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Article de revue

L'Union européenne et l'Italie des années 2000, ou comment continuer à « aimer bien celui qui vous châtie bien »

Pages 619 à 637

Notes

  • [1]
    Les trois personnages cités sont l’auteur de livres vantant les mérites de l’intégration européenne (PRODI R., Un idea dell’Europa, Bologne, Il Mulino, 1999 ; NAPOLETANO G., Europa politica. Il difficile approdo di un lungo percorso, Rome, Donzelli, 2003 ; AMATO G.,La democrazia senza costituzione ? L’Europa e gli europei dopo i referendum, Milan, CLUEB, 2007.
  • [2]
    Littéralement, le « lien extérieur ».
  • [3]
    Littéralement, « arc constitutionnel ».
  • [4]
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 67 – Rapporto nazionale Italia, 2007b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
  • [5]
    Les élections du printemps 2008 ont privé de représentation parlementaire pour la première fois depuis l’avènement de la République en 1946 les partis se réclamant du communisme, et les néofascistes qui ne sont pas ralliés à S. Berlusconi ne sont pas représentés au Parlement.
  • [6]
    TAGGART P., « A Touchstone of Dissent : Euroscepticism in Contemporary Western European Party Systems », European Journal of Political Research, vol. 33, 1998, p. 363-388.
  • [7]
    HIX S., What’ Wrong with the European Union and How to Fix It, Cambrige, Polity, 2008.
  • [8]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007.
  • [9]
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 56 Report, 2002a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 57 – National Standard Report. Italy, 2002b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 58 – National Standard Report. Italy, 2003a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 59 – National Standard Report. Italy, 2003b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 60 – National Standard Report. Italy, 2004a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 61 – National Standard Report. Italy, 2004b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 62 – Rapporto nazionale Italia, 2005a,disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 63 – Rapporto nazionale Italia, 2005b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 64 – Rapporto nazionale Italia, 2006a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 65 – Rapporto nazionale Italia, 2006b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 66 – Rapporto nazionale Italia, 2007a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.
  • [10]
    ISERNIA P., « L’Europa vista dagli italiani : vent’anni dopo », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [11]
    Sur le choix de cette définition, nous renvoyons à nos travaux précédents sur le sujet, BOUILLAUD C., « L’euroscepticisme partisan lors des élections européennes de juin 2004. Un premier essai d’estimation et d’explication », in DELWIT P. et POIRIER P., (dir.), Parlement puissant, électeurs absents ? Les élections européennes de juin 2004, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2005 ; BOUILLAUD C., « Italie », in DÉLOYE Y., (dir.), Dictionnaire des élections européennes, Paris, Économica, 2005 ; BOUILLAUD C., « Voter contre l’intégration européenne dans l’enceinte du Parlement européen comme indicateur robuste d’euroscepticisme (2005-07) », in NEUMAYER L., ROGER A., ZALEWSKI F., (dir.), L’Europe contestée. Espaces et enjeux des positionnements contre l’intégration européenne, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008, p. 158-184.
  • [12]
    BOUILLAUD C., « La législation italienne des années 2001-2005 porte-t-elle la marque des nouvelles droites ? », in DELWIT P. et POIRIER P., (dir.), Extrême droite et pouvoir en Europe. The Extreme Right Parties and Power in Europe », Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2007.
    BOUILLAUD C., « Voter contre l’intégration européenne dans l’enceinte du Parlement européen comme indicateur robuste d’euroscepticisme (2005-2007) », in NEUMAYER L., ROGER A., ZALEWSKI F., (dir.), L’Europe contestée. Espaces et enjeux des positionnements contre l’intégration européenne, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008, p. 158-184.
  • [13]
    BELLUCCI P., « La reazione dell’élite politica italiana di fronte all’integrazione europea alla fine degli anni’90 », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [14]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2007.
  • [15]
    Pour une présentation en terme « eurosceptiques » de la politique étrangère du gouvernement de S. Berlusconi en 2001-2006, cf. RAYNER H., L’Italie en mutation, Paris, La Documentation française, 2007, p. 78-84.
  • [16]
    Pour un récit pondéré de la séance par un opposant de S. Berlusconi, cf. ALBORGHETTI G., Il libro nero del governo Berlusconi, Rome, Nutrimenti, 2005, p. 407-412. Cette séance du 2 juillet 2003 au Parlement européen siégeant à Strasbourg est citée dans la phrase d’introduction de la synthèse de Gillepsie et Laffan sur l’identité européenne comme l’exemple inusité d’expression d’un sentiment nationaliste dans les enceintes européennes. Nous doutons fortement de cette interprétation, mais nous y trouvons l’écho académique du choc médiatique que cette répartie berlusconienne provoqua. (GILLESPIE P., LAFFAN B., « European Identity : Theory and Empirics », in CINI M., BOURNE A. K., (dir.), Palgrave Advances in European Union Studies, Houndmills, Basingskoke and Hampshire and New York, Palgrave, 2006.
  • [17]
    Le Commissaire italien pressenti pour participer à la Commission Barroso en 2004, Rocco Buttiglione, philosophe de profession, proche du mouvement catholique Comunione & Liberazione, qui fut refusé par les eurodéputés lors des auditions pour ses déclarations perçues comme particulièrement homophobes et misogynes, était pourtant l’un des leaders de l’UDC, donc du parti a priori le plus europhile de la coalition au pouvoir. Il était d’ailleurs Ministre des Affaires communautaires depuis 2001, poste ministériel créé récemment en Italie qui témoigne de l’européanisation des politiques publiques dans le pays. Il ne s’agissait donc pas d’un désaccord sur l’idée d’intégration européenne en elle-même, mais, là encore, d’une incompatibilité des styles politiques.
  • [18]
    Lors de ces élections de 1996, la LN n’est pas encore sur un discours eurosceptique, au contraire.
  • [19]
    . Score de la liste « Sinistra Arcobaleno » (SA) (Gauche Arc-en-Ciel), qui regroupe le PRC et le PCDI dont les représentants votent contre la Constitution au Parlement européen et la Fédération des Verts et des scissionnistes des Démocrates de gauche qui ont soutenu le processus constitutionnel européen. Il existe trois petites listes à gauche de SA qui ont recueilli autour de 1 % des voix.
  • [20]
    Ce point constitue une évolution par rapport à des données datant de 1997, cité dans Bouillaud et Pujas, qui montraient un plus fort gradient droite/gauche dans l’appréciation de l’UE. Cf. BOUILLAUD C., PUJAS V., « Entre utopie et contrainte : l’opinion publique italienne face à l’Europe », in CAUTRÈS B. et REYNIÉ D., (dir.), L’Opinion européenne 2002, Paris, PFNSP, 2002.
  • [21]
    Nous n’avons pas reproduit en annexe de tels résultats obtenus en explorant les données d’EB 64, tant ils nous ont paru banals pour le cas italien. Pour une conclusion similaire, voir Commission européenne, op. cit., 2007b.
  • [22]
    RAYNER H., L’Italie en mutation, Paris, La Documentation française, 2007.
  • [23]
    Le cas des néofascistes nous procure moins d’exemples de cette séparation entre enjeux européens et constitution des coalitions gouvernementales dans la mesure où leurs divisions en multiples groupements depuis la rupture postfasciste du Congrès de Fiuggi de janvier 1995 qui a donné naissance à AN à partir du MSI les a empêché d’avoir un poids électoral et politique suffisant pour que leur ralliement à une majorité de gouvernement soit indispensable au centre-droit. On remarquera toutefois qu’Alessandra Mussolini a rejoint avec son petit groupe de partisans les listes du PDL aux dernières élections, malgré sa participation au Parlement européen en 2007 à l’éphémère aventure du groupe d’extrême-droite ITS (Identité, Tradition, Solidarité), groupe particulièrement hostile au Traité de Lisbonne.
  • [24]
    Au sens nouveau que donne à ce terme la législation européenne en la matière de 2003.
  • [25]
    Cf. pour des récits circonstanciés de cette crise, et de sa répétition générale en 1997 : LEGRENZI P., « La crisi di ottobre del governo Prodi », in BARDI L. et RHODES M., (dir.), Politica in Italia. Edizione 98, Bologne, il Mulino, 1998 ; MASSARI O., PARKER S., « Le due sinistre tra rotture e ricomposizioni », in HINE D. et VASSALLO S., (dir.), Politica in Italia. Edizione 99, Bologne, il Mulino, 1999 ; TRANFAGLIA N., La transizione italiana. Storia di un decennio, Milan, Garzanti, 2004.
  • [26]
    Voir, par exemple, Ginsborg (GINSBORG P., L’Italia del tempo presente. Famiglia, società civile, Stato, Turin, Einaudi, p. 451-470, 1998) qui, malgré son intérêt pour le sujet de l’intégration européenne, ne consacre que quelques pages au sujet européen, dans sa somme de prés de 600 pages sur l’Italie contemporaine ou Colarizi (COLARIZI S., Storia politica della Repubblica 1943-2006, Laterza, Bari, 2007.
  • [27]
    CONTI N., VERZICHELLI L., « La dimensione europea del discorso politico in Italia : un’analisi diachronica delle preferenze partitiche (1950-2001) », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [28]
    L’article commence significativement par la phrase suivante : « Les élections européennes des 12-13 juin 2004 et les élections provinciales tenues au même moment ont eu une grande importance pour la politique italienne » (notre traduction). Tout l’article confirme amplement notre analyse de l’année précédente : rien dans l’élection européenne de 2004 en Italie ne fut européanisé. BOUILLAUD C., « Italie : une élection européenne italianissime », Revue politique et parlementaire, n°1031, juillet-août-septembre 2004 ; DONOVAN M., « Gli equilibri politici dopo le elezioni di giugno », in GUARNIERI C. et NEWELL J. L., (dir.), Politica in Italia. Edizione 2005, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [29]
    DIAMANTI I., Bianco, rosso, verde… e azzurro. Mappe e colori dell’Italia politica, Bologne, il Mulino, 2003 ; DIAMANTI I., La geografia politica di Silvio Berlusconi. Mappe 19/05/08, 2008, disponible sur www. demos. it (consulté le 03/09/08).
  • [30]
    BOBBIO L., « La dissociation italienne. Le monde du décisionnisme majoritaire et celui de la concertation », Pôle sud, n°19, novembre 2003.
  • [31]
    Si l’on exclut les groupuscules à moins de 0,3 / 0,4 % des voix au niveau national. Même parmi les quelques dizaines de micro-entreprises politiques cherchant à émerger dans le jeu politique (ou refusant leur caducité) à chaque élection nationale, il est en fait difficile d’identifier des discours résolument anti-européens. Au contraire, ces tentatives, surtout quand elles se situent au centre, comprennent souvent l’adjectif « européen » dans leur raison sociale.
  • [32]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2002b.
  • [33]
    ALBORGHETTI G., Il libro nero del governo Berlusconi, Rome, Nutrimenti, 2005.
  • [34]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2004.
  • [35]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.
  • [36]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2004 ; BOUILLAUD C., op. cit., 2005.
  • [37]
  • [38]
    Le temps d’antenne est la somme du temps, du temps de nouvelle (où l’on parle du sujet en question) et du temps de parole (où le sujet s’exprime directement). Les scores des temps de parole pour l’UE sont encore plus faibles en proportion.
  • [39]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.

1Au lendemain du Conseil européen des 21-22 juin 2007, les principaux dirigeants du centre-gauche italien rappelèrent que « la Constitution européenne » demeurait leur solution préférée. Giorgio Napoletano, l’octogénaire président de la République, en poste depuis le printemps 2006, premier ex-communiste à occuper ce poste depuis sa création en 1948, s’était déjà inquiété pendant les négociations de la perte de l’élan européen. Le négociateur du compromis pour l’Italie, Romano Prodi, Président du Conseil en fonction lui aussi depuis le printemps 2006 et par ailleurs ancien Président de la Commission européenne (1999-2004), fit remarquer que l’esprit européen tendait à se perdre face aux égoïsmes nationaux. Giuliano Amato, Ministre de l’Intérieur de ce même gouvernement Prodi, deux fois Président du Conseil auparavant, vice-Président de la Convention européenne dirigée par Valéry Giscard d’Estaing et ayant rédigé de ce fait une bonne part du texte même de la Constitution, regretta quant à lui que l’on fasse passer son contenu en contrebande de l’opinion, et que l’on ait abandonné tout symbole d’unité européenne allant dans le sens d’un fédéralisme à venir [1]. Cette position des élites du centre-gauche s’inscrit dans la continuité d’une politique d’ajustement socio-économique de l’Italie, via le vincolo esterno[2] européen, menée avec constance depuis le début des années 90 par tous les dirigeants du centre-gauche issus des partis l’ancien arco costituzionale[3] des années 1970-1980 (Démocratie-Chrétienne [DC], Parti Républicain Italien [PRI], Parti Social-Démocrate Italien [PSDI], Parti Socialiste Italien [PSI], Parti Libéral Italien [PLI] au centre et Parti Communiste Italien [PCI] à gauche) (Rivière, 2004).

2Ces regrets trouvent sans doute un écho dans le grand public : selon le sondage Eurobaromètre de mai 2007, témoignant plus généralement d’un regain europhile en Italie, 72 % des enquêtés se déclaraient favorables à une Constitution pour l’Europe et 79 % voyaient dans le drapeau européen un symbole positif (Commission européenne [4]). L’opposition de centre-droit elle-même se déclara satisfaite du compromis obtenu, et en son sein, seule la Lega Nord (Ligue du Nord) [LN] réitéra son opposition au contenu du nouveau Traité d’intégration européenne. La ratification par le Parlement italien du Traité de Lisbonne apparaît dès ce moment comme un non-événement quelles que soient les péripéties à venir de la politique italienne : seuls les extrêmes – néo-fascistes, néo-communistes et partisans de la LN – proclament leur hostilité à cette intégration européenne-là. En effet, aucun de ces extrémismes ne se réfère à un espace territorial de référence qui ne soit pas par définition « européen » : les néo-communistes ne veulent certes pas de l’« Europe néo-libérale du capital » incarnée, selon eux, dans les politiques présentes de l’UE, mais ils appellent de leurs vœux celle des « travailleurs », les néo-fascistes veulent l’« Europe des Patries », et les défenseurs autoproclamés de l’Italie du nord veulent eux d’une (bien mal définie au demeurant) « Europe des Peuples ». Ces derniers, revenus au pouvoir depuis peu et malgré le soutien de leurs militants au vote négatif irlandais du 12 juin 2008, finiront d’ailleurs par voter le 31 juillet 2008 la ratification du Traité de Lisbonne, ceci au nom de la solidarité gouvernementale. La LN, le parti le plus eurosceptique en paroles depuis 1998, assure ainsi l’unanimité des députés italiens en faveur du Traité de Lisbonne [5]. La situation des partis italiens vis-à-vis des affaires européennes semble alors correspondre parfaitement à la motivation alléguée par Paul Taggart [6] à l’« euroscepticisme » d’un parti, à savoir que ce dernier constitue « a touchstone of dissent », un moyen pour une force le plus souvent exclue des bénéfices du gouvernement ou en émergence dans un système politique national d’affirmer son particularisme sur le marché électoral face à des forces politiques exerçant ou ayant la perspective d’exercer le pouvoir à l’échelle nationale et donc européenne.

3Plus encore, la période qui s’ouvre en 1993 de restructuration des équilibres politiques et institutionnels en vue de définir une « Seconde République » n’est pas marquée par des résistances partisanes à l’intégration européenne telles qu’elles puissent constituer un élément central du compte-rendu de la politique italienne. Dans ce scénario d’une transition à ce jour inachevée entre « Première République » et « Seconde République » – et sans doute inachevable tant que S. Berlusconi n’aura pas quitté définitivement la scène ou bouleversé définitivement les équilibres antérieurs en faveur de son camp –, l’intégration européenne ne tient qu’un rôle mineur, ou plutôt ne constitue que le décor de l’interminable tragi-comédie qui se joue. On pourrait s’en étonner dans la mesure où, par ailleurs, les sondages Eurobaromètres montrent tout au long de ces années un affaiblissement de l’européisme déclaratif des Italiens. Comme le fait remarquer Simon Hix, l’Italie est le pays de l’UE où, de 1991 à 2006, le soutien à l’appartenance à cette dernière baisse le plus fortement (de 25 %), en s’établissant désormais autour de la moyenne européenne [7]. En mai 2007 [8], seuls 51 % des Italiens voyaient l’appartenance de l’Italie à l’UE comme une bonne chose, 58 % en avaient une image positive, et seulement 48 % pensaient que leur pays avait bénéficié de son appartenance à l’UE.

4Une des raisons majeures de cet affaiblissement de l’européisme déclaré des Italiens pendant la dernière décennie tient sans grand doute possible aux vicissitudes économiques liées à l’introduction physique de la monnaie européenne au 1er janvier 2002. Ce changement de monnaie a en effet provoqué en Italie une « crise des classes moyennes » dont la presse à grand tirage s’est largement fait l’écho : en effet, une forte hausse de l’inflation a été ressentie par les salariés et les retraités. L’ISTAT, l’organisme public en charge des statistiques, n’a calculé lui au même moment qu’une progression très modérée des prix à la consommation cohérente avec les objectifs de maîtrise de l’inflation de la BCE. Les données Eurobaromètres sur l’Italie sont toutefois explicites sur ce point [9], (entre le printemps et l’automne 2002), l’opinion publique exprime un fort désenchantement vis-à-vis de l’UE, qui se poursuit sur les années suivantes et qui n’est pas complètement résorbé à ce jour. Le public italien attribue clairement comme défaut à l’Europe son incapacité à maîtriser les prix. Il y là la répétition d’un scénario déjà connu [10] : en effet, le public italien avait déjà accusé le coup (ou le coût plutôt) à la suite de la politique de rigueur liée au Traité de Maastricht menée en 1992-1994, et, lors de celle de « qualification à l’Euro », menée par R. Prodi, en 1996-1998. À compter de 2002, pour la troisième fois, une majorité d’Italiens a été confronté à un « objet européen » qui ne répond pas à leurs attentes. Les années les plus récentes voient la montée en puissance d’un discours, assez partagé à droite comme à gauche, aussi bien chez les entrepreneurs que chez les syndicalistes, présent aussi bien chez les universitaires et chez l’homme de la rue, d’interrogation alarmée sur la place future de l’Italie dans la mondialisation. Dans cette grande inquiétude montante, l’UE n’apparaît guère comme une ressource : au mieux, surtout au centre-gauche, c’est une contrainte nécessaire pour ne pas faire pire.

5En somme, à première vue, on pourrait penser que les conditions étaient réunies pour que des partis politiques profitent de cette crise de confiance vis-à-vis de l’UE pour développer un euroscepticisme italien, et ce d’autant plus que celle-ci tient tout au long de ces années 1993-2008 le rôle du grand censeur des politiques publiques menées en Italie. Il n’y a en effet du point de vue des bonnes pratiques promues par le consensus européen rien ou presque à sauver en Italie : le niveau de la dette publique est toujours largement au-delà des critères du Traité de Maastricht ; les dépenses sociales sont orientées plus vers l’assistance aux personnes âgées que vers la jeunesse, les familles, les chômeurs et les exclus ; le niveau de dépense en R & D, publique comme privé, reste loin du seuil des 3 % du PIB ; le nombre de diplômés de l’enseignement supérieur stagne ; les taux d’activité des femmes et des plus de 50 ans peinent à s’aligner sur les critères de la « stratégie de Lisbonne » ; le secteur des services est réputé peu concurrentiel, pour ne pas dire cartellisé ; une bonne moitié du territoire reste marquée par les criminalités organisées parmi les plus virulentes de la planète. On pourrait multiplier les exemples – dont la récente « crise des ordures » dans la région de Naples n’est que l’épisode le plus médiatisé. L’Italie paraît toujours à la traîne d’un ensemble européen où l’excellence en matière de politiques publiques se définit en dehors d’elle. Le rebond économique des années 1993-2000 lui-même n’a été obtenu qu’avec l’aide d’une dévaluation compétitive des plus contraires à l’esprit de gestion coopérative d’une économie nationale dans le cadre européen. Comment rendre compte de cette situation qui pourrait porter à l’euroscepticisme et où, pourtant, ce dernier ne tend pas à structurer la vie politique ? Comment aboutit-on à ce vote unanimement proeuropéen du 31 juillet 2008 ?

Faux semblants eurosceptiques du « Berlusconisme » et absence de dynamique des euroscepticismes italiens

6Si nous choisissons [11] de définir l’euroscepticisme en tant que force politique comme l’attitude qui consiste, d’une part, à tenir publiquement des discours qui déclarent une opposition à ce qui se trouve à l’agenda principal de l’intégration européenne au moment où ils sont émis, mais aussi, d’autre part, à poser des actes – votes dans une enceinte parlementaire, appel à un vote en un certain sens des électeurs, recueil de signatures pour obtenir un référendum par exemple – qui s’opposent à la mise en œuvre de cet agenda principal, on constate d’abord que des forces eurosceptiques sont pourtant bien présentes en Italie.

7En effet, si l’agenda principal demeure pour la période récente l’adoption d’une Constitution (ou d’un ersatz de cette dernière à compter de juin 2007), la LN et les petites forces néo-fascistes à droite et le Partito della Rifondazione comunista (Parti de la refondation communiste) [PRC] à gauche s’opposent par leurs discours et leurs actes à une telle évolution. Ils votent dans l’enceinte du Parlement national et du Parlement européen systématiquement contre tout texte favorable à cette Constitution ou à sa suite logique. Le vote de la LN du 31 juillet 2008 constitue le reniement de dix ans d’activisme antieuropéen. Toutes les autres forces politiques, représentées dans l’un des deux Parlements, votent systématiquement pour la Constitution européenne ou le Traité de Lisbonne. Ainsi, si l’on observe leurs votes sur la période 2004-2008 en la matière [12], Forza Italia (Allez l’Italie) [FI], le parti de S. Berlusconi et Alleanza Nazionale (Alliance nationale)[AN], le parti « post-fasciste », tous deux parfois qualifiés d’« eurosceptiques soft », s’avèrent par leurs actes des soutiens solides de celle-ci aussi bien au sein du Parlement italien que du Parlement européen : FI, membre du Parti Populaire Européen (PPE) depuis 1998, suit avec rigueur la ligne de ce dernier en matière institutionnelle ; pour ce qui est d’AN, Gianfranco Fini, son chef dont le destin s’identifie largement à celui de ce parti « postfasciste » de 1993 à 2008, participe en tant que Ministre des Affaires étrangères à la phase finale de l’élaboration du compromis obtenu au sein de la Convention pour l’avenir de l’Europe, il se reconnaît donc entièrement dans les solutions retenues.

8Une étude par questionnaires auto-administrés sur les attitudes des députés italiens vis-à-vis de l’intégration européenne [13] confirme d’ailleurs que, revenus au pouvoir en 2001, les députés nationaux du centre-droit se déclaraient dès 2002 désormais presque aussi intégrationnistes que ceux du centre-gauche, dont l’attitude proeuropéenne constitue pourtant l’un des principaux éléments distinctifs depuis 1994. Seuls les députés de la LN à droite et du PRC à gauche exprimaient alors un désaccord avec le consensus intégrationniste (les néo-fascistes ne sont pas représentés significativement au Parlement italien pour être inclus dans l’enquête).

9Les second et troisième gouvernements Berlusconi (2001-2006), qui regroupent FI, AN et LN, mais aussi l’Unione dei Democratici Cristiani e di Centro (Union des Démocrates chrétiens et du Centre) [UDC] qui hérite directement de la tradition europhile de la Démocratie Chrétienne (DC), sont parfois accusés de marquer une rupture dans les choix proeuropéens des gouvernements italiens. Or, en pratique, si l’on examine l’ensemble de leur législation [14], ces gouvernements furent aussi proeuropéens que les précédents gouvernements italiens, au sens où ils transposèrent, autant que possible vu les embarras des mécanismes parlementaires italiens, les décisions européennes, même celles d’ailleurs qu’ils avaient éventuellement refusées dans un premier temps (le mandat d’arrêt européen en particulier).

10L’impression de moindre soutien du centre-droit italien à l’intégration européenne tient en fait essentiellement à quelques faits médiatisés. Les incartades de Silvio Berlusconi, y compris pendant le Semestre italien de Présidence du Conseil européen en 2003, dont la presse internationale s’est fait largement l’écho, ne tiennent pas à un refus de l’intégration européenne en elle-même, puisque ses gouvernements ni ne bloquent le fonctionnement des instances européennes, ni n’arrêtent de transposer le droit européen dans la législation italienne. Il existe par contre, surtout en 2001-2003, une crainte d’une instrumentalisation du niveau européen pour déstabiliser le gouvernement de centre-droit et son chef : S. Berlusconi étant en conflit ouvert avec la magistrature italienne, et ayant des intérêts économiques ailleurs en Europe, il tend à transposer ce conflit à l’échelle européenne et d’y refuser là aussi le « gouvernement des juges ». De même, la loi de réorganisation de l’audiovisuel adoptée par le centre-droit en 2005, dite « loi Gasparri », déclenche un conflit d’interprétation sur sa compatibilité avec le droit européen en la matière : là encore, le conflit ne tient pas tant à l’Europe en soi – le centre-droit se targue d’ailleurs d’avoir respecté en substance le droit européen –, qu’à la crainte que l’Europe serve à renverser un rapport de force, établi au niveau italien, dans une matière qui touche à l’intérêt personnel de S. Berlusconi lui-même.

11Cette même attitude se retrouve en matière économique et financière : Giulio Tremonti, ministre de l’Économie pendant la plus longue partie des deuxième et troisième gouvernements Berlusconi, n’a cessé de batailler contre la Commission européenne sur l’état réel des comptes publics italiens et de demander la révision du « Pacte de stabilité et de croissance » adopté à Amsterdam en 1997 en un sens plus favorable à ce qu’il considérait être les intérêts italiens, mais il n’a jamais contesté sur le fond la nécessité d’une coordination européenne des politiques économiques, bien au contraire, il a tenté de proposer son propre plan global de politique économique à l’UE.

12Le gouvernement de S. Berlusconi se situe par ailleurs clairement dans le camp de la « Nouvelle Europe » en 2003, au côté du gouvernement conservateur d’Aznar, du gouvernement néo-travailliste de Blair, et des autres pays européens signataires de l’appel à soutenir les États-Unis dans leur entreprise irakienne (la « Nouvelle Europe »). Cependant, il ne s’agit pas là pour nous d’un indicateur d’euroscepticisme, dans la mesure où les soutiens de l’entreprise américaine en Irak ont toujours déclaré qu’il y allait des intérêts vitaux de l’Europe démocratique de renverser le régime baasiste. Autrement dit, en tant qu’analyste, nous ne pouvons dire où est l’intérêt de l’Europe, et qui seraient en conséquence les « bons Européens » et les « mauvais Européens ». De même, il ne faut pas confondre les affirmations proaméricaines, prorusses et aussi pro-israéliennes de S. Berlusconi dans le contexte de l’après 11 septembre 2001 avec de l’euroscepticisme, sauf là encore à se faire l’arbitre de la « vraie Europe » [15].

13De même, l’incapacité à conclure les négociations sur la Constitution pendant le semestre italien de Présidence de l’UE ne tient pas à un choix de S. Berlusconi, qui aurait bénéficié d’une heureuse issue. L’impression d’une rupture entre S. Berlusconi et « l’Europe » tient essentiellement à un usage plus libre de la langue politique en Italie, à la télévision, au Parlement ou dans les meetings, que dans les enceintes européennes. Ainsi quand S. Berlusconi, déjà bien connu en Italie pour ses blagues d’un goût douteux, réplique lors de son passage au Parlement européen en juillet 2003 (au tout début du Semestre italien de Présidence de l’UE) à l’eurodéputé allemand social-démocrate Martin Schulz, alors vice-président du groupe du Parti Socialiste Européen (PSE), en lui proposant un rôle de « kapo » dans un film à tourner en Italie [16], il ne fait là qu’utiliser le langage désormais habituel de la vie politique italienne et ce depuis le début des années 90. Ce dernier, qu’on trouve aussi bien au Parlement et dans les réunions que dans les talk-shows, se situe en effet à un niveau d’insulte et de dépréciation des concurrents politiques très largement au delà de ceux que l’on connaît ailleurs en Europe, en France ou en Allemagne en tout cas. Il y a quelques années un éditorialiste de la Repubblica avait constaté qu’en Italie, à force d’excès, les paroles sont sans effet réel. S. Berlusconi s’inscrit par son style dans la continuité d’une transformation du langage politique italien engagée dès les années 1970 par les Radicaux italiens pour briser le mur de l’inattention des médias dont ils se disaient victimes, transformation qui a fini par « contaminer » la plupart des politiques italiens à la faveur de la transition entamée au début des années 1990 [17].

Tableau 1

Résultats électoraux des forces eurosceptiques (1996-2006) (exprimés en %) [18],[19]

Tableau 1
Catégorisation de leur discours Parti ou aire politique Élections Politiques 1996 Élections Européennes 1999 Élections Politiques 2001 Élections Européennes 2004 Élections Politiques 2006 Élections Politiques 2008 Faible saillance eurosceptique Néofascisme 0,9 1,6 0,4 2,0 1,3 2,6 Lega Nord (LN) [10,1] 18 4,5 3,9 5,0 4,6 8,3 Partito della Rifondazione comunista (PRC) 8,6 4,3 5,0 6,1 5,8 [3,1] 19 Forte saillance eurosceptique No Euro n.p. n.p. n.p. 0,2 0,1 n.p. Note : tous les résultats sont exprimés en pourcentage des votes valides exprimés. Pour les élections politiques de 1996 et de 2001, il s’agit du résultat du vote proportionnel à la Chambre des députés ; pour celles de 2006 et de 2008, du vote dans la « circonscription Italie » dont dépend l’attribution de la prime de majorité à la Chambre.

Résultats électoraux des forces eurosceptiques (1996-2006) (exprimés en %) [18],[19]

14Si l’on exclut donc FI et AN des forces eurosceptiques, les résultats électoraux des forces eurosceptiques – néofascisme, néo-communisme et léghisme – (voir Tableau 1) oscillent au gré des aléas de la politique italienne (qui est dans la majorité, qui est à l’opposition ?) et des politiques d’alliance qui y sont en vigueur : ils dessinent plus des segments identitaires du marché électoral italien qu’un quelconque électorat eurosceptique en formation. Il apparaît d’une part, difficile d’établir un lien entre leurs performances électorales et l’agenda européen – sauf a contrario pour y voir l’une des nombreuses raisons de l’écroulement de la LN entre 1996 et 1999 (qui passe alors de l’europhilie à l’europhobie), ou éventuellement de RC entre 1996 et 1998 et de nouveau entre 2006 et 2008 (qui participe à des gouvernements europhiles), et, d’autre part, il serait abusif de qualifier leurs propagandes électorales tout au long de ces années comme à forte saillance eurosceptique. La LN elle-même, si elle a tenu régulièrement des propos antieuropéens de 1998 à 2008, n’en a jamais fait le centre d’une de ses campagnes électorales. La lutte contre le « centralisme bruxellois » ne fait que se surajouter à une protestation constante contre le « centralisme romain » et les abus de l’assistance au Mezzogiorno. Les données de l’Eurobaromètre 64 (automne 2005) permettent de mettre en rapport autopositionnement droite-gauche et attitude vis-à-vis de l’UE ; ils montrent qu’aucun segment de l’électorat italien n’est majoritairement hostile à l’UE, et qu’inversement, aucune n’y est unanimement favorable. Il existe des doutes et des espoirs en matière européenne aussi bien à droite, à gauche et même au centre [20]. Seules les questions sur la monnaie unique et la Constitution semblent témoigner d’une hostilité plus forte à l’extrême droite de l’échiquier politique. Toutes les questions portant sur le devenir plus ou moins lointain de l’UE ou sur l’attribution de valeurs à cette dernière – les plus abstraites ou les plus utopiques si l’on veut – témoignent d’une europhilie dominante dans tous les autopositionnements sur l’axe droite/gauche [21].

15Une liste dite No Euro [Pas d’Euro], la seule tentative à ce jour d’organiser en Italie une offre électorale exclusivement eurosceptique, a tenté d’exploiter lors des élections européennes de 2004 la montée en puissance d’un doute en matière d’Europe des Italiens, bien visible dans les sondages comme nous l’avons dit plus haut. Les performances électorales de ce groupuscule, par ailleurs sans doute monté de toutes pièces par le centre-droit en guise de contre-feu, sont d’une faiblesse telle que nous n’en faisons mention ici que parce qu’elles constituent la preuve qu’il n’existe aucun électorat susceptible d’être séduit par un discours à forte saillance eurosceptique qui déborde les identités politiques constituées de longue date.

Constitution matérielle de la « Seconde République italienne » : « Aucun enjeu européen n’est digne d’une crise politique », « Tout le monde quelque soit son orientation sur l’Europe s’il est utile à établir une coalition gagnante aura droit de bénéficier tant qu’il lui plaira des joies du gouvernement »

16Comme on le sait sans doute, l’Italie d’après 1948 fut longtemps marquée par un net écart entre sa Constitution écrite et sa Constitution dite matérielle, celle qui s’appliquait en réalité dans la pratique politique. L’élément le plus central de cette dernière était la convention ad excludendum, qui interdisait toute participation directe au gouvernement à la première force d’opposition, le Parti communiste italien (PCI). Il était aussi interdit depuis 1960 à l’extrême-droite néo-fasciste de soutenir directement le pouvoir modéré de la DC.

17L’Italie de la « Seconde République » n’a plus de telles règles, mais nous croyons pouvoir en souligner deux par l’observation : « Aucun enjeu européen n’est digne d’une crise politique » et « Tout le monde quelque soit son orientation sur l’Europe s’il est utile à établir une coalition gagnante aura droit de bénéficier tant qu’il lui plaira des joies du gouvernement ». La seconde est simplement l’inversion de la conventio ad excludendum qui traduit la fin des interdits idéologiques issus de l’après-Seconde Guerre mondiale à la faveur de la crise politique du début des années 90 : elle vaut aussi bien au niveau d’un parti, d’un groupe de politiciens ou que d’un politicien isolé, elle se diffracte au niveau européen, régional et local.

18L’autre règle nous paraît plus importante pour ce qui nous préoccupe ici : sur la période 1993-2008, l’intégration européenne en elle-même n’est jamais un motif suffisant de non-constitution ou de rupture des coalitions politiques de centre-droit comme de centre-gauche. Élément pour le moins non négligeable dans un pays où tout gouvernement depuis 1946 résulte d’une coalition de partis – même si le parlementarisme du régime politique s’étiole sur les vingt dernières années [22].

19La LN, qui est devenue eurosceptique en 1998-1999 et qui se déclarait prête à aller manifester à Nice pour bloquer le Conseil européen tenu dans cette ville en 2000, a gouverné pendant une législature entière (2001-2006) avec FI et l’UDC, deux partis membres du PPE, et AN, dont on a rappelé la stratégie de normalisation de son chef. La LN a donc siégé dans un gouvernement qui a entériné une Constitution européenne qu’elle déclare rejeter comme une abomination menant tout droit à un « État soviétique de l’Ouest », dominé par les « bureaucrates pédophiles de Bruxelles ». Comme l’a dit S. Berlusconi, face aux déclarations europhobes de ses ministres, députés et sénateurs léghistes, « je garantis », ce qui voulait dire que toutes ces paroles (en l’air) ne changeraient pas la loyauté de son gouvernement aux engagements européens pris. Le même scénario se remet en place en 2008 : la LN est toujours europhobe en paroles et dans ses votes au Parlement européen ; ses militants et certains de ses dirigeants se réjouissent du vote négatif irlandais de juin 2008 comme ils s’étaient réjouis des votes négatifs français et hollandais de mai et juin 2005 ; ceci ne l’empêche pas d’entrer, renforcé par son succès électoral d’avril 2008, dans le quatrième gouvernement Berlusconi. Celui-ci regroupe le Popolo della Libertà (Peuple de la Liberté) [PDL] – parti encore virtuel au moment de la formation de l’exécutif qui doit fusionner FI, AN, une minorité de l’UDC et quelques minuscules alliés de FI –, et la LN. Ce nouveau gouvernement paraît a priori devoir être plus eurosceptique que les précédents, puisque la majorité de l’UDC a fait défection à la veille des élections. Pourtant, à peine formé, il approuve en Conseil des ministres la ratification par l’Italie du Traité de Lisbonne, et, suite au vote négatif irlandais, U. Bossi, le leader historique de la LN, déclare que son parti pourrait finalement voter la ratification italienne du texte. Le retour au pouvoir d’une droite renforcée à la suite des élections d’avril 2008 ne devrait donc rien changer à la règle énoncée plus haut : la LN, bien que sortie en position de force de ces élections de 2008, et malgré son euroscepticisme affirmé et sans doute ressenti par sa base militante, ne souhaite pas rompre avec son partenaire de coalition sur une telle question [23].

20La situation est symétrique au centre gauche : la coalition de centre-gauche au pouvoir en 2006-2008, l’Unione (l’Union), comprend en effet en sus des partis pro-européens rassemblés dans la coalition de l’Ulivo (l’Olivier) depuis 1996, une aile néo-communiste (PRC) dont les représentants votent au Parlement européen et au Parlement italien contre cette même Constitution. Ces votes sont cohérents avec l’appartenance du PRC au « Parti de la Gauche européenne ». Ce « parti européen » [24] a été créé à Rome à la veille des élections européennes de juin 2004, largement à l’initiative du leader du PRC, Fausto Bertinotti. Mais, dans le cadre des accords de coalition du centre-gauche élargi en 2006, ce dernier est devenu le Président de la Chambre des Députés. On pourrait voir une contradiction à voter à Strasbourg contre un texte majeur qui engage la coalition romaine dont on constitue pourtant une pièce maîtresse. On peut surtout constater qu’au centre-gauche, comme au centre-droit, les affaires européennes ne sont pas un enjeu digne d’un conflit qui mettrait en jeu la conquête du pouvoir.

21On pourrait cependant arguer que le PRC, alors déjà dirigé par F. Bertinotti, provoque en octobre 1998 la chute du premier Gouvernement Prodi sur un enjeu européen, mais il s’agirait là d’une erreur historique majeure : la majorité du PRC vote contre le gouvernement Prodi après que celui-ci ait réussi la qualification de l’Italie dans l’Euro en mai 1998 [25]. En 1996, au sortir d’élections politiques où le PRC et l’Olivier s’étaient simplement désistés l’un et l’autre là où cela s’avérait nécessaire pour gagner des sièges, il aurait suffi au PRC de refuser son aide à l’Olivier de Romano Prodi s’il avait été de manière cohérente contre l’agenda européen de ce dernier, à savoir la mise en place de l’Euro, et ce que ce soit avant ou après les élections. Certes, cela aurait signifié en cas de non-accord électoral une défaite assurée face à S. Berlusconi, ou, en cas de refus de soutenir la formation d’un gouvernement Prodi, un retour devant les électeurs à court terme sûrement favorable à ce dernier ou encore un gouvernement de coalition des centres avec S. Berlusconi comme partenaire majeur. De même, la chute du gouvernement Prodi au printemps 2008 ne s’est pas faite sur un enjeu européen, mais en raison d’un désaccord sur la gestion de la justice entre deux ministres, Antonio Di Pietro et Clemente Mastella, issus de l’aile la plus conservatrice de la coalition : le PRC a appuyé de son vote l’ultime tentative de sauver le gouvernement de l’Unione.

22De très nombreux sujets peuvent donc provoquer en Italie dans les années 1990-2000 des crises gouvernementales, ou des menaces sérieuses de crises gouvernementales, mais « l’Europe » n’a jamais jusqu’à présent constitué l’enjeu (supposé) réel (par les commentateurs) de ces crises. Le récit de la vie politique italienne, tel qu’on le trouve réifié dans les ouvrages des historiens du contemporain [26] fait rarement mention d’un élément européen qui diviserait les forces politiques en présence. La série des Politica in Italia, livres-revues annuels publié par l’éditeur il Mulino de Bologne, témoigne de cette absence de l’Europe dans les récits les plus autorisés : en consultant les éditions 1992 à 2007, couvrant les années 1991 à 2006, on trouvera sur les 175 articles publiés 15 articles sur un thème identifiable (en étant généreux) comme européen. Il s’agit essentiellement d’articles traitant de l’entrée de l’Italie dans l’Euro ou des suites de cette dernière, ou de la politique étrangère de l’Italie. Un seul article traite d’une politique publique, à savoir l’agriculture, en perspective européenne, à l’occasion de la crise de la « vache folle », d’autres font seulement des allusions incidentes à l’Europe (par exemple à l’occasion des scandales bancaires de 2004-2005).

23Ainsi, contrairement à ce que nous disions plus haut à partir de notre définition, l’impression qui domine à la lecture de ces récits autorisés est qu’il n’existe tout bonnement pas de forces politiques eurosceptiques en Italie, en dehors de la LN après 1998-1999, au sens de forces qui feraient de « l’Europe » le lieu d’un affrontement politique lié à la conquête du pouvoir. D’autres, adoptant une définition plus scalaire de l’euroscepticisme [27] que la nôtre, arrivent à une conclusion similaire : sur le papier pour ainsi dire, dans les discours partisans les plus officiels (programmes, motions de congrès, etc.), il existe des forces eurosceptiques en Italie dans les années 1990-2000. Cependant la saillance dans le récit de la vie politique de l’euroscepticisme des uns ou des autres ainsi identifié apparaît pour le moins faible. Il s’agit d’un euroscepticisme à droite comme à gauche sans conséquences pratiques ni sur les grands choix politiques de l’Italie, ni sur la vie politique. De fait, les votes refondationnistes, léghistes, ou néofascistes, des électeurs italiens, y compris aux élections européennes de 2004 [28]), apparaissent avant tout comme le résultat de la conjoncture politique nationale, et aussi de l’histoire politique longue de l’Italie, de sa diversité régionale, de la capacité locale d’élites partisanes à mobiliser sur des identités sans cesse réactivées [29].

24Une conséquence majeure des règles énoncées ci-dessus, ainsi que des alternances répétées au niveau national depuis 1993 entre de larges coalitions de centre-gauche et de centre-droit, consiste en la participation de toutes les forces politiques ayant un suivi électoral minimal (jusqu’à moins de 1 % des voix au niveau national) au pouvoir exécutif national. Le même phénomène se répète d’ailleurs aux niveaux inférieurs (régions, provinces, communes). Comme aucun parti politique ayant un minimum de partisans et d’électeurs qui le situe un peu au-delà du groupuscule n’est plus exclu de l’exercice du pouvoir exécutif à un niveau ou un autre des différents échelons de gouvernements présents en Italie, toute force politique doit faire avec les politiques publiques telles qu’elles sont définies par le cadre réglementaire européen. Aussi bien la LN que le PRC ont désormais des ministres qui peuvent se targuer d’avoir participé à leurs Conseils européens des Ministres respectifs pendant quelques années. Pour reprendre l’heureuse terminologie de Luigi Bobbio, tout parti politique italien participe désormais du « Monde B », celui des politiques publiques, technicisées, relativement consensuelles, nécessairement encastrées dans la « gouvernance européenne », alors même que le « Monde A », celui de la politique visible reste agonistique et marqué par des oppositions irréconciliables [30]. P. Taggart remarquait dès 1998 que les partis eurosceptiques qu’il listait en Europe étaient dans l’immense majorité des cas des partis sans expérience gouvernementale récente ; en Italie dans les années 2000, il n’existe plus de tels partis[31].

La « politique à l’italienne » de la « Seconde république », ou comment internaliser les enjeux européens

25Un dernier facteur doit être invoqué pour comprendre la marginalité des résistances partisanes à l’Europe en Italie, malgré un état de l’opinion publique où il existe un public, sans doute minoritaire certes (entre 10 et 40 % selon l’indicateur choisi), peu satisfait de l’Europe. Cela tient à un mécanisme de clôture du débat politique italien sur lui-même, que l’on peut mettre en évidence lors de la polémique qui a suivi l’introduction de l’Euro au 1er janvier 2002.

26Le public italien et la presse qui se fait son relais ressentent une grave dérive des prix à la consommation. Il existe selon les sondages Eurobaromètres dès le printemps 2002 [32], une quasi-unanimité dans le public sondé pour penser que les prix ont été arrondis à un chiffre supérieur, tout particulièrement dans les petits commerces. Des associations de consommateurs s’emparent du sujet et font circuler leurs estimations de la hausse réelle des prix. Dès ce moment, les Italiens attribuent à l’Europe l’incapacité à maîtriser la hausse des prix.

27Or la réaction de toute la classe politique n’est pas de s’en prendre à l’Europe : elle reconnaît de fait la hausse des prix, sans trop chercher à défendre le travail des statisticiens de l’ISTAT, mais elle en attribue l’entière responsabilité au camp d’en face et non à l’UE. Le gouvernement de S. Berlusconi qui dirige le pays depuis sa victoire du printemps 2001 accuse ainsi la coalition de centre-gauche au pouvoir entre 1996 et 2001 d’avoir très mal préparé l’entrée dans l’Euro physique et d’être le seul responsable de la hausse des prix. Elle insiste beaucoup sur l’erreur de ne pas avoir exigé de la BCE l’introduction de coupures papier de 1 euro et de 2 euros pour tenir compte de la psychologie monétaire des Italiens (habitués pour payer de petits montants aux billets de 1000 lires, 2000 lires et 5000 lires), le change Lire – Euro en ayant été de fait selon elle faussé. L’opposition de centre-gauche rétorque que tout a été dûment préparé en temps et en heure, et que la hausse des prix au détail dépend des manquements du centre-droit au pouvoir qui ne sait pas tenir ses diverses clientèles de petits commerçants et d’indépendants qui font valser les étiquettes à l’occasion du passage à l’Euro physique.

28On aurait pu s’attendre à un phénomène de blame avoidance de la part de la classe politique nationale rejetant sur la Commission européenne ou la BCE les désagréments ressentis par les Italiens. On observe au contraire un jeu d’accusations réciproques : chaque coalition accuse l’autre d’incapacité à gouverner et de dérives clientélistes. Il est vrai que l’Europe étant à ce moment-là incarné par R. Prodi, qui préside la Commission depuis 1999, et ancien leader de l’Olivier de surcroît, il est facile d’italianiser de part et d’autre le conflit. Dans un livre bilan de la législature berlusconienne, un membre des Democratici di Sinistra (Démocrates de gauche) [DS], ancien député, Guido Alborghetti [33], raconte en détail l’épisode en attribuant toute la faute de la dérive des prix au centre-droit au pouvoir, accusé d’avoir pris le passage à l’Euro physique à la légère avant de s’en alarmer trop tard et de manière inefficace. Il ajoute même, et sans crainte de se contredire, qu’au total, le gouvernement de centre-droit a en fait profité de l’occasion pour augmenter mécaniquement les recettes de TVA à la faveur de cette hausse des prix qu’il n’avait pourtant pas anticipé ! La liste No Euro, qui essaye aux élections européennes de 2004 d’exploiter cette insatisfaction face aux effets inflationnistes de la nouvelle monnaie, connaît, comme nous l’avons déjà signalé, un échec, tandis que les protagonistes de la polémique centre-droit et centre-gauche maintiennent leurs scores respectifs [34] chacun ayant visiblement réussi à convaincre ses partisans de la culpabilité du camp adverse en la matière.

29Le même phénomène se reproduit pour la croissance pour le moins médiocre de l’Italie dans les années 2001-2006 : il serait loisible d’y voir un effet inévitable de l’Euro qui contredit les nécessités exportatrices de l’industrie italienne, largement encore price-taker sur les marchés européens et mondiaux. Les élites du centre-droit et celles du centre-gauche y voient là encore une occasion de souligner la nullité de la gestion de leurs adversaires, et le patronat italien par la voix de son principal dirigeant, Luca di Monzemolo, de souligner quant à lui la nullité des responsables politiques de part et d’autre. Seule la LN tentera quelques propos eurosceptiques (et accessoirement protectionnistes et antichinois), en particulier au lendemain des référendums français et néerlandais de 2005, en proposant de sortir l’Italie de l’Euro.

30De fait, l’Italie de la politique des « salons télévisés », dont l’émission Porta a Porta (D’une porte à l’autre) de fin de soirée sur RAI 1 représente le symbole avec son présentateur « inoxydable » Bruno Vespa semble affligée du syndrome bien décrit pour l’Italie du sud dit du « Piove, governo ladro ! » (Il pleut, gouvernement de voleurs !). Tout événement désagréable qui frappe la population ne peut avoir pour unique motif que la malveillance du gouvernement – ou d’une force politique interne. D’après les sondages Eurobaromètres, les Italiens semblent de fait bien peu conscients d’une influence de l’Europe sur leur vie quotidienne. Or leur source d’information principale sur l’UE n’est autre que la télévision : selon l’Eurobaromètre de mai 2007 [35], 60 % déclarent avoir recours principalement à la télévision pour s’informer sur l’UE, contre 13% pour la presse écrite, 14 % pour Internet, et 21 % à des conversations en famille ou entre amis. Mais la télévision parle pour le moins très peu d’Europe comme sujet institutionnel [36].

31En juin 2007, selon les données officielles de l’Agenzia per le Garanzie nelle Comunicazione (l’Agence pour les garanties dans les communications) [37], alors même qu’a eu lieu un important sommet européen, les journaux télévisés de la RAI ont consacré moins de 4 % de leur « temps d’antenne » [38] toutes éditions confondues aux Italiens présents dans les organes décisionnels de l’UE (et donc 96 % à des acteurs partisans et institutionnels exerçant une tache nationale). Ce même mois, on tombe à tout juste plus de 3 % dans les journaux télévisés du groupe Mediaset appartenant à la famille Berlusconi. Le résultat semble encore pire pour les émissions politiques qui ne sont pas des journaux télévisés (talk-shows), où les acteurs italiens recouvrant des charges au niveau européen sont très peu présents. Plus significatif encore, selon la même source qui surveille depuis peu le « pluralisme social » de l’information télévisée, l’UE ne représenterait qu’un peu plus de 2,2 % du temps d’antenne en ce même mois de juin 2007 dans les journaux télévisés de la RAI et 1,6 % dans ceux de Mediaset. L’UE semble aussi peu présente dans les journaux télévisés que les institutions internationales ou que… les gens ordinaires, alors que, sur les deux réseaux en duopole de fait (RAI/Mediaset), les acteurs partisans nationaux représentent à eux seuls 29 % du temps d’antenne. Les sondés italiens se déclarent d’ailleurs en mai 2007 [39] pas du tout informés à 23 % ou plutôt mal à 46 % sur l’UE, seul un petit tiers des enquêtés italiens s’estimant bien ou très bien informé. Le ressenti déclaré d’une absence d’information est encore plus accentué dès que les questions portent sur la connaissance d’une politique publique particulière, où l’ignorance déclarée dépasse toujours les 70 % de l’échantillon. Tout le mal peut donc rester de la responsabilité du camp d’en face, puisque seuls ces camps existent sur la scène médiatique.

Conclusion

32Que peut en définitive apporter le cas italien à une théorie générale des résistances partisanes à l’Europe ?

33Le cas italien nous semble indiquer qu’il ne peut y avoir résistance partisane à l’Europe que :

34a) si une conviction s’est formée que « l’Europe » détermine négativement certains aspects importants de la vie quotidienne ; le cas de l’introduction de l’Euro et l’inflation ressentie qui s’en est suivie montre effectivement une augmentation du scepticisme déclaratif envers l’UE dans le public italien ;

35b) si des acteurs politiques nationaux attribuent des responsabilités dans ce qui arrive de mal à la population à l’UE, et non à leurs adversaires politiques nationaux : l’Italie propose en ce sens un cas extrême : en effet, à en croire le discours public des politiques, tout ce qui se passe en Italie semble être le seul fait de l’adversaire politique national : la politique berlusconienne du camp contre camp a renforcé cet aspect déjà présent auparavant d’une généralisation de la responsabilité de l’adversaire dans tout ce qui arrive de mauvais au pays ; comme les Italiens ordinaires voient la politique à travers le prisme presque exclusif de la télévision encore aujourd’hui, que celle-ci parle très peu d’Europe et que les discours qu’on y entend du matin au soir sont ceux d’une dénonciation incessante des responsabilités de l’autre camp (ou d’un autre secteur économique ou social italien), il est difficile de rendre crédible l’idée même que l’UE y soit pour quelque chose ;

36c) s’il existe des forces politiques tenues en marge des responsabilités exécutives de manière durable et ne participant pas de ce fait à la « gouvernance européenne » : l’évolution de la LN est éloquente de ce point de vue.

37Un dernier point appellerait d’autres développements : la réussite de forces eurosceptiques dépend d’un horizon historique à rebours ; il faut un passé, proche ou lointain, à idéaliser. Dans le cas italien, il s’agit selon nous de la condition la plus difficile à réaliser.

Notes

  • [1]
    Les trois personnages cités sont l’auteur de livres vantant les mérites de l’intégration européenne (PRODI R., Un idea dell’Europa, Bologne, Il Mulino, 1999 ; NAPOLETANO G., Europa politica. Il difficile approdo di un lungo percorso, Rome, Donzelli, 2003 ; AMATO G.,La democrazia senza costituzione ? L’Europa e gli europei dopo i referendum, Milan, CLUEB, 2007.
  • [2]
    Littéralement, le « lien extérieur ».
  • [3]
    Littéralement, « arc constitutionnel ».
  • [4]
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 67 – Rapporto nazionale Italia, 2007b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
  • [5]
    Les élections du printemps 2008 ont privé de représentation parlementaire pour la première fois depuis l’avènement de la République en 1946 les partis se réclamant du communisme, et les néofascistes qui ne sont pas ralliés à S. Berlusconi ne sont pas représentés au Parlement.
  • [6]
    TAGGART P., « A Touchstone of Dissent : Euroscepticism in Contemporary Western European Party Systems », European Journal of Political Research, vol. 33, 1998, p. 363-388.
  • [7]
    HIX S., What’ Wrong with the European Union and How to Fix It, Cambrige, Polity, 2008.
  • [8]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007.
  • [9]
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 56 Report, 2002a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 57 – National Standard Report. Italy, 2002b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 58 – National Standard Report. Italy, 2003a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 59 – National Standard Report. Italy, 2003b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 60 – National Standard Report. Italy, 2004a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 61 – National Standard Report. Italy, 2004b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 62 – Rapporto nazionale Italia, 2005a,disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 63 – Rapporto nazionale Italia, 2005b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 64 – Rapporto nazionale Italia, 2006a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 65 – Rapporto nazionale Italia, 2006b, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, Eurobarometer 66 – Rapporto nazionale Italia, 2007a, disponible sur http:// ec. europa. eu/ public_opinion.
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.
  • [10]
    ISERNIA P., « L’Europa vista dagli italiani : vent’anni dopo », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [11]
    Sur le choix de cette définition, nous renvoyons à nos travaux précédents sur le sujet, BOUILLAUD C., « L’euroscepticisme partisan lors des élections européennes de juin 2004. Un premier essai d’estimation et d’explication », in DELWIT P. et POIRIER P., (dir.), Parlement puissant, électeurs absents ? Les élections européennes de juin 2004, Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2005 ; BOUILLAUD C., « Italie », in DÉLOYE Y., (dir.), Dictionnaire des élections européennes, Paris, Économica, 2005 ; BOUILLAUD C., « Voter contre l’intégration européenne dans l’enceinte du Parlement européen comme indicateur robuste d’euroscepticisme (2005-07) », in NEUMAYER L., ROGER A., ZALEWSKI F., (dir.), L’Europe contestée. Espaces et enjeux des positionnements contre l’intégration européenne, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008, p. 158-184.
  • [12]
    BOUILLAUD C., « La législation italienne des années 2001-2005 porte-t-elle la marque des nouvelles droites ? », in DELWIT P. et POIRIER P., (dir.), Extrême droite et pouvoir en Europe. The Extreme Right Parties and Power in Europe », Bruxelles, Éditions de l’Université de Bruxelles, 2007.
    BOUILLAUD C., « Voter contre l’intégration européenne dans l’enceinte du Parlement européen comme indicateur robuste d’euroscepticisme (2005-2007) », in NEUMAYER L., ROGER A., ZALEWSKI F., (dir.), L’Europe contestée. Espaces et enjeux des positionnements contre l’intégration européenne, Paris, Michel Houdiard Éditeur, 2008, p. 158-184.
  • [13]
    BELLUCCI P., « La reazione dell’élite politica italiana di fronte all’integrazione europea alla fine degli anni’90 », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [14]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2007.
  • [15]
    Pour une présentation en terme « eurosceptiques » de la politique étrangère du gouvernement de S. Berlusconi en 2001-2006, cf. RAYNER H., L’Italie en mutation, Paris, La Documentation française, 2007, p. 78-84.
  • [16]
    Pour un récit pondéré de la séance par un opposant de S. Berlusconi, cf. ALBORGHETTI G., Il libro nero del governo Berlusconi, Rome, Nutrimenti, 2005, p. 407-412. Cette séance du 2 juillet 2003 au Parlement européen siégeant à Strasbourg est citée dans la phrase d’introduction de la synthèse de Gillepsie et Laffan sur l’identité européenne comme l’exemple inusité d’expression d’un sentiment nationaliste dans les enceintes européennes. Nous doutons fortement de cette interprétation, mais nous y trouvons l’écho académique du choc médiatique que cette répartie berlusconienne provoqua. (GILLESPIE P., LAFFAN B., « European Identity : Theory and Empirics », in CINI M., BOURNE A. K., (dir.), Palgrave Advances in European Union Studies, Houndmills, Basingskoke and Hampshire and New York, Palgrave, 2006.
  • [17]
    Le Commissaire italien pressenti pour participer à la Commission Barroso en 2004, Rocco Buttiglione, philosophe de profession, proche du mouvement catholique Comunione & Liberazione, qui fut refusé par les eurodéputés lors des auditions pour ses déclarations perçues comme particulièrement homophobes et misogynes, était pourtant l’un des leaders de l’UDC, donc du parti a priori le plus europhile de la coalition au pouvoir. Il était d’ailleurs Ministre des Affaires communautaires depuis 2001, poste ministériel créé récemment en Italie qui témoigne de l’européanisation des politiques publiques dans le pays. Il ne s’agissait donc pas d’un désaccord sur l’idée d’intégration européenne en elle-même, mais, là encore, d’une incompatibilité des styles politiques.
  • [18]
    Lors de ces élections de 1996, la LN n’est pas encore sur un discours eurosceptique, au contraire.
  • [19]
    . Score de la liste « Sinistra Arcobaleno » (SA) (Gauche Arc-en-Ciel), qui regroupe le PRC et le PCDI dont les représentants votent contre la Constitution au Parlement européen et la Fédération des Verts et des scissionnistes des Démocrates de gauche qui ont soutenu le processus constitutionnel européen. Il existe trois petites listes à gauche de SA qui ont recueilli autour de 1 % des voix.
  • [20]
    Ce point constitue une évolution par rapport à des données datant de 1997, cité dans Bouillaud et Pujas, qui montraient un plus fort gradient droite/gauche dans l’appréciation de l’UE. Cf. BOUILLAUD C., PUJAS V., « Entre utopie et contrainte : l’opinion publique italienne face à l’Europe », in CAUTRÈS B. et REYNIÉ D., (dir.), L’Opinion européenne 2002, Paris, PFNSP, 2002.
  • [21]
    Nous n’avons pas reproduit en annexe de tels résultats obtenus en explorant les données d’EB 64, tant ils nous ont paru banals pour le cas italien. Pour une conclusion similaire, voir Commission européenne, op. cit., 2007b.
  • [22]
    RAYNER H., L’Italie en mutation, Paris, La Documentation française, 2007.
  • [23]
    Le cas des néofascistes nous procure moins d’exemples de cette séparation entre enjeux européens et constitution des coalitions gouvernementales dans la mesure où leurs divisions en multiples groupements depuis la rupture postfasciste du Congrès de Fiuggi de janvier 1995 qui a donné naissance à AN à partir du MSI les a empêché d’avoir un poids électoral et politique suffisant pour que leur ralliement à une majorité de gouvernement soit indispensable au centre-droit. On remarquera toutefois qu’Alessandra Mussolini a rejoint avec son petit groupe de partisans les listes du PDL aux dernières élections, malgré sa participation au Parlement européen en 2007 à l’éphémère aventure du groupe d’extrême-droite ITS (Identité, Tradition, Solidarité), groupe particulièrement hostile au Traité de Lisbonne.
  • [24]
    Au sens nouveau que donne à ce terme la législation européenne en la matière de 2003.
  • [25]
    Cf. pour des récits circonstanciés de cette crise, et de sa répétition générale en 1997 : LEGRENZI P., « La crisi di ottobre del governo Prodi », in BARDI L. et RHODES M., (dir.), Politica in Italia. Edizione 98, Bologne, il Mulino, 1998 ; MASSARI O., PARKER S., « Le due sinistre tra rotture e ricomposizioni », in HINE D. et VASSALLO S., (dir.), Politica in Italia. Edizione 99, Bologne, il Mulino, 1999 ; TRANFAGLIA N., La transizione italiana. Storia di un decennio, Milan, Garzanti, 2004.
  • [26]
    Voir, par exemple, Ginsborg (GINSBORG P., L’Italia del tempo presente. Famiglia, società civile, Stato, Turin, Einaudi, p. 451-470, 1998) qui, malgré son intérêt pour le sujet de l’intégration européenne, ne consacre que quelques pages au sujet européen, dans sa somme de prés de 600 pages sur l’Italie contemporaine ou Colarizi (COLARIZI S., Storia politica della Repubblica 1943-2006, Laterza, Bari, 2007.
  • [27]
    CONTI N., VERZICHELLI L., « La dimensione europea del discorso politico in Italia : un’analisi diachronica delle preferenze partitiche (1950-2001) », in COTTA M., ISERNIA P., VERZICHELLI L., (dir.), L’Europa in Italia. Elite, opinione pubblica, e decisioni, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [28]
    L’article commence significativement par la phrase suivante : « Les élections européennes des 12-13 juin 2004 et les élections provinciales tenues au même moment ont eu une grande importance pour la politique italienne » (notre traduction). Tout l’article confirme amplement notre analyse de l’année précédente : rien dans l’élection européenne de 2004 en Italie ne fut européanisé. BOUILLAUD C., « Italie : une élection européenne italianissime », Revue politique et parlementaire, n°1031, juillet-août-septembre 2004 ; DONOVAN M., « Gli equilibri politici dopo le elezioni di giugno », in GUARNIERI C. et NEWELL J. L., (dir.), Politica in Italia. Edizione 2005, Bologne, il Mulino, 2005.
  • [29]
    DIAMANTI I., Bianco, rosso, verde… e azzurro. Mappe e colori dell’Italia politica, Bologne, il Mulino, 2003 ; DIAMANTI I., La geografia politica di Silvio Berlusconi. Mappe 19/05/08, 2008, disponible sur www. demos. it (consulté le 03/09/08).
  • [30]
    BOBBIO L., « La dissociation italienne. Le monde du décisionnisme majoritaire et celui de la concertation », Pôle sud, n°19, novembre 2003.
  • [31]
    Si l’on exclut les groupuscules à moins de 0,3 / 0,4 % des voix au niveau national. Même parmi les quelques dizaines de micro-entreprises politiques cherchant à émerger dans le jeu politique (ou refusant leur caducité) à chaque élection nationale, il est en fait difficile d’identifier des discours résolument anti-européens. Au contraire, ces tentatives, surtout quand elles se situent au centre, comprennent souvent l’adjectif « européen » dans leur raison sociale.
  • [32]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2002b.
  • [33]
    ALBORGHETTI G., Il libro nero del governo Berlusconi, Rome, Nutrimenti, 2005.
  • [34]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2004.
  • [35]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.
  • [36]
    BOUILLAUD C., op. cit., 2004 ; BOUILLAUD C., op. cit., 2005.
  • [37]
  • [38]
    Le temps d’antenne est la somme du temps, du temps de nouvelle (où l’on parle du sujet en question) et du temps de parole (où le sujet s’exprime directement). Les scores des temps de parole pour l’UE sont encore plus faibles en proportion.
  • [39]
    COMMISSION EUROPÉENNE, op. cit., 2007b.
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