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Article de revue

Le juge unique en Belgique

Quelques jalons historiques d’une révolution tranquille

Pages 97 à 113

Notes

  • [1]
    Loi du 25 juillet 1985 modifiant les articles 91 et 92 du code judiciaire (M.B., 14 août 1985, pp. 11703-11704).
  • [2]
    Loi du 19 juillet 1985 relative à la création de chambres d’appel à conseiller unique au sein des cours d’appel (M.B., 15 août 1985, pp.11777-11779).
  • [3]
    A voir concernant cette législation, A. Kebers,La loi du 19 juillet 1985 relative à la création des chambres à conseiller unique au sein des cours d’appel, dans J.T., 1985, pp. 677-683 et J. Gillardin, Conseillers et juges uniques, dans Journal des Procès, 10 septembre 1985, n° 68, p. 28. La question du conseiller unique a fait l’objet d’une importante controverse. Voir notamment E. Verougstraete, Faut-il constituer dans les cours d’appel des chambres à conseiller unique ?, dans J.T., 1975, p. 32 ainsi que du même auteur De contestés à contestataires, dans J.T., 1975, p. 736 ; A. Maréchal, Le conseiller unique à la cour d’appel, dans J.T., 1979, p. 468 ; P. Mahillon, A propos du conseiller unique, dans J.T., 1975, p. 556.
  • [4]
    Cette absence de discussions parlementaires tient peut-être au fait qu’en 1985 cette question ne soulève plus guère d’objections majeures. L’ordre national des avocats avait notamment marqué son accord sur l’introduction du conseiller unique dans un avis remis à la commission de la justice du Sénat (D.P., Sénat, session 1984-1985, séance du 2 juillet 1985,n° 910/2, pp.8-10).
  • [5]
    E. Garsonnet, Traité théorique et pratique de procédure. Organisation judiciaire, compétence et procédure civile et commerciale, T. I, Paris, 1882, pp. 67-68 ; F. Thiry, Organisation judiciaire. Compétence et procédure en matière civile, Liège, 1893, p. 28.
  • [6]
    Chambre des Représentants, séance du 9 juin 1832, dans M.B., 11 juin 1832, p. 1351.
  • [7]
    "Sous l’empire de la loi organique de l’ordre judiciaire en Belgique, le nombre fixe des juges est une condition constitutive et essentielle de la formation légale d’une cour ou d’un tribunal pour qu’il soit investi du pouvoir de juger; en nombre supérieur à celui déterminé, le tribunal n’a pas plus de pouvoir qu’en nombre moindre. La violation de cette règle produit une nullité radicale et d’ordre public qui vicie l’arrêt ou le jugement de sa substance"(Arrêt de la Cour d’appel de Gand du 6 juin 1834 dans Jurisprudence du XIXe siècle, 1834, 3e partie, p. 336).
  • [8]
    Ce travail fondamental porte sur les sources du code judiciaire actuel. Il s’agira d’étudier l’évolution de l’organisation judiciaire, de la compétence et de la procédure de 1830 à 1945.
  • [9]
    E. Picard, Rapport sur le juge unique. Rapport présenté à la Fédération des avocats belges lors de la séance du 27 novembre 1887, Bruxelles, 1887. Ce rapport a également été publié en introduction du tome XXIV des Pandectes belges, Bruxelles, 1887, pp. IX-L. Les premiers éléments de la théorie du juge unique sont formulés dès 1884 dans le J.T., 3 août 1884, col. 982.
  • [10]
    A. Prins, Criminalité et répression (paru en 1886), in L’œuvre d’Adolphe Prins, Bruxelles, 1934, p. 285.
  • [11]
    Ces débats se développèrent à l’occasion de la publication d’un texte important qu’Odilon Barrot consacra à l’organisation judiciaire en France. Le texte de Barrot ainsi que la controverse qu’il suscita sont parus dans Comptes-rendus des séances et des travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, T. 25, 1871, pp. 351-371, 673-712 ; T.26, pp.7-60, 247-377 ; T.27, 1872, pp. 465-480 ; T. 28, 1872, pp. 6-26, 161-187 ; T. 29, 1872, pp. 491-521.
  • [12]
    J. Bentham, Oeuvres, T. III, Bruxelles, 1830, pp. 14-19 (édition Dumont et Laroche). Sur l’œuvre de Bentham, voir Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, Bruxelles, 1987 (sous la direction de Ph. Gerard, F. Ost et M. van de Kerckove).
  • [13]
    Le premier numéro du Journal des tribunaux date du 15 décembre 1881. Dans la présentation de la charte du journal, on peut lire notamment : "Le Droit…et les œuvres de la justice apparaissent, à quiconque n’est pas initié, comme un ensemble bizarre de règles et de pratiques toutes de convention, sans réalité et sans équation avec les vraies nécessités sociales …Il faut se rapprocher davantage de la masse en choisissant parmi les faits si variés du mouvement judiciaire ceux qui ont pour elle de l’intérêt, et en les lui présentant dans leurs éléments les plus simples, sans cependant leur enlever cette couleur technique qui en fait le charme et l’originalité (J.T., 15 décembre 1881, p. 1).
  • [14]
    Voir notamment la discussion générale du budget du ministère de la justice de 1887 dans A.P., Ch., séance du 21 janvier 1887, pp. 344-345 et p. 379.
  • [15]
    A.P., Ch., séance du 21 janvier 1887, p. 352.
  • [16]
    Compte rendu de la session du 27 novembre 1887 de la Fédération des avocats belges, dans J.T., 1887, p. 1445.
  • [17]
    A. Braun-A. Moreau, La réorganisation judiciaire. Rapport présenté à la Fédération des avocats belges lors de l’assemblée générale du 30 mai 1896, Bruxelles, 1896, p. 42.
  • [18]
    J.T., 1896, p. 701.
  • [19]
    E. Eeckman, Cour d’appel de Bruxelles. Sa situation. Son arriéré, dans B.J., 12 déc.l886, col. 1569-1586.
  • [20]
    Ibidem, p. 1580.
  • [21]
    M. Melot, Le juge unique et le recrutement de la magistrature en Belgique. Discours prononcé lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation le 1er octobre 1897, dans Pas., I, pp. 1-11.
  • [22]
    Citons notamment la loi du 24 août 1887 augmentant le personnel des tribunaux de première instance de Bruxelles, Anvers et Liège; celle du 4 septembre 1891 augmentant le personnel de la Cour d’appel de Bruxelles ; celle du 11 septembre 1895 augmentant de deux conseillers le personnel de la Cour d’appel de Bruxelles ; celle du 27 avril 1898 augmentant le personnel des tribunaux de première instance de Bruxelles, Anvers et Charleroi ; celle du 3 août 1909 augmentant le personnel des tribunaux de Bruxelles et d’Anvers ; celle du 12 août 1911 augmentant le personnel des tribunaux de Charleroi, Mons, Bruges, Anvers, Malines et Termonde.
  • [23]
    La bibliographie sur ce sujet est abondante. Citons uniquement le Rapport général de la commission instituée le 8 septembre 1919, dans B.J., 1920, col. 113-125 qui introduit parfaitement à la problématique et à l’historique de la question.
  • [24]
    La compétence du juge de paix a été fixée par la loi du 26 mars 1876. Depuis cette date et jusqu’en 1919, cette compétence a été étendue aux matières suivantes : instruction obligatoire, repos dominical, réparation des accidents de travail, la chasse, les petits héritages, l’épargne de la femme mariée, le contrat de travail, les mines, les loyers. Sur cette question, voir notamment H. Carton, Rapport au Sénat du budget du ministère de la justice pour l’année 1922, dans D.P., Sénat, session 1921-1922, séance du 31 mai 1922, n° 80, p. 228.
  • [25]
    Article 2 de la loi du 4 septembre 1891 modifiant l’article 84 de la loi du 18 juin 1869 sur l’organisation judiciaire.
  • [26]
    A. Braun-A. Moreau, op.cit., pp. 42-43.
  • [27]
    Cette question de la composition des chambres des Cours d’appel mériterait également à elle seule un long développement. Pour un premier aperçu technique et historique, voir un article signé O. A, La veille d’un débat, dans B.J., 29 mai 1913, col. 657-661.
  • [28]
    En 1903, le gouvernement installe une commission instituée pour l’accélération de la justice et le désencombrement des tribunaux (J.T., 16 juillet 1903, col.882-887) présidée par P. Van Iseghem, conseiller à la Cour de cassation. Cette commission fut saisie d’une proposition réduisant à trois le nombre de conseillers en matière civile. Cfr A. CALLIER, La crise de la magistrature, dans B.J., 7 décembre 1919, col. 1329-1330).
  • [29]
    Voir notamment l’opposition ferme du Procureur général près la Cour de cassation Terlinden, L’heure est-elle venue de réduire en matière civile le nombre des juges d’appel ?, dans J.T., 1913, col. 17-24, 49-60 et 81-92.
  • [30]
    Plus exactement, le gouvernement déposa en 1912 un projet de loi modifiant la composition des chambres des cours d’appel dans le sens d’une réduction des conseillers à trois pour les affaires civiles et portant augmentation du personnel de certains tribunaux (D.P., Ch., session 1912-1913, séance du 12 novembre 1912, n°11). Le parlement se prononça pour la disjonction du projet, reportant à plus tard le problème de la composition des chambres des cours d’appel (A.P., Ch., 23 août 1913, pp.2228-2229).
  • [31]
    A. Callier, op.cit., p. 1330.
  • [32]
    La commission de désencombrement rédige un avant-projet de loi permettant à la chambre du conseil de renvoyer certains délits devant un juge unique (rapport et texte de l’avant-projet dans J.T., 31 mars 1904, col. 414-417) et un autre avant-projet concernant l’extension de la compétence des présidents des tribunaux de première instance permettant au juge seul de statuer, dans des limites restreintes, sur les affaires civiles (rapport et texte de l’avant-projet de loi dans J.T., 10 avril 1914, col. 473-476).
  • [33]
    D.P., Ch., session 1907-1908, séance du 22 novembre 1907, n°14.
  • [34]
    Le projet ne sera jamais examiné par la commission qui avait pourtant été constituée à cet effet.
  • [35]
    Voir notamment A. Materne, La charte de l’enfance. Commentaire de la loi du 15 mai 1912, Bruxelles, 1913, pp. 137-140.
  • [36]
    M. Collaert, Rapport fait à la chambre au nom de la section centrale sur les amendements proposés par le gouvernement, dans Pasin., 1912, p.273.
  • [37]
    Mme Carton De Wiart, Les tribunaux pour enfants. Rapport présenté au congrès international des patronages à An vers. Juillet 1911, p. 40.
  • [38]
    A. Oliviers, Protection de l’enfance.Réflexion sur la loi du 15 mai 1912, dans J.T., 1912, p. 780.
  • [39]
    H. Carton de Wiart a bien perçu l’importance de cette réforme judiciaire dans ses Souvenirs politiques (1878-1918), T.I, Bruxelles, 1948, p. 186.
  • [40]
    Loi du 24 octobre 1919 modifiant temporairement l’organisation judiciaire et la procédure devant les cours et tribunaux (M.B. du 9 novembre 1919).
  • [41]
    Sur l’analyse complète de l’arriéré, voir l’exposé des motifs du projet de loi (D.P., Ch., session 1918-1919, séance du 22 mai 1919, n°169, pp. 524-526).
  • [42]
    Sur le cours de la justice durant la guerre, voir Terlinden, La magistrature belge sous l’occupation allemande.Souvenirs de guerre.Août 14 - octobre 18. Discours du procureur général prononcé à l’audience de rentrée de la Cour de cassation du 1er octbre 1919, dans B.J., 1919, col 1169-1182 et 1201-1225. Sur les raisons qui ont motivé la suspension du cours de la justice en février 1918, voir Une page de gloire de la magistrature belge, dans J.T., 1918, col. 946-952 et 963-967 avec des sources inédites.
  • [43]
    A.P., Ch., séance du 17 juillet 1919, p. 1306.
  • [44]
    Discours de H. Levy Morelle lors de son installation comme Premier président de la Cour d’appel de Bruxelles, dans B.J., 1919, p.645.
  • [45]
    Voir à ce sujet les contributions de F. Vrancken, E. Seulen, M. Masoin, G. Coppée, E. Moulard et J. Grauls, Histoire des finances publiques en Belgique, T.II, Bruxelles, 1954.
  • [46]
    Sur une analyse détaillée de cette loi, voir C. Marcotty, Loi du 25 octobre 1919 modifiant temporairement l’organisation judiciaire et la procédure devant les cours et les tribunaux, dans B.J., 31 juillet 1921, col. 481-488.
  • [47]
    En 1928, le parlement décida de la proroger jusqu’au jour de l’entrée en vigueur de la loi modifiant les lois d’organisation, de compétence et de procédure. Voir l’article 1 de la loi du 18 août 1928 prorogeant les lois temporaires d’organisation judiciaire et la loi de surséance à certaines nominations judiciaires.
  • [48]
    Citons entre autres les travaux du Centre d’études pour la réforme de l’Etat publiés sous le titre Réforme de la procédure, T. I, Bruxelles, 1937, pp. 1-129. Une synthèse en est parue dans La réforme de l’Etat, Bruxelles, 1937, pp. 431-496.
  • [49]
    Voir à ce propos Les pouvoirs du judiciaire (sous la direction de C. Panier et F. Ringelheim), Bruxelles, 1987.
  • [50]
    A.P., Ch., séance du 30 septembre 1923, p. 1342.
  • [51]
    A. Fetweis, Introduction au droit judiciaire. Les institutions, 8e édition, Liège, 1985, p. 13 : "Si le code Van Reepinghen a réalisé une amélioration des lois de justice, il n’a pas poussé la modernisation espérée en 1958. Dans leur ensemble, les institutions antérieures subsistent et, à certains égards, le code réalise davantage une bonne coordination et un rajeunissement du droit écrit qu’un renouvellement des structures et des principes. Il n’y a pas de rupture avec le passé. Les normes fondamentales sont peu modifiées".
  • [52]
    A.P., Ch., séance du 4 mai 1922, p. 707.
  • [53]
    E. Krings, Considérations critiques pour un anniversaire. Discours prononcé par le Procureur général à l’audience de rentrée de la Cour de cassation du 1er septembre 1987, dans J.T., 10 octobre 1987, pp. 545-557.

1Il n’est point toujours nécessaire d’user de tumultueuses révisions constitutionnelles pour transformer parfois de manière radicale des institutions séculaires au point de se trouver aux antipodes des principes qui ont régi ces mêmes institutions à l’origine de leur fonctionnement. La méthode douce peut parfois aussi produire le même effet.

2Un contexte précis - la crise économique - accompagné de phénomènes connexes comme par exemple un grossissement démesuré de l’arriéré judiciaire ont suffi pour que le parlement vote une loi qui a fondamentalement modifié l’organisation judiciaire de la Belgique. En effet, par la loi du 25 juillet 1985 [1], le législateur a décidé qu’en première instance l’attribution d’une affaire à une chambre à un juge était la règle alors que seules les affaires limitativement énumérées devaient être confiées, par exception, à une chambre à trois juges. Dans la foulée, le parlement a voté une autre loi [2] qui introduit le magistrat unique au niveau des cours d’appel cette fois mais avec cette réserve qu’ici l’attribution des affaires à des chambres à trois conseillers demeure la règle, le conseiller unique ne fonctionnant qu’à titre d’exception [3].

3Le plus étonnant, c’est que cette transformation s’est opérée sans guère de débats au parlement : on estimait en effet qu’il ne s’agissait là que de réformes techniques destinées à résorber l’arriéré judiciaire et à accélérer le cours de la justice [4].

4Or, à y regarder de près, c’est à une véritable rupture historique que le législateur a procédé : en généralisant le juge unique en première instance se trouve en effet transformé le fondement même sur lequel reposait notre organisation judiciaire. Le législateur a consacré abruptement dans les textes une institution qui avait certes été introduite dès 1919 mais de manière très partielle et très contrôlée et qui a toujours suscité des controverses passionnées depuis la fin du XIXe siècle. Le législateur est même allé au-delà en introduisant pour la première fois le conseiller unique, ce qui est tout à fait nouveau : jusqu’alors cette question n’avait été abordée que dans la perspective de la nécessaire réduction du nombre de conseillers sans que ne se dégage un courant favorable au conseiller unique.

5Pour comprendre cette évolution, il importe de partir de la première loi d’organisation judiciaire de 1832.

6En effet, dès l’origine et cela est enseigné durant tout le XIXe siècle [5], un des caractères spécifiques de nos juridictions est d’être composées presque toutes de plusieurs juges et qu’elles ne peuvent juger valablement que si un certain nombre de juges ont pris part au jugement. La pluralité a toujours été réputée chez nous une garantie très efficace de bonne justice : le délibéré qui précède le jugement donne naissance à une décision qu’on estime mieux étudiée, plus objective, moins sujette à caution. Ce principe était à ce point ancré dans les esprits qu’il ne donna lieu à aucun débat lors de l’élaboration de la première loi d’organisation judiciaire de la Belgique votée en 1832. C’est donc sans aucune discussion que fut voté l’article 46 stipulant "que les tribunaux de première instance ne peuvent rendre de jugement qu’au nombre fixe de trois juges" [6].

7Très logiquement, de l’adoption de cet article découle la composition des autres juridictions mais cette fois en appliquant un deuxième grand principe : les juges du degré supérieur doivent toujours siéger en nombre plus important que celui des juridictions inférieures.

8Ainsi s’est trouvé posé le sacro-saint principe de la pyramide inversée : trois juges en première instance, cinq conseillers par chambre en cour d’appel, sept en cassation. Le législateur a conservé ces deux fondements dans la loi d’organisation judiciaire de 1869.

9C’est dans les années 1880 que furent assénés les premiers coups de boutoir contre cet ordonnancement judiciaire qui paraissait aux yeux de la doctrine et de la jurisprudence comme un monument intouchable, destiné à la perpétuité [7]. Ces critiques se développeront à partir de ce qu’on a appelé la question du juge unique, question qui s’inscrit dans la problématique beaucoup plus large de la réforme judiciaire qui traverse l’histoire de la Belgique à partir de la fin du XIXe siècle. Question complexe s’il en est car elle concerne autant des problèmes d’organisation judiciaire que de compétence et de procédure. Il est exclu d’analyser ici l’ensemble de ces problèmes qui fait l’objet d’une recherche qu’on mène actuellement [8]. Il convient cependant de ne jamais perdre de vue que le juge unique n’est qu’une facette de cette mosaïque complexe.

Edmond Picard et le juge unique

10C’est en Edmond Picard que le juge unique trouve en Belgique son héraut le plus fervent et le plus fougueux. Il est le premier qui en propose une théorisation complète et systématique [9]. Avec lui, une autre personnalité d’envergure, Adolphe Prins, qui prône également le juge unique en matière répressive [10].

11Cette question du juge unique n’est pas née ex abrupto des réflexions du brillant avocat bruxellois. On peut supposer qu’il fut influencé par un débat similaire et de grande envolée qui avait agité les milieux juridiques français quelques années auparavant [11]. Mais c’est surtout de l’analyse de l’état de la magistrature et de son fonctionnement que Picard tire l’essentiel de son argumentation.

12Pour Picard, les cours et tribunaux sont composés de manière aberrante. De la justice de paix à la cour de cassation, le personnel est en progression arithmétique et constitue une hiérarchie retournée qui brille plutôt par la symétrie que par la logique. Cette accumulation de places dans les juridictions s’expliquait autrefois lorsque les charges étaient vénales : plus elles étaient nombreuses, plus le pouvoir tirait profit de leur trafic. Et le régime napoléonien amplifia le phénomène par unique raison d’apparat et de décorum. Conséquence de ce système : un personnel trop nombreux, 615 magistrats en 1887. Or, estime Picard, il est impossible aux barreaux qui, dans l’ensemble, ne fournissent pas 2000 membres, d’offrir un tel contingent d’esprits d’élite. Le risque est donc grand de voir se développer un nivellement par le bas et, pour Picard, la cote d’alerte est largement atteinte. D’autant plus que l’insuffisance des traitements, conséquence logique du surnombre de postes à pourvoir, ne pousse guère les plus brillants avocats à embrasser la carrière de la magistrature. Si on ajoute à cela la politisation extrême des nominations, on aura compris que pour Picard le tableau est on ne peu plus sombre : la magistrature belge lui apparaît à ce moment comme médiocre, sans prestige et sans crédibilité.

13Et également sans efficacité. Car cette magistrature est confrontée à un problème qui, s’il est perçu comme temporaire à l’époque, deviendra lancinant par la suite : c’est celui de l’arriéré judiciaire. Cette question mériterait à elle seule un long développement. Précisons cependant qu’en cette décennie 1880-1890, deux ordres de faits expliquent l’encombrement des rôles. D’une part une série de dispositions législatives qui ont attribué aux cours d’appel la connaissance des affaires électorales, des affaires fiscales jointes à ces causes ainsi que des contestations relatives à la formation des listes d’électeurs pour les tribunaux de commerce et les conseils de prud’hommes. Citons un seul chiffre, à titre d’exemple, tant il est impressionnant : durant l’ année judiciaire 1883-1884, le nombre d’affaires électorales portées devant la seule cour d’appel de Bruxelles s’élevait à 18.200. A ces causes conjoncturelles s’ajoutent des facteurs plus structurels liés à l’évolution même de la société. On assiste en effet à un développement des contestations judiciaires résultant de l’augmentation de la population et du développement sans cesse grandissant de l’activité industrielle et commerciale.

14En résumé, pour Picard il y a trop de juges, trop de juges mal payés et mal recrutés, chargés d’un volume d’affaires tel que la lenteur mise à les traiter efficacement et rapidement confine au déni de justice.

15Il s’impose donc de modifier radicalement l’organisation judiciaire et le seul moyen vraiment efficient d’y porter remède, c’est d’introduire le juge unique.

16Mais au-delà de ces visées pratiques et ponctuelles - hausse des traitements, accélération du cours de la justice, suppression des intrigues politiques-, le recours au juge unique s’articule chez Picard sur une nouvelle conception du juge, de son rôle et de son mode de fonctionnement. C’est en référence aux thèses de Bentham [12], premier véritable théoricien du juge unique, et à l’exemple anglais où le juge unique constitue la pierre angulaire du système judiciaire, que Picard esquisse ce profil du juge nouveau auquel il sied, selon lui, d’occuper une place éminente au sein de la société.

17Pour Picard, l’unité est favorable à toutes les qualités essentielles qu’un juge doit receler : moralité, science, responsabilité, connaissance parfaite du litige.

18La probité du juge dépend de sa responsabilité et il n’est pas bon que celle-ci soit partagée. La pluralité affaiblit en effet la responsabilité du juge car il n’y est pas soumis à l’opinion ; elle fournit au juge le moyen de s’absoudre lui-même. Par contre, la responsabilité pèse toute entière sur le juge unique. Celui-ci est attaché à son décret d’une manière indissoluble : c’est une couronne ou un carcan.

19Dans un corps nombreux s’établit également une subordination tacite, une harmonie qui ne tient qu’à l’ascendant des uns et à la déférence des autres. En réalité, la collégialité est un mythe. Dans les faits, c’est un des membres qui expédie le plus souvent à lui seul la majeure partie des causes. Au fond, c’est le juge unique qui fonctionne, moins la responsabilité.

20Un trop grand nombre de magistrats nuit aussi au prestige de la magistrature. La dissémination du travail accrédite facilement l’opinion que la besogne collective se réduit à peu de choses.

21Enfin, les opinions et les courants collectifs amènent de mauvais résultats dans les assemblées délibérantes. Dans un groupe, il se produit une suggestion spéciale. Les individus ont quelquefois plus d’intelligence pris isolément que réunis. Leur mérite est souvent en sens inverse de leur nombre.

22Telle est dans ses grandes lignes l’argumentation de Picard.

23Ainsi se dégage la figure d’un juge aux allures prométhéennes, aux accents romantiques, puissamment seul et responsable devant l’opinion. Et pour renforcer ce poids du juge, il convient d’augmenter sensiblement son traitement de manière à le préserver de toute tentation néfaste et à attirer la fine fleur du barreau, sur le modèle des juridictions anglaises composés d’hommes particulièrement expérimentés et rompus aux débats judiciaires. D’où la formule fréquemment martelée par Picard : moins de magistrats, des magistrats mieux recrutés, des magistrats mieux payés.

24Le juge unique apparaît donc chez Picard comme la pièce maîtresse d’un nouveau système judiciaire dans lequel la fonction du juge serait largement valorisée et sa personnalité davantage mise en exergue et par lequel nombre de disfonctionnements se trouveraient supprimés et la justice rendue plus rapidement sans nuire pour autant à la qualité des jugements rendus.

Des réactions mitigées à l’hostilité déclarée

25Les thèses de Picard ont suscité un important mouvement d’idées provoqué autant par leurs audaces - leurs applications auraient en effet entraîné une profonde transformation de l’institution judiciaire bien assise dans sa tradition napoléonienne,- que par les multiples aspects qu’elles touchaient.

26C’est au sein du Journal des tribunaux que se cristallisa cette agitation idéologique. Ceci n’est pas surprenant quand on sait que ce journal était l’organe même de Picard et avait été lancé à la fin de 1881 précisément pour secouer quelque peu la torpeur, le traditionalisme et la technicité rebutante représentés par La Belgique judiciaire[13].

27La classe politique ne demeura pas non plus indifférente à ce débat. Régulièrement, lors des discussions annuelles du budget du ministère de la justice, la question du juge unique est abordée mais toujours de manière incidente et dans une perspective très pragmatique : celle de la résorption de l’arriéré judiciaire. Et si des Jacobs, Sainctelette, Carlier, Guillery prennent résolument parti pour le juge unique, c’est sans pour autant parvenir à faire traduire leur conviction en un quelconque acte législatif [14]. De même que si le ministre de la justice de l’époque, J.E. Devolder, se dit convaincu de l’intérêt de tenter l’expérience, c’est pour reconnaître tout aussi promptement que les esprits ne sont guère mûrs pour ce genre de réforme [15].

28Mais le blocage n’est pas qu’idéologique. Il est aussi budgétaire. Certes, il peut paraître paradoxal d’avancer cet argument alors que l’introduction du juge unique aurait précisément entraîné un allègement de la charge financière. Mais en fait, à cette époque, la grande question qui agite le parlement en matière judiciaire, c’est celui du relèvement des traitements des magistrats en général et plus particulièrement la modification du système de rémunération des juges de paix. Celui-ci reposait sur le principe de l’émolument perçu à l’acte, ce qui engendrait des tensions et de nombreux excès. Par la loi du 25 novembre 1889 le législateur mit un terme à ce système quelque peu archaïque qui ne correspondait pas au mode de rémunération des fonctionnaires et releva substantiellement le traitement des magistrats cantonnaux. De même, le pouvoir ne parvint jamais à évaluer correctement l’impact budgétaire d’une mesure qui aurait diminué le nombre déjugés en même temps qu’elle aurait augmenté le traitement de ces mêmes juges.

29Même accueil mitigé au sein de la corporation des avocats. Certes un débat s’amorcera à la Fédération des avocats belges lors de la présentation du rapport Picard mais il tournera rapidement court et l’assemblée générale décidera d’ajourner sine die l’examen de cette question considérée comme "trop délicate" [16]. Et dix ans plus tard, Alexandre Braun et Alfred Moreau, deux avocats auteurs d’un volumineux rapport consacré à la réorganisation judiciaire, sont toujours contraints de constater que si le juge unique est bien la réforme de l’avenir, "dans l’état actuel, pour être accueillie, toute réforme doit tenir compte de nos usages et ne modifier le plan de notre édifice judiciaire qu’en respectant ses grandes lignes. Pas de bouleversements" [17]. Et la Fédération des avocats belges se contentera d’ailleurs, en 1896, de voter le vœu très général "en faveur du resserement progressif des cadres de la magistrature" [18].

30Quant à la magistrature, son silence est éloquent. Le seul indice d’une certaine opinion de la haute magistrature, on peut le trouver dans un important article publié par le premier président de la cour d’appel de Bruxelles, E.Eeckman, consacré à l’arriéré judiciaire de cette cour [19]. Parmi les remèdes envisagés pour résorber l’encombrement des rôles, Eeckman propose "de substituer…aux sections actuelles autant de sections qu’il y a de magistrats dans chaque cour, chaque conseiller formant ainsi une cour" [20].

31Ce qui revient en somme à proposer le conseiller unique mais dans un contexte bien précis - l’arriéré-, à propos d’une matière bien spécifique - les affaires électorales,- et bien sûr à titre tout à fait temporaire. Et encore, cette proposition est-elle avancée avec beaucoup de réticence, la faveur du magistrat allant davantage à la création d’une nouvelle chambre à la cour d’appel. Ce qui sera entendu par les parlementaires. Mis à part cette opinion, rien en 1887 concernant le juge unique en matière civile en première instance. Il faut attendre 1897, soit dix ans après la publication du rapport Picard, pour enfin connaître le point de vue de la cour suprême sur ce sujet. En effet, la mercuriale prononcée par le premier avocat général à l’audience solennelle de rentrée de la cour de cassation est entièrement consacrée au juge unique et au recrutement de la magistrature en Belgique [21]. Et sa position est nette et claire : la réforme du juge unique n’est pas souhaitable; le juge unique aurait pour effet de rendre la justice plus incertaine et moins respectée tout en admettant que sa généralisation aurait pour conséquence de hâter la fin des procès. Pour Melot, rien ne vaut le délibéré. La collégialité est une garantie de justice éclairée car elle offre les avantages d’un débat contradictoire : chaque juge fait profiter ses collègues de sa science et de son expérience personnelle. Elle permet également une justice impartiale : chaque juge contrôlant ses collègues, il devient impossible que l’un des plaideurs soit injustement favorisé aux dépens de l’autre. La décison de justice en retire une grande force puisqu’elle n’est pas suspectée.

32On le voit, la résistance est ici essentiellement d’ordre théorique et dogmatique.

Le lent cheminement du juge unique

33Est-ce à dire pour autant que le brûlot de Picard n’était qu’un feu de paille destiné à alimenter les querelles du milieu et que ses idées audacieuses n’eurent d’autre effet que d’agiter quelque peu la coterie judiciaire ?

34On pourrait le penser lorsqu’on examine la politique suivie pour résorber l’arriéré judiciaire. Au lieu de trancher dans le sens de Picard, ce qui aurait permis de réduire le corps des magistrats, le législateur poursuivit au contraire une politique diamétralement opposée : il augmente régulièrement et systématiquement le nombre de magistrats des cours et tribunaux [22], politique qui aura pour effet de bloquer la question la plus débattue de ces années, celle du relèvement du traitement des magistrats autres que les juges de paix [23]. Bien plus, par un étonnant paradoxe, bien qu’hostile au juge unique, le législateur ne se prive pas d’élargir régulièrement la compétence du juge de paix qu’on avait voulu pourtant, à l’origine, cantonner aux affaires de moindre importance précisément par défiance vis-à-vis de l’unicité de sa juridiction [24].

35Et pourtant, l’idée de réduire le nombre de magistrats progressera par une voie qui permettra, malgré tout, dans un premier temps, de sauvegarder le principe de la collégialité. Le législateur décida en 1891, à l’instar de ce qu’il fit en 1878 et 1882 pour les affaires électorales, de réduire le nombre de magistrats d’appel chargés de statuer en dernier ressort sur les affaires répressives [25]. Nulle protestation ne s’éleva : tout le monde fut d’accord pour voir dans cette mesure un progrès dans la réduction souhaitée [26]. Mais quel nouveau paradoxe ! Pourquoi ne pas étendre l’innovation aux matières civiles dont les débats ne portent que sur des faits précis, dont les données sont classées et dont les notes d’audience donnent l’explication de tous les actes de la cause? Au civil, l’examen a lieu à tête reposée, alors qu’au pénal, les affaires sont autrement plus difficiles à traiter : elles exigent du magistrat promptitude, habileté, rapidité [27]. Mais au civil, le blocage semble total [28] : en 1913, sur la pression notamment de la magistrature supérieure [29], le parlement refusera de voter un projet de loi visant la réduction des conseillers pour les affaires civiles [30] et ce malgré l’avis favorable de la commission de désencombrement de rôle qui avait sur ce sujet modifié sa position initiale [31].

36Malgré ces blocages, le courant qui tend à l’introduction du juge unique s’élargit en ce début de siècle. Il suffit de parcourir les rapports et les avant-projets élaborés par la commission de désencombrement de 1903 pour s’en convaincre [32]. Et fort de ces recommandations, le ministre de la justice Jules Renkin se risque même de déposer un projet de loi sur le juge unique en matière correctionnelle [33]. C’est la première fois que l’exécutif s’engage à ce point.

37Bien que cette tentative ait échoué [34], elle révèle néanmoins une évolution des mentalités que l’on peut aisément mesurer à propos d’une autre question qui occupera longuement et passionnément les esprits : celle de l’introduction d’une juridiction spéciale pour enfants. Une fois admis le principe de l’existence même d’un tribunal pour enfants, principe qui donna lieu à d’importantes controverses, une unanimité se dégagera rapidement sur la composition de ce tribunal. Et c’est le modèle du juge unique qui prévaudra [35].

38Il est vrai que le caractère particulier que l’on a voulu donner à cette juridiction, la distinguant des juridictions pénales ordinaires, peut expliquer cette unanimité. On estime que le tribunal pour enfants est de nature paternelle et tutélaire.Il semble donc exclure la pluralité des juges : l’enfant se soumettra plus facilement à un homme qu’à trois [36]. "L’enfant en présence de trois juges restera sur la défensive et ne s’abandonnera pas à un bon mouvement" estime Mme Carton de Wiart [37]. On a donc voulu enlever à cette juridiction son caractère répressif et tout l’appareil judiciaire intimidant pour en faire une juridiction paternelle [38]. Mais quelles que soient ces restrictions, le juge unique est bel et bien reconnu et introduit dans notre organisation judiciaire [39].

La percée définitive du juge unique

39L’avancée définitive du juge unique aura lieu en 1919. C’est en effet par la loi du 25 octobre 1919 que sont introduites les deux réformes capitales consistant dans la réduction de cinq à trois magistrats siégeant aux chambres civiles des cours d’appel et dans l’introduction en première instance, tant en matière civile que répressive, de chambres ne comprenant qu’un seul juge [40].

40Comment expliquer cette brusque percée ?

41D’abord et toujours l’arriéré judiciaire. Mais cette fois, du fait de la guerre, il se pose avec une acuité toute particulière [41]. De nombreux procès ne peuvent être terminés durant la guerre à la suite de la loi du 4 août 1914 suspendant les poursuites en matière civile et commerciale contre les citoyens présents sous les drapeaux; de nombreuses remises furent également accordées parce que l’une des parties se trouvait à l’étranger ou au front. A ces causes s’ajoute un autre facteur, plus désastreux : la justice nationale suspendit ses travaux en février 1918 en guise de riposte à l’interventionnisme intempestif de l’occupant [42]. Enfin la guerre elle-même engendra de multiples conflits dans tous les domaines du droit : procès en matière d’état civil, d’absence, de succession, d’exécution de contrats, ceux des loyers par exemple.

42Se pose également la délicate question du recrutement. Beaucoup de vacances se sont produites dans les tribunaux et celles-ci ne peuvent être facilement comblées car pendant les quatre années de guerre, on n’a plus guère formé de docteurs en droit. Selon E. Vandervelde, il s’agirait de renouveler près du tiers de la magistrature [43].

43Demeure enfin le problème de la qualité même des magistrats. L’augmentation systématique du personnel n’a guère favorisé la sélection. Et le premier président de la cour d’appel de Bruxelles de lancer un véritable cri d’alarme :"la moyenne des nominations directes n’a pas présenté la valeur que l’on peut légitimement exiger des titulaires d’une fonction aussi importante" [44].

44Si l’accord est général sur la nécessité de faire face à cette grave crise de fonctionnement du judiciaire autrement que par des palliatifs tels que par exemple la nomination de nouveaux magistrats effectifs et suppléants et ce d’autant plus que les finances publiques sont, à ce moment, plutôt délabrées [45], l’unanimité ne se dégagera que très difficilement sur l’opportunité d’introduire le système du juge unique. L’élaboration de la loi de 1919 atteste à loisir les multiples divergences qui traverseront alors la classe politique. Le projet gouvernemental était au départ très large [46] : toutes les affaires correctionnelles et toutes celles sujettes à appel (civiles et commerciales) étaient déférées à une chambre ne comportant qu’un juge. Les autres chambres statueraient sur les causes non appelables. Au Roi était attribuée la désignation du juge appelé à juger seul. Projet maximaliste donc à l’inverse de celui de la section centrale d’après lequel tout était remis au choix des parties et le juge unique au lieu d’être désigné par le Roi l’était par le président du tribunal.

45A la suite de discussions ardues, le gouvernement substitua au projet primitif un texte nouveau fait de concessions réciproques qui devint la loi définitive. Celle-ci énumère limitativement un certain nombre d’affaires tant civiles que correctionnelles qui sont dévolues au juge unique; le président a toute latitude pour répartir les autres affaires entre les chambres d’un juge ou de trois juges. Par ailleurs, il est bien établi que la juridiction composée de trois magistrats est l’institution de droit commun.

46Mais ce qui conditionnera finalement l’adhésion définitive, c’est l’affirmation maintes fois répétée du caractère expérimental de la loi et surtout son caractère provisoire, la section centrale obtenant qu’elle ne soit d’application que durant deux années.

47On le voit, le pas est donc franchi, emportant les réticences les plus tenaces. La loi fut régulièrement prorogée [47]. Et l’on sait que ce n’est qu’en 1967, soit quarante ans plus tard, que ce travail de titan fut réalisé par Charles Van Reepinghen dont le code judiciaire consacra définitivement le juge unique dans l’organisation judiciaire de la Belgique, malgré des réserves qui ne cessèrent de s’exprimer [48], mais en le considérant toujours comme "une juridiction d’exception".

Conclusions

48De ce rapide survol, quelques pistes de réflexion se dégagent concernant autant la position du pouvoir judiciaire que la manière dont on perçoit le rôle du juge dans la société.

49La question du juge unique révèle bien, à sa façon, le problème rencontré par l’Etat belge d’adapter ses institutions aux évolutions économiques et sociales, surtout à partir du moment où l’importance des partis politiques devint prépondérante. Or la question de la réforme judiciaire, qui contenait celle du juge unique, surgit précisément durant une phase de durcissement politique. Par la suite, le poids de la particratie fut tel que l’inertie et l’intérêt partisan l’emportèrent sur les nécessités.

50L’on peut ainsi interpréter le double phénomène de la résistance à l’introduction du juge unique et la politique délibérément poursuivie d’augmenter systématiquement le personnel judiciaire et cela malgré les charges qu’elle entraînait pour le Trésor, comme l’expression de la volonté de la classe politique de maintenir réservé au pouvoir exécutif le système de nomination surtout pour les juges du premier degré. Que l’on n’ait toujours pas aujourd’hui modifié ce système de recrutement est à cet égard révélateur [49].

51Et si l’on admit finalement d’introduire le juge unique, c’est en lui ôtant toutes les mesures accompagnatrices qui auraient fait du juge unique autre chose qu’un juge seul. En 1919, on n’a retenu de la thèse de Picard que la visée technique et pragmatique. C’était une loi d’expédient. Le juge unique de 1919 est un juge dépouillé, privé des autres atouts dont Picard avait démontré toute l’importance. Jules Destrée a bien perçu cette restriction lorsqu’il refusa de considérer le juge unique de 1919 comme la réalisation du système de Picard qui impliquait en même temps et une amélioration substantielle des émoluments du juge et un autre mode de recrutement [50].

52On n’est jamais parvenu en Belgique à concevoir et à réaliser une réforme judiciaire complète et systématique. En fait les réformes introduites dans l’organisation judiciaire se sont toujours produites dans des moments de crise : le juge unique est admis en 1919 suite aux bouleversements causés par la guerre. De même, il est généralisé en 1985 pour faire face à un arriéré judiciaire que la crise économique amplifia démesurément. Certes ces contextes de crises permettent d’obtenir des consensus mais le plus souvent à propos de réformes partielles et incomplètes.

53Et lorsque, par temps plus calme, on envisage de réformer plus profondément et plus globalement, c’est le compromis qui l’emporte au point parfois, ce fut le cas dans les années 1920-1930, de produire une législation hybride et cahotante.Même la codification de Charles Van Reepinghen n’échappe pas à ces reproches : considérée hier comme une œuvre de codification originale, certains n’hésitent plus aujourd’hui à estimer qu’il s’agit là d’un travail d’ordonnancement, certes impressionnant et réussi, plutôt que d’une innovation [51].

54Quoi qu’il en soit de ces restrictions, si toutes les portes ne sont pas ouvertes en même temps, celles que l’on ouvre permettent le déploiement de pratiques nouvelles qu’il devient impossible de maîtriser car elles déterminent autant qu’elles révèlent des mouvements d’idées incontrôlables.

55Le développement progressif du juge unique dans notre organisation judiciaire révèle aussi une évolution de la relation du justiciable à la justice. L’institution du juge unique conduit aujourd’hui à une personnalisation et à une responsabilisation accrues du juge. Ce n’est plus le tribunal qui juge mais tel ou tel juge. Un mythe s’est ainsi progressivement fissuré : celui de la justice sereine, à l’abri des pouvoirs, des passions et de l’esprit partisan. Les dieux ne sont plus sur l’Olympe. Et, partant, se trouve également modifiée la relation à la justice : ses décisions sont aujourd’hui critiquées, contestées, parfois même combattues. La guerre des juges, des événements récents l’ont montré, n’est pas qu’un slogan. En 1922, Prosper Poullet avait déjà bien pressenti cette évolution lorsqu’il déclarait à la tribune de la Chambre : "il ne faut pas que ni le public, ni les justiciables, quand une décision a été rendue, pourrait avoir cette pensée : si le cas avait été soumis à tel autre juge unique de la juridiction, la décision eût été autre" [52].

56Il n’appartient pas à l’historien d’émettre un quelconque jugement de valeur sur le sens de cette évolution. Mais il se doit de constater que la démocratisation de la société a progressivement bouleversé un mode de relation à la justice dont l’organisation avait été pensée au départ dans un cadre moins conflictuel, plus consensuel alors qu’aujourd’hui, elle apparaît de plus en plus inadaptée et même, dans certains de ses aspects comme l’a démontré l’actuel procureur général près la Cour de cassation, totalement obsolètes [53]


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Date de mise en ligne : 08/09/2019

https://doi.org/10.3917/riej.023.0097

Notes

  • [1]
    Loi du 25 juillet 1985 modifiant les articles 91 et 92 du code judiciaire (M.B., 14 août 1985, pp. 11703-11704).
  • [2]
    Loi du 19 juillet 1985 relative à la création de chambres d’appel à conseiller unique au sein des cours d’appel (M.B., 15 août 1985, pp.11777-11779).
  • [3]
    A voir concernant cette législation, A. Kebers,La loi du 19 juillet 1985 relative à la création des chambres à conseiller unique au sein des cours d’appel, dans J.T., 1985, pp. 677-683 et J. Gillardin, Conseillers et juges uniques, dans Journal des Procès, 10 septembre 1985, n° 68, p. 28. La question du conseiller unique a fait l’objet d’une importante controverse. Voir notamment E. Verougstraete, Faut-il constituer dans les cours d’appel des chambres à conseiller unique ?, dans J.T., 1975, p. 32 ainsi que du même auteur De contestés à contestataires, dans J.T., 1975, p. 736 ; A. Maréchal, Le conseiller unique à la cour d’appel, dans J.T., 1979, p. 468 ; P. Mahillon, A propos du conseiller unique, dans J.T., 1975, p. 556.
  • [4]
    Cette absence de discussions parlementaires tient peut-être au fait qu’en 1985 cette question ne soulève plus guère d’objections majeures. L’ordre national des avocats avait notamment marqué son accord sur l’introduction du conseiller unique dans un avis remis à la commission de la justice du Sénat (D.P., Sénat, session 1984-1985, séance du 2 juillet 1985,n° 910/2, pp.8-10).
  • [5]
    E. Garsonnet, Traité théorique et pratique de procédure. Organisation judiciaire, compétence et procédure civile et commerciale, T. I, Paris, 1882, pp. 67-68 ; F. Thiry, Organisation judiciaire. Compétence et procédure en matière civile, Liège, 1893, p. 28.
  • [6]
    Chambre des Représentants, séance du 9 juin 1832, dans M.B., 11 juin 1832, p. 1351.
  • [7]
    "Sous l’empire de la loi organique de l’ordre judiciaire en Belgique, le nombre fixe des juges est une condition constitutive et essentielle de la formation légale d’une cour ou d’un tribunal pour qu’il soit investi du pouvoir de juger; en nombre supérieur à celui déterminé, le tribunal n’a pas plus de pouvoir qu’en nombre moindre. La violation de cette règle produit une nullité radicale et d’ordre public qui vicie l’arrêt ou le jugement de sa substance"(Arrêt de la Cour d’appel de Gand du 6 juin 1834 dans Jurisprudence du XIXe siècle, 1834, 3e partie, p. 336).
  • [8]
    Ce travail fondamental porte sur les sources du code judiciaire actuel. Il s’agira d’étudier l’évolution de l’organisation judiciaire, de la compétence et de la procédure de 1830 à 1945.
  • [9]
    E. Picard, Rapport sur le juge unique. Rapport présenté à la Fédération des avocats belges lors de la séance du 27 novembre 1887, Bruxelles, 1887. Ce rapport a également été publié en introduction du tome XXIV des Pandectes belges, Bruxelles, 1887, pp. IX-L. Les premiers éléments de la théorie du juge unique sont formulés dès 1884 dans le J.T., 3 août 1884, col. 982.
  • [10]
    A. Prins, Criminalité et répression (paru en 1886), in L’œuvre d’Adolphe Prins, Bruxelles, 1934, p. 285.
  • [11]
    Ces débats se développèrent à l’occasion de la publication d’un texte important qu’Odilon Barrot consacra à l’organisation judiciaire en France. Le texte de Barrot ainsi que la controverse qu’il suscita sont parus dans Comptes-rendus des séances et des travaux de l’Académie des sciences morales et politiques, T. 25, 1871, pp. 351-371, 673-712 ; T.26, pp.7-60, 247-377 ; T.27, 1872, pp. 465-480 ; T. 28, 1872, pp. 6-26, 161-187 ; T. 29, 1872, pp. 491-521.
  • [12]
    J. Bentham, Oeuvres, T. III, Bruxelles, 1830, pp. 14-19 (édition Dumont et Laroche). Sur l’œuvre de Bentham, voir Actualité de la pensée juridique de Jeremy Bentham, Bruxelles, 1987 (sous la direction de Ph. Gerard, F. Ost et M. van de Kerckove).
  • [13]
    Le premier numéro du Journal des tribunaux date du 15 décembre 1881. Dans la présentation de la charte du journal, on peut lire notamment : "Le Droit…et les œuvres de la justice apparaissent, à quiconque n’est pas initié, comme un ensemble bizarre de règles et de pratiques toutes de convention, sans réalité et sans équation avec les vraies nécessités sociales …Il faut se rapprocher davantage de la masse en choisissant parmi les faits si variés du mouvement judiciaire ceux qui ont pour elle de l’intérêt, et en les lui présentant dans leurs éléments les plus simples, sans cependant leur enlever cette couleur technique qui en fait le charme et l’originalité (J.T., 15 décembre 1881, p. 1).
  • [14]
    Voir notamment la discussion générale du budget du ministère de la justice de 1887 dans A.P., Ch., séance du 21 janvier 1887, pp. 344-345 et p. 379.
  • [15]
    A.P., Ch., séance du 21 janvier 1887, p. 352.
  • [16]
    Compte rendu de la session du 27 novembre 1887 de la Fédération des avocats belges, dans J.T., 1887, p. 1445.
  • [17]
    A. Braun-A. Moreau, La réorganisation judiciaire. Rapport présenté à la Fédération des avocats belges lors de l’assemblée générale du 30 mai 1896, Bruxelles, 1896, p. 42.
  • [18]
    J.T., 1896, p. 701.
  • [19]
    E. Eeckman, Cour d’appel de Bruxelles. Sa situation. Son arriéré, dans B.J., 12 déc.l886, col. 1569-1586.
  • [20]
    Ibidem, p. 1580.
  • [21]
    M. Melot, Le juge unique et le recrutement de la magistrature en Belgique. Discours prononcé lors de l’audience solennelle de rentrée de la Cour de cassation le 1er octobre 1897, dans Pas., I, pp. 1-11.
  • [22]
    Citons notamment la loi du 24 août 1887 augmentant le personnel des tribunaux de première instance de Bruxelles, Anvers et Liège; celle du 4 septembre 1891 augmentant le personnel de la Cour d’appel de Bruxelles ; celle du 11 septembre 1895 augmentant de deux conseillers le personnel de la Cour d’appel de Bruxelles ; celle du 27 avril 1898 augmentant le personnel des tribunaux de première instance de Bruxelles, Anvers et Charleroi ; celle du 3 août 1909 augmentant le personnel des tribunaux de Bruxelles et d’Anvers ; celle du 12 août 1911 augmentant le personnel des tribunaux de Charleroi, Mons, Bruges, Anvers, Malines et Termonde.
  • [23]
    La bibliographie sur ce sujet est abondante. Citons uniquement le Rapport général de la commission instituée le 8 septembre 1919, dans B.J., 1920, col. 113-125 qui introduit parfaitement à la problématique et à l’historique de la question.
  • [24]
    La compétence du juge de paix a été fixée par la loi du 26 mars 1876. Depuis cette date et jusqu’en 1919, cette compétence a été étendue aux matières suivantes : instruction obligatoire, repos dominical, réparation des accidents de travail, la chasse, les petits héritages, l’épargne de la femme mariée, le contrat de travail, les mines, les loyers. Sur cette question, voir notamment H. Carton, Rapport au Sénat du budget du ministère de la justice pour l’année 1922, dans D.P., Sénat, session 1921-1922, séance du 31 mai 1922, n° 80, p. 228.
  • [25]
    Article 2 de la loi du 4 septembre 1891 modifiant l’article 84 de la loi du 18 juin 1869 sur l’organisation judiciaire.
  • [26]
    A. Braun-A. Moreau, op.cit., pp. 42-43.
  • [27]
    Cette question de la composition des chambres des Cours d’appel mériterait également à elle seule un long développement. Pour un premier aperçu technique et historique, voir un article signé O. A, La veille d’un débat, dans B.J., 29 mai 1913, col. 657-661.
  • [28]
    En 1903, le gouvernement installe une commission instituée pour l’accélération de la justice et le désencombrement des tribunaux (J.T., 16 juillet 1903, col.882-887) présidée par P. Van Iseghem, conseiller à la Cour de cassation. Cette commission fut saisie d’une proposition réduisant à trois le nombre de conseillers en matière civile. Cfr A. CALLIER, La crise de la magistrature, dans B.J., 7 décembre 1919, col. 1329-1330).
  • [29]
    Voir notamment l’opposition ferme du Procureur général près la Cour de cassation Terlinden, L’heure est-elle venue de réduire en matière civile le nombre des juges d’appel ?, dans J.T., 1913, col. 17-24, 49-60 et 81-92.
  • [30]
    Plus exactement, le gouvernement déposa en 1912 un projet de loi modifiant la composition des chambres des cours d’appel dans le sens d’une réduction des conseillers à trois pour les affaires civiles et portant augmentation du personnel de certains tribunaux (D.P., Ch., session 1912-1913, séance du 12 novembre 1912, n°11). Le parlement se prononça pour la disjonction du projet, reportant à plus tard le problème de la composition des chambres des cours d’appel (A.P., Ch., 23 août 1913, pp.2228-2229).
  • [31]
    A. Callier, op.cit., p. 1330.
  • [32]
    La commission de désencombrement rédige un avant-projet de loi permettant à la chambre du conseil de renvoyer certains délits devant un juge unique (rapport et texte de l’avant-projet dans J.T., 31 mars 1904, col. 414-417) et un autre avant-projet concernant l’extension de la compétence des présidents des tribunaux de première instance permettant au juge seul de statuer, dans des limites restreintes, sur les affaires civiles (rapport et texte de l’avant-projet de loi dans J.T., 10 avril 1914, col. 473-476).
  • [33]
    D.P., Ch., session 1907-1908, séance du 22 novembre 1907, n°14.
  • [34]
    Le projet ne sera jamais examiné par la commission qui avait pourtant été constituée à cet effet.
  • [35]
    Voir notamment A. Materne, La charte de l’enfance. Commentaire de la loi du 15 mai 1912, Bruxelles, 1913, pp. 137-140.
  • [36]
    M. Collaert, Rapport fait à la chambre au nom de la section centrale sur les amendements proposés par le gouvernement, dans Pasin., 1912, p.273.
  • [37]
    Mme Carton De Wiart, Les tribunaux pour enfants. Rapport présenté au congrès international des patronages à An vers. Juillet 1911, p. 40.
  • [38]
    A. Oliviers, Protection de l’enfance.Réflexion sur la loi du 15 mai 1912, dans J.T., 1912, p. 780.
  • [39]
    H. Carton de Wiart a bien perçu l’importance de cette réforme judiciaire dans ses Souvenirs politiques (1878-1918), T.I, Bruxelles, 1948, p. 186.
  • [40]
    Loi du 24 octobre 1919 modifiant temporairement l’organisation judiciaire et la procédure devant les cours et tribunaux (M.B. du 9 novembre 1919).
  • [41]
    Sur l’analyse complète de l’arriéré, voir l’exposé des motifs du projet de loi (D.P., Ch., session 1918-1919, séance du 22 mai 1919, n°169, pp. 524-526).
  • [42]
    Sur le cours de la justice durant la guerre, voir Terlinden, La magistrature belge sous l’occupation allemande.Souvenirs de guerre.Août 14 - octobre 18. Discours du procureur général prononcé à l’audience de rentrée de la Cour de cassation du 1er octbre 1919, dans B.J., 1919, col 1169-1182 et 1201-1225. Sur les raisons qui ont motivé la suspension du cours de la justice en février 1918, voir Une page de gloire de la magistrature belge, dans J.T., 1918, col. 946-952 et 963-967 avec des sources inédites.
  • [43]
    A.P., Ch., séance du 17 juillet 1919, p. 1306.
  • [44]
    Discours de H. Levy Morelle lors de son installation comme Premier président de la Cour d’appel de Bruxelles, dans B.J., 1919, p.645.
  • [45]
    Voir à ce sujet les contributions de F. Vrancken, E. Seulen, M. Masoin, G. Coppée, E. Moulard et J. Grauls, Histoire des finances publiques en Belgique, T.II, Bruxelles, 1954.
  • [46]
    Sur une analyse détaillée de cette loi, voir C. Marcotty, Loi du 25 octobre 1919 modifiant temporairement l’organisation judiciaire et la procédure devant les cours et les tribunaux, dans B.J., 31 juillet 1921, col. 481-488.
  • [47]
    En 1928, le parlement décida de la proroger jusqu’au jour de l’entrée en vigueur de la loi modifiant les lois d’organisation, de compétence et de procédure. Voir l’article 1 de la loi du 18 août 1928 prorogeant les lois temporaires d’organisation judiciaire et la loi de surséance à certaines nominations judiciaires.
  • [48]
    Citons entre autres les travaux du Centre d’études pour la réforme de l’Etat publiés sous le titre Réforme de la procédure, T. I, Bruxelles, 1937, pp. 1-129. Une synthèse en est parue dans La réforme de l’Etat, Bruxelles, 1937, pp. 431-496.
  • [49]
    Voir à ce propos Les pouvoirs du judiciaire (sous la direction de C. Panier et F. Ringelheim), Bruxelles, 1987.
  • [50]
    A.P., Ch., séance du 30 septembre 1923, p. 1342.
  • [51]
    A. Fetweis, Introduction au droit judiciaire. Les institutions, 8e édition, Liège, 1985, p. 13 : "Si le code Van Reepinghen a réalisé une amélioration des lois de justice, il n’a pas poussé la modernisation espérée en 1958. Dans leur ensemble, les institutions antérieures subsistent et, à certains égards, le code réalise davantage une bonne coordination et un rajeunissement du droit écrit qu’un renouvellement des structures et des principes. Il n’y a pas de rupture avec le passé. Les normes fondamentales sont peu modifiées".
  • [52]
    A.P., Ch., séance du 4 mai 1922, p. 707.
  • [53]
    E. Krings, Considérations critiques pour un anniversaire. Discours prononcé par le Procureur général à l’audience de rentrée de la Cour de cassation du 1er septembre 1987, dans J.T., 10 octobre 1987, pp. 545-557.

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