Couverture de RIDE_234

Article de revue

Propriété intellectuelle, concurrence et régulation – limites de protection et limites de contrôle

Pages 399 à 450

Notes

  • [1]
    Professor Dr. iur., M. C. J. (N. Y. Univ.), professeur émérite, Universität der Bundeswehr München ; ancien professeur Institut universitaire européen, Florence ; professeur visiteur, Collège d’Europe, Bruges.
  • [2]
    Cornish, The Expansion of Intellectual Property Rights, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), Geistiges Eigentum im Dienst der Innovation, Baden-Baden 2001, 9 et suiv. ; quant au plan communautaire voir Seville, EU Intellectual Property Law and Policy, Cheltenham 2009, passim ; Ullrich, Die gemeinschaftsrechtliche Entwicklung des Rechts des geistigen Eigentums, dans Behrens (Hrsg.), Stand und Perspektiven des Schutzes Geistigen Eigentums in Europa, Baden-Baden 2004, 9 et suiv.
  • [3]
    Voir pour les brevets Office européen des brevets (OEB), Rapport annuel 2008, Munich 2009, 66 et suiv. ; World Intellectual Property Organisation (WIPO/OMPI), World Patent Report 2008, Genève 2008 ; pour les marques et les dessins et modèles, Office d’harmonisation pour le Marché intérieur (OHMI), Rapport annuel 2008, Alicante 2009, 4 et suiv.
  • [4]
    D’une part, la Commission européenne multiplie et intensifie ses instruments de poursuite à l’égard des ententes les plus nocives et les plus faciles à évaluer (voir Commission, Rapport sur la politique de concurrence 2008, Bruxelles, 23. VII.2009, COM (2009) 374 fin. , n° 5 et suiv., n° 18 (procédure de transaction) ; Vialfont, Le droit de la concurrence et les procédures négociées, RIDE 2007, 157 et suiv.). D’autre part, la Commission guide et tolère la « coopération entre concurrents » (voir Commission, Lignes directrices sur l’applicabilité de l’article 81 du Traité CE aux accords de coopération horizontale, J. O. C. E. 2001 C 3, 2). Il est vrai que pour certains secteurs, notamment les secteurs régulés ou susceptibles d’être régulés, le tableau est plus nuancé.
  • [5]
    Dont les affaires relatives à la propriété intellectuelle figurent parmi les plus importantes. Voir infra sub 2.2.2. ; 3.1.2.3.
  • [6]
    Voir Considérant 47 et Art. 16 (3) Directive 96/9/CE du Parlement et du Conseil du 11 mars 1996 relative à la protection des banques de données, J. O. C. E. 1996 L 77, 20.
  • [7]
    Voir Commission du 16 juill. 2008, COMP/C-2/38.698-CISAC, J. O. U. E. 2008 L 323, 12.
  • [8]
    Commission, Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 du Traité CE aux accords de transfert de technologie, J. O. U. E. 2004 C 101, 2, sub n° 8 et suiv., et infra sub 2.1.
  • [9]
    À savoir dans la mesure où l’accord est de nature « vertical » et son contenu économiquement contrôlé par la concurrence « horizontale » entre technologies (intra-brand competition), voir infra sub 2.1.
  • [10]
    Voir infra sub 3.1.2. pour les affaires Magill TV-Guide et Microsoft.
  • [11]
    Commission, Communication du 8 juill. 2009, synthèse du rapport d’enquête sur le secteur pharmaceutique, sub 1. (p. 3 et suiv.), 3.3. (p. 18) ; id., Pharmaceutical Sector Inquiry, Final Report, 8 July 2009, sub n° 3 et suiv., 14 (http:// ec. europa. eu/ competition/ sectors/ pharmaceuticals/ inquiry/ index.html).
  • [12]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., n° 7, 10, 32 ; id., Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 (3) du Traité, J. O. U. E. 2004 C 101, 97, n° 5, 11, 13 et suiv. ; id., Communication relative aux « Orientations sur les priorités retenues par la Commission pour l’application de l’article 82 du Traité CE aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes », J. O. U. E. 2009 C 45, 7, n° 5 et suiv., 28 et suiv. ; Drexl, Competition Law – Between the Lisbon Treaty and the Economic Approach, dans v. Bogdandy, Bast (eds.), Principles of European Constitutional Law, 2e éd. Oxford 2009 (à paraître), sub III.
  • [13]
    Voir référence supra n. 11 et Commission, Une politique de concurrence proactive pour une Europe compétitive, Bruxelles, 20. IV.2004, COM (2004) 293 final ; Forrester, Komninos, Agenda de Lisbonne et droit de la concurrence, Concurrences 2006 (3) 1 ; Riem, Concurrence effective ou concurrence efficace ? L’ordre concurrentiel en trompe-l’œil, RIDE 2008, 67, 82 et suiv.
  • [14]
    Voir infra sub 3.1.2., 3.2.1.
  • [15]
    L’analyse qui suit ne porte essentiellement que sur la propriété industrielle technologique censée servir l’innovation économique (brevets, dessins et modèles), y compris le droit d’auteur « technologique » (programmes d’ordinateurs, banques de données). Le droit d’auteur en général et le droit des marques ne seront abordés que de manière sélective.
  • [16]
    Voir pour une présentation et une critique Buxbaum, Restrictions Inherent in the Patent Monopoly : A Comparative Critique, 11 U. Pa. L. Rev. 633 (1965) = WuW 1966, 193 (version allemande).
  • [17]
    Voir le § 20 de la loi (allemande) contre les restrictions à la concurrence du 27 juillet 1957 (BGBl I, 1081), entrée en vigueur le 1er janvier 1958 ; ce § 20 est devenu le § 17 en 1998 et a été abrogé par la loi du 1er juillet 2005 (BGBl I, 1954, 2115), laquelle adopta plus ou moins in toto les règles de concurrence du Traité CE ainsi que leur système et Règlements d’application.
  • [18]
    Voir U. S. Department of Justice/Federal Trade Commission (DoJ/FTC), Antitrust Guidelines for Licensing of Intellectual Property, Washington D. C. April 6, 1995, 4 Trade Reg. Rep. (CCH) 13.132 ; Baxter, Legal Restrictions on Exploitation of the Patent Monopoly : An Economic Analysis, 76 Yale L. J. 267 (1966) et suiv.
  • [19]
    Commission, Communication du 24 décembre 1962 relative à l’application de l’article 85 du Traité aux contrats de licence, J. O. C. E. 1962, n° 139, 2922. Cette communication, dite « de Noël », fut abrogée lors de la promulgation du premier Règlement (2349/84) exemptant certaines catégories de licence de brevet de l’application de l’article 85 en 1984.
  • [20]
    On retrouvera, certes, des traces de cette doctrine dans certaines décisions de la Commission, et même dans les arrêts de la Cour, voir CJCE du 25 fév. 1986, aff. 193/83, Windsurfing International/ Commission, Rec. 1986, 611.
  • [21]
    Pour l’importance persistante de la concurrence intra-marques, établie par CJCE du 13 juill. 1966, aff. 56 et 58/64, Grundig, Consten/Commission, Rec. 1966, 321, 386 et suiv., 390 et suiv. ; id. du 13 juill. 1966, aff. 32/65, Italie/Conseil, Rec. 1966, 457, 484 et suiv. ; voir récemment CJCE du 16 sept. 2008, aff. C-468/06 à C-478/06, Lelos Kai Sia et al./GlaxoSmithKline, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 52 et suiv.
  • [22]
    C’était toute l’importance de CJCE du 8 juin 1982, aff. 258/78, Nungesser/Commission, Rec. 1982, 2015 (Semences de maïs).
  • [23]
    Voir pour les intérêts et motifs des parties sous-jacents à un accord de licence Ullrich, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), EG-Wettbewerbsrecht, 1re éd. Munich 1997, t.1, p. 1264 et suiv.
  • [24]
    Mestmäcker, Europäisches Wettbewerbsrecht, Munich 1974, 473 et suiv. concluait déjà que l’examen pertinent n’était pas de comparer la situation telle qu’elle se produirait sous le brevet avec ou sans un accord de licence, mais de se demander quelle concurrence pourrait se produire en l’absence de la restriction contractuelle en question.
  • [25]
    DoJ/FTC, Guidelines IP Licensing, loc. cit., sub 2.0, 2.1 ; pour une analyse critique Peritz, Competition Policy and its Implications for Intellectual Property Rights in the United States, dans Anderman (ed.), The Interface Between Intellectual Property Rights and Competition Policy, Cambridge (CUP) 2007, 125, 203 et suiv.
  • [26]
    Voir TPI du 23 oct. 2003, aff. T-65/98, Van den Bergh Foods/Commission, Rec. 2003 II 4653, confirmé par CJCE du 28 sept. 2006, aff. C-552/03 P, J. O. U. E. 2006 C 294, 19.
  • [27]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub. n° 7 ; et de façon expresse dans Commission, Projet de Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 du Traité aux accords de transfert de technologie, du 25 sept. 2003, sub n° 9, 1re phrase, puis omise au n° 9 des Lignes directrices telles qu’entrées en vigueur. Dans Commission, Rapport d’évaluation sur le Règlement d’exemption par catégorie (CE) n° 240/96 relatif aux accords de transfert de technologie, Bruxelles 2001, sub n° 30, on pouvait encore lire que la propriété intellectuelle est distincte d’autres formes de propriété en ce qu’elle serait « moins absolue », à savoir limitée dans le temps ou quant à son étendue, ou en ce qu’elle ne protège pas contre les « développements parallèles » (droit d’auteur, savoir-faire). Cette confusion entre objet protégé et nature du droit protégeant l’objet réapparaît presque littéralement chez Lowe, Peeperkorn, Intellectual Property : How Special is its Competition Case ?, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), The Interaction Between Competition Law and Intellectual Property Law, European Competition Law Annual 2005, Oxford (Hart) 2007, 91, 92, où les auteurs s’étonnent également de ce que le savoir-faire (qu’ils traitent comme propriété) perd sa valeur lorsqu’il perd son caractère secret.
  • [28]
    Pour la notion de transfert de technologie voir Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 46 et suiv. En fait, l’application du Règlement 772/2004 (voir infra n. 30) ou des lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., ne dépend pas de ce qu’il y ait effectivement un transfert de technologie, mais seulement de ce qu’il y ait une licence (licence négative, voir Lignes directrices sub n° 204 et suiv. ; licences croisées, ibid., sub n° 32, 78), car les entreprises détiennent le plus souvent la technologie en question, mais ne sont pas autorisées à l’utiliser. Pour d’autres exemples voir Ullrich, The Interaction Between Competition Law and Intellectual Property Law – An Overview, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. xxviii, liii et suiv.
  • [29]
    Voir pour l’histoire depuis 1979 des Règlements d’exemption par groupe d’accords de licence de brevet (1984) ou de savoir-faire (1989), puis des accords de transfert de technologie (1996) Ullrich, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), 1re éd., loc. cit., p. 1268 et suiv. ; Waelbroeck, Frignani, Concurrence, 2e éd., dans Commentaire J. Mégret, Le droit de la CE, t. 4, Bruxelles (Éditions de l’Université de Bruxelles) 1997, 752 et suiv.
  • [30]
    Règlement (CE) n° 772/2004 de la Commission du 27 avril 2004 concernant l’application de l’article 81, paragraphe 3 du Traité à des catégories d’accords de transfert de technologie, J. O. U. E. 2004 L 123, 11 ; pour une présentation « d’autorité » voir Kjoelbye, Peeperkorn, The New Technology Transfer Block Exemption Regulation and Guidelines, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 161 et suiv.
  • [31]
    L’article 3 (2) du Règlement 772/2004 prévoit l’exemption de l’article 81 (1) du Traité pour tout accord de transfert de technologie à condition que la part détenue par chacune des parties sur les marchés de technologies et les marchés de produits en cause ne soit pas supérieure à 30 %. Une telle part de marché est généralement reconnue comme seuil à partir duquel un examen d’une dominance de marché peut devenir nécessaire.
  • [32]
    Voir la liste limitée de l’article 4 (2) du Règlement 772/2004, à savoir lit a) : fixation de prix minima ; lit b) : les territoires exclusifs protégés contre des ventes passives (avec la série (i)- (iv) de sous-exceptions ! ) ; lit c) et voir Art. 5 (1) (2), clauses non permises, mais « séparables », c’est-à-dire ne bloquant pas l’exemption de l’accord en tant que tel.
  • [33]
    L’article 3 (1) du Règlement 772/2004 exclut l’exemption par catégorie lorsque les parts de marché cumulées des parties à l’accord excèdent 20 % des marchés pertinents de technologies et de produits en cause ; la liste de l’article 4 (1) du Règlement 772/2004 relative aux clauses excluant l’exemption est plus longue et plus stricte, surtout en cas de licences réciproques, mais les sous-exceptions définissant l’étendue de l’exclusivité des licences restent considérables, Art. 4 (1) (i)- (vii).
  • [34]
    Voir Art. 1 (1) lit j) (i) Règlement 772/2004 et Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 26 et suiv. ; plus particulièrement n° 31 et suiv. (en ce qui concerne l’exemption par groupe, la concurrence potentielle sur le marché des technologies n’est pas prise en compte ; les situations de blocage transforment les rapports horizontaux en rapports verticaux) ; Ullrich, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. xlvii et suiv., et infra n. 45 avec texte accompagnant la note.
  • [35]
    Voir Anderman, EC Competition Policy and IPRs, dans Anderman (ed.), loc. cit., The Interface, p. 37, 81 et suiv. ; id., The New EC Competition Law Framework for Technology Transfer and IP Licensing, dans Drexl (ed.), Research Handbook on Intellectual Property and Competition Law, Cheltenham (Elgar) 2008, 107 et suiv. ; Drexl, Die neue Gruppenfreistellungsverordnung über Technologietransfer-Vereinbarungen im Spannungsfeld von Ökonomisierung und Rechtssicherheit, GRUR Int 2004, 716 ; Marquis, Patent, Knowhow, and Software Copyright Licensing : The EU Competition Regime, 52 Antitrust Bull. 239 (2007) ; Orstavik, Technology Transfer Agreements : Grant Bocks and No-Challenge Clauses in the New EC Technology Transfer Regulation, 36 IIC 83 (2005) ; Ullrich, Le droit de la concurrence, propriété intellectuelle, et accès à l’information technologique, dans Buydens, Dusollier (éd.), L’intérêt général et l’accès à l’information en propriété intellectuelle, Bruxelles 2008, 249, 266 et suiv.
  • [36]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 7 ; DoJ/FTC, Guidelines Licensing Intellectual Property, loc. cit., sub 1.0.
  • [37]
    Les considérations suivantes ont été exposées avec plus de détails et avec des références à la littérature économique (à commencer par Arrow, Economic Welfare and the Allocation of Resources for Inventions, dans NBER (ed.), The Rate and Direction of Inventive Activity, Princetone 1962, 609, 614 et suiv.) dans Ullrich, Lizenzkartellrecht auf dem Weg zur Mitte, GRUR Int 1996, 554, 564 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (eds.), Wettbewerbsrecht, 4e éd. Munich 2007, EG-Teil 2, p. 138 et suiv., 144 et suiv. ; voir également Mestmäcker, Gewerbliche Schutzrechte und Urheberrechte in der Eigentums – und Wirtschaftsordnung, Festschrift Immenga, Munich (Beck) 2004, 261, 263 et passim, et pour une analyse économique approfondie récente Scotchmer, Innovation and Incentives, Cambridge, Mass. (MIT Press) 2004, 34 et passim. Il convient de noter que l’argumentaire, qui suit, n’est pas affecté par les diverses idées qu’on peut se faire de la notion de propriété en la matière, voir pour une analyse récente Mosoff, Exclusion and Exclusive Use in Patent Law, 22 Harv. J. L. Tech’y 321 (2009).
  • [38]
    En ce sens, la propriété privée est non seulement le fondement, mais aussi au service du système du marché, de sorte qu’on ne saurait l’opposer au droit de la concurrence, comme le veut la thèse de la complémentarité. Toute propriété s’exerce dans le cadre du droit de la concurrence (voir supra n. 26). Le fait que, à juste titre, une valeur constitutionnelle fondamentale est attribuée à la propriété privée ne saurait dissimuler sa fonction subserviante à la liberté économique, voir pour une discussion détaillée Wielsch, Zugangsregeln, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008, 31 et suiv., 72 et suiv.
  • [39]
    Le phénomène d’obsolescence du savoir n’est généralement pas pris en considération, peut-être parce que la durée de la protection, pour ne pas manquer son but qui est de limiter la protection en vue d’une diffusion optimale du savoir, devrait normalement s’achever avant l’obsolescence du savoir, voir infra n. 126, 130.
  • [40]
    Cet argument classique, qui, aux États-Unis, est même de descendance constitutionnelle (Art. 1, Sect. 8 U. S. Const.), a toujours été le sujet de critiques, voir récemment Drexl, Geistiges Eigentum als integraler Bestandteil der europäischen Wettbewerbsordnung, dans FIW-Schriftenreihe n° 215, Wettbewerb in einem größeren Europa, Cologne 2007, 79, 89 et suiv. ; Engel, Geistiges Eigentum als Anreiz zur Innovation – Die Grenzen des Arguments, dans Eifert, Hoffmann-Riem (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Innovation, Berlin (Duncker, Humboldt) 2008, 43 et suiv. ; id., Innovationsanreize aus Wettbewerb und Kollusion, dans Ohly, Klippel (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Gemeinfreiheit, Tübingen (Mohr, Siebeck) 2007, 19 et suiv.
  • [41]
    Voir pour un tel malentendu LG Düsseldorf du 30 nov. 2006 – MPEG 2 – Standard, WuW DE-R 2120, 2128 ; voir par contre CJCE du 14 juill. 1981, aff. 187/80, Merck/Stephar, Rec. 1981, 2063 sub n° 10 ; du 5 déc. 1996, aff. jointes C-268/95, Merck/Primecrown, Rec. 1996 II 6285 sub n° 31. Voir également infra n. 123.
  • [42]
    Voir références supra n. 40 et pour le constat empirique, que l’existence du droit des brevets n’a que très peu d’influence sur les décisions des entreprises d’investir dans l’innovation Lowe, Peeperkorn, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 92 et suiv. avec références. Il est à noter que, malgré l’extension, l’expansion et le renforcement de la protection de la propriété intellectuelle, ce constat empirique est resté inchangé depuis au moins les années 1970, voir Grefermann, Oppenländer et al., Patentwesen und technischer Fortschritt, Teil 1 : Die Wirkung des Patentwesens im Innovationsprozeß, Göttingen (Otto Schwartz) 1974, 45 et suiv. L’intérêt de la propriété intellectuelle consiste en ce qu’elle protège l’innovation une fois qu’elle est faite, et qu’elle permet de prolonger son exploitation exclusive, c’est-à-dire que la protection opère ex post et de façon marginale, mais à cette limite critique où les barrières de fait à une concurrence d’imitation effective ne protègent plus suffisamment l’innovation. Puisque les entreprises anticipent cette protection, elles obtiennent une assurance accrue pour encourir le risque d’innovation.
  • [43]
    En pure théorie de modèle, on peut même affirmer qu’il n’y aurait pas de concurrence de substitution s’il n’y avait pas l’interdiction de l’imitation (voir également Mestmäcker, Festschrift Immenga, loc. cit., p. 264 et suiv.). Cette interdiction se justifie donc moins en tant qu’exigence de justice qu’en tant que condition préalable au progrès technologique par l’innovation. Encore faut-il entourer cette proposition d’une réserve, car, également en pure théorie, l’imitation ne paie que pour autant que l’innovation soit offerte (et acceptée par la demande) à un prix supra-marginal. L’imitation n’est donc rémunératrice qu’à court terme (tout comme, aux conditions d’une concurrence parfaite, les marchés de produits homogènes sont sans intérêt).
  • [44]
    Voir infra sub 2.2.3.2.
  • [45]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, supra n. 8.
  • [46]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 32. À cet égard, il importe de noter que les situations de blocage ne sont pas définies par rapport à des brevets, dont les revendications se recouvriraient en partie (les situations de dépendance technique, telles qu’en cas de brevets d’amélioration, ne sont mentionnées qu’à titre d’exemple), mais par rapport à des « technologies ». Le nombre de situations de blocage et donc de transformations de rapports concurrentiels horizontaux en rapports verticaux et les problèmes des limites des technologies en question seront d’autant plus grands.
  • [47]
    Sauf si les parties sont concurrentes sur le marché des produits, ce qui n’est pas nécessairement le cas (utilisation d’une même technologie à des fins différentes ou par des entreprises agissant sur différents marchés géographiques ou de produits, ou agissant sur différents échelons des marchés).
  • [48]
    Cette éventualité est à la base du dilemme qu’aucun propriétaire de droits exclusifs ne donnerait des licences s’il devait craindre que son licencié d’aujourd’hui soit son concurrent demain. On doit donc lui concéder la possibilité de tenir son licencié à une certaine distance concurrentielle, mais à quelle distance ? La règle énoncée par l’article 81 (3) du Traité exige qu’on n’admette d’autres restrictions de la concurrence que celles qui sont indispensables pour encourager le propriétaire du droit exclusif à donner des licences même à des tiers dont il peut raisonnablement présumer qu’en l’absence de la restriction en question, ils deviendraient ses concurrents.
  • [49]
    Voir supra n. 13.
  • [50]
    Commission, Final Report Sector Inquiry Pharma, loc. cit., sub C 3.1, 3.1.2. En effet, il y a une contradiction évidente entre le constat que les entreprises cherchent délibérément à créer des situations de blocage par brevets afin d’ « arrêter » leurs concurrents et la présomption « légale » qu’elles ne sont pas concurrentes.
  • [51]
    Voir infra sub 2.2.3, 3.1.2.
  • [52]
    Voir pour une perspective internationale Ullrich, Expansionist Intellectual Property Protection and Reductionist Competition Rules : A TRIPs Perspective, 7 (2) J. I. E. L. 401, 420 et suiv. (2004) = Maskus, Reichman (eds.), International Public Goods and Transfer of Technology Under a Globalized Intellectual Property Regime, Cambridge (CUP) 2005, 726, 746 et suiv. La problématique du transfert de technologie vers des pays en voie de développement et celle de l’existence ou de l’établissement d’un droit international de la concurrence ne peuvent pas être abordées ici.
  • [53]
    Jurisprudence constante depuis CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 112 ; du 18 févr. 1971, aff. 40/70, Sirena/Novimpex, Rec. 1971, 69, n° 16 ; du 8 avril 1971, aff. 78/70, Deutsche Grammophon/Metro-SB-Großmärkte, Rec. 1971, 487, sub n° 14 et suiv.
  • [54]
    Pour plus de détails Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 19 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., EG-Teil 2, p. 170 et suiv.
  • [55]
    Voir références supra n. 53 ; Drexl, The Relationship Between the Legal Exclusivity and Economic Market Power, dans Govaere, Ullrich (eds.), Intellectual Property, Market Power, and the Public Interest, Bruxelles (Lang), 2008, 13 et suiv.
  • [56]
    Pour plus de détails voir Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., EG-Teil 2, p. 173 et suiv. ; pour les rapports entre épuisement communautaire du droit exclusif et ségrégation territoriale abusive des marchés voir CJCE du 16 sept. 2008, aff. C-468/06 à C-478/06, Sot Lelos Kai Sia/GlaxoSmithKline, Rec. 2008 I (à paraître) ; du 6 oct. 2009, aff. C-501/06 P, C-513/06 P, C-515/06 P et C-519/06 P, GlaxoSmithKline Service/Commission, Rec. 2009 I (à paraître) ; pour un cas de discrimination internationale des prix en l’absence d’épuisement international TPI du 16 déc. 1999, aff. T-198/98, Micro Leader Business/Commission, Rec. 1999 II 3989 ; Ullrich, European Competition Law, Community-Wide Exhaustion and Compulsory Licences – Disintegrating the Internal Market in the Public Interest, dans Godt (ed.), Differential Pricing of Pharmaceuticals Inside Europe – Exploring Compulsory Licenses and Exhaustion, 2009 (à paraître).
  • [57]
    Jurisprudence constante depuis CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 113 ; du 23 mai 1978, aff. 102/77, Hoffmann-La Roche/Centrafarm, Rec. 1978, 1139 sub n° 16 ; du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211, sub n° 8 ; du 6 avril 1995, aff. C-241/91 P et C-242/91 P, RTE et ITP/Commission, Rec. 1995 I 743 sub n° 49.
  • [58]
    À cet égard, TPI du 10 juill. 1970, aff. T-51/89, Tetra Pak Rausing/Commission, Rec. 1990 II 309 sub n° 37, a rappelé que le principe suivant lequel une entreprise dominante doit veiller au maintien de la concurrence résiduelle s’applique également lorsqu’une telle entreprise essaye de renforcer sa position par le rachat d’une licence exclusive couvrant la seule technologie de substitution. Ce rappel est d’autant plus remarquable que la licence en question bénéficiait d’une exemption de l’article 81 (1) en vertu de l’article 81 (3) du Traité. Voir également CJCE du 11 déc. 2008, aff. C-52/07, Kanal 5/STIM, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 26.
  • [59]
    Voir CJCE du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211 (refus absolu) ; Commission du 22 déc. 1987, aff. IV/30.787 et 31.488, Eurofix-Bau co/Hilti, J. O. C. E. 1988 L 65, 19, confirmée par TPI du 12 déc. 1991, aff. T-30/89, Hilti/Commission, Rec. 1991 II 1439 (refus qualifié par l’exigence d’achat lié).
  • [60]
    Voir CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 113 ; du 5 oct.1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211 sub n° 9 ; du 11 déc.2008, aff. C-52/07, Kanal5/STIM, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 27 et suiv. ; à distinguer des pratiques de prix discriminatoires, voir CJCE du 13 juill. 1989, aff. 395/87, Ministère public/Tournier, Rec. 1989, 2521 sub n° 34 et suiv. ; pour une discussion générale voir Anderman, EC Competition Policy and IPRs, dans Anderman (ed.), loc.cit., p. 37, 49 et suiv.
  • [61]
    Pour l’affaire Le Point Vert /Der Grüne Punkt voir infra sub 2.2.2.3.
  • [62]
    Voir Commission, Communication en vertu de l’art. 27 para. 4 Règlement 1/2003 du Conseil dans l’affaire COMP/C-3/38636-Rambus, J. O. U. E. 2009 C 133, 16 insistant inutilement sur les aspects frauduleux du comportement de Rambus, très controversés aux États-Unis (voir pour plus de détails Ullrich, Patente und technische Normen : Konflikt und Komplementarität in patent- und wettbewerbsrechtlicher Sicht, dans Leistner (Hrsg.), Europäische Perspektiven des geistigen Eigentums (à paraître), sub II A1.
  • [63]
    Voir pour la problématique en général Liotard, Persistance et intensité des conflits entre normalisation et propriété intellectuelle : les enseignements de la 3e génération de téléphone mobile, RIDE 2008, 47 ; Levêque, Menière, Licensing Committments in Standard Setting Organisations, CERNA Working Paper 11/2007 ; Farrel, Hayes, Shapiro, Sullivan, Standard Setting, Patents, and Hold-up, 74 Antitrust L. J. 603 (2007) ; Merges, An Estoppel Doctrine for Patented Standards, 97 Cal. L. Rev. 1 (2009) ; Ullrich, dans Leistner (Hsrg.), loc. cit., sub II et passim ; id., Patente, Wettbewerb und technische Normen : Rechts- und ordnungspolitische Fragestellungen, GRUR 2007, 817 ; Ghidini, Intellectual Property and Competition Law, Cheltenham (Elgar) 2006, 103 et suiv.
  • [64]
    Voir Commission du 22 déc. 1987, supra n. 59 ; TPI du 17 sept. 2007, aff. T-201-04, Microsoft/ Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 814 et suiv. ; Lange, Europäisches Kartellrecht und geistiges Eigentum – der Fall Microsoft, dans Lange, Klippel, Ohly (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Wettbewerb, Tübingen (Mohr Siebeck) 2009, 131, 142 et suiv.
  • [65]
    Pour une discussion générale voir Grimes, Making Antitrust and Intellectual Property Policy in the United States : Requirements Tie-Ins and Loyalty Discounts, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 258 et suiv. ; Anderman, dans Anderman (ed.), loc.cit., p. 72 et suiv. ; Jones, Patent Power and Market Power : Rethinking the Relationship Between Intellectual Property Rights and Market Analysis, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 237 et suiv.
  • [66]
    Commission, Communication relative aux Orientations sur les priorités retenues par la Commission pour l’application de l’article 82 du Traité CE aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes, J. O. U. E. 2009 C 45, 7, sub n° 47 et suiv.
  • [67]
    Voir pour une excellente discussion Drexl, Abuse of Dominance in Licensing and Refusal to Licence : A « More Economic Approach » to Competition by Imitation and to Competition by Substitution, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 647.
  • [68]
    CJCE du 16 juill. 2009, aff. C-385/07 P, Der Grüne Punkt – DSD/Commission, Rec. 2009 II (à paraître).
  • [69]
    Commission du 20 avril 2001, aff. COMP D3/34493-DSD, J. O. C. E. 2001 L 166, 1 ; TPI du 24 mai 2007, aff. T-151/01, Der Grüne Punkt – DSD/Commission, Rec. 2007 II 1607 ; voir pour une discussion critique Traple, Trademarks as a Tool for Market Control, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 219.
  • [70]
    À cet égard, il est à noter que l’article 82 lit a) du Traité CE couvre non seulement l’abus par la demande de prix excessifs en tant que tel, mais condamne également des demandes de prix excessifs, dont le but ou le résultat est d’évincer les concurrents, voir supra n. 68, 69 et Anderman, dans Anderman (ed.) loc. cit., p. 53 et suiv.
  • [71]
    La marque devait être apposée sur les emballages avant la vente, alors que le choix d’une collecte collective ou individuelle, par le titulaire de la marque ou par un autre service de collecte, se faisait après la vente ou même après utilisation des produits emballés, et la répartition entre les systèmes de collecte se faisait par pourcentage global plutôt qu’au cas par cas, voir pour les détails et l’appréciation de l’impossibilité économique d’une séparation des marques TPI, supra n. 69, sub n° 129 et suiv. (143) ; CJCE, supra n. 68, sub n° 154 et suiv.
  • [72]
    En pratique, l’obligation de réduire les royalties à zéro revenait à une obligation de tolérer l’utilisation gratuite de la marque dans le cadre d’une licence volontairement concédée, de sorte que le titulaire gardait le contrôle de l’usage fait de la marque ; la CJCE, supra n. 68, sub n° 124 et suiv. (146) n’a pas manqué de noter cet aspect, bien que de manière quelque peu formaliste.
  • [73]
    Voir TPI, supra n. 69, sub n° 156 et suiv. La marque est apposée sur les emballages des produits et n’indique que la possibilité d’une collecte collective par DSD. Il n’y a aucun « passing off » de la marque en tant que marque de service de DSD par les concurrents offrant un autre système de collecte collectif ou par des clients/licenciés recourant au mode d’une collecte individuelle (auto-collecte = Selbstentsorgung), puisque, dans le commerce, tous doivent se servir de leurs propres marques.
  • [74]
    Voir TPI, supra n. 69, sub n° 146 et suiv.
  • [75]
    CJCE, supra n. 68, sub n° 141 et suiv. ; TPI, supra n. 69, sub n° 886 et suiv., 119 et suiv.
  • [76]
    TPI, supra n. 69, sub n° 157.
  • [77]
    Voir références supra n. 63.
  • [78]
    CJCE du 29 avril 2004, aff. C-418/01, IMS Health/NDC Health, Rec. 2004 I 5039 ; l’arrêt est mal motivé en ce qu’il insiste sur l’application de la règle du « produit innovateur » énoncée par l’arrêt Magill (voir infra sub 3.1.2.3.), mais c’est ainsi que le cas fut plaidé par les parties.
  • [79]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., sub n° 163, 174 et infra n. 85 ; pour plus de détails voir Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. A. 2., et infra sub 3.2.
  • [80]
    Voir références supra n. 63.
  • [81]
    BGH du 13 juill. 2004, GRUR 2004, 966 = WuW DE-R 1329, traduction en anglais, 36 IIC 741 (2005) – « bonde normalisée de tonneau ».
  • [82]
    Il semble que l’industrie chimique avait approché un certain nombre de producteurs de tonneaux, mais pas la partie portant plainte.
  • [83]
    BGH, supra n. 81, sub A III. 3. c) (bb).
  • [84]
    BGH du 6 mai 2009, GRUR 2009, 694 = WuW DE-R 2613-Orange Book Standard II (traduction en anglais à paraître dans IIC (2009)) ; pour une critique Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. 2. b).
  • [85]
    En ce qui concerne les organisations de normalisation publiquement reconnues, lesquelles, d’après Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., sub n° 163, ne tombent même pas sous le coup de l’article 81 (1) du Traité, l’exigence d’une accessibilité ouverte à leurs normes résulte tant des n° 174 de ces Lignes directrices (arg. a fortiori) que de leur statut, voir Commission, Lignes directrices générales relatives à la coopération entre CEN, CENELEC et ETSI, d’une part, et la Commission européenne et l’Association européenne de Libre-Échange, d’autre part, J. O. U. E. 2003 C 91, 7, 11 (sub n° 5) ; pour plus de détail voir infra sub 3.2. ; Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub II.
  • [86]
    Pour l’affaire Microsoft relative à un standard de facto établi individuellement par le titulaire d’une propriété intellectuelle, et dont l’utilisation est indispensable pour avoir accès à des marchés dérivés, voir infra n. 179 et texte accompagnant la note.
  • [87]
    Voir supra sub 2.1.2.
  • [88]
    La problématique va bien au-delà du dépôt de marques de réserve ou de blocage, que le droit des marques tente de contenir en des limites par l’obligation d’utiliser la marque (Art. 10 Directive 89/104/EC relative au rapprochement du droit des marques, version consolidée J. O. U. E. 2008 L 299, 25 ; Art. 15 Règlement 40/94 relatif à la marque communautaire) et par le contrôle des dépôts faits de mauvaise foi, voir Art. 3 (2) lit d) Directive n° 89/104, Art. 5 1 (1) lit b) Règlement 40/94, et CJCE du 11 juin 2009, aff. C-529/07, Lindt+Sprüngli/Hauswirth, Rec. 2009 I (à paraître). Pour une analyse du dépôt de marques stratégiques voir Kur, Strategic Branding – Does Trademark Law Provide for Sufficient Self Help and Self Healing Forces ?, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 191 ; pour le « umbrella branding » Anderman, dans Anderman (ed), loc. cit., p. 554 et suiv.
  • [89]
    Par exemple, lorsque la marque « Fussball WM 2000 » (Championnat de Football 2000), déposée pour plusieurs centaines de produits et services, fut annulée pour la plus grande partie par BGH du 27 avril 2006, GRUR 2006, 850 = 38 IIC 867 (2007), voir Kur, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 201 avec références.
  • [90]
    Voir références supra n. 88, 89 et pour une analyse monographique Stöckel, Strategien gegen Markenmissbrauch, Cologne 2007, passim. Quant au dépôt de marques « de rançon » fait seulement pour bloquer le dépôt prévisible de marques par d’autres entreprises en vue de leur demander un prix de rançon, la jurisprudence a su contrôler de telles pratiques « d’embuscade » en vertu du droit contre la concurrence déloyale, voir par ex. BGH du 23 nov. 2000, GRUR 2001, 242 – « Classe E » et la discussion de la pratique, similaire aux « patent trolls », par Ohly, « Patenttrolle » oder Der patentrechtliche Unterlassungsanspruch unter Verhältnismäßigkeitsvorbehalt ? GRUR Int 2008, 787, 794 et suiv. avec de plus amples références.
  • [91]
    Commission, Synthèse du rapport d’enquête, loc. cit., sub 4.1 (p. 22) et 5 ; id., Final Report, loc. cit., sub 2.1.
  • [92]
    En ce sens les premières réactions négatives par Straus, Patentanmeldung als Missbrauch der marktbeherrschenden Stellung nach Art. 82 EGV ?, GRUR Int 2009, 93 ; Kjolbye, Article 82 EC as Remedy to Patent System Imperfections : Fighting Fire with Fire ?, 32 World Competition 163 (2009) ; Jacobs, Patent and Pharmaceuticals – a paper given on 29th November 2008 at the Presentation of the Directorate – General of Competition’s Preliminary Report of the Pharma-sector Inquiry (http:// ec. europa. eu/ competition/ sectors/ pharmaceuticals/ inquiry/ jacob. pdf).
  • [93]
    Voir pour un résumé Ullrich, Die Reglung des Innovationswettbewerbs in und durch das Patentrecht, dans Abel, Stauder (Hrsg.), Die Sektoruntersuchung Pharma – Kartellrechtliche Disziplinierung des Patentsystems ?, Cologne (Heymanns), (à paraître).
  • [94]
    D’après Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 85, quelques grands laboratoires de princeps ont acquis des fabricants de génériques, et ces derniers ont des activités de recherche et déposent des brevets afin d’assurer leur capacité d’adapter et de produire des génériques, id. sub n° 89 et suiv., 460.
  • [95]
    Voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 3, 24 et suiv., 462 et suiv. ; la période de protection est la « période d’exclusivité » résultant de la protection par brevet ou par des certificats supplémentaires de protection, de la période d’exclusivité de l’autorisation de mise sur marché et de la protection de données, voir id., le « Glossary » (glossaire) et n° 324.
  • [96]
    Voir Commission du 15 juin 2005, aff. COMP/A. 37.507/F3 – Astra Zeneca (http:// ec. europa. eu/ competiton/antitrust/cases/decisions/37507/eu.pdf) sous appel ; Drexl, Deceptive Conduct in the Patent World – A Case for US Antitrust and EU Competition Law, dans Prinz zu Waldeck und Pyrmont (ed.), Liber amicorum J. Straus, Berlin (Springer) 2009, 137 ; Negrinotti, Abuse of Regulatory Procedures in the Intellectual Property Context – The Astra Zeneca Case, dans Govaere, Ullrich, (eds.), loc. cit., p. 143.
  • [97]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 467 et suiv., 484 et suiv.
  • [98]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 445 et passim, également n° 696 et suiv.
  • [99]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 507 et suiv., 523 et suiv., 528 et suiv. ; voir également id., sub n° 555 et suiv. (contentieux entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques), 665 et suiv. (procédures d’opposition).
  • [100]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1090 et passim.
  • [101]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1109, 1237 et suiv.
  • [102]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1133 et suiv. ; mais voir infra n. 117. La divulgation étant normalement bénéfique (ibid. n° 1237), une divulgation défensive ne saurait être critiquable que lorsqu’elle vise spécifiquement à contrecarrer un projet de recherche indépendant d’un concurrent, voir infra sub 2.2.3.3.
  • [103]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 702 et suiv. (accords de règlement de litige entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques), à comparer avec n° 1223 et suiv. (règlement de litige entre laboratoires de princeps) ; pour les fameux accords de paiement inverse (reverse payment agreements) voir Drexl, Reverse Payments in Prozessvergleichen, dans Abel, Stauder (Hrsg.), loc. cit., (à paraître) ; Ferri, Morneault, Reverse Payment Settlements : The Interplay of Antitrust and Patent Policies, 14 (11) Intellect. Prop’y Tech’y L. J. 11 (2008).
  • [104]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 856 et suiv., 987 et suiv. (produits de 2e génération, à ne pas confondre avec brevets secondaires), 1050 et suiv. (cumul des pratiques).
  • [105]
    Voir Art. 52 et suiv. (notion d’invention), 54 et suiv. (critères qualitatifs de brevetabilité) Convention pour le brevet européen (CBE).
  • [106]
    Voir Art. 69 CBE.
  • [107]
    Voir Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en œuvre des droits de propriété intellectuelle, J. O. U. E. 2004 L 157, 45, rect. J. O. U. E. 2004 L 195, 16 et L 351, 44.
  • [108]
    Notamment relatives à l’utilisation de l’invention brevetée à des fin expérimentales (Art. L 613-5 lit b) c. prop. int.), à la possession personnelle ou à l’utilisation antérieure au dépôt de brevet (Art. L 613-7, L 614-10, para. 3 c. prop. int.).
  • [109]
    À la différence du droit à la marque, le droit au brevet ne se perd pas en cas de non-utilisation, mais peut seulement être sujet à l’imposition d’une licence obligatoire, Art. 5 A, C Convention de Paris relative à la protection de la propriété industrielle. Le droit de brevet se perd donc seulement par abandon, notamment non-paiement des redevances de maintien, ou à la fin de sa période de protection.
  • [110]
    À la différence de la plupart des systèmes nationaux de brevets, le droit allemand ne permet pas d’opposer une exception d’invalidité à l’action en contrefaçon, mais demande au contrefacteur d’introduire une action pour annulation du brevet, §§ 81 et suiv. PatG.
  • [111]
    Art. 93 CBE.
  • [112]
    Dans l’Union européenne, les entreprises peuvent choisir entre, d’une part, la voie nationale de protection, qui les oblige de passer par la procédure nationale (avec uniquement la délivrance d’un rapport de nouveauté en France, et avec un plein examen préalable obligatoire de tous les critères de brevetabilité, mais différé pour 7 ans en Allemagne, § 44 PatG), d’autre part, la voie européenne via la CBE (avec examen préalable obligatoire, Art. 91 et suiv. CBE, mais possibilité de demander un examen accéléré, PACE) ou encore la voie internationale via le PCT (Traité de coopération en matière de brevets), qui entraîne une « internationalisation », mais également un certain retardement de la procédure de délivrance de brevet nationale ou européenne subséquente.
  • [113]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 507 et suiv., 1097 et suiv., 1112 et suiv. ; pour une présentation générale des diverses « stratégies » de dépôt de brevets des entreprises en général voir Granstrand, The Economics and Management of Intellectual Property, Cheltemham (Elgar) 1999 (paperback 2000), 209, 218 et suiv. ; Weber, Hedemann, Cohausz, Patentstrategien, Cologne (Heymanns) 2007, 111 et suiv. ; Raasch, Strategic Options to Tackle Patent Expiration : Theoretical Framework and Case Studies, 3 Int. J. Intell. Prop. Management 278 (2009). Évidemment, le seul fait que beaucoup d’entreprises poursuivent le même type de stratégie ne saurait l’exclure du contrôle quant à sa compatibilité avec le droit de la concurrence.
  • [114]
    Art. 105 a et suiv. CBE.
  • [115]
    Il en est ainsi, par ex., du système allemand de l’examen différé (voir supra n. 112), lequel a été introduit pour délester une procédure congestionnée, mais qui offre également une période de réflexion aux entreprises quant à l’opportunité économique de poursuivre leur demande de brevet, période de réflexion d’autant plus utile que dans certaines industries, dont l’industrie pharmaceutique, la nature de la recherche-développement aussi bien que la pression de la concurrence demandent un dépôt rapide aux premières phases de l’activité de recherche, voir Schäfers, kommentarbeitrag, dans Benkard (Hrsg.), Patentgesetz, 10e éd. Munich (Beck) 2006, annot. 29 et suiv. vor § 34 PatG ; id., Harmonisierung des Patentrechts : Perspektiven, Chancen, Hindernisse, Festschrift Nirk, Munich (Beck) 1992, 949, 960 et suiv.
  • [116]
    Art. 99 et suiv. CBE. La procédure d’opposition est censée compenser le fait que, avant la délivrance du brevet, les tiers ne peuvent pas formellement intervenir dans la procédure de dépôt. Cette exclusion des tiers vise à accélérer la délivrance du brevet et, dans une certaine mesure, tend à renforcer la position du déposant d’une demande de brevet. Pour une discussion générale de la problématique, connue également en d’autres domaines du droit de la propriété industrielle et en d’autres pays voir Ullrich, Die Beteiligung Dritter imVerfahren vor der Schutzrechtserteilung, Festschrift Loewenheim (Hilty et al., Hrsg.), Munich (Beck) 2009, 333 et suiv.
  • [117]
    Art. 78, 83 CBE. La divulgation claire et complète de l’invention est censée faciliter tant le développement d’améliorations de l’invention brevetée que la recherche de solutions de substitution, souvent dites inventions de contournement ( « circumvention »), lesquels, pourtant, font partie du système. Si, dans la concurrence entre les laboratoires de princeps, les pratiques de divulgation (ou de publication) « défensive » posent problème (voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1122 et suiv., 1133 et suiv.), il faut non seulement tenir compte de ce qu’elles produisent des effets positifs expressément visés par le système, mais également de ce qu’elles sont préférables à une pratique de suppression de l’invention par le maintien du secret. Les effets pervers de la divulgation ou de la publication d’inventions faites constituent donc des « dommages collatéraux » du système particulièrement difficiles à éviter ou à contrebalancer.
  • [118]
    Voir Art. L 613-5 lit b) c. prop. int. La règle est d’une portée assez limitée, car elle ne prévoit pas d’exception générale en faveur de la recherche (publique). Elle ne constitue qu’un complément de l’obligation de divulguer l’invention (supra n. 117) en ce qu’elle autorise les tiers à utiliser l’invention afin d’en vérifier le fonctionnement. Voir pour les essais cliniques BGH du 17 avril 1997, BGHZ 135, 217 (= NJW 1997, 3092) précisant sa jurisprudence antérieure BGH du 11 juill. 1995, BGHZ 130, 259 (= NJW 1996, 782, = 28 IIC 103 (1997) annot. Pagenberg) ; voir également infra sub 3.2.1.).
  • [119]
    Voir supra n. 105.
  • [120]
    La littérature est abondante, voir parmi les rapports et analyses officiels Federal Trade Commission, To Promote Innovation : The Proper Balance of Competition and Patent Law and Policy, Washington D. C. 2003, chapters 4, 5 ; Tirole, Henry, Trommetter, Tubiana, Caillaud, Propriété intellectuelle (rapport rendu au Conseil d’Analyse économique), Paris (La Documentation francaise) 2003, 9 et passim ; National Research Council of the National Academies (ed.), A Patent System for the 21st Century (by Merrill, Levin, Myers), Washington D. C. 2004 ((http:// www. nap. edu),9 et passim ; Gowers, Review of Intellectual Property, London (HMSG ; http:// www. hm. treasury. gov. uk) 2009, 36 et suiv., 77 et suiv., 113 et suiv. ; Wissenschaftlicher Beirat beim Bundesministerium für Wirtschaft und Technologie, Patentschutz und Innovation, Gutachten 1/07, Berlin 2007, passim ; European Patent Office, Scenarios for the Future, Munich 2007, 15 et suiv.
  • [121]
    Voir Lowe, Peeperkorn, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 92 et suiv. ; Cotter, Reflections on the Antitrust Modernization Commission’s Report and Recommendations Relating to the Antitrust/IP Interface, 53 Antitrust Bull. 745, 775, 794 et suiv. ; Fox, Can Antitrust Policy Protect the Global Commons from the Excesses of IPRs ?, dans Maskus, Reichman (eds.), loc. cit., p. 758 et suiv. (avec ibid. p. 770 et suiv. : comment Fink, Competition Law as a means of Containing Intellectual Property Rights) ; Ullrich, dans Buydens, Dusollier (éd.), loc. cit., p. 258 et suiv.
  • [122]
    Voir Burk, Lemley, Policy Levers in Patent Law, 89 Virg. L. Rev. 1575 (2003) ; Reichman, Of Green Tulips and Legal Kudzu : Repackaging Rights in Subpatentable Innovation, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), Expanding the Boundaries of Intellectual Property, Cambridge (CUP) 2001, 23 ; Carroll, Tailoring Intellectual Property Rights, working paper (à paraître) ; id., Patent Injunctions and the Problem of Uniformity Cost, 13 Mich. Telecomm. Tech. L. Rev. 421 (2007) ; Mosel, Sector-Specific Patent Protection and Economic Growth, working paper, July 8, 2009, Passau Graduate School of Business and Economics ; pour la protection (ou non) du logiciel plus particulièrement Hilty, Geiger, Patenting Software ? A Judicial and Socio-Economic Analysis, 36 IIC 615, 630 et suiv. (2005) ; pour le droit d’auteur Hilty, Sündenbock Urheberrecht, dans Ohly, Klippel (Hrsg.), loc. cit., p. 107, 111 et suiv. ; Schmidt-Bischoffshausen, « One size fits all » – Wieviel Einheitlichkeit verträgt das Urheberrecht ?, dans Götting, Lunze, Überprotektion durch Geistiges Eigentum ? Baden-Baden (Nomos) 2009, 15.
  • [123]
    Voir pour une présentation empirique Merges, Nelson, On the Complex Economics of Patent Scope, 90 Col. L. Rev. 839 (1990) ; quant à la nature « inéquitable » du système de « récompense » voir Scherer, The Innovation Lottery, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), loc. cit., p. 3 et suiv.
  • [124]
    Le taux d’innovation souhaitable d’un système économique n’étant pas défini dans l’abstrait, mais par rapport aux taux d’innovation atteints par les systèmes économiques nationaux ou régionaux concurrents.
  • [125]
    Voir Scotchmer, loc. cit., p. 31 et suiv. ; David, Koyaanisqatsi in Cyberspace : The Economics of an « Out of Balance » Regime of Private Property Rights in Data and Information, dans Maskus, Reichman (eds.), loc. cit., p. 81, 85 et suiv. ; Ullrich, Standards of Patentability for European Inventions, Weinheim (Verlag Chemie) 1977, 105 et suiv. (avec références à une littérature déjà riche à l’époque).
  • [126]
    Voir Scotchmer, loc. cit., p. 98 et suiv. ; Koo, Wright, Economics of Patenting an Input Essential to Further Research, dans Granstrand (ed.), Economics, Law, and Intellectual Property, Boston (Kluwer) 2003, 331, 336 et suiv. ; la problématique ressort clairement de Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 163 et suiv., 467 et suiv. La période moyenne de maintien du brevet étant de 12,5 années, mais tout effort étant fait pour « prolonger » l’exclusivité des « blockbusters » par le dépôt de brevets secondaires surtout dans les dernières années précédant l’expiration des brevets primaires, le résultat en est que le « trade-off » entre promotion de l’innovation par la protection et sa diffusion optimale par la concurrence (voir infra n. 130) est mis hors de balance, et ceci pas nécessairement en faveur de l’innovation, mais en faveur de la création de rentes de monopole (la « surprotection »).
  • [127]
    C’est ainsi que l’introduction d’une protection spécifique des circuits intégrés ou des banques de données n’a jamais produit le progrès promis (voir pour les circuits intégrés Heilein, Die Bedeutung des Rechtsschutzes für integrierte Halbleiterschaltkreise in der Praxis, Francfort (Lang) 2003, 61 et suiv., 103 et suiv. ; pour les banques de données Commission, DG Marché intérieur, Working Paper du 12 déc. 2005, First Evaluation of Directive 96/9/EC on the Legal Protection of Databases, et Commission, Communication de presse du 12 déc. 2005, IP/05/1567 : Propriété intellectuelle : évaluation des règles UE relatives aux banques de données), alors que pour les programmes d’ordinateur (le logiciel), on aurait mieux fait d’élaborer une protection sui generis que de se retrouver enfermé aujourd’hui entre une protection sélective par brevets et une protection excessive par le droit d’auteur.
  • [128]
    Voir Ghidini, loc. cit., p. 31 et suiv. ; Ullrich, Standards of Patentability, loc. cit., p. 108 et suiv.
  • [129]
    À cet égard, il suffit de se rendre compte que le contrôle par le droit de la concurrence ne saurait saisir que les pratiques des entreprises dominant le marché, alors que la même pratique, dans le cas où elle est adoptée par toutes les entreprises, même non dominantes, peut produire des effets systématiques négatifs, lesquels seront probablement d’une plus grande ampleur.
  • [130]
    Voir Molitor, Der Patentschutz als wirtschaftspolitisches Problem, WiSt 1973, 507. À cet égard, on ne saurait trop souligner, primo, le manque de pertinence de l’argument, souvent allégué, que la durée excessive de protection conférée au logiciel par sa protection par le droit d’auteur ne serait pas « nuisible », étant donné le taux rapide de l’innovation dans ce domaine, et, secundo, l’absurdité de justifier l’extension à plusieurs reprises de la durée de protection des œuvres littéraires, artistiques et technologiques (logiciels, banques de données ! ) par l’idée d’une incitation à la création (voir les arguments peu convaincants tant de la majorité que de la « dissenting opinion » dans Eldred v. Ashcroft, 537 US. 186 (2003)). Pour la discussion récente relative à la prolongation de la durée de protection des œuvres des artistes performants et des supports de son Klass, Drexl, Hilty, Kur, Peukert, Statement of the Max Planck Institute for Intellectual Property, Competition and Tax Law Concerning the Commission’s Plans to Prolong the Protection Period for Performing Artists and Sound Recordings, 39 II C 586 (2008) ; Commission, Proposition d’une directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/116/CE relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins, COM (2008) 464 fin. , J. O. U. E. 2009 C 182, 7.
  • [131]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 525.
  • [132]
    Pour la divulgation/publication défensive voir supra n. 117 ; plus généralement Fleischer, Mißbräuchliche Produktvorankündigungen im Monopolrecht, WuW 1997, 203 ; id., Behinderungsmißbrauch durch Produktinnovation, Baden-Baden (Nomos) 1997, 91 et suiv.
  • [133]
    En effet, de peur de voir leurs concurrents déposer des brevets, toutes les entreprises adhèrent à la pratique qui consiste à déposer autant de brevets que possible aussitôt que possible. Dans ce cas, la perspective d’une utilisation de l’invention peut encore être assez incertaine, de sorte que ces brevets ne sont pas « défensifs » par nature, mais le deviennent seulement par la suite. Les seuls vrais brevets défensifs sont ceux qui sont déposés sans aucun motif d’utilisation propre, donc le plus souvent les brevets déposés tard dans le cycle de vie d’une technologie.
  • [134]
    Pour les raisons énoncées supra n. 133, cette évaluation doit être faite dans une perspective ex ante par rapport au moment du dépôt du brevet ou par rapport au moment de la demande d’examen du brevet déposé, voir pour les difficultés Patterson, Intellectual Property and Sources of Market Power, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 35, 44 et suiv. ; voir également Himes, Zain, Anti-competitive Innovation : Is there a Role for Antitrust in Evaluating Product Line Extensions ?, American Conference Institute : Pharmaceutical Antitrust, New York, N. Y. May 15-16, 2007 (www. oag.state.ny.us/bureau/antitrust/pdfs) ; Gilbert, Newberry, Preemptive Patenting and the Persistence of Monopoly, 72 Am. Ec. Rev. 514 (1982).
  • [135]
    Voir inter alia Granstrand, Management, loc. cit., 148 et suiv. ; Blind, Cremers, Mueller, The Influence of Strategic Patenting on Companies’ Patent Portfolios, 38 Res. Pol’y 428 (2009) ; Lichtenthaler, The Role of Corporate Technology Strategy and Patent Portfolios in Low-, Medium- and High-Technology Firms, 38 Res. Pol’y 559 (2009) ; Bekkers, West, The Limits to IPR Standardization Policies as Evidenced by Strategic Patenting in UMTS, 33 Telecomm. Pol’y 80 (2009).
  • [136]
    Voir Merges, Institutions for Intellectual Property Transactions : The Case of Patent Pools, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), loc. cit., p. 123 et suiv. ; Ullrich, Patent Pools – Policy and Problems, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 139 et suiv.
  • [137]
    Voir DoJ/FTC, IP Antitrust Guidelines, loc. cit., sub 5.5 ; DoJ/FTC, Antitrust Enforcement and Intellectual Property Rights : Promoting Innovation and Competition, Washington D. C. 2007, 57 et suiv., avec p. 68 sommaire d’une série de « Business Review Letters » adressées par le DoJ à des entreprises depuis 1997 ; récemment DoJ, Ass. Att. Gen. Barnett, Bus. Rev. Letter du 21 oct. 2008 au RFID Consortium LLC relative à l’UHF RFID standard, avec communication de presse de la même date ((www. usdoj. gov/ atr/ pubdocs/ busreview/ index) ;Peritz, Competition Policy and its Implications for Intellectual Property Rights in the United States, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 125, 214 et suiv.
  • [138]
    Voir Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 41 (non-applicabilité de l’exemption par catégorie), 210 et suiv. (critères d’application de l’Art. 81 (1), (3) à ce que la Commission appelle par euphémisme « accord de regroupement de brevets ») ; pour une discussion détaillée voir Ullrich, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 139 et suiv. ; id., Patent Pools : Approaching a Patent Law Problem via Competition Policy, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 305 et suiv.
  • [139]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 26 et suiv. (32), 78 et suiv., accordent une certaine faveur aux licences croisées de brevets complémentaires se trouvant en situation de blocage, la raison mal exprimée étant le souci de faciliter le déblocage et donc l’utilisation de toute la technologie concernée. Par sa nature même, ce genre d’échange de licences entre membres d’un pool est à la base de la constitution d’une communauté de brevets. Juridiquement parlant, il doit être distingué de l’accord sur la constitution du pool, lequel vise les conditions de la mise en commun des brevets en vue de la concession de licences à des tiers. Toute-fois, économiquement, les deux accords sont étroitement liés car le premier influence les conditions des licences à accorder à des tiers. C’est à cette lumière qu’il faut lire le n° 226 des Lignes directrices qui, en demandant un traitement égal des licenciés, membres du pool, et des tiers licenciés, invite les parties à prévoir une séparation des marchés concernés par les licences respectives.
  • [140]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 214, abordant ainsi le fameux problème du « royalty stacking », voir Lemley, Shapiro, Patent Holdup and Royalty Stacking, 85 Texas L. Rev. 1991 (2007) ; id., Reply, Patent Holdup and Royalty Stacking, Working Paper N° 345, Stanford Law School ((http:// ssrn. com/ abstract= 1005727)répondant à la critique de Golden, « Patent Trolls » and Patent Remedies, 85 Texas L. Rev. 2111 (2007) ; Godt, The Role of Patents in Scientific Competition : A Closer Look at the Phenomenon of Royalty Stacking, dans Albert, Schmidtchen, Voigt, Scientific Competition, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008, 151.
  • [141]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 213 (voir également n° 225). Il est intéressant de noter que la Commission mentionne seulement la collusion relative aux prix de licences pour brevets substitutifs, et non le risque d’entente sur le prix des licences relatives aux brevets complémentaires, ce qui s’explique par la présomption de non-concurrence entre titulaires de brevets bloquants (voir supra n. 46), laquelle, miraculeusement, transforme l’entente sur les redevances en accord vertical sur les prix, pourtant pas nécessairement légal (voir Art. 4 (2) lit a) Règlement 772/2004).
  • [142]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 213.
  • [143]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 215. La distinction, bien qu’indispensable sous l’aspect de l’Art. 81 (3) du Traité, ne satisfait pas les souhaits plus larges de l’industrie, voir Melamed, Lerch, Uncertain Patents, Antitrust, and Patent Pools, dans Ehlerman, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 273 et suiv. (analysant les pools comme institutions d’assurance) ; Plompen, The New Technology Transfer Guidelines (TTG) as Applied to Patent Pools and Patent Pool Licensing : Some Observations Regarding the Concept of « Essential Technologies », ibid. p. 295 et suiv. (proposant une notion économique plutôt que technique ou légale de ce qui est une technologie « essentielle »). En fait, le critère d’ « essentiality » est assez flou, s’il est appliqué en dehors de son contexte d’origine qui est la normalisation : un brevet ne peut être essentiel que par rapport à une norme technique ou par rapport à un autre standard superposé, mais lequel ?
  • [144]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 220.
  • [145]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 219.
  • [146]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 221 et suiv.
  • [147]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 222.
  • [148]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 224. N’est pas évidente l’interprétation du critère suivant lequel le pool doit être « ouvert ». Veut-il dire : accessible par tout tiers en tant que membre du pool ou veut-il dire seulement que le pool doit être préparé à accorder des licences à tout un chacun, comme semblent l’indiquer les Lignes directrices au n° 226 ?
  • [149]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 226.
  • [150]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 212, ce qui signifie que, dans la plupart des cas de licences accordées à des non-concurrents, le pool peut couvrir 30 % du marché au maximum (Art. 3 Règlement 772/ 2004), étant entendu que le dépassement de ce seuil n’entraîne ni forcément l’application de l’article 81 (1) ni nécessairement la non-application de l’article 81 (3), voir Lignes directrices, ibid., sub n° 37.
  • [151]
    Voir références à la littérature supra n. 138.
  • [152]
    À cet égard, il est intéressant de comparer l’approche globale choisie par le United States Patent and Trademark Office, White Paper, Patent Pools : A Solution to the Problem of Access in Biotechnology Patents, Washington D. C. December 5, 2000/January 19, 2001 (www. uspto. gov/ web/ offices/ pac/ dapp/opla/patpoolcover.html) avec l’examen prudent fait par Van Overwalle, Of Thickets, Blocks and Gaps. Designing Tools to Resolve Obstacles in the Gene Patent Landscape, dans Van Overwalle (ed.), Gene Patents and Collaborative Licensing Models, Cambridge (CUP) 2009, 383 ; Aoki, Access to Genetic Patents and Clearing Models – An Economic Perspective, ibid. p. 350 et suiv. (voir également les contributions illustrant diverses formes de clearing houses, ibid. part II, p. 63 et suiv.). Par ailleurs, les activités de clearing pourraient bien être de la compétence auxiliaire des offices nationaux des brevets.
  • [153]
    Voir texte infra sub 3.1.2.
  • [154]
    Voir texte supra sub 2.2.3.2., 2.2.3.3. Il importe de noter la transformation des modes d’exploitation des brevets dans certaines industries, notamment dans le secteur de l’informatique où, au lieu de protéger les seules activités de recherche-développement et de production des entreprises, titulaires des brevets, les brevets sont également ou même seulement exploités par la commercialisation de l’invention en tant que telle. L’exemple notoire est celui du développement, de l’introduction sur le marché et de l’exploitation de technologies de système demandant la normalisation (sous-jacente souvent à la constitution de pools) par la « distribution » de licences à travers les diverses branches de l’industrie appliquant la technologie et contribuant ainsi à sa diffusion, voir références supra n. 135 et Ullrich, dans Leistner (Hsrg.), loc. cit., sub II.1., 2.c) ; pour une pratique problématique à plusieurs égards Bekkers, Duysters, Verspagen, Intellectual Property Rights, Strategic Technology Agreements, and Market Structure : The Case of GSM, 31 Res. Pol’y 1141 (2002). Voir également Lévy, Jouyet, L’économie de l’immatériel, Rapport de la Commission sur l’économie de l’immatériel, Paris (Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie) 2006, 18 et suiv., 140 et suiv. Les difficultés qu’éprouve le système de brevets d’intégrer ou de se défendre contre les patent trolls ne représentent qu’un exemple illustrant cette transformation, voir Subramanian, Patent Trolls in Thickets : Who is Fishing under the Bridge, Eur. Int. Prop. Rev. 2008, 182 ; Kuan, Patent Trolling : Innovation at Risk, Eur. Int. Prop. Rev. 2009 (à paraître) ; Osterrieth, Patent-Trolls in Europa – braucht das Patentrecht neue Grenzen ?, GRUR 2009, 540 ; Ohly, « Patenttrolle » oder : Der patentrechtliche Unterlassungsanspruch unter Verhältnismäßigkeitsvorbehalt ?, GRUR Int 2008, 787.
  • [155]
    Voir texte supra sub 2.2.3.1.
  • [156]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 230 et suiv. ; pour une critique voir Ullrich, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 159 et suiv.
  • [157]
    Voir Art. 321-1 à 321-12 c. prop. int. ; Gesetz über die Wahrnehmung von Urheberrechten und verwandten Schutzrechten (Urheberrechtswahrnehmungsgesetz du 9 sept. 1965, BGBl. I 1294 telle que modifiée dernièrement par la loi du 26 oct. 2007, BGBl. I 2513).
  • [158]
    Voir pour une présentation sommaire Slothers, Copyright and the EC Treaty : Music, Films and Football, Eur. Int. Prop. Rev. 2009, 272, 279 et suiv. ; Drexl, Competition in the Field of Collective Management : Preferring « Creative Competition » to Allocative Efficiency in European Copyright Law, dans Torremans (ed.), Copyright Law : A Handbook on Contemporary Research, Cheltenham (Elgar) 2007, 255 et suiv. ; Mestmäcker, Collecting Societies, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 343 et suiv. ; Jenny, EC Competition Law Enforcement and Collecting Societies for Music Rights : What are we aiming for ?, ibid. p. 361 et suiv. ; Allendesalazar, Vallina, Collecting Societies : The Usual Suspects, ibid. p. 371 et suiv. ; Vinje, Niiranen, The Application of Competition Law to Collecting Societies in a Borderless Digital Environment, ibid. p. 399 et suiv. et le panel discussion, ibid. p. 254 et suiv. ; voir également Commission du 16 juill. 2008, aff. COMP/C-2/38.698 – CISAC, J. O. U. E. 2008 C 323, 1 (sommaire), WuW-EU-V1357 (version plus complète).
  • [159]
    Pour la terminologie changeant suivant le contexte voir Van Overwalle, dans Van Overwalle (ed.), loc. cit., p. 385 et suiv., 389 et suiv.
  • [160]
    Voir supra texte accompagnant n. 148 et suiv.
  • [161]
    Voir Merges, loc. cit., n. 136.
  • [162]
    Voir Art. 613-11, L 613-15 c. prop. int. ; §24 PatG ; Ullrich, Patentgemeinschaften, dans Festschrift Immenga, loc. cit., p. 429 et suiv. proposant une certaine adaptation de ces règles.
  • [163]
    De toute façon, on ne peut pas espérer que la loi soit modifiée en temps utile, voir Van Overwalle, dans Van Overwalle (ed.), loc. cit., p. 398 et suiv.
  • [164]
    Un obstacle majeur à une application efficace du système de licences obligatoires est leur éparpillement en systèmes nationaux, ce qui fait que, pour le Marché intérieur communautaire, la personne intéressée par l’obtention d’une licence obligatoire doit déposer des demandes dans une multitude d’États. C’est pourquoi il est nécessaire de prévoir une compétence centrale telle qu’elle existerait si le brevet communautaire était introduit, et peut-être même pour le brevet européen, voir Jaeger, Drexl, Hilty, Ullrich, Comments of the Max Planck Institute for Intellectual Property, Competition and Tax Law on the 2009 Commission Proposal for the Establishment of a Unified European Patent Judiciary, 40 IIC 2009 (à paraître).
  • [165]
    Voir supra sub 2.2.3., et références supra n. 121.
  • [166]
    Voir infra texte accompagnant n. 173, et infra sub 3.1.2.3., texte accompagnant n. 180.
  • [167]
    Pour la tendance à concevoir la protection de la propriété intellectuelle en vue de promouvoir la compétitivité de l’industrie européenne et d’accroître le taux d’innovation voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 5 et suiv. ; plus généralement (et critiquant cette tendance) Ullrich, Legal Protection of Innovative Technologies : Property or Policy ?, dans Granstrand (ed.), loc. cit., Economics, p. 439, 457 et suiv., 467 et suiv.
  • [168]
    Voir supra sub 2.1.2., 2.2.3.2.
  • [169]
    Voir Dreier, Primär- und Folgemärkte, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), Geistiges Eigentum im Dienst der Innovation, Baden-Baden (Nomos) 2001, 51, 70 et suiv. ; Ullrich, dans Granstrand (ed.), loc. cit., supra n. 167.
  • [170]
    Voir pour les menaces modernes auxquelles le domaine public est exposé Dusollier, Droit d’auteur et protection des œuvres dans l’univers numérique, Bruxelles (Larcier) 2005, passim ; id., Le domaine public, garant de l’intérêt public en propriété intellectuelle ?, dans Buydens, Dusollier (eds.), loc. cit., p. 117 et suiv. ; Van Overwalle, L’intérêt général, le domaine public, les commons et le droit des brevets d’invention, ibid. p. 149 et suiv. ; pour une illustration de prudence judiciaire en la matière CJCE du 9 nov. 2004, aff. C-203/02, British Horseracing Board/William Hill, Rec. 2004 I 10415. Voir également l’analyse faite sous l’aspect du droit de la concurrence par Sheehan, Can Intellectual Property Rights Be Construed by the Courts to Limit their Use for Anti-Competitive Purposes ?, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 241, 243 et suiv., 250 et suiv.
  • [171]
    De telles règles font pourtant l’exception, voir pour le droit des marques par ex. Art. 6 (1), 9 Directive 89/104/CE du 21 déc. 1988 rapprochant le droit des marques, telle que codifiée par la directive 2008/95/CE du 22 oct. 2008, J. O. U. E. 2008 L 299, 25 ; Art. 12, 53, 107 Règlement 40/94 du 20 déc. 1993 relatif à la marque communautaire.
  • [172]
    Voir supra n. 162, 164. En droit d’auteur, les adaptations d’œuvres informatiques peuvent présenter de pareils problèmes d’innovation incrémentale dépendante, mais le législateur ne semble pas considérer qu’ils valent une solution particulière ou à même d’en introduire une, voir Art. 8, 12 Berne Convention for the Protection of Literary and Artistic Works ; pour le droit européen Art. 4 lit b) Directive 91/50/CEE du 14 mai 1991 relative à la protection des programmes d’ordinateurs telle que codifiée par la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009, J. O. U. E. 2009 L 111, 16 ; Art. 5 lit b) Directive 96/9/CE du 11 mars 1996 relative à la protection des banques de données, J. O. C. E. 1996 L 77, 20 ; pour § 23 UrhG voir Schulze, dans Dreier, Schulze, Urheberrecht, Munich (Beck) 3e éd. 2008, § 23 annot. 16 et suiv. (19).
  • [173]
    BGH du 13 VII. 2004, GRUR 2004, 966=WuW DE-R 1329=36 IIC 741 (2005) – Standard-Spundfass – sub A. III.1.
  • [174]
    Art. 6 Directive 91/50/CE relative à la protection des programmes d’ordinateur, susmentionnée (n. 172) ; voir Bently, kommentarbeitrag, dans Dreier, Hugenholtz, Concise European Copyright Law, Alphen (Kluwer) 2006, Computer Programs Dir., art. 6, passim ; à comparer avec TPI du 17 sept. 2007, aff. F 201/04, Microsoft/Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 102 et suiv., 118 et suiv., 151 et suiv. (227).
  • [175]
    Voir Art. 7 (2), Art. 14 Directive 98/71/CE du 13 oct. 1998 relative à la protection des dessins et modèles, J. O. C. E. 1998 L 289, 28 ; Art. 8 (2), 110 Règlement 6/92/CE du 12 déc. 2001 relatif aux dessins et modèles communautaires, J. O. C. E. 2002 L 3, 1 tel que modifié par le Règlement 1891/2006 du 18 déc. 2006, J. O. U. E. 2006 L 386, 14 ; Kur, Limiting IP Protection for Competition Policy Reasons – a Case Study Based on the EU Spare-Parts-Design Discussion, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 313 et suiv.
  • [176]
    La doctrine tend plutôt à souligner, d’une part, l’effet de blocage trop large que produirait un brevet sur les découvertes, les théories scientifiques, les méthodes mathématiques ou les plans et principes d’activités intellectuelles et, d’autre part, les coûts de transaction que demanderait l’exploitation d’une exclusivité trop large (voir Prahl, Patentschutz und Wettbewerb, Göttingen (Vandenhoeck) 1969, 141 et suiv. ; Peddrazini, Wie das Recht wissenschaftlich-technische Kreationen erfassen kann, dans Harabi, Kreativität, Wirtschaft, Recht, Zurich (rdf) 1996, 175, 179 et suiv. ; Kraßer, Patentrecht, 6e éd. Munich (Beck) 2009, p. 127 (§11 II)), mais il ne s’agit là que d’un aspect du problème (voir Godt, Eigentum an Information, Tübingen (Mohr Siebeck) 2007, 25 et suiv.). L’aspect le plus intriguant de la protection de découvertes qui est une réalité depuis bien longtemps dans le domaine de la chimie et de la microbiologie (voir Beier, Straus, Der Schutz wissenschaftlicher Forschungsergebnisse, Weinheim (Verlag Chemie) 1982, 66 et suiv.), ce sont les coûts d’opportunité d’une exclusivité excessive, qu’on pourrait éviter en permettant une concurrence plus large résultant éventuellement d’une multitude d’exclusivités bien délimitées et appartenant à des titulaires divers. Cela n’empêchera pas l’apparition de coûts de transaction, mais ces exclusivités sont inhérentes au système de brevets dans la mesure où il crée d’innombrables dépendances.
  • [177]
    CJCE du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988, 6211 sub n° 9 (3e alt.) ; id., du 5 oct. 1988, aff. 53/87, CICRA/Renault, Rec. 1988, 6039, sub n° 16 (3e alt.).
  • [178]
    CJCE du 6 avril 1995, aff. jointes C-241/91 P et C-242/91 P, RTE et ITV Publications/Commission, Rec. 1995 I 743 sub n° 48 et suiv.
  • [179]
    TPI du 17 sept. 2007, aff. T-201/04, Microsoft/Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 621 et suiv., 643 et suiv.
  • [180]
    Voir Anderman, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 54 et suiv. ; Drexl, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 649 et suiv. ; Ghidini, loc. cit., p. 103 et suiv. ; Ullrich, dans Buydens, Dusollier (éd.), loc. cit., p. 271 et suiv. ; pour des commentaires sur l’affaire Microsoft (supra n. 179) voir inter alia Petit, L’arrêt Microsoft : abus de position dominante, refus de licences et vente liée, J. dr. eur. 2008, 8 et suiv. ; Coppo, Article 82 CE et refus de licence des droits de propriété intellectuelle : nouvelles perspectives après l’arrêt « Microsoft », Rev. dr. Union eur. 2008, 783 et suiv. Par ailleurs, la jurisprudence Magill a ses racines dans les principes généraux que la Cour a développés en son interprétation de l’article 82, voir TPI du 6 oct. 1994, aff. T-83/91, Tetra Pak/Commission, Rec. 1994 II 755, sub n° 114 et suiv. avec références.
  • [181]
    Voir CJCE du 6 avril 1995, supra n. 178, sub n° 55 ; TPI du 17 sept. 2007, supra n. 179, sub n° 666 et suiv., 688 et suiv. ; et voir infra n. 187.
  • [182]
    Le concept de marché primaire/marché secondaire n’est pas encore bien établi, voir pour le droit de la concurrence Commission, Communication relative à la notion du marché pertinent, J. O. C. E. 1997 C 372, 5 sub n° 56 et suiv. ; pour le droit de la propriété intellectuelle Dreier, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), loc. cit., p. 58 et suiv. ; pour une analyse détaillée Bechthold, Die Kontrolle von Sekundärmärkten, Baden-Baden (Nomos) 2007,67 et suiv.
  • [183]
    Voir Sheehan, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 259 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 170 et suiv. (n° 46 et suiv. (48)).
  • [184]
    Voir pour les différences Drexl, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 649 et suiv., 660 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hrsg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 179 (n° 56) ; Ghidini, loc. cit., p. 106 et suiv. ; Eilmannsberger, dans Hirsch, Montag, Säcker (Hrsg.), Münchener Kommentar, Europäisches und Deutsches Wettbewerbsrecht (Kartellrecht), Munich (Beck) 2007, Art. 82, annot. 332 et suiv., mais voir sa critique n° 386 et suiv. ; voir également Ritter, Refusal to Deal and « Essential Facilities » : Does Intellectual Property Require Special Deference Compared to Tangible Property ?, 28 (3) World Competition 281 (2005). Les observateurs critiquent souvent CJCE du 29 avril 2004, aff. C-418/01, IMS Health/NDC Health, Rec. 2004 I 5039, mais cet arrêt n’est pas pertinent au problème, voir supra texte accompagnant la n. 78.
  • [185]
    C’est pour ces raisons que le législateur allemand a exclu l’application du §19 (4) n° 4 GWB à la propriété intellectuelle en tant que « facilité d’infrastructure » à laquelle un accès doit être donné obligatoirement. Toutefois, ne sont exclues ni l’application du §19 (4) GWB à des « facilités d’infrastructure » couvertes par de la propriété intellectuelle, ni l’application des règles générales du §19 (1), 4 n° 1-3 GWB à la propriété intellectuelle, voir Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. A.2.a) (i) avec références. Voir également Commission, Communication, Orientations pour l’application de l’article 82, loc. cit., J. O. U. E. 2009 C 45, 7 sub n° 89.
  • [186]
    Voir supra texte accompagnant n. 182.
  • [187]
    Voir supra n. 181 ; Ullrich, Heinemann, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 176 et suiv. (n° 53 et suiv. (54)).
  • [188]
    Art. L 613-11 c. prop. int. ; § 24 (5) PatG.
  • [189]
    Par contre, les autorités et le juge de la concurrence détermineront eux-mêmes la portée et la validité d’un titre de protection, voir CJCE du 25 fév. 1986, aff. 193/83, Windsurfing International/ Commission, Rec. 1986, 611.
  • [190]
    Voir la critique par Riem, Concurrence effective et concurrence efficace ? L’ordre concurrentiel en trompe-l’œil, RIDE 2008, 67.
  • [191]
    Voir supra 2.1.2., 2.2.3.2., 2.2.3.3.
  • [192]
    Voir référence supra n. 169, et Ghidini, loc. cit., passim, dont toute l’analyse suit une logique de « concurrence pour l’innovation » ; également Hilty, Geiger, loc. cit., 36 IIC 615 et suiv. (2005).
  • [193]
    Pour ces dilemmes voir Scotchmer, loc.cit., p. 127 et suiv. et supra n. 130, 176.
  • [194]
    Voir pour le droit des États-Unis Adams v. Burke, 84 U. S. 453 (1873) ; Schlichter, Patent Law, Legal and Economic Principles, 2e éd. Eagan, MN (West) 2003 (loose leaf) §8.51 et suiv. ; Peritz, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 142 ; pour le droit allemand des brevets Krasser, loc. cit., p. 793 et suiv.
  • [195]
    Voir Ullrich, International Exhaustion of Intellectual Property Rights : Lessons from European Economic Integration, Mélanges Waelbroeck, Bruxelles (Bruylant) 1999, 205, 209 et suiv. ; id., dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc.cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 40 et suiv.
  • [196]
    Voir Herzog, Handel mit gebrauchter Software, Baden-Baden (Nomos) 2009, passim ; Jaeger, Der Erschöpfungsgrundsatz im neuen Urheberrecht, dans Hilty, Peukert, Interessenausgleich im Urheberrecht, Baden-Baden (Nomos) 2004, 47 et suiv. ; Bechthold, dans Dreier, Hagenholte (eds.), loc. cit., Information Society Dir. Art. 3, annot. 4, Art. 5 annot. 3 ; Leistner, The German Second-Hand Software Controversy, dans Technologie et concurrence, Mélanges Ullrich, Bruxelles (Larcier) 2009 (à paraître).
  • [197]
    Voir Sarnoff, Holman, Recent Developments Affecting the Enforcement, Procurement, and Licensing of Research Tool Patents, 23 Berkeley Tech’y L. J. 1299, 1304 et suiv. (2008).
  • [198]
    Voir Godt, Research Tools : Patents and the Information Market in the Knowledge Based Economy, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 275 et suiv. ; Sarnoff, Holman, loc. cit., 23 Berkeley Tech’y L. J. 1337 et suiv. (2008), et plus généralement Ost, Les brevets portant sur les inventions biotechnologiques, dans Remiche (sous la direction de), Brevet, innovation et intérêt général, Bruxelles (Larcier) 2007, 131, 135 et suiv., 144 et suiv. ; Gutmann, Intervention, ibid. p. 177 et suiv.
  • [199]
    Max Planck-Institut für geistiges Eigentum, Wettbewerb- und Steuerrecht, Munich. Déclaration en vue d’une interprétation du « test des trois étapes » respectant les équilibres du droit d’auteur (www. ip. mpg.de/shared/data/ pdf/declaration_three_step_test_final_francais.pdf) ; voir également Dusollier, loc. cit., p. 423 et suiv. ; Senftleben, Die Bedeutung der Schranken des Urheberrechts in der Informationsgesellschaft und ihre Begrenzung durch den Dreistufentest, dans Hilty, Geiger (Hrsg.), loc. cit., p. 159 et suiv.
  • [200]
    BGH du 5 déc. 2006, BGHZ 170, 115 = GRUR 2007, 221 (n. Götting) – « Simvastatin ». Le conflit avec les considérations énoncées par Commission, Final Report Pharma, loc. cit., n° 23 et suiv., 172 et suiv., 547 et suiv. ne peut pas être plus évident. Voir également supra n. 130.
  • [201]
    Voir Ohly, loc.cit., GRUR 2008, 795 et suiv. proposant d’appliquer le principe de la proportionnalité à l’action en cessation lorsque l’injonction reviendrait à anéantir des biens économiques dont la valeur est hors rapport avec le dommage causé par la contrefaçon (p. ex. composant breveté de petite valeur intégré dans un produit complexe de haute valeur). En droit américain, le constat de la contrefaçon relève du droit strict alors que le remède à y apporter relève du droit d’équité, ce qui permet de tempérer la sanction de la contrefaçon, voir eBay v. MercExchange, 126 S. Ct.1837 = 78 USPQ 2nd 1577 (2006).
  • [202]
    Voir pour la question de l’épuisement, d’une part, CJCE du 8 juin 1982, aff. 258/78, Nungesser/ Commission, Rec. 1982, 2015 sub n° 61 et suiv. ; d’autre part, TPI du 27 sept. 2006, aff. T-168/01, GlaxoSmithKline Services/Commission, Rec. 2006II2969, confirmé par CJCE du 6 oct. 2009, aff. jointes C-501/06 et al., GlaxoSmithKline/Commission, non encore publié au Rec. ; pour une analyse critique Ullrich, European Competition Law, Community-wide Exhaustion and Compulsory Licenses – Disintegrating the Internal Market in the Public Interest, dans Godt (Hrsg.), Differential Pricing of Pharmaceuticals Inside Europe, Baden-Baden (Nomos) (à paraître) ; pour une approche « holistique » de l’application des Art. 28 et suiv. et Art. 81, 82 du Traité au problème des importations parallèlles Rognstad, The Exhaustion/Competition Interface in EC Law – Is There Room for a Holistic Approach, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 427 et suiv.
  • [203]
    En particulier la « grande » question de savoir si et dans quelle mesure un objet peut ou doit être protégé cumulativement sous ses aspects divers par divers titres de propriété intellectuelle, voir inter alia Sosnitza, Konvergenz und Interferenz der Schutzrechte, dans Festschrift Tilmann, Cologne (Heymanns) 2003, 895 ; Ghidini, Arezzo, One, None, or a Hundred Thousand : How Many Layers of Protection for Software Innovations ?, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 346 et suiv. ; Casucci, Software and Computer-Related Inventions : Protection by Patent and Copyright, dans Heath, Kamperman (eds.), New Frontiers of Intellectual Property Law, Oxford (Hart) 2005, 161 et suiv. ; Heath, The Protection of Aesthetic Creations as Three-Dimensional Marks, Designs, Copyright or Under Unfair Competition, ibid. p. 181 et suiv. ; pour les mesures de protection technique voir Dusollier, loc. cit., passim ; Heide, Copyright, Contract, and the Legal Protection of Technological Measures : Providing a Rationale to the Copyright Exceptions Interface, dans Heath, Kamperman (eds.), loc. cit., p. 215 et suiv. ; Hubicki, Sherman, Terminator Genes as a Technical Protection Measure for Patents ?, ibid. p. 267 et suiv.
  • [204]
    Voir pour les détails de la présentation sommaire suivante Liotard, Persistance et intensité des conflits entre normalisation et propriété intellectuelle : les enseignements de la troisième génération de téléphonie mobile, RIDE 2008, 47 ; Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., passim ; id., Patente, Wettbewerb und technische Normen : Rechts- und ordnungspolitische Fragestellungen, GRUR 2007,817, tous avec de plus amples références.
  • [205]
    Voir Simcoe, Open Standards and Intellectual Property Rights, dans Chesbrough et al. (eds.), Open Innovation : Researching a New Paradigm, Oxford (OUP) 2006,161. Bien que le concept puisse être adopté aussi bien pour les normes de facto introduites individuellement par une entreprise ou introduites par un « club de normalisation » composé d’un nombre limité d’entreprises, il est typiquement associé aux organisations de normalisation publiquement reconnues. La raison en est, d’une part, que ces organisations sont tenues à garantir l’accessibilité générale des normes techniques qu’elles développent et, d’autre part, que, en principe, les clubs et les entreprises individuelles sont libres de modifier ou d’abandonner le choix d’une politique d’accès ouvert à leurs normes. De toute façon, le concept de l’open standardization est à distinguer du mouvement open source, car il ne vise que le maintien de l’accessibilité générale d’une norme technique, laquelle est, au moins en partie, couverte par les revendications d’un brevet.
  • [206]
    Voir Farrell, Hayes, Shapiro, Sullivan, Standard Setting, Patents, and Hold-Up, 74 Antitrust L. J. 603 (2007) ; Lemley, Ten Things to Do About Patent Holdup of Standards (And One Not to), 48 Boston Coll. L. Rev. 149 (2007).
  • [207]
    CEN = Comité européen de normalisation (site : wwww. cen. eu) ; CENELEC = Comité européen de normalisation électrotechnique (site : wwww. cenelec. eu) ;ETSI = European Telecommunications Institute (site : wwww. etsi. org) ;ANSI = American National Standardization Institute (site : www. ansi.org) ; IEEE = Institute of Electrotechnical and Electronic Engineers (site : wwww. ieee. org) ;ISO = International Standardisation Organisation (site : wwww. iso. org) ;ITU = International Telecommunications Union (site : wwww. itu. int). En général, les structures, les modes de fonctionnement et les pratiques ou « policies », y compris les pratiques relatives à la propriété intellectuelle, sont renseignés sur les sites de ces organisations ; quant à l’ETSI, voir pour plus de détails Fröhlich, Standards und Patente – Die ETSI IPR Policy, GRUR 2008, 205.
  • [208]
    Voir supra n. 205. Néanmoins, le titulaire du brevet peut, de sa propre volonté, décider et déclarer qu’il est prêt à concéder des licences à titre gratuit. NB : il reste lié par l’obligation de non-discrimination.
  • [209]
    RAND : « reasonable and non discriminatory » terms ; FRAND : « fair, reasonable, and non discriminatory » terms. Les conditions RAND sont demandées par les organisations de normalisation américaines (ANSI et ses organisations adhérentes) et internationales (ISO, ITU), alors que l’ETSI et le CEN/CENELEC sont tenus de demander des conditions FRAND, voir l’accord de coopération « Orientations générales pour la coopération entre le CEN, le CENELEC et l’ETSI et la Commission européenne et l’Association européenne de Libre-Échange » du 28 mars 2003, J. O. U. E. 2003 C 91, 7, 11, 6e tiret, col. gauche. Le contenu exact des termes RAND/FRAND et leurs différences sont controversés, voir infra n. 221.
  • [210]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc.cit., J. O. C. E. 2001 C 3,2, sub n° 174.
  • [211]
    Voir p. ex. BGH, supra n. 81, WuW DE-R 1331 (sub A. III.2.).
  • [212]
    Voir supra n. 62 ; Drexl, dans Liber amicorum J. Straus, loc.cit., supra n. 96.
  • [213]
    Voir références supra n. 84. Étant donné l’absence d’une concession de licence, la Cour suprême n’admet une « défense antitrust » que lorsque le défendeur se comporte effectivement comme s’il avait obtenu une licence à des conditions raisonnables et non discriminatoires : il doit donc payer les redevances correspondantes par avance ou du moins en faire un dépôt garanti par une banque. Ainsi, le défendeur supporte le risque d’une évaluation insuffisante de ce qui constitue des conditions RAND/FRAND. Au lieu de supporter seulement la charge de la preuve du caractère abusif des conditions, il doit supporter la charge de la preuve de ce qui serait des conditions justifiées. En plus, l’hypothèse de conditions discriminatoires échappe à l’approche choisie par la Cour.
  • [214]
    Merges, Kuhn, An Estoppel Doctrine for Patented Standards, 97 Cal. L. Rev. 1 (2009).
  • [215]
    Miller, Standard Setting, Patents, and Access Lock-in : RAND Licensing and the Theory of the Firm, 40 Ind. L. Rev. 35 (2007). À la différence de Merges, supra n. 214, qui propose d’attacher l’estoppel au fait de la non-divulgation du brevet ou du dépôt de brevet, Miller voudrait seulement que la déclaration de disponibilité générale de licences soit irrévocable.
  • [216]
    Voir pour le droit des États-Unis eBay v. MercExchange, 126 Sup. Ct.1837 = 78 USPQ 2nd 1577 (2006) ; pour le droit européen Art.11 Directive 2004/48/EC du Parlement et du Conseil du 29 avril 2004 relative à la mise en œuvre des droits de propriété intellectuelle, J. O. U. E. 2004 L 157,45 ; CJCE du 9 juill. 1985, aff. 19/84, Pharmon/Hoechst, Rec.1985, 228, n° 25.
  • [217]
    Voir pour une analyse monographique générale Blind, The Economics of Standards, Cheltenham (Elgar) 2004, 24 et passim.
  • [218]
    Voir l’accord de coopération CEN/CENELEC, ETSI/Commission, loc.cit., supra n. 209.
  • [219]
    À cet égard, il importe de noter qu’une fois une invention incorporée dans une norme technique, laquelle a été adoptée par le marché, on ne peut plus « retirer » cette invention de la norme. L’invention devient la norme, qui est appliquée par tous, et le titulaire du brevet tirera son profit particulier de cette situation de fait pratiquement irréversible.
  • [220]
    La distinction a été soulignée notamment par Miller, loc.cit., 40 Ind. L. Rev. 35, sub II. (2007).
  • [221]
    C’est l’approche aux conditions FRAND/RAND la plus souvent proposée (voir Farrell, Hayes, Shapiro, Sullivan, loc.cit., 74 Antitrust L. J. 635 et suiv. (2007)), mais son interprétation reste assez controversée (voir Geradin, Pricing Abuses by Essential Patent Holders in a Standard Setting Context : A View From Europe, 76 Antitrust L. J. 329 (2009) avec références).
  • [222]
    Voir Godt, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., supra n. 198 ; id., The Role of Patents in Scientific Competition : A Closer Look at the Phenomenon of Royalty Stacking, dans Albert, Schmidtchen, Voigt (eds.), Scientific Competition, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008,151.
  • [223]
    Voir l’allusion faite par Ghidini, loc.cit., p. 110 et suiv. aux traditions anglo-saxonne et romaine différentes concernant la régulation des rapports entre propriété individuelle et intérêts des tiers à l’accès à l’objet protégé.

1 1. Introduction

2 2. Autonomie et restrictions de la concurrence

3 2.1. Pratiques contractuelles

4 2.1.1. De la protection contre la concurrence…

5 2.1.1.1. Les doctrines classiques

6 2.1.1.2. L’approche européenne

7 2.1.2.… à la protection pour la concurrence

8 2.1.2.1. La transformation du bien informationnel public en bien privé protégé

9 2.1.2.2. La fonction concurrentielle de la propriété intellectuelle

10 2.1.2.3. L’importance de la configuration du droit exclusif

11 2.1.2.4. Une propriété pour une politique volontariste de la concurrence

12 2.2. Pratiques unilatérales

13 2.2.1. Points de départ

14 2.2.2. L’abus de position dominante

15 2.2.2.1. Les pratiques d’exploitation inéquitable

16 2.2.2.2. Les pratiques « classiques » d’éviction de technologies de substitution

17 2.2.2.3. Les pratiques d’exploitation de marchés fermés

18 2.2.3. « Stratégies » abusives de dépôt de brevets

19 2.2.3.1. Le rapport d’enquête sectorielle Pharma

20 2.2.3.2. La protection de la propriété industrielle comme règlement-cadre du marché

21 2.2.3.3. Le choix autonome de protection et ses limites

22 3. Autonomie et régulation de la protection

23 3.1. Régulation du système de protection par le droit de la concurrence ?

24 3.1.1. Les communautés de brevets

25 3.1.2. Le contrôle de la portée de l’exclusivité

26 3.1.2.1. L’impasse en droit positif des brevets

27 3.1.2.2. La ligne de démarcation entre limites intrinsèques et limites extrinsèques à la protection

28 3.1.2.3. La jurisprudence Magill

29 3.2. Les limites intrinsèques de la protection

30 3.2.1. Une logique concurrentielle fonctionnaliste

31 3.2.2. Accès aux normes techniques dites « ouvertes » (open standardization)

32 4. Conclusion

33 Summary

1. INTRODUCTION

34 L’articulation entre droit de la propriété intellectuelle et droit contre les restrictions à la concurrence semble être le sujet d’un débat éternel. Mais alors qu’autrefois seuls quelques généralistes du droit de la concurrence se battaient avec les spécialistes du droit de la propriété intellectuelle, dont chacun avait des vues spécifiques dues aux particularités des différents types de propriété intellectuelle, aujourd’hui le sujet attire l’attention générale. Cela surprend dans la mesure où l’extension du champ de protection de la propriété intellectuelle [2] et le nombre toujours croissant des brevets et marques déposés [3] qu’on observe depuis une quinzaine d’années, ne semblent pas avoir provoqué une expansion équivalente de la mise en œuvre du droit de la concurrence, du moins au plan communautaire. Au contraire, ce dernier a connu une certaine focalisation de son application sur des opérations de concentration des entreprises, sur les ententes entre concurrents [4], et sur quelques cas particuliers d’abus de position dominante, voire hyper-dominante [5]. En fait, l’extension de la protection de la propriété intellectuelle n’a pas produit de conflits systématiques là où on le craignait le plus, à savoir dans le domaine de la protection des banques de données [6], et il est vrai que pas mal de vieux conflits persistent, dont l’actualité est due seulement à un changement de circonstances techno-économiques, par exemple dans le cas des sociétés d’auteurs [7].

35 Ce qui est davantage révélateur, c’est que la perspective de la mise en œuvre du droit de la concurrence en notre domaine spécifique ainsi que l’importance que les autorités de la concurrence attachent à la poursuite de certaines pratiques potentiellement anticoncurrentielles ont changé. Ainsi, aucun contrôle administratif n’est quasiment plus effectivement exercé à l’égard des contrats de licence, la raison avancée étant qu’ils sont, soit pro-innovation par nature [8], soit contrôlés par la concurrence elle-même [9]. Suivant la même idée directrice, l’exercice unilatéral d’un droit de propriété intellectuelle par une entreprise dominant le marché est soumis à un contrôle rigoureux dès qu’il peut en résulter une entrave à l’innovation [10]. Récemment encore, la Commission européenne a mené une enquête sectorielle relative à l’industrie pharmaceutique au motif que le taux d’innovation s’est ralenti et ce, probablement du fait des stratégies d’acquisition et de mise en œuvre défensives de brevets par les entreprises dites « originators » de nouveaux médicaments (les « laboratoires de princeps »)  [11].

36 On peut tirer deux conclusions provisoires de cette évolution du droit de la concurrence en notre matière. D’une part, la mise en œuvre d’une politique communautaire de la concurrence ne couvre pas seulement les pratiques d’exploitation par contrat des droits de propriété, mais elle s’en prend de plus en plus à l’exercice unilatéral de ces droits et même à l’acquisition de ces droits. Par conséquent, de la demande de protection jusqu’à sa fin ou, pour choisir une formule un peu polémique, de sa naissance à sa mort, la protection de la propriété intellectuelle semble être soumise au contrôle du droit de la concurrence.

37 D’autre part, ce contrôle complet n’est ni d’une intensité égale, ni le résultat de l’élargissement du champ de protection de la propriété intellectuelle ou de la transformation de l’industrie productrice de biens corporels en industrie du savoir, ni celui de la part grandissante du savoir technique et informatique dans la création de plus-values économiques. Toutes ces tendances caractérisent nos économies depuis l’industrialisation. Ce contrôle étendu vise plutôt, par son orientation vers l’élimination de pratiques bloquant l’innovation, à atteindre les mêmes objectifs que ceux poursuivis par la protection de la propriété intellectuelle. Toutefois, du moins sous le régime d’une « approche plus économique » du droit de la concurrence, qui peut devenir une approche d’économie industrielle [12], si ce n’est de politique industrielle en faveur de la compétitivité internationale de l’industrie européenne [13], une telle orientation peut aboutir à ce que le droit de la concurrence devienne un instrument à la fois pour compenser et pour corriger certains déficits ou défauts du système de protection de la propriété intellectuelle. Alors que le premier aspect est généralement considéré comme positif, le dernier tend à susciter des réactions mixtes de la part de la communauté de ceux qui s’intéressent à la propriété intellectuelle. Certains milieux industriels et professionnels au moins y voient un effort pour « discipliner » la protection de la propriété intellectuelle alors que d’autres cercles – pas seulement académiques [14] – saluent plutôt la possibilité d’endiguer une « surprotection » éventuelle, voire de la réduire aux limites d’une fonction de protection propre. Mais, puisque les aspects positifs et négatifs tiennent tous les deux à la façon dont on conçoit la « politique de concurrence » sous-jacente au droit de la concurrence, la vraie question est de savoir si et dans quelle mesure le système de protection de la propriété intellectuelle [15] bénéficie ou devrait bénéficier d’un régime propre permettant d’ « adapter » l’application du droit de la concurrence aux particularités – vraies ou apparentes – de l’existence et de l’exploitation des droits de propriété intellectuelle.

2. AUTONOMIE ET RESTRICTIONS DE LA CONCURRENCE

2.1 Pratiques contractuelles

2.1.1. De la protection contre la concurrence…

2.1.1.1. Les doctrines classiques

38 La question qui vient d’être posée ne doit pas être confondue avec celle de savoir si, du fait que la propriété intellectuelle confère au titulaire un droit d’exploitation exclusive de l’objet protégé, la concession de licences restrictives accordée par le titulaire à des tiers serait exempte du contrôle du droit de la concurrence. Il s’agit d’un concept pour l’évaluation des restrictions contenues dans les contrats de licence, lequel a été développé aux États-Unis sous la dénomination de « inherency doctrine »  [16], devenue la « reasonable reward doctrine », et que le législateur allemand a adopté en 1958 [17] et maintenu encore longtemps après que cette approche fut tombée en disgrâce dans son pays d’origine [18]. Cette doctrine, malgré un succès éphémère [19] au début, n’a jamais vraiment retrouvé la faveur des autorités communautaires [20].

39 D’une part, ce concept était trop formaliste et mal adapté aux besoins d’un Marché commun en formation où les règles du droit de la propriété intellectuelle variaient encore fondalement d’un État membre à l’autre, et où la priorité politique était d’assurer un jeu de la concurrence, lequel ne s’arrête pas aux frontières nationales. Alors qu’elles restreignent uniquement la concurrence intra-marques [21] (ou intra-technologies), c’étaient les licences territoriales qui étaient dans le collimateur des autorités administratives et judiciaires [22].

40 D’autre part, du fait que l’on visait avant tout les licences territoriales, on ne pouvait pas se contenter de contrôler les seules restrictions imposées aux preneurs de licence, et donc éventuellement couvertes par les « inherency » et « reasonable reward » doctrines. Il fallait saisir également les restrictions « imposées » aux donneurs de licence, donc reconnaître que la soi-disant « concession » de licence est une transaction négociée où les parties s’accordent « mutuellement » des restrictions suivant leurs intérêts respectifs [23]. Comme pour toute autre transaction, il s’agit d’évaluer, dans une perspective de protection de la concurrence, si les parties au contrat de licence mettent leur autonomie contractuelle en œuvre pour des motifs concurrentiels légitimes ou, au contraire, en vue de fausser ou de restreindre la concurrence [24]. Par conséquent, les critères d’évaluation sont ceux du droit commun de la concurrence : la nature horizontale ou verticale de l’accord, ses objectifs ou effets, y inclus son importance sur le marché, la nature de la concurrence existante, etc.

2.1.1.2. L’approche européenne

41 À cet égard, la Commission, suivant en cela une fois de plus l’exemple américain [25], a expressément reconnu le principe selon lequel, tout en protégeant un bien incorporel aux caractéristiques économiquement particulières, la propriété intellectuelle constitue un titre de propriété comme toute autre propriété et, tout comme la propriété « réelle » de biens corporels [26], elle est entièrement sujette au droit de la concurrence [27]. Mais ce constat n’a pas empêché, ni les autorités américaines ni surtout la Commission européenne, d’établir un régime particulièrement favorable pour les accords dits – non sans raison politique – de transfert de technologie [28]. En effet, depuis les premiers règlements d’exemption par catégorie [29], le régime des accords de licence a été de plus en plus assoupli au point que, sous l’empire du Règlement 772/2004 [30], les accords verticaux de transfert de technologie sont pratiquement exempts de tout contrôle tant qu’une des parties ne détient pas une part de marché indiquant un risque de dominance de marché [31], et tant que l’accord ne contient pas de clauses « hardcore » enfreignant per se les principes les plus fondamentaux du droit contre les restrictions de concurrence [32]. Il est vrai que les accords dits horizontaux, donc conclus entre concurrents, sont observés avec plus de méfiance [33]. Tout est fait cependant pour permettre de qualifier un accord comme relevant de la catégorie verticale plutôt que de la catégorie horizontale [34].

42 Il n’y a pas lieu ici d’entrer dans une analyse critique détaillée de ce développement du régime des accords de transfert de technologie [35]. Il s’agit plutôt de comprendre comment la politique de la concurrence de la Communauté a pu prendre une telle tournure en faveur des contrats d’exploitation de la propriété intellectuelle alors que, depuis toujours, il s’agit des mêmes pratiques, de la même propriété, de la même autonomie d’exploitation, et alors que les objectifs de la protection de cette propriété et de l’autonomie d’exploitation qui en découle, ont toujours été les mêmes. Est-il dès lors possible qu’on cherche à aboutir, sans modifier le système de protection de la propriété intellectuelle, par un changement de la politique et donc du droit de la concurrence, à un taux plus élevé d’innovation, comme le veut le Règlement 772/2004, alors que c’est généralement la protection de la propriété intellectuelle qui est censée promouvoir le progrès technologique ? La réponse est oui, au moins dans une première approche. En effet, ne présente au mieux qu’une demi-vérité la thèse, trop souvent avancée [36], selon laquelle la propriété intellectuelle et le droit de la concurrence seraient liés par un objectif commun, la promotion de l’innovation, et qu’il existerait donc un rapport de complémentarité entre eux, la propriété intellectuelle favorisant une concurrence dynamique pour l’innovation, qu’à son tour, le droit de la concurrence ne serait censé que protéger utilement.

2.1.2.… à la protection pour la concurrence

2.1.2.1. La transformation du bien informationnel public en bien privé protégé

43 Pour mieux comprendre les rapports existant entre les deux systèmes de droit, il suffit de se rappeler deux vérités, simples mais fondamentales, et de placer la propriété intellectuelle dans son contexte [37]. La première est que dans une économie de marché, c’est-à-dire une économie fondée sur le principe de la concurrence, ce sont le droit contre les restrictions de la concurrence ainsi que la politique de concurrence au sens large qui déterminent le fonctionnement non faussé de cette concurrence. La seconde est que l’exercice de la concurrence se fonde sur la propriété privée individuelle et sur son exploitation autonome en vertu de la liberté contractuelle [38]. Tout l’intérêt de la propriété intellectuelle réside dans sa capacité à introduire dans le système d’une économie de marché, des biens qui, par leurs caractéristiques économiques naturelles, s’y prêtent difficilement. En effet, les objets de la protection, telles les inventions brevetables, qui sont des instructions technologiques, ou les programmes d’ordinateur, qui sont des instructions de programmation, ou encore les banques de données, représentent tous des biens dont l’essence est une information, un savoir. Or les informations ou le savoir constituent des biens publics dans la mesure où ils ne sont pas soumis aux règles naturelles d’appropriation individuelle, comme le sont les biens corporels ; il n’y a pas une rivalité d’utilisation. Une fois divulgué, le savoir est partagé par tous, il peut être utilisé simultanément par tout le monde, et il ne souffre pas d’effets de consommation [39]. Par conséquent, l’information en tant que telle échappe aux règles élémentaires de formation de prix. Elle n’a pas de valeur marchande naturelle. Chacun peut s’en emparer à des coûts minimes, voire nuls, et, en tout cas, à des coûts n’ayant aucun rapport avec les coûts de production du savoir. Bref, il s’agit d’un bien public au sens économique dans la mesure où, du fait du manque d’ « appropriabilité » individuelle, personne ne le produirait à ses propres frais.

44 Il est bien connu que l’octroi d’un titre de propriété intellectuelle à un bien informationnel « qualifiant » pour la protection sert à transformer un bien public en bien privé, et ceci, nous dit-on communément, afin de permettre au propriétaire, producteur du savoir en question, d’exclure l’adoption de « son » savoir par des tiers à coût zéro ou minime et de pouvoir ainsi récupérer ses coûts et en tirer profit [40]. On en déduit généralement que l’attribution d’une protection sous forme de propriété intellectuelle constitue la récompense due à l’inventeur (ou à l’auteur) par la société pour avoir contribué à l’innovation (ou à la création). Mais un tel argument risque de court-circuiter la logique du marché et de promettre une récompense à l’inventeur, titulaire du droit de propriété, alors qu’en vérité il n’a nullement droit à une récompense certaine [41]. Tout ce qui est accompli par l’octroi d’une exclusivité, c’est uniquement la transformation d’un bien non marchand en un bien marchand, c’est-à-dire en un bien pour la vente duquel le titulaire peut demander un prix sur le marché, et ceci simplement parce que le droit exclusif lui permet d’exclure les tiers de l’utilisation de « son » savoir. Le bien public est devenu une ressource rare. Mais, comme pour le prix de tous les produits, la question de savoir si, oui ou non, cette ressource a vraiment un prix sur le marché et le montant de ce prix dépendent de l’existence d’une demande, et de ce que cette demande est disposée à payer – ou obligée à payer du fait de la concurrence existant entre demandeurs – en vue de l’offre de produits de substitution ou plus précisément de technologies de substitution. En d’autres termes, la transformation du savoir par la propriété intellectuelle de bien public en bien privé n’introduit pas une promesse de récompense pour, mais, par le mécanisme de la concurrence, dans la production du savoir.

2.1.2.2. La fonction concurrentielle de la propriété intellectuelle

45 Il s’ensuit, d’une part, que le droit exclusif est accordé au titulaire pour lui permettre d’agir efficacement dans la concurrence en saisissant, voire en « s’appropriant » les opportunités de bénéfices offertes sur le marché. Ce sont ces opportunités qui constituent l’incitation à l’innovation [42], et non pas le droit exclusif, lequel, en soi, est sans valeur. Il ne représente qu’un moyen de capter les profits qu’offre le marché, et ceci, bien sûr, uniquement dans les limites résultant de la concurrence qui y règne. C’est là tout le sens de l’autonomie dont doit jouir le titulaire de droit. L’exclusivité est donc un instrument pour agir dans la concurrence plutôt qu’un instrument pour se défendre contre la concurrence, ou, pour être plus précis, un instrument pour agir dans la concurrence entre technologies de substitution. Et c’est à ce titre seulement, et dans la perspective de cette concurrence de substitution que le droit d’exclusivité est censé servir de moyen pour le titulaire de se défendre contre la simple imitation de son innovation, donc de se défendre contre la « petite » concurrence intra-technologies [43]. Là encore, il ne s’agit que d’un aspect instrumentaliste de la protection, non d’une fin en soi.

46 D’autre part, la transformation du bien public en bien privé et l’introduction du mécanisme de la concurrence, qui en résulte, rationalisent la production du savoir. Du fait que c’est le marché qui détermine le prix que le titulaire du droit de propriété intellectuelle peut obtenir pour le transfert ou l’utilisation de l’objet protégé, celui-ci n’est pas seulement obligé d’adapter ses coûts aux prix. Plus exactement, il est également censé programmer sa production en vue de ce qu’une demande éventuelle ou espérée sera disposée à payer. C’est ainsi que la production du savoir devient une activité industrielle, dont la rentabilité et, par la suite, les investissements présents et futurs, sont déterminés par le marché.

2.1.2.3. L’importance de la configuration du droit exclusif

47 Si, donc, ce sont la concurrence et le marché qui constituent la véritable source de l’innovation et de sa rentabilité, cela ne veut pas dire pour autant que la configuration du système de protection et des droits de propriété intellectuelle n’ont aucune influence sur le taux d’innovation. Tout au contraire, l’étendue, la durée et les exceptions à la protection déterminent la mesure dans laquelle les opportunités de profit offertes sur le marché pour l’exploitation de l’objet protégé peuvent être captées par le titulaire du droit exclusif. En ce sens, le système de protection constitue une réglementation-cadre du marché [44]. Cela ne change rien au principe selon lequel la propriété intellectuelle n’est pas censée conférer au propriétaire un droit de monopole. Tout ce qu’il peut réclamer, c’est un droit exclusif lui servant d’instrument pour faire de la concurrence, en ce que ce droit protège sa technologie, laquelle, à son tour, lui permet de rivaliser avec des concurrents détenteurs de technologies de substitution. De toute façon, le concept de la réglementation-cadre du marché par le système de protection ne change pas l’idée fondamentale selon laquelle ce sont le marché et les conditions de concurrence qui y prévalent, qui déterminent et doivent être les seules à déterminer les perspectives et les opportunités de profit pour l’exploitation de l’objet protégé.

48 Par conséquent, il est évident, d’une part, que le système de protection de la propriété intellectuelle, en tant que tel, est neutre par rapport au choix de telle ou telle politique de concurrence par les autorités de concurrence. D’autre part, il n’est pas moins évident qu’une politique volontariste du droit de la concurrence peut profondément affecter les conditions, le déroulement et finalement les résultats d’une concurrence pour l’innovation menée avec les instruments de protection que le système de la propriété intellectuelle met à la disposition des acteurs sur le marché.

2.1.2.4. Une propriété pour une politique volontariste de la concurrence

49 À cet égard, la politique de concurrence relative aux accords de transfert de technologie, telle que formulée par la Commission dans les Lignes directrices de 2004 [45], est assez révélatrice dans la mesure où elle définit les rapports concurrentiels entre donneurs et preneurs de licence par référence non seulement à leur position respective sur le marché pertinent, mais également à leur position sur le plan de la protection par des droits exclusifs. Dès que les parties détiennent des technologies dont les brevets se trouvent en position de blocage unilatéral ou bilatéral, elles ne sont plus considérées comme étant des concurrents sur le marché des technologies [46], et c’est alors le régime des accords verticaux qui s’applique [47]. Cette qualification s’explique par le souci de permettre aux parties de combiner les résultats de leurs efforts de recherche, et d’éviter ainsi que leurs investissements demeurent vains et qu’elles ne perdent des opportunités de profit. Cela ne représente cependant qu’un aspect du problème. La distinction entre accords verticaux et accords horizontaux est malaisée en matière de licences car, du fait même de la prise d’une licence, le licencié peut devenir un concurrent potentiel du donneur de licence [48]. Mais, si difficile qu’elle soit, elle exerce une influence directe sur l’évaluation du potentiel anticoncurrentiel d’un accord de licence, le risque d’une collusion entre concurrents étant toujours présent pour ces derniers.

50 Normalement, on aurait pensé que la possession d’une propriété intellectuelle couvrant en partie la même technologie est un indice des plus clairs de ce que les parties sont des concurrents, et que la résolution de leur conflit en matière de brevets demande une attention particulière de la part des autorités de la concurrence plutôt qu’une tolérance affichée. En effet, s’il est nécessaire de permettre aux parties de sortir de l’impasse, il est impératif de veiller à ce qu’un tel accord ne contienne pas d’arrangements restrictifs, qui ne sont pas indispensables à la solution de leur conflit, au sens de l’article 81 (3) du Traité. Ceci est d’autant plus vrai que, la plupart du temps, les parties se sont mises elles-mêmes dans cette situation apparemment embarrassante. La Commission qui, par son approche « pro-active » de politique industrielle [49], a cru devoir se soucier plus des intérêts des entreprises et de « l’orientation » de la concurrence en vue d’objectifs préétablis que du jeu non faussé de la concurrence, s’est peut-être rendu compte de la problématique de son approche lorsque, lors de son enquête dans le secteur de l’industrie pharmaceutique, elle a dû constater les stratégies agressives de prise de brevets soi-disant défensifs déployées par les laboratoires de princeps [50]. Il faut espérer que, pour corriger sa politique, elle ne greffe pas encore une nouvelle approche « pro-active » sur la première en essayant de contrôler la stratégie de prise de brevets des entreprises au-delà de ce qui est justifié au titre de la suppression de restrictions à la concurrence [51].

2.2. Pratiques unilatérales

2.2.1. Points de départ

51 On peut toujours douter de l’opportunité d’une politique de concurrence à l’égard des pratiques contractuelles des propriétaires de technologie qui renforce leur position en leur permettant d’inclure ou d’exclure, à leurs conditions, les tiers de l’utilisation de la technologie protégée [52]. Encore faut-il se demander également si, et éventuellement, comment les autorités communautaires pourraient contrebalancer une approche tolérante prise lors de l’application de l’article 81 du Traité par une mise en œuvre rigoureuse de l’article 82. À cet égard encore, le point de départ pour toute analyse réside en ce que le droit exclusif permet uniquement à son titulaire de se défendre contre l’imitation par des tiers de l’objet protégé, mais pas d’exclure ou d’entraver la concurrence que lui font les tiers par des produits de substitution.

52 Par conséquent, le premier élément de l’article 82 du Traité, l’existence d’une position dominante, ne peut être affirmé par référence à la seule exclusivité conférée par la propriété intellectuelle au titulaire du droit, mais seulement par référence à la situation concurrentielle de fait, dans laquelle se trouve l’objet protégé sur un marché pertinent. Cette formule maintenant classique [53] signifie tout d’abord que le marché pertinent et la position dominante qu’y détient une entreprise, sont, en principe, déterminés de la même manière pour les technologies ou produits protégés par une propriété intellectuelle qu’ils le sont pour tout autre produit ou service, à savoir par rapport aux préférences de la demande pour le produit en cause et ses substituts économiques [54]. Elle signifie également que ce n’est pas le pouvoir d’exclusion découlant de la propriété intellectuelle qui caractérise la dominance du marché, mais la puissance économique, laquelle permet un comportement indépendant de l’entreprise par rapport aux réactions de ses concurrents et des consommateurs [55]. Il s’ensuit, comme le dit le texte même de l’article 82, que ce n’est jamais le droit exclusif, mais la position dominante, dont il faut prouver et éventuellement constater l’abus.

2.2.2. L’abus de position dominante

2.2.2.1. Les pratiques d’exploitation inéquitable

53 Si de ce fait, l’article 82 du Traité ne se prête pas au développement d’une « misuse doctrine », telle qu’elle s’est développée aux États-Unis, il reste vrai néanmoins que l’exercice du droit de propriété intellectuelle peut s’opérer au service de la position dominante, notamment pour la défendre ou pour la renforcer. Les formes en sont multiples, d’autant que l’objet protégé – le savoir – se prêtera à de multiples formes et objectifs d’utilisation. Il est impossible d’en faire une analyse ici, ne serait-ce que de façon sommaire [56]. Mais encore une fois, le principe de contrôle est le même que pour toute propriété. Plus particulièrement, l’entreprise en position dominante n’est pas seulement en droit de se défendre contre tout acte de contrefaçon de sa technologie protégée, elle jouit encore de la pleine autonomie d’exploiter cette technologie comme le ferait toute entreprise se trouvant en situation de concurrence [57], soit par la production et la vente des produits protégés, soit par la concession de licences.

54 L’important du point de vue du contrôle des pratiques abusives est la formule de réserve. Elle signifie que la propriété intellectuelle ne peut pas servir de justification à des pratiques qui autrement sont interdites comme étant abusives pour toute entreprise en position dominante [58], notamment les pratiques de prix ou de conditions excessifs et les pratiques d’éviction du marché. Ces pratiques peuvent prendre la forme soit d’un contrat de licence indûment restrictif, soit d’un refus absolu ou qualifié de licence [59]. Malheureusement, le rapport de tension, qui existe entre une exploitation légitime fondée sur le mérite d’un effort d’innovation réussi et une exploitation ne satisfaisant plus la comparaison avec une conduite quasiment concurrentielle fait que toute détermination d’un abus de position dominante demande une évaluation circonstanciée dans chaque cas d’espèce. La jurisprudence en la matière est limitée, tout au moins en ce qui concerne celle des instances communautaires.

55 Alors qu’en principe, une demande de prix excessif peut constituer un abus [60], jusqu’à présent un tel abus n’a jamais pu être vérifié formellement dans un cas d’espèce [61]. Toutefois, dans l’affaire Rambus concernant l’exercice d’un droit de brevet contre l’application d’une norme technique couverte par les revendications du brevet, la Commission semble être sur le point d’imposer l’obligation à la société Rambus de réduire à un niveau concurrentiel les royalties qu’elle demande aux tiers [62]. La raison en est que la société Rambus a toléré l’inclusion de sa technologie protégée dans la norme technique et qu’elle cherche maintenant à tirer profit de ce que, du fait de l’adoption de la norme par le marché, les entreprises sont désormais obligées de payer tout prix arbitraire, car elles se trouvent enfermées dans une impasse : elles ont engagé des coûts d’investissement qu’elles risquent de perdre si elles changent de norme. De plus, un tel changement est à peine possible, étant donné que les effets de réseau accompagnant l’adoption d’une norme rendent son remplacement par une autre extrêmement difficile. Le marché est capté par la norme existante dès que celle-ci l’a fait tourner en sa faveur [63].

2.2.2.2. Les pratiques « classiques » d’éviction de technologies de substitution

56 En revanche, la forme classique de pratique d’éviction, qui est celle du jumelage de produits ou de services, a été constatée dans quelques cas [64]. Toutefois, ici encore, la nécessité d’un contrôle est mieux acceptée que son exercice [65], étant donné que le jumelage peut se justifier économiquement et que la Commission, dans une récente Communication, n’a plus essayé de nous éclairer sur les détails [66]. Il n’en reste pas moins que semble hors de doute le point crucial : les pratiques de jumelage entre objet protégé et autres produits ou prestations sont soumises à un contrôle particulier par le droit contre les restrictions à la concurrence, parce qu’elles consistent en l’offre conjointe de produits, un produit « fort » – le produit protégé – entraînant ainsi l’achat du produit lié, alors que, pour chacun d’entre eux, existe une demande indépendante. Il en résulte qu’en vertu de sa position sur le marché du produit « fort », l’entreprise dominante entrave l’accès à des marchés en amont ou en aval, où des concurrents voudraient offrir des produits de substitution au produit lié. Le remède à ces pratiques est l’obligation imposée à l’entreprise dominante de scinder son offre en offres distinctes, non pour réduire le pouvoir d’attraction du produit protégé, mais pour contraindre à son utilisation en tant que levier pour la vente d’autres produits, chaque produit devant être offert à partir de ses mérites propres. Par conséquent, l’exclusivité de la protection n’est pas mise en cause, et elle ne saurait l’être, puisque c’est l’emploi de l’effet de levier plutôt que l’existence du droit exclusif lui-même qui est à la base de l’effet anticoncurrentiel de la pratique de jumelage.

2.2.2.3. Les pratiques d’exploitation de marchés fermés

57 Il en est autrement dans certains cas limites dans lesquels l’entreprise dominante peut être tenue de tolérer ou de permettre l’utilisation de sa propre technologie par des tiers afin d’ouvrir un marché qui, autrement, serait économiquement inaccessible à la concurrence. La solution juridique à apporter à ces situations qui sont assez hétérogènes, est tout naturellement controversée [67]. Ainsi, dans l’affaire Le Point Vert (Der Grüne Punkt)  [68], à la suite de l’approche choisie par la Commission et le Tribunal [69], la Cour de justice a caractérisé comme pratique de prix excessif au sens de l’article 82 lit a) du Traité un comportement du titulaire de la marque, lequel consistait en ce que celui-ci demandait à ses licenciés les mêmes royalties pour l’utilisation de la marque indépendamment du fait qu’ils utilisaient ou non des services que le titulaire leur offrait sous sa marque. Le résultat de cette pratique de prix était que personne n’avait intérêt à se passer des services du titulaire ; celui-ci avait donc au moins pour effet, sinon pour objet, d’entraver la concurrence de tiers offrant des services de substitution [70]. Mais la raison sous-jacente de cette politique de concession de licence était que, économiquement et peut-être même techniquement, il n’était pas possible de limiter la licence de marque aux seuls cas où les preneurs de licence ou leurs clients faisaient effectivement usage des services offerts par le titulaire de la marque [71].

58 Par conséquent, le seul moyen d’ouvrir le marché aux concurrents offrant un service similaire consistait en l’obligation imposée au titulaire de la marque de réduire à zéro les royalties pour l’utilisation de celle-ci dans l’hypothèse où il pouvait être prouvé que les consommateurs n’avaient effectivement pas fait usage du service offert par le titulaire. Celui-ci s’est plaint alors de ce que les autorités communautaires lui demandaient d’accorder des licences obligatoires gratuites, et, du moins économiquement parlant, il avait raison. Il avait cependant tort de ne pas vouloir accepter cette « obligation »  [72]. D’une part, son intérêt d’être protégé en tant que titulaire de la marque « Der Grüne Punkt » n’était pas vraiment remis en question, étant donné que ni la fonction d’identification des produits ou des services, ni la réputation de la marque n’étaient en péril [73]. D’autre part, une fois installé, le système de collecte collectif produit des effets de réseau et de jumelage naturel que la pratique de la licence globale ne faisait que renforcer, et qui, pris ensemble, rendait le marché suffisamment inaccessible pour assurer un quasi-monopole au titulaire de la marque [74].

59 Il importe de noter que, dans l’affaire Le Point Vert, la Cour a insisté sur le fait qu’elle n’avait qu’à juger d’un abus de position dominante, et non pas d’un abus du droit exclusif [75]. La Cour a même tenu à préciser que, quant à ses fonctions essentielles, l’exercice du droit exclusif n’était pas affecté par l’interdiction de la pratique abusive, ou si affectation il y avait, celle-ci était de minimis par rapport à l’atteinte à la concurrence à laquelle son interdiction était censée remédier [76]. Se dessine donc à l’horizon l’apparition d’un principe de proportionnalité. Toutefois, l’adoption d’un tel principe ne devrait pas aboutir à l’exigence d’un rapport proportionnel direct entre, d’une part, le manque éventuel d’intérêt de protection suffisamment solide pour justifier l’exploitation monopolistique d’un marché à hautes barrières économiques à l’entrée quasiment insurmontables et, d’autre part, les gains à obtenir en termes de surplus concurrentiel résultant de l’application de l’article 82 à l’exercice du droit exclusif en de telles circonstances. Il s’agit plutôt de modérer l’autonomie dont jouit le titulaire du droit de propriété intellectuelle quant à la concession de licence par des règles caractérisant clairement le type de comportement restrictif pour lequel un contrôle approfondi est nécessaire.

60 L’hypothèse modèle est constituée par l’exercice du droit exclusif conféré par un brevet dont les revendications couvrent les instructions incluses dans une norme technique. Une fois que la norme est établie et adoptée par le marché, ce dernier est normalement impénétrable pour des technologies de substitution, au moins à court et moyen terme, car les effets de réseau qu’il produit résultent en un phénomène de « renfermement » des acteurs sur le marché et donc en de hautes barrières à l’entrée pour les technologies concurrentes, même assez innovantes [77]. La concurrence se joue avant et en amont pour l’adoption d’une technologie en tant que norme technique. Un tel déroulement de la concurrence dynamique pour l’innovation demande, en principe, que le vainqueur de la course au standard ne soit pas obligé de partager sa technologie avec ses anciens concurrents, mais qu’il puisse les exclure en vertu de l’exclusivité de sa propriété intellectuelle couvrant la norme technique en question. C’est ce qu’a décidé avec beaucoup de raison, mais sans en donner de bonnes raisons, la Cour de justice dans l’affaire IMS Health [78].

61 Si, par contre, il s’agit d’une norme dite ouverte, puisque établie par une organisation de normalisation reconnue et couvrant toute une industrie, l’accès à la norme doit être garanti pour tous les acteurs par une obligation du titulaire du brevet d’accorder des licences à tout demandeur à des conditions non discriminatoires et raisonnables, et ceci tant en vertu du droit de la normalisation qu’en vertu du droit de la concurrence relative à la normalisation privée collective [79]. La raison à l’appui de cette approche est que les bénéfices potentiels d’un effort de normalisation collectif englobant toute une industrie ne peuvent être réalisés que si la diffusion de la nouvelle technologie brevetée et normalisée est assurée par un accès ouvert à l’utilisation de la norme [80].

62 Toutefois, certains cas se situent entre la perte du jeu concurrentiel par une entreprise sur le marché des standards – donc dans la concurrence inter-technologies – et l’accès ouvert à la concurrence sur le marché des produits normalisés, où joue la concurrence intra-technologies. Ainsi, en Allemagne, la Cour fédérale suprême [81] a eu à décider de la demande d’accès à une norme technique qu’une entreprise, concurrente du demandeur, avait développée sur l’initiative de l’industrie utilisatrice du produit normalisé [82]. La technologie (la configuration de la bonde de tonneau pour liquides chimiques nocifs) avait été brevetée en faveur de l’entreprise qui l’avait développée. Par la suite, elle avait été adoptée en tant que technologie-standard par un accord-cadre conclu avec l’industrie utilisatrice. Le brevet concerné a été donné en licence à titre gratuit à trois concurrents qui, au début, avaient coopéré au développement de la technologie en question et, contre rémunération, à d’autres entreprises situées en d’autres États membres de l’Union européenne. Bref, il s’agissait d’une norme privée, pas nécessairement ouverte à l’utilisation par tout demandeur (sauf, bien sûr, l’industrie utilisatrice du produit normalisé), mais qui dominait totalement le marché.

63 La Cour suprême, tout en insistant sur la liberté pour l’entreprise d’accorder des licences à des tiers dont jouit même un titulaire de brevet dominant le marché, a noté que la légitimité de l’exercice de cette autonomie était affaiblie du fait que la position dominante du titulaire reposait moins sur les mérites intrinsèques de son invention ou sur son effort d’innovation que sur l’adoption de la technologie en tant que « standard » par l’industrie utilisatrice, laquelle avait même pris l’initiative de demander une nouvelle et meilleure technologie. La Cour en a conclu qu’en ce qui concerne un marché dont l’accessibilité dépend de l’observation de la norme en question, le titulaire du brevet couvrant la norme ne peut faire valoir son autonomie que sur la base de critères conformes à un système de concurrence libre, tel qu’il est visé par le droit allemand (ou communautaire) de la concurrence.

64 À cet égard, plutôt que d’appliquer les règles générales concernant l’interdiction de l’exercice discriminatoire d’une puissance de marché, ou, au contraire, d’énoncer une interdiction absolue du refus de licence concernant les brevets couvrant une norme technique, la Cour semble vouloir développer une règle spécifique et particulièrement stricte de non-discrimination, laquelle s’appliquerait dans tous les cas où le titulaire du brevet bénéficie en fait de l’application de la norme technique « brevetée », qu’il ait ou non participé à son établissement, ou qu’il l’ait ou non initiée ou qu’il ait consenti à sa définition suivant son invention brevetée [83]. Cette règle n’est pas aisée à appliquer – dans un arrêt récent, la Cour vient même de saper son effet utile en refusant son application tant que le tiers utilisateur de la norme ne se comporte pas, en fait, entièrement en conformité aux conditions (non discriminatoires et légitimes par ailleurs) d’une licence fictive [84] –, et elle n’exige normalement que la concession de licences payantes. Toutefois, cette règle peut offrir une solution intermédiaire et flexible dans les cas qui se situent entre ceux où le brevet couvre une norme technique « ouverte » adoptée par une organisation de normalisation publiquement reconnue [85] et ceux où le brevet couvre un standard de fait établi sur l’initiative innovatrice et aux risques et coûts d’une entreprise individuelle [86].

2.2.3. « Stratégies » abusives de dépôt de brevets

2.2.3.1. Le rapport d’enquête sectorielle Pharma

65 À l’autonomie conférée au titulaire d’un brevet, d’un dessin ou d’une marque en vertu du droit de propriété qui, lui, est un élément constitutif du système de la libre concurrence, correspond la liberté d’acquérir ou non un titre de protection par la propriété intellectuelle pour les inventions, les créations utiles et esthétiques ou pour la réputation qu’une entreprise a obtenue dans cette concurrence. Comme l’autonomie du propriétaire, cette liberté de choisir et d’acquérir un titre de protection peut être exercée en vue de s’en servir en tant qu’instrument pour entrer et gagner dans le jeu concurrentiel [87] ou pour restreindre son bon fonctionnement.

66 À cet égard, ce sont surtout les droits exclusifs s’acquérant par un dépôt formel auprès d’un office de propriété intellectuelle qui posent des problèmes particuliers du fait que la liberté même de choisir une protection et sa forme ainsi que les procédures d’obtention et de maintien du droit permettent aux entreprises de développer leurs propres stratégies de prise de brevets, de droits sur leurs dessins ou de marques. Ces problèmes sont connus en droit des marques [88] où des demandes de protection excessive ont même attiré l’intérêt d’un public assez large [89]. Il semble cependant que, jusqu’à présent, ils ont pu être résolus sans qu’il ait été nécessaire d’avoir recours au droit relatif aux restrictions de concurrence [90]. En revanche, en ce qui concerne les « stratégies » de prise de brevets des entreprises, le rapport de la Commission relatif à l’enquête dans le secteur pharmaceutique ne laisse point de doute que la Commission se propose d’examiner ces stratégies de plus près sous l’angle de la prohibition des abus de position dominante [91]. Son approche sera donc limitée ; elle oblige à se demander pourquoi il s’agit d’une problématique de pur droit de la concurrence plutôt que tirée du seul droit des brevets [92].

67 Le rapport est trop long pour être résumé ici [93]. Il recouvre toute une série de pratiques mises en œuvre par les entreprises du secteur pharmaceutique en ce qui concerne la protection de leurs intérêts concurrentiels par des brevets et par d’autres moyens. En ce qui concerne les « stratégies » de prise et de maintien de brevets, une opposition faite de façon générale dans le rapport entre, d’une part, l’interaction entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques et, d’autre part, la concurrence entre laboratoires de princeps, s’avère utile. Dans la première hypothèse, la stratégie des entreprises créant et produisant les princeps vise essentiellement à établir une position protégée large, puis à tenter de faire prolonger cette protection aussi longtemps que possible, alors que, dans la deuxième hypothèse, les laboratoires de princeps tentent non seulement de se procurer une protection large et solide, mais encore de bloquer ou de saper les efforts semblables qu’entreprennent leurs concurrents, laboratoires de princeps. Néanmoins, cette distinction peut sembler quelque peu stylisée car elle prend pour acquis que les fabricants de génériques n’agissent jamais en tant que laboratoires innovateurs et que les laboratoires de princeps n’ont aucune activité de fabrication et de vente de génériques [94].

68 En ce qui concerne plus spécifiquement la concurrence entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques, le souci principal de la Commission était de comprendre les raisons expliquant la rapidité ou la lenteur de la substitution des princeps par des produits génériques, et plus particulièrement le délai existant entre la fin de la période de protection du princeps et l’apparition des génériques sur le marché [95]. À cet égard, outre des pratiques exceptionnelles de fraude accompagnant une demande éventuelle de prolongation de la protection [96] et outre certaines tactiques d’intervention auprès des autorités en charge des autorisations de mise en circulation des produits pharmaceutiques, le rapport relève, quant aux stratégies d’obtention de brevets, d’une part, une pratique d’accumulation de brevets ou de formation de « grappes de brevets » autour de l’invention pharmaceutique principale [97] et, d’autre part, une pratique de demandes de protection pour des inventions secondaires, variantes du princeps, qui ont tendance à être déposées vers la fin de la durée des brevets principaux et dont la validité peut trop souvent être sujette à doutes [98]. Tout en reconnaissant les mérites d’innovations graduelles ( « incremental innovation ») résultant d’efforts de recherche continue, la question posée par le rapport est de savoir si, en tant que telles, les « grappes de brevets » établissent un obstacle à l’entrée rapide des génériques sur le marché. En effet, ces grappes créent tout un ensemble de branches de brevets autour des princeps, dont il est difficile de savoir dans quelle mesure les diverses branches sont interconnectées avec les brevets couvrant le princeps en tant que tel. Ainsi, en créant une grande incertitude juridique autour d’elles, les grappes de brevets produiraient des effets de dissuasion qui seraient accrus par les coûts, la lenteur et les difficultés des procédures de demande de brevets, d’opposition à l’octroi des brevets et de défense contre les actions en contrefaçon ainsi que par les pratiques procédurales employées par les laboratoires de princeps [99].

69 Dans la partie, beaucoup plus courte, que le rapport consacre aux rapports concurrentiels entre laboratoires de princeps, le principal thème concernant la stratégie d’acquisition de brevets est relatif à la stratégie dite de brevets défensifs ou de blocage [100]. Celle-ci s’ajoute à l’accumulation de brevets demandés pour assurer aux laboratoires de princeps un espace protégé de libre développement de leurs activités de recherche, de production et de vente de princeps, si besoin est en prenant des licences bien définies provenant d’autres laboratoires [101]. La stratégie de brevet défensif consisterait alors notamment à ce qu’un laboratoire de princeps demande des brevets pour des inventions qui sont en dehors de son propre champ d’intérêt d’innovation, mais qui peuvent gêner la recherche-développement et la production des concurrents, étant donné qu’il n’y a que quelques domaines de recherche-développement économiquement prometteurs, dans lesquels les laboratoires tentent de définir et de protéger leurs prés carrés préférés. Une telle stratégie de blocage peut être complétée par des « publications défensives », par lesquelles sont créées des antériorités techniques empêchant les concurrents d’obtenir un brevet pour leurs efforts de recherche parallèle [102].

2.2.3.2. La protection de la propriété industrielle comme règlement-cadre du marché

70 Dans son rapport, la Commission insiste sur ce que les stratégies de demande de brevets, notamment celles qui peuvent servir à ralentir l’entrée des génériques sur le marché, doivent être appréciées non seulement en tant que pratiques isolées, mais aussi comme compléments d’un ensemble de moyens de défense contre les concurrents. Celui-ci inclut les modes de négociation et d’utilisation des procédures judiciaires, les règlements à l’amiable [103] et toute une série de pratiques de lobbying, de marketing, et même de diffamation subtile de produits [104]. Il est également intéressant de noter que le rapport ne cesse de souligner que les constatations faites ne préjugent en rien de l’appréciation des pratiques en question dans le cadre de l’application des règles de concurrence à des cas d’espèce, puisque tout dépend précisément des circonstances particulières de l’espèce. Il est pourtant clair que le rapport soupçonne certaines pratiques d’effets anticoncurrentiels au sens de l’article 81 et surtout de l’article 82 du Traité. Afin de pouvoir vérifier dans quelle mesure ce soupçon, en tant que tel, peut s’avérer justifié, il est nécessaire de revenir sur l’autonomie dont jouissent les entreprises ayant recours au système de protection par brevets.

71 Cette autonomie, nous l’avons déjà dit, ne concerne pas seulement la libre exploitation de la propriété, celle-ci une fois accordée, mais aussi, étant donné la liberté du commerce et de l’industrie, le libre choix d’une protection et la liberté de choisir entre les opportunités et options offertes par le système de protection. En effet, comme il a été noté auparavant, la propriété intellectuelle, plus particulièrement le droit des brevets, ne met pas seulement à la disposition des entreprises un moyen de faire de la concurrence. Plus exactement, en fixant les conditions, les modalités et les termes de la protection en ce qui concerne son obtention, son étendue, son maintien, sa durée et sa mise en œuvre, il établit également une réglementation-cadre pour cette concurrence. C’est ainsi que les critères de brevetabilité définissent la nature et la qualité des objets qui peuvent éventuellement bénéficier d’une exclusivité dans la concurrence [105]. De même, la détermination de la portée des revendications [106] ou des critères et des sanctions de la contrefaçon [107] conditionnent la mesure dans laquelle le titre de protection va garantir l’exclusivité dans l’exploitation des opportunités offertes sur le marché. De façon similaire, les exceptions à la protection [108], les conditions de son maintien, de son abandon ou de sa perte [109] ainsi que la configuration des procédures d’obtention, d’opposition, de contrefaçon ou de nullité [110] du brevet sont toutes conçues de façon à faciliter ou à contrebalancer l’exclusivité en tant que moyen dans la concurrence dynamique entre diverses technologies.

72 Plus particulièrement, le système ne permet pas seulement aux entreprises de choisir entre, d’une part, le maintien du secret de fabrique, le gain de parts de marché suffisantes et suffisamment stables par une « entrée surprise » et la pénétration rapide du marché, et, d’autre part, l’obtention d’une protection par brevet. Plus exactement, les entreprises sont-elles libres non seulement de combiner toutes ces stratégies, mais encore, grâce au système de brevet, de déposer des demandes de brevet plus ou moins larges suivant leurs besoins et capacités, de divulguer leurs inventions immédiatement après le dépôt de demande ou seulement après une période d’attente de 18 mois [111], de faire avancer ou de retarder l’examen de leur demande en conformité avec les règles particulières des systèmes nationaux et internationaux de protection [112], de diviser leur demandes pour des raisons diverses, telles que décrites dans le rapport d’enquête sectorielle Pharma [113], de limiter la demande de brevet, voire les revendications du brevet accordé [114], et enfin de retirer la demande ou d’abandonner le brevet.

73 Toutes ces règles ne sont pas simplement de nature formelle en servant seulement la bonne administration technocratique du système d’octroi de brevet. Le plus souvent, elles sont surtout ou du moins également censées permettre aux entreprises de faire un bon choix, lorsque celles-ci se décident à utiliser le système des brevets [115]. Inversement, les tiers ont la possibilité de se défendre devant l’office de brevets [116] et, de toute façon, devant les tribunaux contre l’obtention non justifiée de cet instrument de concurrence par leurs actuels ou futurs concurrents. Ce qui est plus important, c’est que le système de brevet lui-même leur laisse une place pour établir leur propre position dans la concurrence. À cet égard, l’obligation du demandeur de divulguer son invention [117] ou l’exception de la protection pour des fins d’utilisation expérimentale de l’invention [118] sont peut-être moins importantes que les critères limitant l’obtention et l’étendue d’un brevet [119], car ils délimitent également le champ ouvert à la concurrence.

74 Tout ceci ne veut pas dire que le système de brevet, tel qu’il existe, fonctionne de façon satisfaisante. La question, assez souvent posée [120], n’est pas là. Elle est plutôt de savoir si ladite « complémentarité » entre système de propriété intellectuelle et droit de la concurrence veut ou permet qu’une insuffisance éventuelle du fonctionnement de la protection par brevet soit corrigée par l’application du droit de la concurrence, lorsque les entreprises font leur choix de la forme même de protection [121]. À cet égard, il importe de se rendre compte que, en tant que support aux efforts de concurrence innovatrice des entreprises, un système de propriété intellectuelle ne peut fonctionner de façon optimale que sur le plan systématique, et pas nécessairement également sur le plan pratique de sa mise en œuvre dans toutes les situations concrètes existant sur un marché donné. Il en est ainsi, primo, parce que les technologies à protéger et leurs besoins de protection changent plus rapidement que le législateur ne peut changer la loi ou que l’administration et la jurisprudence ne peuvent réorienter leurs pratiques et doctrines. Secundo, et surtout, le système n’est pas conçu seulement pour une technologie ou pour une industrie donnée, mais doit servir toute l’économie d’un État ou d’une région en termes égaux, alors que les nécessités de protection des entreprises agissant sur des marchés très hétérogènes varient largement. Tant que le principe « une taille pour tous » n’est pas abandonné [122], des situations de « surprotection » ou de « sous-protection », qui sont économiquement inefficientes, se présenteront de façon inévitable et peut-être même relativement souvent [123]. Mais il s’agit là des coûts du choix d’un système de propriété plutôt que d’un système de subventions ou de prix et de primes pour soutenir un taux souhaitable [124] d’innovation, ces derniers étant trop difficiles et coûteux ( ! ) à administrer [125]. En fait, l’exemple de la bonne détermination de la durée de protection le montre bien [126], le seul moyen d’éviter toute « inefficience » serait de déterminer les conditions de protection au cas par cas. Puisque ceci est pratiquement impossible et puisqu’un changement du système général existant en faveur d’un système prévoyant la délivrance de titres de protection qui seraient à la fois abstraits et spécifiquement adaptés aux besoins particuliers des projets d’innovation en question, donc quasiment délivrés « sur mesure », n’est ni probable ni particulièrement prometteur [127], il faut bien reconnaître que nous devons vivre avec le fait que le système des brevets est susceptible de produire aussi bien des excès que des déficits. Seul le législateur saurait corriger ce déficit systématique par une modification de la réglementation-cadre, si le besoin s’en fait suffisamment sentir.

2.2.3.3. Le choix autonome de protection et ses limites

75 En tout cas, ce constat quelque peu pessimiste est nécessaire pour mieux comprendre que l’autonomie dont jouissent les entreprises lors du choix et de la mise en œuvre de la protection offerte par le système des brevets, constitue un élément essentiel de son fonctionnement. Elle permet aux entreprises de faire un choix, dans les limites du système, et d’obtenir une protection laquelle, en ce qui concerne le moment de son obtention, sa composition, son étendue et sa durée ainsi qu’en ce qui concerne sa fiabilité et sa mise en œuvre, est adaptée à leurs besoins individuels. À supposer que les entreprises se comportent de façon rationnelle et surtout qu’une concurrence suffisante les y oblige, qu’en plus l’administration et la jurisprudence respectent tant la neutralité concurrentielle du système [128] que cette autonomie (plutôt que de vouloir contrôler l’opportunité de son exercice individuel), l’exercice de cette autonomie devrait contribuer à une certaine optimisation de la protection en tant qu’instrument de concurrence. Toutefois, comme toute liberté, elle peut être exercée non seulement en vue d’atteindre des buts systématiques légitimes, mais également avec l’objectif ou avec l’effet de restreindre la concurrence.

76 À cet égard, il devrait être clair à présent qu’on ne saurait ni assimiler à une restriction anticoncurrentielle le seul fait qu’une entreprise ait réussi à obtenir une protection maximale, ni même faire une telle assimilation simplement parce que la protection obtenue excède, peut-être, ce qui est objectivement indispensable à une concurrence innovatrice et à armes égales, en ce qu’elle renforce, d’une part, le contrôle que cette entreprise peut exercer sur la concurrence intra-technologies et, d’autre part, sa position vis-à-vis de ses concurrents et des technologies de substitution [129]. Il convient plutôt de prouver l’existence d’une stratégie de dépôt de brevets caractérisée, laquelle viserait effectivement à restreindre la concurrence par des technologies de substitution. Certes, la ligne de démarcation est difficile à tracer. Pourtant, le rapport d’enquête sectorielle Pharma relève des pratiques qui peuvent servir à illustrer la distinction. C’est ainsi que la formation de « grappes de brevets » par le dépôt d’une multitude de brevets principaux et secondaires et leur étalement dans le temps reflète simplement une problématique du système qui est que, du fait des critères de brevetabilité, le système de protection conduit à une fragmentation des technologies en morceaux protégés, alors que l’entreprise innovante aurait besoin de protéger l’ensemble de « sa technologie » telle qu’elle la développe dans le temps. Les brevets, tels que composés, servent effectivement à identifier et à protéger la technologie en sa substance essentielle et rendent ainsi l’accès à son noyau difficile, même si ce dernier n’est plus couvert par un brevet. La conséquence en est que le trade-off entre la protection de l’innovation et sa diffusion ultérieure, lequel est à la base de la détermination de la durée de protection, est compromis. Un tel retardement de l’ouverture à la concurrence intra-technologies, qui seule peut garantir une diffusion optimale de l’innovation [130], produit des « rentes de monopole » injustifiées et des pertes macroéconomiques. Il ne faut donc pas s’étonner de ce que la Commission se heurte au « cluster building » [131]. Pourtant, sauf circonstances particulières, une telle stratégie est le résultat du mode normal de fonctionnement du système de brevet plutôt que l’expression d’une pratique anticoncurrentielle.

77 Par contre, si au lieu de protéger ses propres technologies et intérêts d’exploitation par la formation de grappes de brevets, une entreprise se préoccupe de saper le potentiel d’innovation substitutive que ses concurrents voudront voir protégé de la même façon que cette entreprise protège le sien – par exemple en déposant des brevets pour des inventions « secondaires » que cette entreprise n’a aucune intention d’exploiter mais qui tombent dans le champ d’intérêt marqué par ses concurrents [132] –, alors cette entreprise entre dans une zone grise, où un contrôle de pratiques éventuellement abusives des entreprises dominantes doit avoir lieu. Cela ne veut pas dire que de telles pratiques, d’ailleurs courantes [133], doivent être considérées comme étant a priori anticoncurrentielles. Mais, dans la mesure où elles ne visent pas à la défense contre une imitation éventuelle mais plutôt ou essentiellement à entraver la concurrence par des technologies de substitution, elles demandent une justification particulière [134]. La sanction éventuelle d’une telle stratégie ne serait, d’ailleurs, pas la perte du brevet mais sa non-opposabilité aux concurrents entravés.

3. AUTONOMIE ET RÉGULATION DE LA PROTECTION

3.1. Régulation du système de protection par le droit de la concurrence ?

3.1.1. Les communautés de brevets

78 La formation de grappes de brevets et les stratégies de dépôt de brevets défensifs ne sont pas particulières à l’industrie pharmaceutique [135]. Le maquis de brevets qui peut en résulter a conduit le droit de la concurrence à courir au secours du système de brevet. En effet, lorsque, pour tailler une voie à travers ces maquis, on a redécouvert les communautés de brevets, lesquelles, autrefois, avaient été excommuniées tant à cause de leur tendance à faciliter la collusion entre concurrents qu’à cause du pouvoir de contrôle qu’elles permettent d’exercer sur les marchés en aval [136], le droit de la concurrence a aidé à les réintégrer dans le droit chemin. Plus particulièrement, la Commission, suivant une fois de plus l’exemple américain [137], a accepté les trois arguments principaux justifiant la constitution d’une communauté de brevets, tout en cherchant à limiter le pooling à ce qui est justifié et indispensable, ainsi que ses effets restrictifs à ce qui est inévitable [138]. Les raisons justifiant le pooling sont moins le fait qu’il permet de résoudre les situations de blocage entre brevets appartenant à des titulaires différents, ce qui peut se faire par un simple échange de licences [139] mais plutôt le fait que le pooling offre des économies en coûts de transaction que devraient encourir en l’absence du pool tant les titulaires cherchant des preneurs de licence que les entreprises cherchant le bon donneur de licence. De plus, le pooling tend à conduire à une limitation du total des redevances à payer, car une licence globale couvrant un grand nombre de brevets est normalement moins chère qu’une multitude de licences individuelles, dont chacune a son prix propre [140].

79 Étant donné que toute constitution de communauté de brevets présuppose un accord sur le prix, à savoir les redevances à demander aux tiers [141], et étant donné aussi que la possibilité d’un pooling peut non seulement affecter la concurrence entre les membres fondateurs, notamment lorsqu’ils cherchent à imposer d’un commun accord un standard technique au marché, mais encore entraver la recherche-développement de technologies de substitution qui ne seront pas admises par le pool, voire évincées du marché [142], la Commission a établi un certain nombre de critères de contrôle.

80 Le critère principal est la double distinction entre « compléments technologiques » et « substituts technologiques », d’une part, et technologies essentielles ou non essentielles, d’autre part [143]. La constitution de pools composés exclusivement de brevets relatifs à des compléments technologiques essentiels est considérée comme ne tombant jamais sous le coup de l’article 81 (1) du Traité [144], alors que la composition majoritaire d’un pool par des brevets couvrant des substituts technologiques le conduit, au moins en principe, au-delà de toute possibilité d’exemption en vertu de l’article 81 (3) du Traité [145].

81 Entre ces deux pôles extrêmes et peu réalistes, se situent les communautés de brevets que les autorités de concurrence ou les tribunaux doivent examiner sous trois aspects, à savoir : d’une part, celui de leurs effets pro- ou anticoncurrentiels, notamment quant au risque d’un jumelage entre technologies essentielles et technologies non essentielles (dit « groupement de licences »), lequel résulterait en une entrave à la concurrence par des technologies de substitution [146], d’autre part, celui du maintien d’une liberté effective de concession de licences individuelles par les titulaires de brevets [147], enfin celui de la dominance éventuelle du marché par le pool. Ce dernier aspect est important car les pools dominant le marché, ce qui est toujours assez probable, doivent être « ouverts »  [148] et concéder des licences à tout tiers à des conditions équitables et non discriminatoires [149]. Par ailleurs, dans la mesure où elles remplissent les conditions du Règlement 772/2004, et notamment lorsque les seuils de marché établis par l’article 3 du Règlement ne sont pas dépassés, les licences accordées à des tiers peuvent bénéficier sans réserves de l’exemption par catégorie prévue par ce Règlement [150].

82 Bien qu’il soit impossible d’entrer dans une discussion détaillée [151] de l’approche de la Commission relative aux problèmes posés par les communautés de brevets, trois remarques s’imposent. Premièrement, il est surprenant de voir que la Commission semble vouloir admettre la nécessité de la constitution d’une communauté de brevets indépendamment de la nature et de l’ordre de magnitude des coûts de transaction de l’exploitation des brevets en question, alors que l’article 81 (3) demanderait l’établissement d’un rapport de proportionnalité entre les économies des coûts de transaction et les risques d’entraves à la concurrence résultant du pooling. Lorsque le nombre de titulaires de brevet et/ou le nombre des preneurs éventuels de licence est restreint ou si la nature de la technologie en question le permet, le critère du caractère indispensable d’une pratique restrictive pour atteindre les effets bénéfiques d’un effort collectif d’exploitation pourrait bien reléguer le pooling au rang d’une approche subsidiaire par rapport à d’autres approches moins restrictives, tel l’établissement d’une institution de simple clearing des brevets pertinents ou d’un système d’échange d’informations sur leur disponibilité [152].

83 Deuxièmement, même si une technologie est couverte par un grand nombre de brevets appartenant à plusieurs titulaires et intéressant une multitude d’entreprises, il ne s’agit pas d’un fait de la nature. Il s’agit plutôt de la conséquence de plusieurs causes. Parmi elles, il y a peut-être, d’une part, la délivrance trop facile de brevets excessivement légers et/ou larges [153], et, d’autre part, la pratique des entreprises visant à former des grappes de brevets et à déposer des demandes de brevets en vue d’objectifs agressifs ou défensifs plus ou moins légitimes [154]. L’admissibilité des pools facilite de telles pratiques dans la mesure où le pooling résout les problèmes qu’elles créent.

84 On ne peut donc que s’étonner que la Commission, dans son rapport d’enquête sectorielle Pharma [155], semble se méfier de ces pratiques et stratégies, alors qu’en admettant aussi généreusement les pools dans ses Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, elle y invite les entreprises. En ce qui concerne l’industrie pharmaceutique, cette contradiction est d’autant plus étonnante que les possibilités offertes aux laboratoires de princeps de résoudre leurs problèmes par l’échange de licences et, si nécessaire, par la constitution d’une communauté de brevets, ne peut que renforcer leur position vis-à-vis des fabricants de génériques. Il va sans dire que la même contradiction peut affecter l’évaluation des communautés de brevets existant dans d’autres branches d’industrie.

85 Troisième remarque, la Commission elle-même ne semble pas avoir trop confiance en sa capacité effective de contrôler les grandes communautés de brevets par les seuls moyens du droit de la concurrence. En effet, pour minimiser la nécessité d’une intervention administrative, elle recommande à ces communautés de s’organiser en conformité avec les principes d’une autorégulation démocratique [156]. Prise au sérieux, cette recommandation tendrait non seulement à entraîner la Commission dans une sorte de contrôle qui est hors de sa compétence et de ses capacités, mais serait l’indicateur d’un besoin de régulation qui caractérise également d’autres formes quasiment monopolistiques d’exploitation collective de propriété, notamment l’exploitation des droits d’auteurs par les sociétés d’auteurs, auxquelles on impose souvent un régime de régulation spécifique [157] et dont les difficultés et les conflits avec le droit de la concurrence sont bien connus [158].

3.1.2. Le contrôle de la portée de l’exclusivité

3.1.2.1. L’impasse en droit positif des brevets

86 Les problèmes des maquis de brevets ne résultent pas seulement du grand nombre de brevets couvrant une technologie ou de la densité de cette couverture, mais également du degré de complémentarité des brevets en question et surtout de la mesure dans laquelle ils se recouvrent techniquement et, par conséquent, produisent des situations de blocage [159], dites de dépendance juridique. Une solution simple à ces derniers problèmes serait de changer le régime de protection, en passant du principe du droit exclusif absolu au principe d’un droit à rémunération. En fait, en exigeant que les pools dominant le marché soient « ouverts » et soient dans l’obligation de concéder des licences à tout demandeur à des conditions équitables et non discriminatoires [160], le droit de la concurrence impose une telle transition de régime. En principe, les parties l’ont en fait déjà accepté en établissant le pool, celui-ci servant justement à exploiter les brevets par une distribution de licences à toute entreprise intéressée [161]. À défaut d’un tel arrangement conclu sous le contrôle du droit de la concurrence, un régime de brevet non exclusif donnant droit à une rémunération exclusive pourrait être introduit soit par un assouplissement des conditions des licences obligatoires prévues en droit des brevets [162], soit par une modification plus radicale du système de protection. Étant donné que ni l’un ni l’autre ne constitue une option réaliste [163], et étant donné également que le système de licences obligatoires, tel qu’il existe en droit positif [164], ne parvient même pas à résoudre les problèmes pour la solution desquels il a été introduit, il peut apparaître qu’une intervention plus directe et plus large fondée sur le droit de la concurrence soit justifiée [165]. Il n’en est rien, car, en appliquant le droit de la concurrence, les autorités judiciaires n’ont jamais prétendu devoir s’arroger une telle compétence [166]. Elles y ont plutôt vu une stricte séparation entre, d’une part, la sauvegarde du bon fonctionnement du système de la propriété intellectuelle et, d’autre part, la protection contre un exercice des droits de propriété qui vise ou aboutit à une restriction collective ou abusive de la concurrence interdite par les articles 81 et 82 du Traité.

3.1.2.2. La ligne de démarcation entre limites intrinsèques et limites extrinsèques à la protection

87 Afin de pouvoir tracer clairement la ligne de démarcation, il faut encore une fois se rendre compte que le système de protection de la propriété intellectuelle constitue également une réglementation-cadre de l’innovation. À cet égard, le système est, d’une part, censé tailler les droits exclusifs qu’il établit en tant qu’instruments de concurrence à l’exacte mesure de l’incitation à l’innovation voulue [167]. D’autre part, il doit être conçu de façon à préserver une part suffisante de concurrence par des technologies de substitution et de diversification, qui seule peut garantir l’utilisation efficace et efficiente de cet instrument pour la concurrence [168]. Il est donc non seulement normal mais désirable que le droit de la propriété industrielle soit conçu, interprété et appliqué autant avec une logique de protection de la propriété [169] et de liberté en découlant, que dans une perspective de libre concurrence. À ce dernier égard, l’illustration la plus exemplaire se trouve dans l’attention portée au maintien d’un domaine public lors de l’interprétation et de l’application des critères de protection ou lors de la détermination de la portée de l’exclusivité [170], car ce domaine public, et donc le savoir non protégeable et le savoir non protégé, constitue la source principale de nouvelles connaissances protégeables. Dans la mesure (économiquement à peine moins importante) où un savoir protégeable se greffe sur du savoir déjà protégé, le système prévoit des règles qui, soit cherchent à rendre les divers titres d’exclusivité compatibles entre eux [171], soit établissent des mécanismes de solution de conflits, par exemple par l’introduction d’un dispositif pour l’octroi de licence obligatoire [172].

88 Le point crucial de ce système est que l’objectif visé par ces règles, par leur interprétation et par leur application est de veiller au bon fonctionnement du système de protection en tant que tel. C’est ainsi qu’en Allemagne, la Cour fédérale [173] a beaucoup insisté sur la distinction à opérer entre, d’une part, les critères et les objectifs de l’octroi de licence obligatoire pour utilisation insuffisante d’une invention brevetée ou pour refus non justifié de licence en cas de dépendance technique de brevet, tel que le prévoit la loi sur les brevets, et, d’autre part, la possibilité d’imposer, en tant que remède à un exercice abusif de l’autonomie du titulaire du brevet, à une entreprise dominant le marché une obligation de concéder des licences à des tiers lésés dans leur liberté de concurrence. Le résultat est que le dispositif pour l’octroi de licence obligatoire prévu par le droit des brevets ne saurait être tourné en instrument de contrôle de la concurrence, et que, inversement, ce dispositif ne saurait bloquer, en tant que lex specialis, la pleine application des règles du droit de la concurrence à des pratiques restrictives.

3.1.2.3. La jurisprudence Magill

89 La ligne de démarcation entre limites intrinsèques et limites extrinsèques à la protection, entre maintien de la fonctionnalité du système de propriété industrielle et sauvegarde de la libre concurrence, entre technologie protégée et technologie de substitution, devient plus fine lorsque c’est le droit de la propriété intellectuelle lui-même qui prévoit des règles ouvrant le système de protection par des droits exclusifs à une certaine concurrence entre technologies complémentaires dépendantes [174], voire à la concurrence intra-technologies [175]. Il faut pourtant bien prendre la pleine mesure de cette division. En effet, un tel dispositif de limites intrinsèques favorisant la concurrence intra-technologies doit s’avérer efficace justement sur le plan systématique qui est le sien, car il est censé éviter, par des règles s’appliquant à tous et pas seulement aux entreprises dominantes, que le droit exclusif ne dégénère en un droit monopolistique trop large pour être exploité individuellement par une entreprise seule.

90 Typiquement, il s’agit de sauvegarder la possibilité que se développent des marchés secondaires de diversification des produits protégés sur la base de produits qui dépendent, pour une partie, techniquement et économiquement des premiers. Au fond, le problème que la loi cherche à résoudre est similaire à celui qui est sous-jacent aux règles définissant l’invention brevetable à travers l’exclusion de certaines connaissances de nature trop large pour être « internalisées » utilement par un droit exclusif accordé à un titulaire seul, telles les découvertes, les théories scientifiques ou les méthodes mathématiques, etc. En effet, les dispositions de l’article 52 (2) lit a) et c) ne visent pas seulement le maintien du domaine public du savoir. Elles sont plutôt conçues pour éviter l’appropriation de connaissances dont les applications sont trop larges et imprévisibles pour être utilement confiées à une exploitation exclusive individuelle [176].

91 Une jurisprudence en matière de droit de la concurrence semble s’attaquer au même problème lorsqu’elle condamne une entreprise, titulaire d’un droit exclusif et dominant un marché, à concéder une licence à des tiers qui voudraient mettre un produit nouveau, dépendant du produit protégé, sur un marché dérivé que l’entreprise dominante ne dessert pas ou ne dessert plus [177], mais où il existe une demande certaine [178] ou probable [179]. Cette jurisprudence a été trop commentée pour être examinée ici de nouveau [180]. On rappellera seulement que le droit de la concurrence ne peut intervenir que lorsque ses critères particuliers d’application sont réunis, à savoir, primo, l’existence d’une position de dominance du marché et, secundo, le fait d’un abus caractérisé par la suppression d’une innovation suffisamment certaine, pour laquelle existe une demande actuelle ou réellement potentielle sur un marché voisin, que l’entreprise dominante s’abstient de satisfaire sans justification valable [181]. Le problème crucial de cette jurisprudence n’est point qu’elle permet aux tiers de percer le droit exclusif par une demande de licence que le titulaire ne saurait refuser sans abus. En effet, ces licences ne leur permettraient pas de faire une concurrence intra-technologique directe à l’entreprise dominante, mais seulement de desservir ou de développer des marchés secondaires par des produits dérivés complémentaires ou de substitution [182], donc d’entrer en une concurrence de variation ou de diversification technologique. Le problème est plutôt de bien saisir et définir la nature et l’importance du savoir auquel l’accès doit être donné en vue de maintenir une concurrence efficace par les mérites, sur tous les marchés concernés. En effet, le seul fait que, tant qu’il ne les divulgue pas, le détenteur d’informations relatives à sa personne, à son entreprise ou à ses affaires possède par définition un « monopole » de fait ou de droit sur ces informations ne peut pas signifier qu’il se trouve en position dominante sur le marché des informations. Une telle approche reviendrait à nier a priori toute possibilité de concurrence pour l’obtention de l’information en question [183]. Il faut donc que l’information ait en outre des qualités particulières, soit qu’elle soit caractérisée par l’importance sociopolitique, culturelle ou autre de son détenteur, soit qu’elle soit particulière par sa nature même, soit encore que son caractère particulier résulte d’une combinaison de ces critères ou encore d’autres caractéristiques. En tout cas, il convient de se garder d’assimiler la jurisprudence Magill à une doctrine des facilités essentielles en matière de propriété intellectuelle, car une telle approche serait à la fois trop étroite et trop rigide [184]. Les dangers liés à une insécurité d’investissement et à une sous-rémunération de l’entreprise innovante aussi bien que les risques de retardement d’innovations de diversification subséquentes demandent une approche se focalisant sur des restrictions spécifiques à la concurrence plutôt qu’une approche régulatrice telle qu’on la trouve à la base de la doctrine des facilités essentielles [185].

3.2. Les limites intrinsèques de la protection

3.2.1. Une logique concurrentielle fonctionnaliste

92 Toutefois, ce ne sont ni les problèmes que pose la jurisprudence Magill quant à la correcte détermination du « savoir essentiel », ni ceux consistant à bien définir les rapports entre les marchés pertinents [186] ou à vérifier les motifs pouvant justifier un refus de licence [187] qui font que le droit de la concurrence ne saurait être appelé au secours pour corriger certains déficits d’efficience économique du système de la propriété intellectuelle. Il est vrai qu’en fin de compte la jurisprudence Magill a transposé en droit d’auteur, ou au moins au domaine particulier du droit d’auteur sur des œuvres à caractère informatique, une obligation d’exploitation similaire à celle connue en droit des brevets [188]. Toutefois, elle l’a fait uniquement pour remédier à une pratique abusivement restrictive de la concurrence en des circonstances particulières au cas d’espèce. Il s’agit donc toujours d’une intervention ponctuelle faite en vertu des critères spécifiques du droit de la concurrence, pas d’un contrôle systématique de la pertinence et encore moins, de l’opportunité d’une protection par la propriété intellectuelle [189]. Tant en sa forme qu’en sa substance, le droit contre les restrictions à la concurrence est de nature défensive puisqu’il vise seulement à supprimer des restrictions à la concurrence plutôt qu’à diriger le libre jeu d’une concurrence effective [190]. Par conséquent, le juge du droit de la concurrence doit toujours respecter le système de protection de la propriété intellectuelle telle que l’a conçue le législateur. Ceci est vrai même si, sous l’aspect d’une bonne politique législative ou après une analyse économique propre, les critères de protection lui semblent permettre une protection trop facile, trop large, trop longue, et même si des exceptions de la protection lui semblent faire défaut ou être trop étroites. Certes, ce système de protection ne constitue qu’un sous-système de l’organisation du marché. Toutefois, en tant que réglementation-cadre mettant un instrument de concurrence à la disposition des entreprises, il suit sa propre logique directrice ou régulatrice [191], laquelle s’exprime justement dans les conditions, les critères et les limites de la protection. Plutôt que de « corriger » le système de protection par le droit de la concurrence, il s’agit de le faire fonctionner adéquatement en tant que composant constitutif de l’ordre concurrentiel de marché. Il faut donc interpréter et appliquer sa « logique de propriété » apparente dans une perspective de concurrence, autrement dit avec une « orientation fonctionnaliste de concurrence »  [192]. Une telle approche implique en permanence de rééquilibrer les conflits d’intérêts privés et publics qui sous-tendent les dilemmes verticaux et horizontaux, en conformité avec l’évolution technologique et socio-économique [193].

93 À cet égard, le droit de la propriété industrielle peut activer une longue tradition et un potentiel considérable. On pense au principe de l’épuisement du droit exclusif de distribution, dont les origines remontent au XIXe siècle [194] et qui a été « réanimé » pour les besoins de l’établissement d’un marché intérieur communautaire [195]. Actuellement, il demande à être adapté aux conditions économiques de l’exploitation sous forme immatérielle de l’objet protégé [196]. De même, l’exception de l’utilisation d’une invention brevetée à des fins expérimentales existe depuis toujours, toutefois elle demande une adaptation non seulement à l’évolution des technologies, des méthodes et de l’organisation de la recherche, mais aussi aux conditions changeantes de l’exploitation des brevets [197].

94 Dans le contexte de la brevetabilité des « instruments de recherche », la bonne détermination de cette exception à la protection ne représente qu’un élément de la nécessaire révision de l’ensemble du dispositif de protection des « inventions-découvertes »  [198]. Plus généralement, l’interdépendance existant entre les critères de protection et les critères d’exceptions à la protection implique que, plus la protection est étendue, plus les exceptions doivent permettre une réaction flexible à des risques de protection excessive, voire contre-productive. La preuve en est la récente manifestation académique contre une application rigide de l’article 9 (2) de la Convention de Berne et de l’article 13 (et articles 17, 26 (2), 30) de l’Accord ADPIC [199]. Souvent aussi, il s’agit de questions de détail. Par exemple, lorsqu’une entreprise fait de la publicité pour son offre de produits qui sont protégés en faveur d’une autre entreprise mais qu’elle le fait pour la vente du produit après l’expiration de la période de protection, faut-il vraiment, par une interprétation littérale de la loi, qualifier cette publicité de contrefaçon, comme l’a fait la Cour fédérale suprême en Allemagne ? Ne faudrait-il pas plutôt choisir une interprétation plus proche de l’objectif de la limitation de la durée de protection, laquelle est d’ouvrir une concurrence effective immédiatement après la fin de la période de protection [200] ? Finalement, dans des cas particuliers, le recours aux principes généraux du droit, tel le principe de la proportionnalité, peut aider à éviter des résultats non seulement inéquitables, mais économiquement non justifiables [201].

95 Parfois, le droit de la concurrence peut s’appliquer de façon subsidiaire ou même de façon additionnelle, mais il ne le fera pas nécessairement pour réduire la complexité des conflits [202]. Dans les cas mentionnés ci-dessus – et il y en a encore bien d’autres [203] –, la réponse à donner sur la base du seul droit de la propriété intellectuelle demanderait une étude détaillée du contexte systématique. Pour illustration, une problématique d’actualité sera brièvement présentée [204].

3.2.2. L’accès aux normes techniques dites « ouvertes » (open standardization)

96 La normalisation dite « ouverte »  [205] vise à permettre la normalisation de hautes technologies de système, tout particulièrement de leurs interfaces techniques, aux premiers stades de leur développement afin de faciliter l’acceptation de ces technologies par les entreprises sur le marché, notamment par les producteurs de composants, de produits périphériques et de produits d’application. Ce désir d’accélérer l’introduction de telles technologies de pointe demande de combiner et de « compatibiliser » les effets de promotion de l’innovation attendus du système de brevet avec les avantages économiques résultant de la diffusion rapide de la nouvelle technologie que promet l’accessibilité générale des normes définissant les critères de compatibilité desdites interfaces techniques. Les grandes institutions de normalisation à caractère public ou semi-public et leurs membres, qui typiquement couvrent une ou plusieurs branches entières d’une industrie, ont donc intérêt, d’une part, à être mis à même de normaliser des technologies couvertes par brevets ou étant en train de l’être, et, d’autre part, à maintenir l’accès à l’utilisation de la norme ouverte à tous. Ceci est d’autant plus vrai que les effets de réseau accroissant l’acceptation de la norme et donc de la technologie, ne peuvent pleinement jouer que si l’accès à la norme n’est pas encombré par des obstacles économiques et, pire, juridiques. Le droit exclusif conféré par un brevet à son titulaire constitue un tel obstacle. Il représente même un obstacle particulièrement grand, car il permet d’exploiter la situation de « hold up » dans laquelle se trouvera une entreprise qui, pour sa part, a investi dans la nouvelle technologie et qui, du fait également des effets de réseau produits par l’introduction de la technologie en question, ne pourra plus sortir du système sans encourir d’importants « coûts de changement de système » (switching costs)  [206].

97 Pour pallier ce risque, mais surtout pour inciter tant les titulaires des brevets que les tiers, futurs utilisateurs de la technologie prévue pour la normalisation, les organisations de normalisation telles que l’ETSI ou le CEN et le CENELEC en Europe, l’ANSI ou l’IEEE aux États-Unis ou encore les organisations internationales telles que l’ISO ou l’ITU [207], ont développé des « politiques de brevets et de licences » qui suivent largement les mêmes règles avec des degrés différents de précision et de réglementation du détail.

98 Les principes sont primo que la participation à un projet de normalisation aboutissant éventuellement à une norme couverte par un brevet dit « indispensable » ou « essentiel » pour la réalisation de la norme soit parfaitement volontaire (même pour les membres). De même, le titulaire d’un brevet, ayant participé ou non à la procédure de normalisation, n’est nullement obligé de mettre son brevet à la disposition de l’organisation de normalisation ou d’accorder une licence à des tiers qui désirent utiliser la norme.

99 Deuxièmement, par contre, les titulaires de brevets pertinents participant au processus de normalisation et qui sont membres de l’organisation de normalisation sont tenus de divulguer leurs droits de protection (ou leurs dépôts de brevets) aussitôt que possible et les tiers, participants ou non, y sont invités. Une telle divulgation de la pratique de prise de brevet est requise des entreprises afin de permettre à l’organisation de normalisation de décider aussitôt que possible de la suite à donner au processus de normalisation car celui-ci ne peut continuer que s’il y a garantie que la norme, une fois promulguée, sera généralement accessible, c’est-à-dire « ouverte ». Cette garantie d’ouverture ne signifie pas accès gratuit, mais accès sur concession de licence [208]. En effet, il est demandé au titulaire du brevet « essentiel » de déclarer formellement qu’il sera prêt à concéder une licence à tout demandeur intéressé d’appliquer la norme technique et ceci, à des conditions raisonnables et non discriminatoires (RAND) ou à des conditions équitables, raisonnables et non discriminatoires (FRAND)  [209]. En l’absence d’une telle déclaration, le projet de normalisation doit, au moins en principe, s’arrêter ou prendre une autre direction technologique.

100 Juridiquement parlant, cette approche d’une « normalisation ouverte » pose deux séries de problèmes. D’une part, il se peut qu’une norme couverte par un brevet essentiel ait été décidée et promulguée sans que le brevet n’ait été divulgué et, surtout, sans qu’une déclaration de disponibilité générale de licences aux termes RAND ou FRAND n’ait été faite. Dans ce cas, le seul moyen d’aider les entreprises qui ont appliqué la norme et qui ont donc contrefait l’invention incorporée dans la norme est de se fier au droit de la concurrence. Si le titulaire du brevet en question a participé au processus de normalisation collective, on peut penser à l’application de l’article 81 du Traité, l’organisation de normalisation (ou plutôt ses membres) étant tenus à concéder des licences FRAND s’ils veulent bénéficier de l’exemption prévue par l’article 81 (3) du Traité [210]. Si le titulaire du brevet essentiel détient une position de dominance sur le marché, ce qui sera typiquement le cas [211], on peut également appliquer l’article 82 du Traité car, suivant les circonstances, l’exploitation d’une situation de hold-up provoquée par le titulaire du brevet peut constituer un comportement abusif. De toute façon, c’est la seule approche possible dans le cas où le titulaire du brevet essentiel n’a pas participé au processus de normalisation. L’illustration est fournie par la fameuse affaire Rambus [212].

101 D’autre part, dans le cas où le titulaire du brevet a effectivement fait une déclaration de disponibilité de licences, il se peut qu’il se ravise et, soit refuse de façon absolue de concéder des licences, soit refuse de les concéder à des conditions réellement conformes aux critères FRAND/RAND. Encore une fois, le droit de la concurrence peut être appelé au secours, mais le secours n’arrivera que d’un pas lourd et lent. Il faudra apporter la preuve de la position dominante et de l’abus, et il faudra surtout compter avec le facteur temps et un effet de levier. Le titulaire du brevet essentiel portant plainte pour contrefaçon de son invention demandera au tribunal d’enjoindre à l’entreprise de cesser d’appliquer la norme technique. Face à cette menace, la défense « antitrust » va souvent s’avérer inefficace [213]. C’est pourquoi une doctrine américaine récente tend à refuser au titulaire d’un brevet essentiel toute possibilité de revenir en arrière sur sa déclaration de disponibilité de licences. L’un de ses courants raisonne à partir de la doctrine de l’ « estoppel », alléguant que le comportement du titulaire du brevet serait contradictoire et motivé uniquement dans le but de tirer un profit disproportionné d’un effort collectif de normalisation aux avantages économiques duquel il n’a contribué qu’en partie [214]. Un autre courant avance des considérations d’économie institutionnelle, le titulaire du brevet ayant, par sa déclaration de disponibilité de brevet, dû renoncer définitivement au droit de bloquer l’accès à la norme et ce, non seulement dans l’intérêt des tiers, mais surtout dans l’intérêt des autres participants au projet de normalisation et dans l’intérêt qu’a le public dans la fiabilité de la normalisation à accès ouvert [215].

102 Ces propositions, qui sont d’une portée différente, ne se prêtent pas aisément à une transposition en droit européen continental. À la différence du système de protection des brevets des États-Unis, dans les systèmes européens, le droit d’enjoindre au contrefacteur de continuer sa pratique illicite fait partie de la substance du titre d’exclusivité, puisqu’elle ne constitue que la contrepartie procédurale de l’autonomie d’exploiter le brevet individuellement, ici par refus de licence [216]. Mais il faut bien voir que la normalisation dite « ouverte » représente un nouveau modèle économique et juridique d’innovation combinant l’idée de rémunération concurrentielle par brevet avec l’accélération de la diffusion de l’invention par la normalisation. Ce modèle demande une solution systématique plutôt qu’une solution au cas par cas. Ceci est d’autant plus vrai que l’introduction de nouvelles technologies de système sur la base d’une rapide normalisation présuppose la volonté de toute l’industrie concernée d’investir dans cette technologie avec l’espoir de pouvoir participer aux bénéfices résultant des effets éventuels de réseau. De même, comme la normalisation innovatrice est généralement désirable du point de vue économique en ce qu’elle tend à promouvoir la concurrence intra-technologies [217], la fiabilité de l’ouverture d’accès à la norme prend le caractère d’un intérêt public [218]. Le titulaire du brevet en profitera largement non seulement parce que la diffusion de son invention par la norme lui assure une base élargie de rémunération, mais également parce que l’incorporation de son invention dans la norme ne peut se faire qu’avec le consentement des autres participants au projet de normalisation, surtout des titulaires d’autres brevets essentiels qui doivent accepter l’invention comme un élément de la norme nonobstant sa couverture par un droit exclusif et les effets de levier procurés à son titulaire. Celui-ci a donc tout intérêt de ne pas décevoir leur confiance par un comportement malhonnête, sinon les autres participants ne donneraient plus jamais un tel consentement.

103 Par conséquent, on ne saurait prendre la déclaration du titulaire de brevet selon laquelle il est prêt à concéder des licences à tout demandeur comme une simple déclaration de bonne volonté exprimée afin de faire avancer la procédure de normalisation. Il s’agit plutôt d’un acte d’exploitation du brevet par lequel l’invention protégée est mise dans le circuit de diffusion particulier, que constitue la norme technique à accès ouvert [219]. C’est un acte à double caractère – in rem par rapport à la norme et procédural en tant qu’adressé à l’organisation de normalisation – et à double contenu – déclaration de disponibilité absolue de licences et soumission de la concession effective d’une licence aux conditions FRAND/RAND [220]. En tant qu’acte d’exploitation opérant in rem, la déclaration de disponibilité absolue de licences « épuise » le droit exclusif quant au droit de poursuivre les contrefacteurs utilisateurs de la norme en cessation, mais n’affecte pas le droit à une rémunération. Le titulaire du brevet n’a en rien à se plaindre. Il a le libre choix de l’organisation de normalisation, de la forme de la normalisation et de sa participation à un projet de normalisation, et il n’est nullement obligé de faire une déclaration de disponibilité absolue de licences. Mais s’il le fait, il doit en supporter les conséquences. En effet, il a joui pleinement de son autonomie d’exploitation et garde son droit à une rémunération concurrentielle [221].

4. CONCLUSION

104 La proposition qui vient d’être faite n’est pas vraiment de nature radicale. Elle ne couvre pas tous les conflits entre droits exclusifs et normalisation technique, notamment ceux résultant d’une absence de déclaration de disponibilité générale de licences et ceux qui peuvent surgir pour l’accès aux normes techniques de fait ou l’accès aux normes introduites par des « clubs » restreints de normalisation. Pourtant, elle peut présenter un intérêt d’ordre général dans la mesure où elle montre que, au lieu de mettre le système de protection de la propriété intellectuelle en opposition ou en balance avec le droit de la concurrence sous prétexte qu’il s’agit de deux corps de droit indépendants et autonomes – éventuellement complémentaires –, il importe d’accepter que l’octroi de droits exclusifs de propriété ne peut être compris et reconnu qu’en tant que partie intégrante de l’ensemble de l’ordre concurrentiel d’un marché. C’est à la lumière de cet ordre concurrentiel et de ses sous-systèmes, telles la normalisation technique, la recherche publique [222], la protection de la santé ou de l’environnement, qu’il faut interpréter et mettre en œuvre la finalité de la protection. Une telle application à la fois fonctionnelle et contextuelle des droits de propriété et de leurs limites nécessaires n’a rien de nouveau [223]. Toutefois, elle demande une approche conceptuelle toujours renouvelée dans la mesure où l’ordre concurrentiel change et doit changer suivant les changements mêmes du marché dont il est censé assurer le bon fonctionnement et la « bonne gouvernance durable ». Si la protection de la propriété intellectuelle s’y refuse, son acceptation en sera amoindrie. C’est précisément ce qu’on peut déjà observer trop souvent.

Notes

  • [1]
    Professor Dr. iur., M. C. J. (N. Y. Univ.), professeur émérite, Universität der Bundeswehr München ; ancien professeur Institut universitaire européen, Florence ; professeur visiteur, Collège d’Europe, Bruges.
  • [2]
    Cornish, The Expansion of Intellectual Property Rights, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), Geistiges Eigentum im Dienst der Innovation, Baden-Baden 2001, 9 et suiv. ; quant au plan communautaire voir Seville, EU Intellectual Property Law and Policy, Cheltenham 2009, passim ; Ullrich, Die gemeinschaftsrechtliche Entwicklung des Rechts des geistigen Eigentums, dans Behrens (Hrsg.), Stand und Perspektiven des Schutzes Geistigen Eigentums in Europa, Baden-Baden 2004, 9 et suiv.
  • [3]
    Voir pour les brevets Office européen des brevets (OEB), Rapport annuel 2008, Munich 2009, 66 et suiv. ; World Intellectual Property Organisation (WIPO/OMPI), World Patent Report 2008, Genève 2008 ; pour les marques et les dessins et modèles, Office d’harmonisation pour le Marché intérieur (OHMI), Rapport annuel 2008, Alicante 2009, 4 et suiv.
  • [4]
    D’une part, la Commission européenne multiplie et intensifie ses instruments de poursuite à l’égard des ententes les plus nocives et les plus faciles à évaluer (voir Commission, Rapport sur la politique de concurrence 2008, Bruxelles, 23. VII.2009, COM (2009) 374 fin. , n° 5 et suiv., n° 18 (procédure de transaction) ; Vialfont, Le droit de la concurrence et les procédures négociées, RIDE 2007, 157 et suiv.). D’autre part, la Commission guide et tolère la « coopération entre concurrents » (voir Commission, Lignes directrices sur l’applicabilité de l’article 81 du Traité CE aux accords de coopération horizontale, J. O. C. E. 2001 C 3, 2). Il est vrai que pour certains secteurs, notamment les secteurs régulés ou susceptibles d’être régulés, le tableau est plus nuancé.
  • [5]
    Dont les affaires relatives à la propriété intellectuelle figurent parmi les plus importantes. Voir infra sub 2.2.2. ; 3.1.2.3.
  • [6]
    Voir Considérant 47 et Art. 16 (3) Directive 96/9/CE du Parlement et du Conseil du 11 mars 1996 relative à la protection des banques de données, J. O. C. E. 1996 L 77, 20.
  • [7]
    Voir Commission du 16 juill. 2008, COMP/C-2/38.698-CISAC, J. O. U. E. 2008 L 323, 12.
  • [8]
    Commission, Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 du Traité CE aux accords de transfert de technologie, J. O. U. E. 2004 C 101, 2, sub n° 8 et suiv., et infra sub 2.1.
  • [9]
    À savoir dans la mesure où l’accord est de nature « vertical » et son contenu économiquement contrôlé par la concurrence « horizontale » entre technologies (intra-brand competition), voir infra sub 2.1.
  • [10]
    Voir infra sub 3.1.2. pour les affaires Magill TV-Guide et Microsoft.
  • [11]
    Commission, Communication du 8 juill. 2009, synthèse du rapport d’enquête sur le secteur pharmaceutique, sub 1. (p. 3 et suiv.), 3.3. (p. 18) ; id., Pharmaceutical Sector Inquiry, Final Report, 8 July 2009, sub n° 3 et suiv., 14 (http:// ec. europa. eu/ competition/ sectors/ pharmaceuticals/ inquiry/ index.html).
  • [12]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., n° 7, 10, 32 ; id., Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 (3) du Traité, J. O. U. E. 2004 C 101, 97, n° 5, 11, 13 et suiv. ; id., Communication relative aux « Orientations sur les priorités retenues par la Commission pour l’application de l’article 82 du Traité CE aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes », J. O. U. E. 2009 C 45, 7, n° 5 et suiv., 28 et suiv. ; Drexl, Competition Law – Between the Lisbon Treaty and the Economic Approach, dans v. Bogdandy, Bast (eds.), Principles of European Constitutional Law, 2e éd. Oxford 2009 (à paraître), sub III.
  • [13]
    Voir référence supra n. 11 et Commission, Une politique de concurrence proactive pour une Europe compétitive, Bruxelles, 20. IV.2004, COM (2004) 293 final ; Forrester, Komninos, Agenda de Lisbonne et droit de la concurrence, Concurrences 2006 (3) 1 ; Riem, Concurrence effective ou concurrence efficace ? L’ordre concurrentiel en trompe-l’œil, RIDE 2008, 67, 82 et suiv.
  • [14]
    Voir infra sub 3.1.2., 3.2.1.
  • [15]
    L’analyse qui suit ne porte essentiellement que sur la propriété industrielle technologique censée servir l’innovation économique (brevets, dessins et modèles), y compris le droit d’auteur « technologique » (programmes d’ordinateurs, banques de données). Le droit d’auteur en général et le droit des marques ne seront abordés que de manière sélective.
  • [16]
    Voir pour une présentation et une critique Buxbaum, Restrictions Inherent in the Patent Monopoly : A Comparative Critique, 11 U. Pa. L. Rev. 633 (1965) = WuW 1966, 193 (version allemande).
  • [17]
    Voir le § 20 de la loi (allemande) contre les restrictions à la concurrence du 27 juillet 1957 (BGBl I, 1081), entrée en vigueur le 1er janvier 1958 ; ce § 20 est devenu le § 17 en 1998 et a été abrogé par la loi du 1er juillet 2005 (BGBl I, 1954, 2115), laquelle adopta plus ou moins in toto les règles de concurrence du Traité CE ainsi que leur système et Règlements d’application.
  • [18]
    Voir U. S. Department of Justice/Federal Trade Commission (DoJ/FTC), Antitrust Guidelines for Licensing of Intellectual Property, Washington D. C. April 6, 1995, 4 Trade Reg. Rep. (CCH) 13.132 ; Baxter, Legal Restrictions on Exploitation of the Patent Monopoly : An Economic Analysis, 76 Yale L. J. 267 (1966) et suiv.
  • [19]
    Commission, Communication du 24 décembre 1962 relative à l’application de l’article 85 du Traité aux contrats de licence, J. O. C. E. 1962, n° 139, 2922. Cette communication, dite « de Noël », fut abrogée lors de la promulgation du premier Règlement (2349/84) exemptant certaines catégories de licence de brevet de l’application de l’article 85 en 1984.
  • [20]
    On retrouvera, certes, des traces de cette doctrine dans certaines décisions de la Commission, et même dans les arrêts de la Cour, voir CJCE du 25 fév. 1986, aff. 193/83, Windsurfing International/ Commission, Rec. 1986, 611.
  • [21]
    Pour l’importance persistante de la concurrence intra-marques, établie par CJCE du 13 juill. 1966, aff. 56 et 58/64, Grundig, Consten/Commission, Rec. 1966, 321, 386 et suiv., 390 et suiv. ; id. du 13 juill. 1966, aff. 32/65, Italie/Conseil, Rec. 1966, 457, 484 et suiv. ; voir récemment CJCE du 16 sept. 2008, aff. C-468/06 à C-478/06, Lelos Kai Sia et al./GlaxoSmithKline, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 52 et suiv.
  • [22]
    C’était toute l’importance de CJCE du 8 juin 1982, aff. 258/78, Nungesser/Commission, Rec. 1982, 2015 (Semences de maïs).
  • [23]
    Voir pour les intérêts et motifs des parties sous-jacents à un accord de licence Ullrich, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), EG-Wettbewerbsrecht, 1re éd. Munich 1997, t.1, p. 1264 et suiv.
  • [24]
    Mestmäcker, Europäisches Wettbewerbsrecht, Munich 1974, 473 et suiv. concluait déjà que l’examen pertinent n’était pas de comparer la situation telle qu’elle se produirait sous le brevet avec ou sans un accord de licence, mais de se demander quelle concurrence pourrait se produire en l’absence de la restriction contractuelle en question.
  • [25]
    DoJ/FTC, Guidelines IP Licensing, loc. cit., sub 2.0, 2.1 ; pour une analyse critique Peritz, Competition Policy and its Implications for Intellectual Property Rights in the United States, dans Anderman (ed.), The Interface Between Intellectual Property Rights and Competition Policy, Cambridge (CUP) 2007, 125, 203 et suiv.
  • [26]
    Voir TPI du 23 oct. 2003, aff. T-65/98, Van den Bergh Foods/Commission, Rec. 2003 II 4653, confirmé par CJCE du 28 sept. 2006, aff. C-552/03 P, J. O. U. E. 2006 C 294, 19.
  • [27]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub. n° 7 ; et de façon expresse dans Commission, Projet de Lignes directrices relatives à l’application de l’article 81 du Traité aux accords de transfert de technologie, du 25 sept. 2003, sub n° 9, 1re phrase, puis omise au n° 9 des Lignes directrices telles qu’entrées en vigueur. Dans Commission, Rapport d’évaluation sur le Règlement d’exemption par catégorie (CE) n° 240/96 relatif aux accords de transfert de technologie, Bruxelles 2001, sub n° 30, on pouvait encore lire que la propriété intellectuelle est distincte d’autres formes de propriété en ce qu’elle serait « moins absolue », à savoir limitée dans le temps ou quant à son étendue, ou en ce qu’elle ne protège pas contre les « développements parallèles » (droit d’auteur, savoir-faire). Cette confusion entre objet protégé et nature du droit protégeant l’objet réapparaît presque littéralement chez Lowe, Peeperkorn, Intellectual Property : How Special is its Competition Case ?, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), The Interaction Between Competition Law and Intellectual Property Law, European Competition Law Annual 2005, Oxford (Hart) 2007, 91, 92, où les auteurs s’étonnent également de ce que le savoir-faire (qu’ils traitent comme propriété) perd sa valeur lorsqu’il perd son caractère secret.
  • [28]
    Pour la notion de transfert de technologie voir Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 46 et suiv. En fait, l’application du Règlement 772/2004 (voir infra n. 30) ou des lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., ne dépend pas de ce qu’il y ait effectivement un transfert de technologie, mais seulement de ce qu’il y ait une licence (licence négative, voir Lignes directrices sub n° 204 et suiv. ; licences croisées, ibid., sub n° 32, 78), car les entreprises détiennent le plus souvent la technologie en question, mais ne sont pas autorisées à l’utiliser. Pour d’autres exemples voir Ullrich, The Interaction Between Competition Law and Intellectual Property Law – An Overview, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. xxviii, liii et suiv.
  • [29]
    Voir pour l’histoire depuis 1979 des Règlements d’exemption par groupe d’accords de licence de brevet (1984) ou de savoir-faire (1989), puis des accords de transfert de technologie (1996) Ullrich, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), 1re éd., loc. cit., p. 1268 et suiv. ; Waelbroeck, Frignani, Concurrence, 2e éd., dans Commentaire J. Mégret, Le droit de la CE, t. 4, Bruxelles (Éditions de l’Université de Bruxelles) 1997, 752 et suiv.
  • [30]
    Règlement (CE) n° 772/2004 de la Commission du 27 avril 2004 concernant l’application de l’article 81, paragraphe 3 du Traité à des catégories d’accords de transfert de technologie, J. O. U. E. 2004 L 123, 11 ; pour une présentation « d’autorité » voir Kjoelbye, Peeperkorn, The New Technology Transfer Block Exemption Regulation and Guidelines, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 161 et suiv.
  • [31]
    L’article 3 (2) du Règlement 772/2004 prévoit l’exemption de l’article 81 (1) du Traité pour tout accord de transfert de technologie à condition que la part détenue par chacune des parties sur les marchés de technologies et les marchés de produits en cause ne soit pas supérieure à 30 %. Une telle part de marché est généralement reconnue comme seuil à partir duquel un examen d’une dominance de marché peut devenir nécessaire.
  • [32]
    Voir la liste limitée de l’article 4 (2) du Règlement 772/2004, à savoir lit a) : fixation de prix minima ; lit b) : les territoires exclusifs protégés contre des ventes passives (avec la série (i)- (iv) de sous-exceptions ! ) ; lit c) et voir Art. 5 (1) (2), clauses non permises, mais « séparables », c’est-à-dire ne bloquant pas l’exemption de l’accord en tant que tel.
  • [33]
    L’article 3 (1) du Règlement 772/2004 exclut l’exemption par catégorie lorsque les parts de marché cumulées des parties à l’accord excèdent 20 % des marchés pertinents de technologies et de produits en cause ; la liste de l’article 4 (1) du Règlement 772/2004 relative aux clauses excluant l’exemption est plus longue et plus stricte, surtout en cas de licences réciproques, mais les sous-exceptions définissant l’étendue de l’exclusivité des licences restent considérables, Art. 4 (1) (i)- (vii).
  • [34]
    Voir Art. 1 (1) lit j) (i) Règlement 772/2004 et Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 26 et suiv. ; plus particulièrement n° 31 et suiv. (en ce qui concerne l’exemption par groupe, la concurrence potentielle sur le marché des technologies n’est pas prise en compte ; les situations de blocage transforment les rapports horizontaux en rapports verticaux) ; Ullrich, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. xlvii et suiv., et infra n. 45 avec texte accompagnant la note.
  • [35]
    Voir Anderman, EC Competition Policy and IPRs, dans Anderman (ed.), loc. cit., The Interface, p. 37, 81 et suiv. ; id., The New EC Competition Law Framework for Technology Transfer and IP Licensing, dans Drexl (ed.), Research Handbook on Intellectual Property and Competition Law, Cheltenham (Elgar) 2008, 107 et suiv. ; Drexl, Die neue Gruppenfreistellungsverordnung über Technologietransfer-Vereinbarungen im Spannungsfeld von Ökonomisierung und Rechtssicherheit, GRUR Int 2004, 716 ; Marquis, Patent, Knowhow, and Software Copyright Licensing : The EU Competition Regime, 52 Antitrust Bull. 239 (2007) ; Orstavik, Technology Transfer Agreements : Grant Bocks and No-Challenge Clauses in the New EC Technology Transfer Regulation, 36 IIC 83 (2005) ; Ullrich, Le droit de la concurrence, propriété intellectuelle, et accès à l’information technologique, dans Buydens, Dusollier (éd.), L’intérêt général et l’accès à l’information en propriété intellectuelle, Bruxelles 2008, 249, 266 et suiv.
  • [36]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 7 ; DoJ/FTC, Guidelines Licensing Intellectual Property, loc. cit., sub 1.0.
  • [37]
    Les considérations suivantes ont été exposées avec plus de détails et avec des références à la littérature économique (à commencer par Arrow, Economic Welfare and the Allocation of Resources for Inventions, dans NBER (ed.), The Rate and Direction of Inventive Activity, Princetone 1962, 609, 614 et suiv.) dans Ullrich, Lizenzkartellrecht auf dem Weg zur Mitte, GRUR Int 1996, 554, 564 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (eds.), Wettbewerbsrecht, 4e éd. Munich 2007, EG-Teil 2, p. 138 et suiv., 144 et suiv. ; voir également Mestmäcker, Gewerbliche Schutzrechte und Urheberrechte in der Eigentums – und Wirtschaftsordnung, Festschrift Immenga, Munich (Beck) 2004, 261, 263 et passim, et pour une analyse économique approfondie récente Scotchmer, Innovation and Incentives, Cambridge, Mass. (MIT Press) 2004, 34 et passim. Il convient de noter que l’argumentaire, qui suit, n’est pas affecté par les diverses idées qu’on peut se faire de la notion de propriété en la matière, voir pour une analyse récente Mosoff, Exclusion and Exclusive Use in Patent Law, 22 Harv. J. L. Tech’y 321 (2009).
  • [38]
    En ce sens, la propriété privée est non seulement le fondement, mais aussi au service du système du marché, de sorte qu’on ne saurait l’opposer au droit de la concurrence, comme le veut la thèse de la complémentarité. Toute propriété s’exerce dans le cadre du droit de la concurrence (voir supra n. 26). Le fait que, à juste titre, une valeur constitutionnelle fondamentale est attribuée à la propriété privée ne saurait dissimuler sa fonction subserviante à la liberté économique, voir pour une discussion détaillée Wielsch, Zugangsregeln, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008, 31 et suiv., 72 et suiv.
  • [39]
    Le phénomène d’obsolescence du savoir n’est généralement pas pris en considération, peut-être parce que la durée de la protection, pour ne pas manquer son but qui est de limiter la protection en vue d’une diffusion optimale du savoir, devrait normalement s’achever avant l’obsolescence du savoir, voir infra n. 126, 130.
  • [40]
    Cet argument classique, qui, aux États-Unis, est même de descendance constitutionnelle (Art. 1, Sect. 8 U. S. Const.), a toujours été le sujet de critiques, voir récemment Drexl, Geistiges Eigentum als integraler Bestandteil der europäischen Wettbewerbsordnung, dans FIW-Schriftenreihe n° 215, Wettbewerb in einem größeren Europa, Cologne 2007, 79, 89 et suiv. ; Engel, Geistiges Eigentum als Anreiz zur Innovation – Die Grenzen des Arguments, dans Eifert, Hoffmann-Riem (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Innovation, Berlin (Duncker, Humboldt) 2008, 43 et suiv. ; id., Innovationsanreize aus Wettbewerb und Kollusion, dans Ohly, Klippel (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Gemeinfreiheit, Tübingen (Mohr, Siebeck) 2007, 19 et suiv.
  • [41]
    Voir pour un tel malentendu LG Düsseldorf du 30 nov. 2006 – MPEG 2 – Standard, WuW DE-R 2120, 2128 ; voir par contre CJCE du 14 juill. 1981, aff. 187/80, Merck/Stephar, Rec. 1981, 2063 sub n° 10 ; du 5 déc. 1996, aff. jointes C-268/95, Merck/Primecrown, Rec. 1996 II 6285 sub n° 31. Voir également infra n. 123.
  • [42]
    Voir références supra n. 40 et pour le constat empirique, que l’existence du droit des brevets n’a que très peu d’influence sur les décisions des entreprises d’investir dans l’innovation Lowe, Peeperkorn, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 92 et suiv. avec références. Il est à noter que, malgré l’extension, l’expansion et le renforcement de la protection de la propriété intellectuelle, ce constat empirique est resté inchangé depuis au moins les années 1970, voir Grefermann, Oppenländer et al., Patentwesen und technischer Fortschritt, Teil 1 : Die Wirkung des Patentwesens im Innovationsprozeß, Göttingen (Otto Schwartz) 1974, 45 et suiv. L’intérêt de la propriété intellectuelle consiste en ce qu’elle protège l’innovation une fois qu’elle est faite, et qu’elle permet de prolonger son exploitation exclusive, c’est-à-dire que la protection opère ex post et de façon marginale, mais à cette limite critique où les barrières de fait à une concurrence d’imitation effective ne protègent plus suffisamment l’innovation. Puisque les entreprises anticipent cette protection, elles obtiennent une assurance accrue pour encourir le risque d’innovation.
  • [43]
    En pure théorie de modèle, on peut même affirmer qu’il n’y aurait pas de concurrence de substitution s’il n’y avait pas l’interdiction de l’imitation (voir également Mestmäcker, Festschrift Immenga, loc. cit., p. 264 et suiv.). Cette interdiction se justifie donc moins en tant qu’exigence de justice qu’en tant que condition préalable au progrès technologique par l’innovation. Encore faut-il entourer cette proposition d’une réserve, car, également en pure théorie, l’imitation ne paie que pour autant que l’innovation soit offerte (et acceptée par la demande) à un prix supra-marginal. L’imitation n’est donc rémunératrice qu’à court terme (tout comme, aux conditions d’une concurrence parfaite, les marchés de produits homogènes sont sans intérêt).
  • [44]
    Voir infra sub 2.2.3.2.
  • [45]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, supra n. 8.
  • [46]
    Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 32. À cet égard, il importe de noter que les situations de blocage ne sont pas définies par rapport à des brevets, dont les revendications se recouvriraient en partie (les situations de dépendance technique, telles qu’en cas de brevets d’amélioration, ne sont mentionnées qu’à titre d’exemple), mais par rapport à des « technologies ». Le nombre de situations de blocage et donc de transformations de rapports concurrentiels horizontaux en rapports verticaux et les problèmes des limites des technologies en question seront d’autant plus grands.
  • [47]
    Sauf si les parties sont concurrentes sur le marché des produits, ce qui n’est pas nécessairement le cas (utilisation d’une même technologie à des fins différentes ou par des entreprises agissant sur différents marchés géographiques ou de produits, ou agissant sur différents échelons des marchés).
  • [48]
    Cette éventualité est à la base du dilemme qu’aucun propriétaire de droits exclusifs ne donnerait des licences s’il devait craindre que son licencié d’aujourd’hui soit son concurrent demain. On doit donc lui concéder la possibilité de tenir son licencié à une certaine distance concurrentielle, mais à quelle distance ? La règle énoncée par l’article 81 (3) du Traité exige qu’on n’admette d’autres restrictions de la concurrence que celles qui sont indispensables pour encourager le propriétaire du droit exclusif à donner des licences même à des tiers dont il peut raisonnablement présumer qu’en l’absence de la restriction en question, ils deviendraient ses concurrents.
  • [49]
    Voir supra n. 13.
  • [50]
    Commission, Final Report Sector Inquiry Pharma, loc. cit., sub C 3.1, 3.1.2. En effet, il y a une contradiction évidente entre le constat que les entreprises cherchent délibérément à créer des situations de blocage par brevets afin d’ « arrêter » leurs concurrents et la présomption « légale » qu’elles ne sont pas concurrentes.
  • [51]
    Voir infra sub 2.2.3, 3.1.2.
  • [52]
    Voir pour une perspective internationale Ullrich, Expansionist Intellectual Property Protection and Reductionist Competition Rules : A TRIPs Perspective, 7 (2) J. I. E. L. 401, 420 et suiv. (2004) = Maskus, Reichman (eds.), International Public Goods and Transfer of Technology Under a Globalized Intellectual Property Regime, Cambridge (CUP) 2005, 726, 746 et suiv. La problématique du transfert de technologie vers des pays en voie de développement et celle de l’existence ou de l’établissement d’un droit international de la concurrence ne peuvent pas être abordées ici.
  • [53]
    Jurisprudence constante depuis CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 112 ; du 18 févr. 1971, aff. 40/70, Sirena/Novimpex, Rec. 1971, 69, n° 16 ; du 8 avril 1971, aff. 78/70, Deutsche Grammophon/Metro-SB-Großmärkte, Rec. 1971, 487, sub n° 14 et suiv.
  • [54]
    Pour plus de détails Commission, Lignes directrices relatives aux accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 19 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., EG-Teil 2, p. 170 et suiv.
  • [55]
    Voir références supra n. 53 ; Drexl, The Relationship Between the Legal Exclusivity and Economic Market Power, dans Govaere, Ullrich (eds.), Intellectual Property, Market Power, and the Public Interest, Bruxelles (Lang), 2008, 13 et suiv.
  • [56]
    Pour plus de détails voir Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., EG-Teil 2, p. 173 et suiv. ; pour les rapports entre épuisement communautaire du droit exclusif et ségrégation territoriale abusive des marchés voir CJCE du 16 sept. 2008, aff. C-468/06 à C-478/06, Sot Lelos Kai Sia/GlaxoSmithKline, Rec. 2008 I (à paraître) ; du 6 oct. 2009, aff. C-501/06 P, C-513/06 P, C-515/06 P et C-519/06 P, GlaxoSmithKline Service/Commission, Rec. 2009 I (à paraître) ; pour un cas de discrimination internationale des prix en l’absence d’épuisement international TPI du 16 déc. 1999, aff. T-198/98, Micro Leader Business/Commission, Rec. 1999 II 3989 ; Ullrich, European Competition Law, Community-Wide Exhaustion and Compulsory Licences – Disintegrating the Internal Market in the Public Interest, dans Godt (ed.), Differential Pricing of Pharmaceuticals Inside Europe – Exploring Compulsory Licenses and Exhaustion, 2009 (à paraître).
  • [57]
    Jurisprudence constante depuis CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 113 ; du 23 mai 1978, aff. 102/77, Hoffmann-La Roche/Centrafarm, Rec. 1978, 1139 sub n° 16 ; du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211, sub n° 8 ; du 6 avril 1995, aff. C-241/91 P et C-242/91 P, RTE et ITP/Commission, Rec. 1995 I 743 sub n° 49.
  • [58]
    À cet égard, TPI du 10 juill. 1970, aff. T-51/89, Tetra Pak Rausing/Commission, Rec. 1990 II 309 sub n° 37, a rappelé que le principe suivant lequel une entreprise dominante doit veiller au maintien de la concurrence résiduelle s’applique également lorsqu’une telle entreprise essaye de renforcer sa position par le rachat d’une licence exclusive couvrant la seule technologie de substitution. Ce rappel est d’autant plus remarquable que la licence en question bénéficiait d’une exemption de l’article 81 (1) en vertu de l’article 81 (3) du Traité. Voir également CJCE du 11 déc. 2008, aff. C-52/07, Kanal 5/STIM, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 26.
  • [59]
    Voir CJCE du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211 (refus absolu) ; Commission du 22 déc. 1987, aff. IV/30.787 et 31.488, Eurofix-Bau co/Hilti, J. O. C. E. 1988 L 65, 19, confirmée par TPI du 12 déc. 1991, aff. T-30/89, Hilti/Commission, Rec. 1991 II 1439 (refus qualifié par l’exigence d’achat lié).
  • [60]
    Voir CJCE du 29 févr. 1968, aff. 24/67, Parke, Davis/Probel, Rec. 1968, 85, 113 ; du 5 oct.1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988 I 6211 sub n° 9 ; du 11 déc.2008, aff. C-52/07, Kanal5/STIM, Rec. 2008 I (à paraître), sub n° 27 et suiv. ; à distinguer des pratiques de prix discriminatoires, voir CJCE du 13 juill. 1989, aff. 395/87, Ministère public/Tournier, Rec. 1989, 2521 sub n° 34 et suiv. ; pour une discussion générale voir Anderman, EC Competition Policy and IPRs, dans Anderman (ed.), loc.cit., p. 37, 49 et suiv.
  • [61]
    Pour l’affaire Le Point Vert /Der Grüne Punkt voir infra sub 2.2.2.3.
  • [62]
    Voir Commission, Communication en vertu de l’art. 27 para. 4 Règlement 1/2003 du Conseil dans l’affaire COMP/C-3/38636-Rambus, J. O. U. E. 2009 C 133, 16 insistant inutilement sur les aspects frauduleux du comportement de Rambus, très controversés aux États-Unis (voir pour plus de détails Ullrich, Patente und technische Normen : Konflikt und Komplementarität in patent- und wettbewerbsrechtlicher Sicht, dans Leistner (Hrsg.), Europäische Perspektiven des geistigen Eigentums (à paraître), sub II A1.
  • [63]
    Voir pour la problématique en général Liotard, Persistance et intensité des conflits entre normalisation et propriété intellectuelle : les enseignements de la 3e génération de téléphone mobile, RIDE 2008, 47 ; Levêque, Menière, Licensing Committments in Standard Setting Organisations, CERNA Working Paper 11/2007 ; Farrel, Hayes, Shapiro, Sullivan, Standard Setting, Patents, and Hold-up, 74 Antitrust L. J. 603 (2007) ; Merges, An Estoppel Doctrine for Patented Standards, 97 Cal. L. Rev. 1 (2009) ; Ullrich, dans Leistner (Hsrg.), loc. cit., sub II et passim ; id., Patente, Wettbewerb und technische Normen : Rechts- und ordnungspolitische Fragestellungen, GRUR 2007, 817 ; Ghidini, Intellectual Property and Competition Law, Cheltenham (Elgar) 2006, 103 et suiv.
  • [64]
    Voir Commission du 22 déc. 1987, supra n. 59 ; TPI du 17 sept. 2007, aff. T-201-04, Microsoft/ Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 814 et suiv. ; Lange, Europäisches Kartellrecht und geistiges Eigentum – der Fall Microsoft, dans Lange, Klippel, Ohly (Hrsg.), Geistiges Eigentum und Wettbewerb, Tübingen (Mohr Siebeck) 2009, 131, 142 et suiv.
  • [65]
    Pour une discussion générale voir Grimes, Making Antitrust and Intellectual Property Policy in the United States : Requirements Tie-Ins and Loyalty Discounts, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 258 et suiv. ; Anderman, dans Anderman (ed.), loc.cit., p. 72 et suiv. ; Jones, Patent Power and Market Power : Rethinking the Relationship Between Intellectual Property Rights and Market Analysis, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 237 et suiv.
  • [66]
    Commission, Communication relative aux Orientations sur les priorités retenues par la Commission pour l’application de l’article 82 du Traité CE aux pratiques d’éviction abusives des entreprises dominantes, J. O. U. E. 2009 C 45, 7, sub n° 47 et suiv.
  • [67]
    Voir pour une excellente discussion Drexl, Abuse of Dominance in Licensing and Refusal to Licence : A « More Economic Approach » to Competition by Imitation and to Competition by Substitution, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 647.
  • [68]
    CJCE du 16 juill. 2009, aff. C-385/07 P, Der Grüne Punkt – DSD/Commission, Rec. 2009 II (à paraître).
  • [69]
    Commission du 20 avril 2001, aff. COMP D3/34493-DSD, J. O. C. E. 2001 L 166, 1 ; TPI du 24 mai 2007, aff. T-151/01, Der Grüne Punkt – DSD/Commission, Rec. 2007 II 1607 ; voir pour une discussion critique Traple, Trademarks as a Tool for Market Control, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 219.
  • [70]
    À cet égard, il est à noter que l’article 82 lit a) du Traité CE couvre non seulement l’abus par la demande de prix excessifs en tant que tel, mais condamne également des demandes de prix excessifs, dont le but ou le résultat est d’évincer les concurrents, voir supra n. 68, 69 et Anderman, dans Anderman (ed.) loc. cit., p. 53 et suiv.
  • [71]
    La marque devait être apposée sur les emballages avant la vente, alors que le choix d’une collecte collective ou individuelle, par le titulaire de la marque ou par un autre service de collecte, se faisait après la vente ou même après utilisation des produits emballés, et la répartition entre les systèmes de collecte se faisait par pourcentage global plutôt qu’au cas par cas, voir pour les détails et l’appréciation de l’impossibilité économique d’une séparation des marques TPI, supra n. 69, sub n° 129 et suiv. (143) ; CJCE, supra n. 68, sub n° 154 et suiv.
  • [72]
    En pratique, l’obligation de réduire les royalties à zéro revenait à une obligation de tolérer l’utilisation gratuite de la marque dans le cadre d’une licence volontairement concédée, de sorte que le titulaire gardait le contrôle de l’usage fait de la marque ; la CJCE, supra n. 68, sub n° 124 et suiv. (146) n’a pas manqué de noter cet aspect, bien que de manière quelque peu formaliste.
  • [73]
    Voir TPI, supra n. 69, sub n° 156 et suiv. La marque est apposée sur les emballages des produits et n’indique que la possibilité d’une collecte collective par DSD. Il n’y a aucun « passing off » de la marque en tant que marque de service de DSD par les concurrents offrant un autre système de collecte collectif ou par des clients/licenciés recourant au mode d’une collecte individuelle (auto-collecte = Selbstentsorgung), puisque, dans le commerce, tous doivent se servir de leurs propres marques.
  • [74]
    Voir TPI, supra n. 69, sub n° 146 et suiv.
  • [75]
    CJCE, supra n. 68, sub n° 141 et suiv. ; TPI, supra n. 69, sub n° 886 et suiv., 119 et suiv.
  • [76]
    TPI, supra n. 69, sub n° 157.
  • [77]
    Voir références supra n. 63.
  • [78]
    CJCE du 29 avril 2004, aff. C-418/01, IMS Health/NDC Health, Rec. 2004 I 5039 ; l’arrêt est mal motivé en ce qu’il insiste sur l’application de la règle du « produit innovateur » énoncée par l’arrêt Magill (voir infra sub 3.1.2.3.), mais c’est ainsi que le cas fut plaidé par les parties.
  • [79]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., sub n° 163, 174 et infra n. 85 ; pour plus de détails voir Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. A. 2., et infra sub 3.2.
  • [80]
    Voir références supra n. 63.
  • [81]
    BGH du 13 juill. 2004, GRUR 2004, 966 = WuW DE-R 1329, traduction en anglais, 36 IIC 741 (2005) – « bonde normalisée de tonneau ».
  • [82]
    Il semble que l’industrie chimique avait approché un certain nombre de producteurs de tonneaux, mais pas la partie portant plainte.
  • [83]
    BGH, supra n. 81, sub A III. 3. c) (bb).
  • [84]
    BGH du 6 mai 2009, GRUR 2009, 694 = WuW DE-R 2613-Orange Book Standard II (traduction en anglais à paraître dans IIC (2009)) ; pour une critique Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. 2. b).
  • [85]
    En ce qui concerne les organisations de normalisation publiquement reconnues, lesquelles, d’après Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc. cit., sub n° 163, ne tombent même pas sous le coup de l’article 81 (1) du Traité, l’exigence d’une accessibilité ouverte à leurs normes résulte tant des n° 174 de ces Lignes directrices (arg. a fortiori) que de leur statut, voir Commission, Lignes directrices générales relatives à la coopération entre CEN, CENELEC et ETSI, d’une part, et la Commission européenne et l’Association européenne de Libre-Échange, d’autre part, J. O. U. E. 2003 C 91, 7, 11 (sub n° 5) ; pour plus de détail voir infra sub 3.2. ; Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub II.
  • [86]
    Pour l’affaire Microsoft relative à un standard de facto établi individuellement par le titulaire d’une propriété intellectuelle, et dont l’utilisation est indispensable pour avoir accès à des marchés dérivés, voir infra n. 179 et texte accompagnant la note.
  • [87]
    Voir supra sub 2.1.2.
  • [88]
    La problématique va bien au-delà du dépôt de marques de réserve ou de blocage, que le droit des marques tente de contenir en des limites par l’obligation d’utiliser la marque (Art. 10 Directive 89/104/EC relative au rapprochement du droit des marques, version consolidée J. O. U. E. 2008 L 299, 25 ; Art. 15 Règlement 40/94 relatif à la marque communautaire) et par le contrôle des dépôts faits de mauvaise foi, voir Art. 3 (2) lit d) Directive n° 89/104, Art. 5 1 (1) lit b) Règlement 40/94, et CJCE du 11 juin 2009, aff. C-529/07, Lindt+Sprüngli/Hauswirth, Rec. 2009 I (à paraître). Pour une analyse du dépôt de marques stratégiques voir Kur, Strategic Branding – Does Trademark Law Provide for Sufficient Self Help and Self Healing Forces ?, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 191 ; pour le « umbrella branding » Anderman, dans Anderman (ed), loc. cit., p. 554 et suiv.
  • [89]
    Par exemple, lorsque la marque « Fussball WM 2000 » (Championnat de Football 2000), déposée pour plusieurs centaines de produits et services, fut annulée pour la plus grande partie par BGH du 27 avril 2006, GRUR 2006, 850 = 38 IIC 867 (2007), voir Kur, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 201 avec références.
  • [90]
    Voir références supra n. 88, 89 et pour une analyse monographique Stöckel, Strategien gegen Markenmissbrauch, Cologne 2007, passim. Quant au dépôt de marques « de rançon » fait seulement pour bloquer le dépôt prévisible de marques par d’autres entreprises en vue de leur demander un prix de rançon, la jurisprudence a su contrôler de telles pratiques « d’embuscade » en vertu du droit contre la concurrence déloyale, voir par ex. BGH du 23 nov. 2000, GRUR 2001, 242 – « Classe E » et la discussion de la pratique, similaire aux « patent trolls », par Ohly, « Patenttrolle » oder Der patentrechtliche Unterlassungsanspruch unter Verhältnismäßigkeitsvorbehalt ? GRUR Int 2008, 787, 794 et suiv. avec de plus amples références.
  • [91]
    Commission, Synthèse du rapport d’enquête, loc. cit., sub 4.1 (p. 22) et 5 ; id., Final Report, loc. cit., sub 2.1.
  • [92]
    En ce sens les premières réactions négatives par Straus, Patentanmeldung als Missbrauch der marktbeherrschenden Stellung nach Art. 82 EGV ?, GRUR Int 2009, 93 ; Kjolbye, Article 82 EC as Remedy to Patent System Imperfections : Fighting Fire with Fire ?, 32 World Competition 163 (2009) ; Jacobs, Patent and Pharmaceuticals – a paper given on 29th November 2008 at the Presentation of the Directorate – General of Competition’s Preliminary Report of the Pharma-sector Inquiry (http:// ec. europa. eu/ competition/ sectors/ pharmaceuticals/ inquiry/ jacob. pdf).
  • [93]
    Voir pour un résumé Ullrich, Die Reglung des Innovationswettbewerbs in und durch das Patentrecht, dans Abel, Stauder (Hrsg.), Die Sektoruntersuchung Pharma – Kartellrechtliche Disziplinierung des Patentsystems ?, Cologne (Heymanns), (à paraître).
  • [94]
    D’après Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 85, quelques grands laboratoires de princeps ont acquis des fabricants de génériques, et ces derniers ont des activités de recherche et déposent des brevets afin d’assurer leur capacité d’adapter et de produire des génériques, id. sub n° 89 et suiv., 460.
  • [95]
    Voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 3, 24 et suiv., 462 et suiv. ; la période de protection est la « période d’exclusivité » résultant de la protection par brevet ou par des certificats supplémentaires de protection, de la période d’exclusivité de l’autorisation de mise sur marché et de la protection de données, voir id., le « Glossary » (glossaire) et n° 324.
  • [96]
    Voir Commission du 15 juin 2005, aff. COMP/A. 37.507/F3 – Astra Zeneca (http:// ec. europa. eu/ competiton/antitrust/cases/decisions/37507/eu.pdf) sous appel ; Drexl, Deceptive Conduct in the Patent World – A Case for US Antitrust and EU Competition Law, dans Prinz zu Waldeck und Pyrmont (ed.), Liber amicorum J. Straus, Berlin (Springer) 2009, 137 ; Negrinotti, Abuse of Regulatory Procedures in the Intellectual Property Context – The Astra Zeneca Case, dans Govaere, Ullrich, (eds.), loc. cit., p. 143.
  • [97]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 467 et suiv., 484 et suiv.
  • [98]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 445 et passim, également n° 696 et suiv.
  • [99]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 507 et suiv., 523 et suiv., 528 et suiv. ; voir également id., sub n° 555 et suiv. (contentieux entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques), 665 et suiv. (procédures d’opposition).
  • [100]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1090 et passim.
  • [101]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1109, 1237 et suiv.
  • [102]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1133 et suiv. ; mais voir infra n. 117. La divulgation étant normalement bénéfique (ibid. n° 1237), une divulgation défensive ne saurait être critiquable que lorsqu’elle vise spécifiquement à contrecarrer un projet de recherche indépendant d’un concurrent, voir infra sub 2.2.3.3.
  • [103]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 702 et suiv. (accords de règlement de litige entre laboratoires de princeps et fabricants de génériques), à comparer avec n° 1223 et suiv. (règlement de litige entre laboratoires de princeps) ; pour les fameux accords de paiement inverse (reverse payment agreements) voir Drexl, Reverse Payments in Prozessvergleichen, dans Abel, Stauder (Hrsg.), loc. cit., (à paraître) ; Ferri, Morneault, Reverse Payment Settlements : The Interplay of Antitrust and Patent Policies, 14 (11) Intellect. Prop’y Tech’y L. J. 11 (2008).
  • [104]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 856 et suiv., 987 et suiv. (produits de 2e génération, à ne pas confondre avec brevets secondaires), 1050 et suiv. (cumul des pratiques).
  • [105]
    Voir Art. 52 et suiv. (notion d’invention), 54 et suiv. (critères qualitatifs de brevetabilité) Convention pour le brevet européen (CBE).
  • [106]
    Voir Art. 69 CBE.
  • [107]
    Voir Directive 2004/48/CE du Parlement européen et du Conseil relative à la mise en œuvre des droits de propriété intellectuelle, J. O. U. E. 2004 L 157, 45, rect. J. O. U. E. 2004 L 195, 16 et L 351, 44.
  • [108]
    Notamment relatives à l’utilisation de l’invention brevetée à des fin expérimentales (Art. L 613-5 lit b) c. prop. int.), à la possession personnelle ou à l’utilisation antérieure au dépôt de brevet (Art. L 613-7, L 614-10, para. 3 c. prop. int.).
  • [109]
    À la différence du droit à la marque, le droit au brevet ne se perd pas en cas de non-utilisation, mais peut seulement être sujet à l’imposition d’une licence obligatoire, Art. 5 A, C Convention de Paris relative à la protection de la propriété industrielle. Le droit de brevet se perd donc seulement par abandon, notamment non-paiement des redevances de maintien, ou à la fin de sa période de protection.
  • [110]
    À la différence de la plupart des systèmes nationaux de brevets, le droit allemand ne permet pas d’opposer une exception d’invalidité à l’action en contrefaçon, mais demande au contrefacteur d’introduire une action pour annulation du brevet, §§ 81 et suiv. PatG.
  • [111]
    Art. 93 CBE.
  • [112]
    Dans l’Union européenne, les entreprises peuvent choisir entre, d’une part, la voie nationale de protection, qui les oblige de passer par la procédure nationale (avec uniquement la délivrance d’un rapport de nouveauté en France, et avec un plein examen préalable obligatoire de tous les critères de brevetabilité, mais différé pour 7 ans en Allemagne, § 44 PatG), d’autre part, la voie européenne via la CBE (avec examen préalable obligatoire, Art. 91 et suiv. CBE, mais possibilité de demander un examen accéléré, PACE) ou encore la voie internationale via le PCT (Traité de coopération en matière de brevets), qui entraîne une « internationalisation », mais également un certain retardement de la procédure de délivrance de brevet nationale ou européenne subséquente.
  • [113]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 507 et suiv., 1097 et suiv., 1112 et suiv. ; pour une présentation générale des diverses « stratégies » de dépôt de brevets des entreprises en général voir Granstrand, The Economics and Management of Intellectual Property, Cheltemham (Elgar) 1999 (paperback 2000), 209, 218 et suiv. ; Weber, Hedemann, Cohausz, Patentstrategien, Cologne (Heymanns) 2007, 111 et suiv. ; Raasch, Strategic Options to Tackle Patent Expiration : Theoretical Framework and Case Studies, 3 Int. J. Intell. Prop. Management 278 (2009). Évidemment, le seul fait que beaucoup d’entreprises poursuivent le même type de stratégie ne saurait l’exclure du contrôle quant à sa compatibilité avec le droit de la concurrence.
  • [114]
    Art. 105 a et suiv. CBE.
  • [115]
    Il en est ainsi, par ex., du système allemand de l’examen différé (voir supra n. 112), lequel a été introduit pour délester une procédure congestionnée, mais qui offre également une période de réflexion aux entreprises quant à l’opportunité économique de poursuivre leur demande de brevet, période de réflexion d’autant plus utile que dans certaines industries, dont l’industrie pharmaceutique, la nature de la recherche-développement aussi bien que la pression de la concurrence demandent un dépôt rapide aux premières phases de l’activité de recherche, voir Schäfers, kommentarbeitrag, dans Benkard (Hrsg.), Patentgesetz, 10e éd. Munich (Beck) 2006, annot. 29 et suiv. vor § 34 PatG ; id., Harmonisierung des Patentrechts : Perspektiven, Chancen, Hindernisse, Festschrift Nirk, Munich (Beck) 1992, 949, 960 et suiv.
  • [116]
    Art. 99 et suiv. CBE. La procédure d’opposition est censée compenser le fait que, avant la délivrance du brevet, les tiers ne peuvent pas formellement intervenir dans la procédure de dépôt. Cette exclusion des tiers vise à accélérer la délivrance du brevet et, dans une certaine mesure, tend à renforcer la position du déposant d’une demande de brevet. Pour une discussion générale de la problématique, connue également en d’autres domaines du droit de la propriété industrielle et en d’autres pays voir Ullrich, Die Beteiligung Dritter imVerfahren vor der Schutzrechtserteilung, Festschrift Loewenheim (Hilty et al., Hrsg.), Munich (Beck) 2009, 333 et suiv.
  • [117]
    Art. 78, 83 CBE. La divulgation claire et complète de l’invention est censée faciliter tant le développement d’améliorations de l’invention brevetée que la recherche de solutions de substitution, souvent dites inventions de contournement ( « circumvention »), lesquels, pourtant, font partie du système. Si, dans la concurrence entre les laboratoires de princeps, les pratiques de divulgation (ou de publication) « défensive » posent problème (voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 1122 et suiv., 1133 et suiv.), il faut non seulement tenir compte de ce qu’elles produisent des effets positifs expressément visés par le système, mais également de ce qu’elles sont préférables à une pratique de suppression de l’invention par le maintien du secret. Les effets pervers de la divulgation ou de la publication d’inventions faites constituent donc des « dommages collatéraux » du système particulièrement difficiles à éviter ou à contrebalancer.
  • [118]
    Voir Art. L 613-5 lit b) c. prop. int. La règle est d’une portée assez limitée, car elle ne prévoit pas d’exception générale en faveur de la recherche (publique). Elle ne constitue qu’un complément de l’obligation de divulguer l’invention (supra n. 117) en ce qu’elle autorise les tiers à utiliser l’invention afin d’en vérifier le fonctionnement. Voir pour les essais cliniques BGH du 17 avril 1997, BGHZ 135, 217 (= NJW 1997, 3092) précisant sa jurisprudence antérieure BGH du 11 juill. 1995, BGHZ 130, 259 (= NJW 1996, 782, = 28 IIC 103 (1997) annot. Pagenberg) ; voir également infra sub 3.2.1.).
  • [119]
    Voir supra n. 105.
  • [120]
    La littérature est abondante, voir parmi les rapports et analyses officiels Federal Trade Commission, To Promote Innovation : The Proper Balance of Competition and Patent Law and Policy, Washington D. C. 2003, chapters 4, 5 ; Tirole, Henry, Trommetter, Tubiana, Caillaud, Propriété intellectuelle (rapport rendu au Conseil d’Analyse économique), Paris (La Documentation francaise) 2003, 9 et passim ; National Research Council of the National Academies (ed.), A Patent System for the 21st Century (by Merrill, Levin, Myers), Washington D. C. 2004 ((http:// www. nap. edu),9 et passim ; Gowers, Review of Intellectual Property, London (HMSG ; http:// www. hm. treasury. gov. uk) 2009, 36 et suiv., 77 et suiv., 113 et suiv. ; Wissenschaftlicher Beirat beim Bundesministerium für Wirtschaft und Technologie, Patentschutz und Innovation, Gutachten 1/07, Berlin 2007, passim ; European Patent Office, Scenarios for the Future, Munich 2007, 15 et suiv.
  • [121]
    Voir Lowe, Peeperkorn, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 92 et suiv. ; Cotter, Reflections on the Antitrust Modernization Commission’s Report and Recommendations Relating to the Antitrust/IP Interface, 53 Antitrust Bull. 745, 775, 794 et suiv. ; Fox, Can Antitrust Policy Protect the Global Commons from the Excesses of IPRs ?, dans Maskus, Reichman (eds.), loc. cit., p. 758 et suiv. (avec ibid. p. 770 et suiv. : comment Fink, Competition Law as a means of Containing Intellectual Property Rights) ; Ullrich, dans Buydens, Dusollier (éd.), loc. cit., p. 258 et suiv.
  • [122]
    Voir Burk, Lemley, Policy Levers in Patent Law, 89 Virg. L. Rev. 1575 (2003) ; Reichman, Of Green Tulips and Legal Kudzu : Repackaging Rights in Subpatentable Innovation, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), Expanding the Boundaries of Intellectual Property, Cambridge (CUP) 2001, 23 ; Carroll, Tailoring Intellectual Property Rights, working paper (à paraître) ; id., Patent Injunctions and the Problem of Uniformity Cost, 13 Mich. Telecomm. Tech. L. Rev. 421 (2007) ; Mosel, Sector-Specific Patent Protection and Economic Growth, working paper, July 8, 2009, Passau Graduate School of Business and Economics ; pour la protection (ou non) du logiciel plus particulièrement Hilty, Geiger, Patenting Software ? A Judicial and Socio-Economic Analysis, 36 IIC 615, 630 et suiv. (2005) ; pour le droit d’auteur Hilty, Sündenbock Urheberrecht, dans Ohly, Klippel (Hrsg.), loc. cit., p. 107, 111 et suiv. ; Schmidt-Bischoffshausen, « One size fits all » – Wieviel Einheitlichkeit verträgt das Urheberrecht ?, dans Götting, Lunze, Überprotektion durch Geistiges Eigentum ? Baden-Baden (Nomos) 2009, 15.
  • [123]
    Voir pour une présentation empirique Merges, Nelson, On the Complex Economics of Patent Scope, 90 Col. L. Rev. 839 (1990) ; quant à la nature « inéquitable » du système de « récompense » voir Scherer, The Innovation Lottery, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), loc. cit., p. 3 et suiv.
  • [124]
    Le taux d’innovation souhaitable d’un système économique n’étant pas défini dans l’abstrait, mais par rapport aux taux d’innovation atteints par les systèmes économiques nationaux ou régionaux concurrents.
  • [125]
    Voir Scotchmer, loc. cit., p. 31 et suiv. ; David, Koyaanisqatsi in Cyberspace : The Economics of an « Out of Balance » Regime of Private Property Rights in Data and Information, dans Maskus, Reichman (eds.), loc. cit., p. 81, 85 et suiv. ; Ullrich, Standards of Patentability for European Inventions, Weinheim (Verlag Chemie) 1977, 105 et suiv. (avec références à une littérature déjà riche à l’époque).
  • [126]
    Voir Scotchmer, loc. cit., p. 98 et suiv. ; Koo, Wright, Economics of Patenting an Input Essential to Further Research, dans Granstrand (ed.), Economics, Law, and Intellectual Property, Boston (Kluwer) 2003, 331, 336 et suiv. ; la problématique ressort clairement de Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 163 et suiv., 467 et suiv. La période moyenne de maintien du brevet étant de 12,5 années, mais tout effort étant fait pour « prolonger » l’exclusivité des « blockbusters » par le dépôt de brevets secondaires surtout dans les dernières années précédant l’expiration des brevets primaires, le résultat en est que le « trade-off » entre promotion de l’innovation par la protection et sa diffusion optimale par la concurrence (voir infra n. 130) est mis hors de balance, et ceci pas nécessairement en faveur de l’innovation, mais en faveur de la création de rentes de monopole (la « surprotection »).
  • [127]
    C’est ainsi que l’introduction d’une protection spécifique des circuits intégrés ou des banques de données n’a jamais produit le progrès promis (voir pour les circuits intégrés Heilein, Die Bedeutung des Rechtsschutzes für integrierte Halbleiterschaltkreise in der Praxis, Francfort (Lang) 2003, 61 et suiv., 103 et suiv. ; pour les banques de données Commission, DG Marché intérieur, Working Paper du 12 déc. 2005, First Evaluation of Directive 96/9/EC on the Legal Protection of Databases, et Commission, Communication de presse du 12 déc. 2005, IP/05/1567 : Propriété intellectuelle : évaluation des règles UE relatives aux banques de données), alors que pour les programmes d’ordinateur (le logiciel), on aurait mieux fait d’élaborer une protection sui generis que de se retrouver enfermé aujourd’hui entre une protection sélective par brevets et une protection excessive par le droit d’auteur.
  • [128]
    Voir Ghidini, loc. cit., p. 31 et suiv. ; Ullrich, Standards of Patentability, loc. cit., p. 108 et suiv.
  • [129]
    À cet égard, il suffit de se rendre compte que le contrôle par le droit de la concurrence ne saurait saisir que les pratiques des entreprises dominant le marché, alors que la même pratique, dans le cas où elle est adoptée par toutes les entreprises, même non dominantes, peut produire des effets systématiques négatifs, lesquels seront probablement d’une plus grande ampleur.
  • [130]
    Voir Molitor, Der Patentschutz als wirtschaftspolitisches Problem, WiSt 1973, 507. À cet égard, on ne saurait trop souligner, primo, le manque de pertinence de l’argument, souvent allégué, que la durée excessive de protection conférée au logiciel par sa protection par le droit d’auteur ne serait pas « nuisible », étant donné le taux rapide de l’innovation dans ce domaine, et, secundo, l’absurdité de justifier l’extension à plusieurs reprises de la durée de protection des œuvres littéraires, artistiques et technologiques (logiciels, banques de données ! ) par l’idée d’une incitation à la création (voir les arguments peu convaincants tant de la majorité que de la « dissenting opinion » dans Eldred v. Ashcroft, 537 US. 186 (2003)). Pour la discussion récente relative à la prolongation de la durée de protection des œuvres des artistes performants et des supports de son Klass, Drexl, Hilty, Kur, Peukert, Statement of the Max Planck Institute for Intellectual Property, Competition and Tax Law Concerning the Commission’s Plans to Prolong the Protection Period for Performing Artists and Sound Recordings, 39 II C 586 (2008) ; Commission, Proposition d’une directive du Parlement européen et du Conseil modifiant la directive 2006/116/CE relative à la durée de protection du droit d’auteur et de certains droits voisins, COM (2008) 464 fin. , J. O. U. E. 2009 C 182, 7.
  • [131]
    Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 525.
  • [132]
    Pour la divulgation/publication défensive voir supra n. 117 ; plus généralement Fleischer, Mißbräuchliche Produktvorankündigungen im Monopolrecht, WuW 1997, 203 ; id., Behinderungsmißbrauch durch Produktinnovation, Baden-Baden (Nomos) 1997, 91 et suiv.
  • [133]
    En effet, de peur de voir leurs concurrents déposer des brevets, toutes les entreprises adhèrent à la pratique qui consiste à déposer autant de brevets que possible aussitôt que possible. Dans ce cas, la perspective d’une utilisation de l’invention peut encore être assez incertaine, de sorte que ces brevets ne sont pas « défensifs » par nature, mais le deviennent seulement par la suite. Les seuls vrais brevets défensifs sont ceux qui sont déposés sans aucun motif d’utilisation propre, donc le plus souvent les brevets déposés tard dans le cycle de vie d’une technologie.
  • [134]
    Pour les raisons énoncées supra n. 133, cette évaluation doit être faite dans une perspective ex ante par rapport au moment du dépôt du brevet ou par rapport au moment de la demande d’examen du brevet déposé, voir pour les difficultés Patterson, Intellectual Property and Sources of Market Power, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 35, 44 et suiv. ; voir également Himes, Zain, Anti-competitive Innovation : Is there a Role for Antitrust in Evaluating Product Line Extensions ?, American Conference Institute : Pharmaceutical Antitrust, New York, N. Y. May 15-16, 2007 (www. oag.state.ny.us/bureau/antitrust/pdfs) ; Gilbert, Newberry, Preemptive Patenting and the Persistence of Monopoly, 72 Am. Ec. Rev. 514 (1982).
  • [135]
    Voir inter alia Granstrand, Management, loc. cit., 148 et suiv. ; Blind, Cremers, Mueller, The Influence of Strategic Patenting on Companies’ Patent Portfolios, 38 Res. Pol’y 428 (2009) ; Lichtenthaler, The Role of Corporate Technology Strategy and Patent Portfolios in Low-, Medium- and High-Technology Firms, 38 Res. Pol’y 559 (2009) ; Bekkers, West, The Limits to IPR Standardization Policies as Evidenced by Strategic Patenting in UMTS, 33 Telecomm. Pol’y 80 (2009).
  • [136]
    Voir Merges, Institutions for Intellectual Property Transactions : The Case of Patent Pools, dans Dreyfuss, Zimmerman, First (eds.), loc. cit., p. 123 et suiv. ; Ullrich, Patent Pools – Policy and Problems, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 139 et suiv.
  • [137]
    Voir DoJ/FTC, IP Antitrust Guidelines, loc. cit., sub 5.5 ; DoJ/FTC, Antitrust Enforcement and Intellectual Property Rights : Promoting Innovation and Competition, Washington D. C. 2007, 57 et suiv., avec p. 68 sommaire d’une série de « Business Review Letters » adressées par le DoJ à des entreprises depuis 1997 ; récemment DoJ, Ass. Att. Gen. Barnett, Bus. Rev. Letter du 21 oct. 2008 au RFID Consortium LLC relative à l’UHF RFID standard, avec communication de presse de la même date ((www. usdoj. gov/ atr/ pubdocs/ busreview/ index) ;Peritz, Competition Policy and its Implications for Intellectual Property Rights in the United States, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 125, 214 et suiv.
  • [138]
    Voir Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 41 (non-applicabilité de l’exemption par catégorie), 210 et suiv. (critères d’application de l’Art. 81 (1), (3) à ce que la Commission appelle par euphémisme « accord de regroupement de brevets ») ; pour une discussion détaillée voir Ullrich, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 139 et suiv. ; id., Patent Pools : Approaching a Patent Law Problem via Competition Policy, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 305 et suiv.
  • [139]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 26 et suiv. (32), 78 et suiv., accordent une certaine faveur aux licences croisées de brevets complémentaires se trouvant en situation de blocage, la raison mal exprimée étant le souci de faciliter le déblocage et donc l’utilisation de toute la technologie concernée. Par sa nature même, ce genre d’échange de licences entre membres d’un pool est à la base de la constitution d’une communauté de brevets. Juridiquement parlant, il doit être distingué de l’accord sur la constitution du pool, lequel vise les conditions de la mise en commun des brevets en vue de la concession de licences à des tiers. Toute-fois, économiquement, les deux accords sont étroitement liés car le premier influence les conditions des licences à accorder à des tiers. C’est à cette lumière qu’il faut lire le n° 226 des Lignes directrices qui, en demandant un traitement égal des licenciés, membres du pool, et des tiers licenciés, invite les parties à prévoir une séparation des marchés concernés par les licences respectives.
  • [140]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 214, abordant ainsi le fameux problème du « royalty stacking », voir Lemley, Shapiro, Patent Holdup and Royalty Stacking, 85 Texas L. Rev. 1991 (2007) ; id., Reply, Patent Holdup and Royalty Stacking, Working Paper N° 345, Stanford Law School ((http:// ssrn. com/ abstract= 1005727)répondant à la critique de Golden, « Patent Trolls » and Patent Remedies, 85 Texas L. Rev. 2111 (2007) ; Godt, The Role of Patents in Scientific Competition : A Closer Look at the Phenomenon of Royalty Stacking, dans Albert, Schmidtchen, Voigt, Scientific Competition, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008, 151.
  • [141]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 213 (voir également n° 225). Il est intéressant de noter que la Commission mentionne seulement la collusion relative aux prix de licences pour brevets substitutifs, et non le risque d’entente sur le prix des licences relatives aux brevets complémentaires, ce qui s’explique par la présomption de non-concurrence entre titulaires de brevets bloquants (voir supra n. 46), laquelle, miraculeusement, transforme l’entente sur les redevances en accord vertical sur les prix, pourtant pas nécessairement légal (voir Art. 4 (2) lit a) Règlement 772/2004).
  • [142]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 213.
  • [143]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 215. La distinction, bien qu’indispensable sous l’aspect de l’Art. 81 (3) du Traité, ne satisfait pas les souhaits plus larges de l’industrie, voir Melamed, Lerch, Uncertain Patents, Antitrust, and Patent Pools, dans Ehlerman, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 273 et suiv. (analysant les pools comme institutions d’assurance) ; Plompen, The New Technology Transfer Guidelines (TTG) as Applied to Patent Pools and Patent Pool Licensing : Some Observations Regarding the Concept of « Essential Technologies », ibid. p. 295 et suiv. (proposant une notion économique plutôt que technique ou légale de ce qui est une technologie « essentielle »). En fait, le critère d’ « essentiality » est assez flou, s’il est appliqué en dehors de son contexte d’origine qui est la normalisation : un brevet ne peut être essentiel que par rapport à une norme technique ou par rapport à un autre standard superposé, mais lequel ?
  • [144]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 220.
  • [145]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 219.
  • [146]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 221 et suiv.
  • [147]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 222.
  • [148]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 224. N’est pas évidente l’interprétation du critère suivant lequel le pool doit être « ouvert ». Veut-il dire : accessible par tout tiers en tant que membre du pool ou veut-il dire seulement que le pool doit être préparé à accorder des licences à tout un chacun, comme semblent l’indiquer les Lignes directrices au n° 226 ?
  • [149]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 226.
  • [150]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 212, ce qui signifie que, dans la plupart des cas de licences accordées à des non-concurrents, le pool peut couvrir 30 % du marché au maximum (Art. 3 Règlement 772/ 2004), étant entendu que le dépassement de ce seuil n’entraîne ni forcément l’application de l’article 81 (1) ni nécessairement la non-application de l’article 81 (3), voir Lignes directrices, ibid., sub n° 37.
  • [151]
    Voir références à la littérature supra n. 138.
  • [152]
    À cet égard, il est intéressant de comparer l’approche globale choisie par le United States Patent and Trademark Office, White Paper, Patent Pools : A Solution to the Problem of Access in Biotechnology Patents, Washington D. C. December 5, 2000/January 19, 2001 (www. uspto. gov/ web/ offices/ pac/ dapp/opla/patpoolcover.html) avec l’examen prudent fait par Van Overwalle, Of Thickets, Blocks and Gaps. Designing Tools to Resolve Obstacles in the Gene Patent Landscape, dans Van Overwalle (ed.), Gene Patents and Collaborative Licensing Models, Cambridge (CUP) 2009, 383 ; Aoki, Access to Genetic Patents and Clearing Models – An Economic Perspective, ibid. p. 350 et suiv. (voir également les contributions illustrant diverses formes de clearing houses, ibid. part II, p. 63 et suiv.). Par ailleurs, les activités de clearing pourraient bien être de la compétence auxiliaire des offices nationaux des brevets.
  • [153]
    Voir texte infra sub 3.1.2.
  • [154]
    Voir texte supra sub 2.2.3.2., 2.2.3.3. Il importe de noter la transformation des modes d’exploitation des brevets dans certaines industries, notamment dans le secteur de l’informatique où, au lieu de protéger les seules activités de recherche-développement et de production des entreprises, titulaires des brevets, les brevets sont également ou même seulement exploités par la commercialisation de l’invention en tant que telle. L’exemple notoire est celui du développement, de l’introduction sur le marché et de l’exploitation de technologies de système demandant la normalisation (sous-jacente souvent à la constitution de pools) par la « distribution » de licences à travers les diverses branches de l’industrie appliquant la technologie et contribuant ainsi à sa diffusion, voir références supra n. 135 et Ullrich, dans Leistner (Hsrg.), loc. cit., sub II.1., 2.c) ; pour une pratique problématique à plusieurs égards Bekkers, Duysters, Verspagen, Intellectual Property Rights, Strategic Technology Agreements, and Market Structure : The Case of GSM, 31 Res. Pol’y 1141 (2002). Voir également Lévy, Jouyet, L’économie de l’immatériel, Rapport de la Commission sur l’économie de l’immatériel, Paris (Ministère de l’Économie, des Finances et de l’Industrie) 2006, 18 et suiv., 140 et suiv. Les difficultés qu’éprouve le système de brevets d’intégrer ou de se défendre contre les patent trolls ne représentent qu’un exemple illustrant cette transformation, voir Subramanian, Patent Trolls in Thickets : Who is Fishing under the Bridge, Eur. Int. Prop. Rev. 2008, 182 ; Kuan, Patent Trolling : Innovation at Risk, Eur. Int. Prop. Rev. 2009 (à paraître) ; Osterrieth, Patent-Trolls in Europa – braucht das Patentrecht neue Grenzen ?, GRUR 2009, 540 ; Ohly, « Patenttrolle » oder : Der patentrechtliche Unterlassungsanspruch unter Verhältnismäßigkeitsvorbehalt ?, GRUR Int 2008, 787.
  • [155]
    Voir texte supra sub 2.2.3.1.
  • [156]
    Commission, Lignes directrices accords de transfert de technologie, loc. cit., sub n° 230 et suiv. ; pour une critique voir Ullrich, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 159 et suiv.
  • [157]
    Voir Art. 321-1 à 321-12 c. prop. int. ; Gesetz über die Wahrnehmung von Urheberrechten und verwandten Schutzrechten (Urheberrechtswahrnehmungsgesetz du 9 sept. 1965, BGBl. I 1294 telle que modifiée dernièrement par la loi du 26 oct. 2007, BGBl. I 2513).
  • [158]
    Voir pour une présentation sommaire Slothers, Copyright and the EC Treaty : Music, Films and Football, Eur. Int. Prop. Rev. 2009, 272, 279 et suiv. ; Drexl, Competition in the Field of Collective Management : Preferring « Creative Competition » to Allocative Efficiency in European Copyright Law, dans Torremans (ed.), Copyright Law : A Handbook on Contemporary Research, Cheltenham (Elgar) 2007, 255 et suiv. ; Mestmäcker, Collecting Societies, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 343 et suiv. ; Jenny, EC Competition Law Enforcement and Collecting Societies for Music Rights : What are we aiming for ?, ibid. p. 361 et suiv. ; Allendesalazar, Vallina, Collecting Societies : The Usual Suspects, ibid. p. 371 et suiv. ; Vinje, Niiranen, The Application of Competition Law to Collecting Societies in a Borderless Digital Environment, ibid. p. 399 et suiv. et le panel discussion, ibid. p. 254 et suiv. ; voir également Commission du 16 juill. 2008, aff. COMP/C-2/38.698 – CISAC, J. O. U. E. 2008 C 323, 1 (sommaire), WuW-EU-V1357 (version plus complète).
  • [159]
    Pour la terminologie changeant suivant le contexte voir Van Overwalle, dans Van Overwalle (ed.), loc. cit., p. 385 et suiv., 389 et suiv.
  • [160]
    Voir supra texte accompagnant n. 148 et suiv.
  • [161]
    Voir Merges, loc. cit., n. 136.
  • [162]
    Voir Art. 613-11, L 613-15 c. prop. int. ; §24 PatG ; Ullrich, Patentgemeinschaften, dans Festschrift Immenga, loc. cit., p. 429 et suiv. proposant une certaine adaptation de ces règles.
  • [163]
    De toute façon, on ne peut pas espérer que la loi soit modifiée en temps utile, voir Van Overwalle, dans Van Overwalle (ed.), loc. cit., p. 398 et suiv.
  • [164]
    Un obstacle majeur à une application efficace du système de licences obligatoires est leur éparpillement en systèmes nationaux, ce qui fait que, pour le Marché intérieur communautaire, la personne intéressée par l’obtention d’une licence obligatoire doit déposer des demandes dans une multitude d’États. C’est pourquoi il est nécessaire de prévoir une compétence centrale telle qu’elle existerait si le brevet communautaire était introduit, et peut-être même pour le brevet européen, voir Jaeger, Drexl, Hilty, Ullrich, Comments of the Max Planck Institute for Intellectual Property, Competition and Tax Law on the 2009 Commission Proposal for the Establishment of a Unified European Patent Judiciary, 40 IIC 2009 (à paraître).
  • [165]
    Voir supra sub 2.2.3., et références supra n. 121.
  • [166]
    Voir infra texte accompagnant n. 173, et infra sub 3.1.2.3., texte accompagnant n. 180.
  • [167]
    Pour la tendance à concevoir la protection de la propriété intellectuelle en vue de promouvoir la compétitivité de l’industrie européenne et d’accroître le taux d’innovation voir Commission, Final Report Pharma, loc. cit., sub n° 5 et suiv. ; plus généralement (et critiquant cette tendance) Ullrich, Legal Protection of Innovative Technologies : Property or Policy ?, dans Granstrand (ed.), loc. cit., Economics, p. 439, 457 et suiv., 467 et suiv.
  • [168]
    Voir supra sub 2.1.2., 2.2.3.2.
  • [169]
    Voir Dreier, Primär- und Folgemärkte, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), Geistiges Eigentum im Dienst der Innovation, Baden-Baden (Nomos) 2001, 51, 70 et suiv. ; Ullrich, dans Granstrand (ed.), loc. cit., supra n. 167.
  • [170]
    Voir pour les menaces modernes auxquelles le domaine public est exposé Dusollier, Droit d’auteur et protection des œuvres dans l’univers numérique, Bruxelles (Larcier) 2005, passim ; id., Le domaine public, garant de l’intérêt public en propriété intellectuelle ?, dans Buydens, Dusollier (eds.), loc. cit., p. 117 et suiv. ; Van Overwalle, L’intérêt général, le domaine public, les commons et le droit des brevets d’invention, ibid. p. 149 et suiv. ; pour une illustration de prudence judiciaire en la matière CJCE du 9 nov. 2004, aff. C-203/02, British Horseracing Board/William Hill, Rec. 2004 I 10415. Voir également l’analyse faite sous l’aspect du droit de la concurrence par Sheehan, Can Intellectual Property Rights Be Construed by the Courts to Limit their Use for Anti-Competitive Purposes ?, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 241, 243 et suiv., 250 et suiv.
  • [171]
    De telles règles font pourtant l’exception, voir pour le droit des marques par ex. Art. 6 (1), 9 Directive 89/104/CE du 21 déc. 1988 rapprochant le droit des marques, telle que codifiée par la directive 2008/95/CE du 22 oct. 2008, J. O. U. E. 2008 L 299, 25 ; Art. 12, 53, 107 Règlement 40/94 du 20 déc. 1993 relatif à la marque communautaire.
  • [172]
    Voir supra n. 162, 164. En droit d’auteur, les adaptations d’œuvres informatiques peuvent présenter de pareils problèmes d’innovation incrémentale dépendante, mais le législateur ne semble pas considérer qu’ils valent une solution particulière ou à même d’en introduire une, voir Art. 8, 12 Berne Convention for the Protection of Literary and Artistic Works ; pour le droit européen Art. 4 lit b) Directive 91/50/CEE du 14 mai 1991 relative à la protection des programmes d’ordinateurs telle que codifiée par la directive 2009/24/CE du 23 avril 2009, J. O. U. E. 2009 L 111, 16 ; Art. 5 lit b) Directive 96/9/CE du 11 mars 1996 relative à la protection des banques de données, J. O. C. E. 1996 L 77, 20 ; pour § 23 UrhG voir Schulze, dans Dreier, Schulze, Urheberrecht, Munich (Beck) 3e éd. 2008, § 23 annot. 16 et suiv. (19).
  • [173]
    BGH du 13 VII. 2004, GRUR 2004, 966=WuW DE-R 1329=36 IIC 741 (2005) – Standard-Spundfass – sub A. III.1.
  • [174]
    Art. 6 Directive 91/50/CE relative à la protection des programmes d’ordinateur, susmentionnée (n. 172) ; voir Bently, kommentarbeitrag, dans Dreier, Hugenholtz, Concise European Copyright Law, Alphen (Kluwer) 2006, Computer Programs Dir., art. 6, passim ; à comparer avec TPI du 17 sept. 2007, aff. F 201/04, Microsoft/Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 102 et suiv., 118 et suiv., 151 et suiv. (227).
  • [175]
    Voir Art. 7 (2), Art. 14 Directive 98/71/CE du 13 oct. 1998 relative à la protection des dessins et modèles, J. O. C. E. 1998 L 289, 28 ; Art. 8 (2), 110 Règlement 6/92/CE du 12 déc. 2001 relatif aux dessins et modèles communautaires, J. O. C. E. 2002 L 3, 1 tel que modifié par le Règlement 1891/2006 du 18 déc. 2006, J. O. U. E. 2006 L 386, 14 ; Kur, Limiting IP Protection for Competition Policy Reasons – a Case Study Based on the EU Spare-Parts-Design Discussion, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 313 et suiv.
  • [176]
    La doctrine tend plutôt à souligner, d’une part, l’effet de blocage trop large que produirait un brevet sur les découvertes, les théories scientifiques, les méthodes mathématiques ou les plans et principes d’activités intellectuelles et, d’autre part, les coûts de transaction que demanderait l’exploitation d’une exclusivité trop large (voir Prahl, Patentschutz und Wettbewerb, Göttingen (Vandenhoeck) 1969, 141 et suiv. ; Peddrazini, Wie das Recht wissenschaftlich-technische Kreationen erfassen kann, dans Harabi, Kreativität, Wirtschaft, Recht, Zurich (rdf) 1996, 175, 179 et suiv. ; Kraßer, Patentrecht, 6e éd. Munich (Beck) 2009, p. 127 (§11 II)), mais il ne s’agit là que d’un aspect du problème (voir Godt, Eigentum an Information, Tübingen (Mohr Siebeck) 2007, 25 et suiv.). L’aspect le plus intriguant de la protection de découvertes qui est une réalité depuis bien longtemps dans le domaine de la chimie et de la microbiologie (voir Beier, Straus, Der Schutz wissenschaftlicher Forschungsergebnisse, Weinheim (Verlag Chemie) 1982, 66 et suiv.), ce sont les coûts d’opportunité d’une exclusivité excessive, qu’on pourrait éviter en permettant une concurrence plus large résultant éventuellement d’une multitude d’exclusivités bien délimitées et appartenant à des titulaires divers. Cela n’empêchera pas l’apparition de coûts de transaction, mais ces exclusivités sont inhérentes au système de brevets dans la mesure où il crée d’innombrables dépendances.
  • [177]
    CJCE du 5 oct. 1988, aff. 238/87, Volvo/Veng, Rec. 1988, 6211 sub n° 9 (3e alt.) ; id., du 5 oct. 1988, aff. 53/87, CICRA/Renault, Rec. 1988, 6039, sub n° 16 (3e alt.).
  • [178]
    CJCE du 6 avril 1995, aff. jointes C-241/91 P et C-242/91 P, RTE et ITV Publications/Commission, Rec. 1995 I 743 sub n° 48 et suiv.
  • [179]
    TPI du 17 sept. 2007, aff. T-201/04, Microsoft/Commission, Rec. 2007 II (à paraître) sub n° 621 et suiv., 643 et suiv.
  • [180]
    Voir Anderman, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 54 et suiv. ; Drexl, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 649 et suiv. ; Ghidini, loc. cit., p. 103 et suiv. ; Ullrich, dans Buydens, Dusollier (éd.), loc. cit., p. 271 et suiv. ; pour des commentaires sur l’affaire Microsoft (supra n. 179) voir inter alia Petit, L’arrêt Microsoft : abus de position dominante, refus de licences et vente liée, J. dr. eur. 2008, 8 et suiv. ; Coppo, Article 82 CE et refus de licence des droits de propriété intellectuelle : nouvelles perspectives après l’arrêt « Microsoft », Rev. dr. Union eur. 2008, 783 et suiv. Par ailleurs, la jurisprudence Magill a ses racines dans les principes généraux que la Cour a développés en son interprétation de l’article 82, voir TPI du 6 oct. 1994, aff. T-83/91, Tetra Pak/Commission, Rec. 1994 II 755, sub n° 114 et suiv. avec références.
  • [181]
    Voir CJCE du 6 avril 1995, supra n. 178, sub n° 55 ; TPI du 17 sept. 2007, supra n. 179, sub n° 666 et suiv., 688 et suiv. ; et voir infra n. 187.
  • [182]
    Le concept de marché primaire/marché secondaire n’est pas encore bien établi, voir pour le droit de la concurrence Commission, Communication relative à la notion du marché pertinent, J. O. C. E. 1997 C 372, 5 sub n° 56 et suiv. ; pour le droit de la propriété intellectuelle Dreier, dans Schricker, Dreier, Kur (Hrsg.), loc. cit., p. 58 et suiv. ; pour une analyse détaillée Bechthold, Die Kontrolle von Sekundärmärkten, Baden-Baden (Nomos) 2007,67 et suiv.
  • [183]
    Voir Sheehan, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 259 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 170 et suiv. (n° 46 et suiv. (48)).
  • [184]
    Voir pour les différences Drexl, dans Ehlermann, Atanasiu (eds.), loc. cit., p. 649 et suiv., 660 et suiv. ; Ullrich, Heinemann, dans Immenga, Mestmäcker (Hrsg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 179 (n° 56) ; Ghidini, loc. cit., p. 106 et suiv. ; Eilmannsberger, dans Hirsch, Montag, Säcker (Hrsg.), Münchener Kommentar, Europäisches und Deutsches Wettbewerbsrecht (Kartellrecht), Munich (Beck) 2007, Art. 82, annot. 332 et suiv., mais voir sa critique n° 386 et suiv. ; voir également Ritter, Refusal to Deal and « Essential Facilities » : Does Intellectual Property Require Special Deference Compared to Tangible Property ?, 28 (3) World Competition 281 (2005). Les observateurs critiquent souvent CJCE du 29 avril 2004, aff. C-418/01, IMS Health/NDC Health, Rec. 2004 I 5039, mais cet arrêt n’est pas pertinent au problème, voir supra texte accompagnant la n. 78.
  • [185]
    C’est pour ces raisons que le législateur allemand a exclu l’application du §19 (4) n° 4 GWB à la propriété intellectuelle en tant que « facilité d’infrastructure » à laquelle un accès doit être donné obligatoirement. Toutefois, ne sont exclues ni l’application du §19 (4) GWB à des « facilités d’infrastructure » couvertes par de la propriété intellectuelle, ni l’application des règles générales du §19 (1), 4 n° 1-3 GWB à la propriété intellectuelle, voir Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., sub III. A.2.a) (i) avec références. Voir également Commission, Communication, Orientations pour l’application de l’article 82, loc. cit., J. O. U. E. 2009 C 45, 7 sub n° 89.
  • [186]
    Voir supra texte accompagnant n. 182.
  • [187]
    Voir supra n. 181 ; Ullrich, Heinemann, kommentarbeitrag, dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc. cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 176 et suiv. (n° 53 et suiv. (54)).
  • [188]
    Art. L 613-11 c. prop. int. ; § 24 (5) PatG.
  • [189]
    Par contre, les autorités et le juge de la concurrence détermineront eux-mêmes la portée et la validité d’un titre de protection, voir CJCE du 25 fév. 1986, aff. 193/83, Windsurfing International/ Commission, Rec. 1986, 611.
  • [190]
    Voir la critique par Riem, Concurrence effective et concurrence efficace ? L’ordre concurrentiel en trompe-l’œil, RIDE 2008, 67.
  • [191]
    Voir supra 2.1.2., 2.2.3.2., 2.2.3.3.
  • [192]
    Voir référence supra n. 169, et Ghidini, loc. cit., passim, dont toute l’analyse suit une logique de « concurrence pour l’innovation » ; également Hilty, Geiger, loc. cit., 36 IIC 615 et suiv. (2005).
  • [193]
    Pour ces dilemmes voir Scotchmer, loc.cit., p. 127 et suiv. et supra n. 130, 176.
  • [194]
    Voir pour le droit des États-Unis Adams v. Burke, 84 U. S. 453 (1873) ; Schlichter, Patent Law, Legal and Economic Principles, 2e éd. Eagan, MN (West) 2003 (loose leaf) §8.51 et suiv. ; Peritz, dans Anderman (ed.), loc. cit., p. 142 ; pour le droit allemand des brevets Krasser, loc. cit., p. 793 et suiv.
  • [195]
    Voir Ullrich, International Exhaustion of Intellectual Property Rights : Lessons from European Economic Integration, Mélanges Waelbroeck, Bruxelles (Bruylant) 1999, 205, 209 et suiv. ; id., dans Immenga, Mestmäcker (Hsrg.), loc.cit., 4e éd. EG/Teil 2, p. 40 et suiv.
  • [196]
    Voir Herzog, Handel mit gebrauchter Software, Baden-Baden (Nomos) 2009, passim ; Jaeger, Der Erschöpfungsgrundsatz im neuen Urheberrecht, dans Hilty, Peukert, Interessenausgleich im Urheberrecht, Baden-Baden (Nomos) 2004, 47 et suiv. ; Bechthold, dans Dreier, Hagenholte (eds.), loc. cit., Information Society Dir. Art. 3, annot. 4, Art. 5 annot. 3 ; Leistner, The German Second-Hand Software Controversy, dans Technologie et concurrence, Mélanges Ullrich, Bruxelles (Larcier) 2009 (à paraître).
  • [197]
    Voir Sarnoff, Holman, Recent Developments Affecting the Enforcement, Procurement, and Licensing of Research Tool Patents, 23 Berkeley Tech’y L. J. 1299, 1304 et suiv. (2008).
  • [198]
    Voir Godt, Research Tools : Patents and the Information Market in the Knowledge Based Economy, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., p. 275 et suiv. ; Sarnoff, Holman, loc. cit., 23 Berkeley Tech’y L. J. 1337 et suiv. (2008), et plus généralement Ost, Les brevets portant sur les inventions biotechnologiques, dans Remiche (sous la direction de), Brevet, innovation et intérêt général, Bruxelles (Larcier) 2007, 131, 135 et suiv., 144 et suiv. ; Gutmann, Intervention, ibid. p. 177 et suiv.
  • [199]
    Max Planck-Institut für geistiges Eigentum, Wettbewerb- und Steuerrecht, Munich. Déclaration en vue d’une interprétation du « test des trois étapes » respectant les équilibres du droit d’auteur (www. ip. mpg.de/shared/data/ pdf/declaration_three_step_test_final_francais.pdf) ; voir également Dusollier, loc. cit., p. 423 et suiv. ; Senftleben, Die Bedeutung der Schranken des Urheberrechts in der Informationsgesellschaft und ihre Begrenzung durch den Dreistufentest, dans Hilty, Geiger (Hrsg.), loc. cit., p. 159 et suiv.
  • [200]
    BGH du 5 déc. 2006, BGHZ 170, 115 = GRUR 2007, 221 (n. Götting) – « Simvastatin ». Le conflit avec les considérations énoncées par Commission, Final Report Pharma, loc. cit., n° 23 et suiv., 172 et suiv., 547 et suiv. ne peut pas être plus évident. Voir également supra n. 130.
  • [201]
    Voir Ohly, loc.cit., GRUR 2008, 795 et suiv. proposant d’appliquer le principe de la proportionnalité à l’action en cessation lorsque l’injonction reviendrait à anéantir des biens économiques dont la valeur est hors rapport avec le dommage causé par la contrefaçon (p. ex. composant breveté de petite valeur intégré dans un produit complexe de haute valeur). En droit américain, le constat de la contrefaçon relève du droit strict alors que le remède à y apporter relève du droit d’équité, ce qui permet de tempérer la sanction de la contrefaçon, voir eBay v. MercExchange, 126 S. Ct.1837 = 78 USPQ 2nd 1577 (2006).
  • [202]
    Voir pour la question de l’épuisement, d’une part, CJCE du 8 juin 1982, aff. 258/78, Nungesser/ Commission, Rec. 1982, 2015 sub n° 61 et suiv. ; d’autre part, TPI du 27 sept. 2006, aff. T-168/01, GlaxoSmithKline Services/Commission, Rec. 2006II2969, confirmé par CJCE du 6 oct. 2009, aff. jointes C-501/06 et al., GlaxoSmithKline/Commission, non encore publié au Rec. ; pour une analyse critique Ullrich, European Competition Law, Community-wide Exhaustion and Compulsory Licenses – Disintegrating the Internal Market in the Public Interest, dans Godt (Hrsg.), Differential Pricing of Pharmaceuticals Inside Europe, Baden-Baden (Nomos) (à paraître) ; pour une approche « holistique » de l’application des Art. 28 et suiv. et Art. 81, 82 du Traité au problème des importations parallèlles Rognstad, The Exhaustion/Competition Interface in EC Law – Is There Room for a Holistic Approach, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 427 et suiv.
  • [203]
    En particulier la « grande » question de savoir si et dans quelle mesure un objet peut ou doit être protégé cumulativement sous ses aspects divers par divers titres de propriété intellectuelle, voir inter alia Sosnitza, Konvergenz und Interferenz der Schutzrechte, dans Festschrift Tilmann, Cologne (Heymanns) 2003, 895 ; Ghidini, Arezzo, One, None, or a Hundred Thousand : How Many Layers of Protection for Software Innovations ?, dans Drexl (ed.), loc. cit., Research Handbook, p. 346 et suiv. ; Casucci, Software and Computer-Related Inventions : Protection by Patent and Copyright, dans Heath, Kamperman (eds.), New Frontiers of Intellectual Property Law, Oxford (Hart) 2005, 161 et suiv. ; Heath, The Protection of Aesthetic Creations as Three-Dimensional Marks, Designs, Copyright or Under Unfair Competition, ibid. p. 181 et suiv. ; pour les mesures de protection technique voir Dusollier, loc. cit., passim ; Heide, Copyright, Contract, and the Legal Protection of Technological Measures : Providing a Rationale to the Copyright Exceptions Interface, dans Heath, Kamperman (eds.), loc. cit., p. 215 et suiv. ; Hubicki, Sherman, Terminator Genes as a Technical Protection Measure for Patents ?, ibid. p. 267 et suiv.
  • [204]
    Voir pour les détails de la présentation sommaire suivante Liotard, Persistance et intensité des conflits entre normalisation et propriété intellectuelle : les enseignements de la troisième génération de téléphonie mobile, RIDE 2008, 47 ; Ullrich, dans Leistner (Hrsg.), loc. cit., passim ; id., Patente, Wettbewerb und technische Normen : Rechts- und ordnungspolitische Fragestellungen, GRUR 2007,817, tous avec de plus amples références.
  • [205]
    Voir Simcoe, Open Standards and Intellectual Property Rights, dans Chesbrough et al. (eds.), Open Innovation : Researching a New Paradigm, Oxford (OUP) 2006,161. Bien que le concept puisse être adopté aussi bien pour les normes de facto introduites individuellement par une entreprise ou introduites par un « club de normalisation » composé d’un nombre limité d’entreprises, il est typiquement associé aux organisations de normalisation publiquement reconnues. La raison en est, d’une part, que ces organisations sont tenues à garantir l’accessibilité générale des normes techniques qu’elles développent et, d’autre part, que, en principe, les clubs et les entreprises individuelles sont libres de modifier ou d’abandonner le choix d’une politique d’accès ouvert à leurs normes. De toute façon, le concept de l’open standardization est à distinguer du mouvement open source, car il ne vise que le maintien de l’accessibilité générale d’une norme technique, laquelle est, au moins en partie, couverte par les revendications d’un brevet.
  • [206]
    Voir Farrell, Hayes, Shapiro, Sullivan, Standard Setting, Patents, and Hold-Up, 74 Antitrust L. J. 603 (2007) ; Lemley, Ten Things to Do About Patent Holdup of Standards (And One Not to), 48 Boston Coll. L. Rev. 149 (2007).
  • [207]
    CEN = Comité européen de normalisation (site : wwww. cen. eu) ; CENELEC = Comité européen de normalisation électrotechnique (site : wwww. cenelec. eu) ;ETSI = European Telecommunications Institute (site : wwww. etsi. org) ;ANSI = American National Standardization Institute (site : www. ansi.org) ; IEEE = Institute of Electrotechnical and Electronic Engineers (site : wwww. ieee. org) ;ISO = International Standardisation Organisation (site : wwww. iso. org) ;ITU = International Telecommunications Union (site : wwww. itu. int). En général, les structures, les modes de fonctionnement et les pratiques ou « policies », y compris les pratiques relatives à la propriété intellectuelle, sont renseignés sur les sites de ces organisations ; quant à l’ETSI, voir pour plus de détails Fröhlich, Standards und Patente – Die ETSI IPR Policy, GRUR 2008, 205.
  • [208]
    Voir supra n. 205. Néanmoins, le titulaire du brevet peut, de sa propre volonté, décider et déclarer qu’il est prêt à concéder des licences à titre gratuit. NB : il reste lié par l’obligation de non-discrimination.
  • [209]
    RAND : « reasonable and non discriminatory » terms ; FRAND : « fair, reasonable, and non discriminatory » terms. Les conditions RAND sont demandées par les organisations de normalisation américaines (ANSI et ses organisations adhérentes) et internationales (ISO, ITU), alors que l’ETSI et le CEN/CENELEC sont tenus de demander des conditions FRAND, voir l’accord de coopération « Orientations générales pour la coopération entre le CEN, le CENELEC et l’ETSI et la Commission européenne et l’Association européenne de Libre-Échange » du 28 mars 2003, J. O. U. E. 2003 C 91, 7, 11, 6e tiret, col. gauche. Le contenu exact des termes RAND/FRAND et leurs différences sont controversés, voir infra n. 221.
  • [210]
    Voir Commission, Lignes directrices relatives à la coopération horizontale, loc.cit., J. O. C. E. 2001 C 3,2, sub n° 174.
  • [211]
    Voir p. ex. BGH, supra n. 81, WuW DE-R 1331 (sub A. III.2.).
  • [212]
    Voir supra n. 62 ; Drexl, dans Liber amicorum J. Straus, loc.cit., supra n. 96.
  • [213]
    Voir références supra n. 84. Étant donné l’absence d’une concession de licence, la Cour suprême n’admet une « défense antitrust » que lorsque le défendeur se comporte effectivement comme s’il avait obtenu une licence à des conditions raisonnables et non discriminatoires : il doit donc payer les redevances correspondantes par avance ou du moins en faire un dépôt garanti par une banque. Ainsi, le défendeur supporte le risque d’une évaluation insuffisante de ce qui constitue des conditions RAND/FRAND. Au lieu de supporter seulement la charge de la preuve du caractère abusif des conditions, il doit supporter la charge de la preuve de ce qui serait des conditions justifiées. En plus, l’hypothèse de conditions discriminatoires échappe à l’approche choisie par la Cour.
  • [214]
    Merges, Kuhn, An Estoppel Doctrine for Patented Standards, 97 Cal. L. Rev. 1 (2009).
  • [215]
    Miller, Standard Setting, Patents, and Access Lock-in : RAND Licensing and the Theory of the Firm, 40 Ind. L. Rev. 35 (2007). À la différence de Merges, supra n. 214, qui propose d’attacher l’estoppel au fait de la non-divulgation du brevet ou du dépôt de brevet, Miller voudrait seulement que la déclaration de disponibilité générale de licences soit irrévocable.
  • [216]
    Voir pour le droit des États-Unis eBay v. MercExchange, 126 Sup. Ct.1837 = 78 USPQ 2nd 1577 (2006) ; pour le droit européen Art.11 Directive 2004/48/EC du Parlement et du Conseil du 29 avril 2004 relative à la mise en œuvre des droits de propriété intellectuelle, J. O. U. E. 2004 L 157,45 ; CJCE du 9 juill. 1985, aff. 19/84, Pharmon/Hoechst, Rec.1985, 228, n° 25.
  • [217]
    Voir pour une analyse monographique générale Blind, The Economics of Standards, Cheltenham (Elgar) 2004, 24 et passim.
  • [218]
    Voir l’accord de coopération CEN/CENELEC, ETSI/Commission, loc.cit., supra n. 209.
  • [219]
    À cet égard, il importe de noter qu’une fois une invention incorporée dans une norme technique, laquelle a été adoptée par le marché, on ne peut plus « retirer » cette invention de la norme. L’invention devient la norme, qui est appliquée par tous, et le titulaire du brevet tirera son profit particulier de cette situation de fait pratiquement irréversible.
  • [220]
    La distinction a été soulignée notamment par Miller, loc.cit., 40 Ind. L. Rev. 35, sub II. (2007).
  • [221]
    C’est l’approche aux conditions FRAND/RAND la plus souvent proposée (voir Farrell, Hayes, Shapiro, Sullivan, loc.cit., 74 Antitrust L. J. 635 et suiv. (2007)), mais son interprétation reste assez controversée (voir Geradin, Pricing Abuses by Essential Patent Holders in a Standard Setting Context : A View From Europe, 76 Antitrust L. J. 329 (2009) avec références).
  • [222]
    Voir Godt, dans Govaere, Ullrich (eds.), loc. cit., supra n. 198 ; id., The Role of Patents in Scientific Competition : A Closer Look at the Phenomenon of Royalty Stacking, dans Albert, Schmidtchen, Voigt (eds.), Scientific Competition, Tübingen (Mohr Siebeck) 2008,151.
  • [223]
    Voir l’allusion faite par Ghidini, loc.cit., p. 110 et suiv. aux traditions anglo-saxonne et romaine différentes concernant la régulation des rapports entre propriété individuelle et intérêts des tiers à l’accès à l’objet protégé.
bb.footer.alt.logo.cairn

Cairn.info, plateforme de référence pour les publications scientifiques francophones, vise à favoriser la découverte d’une recherche de qualité tout en cultivant l’indépendance et la diversité des acteurs de l’écosystème du savoir.

Avec le soutien de

Retrouvez Cairn.info sur

18.97.9.173

Accès institutions

Rechercher

Toutes les institutions