, 1950, p. 40 et 41) et la perception traditionnelle de la science politique comme branche du système féodal du confucianisme dans le Japon d’avant l’ère Meiji (Royama, 1950, p. 313). Une étude éloquente de la science politique au Nigéria donne une image qui doit être raisonnablement représentative d’une bonne partie de la science politique non occidentale : elle décrit une discipline qui est « une reproduction de la science politique dominante expatriée » et qui atteste de l’omniprésence de l’héritage colonial, dont les modes et les tendances arrivent soit trop tard soit sous des formes édulcorées (Jinadu, 1987).

9Il serait cependant injuste et inexact de ne voir dans le reste du monde que le destinataire passif de la sagesse de l’Occident et, en particulier, de celle de l’Amérique du Nord. Même si cela occupe une place mineure dans la conscience des érudits occidentaux, la réalité est qu’un certain nombre de spécialistes d’Afrique et, surtout, d’Amérique latine ont apporté des contributions originales (bon nombre d’entre elles ont été utilisées ultérieurement, de manière critique ou non, par leurs collègues américains et européens) dans des domaines comme la théorie de l’État, les États et les régimes autoritaires, la transition vers la démocratie, l’économie politique, les aspects politiques de la dépendance et les systèmes mondiaux. Au cours des dernières années, notamment, le réveil asiatique a largement dépassé les frontières de l’économie pour s’étendre au domaine de la recherche en sciences sociales et, là aussi, l’importance de contributions indépendantes sur les questions de démocratisation, d’économie politique et de mondialisation ne doit pas être sous-estimée.

La science politique en tant que matière universitaire

10Bien que la politique ait été étudiée dans une perspective clairement universitaire des siècles avant la naissance de l’université en Occident, la matière elle-même a mis longtemps à apparaître dans les programmes (Ridley, 1975). Des quatre facultés de l’université médiévale (théologie, médecine, droit et philosophie), deux au moins peuvent être considérées comme dispensant un enseignement englobant l’étude de l’État et de la vie politique (c’est peut-être vrai aussi de la faculté de théologie, mais l’évolution de celle-ci ne la prédisposait pas dans la pratique à encourager réellement l’étude proprement dite de la science politique).

11L’enseignement de la faculté de droit s’étendait nécessairement à l’étude des institutions de l’État et à celle des statuts et conventions qui les étayent. Avec le temps, l’étude des principes de la jurisprudence et du droit constitutionnel et administratif a évolué, dans quelques universités, vers une reconnaissance formelle de la politique comme domaine d’étude. En gros, l’évolution a suivi deux voies. Dans l’Europe centrale germanophone, la « théorie générale de l’État » (allgemeine Staatslehre) est née relativement tôt de l’étude du droit et n’a jamais été isolée des événements et besoins politiques contemporains. Elle a finalement constitué le noyau central des études modernes de la politique (Adamovich, 1950a, p. 23-31). En France, comme d’ailleurs dans d’autres pays fidèles à la tradition du droit romain, l’étude de la vie politique a été subordonnée à celle du droit et, même si elle a pu progresser au sein d’autres disciplines comme l’histoire et la sociologie, elle était toujours dans un état incontestable de sous-développement vers le milieu du xxe siècle. Ainsi, vers la fin des années 1940, Raymond Aron pouvait déclarer haut et fort qu’« en France, il n’y a pas de « science politique » au singulier » (Aron, 1950 ; voir aussi Kopelmanas, 1950, p. 647). De fait, la liaison entre la science politique et le droit est restée très forte dans une grande partie du monde latin jusqu’à une époque tardive du xxe siècle et bon nombre de départements de science politique n’ont finalement affirmé leur indépendance par rapport à leur parent, le droit, que dans les dernières décennies. Nonobstant cette parenté formelle, dans un certain nombre de cas, par exemple dans certaines universités brésiliennes, la science politique s’est développée au sein des facultés de philosophie (Menezes, 1950, p. 228).

12La faculté de philosophie, avec sa vocation traditionnelle à embrasser tous les aspects du savoir, a effectivement constitué un deuxième lieu d’étude de la politique. Cependant, là aussi, la création de départements de science politique distincts a été lente. À mesure que l’université se développait et que des chaires se créaient pour une gamme de matières de plus en plus diverses, ce sont des disciplines comme les langues, les mathématiques et l’histoire qui furent les premières à obtenir la reconnaissance. Même l’économie, la sociologie et l’anthropologie ont progressé plus rapidement que la science politique au xixe siècle. Ces études politiques ont ainsi tendu à être considérées comme une branche de la philosophie morale, bien que, dans certains cas, comme au Canada, elle ait eu un lien très fort avec l’économie (Keirstead et Watkins, 1950, p. 171 ; Stein et Trent, 1982). Dans une autre acception encore, une nouvelle forme d’économie a servi de point d’ancrage à cette interprétation de la vie politique connue sous le nom de « matérialisme historique » : telle est la voie caractéristique empruntée par les études politiques dans les pays sous contrôle communiste (Schaff et Ehrlich, 1950).

13Ce phénomène de reconnaissance tardive de l’autonomie de la discipline se reflète dans l’histoire des départements de science politique. Il est vrai que l’Université de Leyde, aux Pays-Bas, a commencé à enseigner officiellement la science politique dès 1613 et que des chaires de cette matière ont été créées peu après cette date (Daalder, 1991). De même, l’Université d’Uppsala en Suède a créé en 1622 une chaire sur le thème « le discours et la politique », et l’Åbo Academie (alors en Suède, maintenant en Finlande) a établi une chaire de politique et d’histoire en 1640 (Ankar, 1987). Il serait cependant difficile de soutenir que les centres d’intérêt de ce genre d’enseignement avaient beaucoup en commun avec ceux des départements de science politique du monde contemporain.

14La deuxième moitié du xixe siècle a vu l’apparition d’embryons de départements de science politique. Cela s’explique en partie par la fondation de nouvelles universités anxieuses de faire reconnaître ce qui paraissait être une matière moderne et socialement pertinente. A Dublin, par exemple, la nouvelle Université catholique d’Irlande (actuellement University College Dublin) a établi en 1855 une chaire de « sciences sociales et politiques » ; dans une perspective résolument catholique, cette chaire se transforma en 1908 en un département intitulé « Ethique et politique ». À partir des années 1840, la « politique » a commencé à acquérir une signification plus moderne à Uppsala (Ruin, 1982). Le développement de la discipline a démarré dans d’autres villes de Suède : une chaire d’histoire et de science politique créée à Lund en 1889 et une chaire de science politique à Göteborg en 1901 (Ankar, 1991). En Belgique, des écoles de sciences politiques et sociales furent établies à l’Université catholique de Louvain et à l’Université libre de Bruxelles en 1893 (Frognier et de Winter, 1991). Dans l’Allemagne d’avant-guerre et ailleurs en Europe, l’étude des phénomènes politiques a aussi progressé à grands pas sous d’autres étiquettes, comme celle de la sociologie. La vérité, toutefois, est que le département de science politique type de l’Europe contemporaine est pour l’essentiel une création du xxe siècle. Même à la fin des années 1940, il n’existait pas un seul département de science politique au Royaume-Uni (Cole, 1950).

15Bien que le développement de la discipline dans les universités américaines ait rapidement relégué à l’arrière-plan son évolution en Europe, sur ce continent aussi la reconnaissance officielle de la science politique par le système universitaire a eu tendance à être plus tardive que celle des autres matières. Il est instructif de rappeler la lenteur des étapes de progression de la discipline, même aux États-Unis : inauguration de la première chaire d’histoire et de science politique à Columbia en 1857 ; création d’un département d’histoire et de sciences sociales et politiques à Cornell en 1868 ; lancement du premier programme d’études universitaires de deuxième cycle en histoire et politique à Johns Hopkins en 1876 ; apparition de la première école de science politique de troisième cycle à Columbia quatre années plus tard. Des départements séparés de science politique ont été établis à Columbia (1903), à l’Université de l’Illinois et du Wisconsin (1904) et à celle du Michigan en 1911 ; en 1914, sur 531 établissements d’enseignement supérieur, 200 offraient des cours de science politique et 40 disposaient de départements indépendants de science politique (Ricci, 1984, p. 59-61). Ce résultat était stupéfiant au regard de la situation en Europe, région du monde qui avait le plus de ressemblance avec les États-Unis du point de vue du développement de la discipline.

16Enfin, il importe de rappeler que l’étude officielle de la science politique peut emprunter un autre chemin que la voie universitaire. Si l’étude théorique de la politique pouvait revêtir un grand intérêt pour les professeurs et un certain intérêt pour le grand public, l’étude du fonctionnement de l’État et de ses organes avait une valeur pratique pour les titulaires de fonctions publiques. Il n’est donc pas surprenant que la fascination éprouvée par le xixe siècle pour le savoir pratique ait débouché sur la création d’institutions éducatives chargées d’importantes fonctions de formation. C’est dans cet esprit que l’Ecole libre des sciences politiques a été fondée à Paris en 1872 (elle a été remplacée en 1945 par la Fondation nationale des sciences politiques et l’Institut d’études politiques de Paris). La London School of Economics and Political Science (lse) a été fondée en 1895 sur ce modèle, et ces deux écoles sont elles-mêmes devenues des modèles pour des institutions du même genre créées plus tard dans d’autres pays – par exemple, l’Ecole des sciences sociales et politiques à Lausanne en 1902, la Deutsche Hochschule für Politik à Berlin en 1920 et l’Ecole des problèmes politiques et sociaux (devenue ultérieurement l’Ecole d’économie de Prague) à Prague à la fin des années 1940 (Klöti, 1991 ; Kastendiek, 1987 ; Škaloud, 1995). L’attachement de la London School of Economics aux « cinq E » (éducation, économie, efficacité, égalité et empire) rend bien compte de l’esprit de cette époque mais, à l’instar de son homologue de Paris, elle faisait porter son attention sur l’ensemble du domaine des sciences sociales sans privilégier la science politique au sens moderne du mot (Dahrendorf, 1995).

Le contexte institutionnel

17Le troisième éclairage sous lequel il convient d’étudier l’histoire de l’aisp est celui des diverses associations qui ont existé avant elle et qui ont façonné les premières années de son évolution. Ces associations relèvent de deux catégories. La première comprend les associations nationales de sciences politiques antérieures à l’aisp et qui ont contribué à sa fondation, ainsi que les organisations nationales ou régionales de spécialistes de la science politique qui sont apparues par la suite ; la plupart de celles-ci ont aussi établi des relations officielles avec l’aisp, au soutien de laquelle plusieurs d’entre elles sont redevables de leur création. La deuxième catégorie est constituée par les associations savantes qui avaient commencé à voir le jour au xixe siècle, mais qui ont réellement commencé à se multiplier dans les années de l’immédiat après-guerre (Meynaud, 1956).

18Avant la deuxième guerre mondiale, la lenteur du développement de la science politique trouvait son pendant dans les pas encore plus hésitants faits vers la création d’associations professionnelles nationales de science politique. De fait, il n’y avait dans la plupart des pays aucune organisation rassemblant les politistes travaillant au sein des universités. Dans les cas de ce genre, il est fort possible que les analystes universitaires de la vie politique aient disposé d’autres formes de contacts structurés. Un modèle est le groupe à orientation politique, tel qu’en Grande-Bretagne, la Fabian Society (1884) à tendance gauchisante et le Political and Economic Planning (1931), plus conservateur [3] (Robson, 1950). Il vaut la peine de noter qu’il existait, même à cette époque lointaine, d’autres institutions témoignant un intérêt pour la discipline, comme l’Australian Institute of Political Science (1932 ; Tatz et Starr, 1982). Un deuxième lieu de rencontre était offert par les associations savantes à composition large, au sein desquelles les politistes faisaient figure de minorité : la Société des juristes viennois (de l’entre-deux-guerres) en est un exemple (Adamovich, 1950b). Un troisième modèle est la réunion savante occasionnelle, dont des exemples sont fournis par le Congrès de science politique tenu à Paris en 1900 (Laponce, 2000) et le Congrès scandinave de sciences politiques tenu à Stockholm vers 1930 (Håstad, 1950, p. 151).

19Le petit nombre d’associations nationales de science politique antérieures à l’aisp constitue une liste assez remarquable. En tête vient l’Association américaine de science politique (1903) et on trouve aussi l’Association finlandaise de science politique (1935) et l’Association indienne de science politique (1938). On peut y ajouter l’Association canadienne de science politique, au départ (1913) organisme interdisciplinaire mais devenue ultérieurement (1968) une association vouée exclusivement à la science politique. La tourmente politique a porté un coup sérieux à l’Association chinoise de science politique qui existait entre les deux guerres (1932), mais la période de reconstruction d’après-guerre a facilité l’apparition de nouvelles associations au Japon (1948) et en France (1949).

20La fermentation intellectuelle de l’après-guerre et la perception croissante de la nécessité de s’organiser sur le plan national comme condition de la collaboration internationale a entraîné une multiplication des associations nationales de science politique. Certaines sont apparues, comme nous l’avons vu, juste avant la naissance de l’aisp. D’autres ont été créées peu après : les associations néerlandaise, israélienne, pakistanaise, polonaise, suédoise, suisse et britannique (1950), les associations autrichienne, belge, allemande et grecque (1951) et les associations australasienne, brésilienne et italienne (1952). Les organisations des pays à gouvernement communiste ont généralement vu le jour plus tard : Yougoslavie (1954), Union soviétique (1960), Tchécoslovaquie (1964) et Bulgarie, Hongrie et Roumanie (1968). Bien entendu, l’association polonaise existait déjà (depuis 1950). Dans l’ensemble du monde communiste, la légitimité de la discipline s’est trouvée confortée sur le plan qualitatif par le Congrès mondial de l’aisp tenu à Moscou en 1979.

21Outre les associations mentionnées plus haut dont beaucoup ont été fondées sur l’initiative de l’aisp, des associations nationales de science politique sont apparues ailleurs, bien que certaines aient disparu depuis. Un certain nombre d’associations régionales sont aussi nées plus tard. Deux d’entre elles, l’Association africaine de science politique (1973) et l’Association de science politique pour l’Asie et le Pacifique (environ 1983) sont devenues des membres collectifs de l’aisp. D’autres, comme l’Association scandinave de science politique (structure de coordination assez lâche) et le Consortium européen de recherche politique (1970) demeurent hors du champ d’action de l’aisp.

22Le modèle des fédérations savantes transnationales a été fourni par les divers organismes apparus dans le domaine des sciences exactes et naturelles ou dans des disciplines faisant une place importante à ces sciences. Sous leur forme initiale, ces organes étaient typiquement composés de membres individuels et se caractérisaient par la nature pratique des objectifs affichés. Parmi les exemples proches des sciences sociales figurent l’Institut statistique international (1885) et le Congrès international de psychologie (1889) et, apparus pendant l’entre-deux-guerres, l’Union internationale pour l’étude scientifique de la population (1928) et l’Institut international des sciences administratives (1930 ; Marshall, 1964).

23Même si elle devait, comme on le verra plus loin, accorder une attention particulière à la science politique, l’unesco a aussi joué un rôle majeur dans la promotion de la collaboration internationale et dans la formation de fédérations savantes internationales dans d’autres disciplines. On peut y voir le reflet de l’ambition, affichée par son premier directeur général, Julian Huxley, de contribuer à l’avancement des sciences sociales aussi bien que des sciences exactes et naturelles en soutenant un grand nombre de programmes autonomes (Sewell, 1975, p. 113-117). Non contente de s’intéresser à la science politique, l’unesco s’est tournée vers l’économie, la sociologie et le droit comparé en 1949 et vers la psychologie sociale en 1950. C’est alors que sont apparues l’Association internationale des sciences économiques (1949), l’Association internationale de sociologie (1949), l’Association internationale des sciences juridiques (1950) et, sous sa nouvelle forme, l’Union internationale de psychologie scientifique (1951).

24L’unesco ne s’est pas bornée à promouvoir les contacts transnationaux ; elle s’est aussi évertuée à encourager la communication interdisciplinaire. C’est ainsi qu’une fois que le nombre de fédérations savantes internationales a atteint la masse critique, elle s’est employée à établir un organe de coordination pour l’ensemble des sciences sociales. Le résultat a été l’apparition en 1952 d’une organisation qui continue de faire le lien entre les principales fédérations internationales de sciences sociales et qui en est rapidement venue à représenter le principal canal de communication entre l’unesco et ces fédérations ; je veux parler du Conseil international des sciences sociales.

25On ne doit pas déduire de ce qui précède qu’il existait un espace vide à remplir par une association internationale de science politique, espace dans lequel l’aisp pouvait s’installer sans crier gare. Il existait en effet deux organismes qui, dans d’autres circonstances, auraient pu redéfinir leur mission en vue précisément d’occuper le terrain que l’aisp a finalement fait sien.

26Le premier de ces organismes était l’Institut international des civilisations différentes, organisation privée très énergique qui se vouait au progrès des « sciences morales et politiques » ; son titre complet, assez révélateur, était « Institut international des sciences politiques et sociales appliquées aux pays de civilisations différentes » (incidi ; unesco, 1956). On peut trouver une indication des valeurs défendues par cet Institut dans le nom qu’il portait au moment de sa fondation en 1894 : l’Institut colonial international, organisation composée de spécialistes des pays possédant un empire colonial et bénéficiant du soutien des gouvernements coloniaux (unesco, 1950c).

27Le deuxième organisme était l’Institut international d’histoire politique et constitutionnelle fondé en 1936, mais rebaptisé après la guerre « Académie internationale de science politique et d’histoire constitutionnelle » (unesco, 1950b). Même si des comparatistes distingués comme Crane Brinton et Boris Mirkine-Guetzévitch ont figuré parmi les vice-présidents de cet Institut, et s’il s’est consciencieusement efforcé de présenter ses travaux comme axés sur la science politique traditionnelle, il avait de toute évidence ses racines dans la communauté des historiens.

La fondation de l’aisp

28Si l’ensemble de faits évoqués plus haut concernant la discipline et la communauté savante internationale forme le contexte général dans lequel a été conçu l’aisp, les circonstances immédiates de sa création apparaissent comme une remarquable conjonction d’intérêts de deux partenaires : d’une part, la quête ambitieuse et idéaliste du noble objectif de la paix mondiale par le principal organisme international responsable de l’éducation et de la science, à savoir l’unesco nouvellement créée et dans toute la vigueur de sa jeunesse ; d’autre part, l’intérêt très précis et très pratique attaché par un groupe international de politistes clairvoyants aux structures de leur discipline.

29La première étape de la création de l’aisp débuta modestement au sein du Département des sciences sociales de l’unesco. Ce département avait reconnu dans la science politique une discipline d’une importance exceptionnelle et la Conférence générale de l’unesco, réunie à Mexico en novembre et décembre 1947, avait décidé ce qui suit : « 5.5 Méthode des sciences politiques. Le Directeur général est chargé : d’encourager l’étude des sujets et des problèmes traités par les spécialistes de science politique des divers pays dans les ouvrages de recherche récents (publications scientifiques et manuels d’un niveau élevé) ; d’encourager également l’étude des différents points de vue, de la valeur accordée à ces problèmes, des méthodes, des techniques et de la terminologie utilisée, et de l’importance prise récemment par la production d’ouvrages de science politique » (unesco, 1949c).

30Si le Département des sciences sociales avançait un certain nombre de raisons pour choisir la science politique, plutôt qu’une autre science sociale, pour en faire l’inventaire (y compris la constatation de son sous-développement dû à son origine très récente et de son manque d’unité expliqué par sa division en une série de courants nationaux), il y avait une raison plus impérieuse. Les lignes qui suivent méritent d’être citées en entier, car elles devaient occuper une place centrale dans les préoccupations de l’aisp et elles expriment éloquemment l’atmosphère qui a entouré sa genèse :

31« Il y a encore un autre facteur qui justifie le choix de la science politique. Nous le mentionnons ici en dernier quoi qu’il soit peut-être le plus important, aussi bien du point de vue des groupes civiques que de celui du but fondamental de l’unesco : le maintien de la paix par la collaboration intellectuelle. Parmi les causes multiples qui ont conduit les êtres humains à s’entretuer, à provoquer des souffrances parfois inouïes, dont les exemples les plus effrayants sont de date trop récente pour qu’il soit nécessaire de les rappeler à l’esprit des citoyens des divers pays, il y en a eu et il y en a qui sont d’ordre purement politique. Qu’il s’agisse là de causes premières ou de causes secondaires, on peut bien affirmer que la tension qui existe à présent à l’intérieur de bien des nations a été étroitement liée à la manifestation des phénomènes dont la connaissance et la compréhension sont du ressort de la science politique… Sans vouloir aborder la question de savoir si et dans quelle mesure l’éducation, telle qu’elle est pratiquée aujourd’hui, dissipe le brouillard qui masque la réalité des phénomènes politiques, il n’en est pas moins vrai que c’est aux spécialistes, en particulier, d’accomplir l’effort demandé pour que le brouillard disparaisse. Avec son projet sur les méthodes en science politique, l’unesco a voulu apporter une contribution – si modeste soit-elle – à l’œuvre délicate de la connaissance humaine dans un domaine dont on ne peut méconnaître l’importance. » (unesco, 1949c, p. 28 et 29).

32L’aboutissement concret de l’initiative de l’unesco a été un ambitieux projet transnational animé par William Ebenstein, professeur de science politique à l’Université de Princeton (États-Unis), qui prit ses fonctions à l’unesco en février 1948. C’est à ce moment que la collaboration d’un grand nombre de politistes à cette initiative a été sollicitée. Des spécialistes de science politique de toutes les régions du monde ont été invités à présenter des rapports sur la science politique dans leur pays ou sur des aspects particuliers de cette science, en suivant un plan relativement détaillé comprenant trois grandes sections – contenu, méthodologie et terminologie. Quatre-vingt-quatre rapports furent reçus en tout, dont 51 ont été publiés. Les rapports reflétaient une tendance appelée à caractériser durablement les études de science politique et d’ailleurs aussi les sciences sociales connexes : leur vigueur exceptionnelle en Occident (53 rapports venaient d’Europe, 13 d’Amérique du Nord, et seulement 18 du reste du monde – cinq d’Amérique du Sud, cinq du Moyen-Orient, quatre d’Asie et quatre d’Océanie). Par ailleurs, on s’efforçait déjà de maintenir un équilibre géopolitique entre les blocs (12 rapports soumis par des pays où des régimes communistes étaient installés ou en voie de l’être) et la position dominante de l’anglais était beaucoup moins forte qu’elle devait le devenir plus tard (38 rapports présentés en anglais, 31 en français, 6 en allemand, 5 en espagnol, 3 en italien et 1 en norvégien) [4].

33Avant même que les rapports soient publiés, un autre fait majeur s’était produit. Il s’agit d’une conférence « non officielle », convoquée à la Maison de l’unesco à Paris en septembre 1948 pour discuter de divers aspects du projet concernant les problèmes de méthodologie. C’est à cet événement que remonte la conception de l’aisp et les décisions prises à la réunion ont eu une portée fondamentale. Trois d’entre elles méritent d’être examinées de plus près en raison de l’effet durable qu’elles ont eu sur l’organisation internationale de la science politique.

34La première décision a consisté à exprimer avec clarté le besoin de collaboration transnationale dans la discipline et à la justifier par un impératif intellectuel défini dans une déclaration approuvée par la Conférence :

35« La science politique se développe à l’intérieur des cadres nationaux. Elle a été, dans chaque pays, marquée par la particularité des traditions historiques, des formes de l’enseignement, des systèmes constitutionnels, des structures sociales, des conceptions philosophiques. Pour une part, ces diversités sont légitimes. Chaque savant emprunte ses questions, ses conceptions directrices au milieu dans lequel il vit. Encore faut-il qu’il prenne conscience de ces particularités pour éviter le double péril de l’isolement et des préjugés. Le but de la collaboration internationale dans ce domaine n’est pas de substituer un objectif et une méthode uniques à la diversité des matières traitées et des méthodes utilisées. Les méthodes juridique, historique, philosophique, sociologique, psychologique et statistique ont toutes été appliquées avec succès à l’étude des idées et des institutions politiques ; d’autre part, les sujets examinés diffèrent considérablement de pays à pays. Le but de la coopération est d’aider chaque savant à connaître les développements de la science politique dans les autres pays afin d’élargir ses perspectives et de faciliter la compréhension mutuelle. » (unesco, 1949c, p. 29-30).

36La deuxième décision concernait, pour l’essentiel, la définition des paramètres de la discipline et le classement de ses champs d’investigation. Il fut décidé que le terme « science politique » au singulier (en France et ailleurs le pluriel « sciences politiques », de sens plus général, était communément utilisé) était l’appellation appropriée de la discipline et, bien que la question de la signification du mot « science » ait été laissée en suspens, le domaine du « politique » a été interprété comme couvrant un nombre de sujets assez bien définis. Ces sujets ont été classés de la manière suivante :

37« I. Théorie politique : (1) La théorie politique ; (2) l’histoire des idées politiques ;

38II. Institutions politiques : (1) la constitution ; (2) gouvernement central ; (3) gouvernement régional et local ; (4) administration publique ; (5) fonctions économiques et sociales du gouvernement ; (6) institutions politiques comparées ;

39III. Partis, groupements et opinion publique : (1) les partis politiques ; (2) groupes et associations ; (3) la participation du citoyen au gouvernement et à l’administration ; (4) l’opinion publique ;

40IV. Relations internationales : (1) politique internationale ; (2) organisation et administration internationales ; (3) droit international » (unesco, 1949c, p. 30).

41Ce que cette liste a de remarquable est sa longévité en tant que principe d’organisation de la discipline au sein de l’aisp (et d’ailleurs aussi pour certains usages importants à l’extérieur). Elle a survécu jusqu’à nos jours avec des modifications mineures (notamment l’insertion d’une nouvelle première rubrique sur les méthodes et d’une dernière section sur les études nationales et régionales), puisqu’elle constitue le système de classification de Documentation politique internationale.

42C’est la troisième décision qui a eu les conséquences pratiques les plus grandes. Il a été décidé de convoquer en 1949 une conférence de spécialistes de la science politique dans le but de créer une association internationale de science politique qui devait contribuer à raffermir les liens culturels au sein de la discipline. Un comité restreint a été désigné pour prendre, en collaboration avec l’unesco, les mesures nécessaires à la préparation de la Conférence. Les membres initiaux du Comité préparatoire étaient Walter Sharp (États-Unis, président), John Goormaghtigh (Belgique, secrétaire), Raymond Aron (France) et William Robson (Royaume-Uni), auxquels viennent s’ajouter plus tard Angadipuram Appadorai (Inde) et Marcel Bridel (Suisse) (unesco, 1949b).

43La perspective de lancer avec succès la nouvelle association a été grandement confortée par la décision, prise par la Conférence générale de l’unesco à Beyrouth en décembre 1948, de charger le nouveau Directeur général d’encourager les initiatives de ce genre et par l’engagement de les soutenir financièrement. Le Directeur général de l’unesco, Jaime Torres Bodet, a dûment invité 23 spécialistes à la conférence qui s’est tenue du 12 au 16 septembre 1949 à Paris. Elle était présidée par Raymond Aron, les vice-présidents étant William Robson et Quincy Wright (États-Unis) et John Goomarghtigh, le secrétaire. La principale décision de la conférence a été d’approuver la constitution du nouvel organe. Il était prévu que cette décision prendrait effet, et donc que la nouvelle Association internationale de science politique verrait le jour, dès que quatre associations nationales auraient accepté de devenir membres collectifs de l’association. La conférence a aussi élaboré un ambitieux programme de travail à l’intention de la nouvelle association et un comité exécutif provisoire de 12 membres a été désigné.

44Le Comité a à son tour élu Quincy Wright président, Marcel Bridel et Denis Brogan (Royaume-Uni) vice-présidents et François Goguel secrétaire exécutif et trésorier (unesco, 1949a). L’Association a vu officiellement le jour plus tard dans la même année, après que quatre associations internationales se furent affiliées en tant que membres collectifs : celles du Canada, de la France, de l’Inde et des États-Unis (unesco, 1949a).

45L’histoire ultérieure de l’aisp est trop riche et complexe pour être résumée ici, mais certains points saillants méritent d’être notés. Du point de vue organisationnel, après avoir été une fédération d’associations nationales (dont plus de 40 sont devenues finalement membres collectifs), elle est désormais un organisme beaucoup plus complexe avec plus de 100 membres institutionnels ou « associés » (en général, des départements universitaires, des centres ou instituts de recherche) et plus de 1 000 membres individuels. En vertu de ses statuts, l’Association continue néanmoins d’être largement tributaire des associations nationales qui en sont les éléments constitutifs de base et son Comité de direction reflète cet état de choses. Cela a facilité le maintien de l’équilibre entre les différentes régions du monde au sein de l’organe directeur de l’Association (trait particulièrement important pour la préservation des liens avec le bloc communiste durant la guerre froide), ainsi qu’une rotation régionale pour le poste de président de l’Association [5].

46Comme pour d’autres organes comparables, la principale activité de l’aisp est son congrès mondial. L’année suivant sa fondation, en 1950, elle a organisé son premier congrès mondial à Zurich, conjointement avec la nouvelle Association internationale de sociologie. Deux années plus tard, un congrès de plus grande ampleur a été organisé à La Haye. Depuis lors, un congrès mondial a eu lieu tous les trois ans, initialement toujours en Europe : Stockholm (1955), Rome (1958), Paris (1961), Genève (1964), Bruxelles (1967) et Munich (1970). Le premier congrès hors d’Europe a eu lieu à Montréal en 1973. Après un retour en Europe (Edimbourg) en 1976, le premier congrès en Europe de l’Est s’est déroulé à Moscou en 1979. Après cette date, les deux derniers congrès européens (Paris en 1985 et Berlin en 1994) furent l’exception : deux congrès ont eu lieu en Amérique du Sud (Rio de Janeiro en 1982 et Buenos Aires en 1991), deux en Amérique du Nord (Washington en 1988 et Québec en 2000), et le premier congrès de l’aisp en Asie (Séoul) s’est tenu en 1997 et le premier congrès en Afrique (Durban) en 2003 [6]. Bien entendu, l’aisp organise de nombreuses réunions d’un autre genre dans l’intervalle des congrès mondiaux. Les réunions de loin les plus nombreuses sont organisées par les comités de recherche de l’Association dont le nombre a atteint 40 ces dernières années.

47La production la plus visible de l’aisp est sa gamme de publications. Après sa fondation, le premier souci de l’Association a été d’organiser ses congrès plutôt que de publier : elle était tributaire à la fois de ses membres collectifs – les associations nationales de science politique et de divers autres éditeurs pour assurer la rédaction et la production des revues professionnelles nécessaires à la discipline, bien qu’elle ait fini par lancer sa propre collection d’ouvrages. Dans ses premières années, l’aisp pouvait compter sur la revue trimestrielle de l’unesco, le Bulletin international des sciences sociales, fondé en 1949 à la fois pour informer des faits nouveaux se produisant au sein de l’Association et pour publier les communications présentées aux congrès de l’aisp. À partir du volume 11 (1959), le Bulletin a été rebaptisé Revue internationale des sciences sociales. Comme elle ne produisait pas elle-même de revue, l’aisp a d’abord diffusé à prix réduit le Bulletin, puis la Revue à l’intention de ses membres individuels ; c’était un des avantages du statut de membre. En 1977, toutefois, elle a commencé à éditer son propre bulletin d’information et, en 1980, a lancé la revue trimestrielle intitulée Revue internationale de science politique, qui est maintenant un périodique professionnel d’importance majeure. Toutefois, le plus grand succès de l’aisp a été Documentation politique internationale. Datant de 1951, cet organe paraît maintenant six fois par an et s’est imposé comme principal outil bibliographique de la discipline (il est disponible sur cd-rom depuis 1995 et peut aussi être consulté sur Internet).

Conclusion

48Il serait exagéré de décrire simplement l’aisp comme une organisation qui a surgi des cendres de la Deuxième Guerre mondiale. Pourtant, comme on l’a montré ici, les circonstances entourant sa naissance sont politiques au plein sens du terme ; les horreurs de la destruction physique et humaine d’une bonne partie de la planète et le choc créé par la révélation du potentiel d’inhumanité dissimulé au cœur même des groupes dépositaires du pouvoir politique étaient encore frais dans les esprits de tous ceux qui les avaient vécus. En sa qualité de premier président de l’aisp, Quincy Wright s’exprimait ainsi à la toute première réunion de la nouvelle association : « Ce qui a provoqué la création de notre Association, c’est la corruption de la politique par la tyrannie inhumaine et par la guerre totale qui ont et pourront avoir encore des conséquences désastreuses pour le monde entier. L’idéal auquel notre Association aspire est d’éliminer cette corruption par l’application de la méthode scientifique à la solution des problèmes politiques. »

49Il serait difficile d’imaginer programme plus difficile ou objectif plus noble. Wright a été lui-même le premier à admettre l’ampleur du défi. Il poursuivait son allocution en formulant une question qui se posait depuis un demi-siècle et qui continuerait à se poser un demi-siècle plus tard, mais sur laquelle il n’y a toujours pas d’accord : « Une science de la politique est-elle possible ? » Pour Wright et ses collègues doués de vision, la réponse consistait à rejeter l’incompatibilité entre art et science.

50Les sujets traités dans bon nombre des travaux ultérieurs de l’aisp pourraient conduire l’observateur à conclure que ce grand objectif a été perdu de vue. Les statuts de l’aisp, après tout, définissent ses buts fondamentaux bien plus modestement et le travail quotidien de l’Association reflète davantage des préoccupations relatives au développement organisationnel de la profession que le souci de trouver le chemin de la paix mondiale. La formation d’associations nationales de science politique a été encouragée, de même que le dialogue et les débats à l’occasion des congrès mondiaux et de tables rondes de moindre portée, des services de bibliographie et de résumés analytiques ont été lancés et un effort systématique déployé pour offrir aux politistes des facilités de publication rendant la communication plus aisée entre eux. À mesure que l’Association gagnait en maturité, un réseau impressionnant de comités de recherche permanents et de groupes d’études s’est constitué et l’Association a commencé à publier une revue qui devait figurer rapidement parmi celles qui jouissent de la plus grande notoriété dans la discipline.

51Dans ces différentes activités, l’aisp foulait un sentier bien balisé, familier à de nombreux organismes savants internationaux, et son histoire ultérieure montre qu’elle a exceptionnellement bien réussi à marquer de son empreinte la communauté mondiale d’érudits sur laquelle elle s’appuie de manière privilégiée. Il est fort possible qu’en longue période d’autres forces mondiales aient pu aider à lever les obstacles à la communication internationale, mais l’aisp a certainement accéléré les choses. Les pas de géant faits dans l’évolution intellectuelle de la discipline auraient sans doute pu être l’aboutissement du seul travail des différents réseaux de spécialistes, mais il faut reconnaître à l’aisp le mérite d’avoir largement facilité et encouragé le processus. La recherche en science politique aurait pu facilement trouver d’autres mécanismes pour élargir la diffusion de ses travaux, mais l’aisp a très tôt favorisé une politique de publication et elle continue d’attacher une grande importance à son indispensable base de données, Documentation politique internationale, qui a d’ailleurs un caractère unique. L’impact de l’aisp sur le développement intellectuel de la discipline, très visible pendant les années 1950 et 1960, est peut-être maintenant plus difficile à détecter, mais sa discrétion ne lui ôte pas sa vigueur.

52Il serait bien entendu tant injuste qu’inexact de ne pas reconnaître le rôle d’autres organismes dans la promotion des idéaux auxquels l’aisp s’est associée. Au-delà de ses organisations sœurs du domaine des sciences sociales et humaines, l’aisp a eu bon nombre d’objectifs en commun avec des organismes au profil plus large. De fait, elle a dès le début, pour des raisons déjà évoquées, entretenu des relations particulièrement chaleureuses avec l’unesco et le Conseil international des sciences sociales. Toutefois, il existe aussi d’autres organisations au champ d’activité plus restreint, au moins sur le plan géographique : les associations nationales de science politique qui ont joué un rôle si puissant dans la création et le fonctionnement de l’aisp. Bon nombre de ces associations jouissent d’un degré d’organisation professionnelle qui dépasse largement ce que l’aisp pourrait raisonnablement espérer et desservent des communautés cohérentes de politistes qui tranchent avec la composition diversifiée de l’Association. Certaines de ces communautés, comme l’American Political Science Association, ont elles-mêmes une composition et une influence internationales. Mais l’aisp continue de jouer dans le domaine de la science politique le même genre de rôle que les Nations Unies en matière de politique internationale : celui d’un organisme nécessaire pour que soit maintenu l’équilibre entre les régions et pour que les petites entités puissent faire (au moins) entendre leur voix à côté des grandes.

53Ces considérations nous éloignent de la formulation idéaliste de Quincy Wright citée plus haut. Le fait que nous puissions si facilement changer notre manière de voir est en soi éloquent : bien des horreurs, présentes dans la conscience des fondateurs de l’aisp, sont maintenant des souvenirs un peu lointains, même si de récents conflits montrent que ce processus d’oubli peut être la conséquence d’une forme de myopie. La vérité est que la perspective d’un conflit mondial entre États s’est éloignée et que les générations récentes de politistes se sont intéressées à des questions plus prosaïques. Cependant, des événements récents nous rappellent que des conflits d’une violence effrayante sont toujours possibles et qu’ils peuvent même revêtir le caractère terrifiant d’un « heurt de civilisations ». Si nous substituons les images de ces événements à celles des conflagrations de la première moitié du xxe siècle, les mots du premier président de l’aisp, rappelant son impression devant une photo des ruines de l’Alte Pinakothek de Munich, résument bien le défi fondamental qui reste lancé :

54« J’ai été vivement impressionné par un tableau saisissant du Tintoret où l’on voit Mars essayer de forcer le bonheur domestique de Vénus et de Vulcain. La mythologie classique admettait une sorte de rapport entre la guerre d’une part, et d’autre part l’amour et le travail… L’étude scientifique de Mars conduit à la science politique, celle de Vénus et de Vulcain aux sciences de la population et de la technique… Si la raison peut tenir Vénus en bride et empêcher l’accroissement des populations humaines… pourquoi cette même raison ne pourrait-elle aussi tenir Mars en bride, et si les conflits sont inévitables entre les valeurs, les cultures et les principes d’action différents de groupes humains, les limiter du moins à l’emploi de méthodes qui permettront à la société humaine universelle de continuer à vivre, de prospérer et de progresser ? Tel est le problème de la science politique. »

55Traduit de l’anglais

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  • WAGNER, P. 1999. « The twentieth century – the century of the social sciences? », dans Kazancigil et Makinson (1999), p. 16-41.
  • WALDO, D. 1975. « Political science: tradition, discipline, profession, science, enterprise », dans Fred I. Greenstein et Nelson W. Polsby (dir. publ.), Handbook of Political Science. Reading, Massachusetts, Addison-Wesley, vol. 1, p. 1-130.
  • WRIGHT, Q. 1951. « La signification de l’Association internationale de science politique : discours d’ouverture ». Bulletin international des sciences sociales, 3(2), p. 299-305.

Notes

  • [*]
    Cet article est basé sur Coakley et Trent (2000). L’auteur est reconnaissant de leurs commentaires sur des versions antérieures de l’article à Asher Arian, Klaus von Beyme, Robert E. Goodin, Serge Hurtig, Hans-Dieter Klingemann, Jean Laponce, Theodore J. Lowi, Richard L. Merritt et Guillermo O’Donnell.
  • [1]
    Une analyse critique des ouvrages existants serait déplacée ici mais, outre les autres travaux cités dans le présent article, un certain nombre d’études très vivantes de l’histoire de la discipline – et d’études de ces études – ont été publiées ; pour des exemples d’analyses approfondies et remarquablement complémentaires, voir Farr (1988), Dryzek et Léonard (1988), et Viltard (1999), qui lui-même s’appuie largement sur Farr, Dryzek et Léonard (1995).
  • [2]
    Pour des rapports sur l’état de la science politique en Europe durant la période allant jusqu’à 1996, voir Durand et Quermonne (1996).
  • [3]
    Ce dernier organisme a été reconstitué en 1978 sous le nom de Policy Studies Institute.
  • [4]
    Chiffres établis à partir de la liste des rapports dans unesco (1950a, p. 658-662).
  • [5]
    La liste des présidents fait clairement ressortir l’étendue de la domination occidentale au cours des premières années, mais cela devait ensuite changer : Quincy Wright (États-Unis, 1949-1952), William A. Robson (Royaume-Uni, 1952-1955), James K. Pollock (États-Unis, 1955-1958), Jacques Chapsal (France, 1958-1961), D. N. Chester (Royaume-Uni, 1961-1964) ; Jacques Freymond (Suisse, 1964-1967) ; Carl J. Friedrich (États-Unis, 1967-1970) ; Stein Rokkan (Norvège, 1970-1973) ; Jean Laponce (Canada, 1973-1976) ; Karl Deutsch (États-Unis, 1976-1979) ; Candido Mendes (Brésil, 1979-1982) ; Klaus von Beyme (Allemagne, 1982-1985) ; Kinhide Mushakoji (Japon, 1985-1988) ; Guillermo O’Donnell (Brésil, 1988-1991) ; Carole Pateman (États-Unis/Royaume-Uni, 1991-1994) ; Jean Leca (France, 1994-1997) ; Theodore J. Lowi (États-Unis, 1997-2000) ; Dalchoong Kim (Corée, 2000-2003), Max Kaase (Allemagne, 2003-).
  • [6]
    Un seul de ces congrès (Moscou, 1979) a fait l’objet d’une étude scientifique détaillée (Merritt et Hanson, 1989).
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