Notes
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[1]
Université Paris 2 – ERMES, CREST – Laboratoire d’Économie industrielle, 28, rue des Saints-Pères, 75007 Paris. Je tiens à remercier Saïd Souam pour son aide précieuse ainsi qu’Élisabeth Bollène.
-
[2]
Selon M. Weiner, « Antitrust and the Rise of the Regulatory Consent Decree », Antitrust, Fall 1995, p. 4.
-
[3]
En France, ces dernières sont jugées par une autorité distincte et sont insusceptibles d’être négociées car, selon la Cour de cassation, le plaider-coupable n’est pas conforme au droit pénal français dans la mesure où il repose sur une négociation à huis clos entre le procureur et l’accusé (Cass., 18 avril 2005, avis n 005-0004P, <http :// www. courdecassation. fr/ article326. html>).
-
[4]
Pour la procédure de clémence il n’est pas demandé d’engagements autres que celui de cesser l’infraction. Pour les deux autres procédures, les engagements ne sont pas renégociables à l’initiative des entreprises.
-
[5]
Respectivement n° 2001-420 du 15 mai 2001, JORF, 16 mai 2001 et n° 2002-689 du 30 avril 2002, JORF, 3 mai 2002.
-
[6]
Ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 portant adaptation de certaines dispositions du code de commerce au droit communautaire de la concurrence, JORF, 5 novembre 2004, page 18689.
-
[7]
Du 16 décembre 2002 et relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence, JOCE, L 001,4 janvier 2003.
-
[8]
Cet acte judiciaire par lequel le rapporteur livre son analyse du dossier marque l’entrée dans une procédure contradictoire et explique, nous le verrons, la marge de manœuvre de l’autorité quant au degré de réduction de sanction offert en cas de non-contestation.
-
[9]
En partie depuis que la loi NRE pose un taux plafond de 10 % du chiffre d’affaires mondial, et non plus de 5% du chiffre d’affaires national.
-
[10]
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 11 janvier 2005 (suite à la Cons. Conc. 13 mai 2004, décision n° 04-D-18, France Télécom) a doublé la sanction établie par le Conseil ((http :// www. minefi. gouv. fr/dgccrf/boccrf/05_06/a0060012.htm).
-
[11]
Article L. 464-2 alinéa II, lettre a du code de commerce tel que modifié par l’ordonnance nº 2004-1173 du 4 novembre 2004.
-
[12]
Un tel recours est toujours possible sur le fondement de l’article L 464-8 du code de commerce. Selon cet article, les décisions du Conseil de la concurrence (hors mesures conservatoires) sont notifiées aux parties en cause et au ministre chargé de l’économie, qui peuvent, dans le délai d’un mois, introduire un recours en annulation ou en réformation devant la Cour d’appel de Paris.
-
[13]
Décision de la Commission du 21 novembre 2001, Vitamines, COMP/E-1/37.512, JOCE, L6,10 janvier 2003.
-
[14]
Intervention de Mme Behar-Touchais, membre du Conseil de la concurrence, lors de l’atelier n° 4 de l’Association française des juristes d’entreprise du 14 avril 2005, intitulé « Des enquêtes de concurrence aux programmes de clémence, d’engagements et de transaction en droit communautaire et interne », <http :// www. afje. org/ ateliers/ 2005/ Atelier4. pdf>.
-
[15]
Commission européenne, « Communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes », JOUE, C 298/11,8 décembre 2006.
-
[16]
Voir Van Barlingen et Barennes, « The European Commission’s 2002 Leniency Notice in Practice », Competition Policy Newsletter, n° 3, Autumn 2005 ; MEMO/06/470 du 7 décembre 2006 sous <http ://europa.eu/rapid/searchAction.do>.
-
[17]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, points 8-a et 10.
-
[18]
Ibid., point 8-b.
-
[19]
Ibid., points 23 et 24. La notion de « valeur ajoutée » est précisée au point 25 (en fonction notamment du degré de corroboration nécessaire).
-
[20]
La Commission aurait reçu environ 80 demandes de réduction de sanction au titre de cette procédure selon Van Barlingen et Barennes, « The European Commission’s 2002 Leniency Notice in Practice », op. cit.
-
[21]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, point 26, selon lequel les éléments rapportés ne seront pas pris en compte dans l’amende infligée à l’entreprise qui les a fournis.
-
[22]
Ibid., la Commission a introduit au point 9 une liste des éléments facilitant l’obtention de l’immunité du fait que la moitié des demandes se sont vues refuser l’avis conditionnel.
-
[23]
La Commission a indiqué avoir annulé l’avis conditionnel d’immunité dans la décision Raw Tabacco Italy du 20 octobre 2005 (COMP/C.38.281/B.2) après que l’entreprise ait révélé à ses principaux concurrents son bénéfice de la clémence, avant même que la Commission ne puisse mener des inspections surprises. Dans un tel cas, l’entreprise récupère de plein droit son pouvoir de contradiction.
-
[24]
On peut voir ici, sous une forme atténuée, un rapprochement du régime américain où il n’est pas demandé à l’entreprise d’interrompre sa participation au cartel, mais bien au contraire de faciliter autant que possible la constitution d’un flagrant délit.
-
[25]
MEMO/06/469 du 7 décembre 2006 sous <http ://europa.eu/rapid/searchAction.do>.
-
[26]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, point 14.
-
[27]
Intervention de M. Lasserre, président du Conseil de la concurrence, le 21 avril 2005 à la Grande chambre de la Cour de cassation au cours de l’Association générale de l’AFEC, <http :// www. conseil-concurrence.fr/doc/intervention_lasserre_2006_12_01_afec.pdf>.
-
[28]
Cons. Conc., décision n° 06-D-09 du 11 avril 2006, dans le secteur de la fabrication de portes planes et isoplanes et des portes laquées.
-
[29]
http :// www. conseil-concurrence. fr/ doc/ cpro_clemence. pdf.
-
[30]
Cette exemption de sanctions pénales qui peut en résulter correspond à la pratique du DOJ établie depuis la Corporate Leniency Policy du 10 août 1993, <http :// www. usdoj. gov/ atr/ public/ guidelines/ lencorp. htm>. En 2004, le régime américain a également établi une immunité partielle dans les recours privés (impliquant les fameux dommages au triple) en offrant à l’entreprise le de-trebbling (The Antitrust Criminal Penalty and Reform Act, Public Law 108-237 § 215).
-
[31]
Le Conseil de la concurrence considère que le domaine en est restreint aux affaires peu graves et peu anciennes. La Commission l’applique à des affaires parfois anciennes, mais dont l’atteinte à l’ordre public économique ne justifie pas le prononcé de sanctions pécuniaires (excluant davantage les affaires particulièrement graves). Aux États-Unis, le DOJ l’applique sans restriction particulière.
-
[32]
Du 6 février 1962, JOCE, 13,21 février 1962, abrogé par le règlement communautaire n° 1/2003.
-
[33]
Essentiellement utilisés dans des affaires d’abus de position dominante. Voir par exemple IBM (1984) rapport XIV, Alhstrom (1988) ECR 5193, Irish Distiller Group (1988) rapp. XVIII, United International Pictures (1989) rapp. XXIX, Coca-Cola (1989) rapp. XIX, Microsoft I (1994) rapp. XXIV, IR Nielsen (1996) rapp. XXVI, Swift (1997), Digital (1997) rapp. XXVI, ITT/Belgacom (1998) rapp. XXVII, etc.
-
[34]
Selon T. Picot, « La nouvelle procédure d’engagements : un settlement à la française en matière de concurrence ? », Revue Lamy de la Concurrence, 2005, n° 1, pp. 142-144.
-
[35]
L’article 2 du règlement n° 773/2004 du 7 avril 2004, JOCE, L123,2004, précise que cette possibilité d’engagements par l’entreprise devient impossible à partir de la communication des griefs qui marque une ouverture de procédure d’interdiction. Cependant, la Commission considère parfois que la communication des griefs peut constituer cette évaluation préliminaire.
-
[36]
En particulier, les associations et les organisations de consommateurs ont la possibilité de faire connaître à la Commission leurs observations sur le modèle commercial proposé.
-
[37]
Faisant référence à la communication relative à la notification préalable d’une entreprise commune : affaire 34.281, Carlsberg-Tetley, JOCE, C 97,16 avril 1992, p. 21.
-
[38]
Une telle publication n’aurait concerné que 5 % des affaires.
-
[39]
Article 9 alinéa 4 du règlement du Conseil n° 1/2003.
-
[40]
Le Tribunal de première instance a approuvé cette pratique pour la première fois dans TPICE, 18 septembre 1992, Automec / Commission, Aff. T-24/90, Rec., II, p. 2223. Le règlement du Conseil n° 1/2003 a confirmé cette possibilité.
-
[41]
Décision de la Commission du 19 janvier 2005, Vente combinée des droits médiatiques sur le championnat allemand de football, Bundesliga, COMP/C-2/37.214. Voir également la décision assez similaire du 22 mars 2006, COMP/38.173, The Football Association Premier League Limited (FAPL).
-
[42]
Aucune disposition ne limite le champ de la procédure d’engagements à cette obligation abrogée par le règlement du Conseil n° 1/2003, mais la majorité des décisions de commitments a débuté dans son cadre.
-
[43]
Voir également, pour des applications en matière d’infraction à l’article 81, les affaires des éditeurs de musique et des sociétés de gestion collective (décision du 4 octobre 2006, Cannes Agreement, COMP/38.681, IP/06/1311) et des compagnies aériennes (décision du 22 septembre 2005, Austrian Airlines + Scandinavian Airline System et Australian, COMP/37.749).
-
[44]
Décision du 22 juin 2005, The Coca-Cola Company, COMP/39.116.
-
[45]
Débutée au cours de l’année 1999, mais dont l’ouverture formelle date de septembre 2004.
-
[46]
Dans la décision du 12 avril 2006, REPSOL C.P.P. SA – Distribution de Carburants et Combustibles, COMP/38.348, la Commission a indiqué que l’amende serait alors imposée sans qu’elle n’ait à prouver l’existence d’un quelconque agissement – malgré l’absence de culpabilité établie – mais pas automatiquement à 10 %. La pratique sera probablement proche de la seconde solution.
-
[47]
Décision du 22 février 2006, ALROSA + DBCAG (part of de Beers group) + City and West East (part of de Beers group), COMP/38.381.
-
[48]
MEMO/06/90 du 22 février 2006 « Competition : De Beers’commitment to phase out rough diamond purchases from ALROSA ».
-
[49]
Lorsque le Conseil est saisi d’une demande de mesures conservatoires, l’évaluation préliminaire est constituée par un rapport oral en séance (article 9 du décret 2005-1668 du 27 décembre 2005, JORF, du 29 décembre). Dans un tel cas, selon M. Dahan, rapporteur général du Conseil, c’est généralement l’entreprise qui sollicite le bénéfice des engagements (séminaire du 8 décembre 2006 à la Maison du barreau, intitulé « Pratiques anticoncurrentielles : politique de sanction et gestion du risque », <http :// www. cercle-montesquieu. fr/ public/ Actualites>).
-
[50]
On notera que le DOJ dispose d’un pouvoir exclusif de rompre les négociations à la suite du Tunney Act (15 U.S.C. § 16). Le DOJ a parfois utilisé ce pouvoir pour contraindre les entreprises, mais les signaux du DOJ avant l’entrée dans les négociations sont souvent assez précis. Voir Branfman, « Antitrust Consent Decrees : A Review and Evaluation of the First Seven Years Under the Antitrust Procedures and Penalties Act », 27 Antitrust Bulletin, 1982, p. 303.
-
[51]
Cons. Conc., 26 avril 2005, décision n° 05-D-16 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD). La Commission dispose en ce sens d’une plus grande latitude dans les négociations, puisque le MEMO/06/163 « Competition : Commission increases competition in Spanish service station market » en anglais précise que l’engagement de Repsol (affaire précitée note 46) de laisser les stations-services de son réseau entièrement libres de proposer des réductions sur les prix de vente au détail était obligatoire alors même que la question n’était pas abordée avant dans le cadre de cette procédure.
-
[52]
Cons. Conc., 17 mars 2005, décision n° 05-D-12 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de la mesure d’audience dans le secteur de la presse quotidienne nationale et sur le marché connexe de la publicité dans ce secteur (décision EUROPQN présentée plus loin).
-
[53]
Décision de classement dans l’affaire France Télécom concernant l’utilisation des dénominations « Numéro vert », « Numéro Azur » et « Numéro Indigo » (communiqué de procédure du 18 janvier 2006, <http :// www. conseil-concurrence. fr/ user/ standard. php ? id_rub= 184&id_article= 514>).
-
[54]
Intervention de M. Cerutti, directeur de la DGCCRF, à la journée d’étude du 6 avril 2005 à l’Université René Descartes, intitulée « À l’heure de la modernisation du droit communautaire de la concurrence, faut-il repenser le système français de régulation de la concurrence ? ».
-
[55]
B. Lasserre, « La politique des engagements en matière de pratiques anticoncurrentielles : premiers pas et premier bilan en France », contribution à la 32e conférence International Antitrust Law and Policy, à l’Université de Fordham, hhttp :// www. conseil-concurrence. fr/ doc/ engagements_lasserre_ fordham.pdf.
-
[56]
Le Conseil de la concurrence regroupe l’ensemble des décisions d’engagements sur son site internet.
-
[57]
Cons. Conc., 17 mars 2005, décision n° 05-D-12 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de la mesure d’audience dans le secteur de la presse quotidienne nationale et sur le marché connexe de la publicité dans ce secteur. Voir également les affaires AudiPress (Cons. Conc., 20 décembre 2006, décision n° 06-D-40 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la presse magazine) et GIE Les Indépendants (Cons. Conc., 6 octobre 2006, décision n° 06-D-29 relative à des pratiques mises en œuvre par le GIE Les Indépendants dans le secteur de la publicité radiophonique).
-
[58]
Bien qu’il soit fait expressément référence à cette infraction dans le communiqué de procédure du 1er février 2005, <http :// www. conseil-concurrence. fr/ user/ standard. php ? id_rub= 149&id_article= 369>,il semble clair que le Conseil ne souhaite pas à ce jour faire application de la procédure d’engagements aux cas d’ententes ; c’est EUROPQN qui est visé par la décision.
-
[59]
Cons. Conc., 7 février 2006, décision n° 06-D-01 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des Nouvelles Messageries de Presse Parisienne (NMPP).
-
[60]
Voir en ce sens les affaires des Haras nationaux (Cons. Conc., 16 juin 2005, décision n° 05-D-29 relative à des pratiques mises en œuvre par « Les Haras nationaux » sur le marché de la reproduction équine) et SACD (Cons. Conc., 26 avril 2005, décision n° 05-D-16 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des auteurs et compositeurs dramatiques).
-
[61]
Cons. Conc., 24 juillet 2006, décision n° 06-D-24 relative à la distribution des montres commercialisées par Festina France. Voir également en matière de distribution les affaires Bose – Focal JM Lab – Triangle (Cons. Conc., 5 octobre 2006, décision n° 06-D-28 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution sélective de matériels Hi-fi et Home cinéma), Sirona Dental Systems (test de marché – engagement – du 22 mai 2006 : distribution d’équipements et matériels dentaires) et Produits cosmétiques et d’hygiène corporelle (test de marché – engagement, 14 novembre 2006).
-
[62]
La jurisprudence du Conseil pose assez nettement le principe selon lequel la procédure d’engagements n’est pas la chose des plaignants. À ce sujet, dans l’affaire du GIE Les Indépendants, la Cour d’appel de Paris sera bientôt amenée à statuer sur la validité d’une telle pratique du Conseil.
-
[63]
Elle est parfois utilisée par d’autres autorités mais n’est pas réglementée et peut être vue comme une combinaison de types de décisions plus habituelles.
-
[64]
Ils sont de même nature que ceux de la procédure d’engagements de l’alinéa I de l’article L464-2 du code de commerce, et peuvent ainsi être comportementaux ou structurels.
-
[65]
La décision 07-D-02 pourrait donc annoncer un revirement de jurisprudence (Cons. Conc., 23 janvier 2007, décision n° 07-D-02 relative à des pratiques ayant affecté l’attribution de marchés publics et privés dans le secteur de l’élimination des déchets en Seine-Maritime). Voir également les décisions 04-D-30 (Cons. Conc., 7 juillet 2004, décision n° 04-D-30 relative à des marchés publics de transport scolaire en Haute-Corse) et 04-D-42 (Cons. Conc., 4 août 2004, décision n° 04-D-42 relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre du marché de la restauration de la flèche de la cathédrale de Tréguier) et surtout 03-D-45 (Cons. Conc., 25 septembre 2003, décision n° 03-D-45 relative aux pratiques mises en œuvre dans le secteur des calculatrices à usage scolaire), présentées plus loin. En tout cas, le revirement a eu lieu dans une affaire au dommage à l’économie très important.
-
[66]
Elle ne peut contester la réalité, la qualification et l’imputabilité de griefs, mais peut contester, en application du principe du contradictoire, la gravité ou le dommage à l’économie qu’on leur prête.
-
[67]
Si l’entreprise les refuse, la procédure reprend à la notification avec présomption d’innocence, car la non-contestation ne vaut pas aveu.
-
[68]
Décisions 03-D-10 (Cons. Conc., 20 février 2003, décision relative à des pratiques constatées lors d’un appel d’offres lancé par le Port autonome de Marseille), 04-D-30 (Cons. Conc., 7 juillet 2004, précitée), 04-D-42 (Cons. Conc., 4 août 2004, précitée).
-
[69]
Le Conseil et la Cour d’appel de Paris appliquent cette réduction à l’assiette maximale de la sanction qui passe donc de 10 à 5 % du chiffre d’affaires mondial du dernier exercice ou de 3 millions d’euros à 1,5 pour une personne physique.
-
[70]
Selon la Cour de cassation, cette incertitude est juridiquement justifiable mais rend impropre la qualification de « transaction » à la procédure de non-contestation (Cass., 11 juillet 2005, avis, n° 0050006P).
-
[71]
Tant que le débat l’a été sur les engagements et sur le montant de base (Cour d’appel de Paris, 1re chambre, 9 novembre 2004, arrêt relatif au recours formé par la SA SEE Camille Bayol et autres contre la décision n° 04-D-08 du Conseil de la concurrence en date du 30 avril 2004, relative au marché de travaux d’assainissement de la commune de Pontacq).
-
[72]
Articles L 464-3 et L 463-2-II du code de commerce.
-
[73]
On notera en plus que la DGCCRF, dans le cadre de son activité d’enquête, peut proposer, sous contrôle des autorités juridictionnelles, un règlement transactionnel aux auteurs de contraventions aux règles du code de commerce depuis la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit (article 83). Il s’agit en fait d’un pouvoir qui avait été supprimé en 1986 : la transaction pénale consistait en un paiement d’une somme au Trésor public, accompagnée éventuellement de certaines obligations. À ce jour, aucune application ne semble en avoir été faite.
-
[74]
La reconnaissance de culpabilité ne semble pas accentuer le degré d’encadrement de l’entreprise sur ces engagements, mais l’enquête a été à son terme, et les déterminants de la violation seront probablement plus clairement dégagés.
-
[75]
Contrairement cependant à ce que prévoit l’article L 463-3 du code de commerce.
-
[76]
Cons. Conc., 27 juillet 2004, décision n° 04-D-37 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché des pompes funèbres dans le Val-de-Marne.
-
[77]
Avis n° 05-00006 du 11 juillet 2005, hhttp :// www. courdecassation. fr/ jurisprudence_publications_documentation_2/ avis_15/ classes_par_239/ et Com., 28 novembre 2006, Bull., IV, 2006, n° 235, p. 258. Peut-être simplement parce que in fine le Conseil a la possibilité d’envoyer un signal fiable à l’entreprise que la procédure simplifiée sera utilisée si les engagements s’avèrent signifiants.
-
[78]
Selon M. Dahan (séminaire précité).
-
[79]
Voir également les affaires des Marchés publics de transport scolaire en Haute-Corse (04-D-30, précitée) et de la restauration de la flèche (04-D-42, précitée).
-
[80]
Il s’agit d’un document juridique qui doit contenir les réponses du rapporteur aux observations des parties sur la notification et y joindre les pièces sur lesquelles il s’appuie dans l’affaire.
-
[81]
Cons. Conc., 25 septembre 2003, décision n° 03-D-45, pratiques mises en œuvre dans le secteur des calculatrices à usage scolaire. Voir également, assez similaire, Cons. Conc., 19 décembre 2005, décision n° 05-D-70 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des vidéocassettes préenregistrées.
-
[82]
Les pratiques mises en œuvre ont été considérées d’autant plus graves que les deux entreprises détenaient 89 % du marché et qu’elles prenaient effet entre des distributeurs se présentant comme des enseignes aux politiques de prix agressives (les hypermarchés). Il semble que le Conseil considère désormais la nature des engagements pour le degré de réfaction.
-
[83]
Cons. Conc., 30 novembre 2004, décision n° 04-D-65 relative à des pratiques mises en œuvre par La Poste dans le cadre de son contrat commercial.
-
[84]
Cette accentuation concerne aussi bien le montant théorique maximum des amendes qui est désormais de 10 % du chiffre d’affaires (au lieu de 5 %), que la pratique. Voir F. Arbault, « La politique de la Commission en matière d’amendes antitrust : récents développements, perspectives d’avenir », Competition Policy Newsletter, Summer 2003, n° 2, pp. 1-7.
-
[85]
Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23 § 2 du règlement du Conseil n° 1/2003.
-
[86]
Il ne peut excéder 30 % de la valeur des ventes et, en cas d’entente horizontale, son calcul doit prendre en compte la gravité de l’infraction – « généralement retenue en haut de l’échelle ».
-
[87]
Parmi lesquelles la récidive qui peut faire doubler le montant de base, même si la décision précédente provient d’une autorité nationale.
-
[88]
F. Arbault, « La politique de la Commission en matière d’amendes antitrust… », op. cit.
-
[89]
On peut comprendre en ce sens les engagements imposés par le Conseil de la concurrence d’informer les employés des sanctions possibles.
-
[90]
CJCE, 27 septembre 1988, Ahlström Osakeyhtio v. Commission, Aff. jointes C-89/85,104/85, 114/85,116/85,125 à 129/85, Rec., p. 5193 (Pâte de bois I).
-
[91]
Voir l’affaire Raw Tabacco Italy précitée pour une application après le rejet d’une demande de clémence.
-
[92]
Article 4 du protocole n° 7 à la Charte.
-
[93]
Article 50, JOCE, C310,16 décembre 2004, qui n’a pas de valeur contraignante.
-
[94]
Voir, pour les procédures normales, Paulis et Gauer, « Le règlement n° 1/2003 et le principe du ne bis in idem », Concurrences, 2005, <http :// www. concurrences. com/ IMG/ pdf/ Article_Gauer-Paulis. pdf>.
-
[95]
CEDH, Oztürk c. RFA, 21 février 1984,8544/79.
-
[96]
CJCE, 7 janvier 2004, Italcementi – Fabbriche Riunite Cemento / Commission, Aff-C-213/00, Rec., 2004, p. I-123.
-
[97]
Voir les décisions de la CJCE, 14 décembre 1972, Boehringer Mannheim / Commission, Aff. 7/72, Rec., p. 1281 et Buchler & Co. / Commission, Aff. 44/69, Rec., 1970, p. 733.
-
[98]
Point 43 de la Communication de la Commission du 27 avril 2004 relative à la coopération au sein du réseau des autorités de concurrence, JOUE, C101,27 avril 2004, p. 43. De même, l’article 16(2) du règlement du Conseil 1/2003 dispose que les autorités nationales ne peuvent prendre de décisions qui iraient à l’encontre de la décision adoptée par la Commission.
-
[99]
Selon l’article 5 du règlement du Conseil n° 1/2003, les autorités de la concurrence des pays membres sont compétentes pour appliquer les articles 81 et 82 du traité quand les pratiques sont susceptibles d’affecter plusieurs États membres. À ce titre, une telle autorité peut interdire un contrat ou décider d’une sanction.
-
[100]
Particulièrement en matière d’abus de position dominante pour laquelle l’article 3 du règlement du Conseil n° 1/2003 accorde une faculté d’adopter des lois nationales plus strictes.
-
[101]
Voir en ce sens le MEMO/06/356 du 29 septembre 2006, « Competition : Commission proposes changes to the Leniency Notice », dans lequel la Commission indique que la reconnaissance mutuelle des décisions des autorités nationales du REC reste à ce jour irréaliste, même en matière de clémence.
-
[102]
<http ://europa.eu.int/comm/competition/antitrust/legislation/authorities_with_leniency_programme.pdf>.
-
[103]
Discours prononcé à Bruxelles le 7 avril 2005.
-
[104]
<http ://ec.europa.eu/comm/competition/ecn/model_leniency_fr.pdf>.
-
[105]
Avec une réduction à 50 % maximum pour les entreprises n’étant pas première. La seule différence notable entre les autorités nationales concernées est celle concernant l’Allemagne et la Grèce refusant la clémence au « leader » de l’entente.
-
[106]
Une telle coopération serait nécessaire en matière de procédure d’engagements car les signaux émis par une telle procédure peuvent avertir d’autres autorités.
-
[107]
Dans la procédure d’engagements, aucun dossier n’est constitué au sens habituel.
-
[108]
Dans la procédure de non-contestation où de tels éléments proviennent tous de l’enquête, la communication est effectuée normalement.
-
[109]
Sauf si une procédure de clémence a été formulée auprès de la destinataire ou que celle-ci s’engage par écrit à ne pas sanctionner l’entreprise (points 37 à 42 de la communication du 27 avril 2004 précitée et réaffirmé dans le programme modèle du REC en matière de clémence <http ://ec.europa. eu/comm/competition/ecn/model_leniency_fr.pdf>).
-
[110]
TPICE, 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation / Commission, Aff. T-2/03, Rec., p. II-1121. En l’espèce, l’absence de contestation des faits avait réduit la charge de travail de la Commission et justifiait une réduction de l’amende de 10 % et une non-communication des dossiers.
-
[111]
Cour suprême des États-Unis, 14 juin 2004, F. Hoffmann-La Roche Ltd et al. v. Empagran SA, (03-724) 542 U.S. 155 (2004) 315 F.3d 338. Un client européen peut poursuivre une entreprise européenne située aux États-Unis pour des dommages et intérêts au triple en raison d’un préjudice entièrement subi en Europe à condition que l’entente soit reliée aux ventes du produit visé aux États-Unis. Voir Souty, « La Cour suprême des États-Unis et les pratiques anticoncurrentielles mondiales : réflexions sur les arrêts Empagram et Intel v. AMD », Les petites affiches, n° 189,2004, p. 13.
-
[112]
Section 1782a), 28 USC, Assistance to foreign and international tribunals and to litigants before such tribunals.
-
[113]
Personne qu’une juridiction peut entendre sans formalité dans le but de rechercher des éléments propres à faciliter son information. L’amicus curiae n’est ni un témoin ni un expert.
-
[114]
Paragraphes 28 à 30 du programme modèle du REC en matière de clémence, précité, paragraphes 32 à 34 de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant de 2006, précitée, et 21 du communiqué de procédure du Conseil de la concurrence relatif au programme de clémence français, <http :// www. conseilconcurrence. fr/ doc/ cproclemence17avril2007. pdf>.
-
[115]
Selon l’article 45 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 dite Royer d’orientation du commerce et de l’artisanat.
-
[116]
Le Conseil constitutionnel rappelle cette exigence dans la décision du 23 juillet 1999, n° 99-416 DC, loi portant création d’une couverture maladie universelle.
-
[117]
Communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant de 2006, précitée, points 32 à 34 et point 47 des notes explicatives du programme modèle du REC en matière de clémence, précité. Le DOJ assure au délateur d’une part le de-trebling (non plus le paiement des « triples dommages », mais seulement celui relatif aux dommages simples) et d’autre part la non-solidarité du paiement avec les autres membres du cartel.
-
[118]
Conférence du 17 octobre 2005 à la Grande chambre de la Cour de cassation, « La réparation du préjudice causé par une pratique anticoncurrentielle en France et à l’étranger : bilan et perspectives ».
-
[119]
Dans la décision CJCE, 20 septembre 2001, Courage et Crehan, Aff. C-453/99, Rec., p. I-6297, la Cour donne la possibilité de recourir à une décision communautaire dans les recours privés. Aux États-Unis, un consent decree ou judgement ne saurait constituer un commencement de preuve contre l’entreprise s’il est entériné avant que la procédure contentieuse n’ait commencé (15 U.S.C § 16-a : avant que les premiers témoignages n’aient été enregistrés).
-
[120]
CJCE, 6 octobre 1970, Grad / Finanzamt Traunstein, Aff. C-9/70, Rec., p. 825.
-
[121]
Il s’agit du comportement des autorités de régulation qui cherchent parfois à récupérer les gains d’efficacité des entreprises en modifiant régulièrement leurs exigences. Voir notamment Perrot, « Les frontières entre régulation sectorielle et politique de la concurrence », Revue française d’économie, n° 4/vol. XVI, 2002, pp. 81-112.
-
[122]
H. First, « Is Antitrust Law ? », Antitrust, Fall 1995, p. 9.
-
[123]
La tentation serait grande pour le DOJ d’édicter des règlements internes définissant des perspectives politiques, changeantes par définition. Voir à ce sujet l’étude empirique de Wood and Anderson, « The Politics of U.S. Antitrust Regulation », American Journal of Political Science, 37,1991, pp. 1-39 ; et pour un exemple d’affaire négociée, voir l’évolution du cas United States v. Microsoft (décision du DOJ du 1er novembre 2002).
-
[124]
Kovacic, « Downsizing Antitrust : is it Time to end Dual Federal Enforcement ? », Antitrust Bulletin, n° 41,1996, pp. 505-520.
-
[125]
Le plea-bargaining se rapportant à l’opération de négociation une fois l’enquête commencée, se-rait-il intéressant d’introduire un mécanisme d’autodénonciation, avant enquête, pour les pratiques d’entreprises isolées ? Ou encore, l’extension des engagements aux affaires d’ententes, éventuellement autres que celles portant directement sur les prix, serait-elle efficace en France ?
1 INTRODUCTION
1Si la négociation des sanctions en droit est par nature paradoxale, une telle issue est fréquente aux États-Unis, où elle concerne 70 % à 80 % des affaires antitrust devant le Department of Justice [2] américain. Elle est encore récente pour le Conseil de la concurrence français et la Commission européenne, et n’y porte pas sur les sanctions pénales [3].
2Les procédures de négociation de sanction regroupent la clémence, la non-contestation des griefs et la procédure d’engagements. Elles ont été introduites dans un contexte d’encombrement des affaires, et dans le but de le résorber en accélérant le temps des procédures, en ce qu’elles sont de nature à faciliter l’obtention de la preuve. Elles reposent en effet sur un schéma incitatif de réduction de sanction et, dans un souci de lutte contre les infractions ainsi détectées, imposent aux contre-venants des engagements pour l’avenir. Ceux-ci deviennent partie intégrante de la décision et sont revêtus, dès lors, de l’autorité de la chose jugée [4].
3On pourrait voir ici un rapprochement avec les missions premières des autorités de régulation dont l’intervention s’applique à des secteurs où la concurrence est structurellement limitée mais avec une perspective de mise en conformité au droit de la concurrence, notamment par le recours au monitoring (contrôle). Cependant, les procédures de négociation ne peuvent être imposées à l’entreprise, sachant que l’autorité, elle, n’adoptera une telle décision que dans un souci de dissuasion des pratiques anticoncurrentielles : un accord doit être trouvé.
4Nous présenterons d’abord ces procédures dans leur mise en œuvre et place au sein du paysage juridique européen (2). Ensuite, nous exposerons les externalités négatives que le droit de la concurrence, dans son organisation et face aux diverses applications qui en sont faites, nous semble pouvoir exercer sur la faisabilité d’une négociation avec une ou plusieurs entreprises (3).
2 LES PROCÉDURES NÉGOCIÉES
5Les différentes procédures de négociation sont rattachées à des périodes de la procédure normale (comme indiqué dans la fig. 1) et provoquent généralement la clôture de celle-ci par un jugement anticipé plus ou moins formel. Les engagements qui peuvent en résulter obligent alors l’autorité à une interaction avec les entreprises dans une troisième étape spécifique aux procédures négociées : elle repose sur un véritable monitoring de l’entreprise par l’autorité avec menace de sanctions, qui peut être complété ou remplacé par les recours privés dénonçant les contrevenants (private enforcement).
Rattachement des procédures négociées à la procédure normale
Rattachement des procédures négociées à la procédure normale
6La loi relative aux nouvelles régulations économiques (ci-après loi NRE) et son règlement d’application [5] ont créé les procédures de non-contestation et de clémence (L 464-2, alinéas III et IV du code de commerce). L’ordonnance n° 2004-1173 a créé celle d’engagements (L. 464-2, alinéa I) [6]. Cette dernière procédure était prévue par l’article 5 du règlement communautaire n° 1/2003 [7] dans l’arsenal nécessaire aux autorités de la concurrence des États membres.
7La procédure de clémence est la seule qui peut être considérée comme une incitation pour l’entreprise à révéler ses pratiques anticoncurrentielles avant le début d’une investigation, mais son champ d’application a été élargi dans la plupart des pays à la période suivant le début d’une enquête.
8En revanche, les procédures d’engagements et de non-contestation n’ont par nature de sens qu’après l’ouverture d’une enquête. À ce jour, elles ne coexistent que dans le régime français, et on notera qu’elles sont normalement séparées par la notification des griefs [8].
9Les différentes procédures que nous étudierons doivent être vues dans un contexte de plus grande sévérité du Conseil dans les dernières années [9], d’une sévérité accrue face au non-respect d’une injonction faite à l’entreprise [10], ainsi que de l’extension du champ d’application des astreintes aux engagements pris par une entreprise devant l’autorité [11].
10De plus, elles rendent les recours contre la décision du Conseil moins probables de par leur caractère consensuel [12].
2.1 La procédure de clémence
11La procédure de clémence permet à une entreprise dénonçant des pratiques collectives, auxquelles elle a participé, d’échapper totalement ou partiellement aux sanctions.
12Tous les régimes reposent en partie sur une course, instaurée par les textes, pour être le premier à dénoncer, ainsi qu’une exigence de l’utilité des preuves apportées : la clémence peut être refusée en cas contraire. Par exemple, ce fut le cas dans l’affaire des vitamines où une entente était dénoncée par la société Aventis, et une immunité totale lui fut accordée sur certains marchés seulement [13]. De même, la société Solvay a-t-elle subi un refus après une hésitation d’un mois à révéler et qu’Hoffmann-La Roche en ait profité pour apporter des preuves suffisantes [14].
2.1.1 Devant la Commission européenne
13La Commission dispose depuis 1996 d’un programme de clémence qui a été renforcé en 2002 par la communication du 19 février 2002, et ajusté en 2006 [15]. Depuis l’entrée en vigueur de la communication de 2002, la Commission indique avoir reçu 87 demandes d’immunité [16], alors qu’elle n’avait été utilisée que 11 fois en application de la communication de 1996.
14Depuis 2002, la Commission a instauré un régime facilitant le bénéfice de l’immunité inspiré en partie de la pratique du Department of Justice (ci-après DOJ). Elle accordera l’immunité totale en faveur du premier membre de l’entente qui fournit à la Commission des renseignements suffisants pour permettre d’effectuer une inspection « ciblée » en rapport avec l’entente présumée avant le début de toute inspection [17] ou suffisants pour constater l’infraction si elle était déjà en possession d’informations suffisantes pour ordonner une inspection [18].
15De plus, comme depuis 1996, la nouvelle communication prévoit une réduction des amendes en faveur des entreprises qui, sans remplir les conditions de l’immunité, fournissent des preuves ayant une « valeur ajoutée significative » par rapport à celles qu’elle a déjà reçues [19]. La première entreprise remplissant ces conditions obtiendra une réduction de 30 % à 50 % de l’amende qui lui aurait été infligée, la deuxième, une réduction de 20 % à 30 % et les suivantes, une réduction allant jusqu’à 20 % [20].
16À l’intérieur de chacune de ces fourchettes, le montant définitif de toute réduction dépendra du moment auquel les éléments de preuve ont été fournis et de leur qualité, ainsi que du degré de coopération de l’entreprise tout au long de la procédure. On notera que dans la communication de 2006, la Commission se réserve le droit de dépasser cette fourchette de réduction si une entreprise rapporte des preuves déterminantes supplémentaires permettant de renforcer la gravité ou la durée de l’infraction [21].
2.1.1.1 Immunité conditionnelle
17La communication de 2002 a créé le mécanisme d’avis conditionnel qui peut être appliqué à la demande de l’entreprise et qui a l’avantage de lui permettre d’obtenir une opinion sur ses chances avant que les pièces ne soient effectivement fournies. L’entreprise présente alors les preuves en termes hypothétiques, sous la forme d’une liste descriptive des pièces qu’elle pourrait apporter [22].
18La procédure se déroule en deux étapes. Dans un premier temps, la Commission prend un avis conditionnel si les pièces rencontrent les conditions ad hoc (point 8), ou indique la fourchette de réduction à laquelle l’entreprise aura droit au titre du point 23. Dans un second temps, après avoir vérifié si les éléments apportés correspondent à ceux décrits, elle confirme l’avis d’immunité.
2.1.1.2 Conditions du bénéfice de la clémence
19Dans tous les cas, le repentir doit être total, et la coopération de l’entreprise doit être véritable, notamment elle ne doit pas informer les autres entreprises de sa demande de clémence [23]. De même, l’entreprise qui veut en bénéficier ne doit pas avoir obligé une autre à participer au cartel – sous le régime de 1996, la clémence était refusée à l’entreprise « leader » du cartel. Enfin, l’entreprise doit en principe mettre fin sans délai à sa participation à l’entente présumée.
20Cependant, au point 12-b de la communication de 2006, la Commission a introduit une possibilité de maintenir la participation au cartel si cela est raisonnablement nécessaire à la préservation de l’intégrité des inspections [24].
21Bien que la qualité des informations qui doivent être apportées par l’entreprise diffère selon que la Commission a ouvert une enquête ou non, pour l’immunité ou une réduction partielle, il est dans l’intérêt de l’entreprise d’apporter en une fois tous les éléments en sa détention et d’informer la Commission de ceux qu’elle pourrait obtenir à tout moment. En effet, si la Commission n’étudie qu’une demande d’immunité à la fois, aucun élément ne peut en principe être ajouté par le demandeur au dossier à partir du moment où une seconde entreprise demande cette immunité. La procédure doit toujours conserver l’aspect de course à la révélation [25].
22Cependant, la Commission peut octroyer, lorsqu’elle considère que cela est nécessaire, un « marqueur » à chaque demande, instaurant une période définie au cas par cas pendant laquelle l’entreprise regroupe les éléments de preuves qu’elle souhaite apporter, et la protégeant d’une nouvelle demande [26].
2.1.2 Devant le Conseil de la concurrence
23Un an après l’entrée en vigueur des règles du Réseau européen de la concurrence (REC), le Conseil annonçait avoir reçu environ quatorze demandes de clémence remplissant les conditions légales et en aurait accepté un peu plus d’une dizaine, en l’accordant aussi à des entreprises qui étaient les secondes à apporter des preuves justifiant de 30 % à 70 % de réduction [27]. À ce jour, une seule affaire a cependant fait l’objet d’une décision formelle [28].
24Les conditions du système de clémence français sont très proches de celles communautaires. Cependant, le Conseil a souhaité garder une plus grande marge de manœuvre sur le traitement des entreprises qui ne sont pas les premières à dénoncer, en n’établissant pas de barème clair, avec une réduction de sanction ne pouvant aller, en principe, au-delà de 50 %. Il n’y a que la première entreprise dénonçant qui semble avoir une position définie.
25De plus, au paragraphe 37 de son communiqué de procédure du 11 avril 2006 [29], le Conseil indique que la clémence est au nombre des motifs légitimes qui justifient la non-transmission des dossiers au parquet au titre de l’article L 462-6 concernant les poursuites pénales contre les personnes physiques [30].
26Enfin, on notera que la décision 06-D-09 semble indiquer a contrario que le cumul des procédures de clémence et de non-contestation devrait être possible dans une même affaire.
2.2 La procédure d’engagements
27La procédure d’engagements diffère de la précédente en ce qu’elle peut être utilisée pour les violations d’une entreprise isolée, et permet à l’entreprise qui s’engage à modifier ses pratiques d’échapper à la sanction. Son champ est réservé en Europe aux affaires où l’autorité n’a pas l’intention de sanctionner [31], car cette procédure aboutit à des décisions sans reconnaissance de culpabilité.
2.2.1 La procédure de commitments devant la Commission
28À côté des engagements qu’une entreprise peut ou doit prendre face à la Commission en matière de droit anti-dumping, les engagements sont possibles en application des articles 81 et 82.
29Cette procédure existe dans les modes d’intervention de la Direction générale de la concurrence depuis longtemps. Sous le règlement 17/1962 [32], la Commission pouvait déjà obtenir des engagements (undertakings [33] ) comportementaux ou structurels dans le domaine des pratiques anticoncurrentielles. Ce texte ne faisait cependant pas explicitement référence à un tel pouvoir de négociation, mais la Commission justifiait cette pratique par une lecture étendue de son article 3. L’opacité de cette procédure entraînait une insécurité juridique pour les entreprises qui se voyaient parfois contraintes à prendre des engagements lourds sous la menace d’utiliser les pouvoirs répressifs. De même, les entreprises se trouvaient parfois poursuivies tout en ayant respecté les engagements car la Commission évoquait une « suspension des poursuites » [34].
30Le règlement communautaire n° 1/2003 a formalisé son déroulement dans les articles 9 et 27 et dès lors assuré une plus grande sécurité juridique aux entreprises.
2.2.1.1 Procédure et champ d’application
31En vertu de l’article 9 du règlement communautaire n° 1/2003, si dans le cadre d’une procédure les entreprises proposent des engagements de nature à éliminer les objections qui leur ont été adressées par la Commission, celle-ci peut rendre ces engagements obligatoires pour les entreprises par voie de décision. L’article précise que ces engagements peuvent être adoptés pour une durée limitée.
32La proposition de l’entreprise doit, normalement, intervenir avant la communication des griefs, et suite à l’évaluation préliminaire détaillant les préoccupations de la Commission, sous la forme d’une lettre [35].
33La constatation formelle par la Commission qu’il n’y a plus lieu pour elle d’agir permet de clore efficacement et souplement la procédure au fond sans établir s’il y a eu ou s’il y a toujours une infraction. Cependant, avant d’arrêter sa décision, la Commission est tenue par l’article 27 § 4 du règlement communautaire n° 1/2003 de publier un résumé succinct de l’affaire et de l’orientation proposée. Elle publie également une version intégrale des engagements sur Internet. Les tiers affectés par la décision peuvent alors présenter leurs observations dans le délai (d’au moins un mois) fixé par la Commission [36]. Cette obligation de publication avec sursis à statuer pour obtenir l’avis des tiers remplace la communication « Carlsberg » [37] qui existait en la matière, sous le régime du R17/1962 mais qui était une possibilité discrétionnaire et ne donnait pas l’orientation proposée du dossier [38].
34Une fois la procédure close, le suivi de l’affaire par la Commission est facilité par la possibilité de mettre en place un mécanisme de monitoring dont le coût est supporté par les parties concernées. De plus, le MEMO/04/217 du 17 septembre 2004 intitulé La nouvelle procédure en matière d’ententes visée à l’article 9 du règlement n° 1/2003 ajoute que les autorités nationales de la concurrence doivent faire appliquer les engagements par tous les moyens dont elles disposent par la loi nationale, y compris par les mesures conservatoires (uniquement dans la version anglaise).
35En cas de violation avérée, la Commission a la possibilité d’imposer des amendes ainsi que des astreintes pouvant aller respectivement jusqu’à 10 % et 5 % du chiffre d’affaires (art. 23 et 24). De plus, on notera que, si l’un des faits sur lesquels la décision repose subit un changement important ou si la décision repose sur des informations incomplètes, inexactes ou dénaturées, la Commission peut rouvrir la procédure à tout moment [39].
36Il reste qu’une lecture de subsidiarité de l’article 9 du règlement communautaire n° 1/2003 est possible, selon laquelle la Commission ne manifesterait par les compromis-décisions qu’une volonté de déclasser l’affaire en termes de priorité communautaire ou de la laisser être uniquement jugée par les autorités nationales [40]. En effet, il n’est pas évident d’en concilier une lecture différente avec le point 13 du préambule du même règlement qui pose la limite de cette procédure aux cas où la Commission n’a pas l’intention de sanctionner.
37Cependant, le domaine de procédure d’engagements semble être plus large et la Commission donne davantage un caractère de solution pour l’avenir à ces compromisdécision. Cette application est d’ailleurs un moyen de renforcer l’incitation des entreprises à prendre des engagements conséquents : limitant les acceptations d’engagements aux propositions sérieuses, les entreprises concernées seront effectivement protégées par la suite face à la Commission, et dans une certaine mesure, nous le verrons, face à une autorité nationale.
38Il reste que l’inconvénient majeur de cette conception est le coût ex post qui peut en résulter, étant donné qu’une solution d’interdiction ne cherche pas à garantir le bon comportement futur.
2.2.1.2 Quelques affaires
39Ligue allemande de football – 2005
40L’affaire avait pour objet la vente centralisée des droits médiatiques sur les matchs du championnat allemand de football masculin [41]. Suite à la notification d’un contrat conformément à l’article 4 du règlement communautaire n° 17/1962 [42], la Commission avait constaté dans son évaluation préliminaire que la vente exclusive de ces droits pouvait violer l’article 81 du traité [43].
41Selon la Commission, les engagements de la Bundesliga ont introduit de la concurrence dans la commercialisation des droits de l’association entre la ligue et les clubs, et ont permis la création de nouveaux produits, et, dès lors, elle pouvait clore l’affaire.
42Plus précisément, les engagements ont réduit l’étendue et la durée des futurs accords commerciaux, notamment par une dissociation par lots des droits, avec une procédure de commercialisation transparente et non discriminatoire. De plus, ils ont amélioré l’accessibilité des contenus pour les opérateurs de télévision, de radio et de nouveaux médias (UMTS, Internet), en assurant que plus de droits seront rendus disponibles au marché, par la déconcentration sur ces marchés. On notera qu’une date d’expiration des engagements a été fixée à juin 2009.
43Coca-Cola – 2005
44Cette affaire est une illustration de l’intérêt de la procédure du fait du peu de formalisme qu’elle exige et en ce qu’elle semble appropriée pour des affaires nécessitant un faisceau d’indices qui peut être compliqué à établir [44]. En effet, cette décision a fait suite à une enquête très longue [45], mais a priori infructueuse en termes de preuve.
45Le marché concerné était celui des boissons gazeuses sans alcool où Coca-Cola était suspectée d’abus de position dominante. Coca-Cola s’est engagée à ne pas conclure d’accords d’exclusivité avec les magasins et cafés, ni à leur offrir des remises ciblées ou de quantité. Elle ne devra pas non plus les contraindre à acheter des produits moins populaires en même temps que ses marques les plus porteuses.
46Les engagements ont été assortis d’une date d’expiration au 31 décembre 2010, et ne concernent que certains pays membres de l’UE potentiellement concernés par l’affaire, avec une publication annuelle de la liste de ceux pouvant y être soustraits ou ajoutés à la discrétion de la Commission. On notera que la Commission a indiqué, dans cette affaire uniquement, qu’une amende à 10 % du chiffre d’affaires serait « automatiquement » imposée à Coca-Cola en cas de violation avérée [46].
47Alrosa et De Beers – 2006
48L’affaire fut ouverte par la notification à la Commission en 2002 d’un accord d’approvisionnement passé entre De Beers et Alrosa, respectivement premier et deuxième fournisseurs mondiaux de diamants bruts [47]. La Commission avait alors exprimé aux entreprises le fait que le volume de diamants bruts acheté par De Beers à Alrosa était de nature à renforcer la puissance de marché de De Beers, intervenant sur les activités de commercialisation, et d’éliminer Alrosa en tant que source d’approvisionnement de substitution. Les quantités d’échange prévues dans le contrat correspondaient à celles exportées par Alrosa hors de Russie (où 98 % de la production est assurée par celle-ci).
49Des engagements avaient été pris après que la Commission eut engagé une procédure en janvier 2003, par l’envoi à De Beers et Alrosa d’une communication des griefs. Elle y expliquait, d’une part, que l’accord commercial notifié restreignait sensiblement la concurrence sur le marché du diamant brut en éliminant la concurrence d’Alrosa et, d’autre part, qu’il constituait un abus de position dominante de la part de De Beers.
50Après la période de publication, la Commission a annoncé avoir reçu de nombreuses observations indiquant l’insuffisance des engagements proposés, et a obtenu une réduction des échanges plus rapide, jusqu’à une cessation totale des achats de diamants bruts à Alrosa à partir de 2009. Un tiers indépendant, désigné par les parties, est chargé de vérifier leur respect. On notera que la solution est considérée par la Commission comme une illustration de son rôle de mise en conformité au droit de la concurrence des industries de base [48].
2.2.2 Devant le Conseil de la concurrence
2.2.2.1 Procédure et domaine d’application
51Lorsque le Conseil de la concurrence envisage de faire application de la procédure d’engagements, le rapporteur fait connaître aux entreprises ou organismes concernés, avant la notification des griefs, son évaluation préliminaire des pratiques en cause [49]. Lorsque les agents de la Direction générale du commerce de la concurrence et de la répression des fraudes (DGCCRF) ont mené l’enquête, l’évaluation est constituée par le procès-verbal.
52Le rapporteur général et le Conseil discutent avec l’entreprise des éventuelles modifications à y apporter, lors d’un entretien en « guichet unique », éventuellement après la période de publication, mais qui ne peuvent être imposées à l’entreprise [50].
53La décision d’acceptation du Conseil rend obligatoires les engagements. Cependant, le Conseil ne peut rendre contraignants que ceux en rapport direct avec l’évaluation préliminaire [51]. De même, dans le cas où les négociations feraient naître des obligations à la charge de l’entreprise saisissante, cette dernière n’est pas engagée au sens de cette procédure, et une inexécution ne pourra être poursuivie que devant le juge des contrats [52]. En revanche, même après le désistement du requérant, par exemple après un accord à l’amiable avec l’entreprise poursuivie, le Conseil peut exiger des engagements répondant à l’évaluation préliminaire [53].
54Les pouvoirs de vérification du Conseil ne sont pas parfaitement établis, mais il pourra sûrement recourir au monitoring, et la saisine d’office reste possible. De plus, selon l’article L 464-8 du code de commerce, le ministre chargé de l’économie devra veiller au respect des engagements que les entreprises ont souscrits, dans le cadre de sa mission générale de contrôle de l’exécution des décisions du Conseil. L’extension en matière antitrust de la mesure à moyen terme de l’effectivité et de l’impact des engagements en matière de concentration devrait être facile [54].
55Selon B. Lasserre, cette procédure est de nature à permettre au Conseil de se recentrer sur la sanction des pratiques anticoncurrentielles les plus graves, et assurer ainsi une meilleure efficacité de son intervention [55].
2.2.2.2 Quelques affaires [56]
56EUROPQN – 2005
57Il s’agit d’une affaire d’abus de position dominante suite au refus de l’association EUROPQN (qui rassemble les grands quotidiens à tirage national) d’intégrer les quotidiens gratuits « 20 minutes » et « Métro » dans son étude d’audience, considérée comme une référence par les professionnels de la publicité [57].
58Une telle restriction au marché publicitaire était d’autant plus problématique pour les deux quotidiens que leur financement repose principalement sur la publicité. Dans son évaluation préliminaire, le Conseil a fait état de présomptions raisonnables de l’existence d’une application discriminatoire et non objective des conditions d’accès par EUROPQN, pouvant résulter d’une entente entre les principaux adhérents de l’association [58].
59Après deux mois de procédure, comprenant la période de publication, le Conseil a décidé d’accepter les engagements en les rendant obligatoires, et visant à une intégration normale des quotidiens gratuits dans l’étude.
60NMPP – 2006
61Le groupe des nouvelles messageries de presse parisienne (NMPP) a été accusé par la société Export Press d’abus de position dominante sur les marchés de vente au numéro de la presse nationale dans les DOM-TOM [59].
62Le 11 novembre 2005, les NMPP ont proposé de s’engager à ne plus pratiquer la tarification discriminatoire de la distribution locale de la presse nationale auprès des autres « exportateurs », qui avait pu lui permettre jusqu’alors d’empêcher une concurrence effective. De plus, elles ont proposé de soumettre aux prochaines assemblées de leurs coopératives associées une résolution les autorisant à présenter les conditions tarifaires applicables aux DOM comme ne relevant pas du régime à l’exportation.
63Dans sa décision, le Conseil a indiqué avoir obtenu le 11 janvier 2006 une version plus précise du premier engagement quant aux barèmes appliqués, suite à des observations de concurrents. Mais le Conseil a rappelé qu’il ne lui revenait pas de se prononcer sur le caractère anticoncurrentiel du niveau absolu des tarifs proposés dès lors qu’ils n’étaient pas injustifiables économiquement, tant que leur structure ne crée pas un avantage concurrentiel illégitime [60].
64Festina – 2006
65Festina France a opposé un refus à la demande de la société Bijourama d’intégrer le réseau de distribution sélective des produits de la première, au motif qu’elle ne souhaitait pas passer par des distributeurs intervenant exclusivement par Internet [61]. Le Conseil a souligné que les préoccupations de concurrence portaient, au-delà de la question liée à la validité du refus opposé à la saisissante, sur la licéité du contrat de distribution sélective de Festina France au regard des règles communautaires et nationales applicables aux restrictions verticales.
66Ainsi, les engagements n’ont pas pour effet d’intégrer Bijourama [62], mais portent sur la création d’une clause prévoyant explicitement des conditions non discriminatoires pour un membre du réseau d’effectuer une distribution par Internet.
2.3 La procédure de non-contestation
67À ce jour, cette procédure est une particularité du droit français de la concurrence [63]. Elle permet une réduction de la sanction normalement encourue par l’entreprise si elle ne conteste pas les griefs notifiés et prend des engagements pour l’avenir [64]. La culpabilité est ici établie.
2.3.1 Face au Conseil de la concurrence
68Fidèle à l’esprit du texte, le Conseil fait application de la procédure de non-contesta-tion aussi bien aux affaires d’ententes (sept cas sur huit à ce jour) qu’à celles d’abus de position dominante, éventuellement collective. L’importance de l’affaire n’est pas une limite à son application – par exemple elle est possible en matière de marché public –, même si en matière d’entente la dernière décision en date fait part d’une réticence du Conseil à son application en cas d’entente horizontale [65].
2.3.1.1 Procédure
69L’entreprise doit renoncer à contester les griefs qui lui sont notifiés [66], et présenter au rapporteur général des engagements « substantiels, crédibles et vérifiables », mettant fin à la pratique. Le rapporteur général peut alors décider de proposer cette procédure au Conseil ainsi qu’un taux de réduction de la sanction.
70Le Conseil peut à cette occasion exiger que l’entreprise en prenne de nouveaux [67] afin de préciser les moyens qui seront mis en œuvre pour leur bonne réalisation. Certains exigent notamment de l’entreprise la communication par notes écrites adressées à l’ensemble du personnel que « la participation à une pratique anticoncurrentielle constitue une faute grave susceptible d’entraîner le licenciement de son auteur » [68].
71L’entreprise bénéficie alors d’une sanction réduite dont le calcul s’effectue en trois étapes. Tout d’abord, l’article L 464-2 alinéa III du code commerce prévoit que la « sanction maximum encourue est réduite de moitié » [69]. Le Conseil calcule ensuite la sanction qui aurait été appliquée sans la procédure de non-contestation, conformément aux règles de la procédure normale, supposant motivation, individualisation et proportionnalité. Enfin, un taux de réfaction (diminution du prix de la chose ou du service vendu) est décidé souverainement par le Conseil, entre 20 % et 90 % à ce jour [70].
72On notera qu’il ne peut être reproché au Conseil de ne pas avoir parfaitement suivi les propositions du rapporteur général quant au taux appliqué, ni de ne pas avoir engagé de débat contradictoire avec l’entreprise sur son niveau [71]. Cependant, un recours contre la réfaction est possible sur d’autres fondements.
73De même que pour la procédure d’engagements, en cas de violation avérée le Conseil a la possibilité d’imposer une amende ou des astreintes [72]. De plus, il est probable que le Conseil puisse rouvrir une affaire sachant que la législation ne lui permet pas a priori de revenir sur la réduction offerte. La surveillance effectuée par la DGCCRF citée pour la procédure d’engagements est valable également pour cette procédure [73].
2.3.1.2 Une procédure critiquée
74Les victimes semblent être négligées, car elles ne sont pas entendues, sauf si elles forment la partie plaignante. Bien que le Conseil n’ait pas vocation à régler les différends entre les parties, le contraire serait préférable, ne serait-ce que pour avoir conscience des conséquences réelles des engagements. Ce problème d’incertitude est inhérent aux procédures de négociation antitrust car l’entreprise n’a aucun intérêt à révéler toutes les informations qu’elle détient, sauf si l’on pense que le Conseil aura recours au monitoring de façon plus efficace que dans la procédure d’engagements [74].
75De plus, au niveau de l’entreprise, cette procédure offre peu de prévisibilité pour les entreprises du fait du « double guichet » qu’impose le principe de séparation des organes d’instruction et de décision. Cela nuit a priori à l’efficacité de la procédure en n’incitant pas les entreprises à supporter le coût des engagements si elles n’en sont pas sûrement récompensées.
76À cet effet, le Conseil a parfois recours à la procédure simplifiée qui pose un plafond de sanction en valeur absolue à 750 000 euros. Pour certains, il existerait une incompatibilité avec la procédure simplifiée quant à l’incitation pour l’entreprise à prendre des engagements sérieux. Le problème du cumul des procédures se pose quand la procédure simplifiée est décidée avant la notification [75] : lorsque 5 % du chiffre d’affaires de l’entreprise (sanction maximale avec la procédure de non-contestation) est supérieur au plafond de la procédure simplifiée, l’entreprise n’a pas intérêt à supporter le coût d’engagements « substantiels » pour l’avenir. Cependant, dans l’affaire des Pompes funèbres [76], suite à un avis demandé par la Cour d’appel de Paris, la Cour de cassation a validé ce cumul quel qu’en soit l’ordre chronologique dans deux arrêts rendus le 28 novembre 2006 [77].
77Le compromis entre négociation parfaite et sanction n’est pas évident du fait des exigences procédurales qu’impose la reconnaissance de culpabilité. On notera que M. Lasserre a annoncé la création d’un groupe de travail avec les membres spécialisés du barreau pour la réforme de cette procédure sous la forme de lignes directrices [78].
2.3.1.3 Quelques affaires
78Port autonome de Marseille (03-D-10)
79Des pratiques ont été constatées entre entreprises concurrentes lors d’un appel d’offres du port autonome de Marseille concernant l’entretien du réseau d’eau douce [79]. Trois entreprises candidates à l’exécution du marché public ont échangé des informations sur le montant de leurs offres avant leur transmission. Deux des trois entreprises, Guigues et SNEF, ont alors décidé de ne pas contester les griefs qui leur étaient notifiés, mais à cause du refus de la troisième, le Conseil a dû établir un rapport avant sa décision [80].
80Sur le calcul de la sanction de base, le Conseil a considéré que la pratique était particulièrement grave en ce qu’elle portait sur des travaux d’un service public indispensable à l’infrastructure concernée, et qu’elle émanait d’entreprises de dimension nationale.
81Au vu des engagements des sociétés Guigues et SNEF, leurs sanctions de base ont été réduites de moitié, conformément à la proposition du rapporteur général.
82Calculatrices à usage scolaire – 2003
83Dans cette affaire, le Conseil a sanctionné des ententes sur le marché des calculettes vendues par les sociétés Noblet (importateur de Casio) et Texas Instruments France (TI), entre elles et avec leurs distributeurs [81]. Les deux sociétés avaient mis en place des mécanismes pour obtenir des distributeurs le respect de prix établis par elles de façon concertée. En effet, Noblet et TI offraient des ristournes garanties a priori, qui étaient retirées si le distributeur les répercutait sur son prix de détail. Les deux entreprises avaient mis en place à cet effet une véritable politique d’observation des prix.
84Seules TI et la Société des distributeurs associés (SDA) n’ont pas contesté les griefs, mais une réduction de 20 % seulement a été accordée par le Conseil du fait de la gravité, de l’étendue et de la durée des pratiques [82]. La SDA, en sa qualité de centrale de référencement, s’est engagée à ne pas enregistrer les fournisseurs aux conditions de ventes anticoncurrentielles. TI s’est engagée à ne procéder à aucune concertation avec ses concurrents, et à modifier la structure des tarifs et conditions de ventes.
85La Poste – 2004
86L’affaire concernait la vente par correspondance des contrats commerciaux proposés par La Poste [83]. Il lui était reproché d’abuser de sa position dominante en accordant des remises commerciales fidélisantes prenant en compte l’ensemble des transactions avec les clients, sans distinguer selon l’origine de celles-ci, qu’elles proviennent d’un secteur d’activité où elle était en position dominante ou non. La conséquence immédiate de ces remises était une concentration des demandes des clients auprès de La Poste, freinant le processus d’ouverture du marché aux fournisseurs de l’acheminement.
87Bien que la pratique ait été appréciée comme d’autant plus grave qu’elle émanait d’un opérateur historiquement en monopole, le dommage à l’économie était moyen car la pratique avait vite été régularisée. Le montant de base de la sanction était déjà très faible en termes de chiffre d’affaires, et le Conseil a finalement accordé 90 % de réduction de l’amende du fait du caractère substantiel, crédible, et vérifiable des engagements.
2.3.2 Vers une transaction au niveau européen ?
88Pour cerner l’importance qu’aurait une telle évolution, il convient de préciser la politique de la Commission en matière d’amendes antitrust qui, depuis 1998, s’est assez nettement accentuée [84].
89Les nouvelles lignes directrices de 2006 ont établi une méthodologie proscrivant plus de proportionnalité mais toujours avec une différenciation selon la nature des pratiques visées [85]. Le calcul s’effectue en deux étapes commençant par la fixation d’un montant de base calculé comme une référence au chiffre d’affaires réalisé par l’entreprise sur le marché concerné [86], multiplié par le nombre d’années d’infraction. La Commission ajuste ensuite ce montant en fonction des circonstances aggravantes [87] ou atténuantes. De plus, la Commission précise qu’elle imposera un « ticket d’entrée » de 15 % à 25 % de la valeur des ventes pour les pratiques injustifiables (point 25), et se réserve la possibilité d’augmenter le montant de la sanction pour lui donner un caractère dissuasif (points 30 et 31).
90L’importance des sanctions effectivement appliquées est également à relier au fait que la Commission ne possède pas de pouvoir de poursuites individuelles, qu’il s’agisse d’amendes ou de peine d’emprisonnement, contrairement au système américain. Selon F. Arbault, « ceux qui commettent directement les infractions ne sont pas forcément les payeurs. Ces derniers (les actionnaires) peuvent donc avoir des difficultés à contrôler les agissements du management (…) La Commission doit nécessairement imposer des amendes importantes, afin qu’un effort réel de discipline soit déployé au sein des entreprises » [88].
91Au regard des modalités de calcul des amendes – à proportion prédéterminée en cas d’entente horizontale et avec ticket d’entrée –, un système de non-contes-tation pourrait s’avérer utile quand la Commission a l’intention de sanctionner les entreprises concernées, ne pouvant alors recourir à la procédure d’engagements. De même, si l’autorité veut sanctionner un niveau hiérarchique de l’entreprise, les engagements permettent une adaptation à l’organisation des entreprises [89]. Une telle procédure n’est d’ailleurs pas incompatible avec le droit communautaire puisque dans la fameuse décision de la Cour de justice Pâte de Bois [90], des engagements étaient annexés à la décision d’interdiction pour pratiques concertées justifiant une réduction de la sanction infligée.
92En ce sens, les lignes directrices de 2006 indiquent que la coopération effective de l’entreprise dans l’enquête peut justifier, à la discrétion de la Commission, une réduction de l’amende en tant que circonstance atténuante [91], mais sans aucune référence à d’éventuels engagements et surtout sans certitude a priori pour les entreprises.
3 INTERACTIONS DES NÉGOCIATIONS AVEC LES AUTRES RÈGLES DU DROIT
93Lorsque plusieurs pays membres ou non sont affectés par une pratique anticoncurrentielle, la question du traitement d’une même affaire par les différentes instances compétentes doit être posée tant elle est déterminante dans l’incitation des entreprises à négocier. De même, il semble que les interactions avec les recours privés, qui peuvent être encouragés par ces procédures, doivent être étudiées.
3.1 La communication des dossiers et le principe du ne bis in idem
3.1.1 Le principe du ne bis in idem
3.1.1.1 Signification et application dans les procédures négociées
94Le principe de ne bis in idem figure dans la Convention européenne des droits de l’homme [92] qui dispose que nul ne peut être poursuivi ou puni pénalement par les juridictions du même État, en raison d’une infraction pour laquelle il a déjà été acquitté ou condamné. La Charte des droits fondamentaux [93] a repris ce principe et l’a étendu aux jugements d’un autre État membre [94]. Cependant, le principe n’existe que pour les sanctions de nature pénale [95].
95Selon la Cour de justice des Communautés européennes (CJCE) [96], l’application du ne bis in idem est soumise à trois conditions : identité des faits, des auteurs, et des intérêts juridiques protégés. Selon la dernière condition, une entreprise sanctionnée aux États-Unis peut l’être dans l’Union [97].
96Dans le cadre des procédures négociées, une nette distinction est à faire dans l’application du principe ne bis in idem selon que la première décision émane de la Commission ou d’une autorité nationale. En effet, au sein du Réseau européen de la concurrence (REC), la Commission, en tant que gardienne des traités, est chargée en dernier ressort d’élaborer la politique et de veiller à l’application efficace et homogène du droit communautaire de la concurrence [98]. Bien que, selon l’article 23 paragraphe 5 du règlement communautaire n° 1/2003, aucune des sanctions de la Commission en matière antitrust n’ait de caractère pénal, il semblerait donc que l’assurance de ne pas être sanctionné une seconde fois par une autorité de la concurrence pourrait être donnée dans le cadre d’une procédure de clémence.
97En ce qui concerne la procédure de compromis-décision, il semble que le raisonnement n’est pas le même car l’autorité ne statue pas sur la matérialité de l’infraction et que les éléments habituels du contradictoire ne sont pas respectés. En ce sens, selon le point 13 du préambule du règlement communautaire n° 1/2003, la procédure de compromis-décision n’interdit pas les poursuites par une autorité nationale pour les mêmes faits, et ce même si les engagements sont respectés. Cependant, bien que la question n’ait pas été formellement abordée, les autorités des pays membres ne feront probablement pas de poursuites aux titres des articles 81 et 82 pour les mêmes pratiques [99]. Il reste que les spécificités nationales n’ayant pas été prises en compte par la Commission peuvent justifier des recours [100]. Leur mise en œuvre devra probablement être faite de manière proportionnée.
98Lorsque la première décision émane d’une autorité nationale, le principe de ne bis in idem ne semble pas s’appliquer. La question se pose d’autant plus lorsque l’autorité base ses sanctions sur le chiffre d’affaires mondial à l’instar du Conseil de la concurrence.
99On pourrait dès lors considérer une coordination des autorités nationales en vue de l’application du principe en question. Une telle affirmation n’est cependant pas encore possible, et ne le sera probablement pas plus du seul fait d’une incitation à la négociation, même au sein du REC qui repose sur une coopération active entre les autorités [101].
3.1.1.2 Vers un « guichet unique » pour la clémence dans le Réseau européen de la concurrence
100Au sein du Réseau européen de la concurrence, 19 autorités sur 25 disposent d’une procédure de clémence [102], et les entreprises ont intérêt à faire des demandes auprès de toutes les autorités qui peuvent être considérées comme bien placées pour agir contre l’infraction en question. Un traitement centralisé des demandes de clémence serait souhaitable selon Nelly Kroes, actuelle responsable de la Direction générale de la concurrence [103].
101C’est dans cet objectif affiché qu’a été rédigé le programme de clémence modèle du REC [104]. Bien que ce programme n’ait pas de valeur contraignante pour les autorités nationales, il reflète leur accord sur la nécessité de motiver l’entreprise à choisir la clémence par une harmonisation des règles et une plus grande sécurité juridique.
102Outre une structure et des conditions sensiblement identiques à la procédure devant le Conseil de la concurrence [105], il y est prévu un système de « demande sommaire » marquant une prise de contact avec les autorités pouvant être amenées à agir dans l’affaire. Cette demande sommaire peut être constituée du marqueur obtenu devant la Commission, et assure au minimum une période pour apporter les preuves qui pourraient être demandées par l’autorité nationale [106].
3.1.2 La non-communication des éléments du dossier
103Le problème de communication des éléments du dossier ne se pose que si le principe de ne bis in idem n’est pas en vigueur, c’est-à-dire pour une pratique concernant plusieurs pays dont au moins un pays membre mais n’ayant pas fait l’objet d’une décision de la Commission.
104La communication à d’autres autorités des éléments reçus dans le cadre des procédures négociées est par nature un frein à la décision de transiger pour l’entreprise [107]. En effet, si elle souhaite négocier, l’entreprise devra généralement apporter des éléments que l’autorité n’aurait pas forcément obtenus par une simple enquête [108].
105En matière de clémence, l’entreprise n’a pas de crainte à avoir au sein du REC car la communication relative à la coopération des autorités de la concurrence a prévu ce problème, et la circulation ne se fait qu’avec le consentement de l’entreprise [109].
106Cependant, on notera que le Tribunal de première instance des Communautés européennes a annulé en 2005, dans l’affaire, une décision de la Commission rejetant une demande d’accès au dossier administratif relatif à la décision concernant le cartel du « club Lombard » [110]. Le principe de non-communication n’est donc pas infaillible, notamment si un intérêt juridique autre vient le nuancer (en l’espèce les recours privés).
107Face aux autorités étrangères, la pratique est différente. Aux États-Unis, la Cour suprême dans son arrêt Empagran reconnaît la possibilité d’une application extraterritoriale du droit antitrust américain au profit des victimes non américaines apportant la preuve du lien de dépendance entre les effets anticoncurrentiels à l’étranger et aux États-Unis [111]. À cet effet, par la procédure d’open-discovery les autorités américaines peuvent exiger des juridictions internationales ou tribunaux étrangers le rapport de preuves contre l’entreprise [112]. Or dans l’arrêt Intel v. ADM du 21 juin 2004, la Cour suprême des États-Unis reconnaît la Direction générale concurrence de la Commission comme un tribunal. Un document localisé en Europe pourrait donc être réclamé.
108Pour contrecarrer ce problème, les autorités nationales et la Commission ont déjà pris des dispositions en vue d’une incommunicabilité des éléments provenant de la demande de clémence : en plus de la possibilité d’intervenir en tant qu’amicus curiae [113], qui n’est pas toujours suffisante, les éléments sont enregistrés vocalement ou sur l’acte de procédure [114].
3.2 Les recours privés
3.2.1 Les recours en dommages et intérêts
109Les consommateurs, clients ou concurrents d’une entreprise ont trois actions possibles si elle contrevient aux règles de la concurrence. En plus du dépôt de plainte devant le Conseil, la Commission ou la DGCCRF et la possibilité d’exercer des poursuites pénales contre les dirigeants (article L 420-6), les victimes peuvent poursuivre afin de percevoir des dommages et intérêts. Ces poursuites civiles doivent être exercées devant les tribunaux de commerce, dans les conditions du droit commun [115]. La loi elle-même ne saurait revenir sur le principe de réparation par le fautif dans ce troisième type d’action [116]. Les conséquences pour les procédures négociées de cette obligation varient donc selon que la culpabilité et la matérialité des faits sont ou non établis.
110Dans la procédure de clémence, la culpabilité du délateur sera établie pour les recours privés qui seront dès lors facilités, voire encouragés. À l’inverse du cas américain, le seul avantage obtenu face aux recours privés est que les éléments du dossier reçus ne pourront être utilisés contre l’entreprise qui dénonce [117]. Cependant, l’arrêt du TPICE de 2005 précité quant à la communicabilité des dossiers administratifs rappelle que la nécessité d’assurer la bonne fin des programmes de clémence ne saurait justifier d’empêcher celle des recours privés.
111Une solution pour accentuer l’incitation à dénoncer, mais souvent considérée comme utopique, serait de constituer un fonds d’indemnisation des victimes alimenté dans chaque affaire de clémence par les dommages et intérêts connexes à ceux de l’entreprise délatrice.
112En revanche, une telle solution ne serait pas valable dans le cadre d’une procédure négociée en matière de pratiques d’entreprise isolée. On notera à ce sujet que, selon maître Saint-Esteben, il est possible, après une procédure de non-contestation, de rediscuter la culpabilité dans le recours privé, sachant que la décision du Conseil ne s’impose pas au tribunal [118].
113Enfin, suite à la procédure d’engagements, bien que l’entreprise soit toujours considérée innocente, la publication des engagements représente un signal assez précis pour les agents privés de l’existence d’une infraction. Il est possible que les tribunaux judiciaires souhaitent adopter une position à l’avantage des requérants en reconnaissant un début de preuve dans les éléments de l’évaluation préliminaire [119]. Si l’enquête a duré longtemps, et que l’évaluation n’est plus réellement « préliminaire » comme dans l’affaire Coca-Cola, cette position sera prise en compte par l’entreprise voulant négocier.
3.2.2 Les recours d’encadrement des engagements
114L’encadrement par les tiers à la décision peut être un bon outil pour l’autorité pour compléter le monitoring, mais ce nouveau rapport n’est pas encore très clairement prévu, même après une décision de la Commission.
115La communication sur la coopération entre la Commission et les juridictions nationales pour l’application des articles 81 et 82 impose à ces dernières de recevoir le cas échéant les recours privés pour non-respect des engagements rendus obligatoires.
116Cependant, il existe un débat à un niveau plus général du droit, et une précision des juridictions serait nécessaire. La CJCE donne une réponse positive pour des injonctions ou mesures conservatoires lorsque le requérant justifie d’un intérêt à agir [120]. Dès lors, il est probable qu’une telle jurisprudence sera mise en œuvre en matière d’engagements, mais cela exigera du plaignant plus que le simple établissement du non-respect des engagements, surtout s’il s’agit d’un consommateur.
117Le private enforcement prend une nouvelle forme avec ces procédures négociées, mais son régime devrait probablement être simplifié pour assurer l’efficacité même de ces procédures.
4 CONCLUSION
118L’évolution du droit de la concurrence que nous avons étudiée reflète la volonté des autorités d’améliorer l’efficacité de leur intervention en prenant en compte les incitations des entreprises lorsque la dissuasion totale n’est pas possible. En ce sens, on a pu récemment constater que les niveaux (théorique et appliqué) des sanctions ont assez nettement augmenté, et une bonne coordination des procédures négociées est nécessaire car toute négociation devant une autorité de la concurrence se fait sous une pointe de menace.
119À ce sujet, la double casquette des autorités de la concurrence qui se munissent de pouvoirs d’intervention ex ante devrait permettre d’éviter le problème d’effet de cliquet, qui, notamment, dissuade les entreprises d’améliorer leurs performances [121]. Du fait du champ d’action étendu des autorités de la concurrence, il est probable que cet effet soit amoindri dans le cadre des procédures appelant des engagements.
120De l’expérience américaine on note, selon H. First [122], qu’il existerait un prix à supporter à s’orienter vers une organisation « bureaucratique » de la politique antitrust qui pourrait éloigner son application des problèmes réels de la concurrence [123]. De plus, la structure sous-jacente rend délicate la délimitation des règles applicables à une affaire, notamment à cause de l’opacité des procédures et publications, et donc de la valeur de précédent des décisions [124].
121Cependant, l’application européenne paraît beaucoup plus transparente et protectrice des différents intérêts en jeu, et surtout de la sécurité juridique des entreprises.
122L’analyse économique permettra d’étudier les implications de la coexistence des deux interventions, notamment lorsqu’une incertitude reste associée à la procédure. Il sera dès lors important de réfléchir à l’articulation en droit de la concurrence des outils de self-reporting et de plea-bargaining [125].
123Subject Descriptors (Econlit Classification System) : K 210, K 420, L 120, L 400.
Notes
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[1]
Université Paris 2 – ERMES, CREST – Laboratoire d’Économie industrielle, 28, rue des Saints-Pères, 75007 Paris. Je tiens à remercier Saïd Souam pour son aide précieuse ainsi qu’Élisabeth Bollène.
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[2]
Selon M. Weiner, « Antitrust and the Rise of the Regulatory Consent Decree », Antitrust, Fall 1995, p. 4.
-
[3]
En France, ces dernières sont jugées par une autorité distincte et sont insusceptibles d’être négociées car, selon la Cour de cassation, le plaider-coupable n’est pas conforme au droit pénal français dans la mesure où il repose sur une négociation à huis clos entre le procureur et l’accusé (Cass., 18 avril 2005, avis n 005-0004P, <http :// www. courdecassation. fr/ article326. html>).
-
[4]
Pour la procédure de clémence il n’est pas demandé d’engagements autres que celui de cesser l’infraction. Pour les deux autres procédures, les engagements ne sont pas renégociables à l’initiative des entreprises.
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[5]
Respectivement n° 2001-420 du 15 mai 2001, JORF, 16 mai 2001 et n° 2002-689 du 30 avril 2002, JORF, 3 mai 2002.
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[6]
Ordonnance n° 2004-1173 du 4 novembre 2004 portant adaptation de certaines dispositions du code de commerce au droit communautaire de la concurrence, JORF, 5 novembre 2004, page 18689.
-
[7]
Du 16 décembre 2002 et relatif à la mise en œuvre des règles de concurrence, JOCE, L 001,4 janvier 2003.
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[8]
Cet acte judiciaire par lequel le rapporteur livre son analyse du dossier marque l’entrée dans une procédure contradictoire et explique, nous le verrons, la marge de manœuvre de l’autorité quant au degré de réduction de sanction offert en cas de non-contestation.
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[9]
En partie depuis que la loi NRE pose un taux plafond de 10 % du chiffre d’affaires mondial, et non plus de 5% du chiffre d’affaires national.
-
[10]
L’arrêt de la Cour d’appel de Paris du 11 janvier 2005 (suite à la Cons. Conc. 13 mai 2004, décision n° 04-D-18, France Télécom) a doublé la sanction établie par le Conseil ((http :// www. minefi. gouv. fr/dgccrf/boccrf/05_06/a0060012.htm).
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[11]
Article L. 464-2 alinéa II, lettre a du code de commerce tel que modifié par l’ordonnance nº 2004-1173 du 4 novembre 2004.
-
[12]
Un tel recours est toujours possible sur le fondement de l’article L 464-8 du code de commerce. Selon cet article, les décisions du Conseil de la concurrence (hors mesures conservatoires) sont notifiées aux parties en cause et au ministre chargé de l’économie, qui peuvent, dans le délai d’un mois, introduire un recours en annulation ou en réformation devant la Cour d’appel de Paris.
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[13]
Décision de la Commission du 21 novembre 2001, Vitamines, COMP/E-1/37.512, JOCE, L6,10 janvier 2003.
-
[14]
Intervention de Mme Behar-Touchais, membre du Conseil de la concurrence, lors de l’atelier n° 4 de l’Association française des juristes d’entreprise du 14 avril 2005, intitulé « Des enquêtes de concurrence aux programmes de clémence, d’engagements et de transaction en droit communautaire et interne », <http :// www. afje. org/ ateliers/ 2005/ Atelier4. pdf>.
-
[15]
Commission européenne, « Communication sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant dans les affaires portant sur des ententes », JOUE, C 298/11,8 décembre 2006.
-
[16]
Voir Van Barlingen et Barennes, « The European Commission’s 2002 Leniency Notice in Practice », Competition Policy Newsletter, n° 3, Autumn 2005 ; MEMO/06/470 du 7 décembre 2006 sous <http ://europa.eu/rapid/searchAction.do>.
-
[17]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, points 8-a et 10.
-
[18]
Ibid., point 8-b.
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[19]
Ibid., points 23 et 24. La notion de « valeur ajoutée » est précisée au point 25 (en fonction notamment du degré de corroboration nécessaire).
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[20]
La Commission aurait reçu environ 80 demandes de réduction de sanction au titre de cette procédure selon Van Barlingen et Barennes, « The European Commission’s 2002 Leniency Notice in Practice », op. cit.
-
[21]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, point 26, selon lequel les éléments rapportés ne seront pas pris en compte dans l’amende infligée à l’entreprise qui les a fournis.
-
[22]
Ibid., la Commission a introduit au point 9 une liste des éléments facilitant l’obtention de l’immunité du fait que la moitié des demandes se sont vues refuser l’avis conditionnel.
-
[23]
La Commission a indiqué avoir annulé l’avis conditionnel d’immunité dans la décision Raw Tabacco Italy du 20 octobre 2005 (COMP/C.38.281/B.2) après que l’entreprise ait révélé à ses principaux concurrents son bénéfice de la clémence, avant même que la Commission ne puisse mener des inspections surprises. Dans un tel cas, l’entreprise récupère de plein droit son pouvoir de contradiction.
-
[24]
On peut voir ici, sous une forme atténuée, un rapprochement du régime américain où il n’est pas demandé à l’entreprise d’interrompre sa participation au cartel, mais bien au contraire de faciliter autant que possible la constitution d’un flagrant délit.
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[25]
MEMO/06/469 du 7 décembre 2006 sous <http ://europa.eu/rapid/searchAction.do>.
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[26]
Communication de la Commission du 8 décembre 2006, point 14.
-
[27]
Intervention de M. Lasserre, président du Conseil de la concurrence, le 21 avril 2005 à la Grande chambre de la Cour de cassation au cours de l’Association générale de l’AFEC, <http :// www. conseil-concurrence.fr/doc/intervention_lasserre_2006_12_01_afec.pdf>.
-
[28]
Cons. Conc., décision n° 06-D-09 du 11 avril 2006, dans le secteur de la fabrication de portes planes et isoplanes et des portes laquées.
-
[29]
http :// www. conseil-concurrence. fr/ doc/ cpro_clemence. pdf.
-
[30]
Cette exemption de sanctions pénales qui peut en résulter correspond à la pratique du DOJ établie depuis la Corporate Leniency Policy du 10 août 1993, <http :// www. usdoj. gov/ atr/ public/ guidelines/ lencorp. htm>. En 2004, le régime américain a également établi une immunité partielle dans les recours privés (impliquant les fameux dommages au triple) en offrant à l’entreprise le de-trebbling (The Antitrust Criminal Penalty and Reform Act, Public Law 108-237 § 215).
-
[31]
Le Conseil de la concurrence considère que le domaine en est restreint aux affaires peu graves et peu anciennes. La Commission l’applique à des affaires parfois anciennes, mais dont l’atteinte à l’ordre public économique ne justifie pas le prononcé de sanctions pécuniaires (excluant davantage les affaires particulièrement graves). Aux États-Unis, le DOJ l’applique sans restriction particulière.
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[32]
Du 6 février 1962, JOCE, 13,21 février 1962, abrogé par le règlement communautaire n° 1/2003.
-
[33]
Essentiellement utilisés dans des affaires d’abus de position dominante. Voir par exemple IBM (1984) rapport XIV, Alhstrom (1988) ECR 5193, Irish Distiller Group (1988) rapp. XVIII, United International Pictures (1989) rapp. XXIX, Coca-Cola (1989) rapp. XIX, Microsoft I (1994) rapp. XXIV, IR Nielsen (1996) rapp. XXVI, Swift (1997), Digital (1997) rapp. XXVI, ITT/Belgacom (1998) rapp. XXVII, etc.
-
[34]
Selon T. Picot, « La nouvelle procédure d’engagements : un settlement à la française en matière de concurrence ? », Revue Lamy de la Concurrence, 2005, n° 1, pp. 142-144.
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[35]
L’article 2 du règlement n° 773/2004 du 7 avril 2004, JOCE, L123,2004, précise que cette possibilité d’engagements par l’entreprise devient impossible à partir de la communication des griefs qui marque une ouverture de procédure d’interdiction. Cependant, la Commission considère parfois que la communication des griefs peut constituer cette évaluation préliminaire.
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[36]
En particulier, les associations et les organisations de consommateurs ont la possibilité de faire connaître à la Commission leurs observations sur le modèle commercial proposé.
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[37]
Faisant référence à la communication relative à la notification préalable d’une entreprise commune : affaire 34.281, Carlsberg-Tetley, JOCE, C 97,16 avril 1992, p. 21.
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[38]
Une telle publication n’aurait concerné que 5 % des affaires.
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[39]
Article 9 alinéa 4 du règlement du Conseil n° 1/2003.
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[40]
Le Tribunal de première instance a approuvé cette pratique pour la première fois dans TPICE, 18 septembre 1992, Automec / Commission, Aff. T-24/90, Rec., II, p. 2223. Le règlement du Conseil n° 1/2003 a confirmé cette possibilité.
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[41]
Décision de la Commission du 19 janvier 2005, Vente combinée des droits médiatiques sur le championnat allemand de football, Bundesliga, COMP/C-2/37.214. Voir également la décision assez similaire du 22 mars 2006, COMP/38.173, The Football Association Premier League Limited (FAPL).
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[42]
Aucune disposition ne limite le champ de la procédure d’engagements à cette obligation abrogée par le règlement du Conseil n° 1/2003, mais la majorité des décisions de commitments a débuté dans son cadre.
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[43]
Voir également, pour des applications en matière d’infraction à l’article 81, les affaires des éditeurs de musique et des sociétés de gestion collective (décision du 4 octobre 2006, Cannes Agreement, COMP/38.681, IP/06/1311) et des compagnies aériennes (décision du 22 septembre 2005, Austrian Airlines + Scandinavian Airline System et Australian, COMP/37.749).
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[44]
Décision du 22 juin 2005, The Coca-Cola Company, COMP/39.116.
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[45]
Débutée au cours de l’année 1999, mais dont l’ouverture formelle date de septembre 2004.
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[46]
Dans la décision du 12 avril 2006, REPSOL C.P.P. SA – Distribution de Carburants et Combustibles, COMP/38.348, la Commission a indiqué que l’amende serait alors imposée sans qu’elle n’ait à prouver l’existence d’un quelconque agissement – malgré l’absence de culpabilité établie – mais pas automatiquement à 10 %. La pratique sera probablement proche de la seconde solution.
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[47]
Décision du 22 février 2006, ALROSA + DBCAG (part of de Beers group) + City and West East (part of de Beers group), COMP/38.381.
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[48]
MEMO/06/90 du 22 février 2006 « Competition : De Beers’commitment to phase out rough diamond purchases from ALROSA ».
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[49]
Lorsque le Conseil est saisi d’une demande de mesures conservatoires, l’évaluation préliminaire est constituée par un rapport oral en séance (article 9 du décret 2005-1668 du 27 décembre 2005, JORF, du 29 décembre). Dans un tel cas, selon M. Dahan, rapporteur général du Conseil, c’est généralement l’entreprise qui sollicite le bénéfice des engagements (séminaire du 8 décembre 2006 à la Maison du barreau, intitulé « Pratiques anticoncurrentielles : politique de sanction et gestion du risque », <http :// www. cercle-montesquieu. fr/ public/ Actualites>).
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[50]
On notera que le DOJ dispose d’un pouvoir exclusif de rompre les négociations à la suite du Tunney Act (15 U.S.C. § 16). Le DOJ a parfois utilisé ce pouvoir pour contraindre les entreprises, mais les signaux du DOJ avant l’entrée dans les négociations sont souvent assez précis. Voir Branfman, « Antitrust Consent Decrees : A Review and Evaluation of the First Seven Years Under the Antitrust Procedures and Penalties Act », 27 Antitrust Bulletin, 1982, p. 303.
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[51]
Cons. Conc., 26 avril 2005, décision n° 05-D-16 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des auteurs et compositeurs dramatiques (SACD). La Commission dispose en ce sens d’une plus grande latitude dans les négociations, puisque le MEMO/06/163 « Competition : Commission increases competition in Spanish service station market » en anglais précise que l’engagement de Repsol (affaire précitée note 46) de laisser les stations-services de son réseau entièrement libres de proposer des réductions sur les prix de vente au détail était obligatoire alors même que la question n’était pas abordée avant dans le cadre de cette procédure.
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[52]
Cons. Conc., 17 mars 2005, décision n° 05-D-12 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de la mesure d’audience dans le secteur de la presse quotidienne nationale et sur le marché connexe de la publicité dans ce secteur (décision EUROPQN présentée plus loin).
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[53]
Décision de classement dans l’affaire France Télécom concernant l’utilisation des dénominations « Numéro vert », « Numéro Azur » et « Numéro Indigo » (communiqué de procédure du 18 janvier 2006, <http :// www. conseil-concurrence. fr/ user/ standard. php ? id_rub= 184&id_article= 514>).
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[54]
Intervention de M. Cerutti, directeur de la DGCCRF, à la journée d’étude du 6 avril 2005 à l’Université René Descartes, intitulée « À l’heure de la modernisation du droit communautaire de la concurrence, faut-il repenser le système français de régulation de la concurrence ? ».
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[55]
B. Lasserre, « La politique des engagements en matière de pratiques anticoncurrentielles : premiers pas et premier bilan en France », contribution à la 32e conférence International Antitrust Law and Policy, à l’Université de Fordham, hhttp :// www. conseil-concurrence. fr/ doc/ engagements_lasserre_ fordham.pdf.
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[56]
Le Conseil de la concurrence regroupe l’ensemble des décisions d’engagements sur son site internet.
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[57]
Cons. Conc., 17 mars 2005, décision n° 05-D-12 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché de la mesure d’audience dans le secteur de la presse quotidienne nationale et sur le marché connexe de la publicité dans ce secteur. Voir également les affaires AudiPress (Cons. Conc., 20 décembre 2006, décision n° 06-D-40 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la presse magazine) et GIE Les Indépendants (Cons. Conc., 6 octobre 2006, décision n° 06-D-29 relative à des pratiques mises en œuvre par le GIE Les Indépendants dans le secteur de la publicité radiophonique).
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[58]
Bien qu’il soit fait expressément référence à cette infraction dans le communiqué de procédure du 1er février 2005, <http :// www. conseil-concurrence. fr/ user/ standard. php ? id_rub= 149&id_article= 369>,il semble clair que le Conseil ne souhaite pas à ce jour faire application de la procédure d’engagements aux cas d’ententes ; c’est EUROPQN qui est visé par la décision.
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[59]
Cons. Conc., 7 février 2006, décision n° 06-D-01 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des Nouvelles Messageries de Presse Parisienne (NMPP).
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[60]
Voir en ce sens les affaires des Haras nationaux (Cons. Conc., 16 juin 2005, décision n° 05-D-29 relative à des pratiques mises en œuvre par « Les Haras nationaux » sur le marché de la reproduction équine) et SACD (Cons. Conc., 26 avril 2005, décision n° 05-D-16 relative à des pratiques mises en œuvre par la société des auteurs et compositeurs dramatiques).
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[61]
Cons. Conc., 24 juillet 2006, décision n° 06-D-24 relative à la distribution des montres commercialisées par Festina France. Voir également en matière de distribution les affaires Bose – Focal JM Lab – Triangle (Cons. Conc., 5 octobre 2006, décision n° 06-D-28 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur de la distribution sélective de matériels Hi-fi et Home cinéma), Sirona Dental Systems (test de marché – engagement – du 22 mai 2006 : distribution d’équipements et matériels dentaires) et Produits cosmétiques et d’hygiène corporelle (test de marché – engagement, 14 novembre 2006).
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[62]
La jurisprudence du Conseil pose assez nettement le principe selon lequel la procédure d’engagements n’est pas la chose des plaignants. À ce sujet, dans l’affaire du GIE Les Indépendants, la Cour d’appel de Paris sera bientôt amenée à statuer sur la validité d’une telle pratique du Conseil.
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[63]
Elle est parfois utilisée par d’autres autorités mais n’est pas réglementée et peut être vue comme une combinaison de types de décisions plus habituelles.
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[64]
Ils sont de même nature que ceux de la procédure d’engagements de l’alinéa I de l’article L464-2 du code de commerce, et peuvent ainsi être comportementaux ou structurels.
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[65]
La décision 07-D-02 pourrait donc annoncer un revirement de jurisprudence (Cons. Conc., 23 janvier 2007, décision n° 07-D-02 relative à des pratiques ayant affecté l’attribution de marchés publics et privés dans le secteur de l’élimination des déchets en Seine-Maritime). Voir également les décisions 04-D-30 (Cons. Conc., 7 juillet 2004, décision n° 04-D-30 relative à des marchés publics de transport scolaire en Haute-Corse) et 04-D-42 (Cons. Conc., 4 août 2004, décision n° 04-D-42 relative à des pratiques mises en œuvre dans le cadre du marché de la restauration de la flèche de la cathédrale de Tréguier) et surtout 03-D-45 (Cons. Conc., 25 septembre 2003, décision n° 03-D-45 relative aux pratiques mises en œuvre dans le secteur des calculatrices à usage scolaire), présentées plus loin. En tout cas, le revirement a eu lieu dans une affaire au dommage à l’économie très important.
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[66]
Elle ne peut contester la réalité, la qualification et l’imputabilité de griefs, mais peut contester, en application du principe du contradictoire, la gravité ou le dommage à l’économie qu’on leur prête.
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[67]
Si l’entreprise les refuse, la procédure reprend à la notification avec présomption d’innocence, car la non-contestation ne vaut pas aveu.
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[68]
Décisions 03-D-10 (Cons. Conc., 20 février 2003, décision relative à des pratiques constatées lors d’un appel d’offres lancé par le Port autonome de Marseille), 04-D-30 (Cons. Conc., 7 juillet 2004, précitée), 04-D-42 (Cons. Conc., 4 août 2004, précitée).
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[69]
Le Conseil et la Cour d’appel de Paris appliquent cette réduction à l’assiette maximale de la sanction qui passe donc de 10 à 5 % du chiffre d’affaires mondial du dernier exercice ou de 3 millions d’euros à 1,5 pour une personne physique.
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[70]
Selon la Cour de cassation, cette incertitude est juridiquement justifiable mais rend impropre la qualification de « transaction » à la procédure de non-contestation (Cass., 11 juillet 2005, avis, n° 0050006P).
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[71]
Tant que le débat l’a été sur les engagements et sur le montant de base (Cour d’appel de Paris, 1re chambre, 9 novembre 2004, arrêt relatif au recours formé par la SA SEE Camille Bayol et autres contre la décision n° 04-D-08 du Conseil de la concurrence en date du 30 avril 2004, relative au marché de travaux d’assainissement de la commune de Pontacq).
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[72]
Articles L 464-3 et L 463-2-II du code de commerce.
-
[73]
On notera en plus que la DGCCRF, dans le cadre de son activité d’enquête, peut proposer, sous contrôle des autorités juridictionnelles, un règlement transactionnel aux auteurs de contraventions aux règles du code de commerce depuis la loi n° 2004-1343 du 9 décembre 2004 de simplification du droit (article 83). Il s’agit en fait d’un pouvoir qui avait été supprimé en 1986 : la transaction pénale consistait en un paiement d’une somme au Trésor public, accompagnée éventuellement de certaines obligations. À ce jour, aucune application ne semble en avoir été faite.
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[74]
La reconnaissance de culpabilité ne semble pas accentuer le degré d’encadrement de l’entreprise sur ces engagements, mais l’enquête a été à son terme, et les déterminants de la violation seront probablement plus clairement dégagés.
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[75]
Contrairement cependant à ce que prévoit l’article L 463-3 du code de commerce.
-
[76]
Cons. Conc., 27 juillet 2004, décision n° 04-D-37 relative à des pratiques mises en œuvre sur le marché des pompes funèbres dans le Val-de-Marne.
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[77]
Avis n° 05-00006 du 11 juillet 2005, hhttp :// www. courdecassation. fr/ jurisprudence_publications_documentation_2/ avis_15/ classes_par_239/ et Com., 28 novembre 2006, Bull., IV, 2006, n° 235, p. 258. Peut-être simplement parce que in fine le Conseil a la possibilité d’envoyer un signal fiable à l’entreprise que la procédure simplifiée sera utilisée si les engagements s’avèrent signifiants.
-
[78]
Selon M. Dahan (séminaire précité).
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[79]
Voir également les affaires des Marchés publics de transport scolaire en Haute-Corse (04-D-30, précitée) et de la restauration de la flèche (04-D-42, précitée).
-
[80]
Il s’agit d’un document juridique qui doit contenir les réponses du rapporteur aux observations des parties sur la notification et y joindre les pièces sur lesquelles il s’appuie dans l’affaire.
-
[81]
Cons. Conc., 25 septembre 2003, décision n° 03-D-45, pratiques mises en œuvre dans le secteur des calculatrices à usage scolaire. Voir également, assez similaire, Cons. Conc., 19 décembre 2005, décision n° 05-D-70 relative à des pratiques mises en œuvre dans le secteur des vidéocassettes préenregistrées.
-
[82]
Les pratiques mises en œuvre ont été considérées d’autant plus graves que les deux entreprises détenaient 89 % du marché et qu’elles prenaient effet entre des distributeurs se présentant comme des enseignes aux politiques de prix agressives (les hypermarchés). Il semble que le Conseil considère désormais la nature des engagements pour le degré de réfaction.
-
[83]
Cons. Conc., 30 novembre 2004, décision n° 04-D-65 relative à des pratiques mises en œuvre par La Poste dans le cadre de son contrat commercial.
-
[84]
Cette accentuation concerne aussi bien le montant théorique maximum des amendes qui est désormais de 10 % du chiffre d’affaires (au lieu de 5 %), que la pratique. Voir F. Arbault, « La politique de la Commission en matière d’amendes antitrust : récents développements, perspectives d’avenir », Competition Policy Newsletter, Summer 2003, n° 2, pp. 1-7.
-
[85]
Lignes directrices pour le calcul des amendes infligées en application de l’article 23 § 2 du règlement du Conseil n° 1/2003.
-
[86]
Il ne peut excéder 30 % de la valeur des ventes et, en cas d’entente horizontale, son calcul doit prendre en compte la gravité de l’infraction – « généralement retenue en haut de l’échelle ».
-
[87]
Parmi lesquelles la récidive qui peut faire doubler le montant de base, même si la décision précédente provient d’une autorité nationale.
-
[88]
F. Arbault, « La politique de la Commission en matière d’amendes antitrust… », op. cit.
-
[89]
On peut comprendre en ce sens les engagements imposés par le Conseil de la concurrence d’informer les employés des sanctions possibles.
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[90]
CJCE, 27 septembre 1988, Ahlström Osakeyhtio v. Commission, Aff. jointes C-89/85,104/85, 114/85,116/85,125 à 129/85, Rec., p. 5193 (Pâte de bois I).
-
[91]
Voir l’affaire Raw Tabacco Italy précitée pour une application après le rejet d’une demande de clémence.
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[92]
Article 4 du protocole n° 7 à la Charte.
-
[93]
Article 50, JOCE, C310,16 décembre 2004, qui n’a pas de valeur contraignante.
-
[94]
Voir, pour les procédures normales, Paulis et Gauer, « Le règlement n° 1/2003 et le principe du ne bis in idem », Concurrences, 2005, <http :// www. concurrences. com/ IMG/ pdf/ Article_Gauer-Paulis. pdf>.
-
[95]
CEDH, Oztürk c. RFA, 21 février 1984,8544/79.
-
[96]
CJCE, 7 janvier 2004, Italcementi – Fabbriche Riunite Cemento / Commission, Aff-C-213/00, Rec., 2004, p. I-123.
-
[97]
Voir les décisions de la CJCE, 14 décembre 1972, Boehringer Mannheim / Commission, Aff. 7/72, Rec., p. 1281 et Buchler & Co. / Commission, Aff. 44/69, Rec., 1970, p. 733.
-
[98]
Point 43 de la Communication de la Commission du 27 avril 2004 relative à la coopération au sein du réseau des autorités de concurrence, JOUE, C101,27 avril 2004, p. 43. De même, l’article 16(2) du règlement du Conseil 1/2003 dispose que les autorités nationales ne peuvent prendre de décisions qui iraient à l’encontre de la décision adoptée par la Commission.
-
[99]
Selon l’article 5 du règlement du Conseil n° 1/2003, les autorités de la concurrence des pays membres sont compétentes pour appliquer les articles 81 et 82 du traité quand les pratiques sont susceptibles d’affecter plusieurs États membres. À ce titre, une telle autorité peut interdire un contrat ou décider d’une sanction.
-
[100]
Particulièrement en matière d’abus de position dominante pour laquelle l’article 3 du règlement du Conseil n° 1/2003 accorde une faculté d’adopter des lois nationales plus strictes.
-
[101]
Voir en ce sens le MEMO/06/356 du 29 septembre 2006, « Competition : Commission proposes changes to the Leniency Notice », dans lequel la Commission indique que la reconnaissance mutuelle des décisions des autorités nationales du REC reste à ce jour irréaliste, même en matière de clémence.
-
[102]
<http ://europa.eu.int/comm/competition/antitrust/legislation/authorities_with_leniency_programme.pdf>.
-
[103]
Discours prononcé à Bruxelles le 7 avril 2005.
-
[104]
<http ://ec.europa.eu/comm/competition/ecn/model_leniency_fr.pdf>.
-
[105]
Avec une réduction à 50 % maximum pour les entreprises n’étant pas première. La seule différence notable entre les autorités nationales concernées est celle concernant l’Allemagne et la Grèce refusant la clémence au « leader » de l’entente.
-
[106]
Une telle coopération serait nécessaire en matière de procédure d’engagements car les signaux émis par une telle procédure peuvent avertir d’autres autorités.
-
[107]
Dans la procédure d’engagements, aucun dossier n’est constitué au sens habituel.
-
[108]
Dans la procédure de non-contestation où de tels éléments proviennent tous de l’enquête, la communication est effectuée normalement.
-
[109]
Sauf si une procédure de clémence a été formulée auprès de la destinataire ou que celle-ci s’engage par écrit à ne pas sanctionner l’entreprise (points 37 à 42 de la communication du 27 avril 2004 précitée et réaffirmé dans le programme modèle du REC en matière de clémence <http ://ec.europa. eu/comm/competition/ecn/model_leniency_fr.pdf>).
-
[110]
TPICE, 13 avril 2005, Verein für Konsumenteninformation / Commission, Aff. T-2/03, Rec., p. II-1121. En l’espèce, l’absence de contestation des faits avait réduit la charge de travail de la Commission et justifiait une réduction de l’amende de 10 % et une non-communication des dossiers.
-
[111]
Cour suprême des États-Unis, 14 juin 2004, F. Hoffmann-La Roche Ltd et al. v. Empagran SA, (03-724) 542 U.S. 155 (2004) 315 F.3d 338. Un client européen peut poursuivre une entreprise européenne située aux États-Unis pour des dommages et intérêts au triple en raison d’un préjudice entièrement subi en Europe à condition que l’entente soit reliée aux ventes du produit visé aux États-Unis. Voir Souty, « La Cour suprême des États-Unis et les pratiques anticoncurrentielles mondiales : réflexions sur les arrêts Empagram et Intel v. AMD », Les petites affiches, n° 189,2004, p. 13.
-
[112]
Section 1782a), 28 USC, Assistance to foreign and international tribunals and to litigants before such tribunals.
-
[113]
Personne qu’une juridiction peut entendre sans formalité dans le but de rechercher des éléments propres à faciliter son information. L’amicus curiae n’est ni un témoin ni un expert.
-
[114]
Paragraphes 28 à 30 du programme modèle du REC en matière de clémence, précité, paragraphes 32 à 34 de la communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant de 2006, précitée, et 21 du communiqué de procédure du Conseil de la concurrence relatif au programme de clémence français, <http :// www. conseilconcurrence. fr/ doc/ cproclemence17avril2007. pdf>.
-
[115]
Selon l’article 45 de la loi n° 73-1193 du 27 décembre 1973 dite Royer d’orientation du commerce et de l’artisanat.
-
[116]
Le Conseil constitutionnel rappelle cette exigence dans la décision du 23 juillet 1999, n° 99-416 DC, loi portant création d’une couverture maladie universelle.
-
[117]
Communication de la Commission sur l’immunité d’amendes et la réduction de leur montant de 2006, précitée, points 32 à 34 et point 47 des notes explicatives du programme modèle du REC en matière de clémence, précité. Le DOJ assure au délateur d’une part le de-trebling (non plus le paiement des « triples dommages », mais seulement celui relatif aux dommages simples) et d’autre part la non-solidarité du paiement avec les autres membres du cartel.
-
[118]
Conférence du 17 octobre 2005 à la Grande chambre de la Cour de cassation, « La réparation du préjudice causé par une pratique anticoncurrentielle en France et à l’étranger : bilan et perspectives ».
-
[119]
Dans la décision CJCE, 20 septembre 2001, Courage et Crehan, Aff. C-453/99, Rec., p. I-6297, la Cour donne la possibilité de recourir à une décision communautaire dans les recours privés. Aux États-Unis, un consent decree ou judgement ne saurait constituer un commencement de preuve contre l’entreprise s’il est entériné avant que la procédure contentieuse n’ait commencé (15 U.S.C § 16-a : avant que les premiers témoignages n’aient été enregistrés).
-
[120]
CJCE, 6 octobre 1970, Grad / Finanzamt Traunstein, Aff. C-9/70, Rec., p. 825.
-
[121]
Il s’agit du comportement des autorités de régulation qui cherchent parfois à récupérer les gains d’efficacité des entreprises en modifiant régulièrement leurs exigences. Voir notamment Perrot, « Les frontières entre régulation sectorielle et politique de la concurrence », Revue française d’économie, n° 4/vol. XVI, 2002, pp. 81-112.
-
[122]
H. First, « Is Antitrust Law ? », Antitrust, Fall 1995, p. 9.
-
[123]
La tentation serait grande pour le DOJ d’édicter des règlements internes définissant des perspectives politiques, changeantes par définition. Voir à ce sujet l’étude empirique de Wood and Anderson, « The Politics of U.S. Antitrust Regulation », American Journal of Political Science, 37,1991, pp. 1-39 ; et pour un exemple d’affaire négociée, voir l’évolution du cas United States v. Microsoft (décision du DOJ du 1er novembre 2002).
-
[124]
Kovacic, « Downsizing Antitrust : is it Time to end Dual Federal Enforcement ? », Antitrust Bulletin, n° 41,1996, pp. 505-520.
-
[125]
Le plea-bargaining se rapportant à l’opération de négociation une fois l’enquête commencée, se-rait-il intéressant d’introduire un mécanisme d’autodénonciation, avant enquête, pour les pratiques d’entreprises isolées ? Ou encore, l’extension des engagements aux affaires d’ententes, éventuellement autres que celles portant directement sur les prix, serait-elle efficace en France ?