Notes
-
[*]
Université de Lorraine/SAPRAT (EA 4116, EPHE) Cet article a été largement écrit lors d’un séjour de recherche à l’invitation du Centre de recherches sur le Moyen Âge et la Renaissance de l’université de Munich, dirigé par Claudia Märtl, que je remercie, ainsi que les collaborateurs du Centre pour ce précieux soutien.
-
[1]
Eberhard Isenmann, « Ratsliteratur und städtische Ratsordnungen des späten Mittelalters und der frühen Neuzeit », dans Pierre Monnet, Otto-Gerhard Oexle (Hg.), Stadt und Recht im Mittelalter, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht (Veröffentlichungen des Max-Planck-Instituts für Geschichte 174), 2003, p. 215-421 , résumé plus qu’analyse de nombreux traités ; Heike Bierschwale, Jacqueline van Leeuwen, Wie man eine Stadt regieren soll. Deutsche und niederländische Stadtregimentslehren des Mittelalters, Frankfurt am Main, Lang (Kultureller Wandel vom Mittelalter zur frühen Neuzeit 8), 2005, concentré sur leur analyse littéraire.
-
[2]
« Bien commun et bon gouvernement : le traité politique de Johann von Soest sur la manière de bien gouverner une ville (Wye men eyn statt regyrn soll, 1495) », dans Élodie Lecuppre-Desjardins, Anne-Laure van Bruaene (sous la direction de), De bono communi. Discours et pratiques du Bien Commun dans les villes d’Europe (XIIIe au XVe siècle), Turnhout, Brepols, 2010, p. 89-106.
-
[3]
Heinrich von Rang, hg. von Kurt Gärtner, « Das Stadtratgedicht Heinrichs von Rang », Aalener Jahrbuch, 1978, p. 45-74.
-
[4]
Ibidem, v. 79-80 : « ainer stat nutz und fromen, / ist das er will zu eren komen und iren schaden wenden ».
-
[5]
Ibid., v. 1 .
-
[6]
Ratsgedichte, hg. von Herbert Wolf, Berlin, E. Schmidt (Texte des späten Mittelalters und der frühen Neuzeit 25), 1971 (cité ci-après Rothe RG). Son œuvre protéiforme (chroniques, traités juridiques, poèmes religieux, traités didactiques en vers) qui défie l’esprit de synthèse n’a pas encore suscité de vision d’ensemble, malgré de nombreuses éditions et études de détail.
-
[7]
Düringische Chronik des Johann Rothe, hg. von Rochus von Liliencron, Jena, Frommann (Thüringische Geschichtsquellen 3), 1859, §. 736, p. 637. Rothe RG n’évoque jamais directement les événements, mais ils apparaissent par exemple p. 88. Il y évoque le cas de conseillers occupés à piller en s’attirant les bonnes grâces du prince à force de pots-de-vin – ce qui montre d’ailleurs qu’il peut exister des intérêts communs entre le pouvoir seigneurial et les contestataires.
-
[8]
Rothe RG, p. 59 : « Yn glicher wyß daz den stet, / Also der vff dem heubt get, / Dem vorkeret sich mach, leber vnd lungen » (« De la même façon que ce qui arrive à celui qui marche sur la tête, qui en a l’estomac, le foie et les poumons retournés »).
-
[9]
Friedrich Ortloff, Sammlung deutscher Rechstquellen, t. 2 : Das Rechtsbuch Johannes Purgoldts nebst statuarischen Rechten von Gotha und Eisenach, Jena, Frommann, 1860 [cité ci-après Rothe], surtout livres IX et X, p. 257-316.
-
[10]
Hans-Jörg Leuchte, Das Liegnitzer Stadtrechtsbuch des Nikolaus Wurm. Hintergrund, Überlieferung und Edition eines schlesischen Rechtsdenkmals, Sigmaringen, Thorbecke (Quellen und Darstellungen zur schlesischen Geschichte 25), 1990 [cité ci-après Wurm].
-
[11]
Rothe, p. 271-272.
-
[12]
Rothe, p. 273 : « nach der gelegenheyt der sthete undt auch der zceyt ».
-
[13]
Rothe, p. 272 : « das leczte geseccze wyderruffet das forderste ».
-
[14]
Rothe, p. 272.
-
[15]
Rothe, p. 288-289 : « dye rechtbücher machen dye radtslewthe snell eyne » ; voir aussi le bref développement sur les activités et les qualités du secrétaire municipal, en guise d’autoportrait déguisé, p. 317.
-
[16]
Rothe, p. 270.
-
[17]
Rothe, p. 271-272.
-
[18]
Rothe, p. 288.
-
[19]
Rothe, p. 306-307.
-
[20]
Rothe, p. 260-261 , d’après Exode 15-16.
-
[21]
De fait, les Conseils urbains patriciens produisent fréquemment des dispositions correspondant à ce que dit Rothe. Voir pour Nuremberg les textes publiés dans Eberhard Isenmann, « Ratsliteratur... », op. cit., p. 460-479, datant de 1461 à 1515.
-
[22]
Rothe, p. 263 : « umb deswyllen das dy handtwerge mit deme radt allezceydt eyntrechttig bleyben ».
-
[23]
Rothe, p. 273-274, p. 294.
-
[24]
Rothe, p. 313 : « Dye fünffte, wanne dye amptleuthe und der stadt furmunden ader radtsmann der stadt geseccze ubertrethen, und dye nyemandt buset, und dy andern auss der gemeyn alleyn gebuset werdenn. Dye sechste ist das vorsmehenyss, also wann mann dye mechtigen, dye reychen, und dy gefrundten smeht, ader das man etzliche aus der gemeyn smehet, und sye nicht zu ampten und zcu wirdigkeytt kewset. »
-
[25]
Trois manuscrits sont conservés aujourd’hui. Voir aussi la réception de son travail par Konrad Popplau, patricien et membre du tribunal de Breslau/Wrocaw, à la fin du siècle : Friedrich Ebel (Hg.), Der Rechte Weg. Ein Breslauer Rechtsbuch des 15. Jahrhunderts, Köln u. a., Böhlau, 2000, qui cite de nombreux extraits non politiques « du petit livre que le duc Ruprecht, seigneur de Liegnitz, a fait faire au docteur Nicolaus en l’an 1399 » (p. 1141).
-
[26]
Wurm, p. 23-63. Sont conservés 30 de ces « articles » sur les 66 annoncés dans le registre (p. 5-16).
-
[27]
Wurm, p. 45.
-
[28]
Wurm, p. 55 : « nach aldin satczunge der Romer ».
-
[29]
Voir pour comparaison Ulrich Meier, Mensch und Bürger. Die Stadt im Denken spätmittelalterlicher Theologen, Philosophen und Juristen, München, Oldenbourg, 1994, p. 159-164 ; mais la perspective de Wurm est bien différente de celle des théoriciens italiens qui fondent l’autonomie urbaine sur l’absence pérenne du souverain ; en outre, si ceux-ci accordent une grande place à la justification de cette délégation générale du pouvoir supérieur, Wurm ne fait qu’en constater l’existence, avec sans doute une préoccupation d’efficacité administrative plus que de formes juridiques, alors même que les villes autour de lui avaient moins encore de fondement juridique à se considérer autonomes.
-
[30]
Wurm, p. 25 : « zuhalden, als ab is der hirre selbir getan hette, synt sie is in seinem namen thun »
-
[31]
Wurm, p. 39.
-
[32]
Wurm, p. 40 : « gesactzer vormund seynir gemeyne »
-
[33]
Wurm, p. 41 : « mit volwort seyner eldisten und gemeyne und seyner eydgenossen ».
-
[34]
Hans Greiner, Das ältere Recht der Reichsstadt Rottweil, Stuttgart, Kohlhammer, 1900, p. 194.
-
[35]
Wurm, p. 41 : « allerhande sache, die do antreffende ist eyne gemeyne, das sal von der gemeyne gevolbort werden ».
-
[36]
Wurm, p. 57.
-
[37]
Wurm, p. 59.
-
[38]
Wurm, p. 42.
-
[39]
Wurm, p. 43, fait dériver tributum du verbe tribuo, sans percevoir que ce dernier est apparenté à tribus.
-
[40]
Wurm, p. 46.
-
[41]
Wurm, p. 50. Citation : « ein lehnman hulde sweret seinen lehnherren ».
-
[42]
Édité dans Diego Quaglioni, Politica e diritto nel Trecento italiano. Il De tyranno di Bartolo da Sassoferrato (1314-1357) s. l., Olschki (Il Pensiero politico. Biblioteca 11), 1983, p. 149-170 ; Voir Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 195-202, et Walter Ullmann, « De Bartoli sententia : Concilium repraesentat mentem populi », dans Bartolo da Sassoferrato. Studi e documenti per il VI centenario, Milano, Giuffrè, 1962, t. 2, p. 705-733 : la structure des relations de pouvoir développée par Bartolo coïncide sur de très nombreux points avec ce qu’on peut observer dans les villes allemandes, mais ces principes généraux qui sont le fondement du consensus politique ne décrivent précisément pas ce qui est au cœur des conflits dans les villes allemandes de la fin du Moyen Âge.
-
[43]
Dans la réflexion politique de la fin du Moyen Âge qui traite des monarchies au moins autant que des villes, le terme civitas peut prêter à confusion et peut souvent être traduit par « État » plutôt que par « ville » ; mais les exemples cités par Bartolo (outre Rome et son regimen monstruosum contemporain, Venise, Sienne, Florence) renvoient bien au monde des cités-États italiennes. Notons aussi que Rothe évoque la Politique comme « les livres d’Aristote sur les villes » (« Aristotiles bucher van den stethen », par exemple p. 263).
-
[44]
Il est copié à Heidelberg en milieu universitaire, puis à Ulm par le notaire impérial Ulrich Lochner en 1461 , et l’humaniste Albrecht von Eyb en ramène un exemplaire d’Italie (cf. description des manuscrits dans Diego Quaglioni, Politica e diritto..., op. cit.).
-
[45]
Voir notamment Hartmut Boockmann et alii (Hg.), Recht und Verfassung im Übergang vom Mittelalter und Neuzeit 2 t., Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht (Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Göttingen 234 et 239), 1998-2001 : articles de Boockmann, « Gelehrte Juristen im spätmittelalterlichen Nürnberg », t. I, p. 199-214, Helmut G. Walther, « Italienisches gelehrtes Recht im Nürnberg des 15. Jahrhunderts », t. I, p. 215-229, et Eberhard Isenmann, « Recht, Verfassung und Politik in Rechtsgutachten spätmittelalterlicher deutscher und italienischer Juristen, vornehmlich des 15. Jahrhunderts », t. II, p. 47-245 (cf. p. 123-127 quelques thèmes traités par les juristes nurembergeois ; rien de surprenant, dans la perspective du gouvernement patricien de la ville, à ce qu’il ne soit pas question de l’organisation institutionnelle de la municipalité). L’influence des juristes italiens est perceptible dans la justification de l’autonomie juridique de la ville (Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 173-175), mais pas dans celle de la forme des institutions.
-
[46]
Mittelalterliche Bibliothekskataloge Deutschlands und der Schweiz, München, Beck, 1918-, t. III/3 : Bistum Bamberg, hg. von Paul Ruf, 1939, p. 772-795, où manque une liste d’ouvrages empruntés en 1370 par un jurisconsulte municipal (Paul Kaegbein, Deutsche Ratsbüchereien bis zur Reformation, Leipzig, Harrassowitz [Zentralblatt für Bibliothekswesen. Beiheft 77] 1950, p. 9). Cf. aussi t. IV/1 : Bistümer Passau und Regensburg, hg. von Christine Elisabeth Ineichen-Eder, 1977, p. 471-480 : bibliothèque du Conseil de Ratisbonne, connue depuis 1396 et possédant des manuscrits juridiques au moins depuis 1430 ; t. I : Die Bistümer Konstanz und Chur, hg. von P. Lehmann, 1918, p. 303-387 : bibliothèque privée des Neithart, mais au moins partiellement accessible au public, cas unique pour le sud de l’Allemagne de dynastie de secrétaires municipaux. Elle fut rassemblée pour l’essentiel par Heinrich II (1439) et gérée en commun par ses frères et neveux ; dans l’inventaire établi en 1465, le droit romain occupe une place non négligeable. Reste à étudier l’influence de ces bibliothèques sur la pratique politique : celle des Neithart pouvait assurer l’accès de l’élite administrative des villes au droit romain, mais dans quelle mesure s’en servait-elle réellement ?
-
[47]
Fac-similé de l’édition de 1484, qui indique qu’il a été rédigé en 1479 : Gerhard Köbler, Reformation der Stadt Nürnberg, Giessen, Arbeiten-zur-Rechts-und-Sprachwissenschafts-Verlag (Arbeiten zur Rechts- und Sprachwissenschaft 25), 1984.
-
[48]
Franz Josef Worstbrock dans Die deutsche Literatur des Mittelalters. Verfasserlexikon, t. 6, Berlin-New York, de Gruyter, 1987, col. 1016-1035.
-
[49]
John Najemy, A History of Florence 1200-1575, Oxford, Blackwell, 2006, p. 200-218.
-
[50]
Outre la faible diffusion de ces traités dans leur zone de production elle-même, les relations entre les aires septentrionale et méridionale de l’espace germanique n’étaient pas rares, mais trop peu riches et complexes pour assurer leur diffusion, cf. Ulf Dirlmeier, « Zu den Beziehungen zwischen oberdeutschen und norddeutschen Städten im Spätmittelalter », dans Werner Paravicini (Hg.), Nord und Süd in der deutschen Geschichte des Mittelalters, Sigmaringen, Thorbecke (Kieler Historische Studien 34), 1990, p. 203-217.
-
[51]
Tom Scott (Hg.), Die Freiburger Enquete von 1476. Quellen zur Wirtschafts- und Verwaltungsgeschichte der Stadt Freiburg im Breisgau im fünfzehnten Jahrhundert, Freiburg im Breisgau, Stadtarchiv (Veröffentlichungen aus dem Archiv der Stadt Freiburg im Breisgau 20), 1986.
-
[52]
Ibidem, p. 56-63.
-
[53]
Staats- und Stadtbibliothek Augsburg, 4o Cod. Aug. 408, inédit.
-
[54]
Heinrich Schreiber (Hg.), Urkundenbuch der Stadt Freiburg im Breisgau, Freiburg im Breisgau, Herder, 1828, t. 2, p. 88-89.
-
[55]
Bernd Kannowski, Bürgerkämpfe und Friedebriefe. Rechtliche Streitbelegung in spätmittelalterlichen Städten, Köln, Böhlau (Forschungen zur deutschen Rechtsgeschichte 19), 2001 et les remarques d’Eberhard Isenmann, Die deutsche Stadt im Mittelalter 1150-1250, Köln/Wien, Böhlau, 2012, p. 229-244, chapitre sans précédent dans la 1re édition du livre, ce qui montre bien l’actualité du thème.
-
[56]
Ainsi à Esslingen en 1392 et 1401 : Adolf Diehl, Eßlinger Urkundenbuch, Stuttgart, Kohlhammer (Württembergische Geschichtsquellen 4 et 7), 1899-1905, t. 2, p. 339.
-
[57]
Staatsarchiv Augsburg, Reichsstadt Dinkelsbühl, Urkunden 23.
-
[58]
Christian Meyer, Quellen zur Geschichte der Stadt Baireuth, Leipzig, Friesenhahn, 1895, p. 4.
-
[59]
« Livre rouge », 1472-1481 , cité par Friedrich Keutgen, Urkunden zur städtischen Verfassungsgeschichte, Berlin, Felber, 1901 , p. 230-234.
-
[60]
Eberhard Naujoks, Karl V. und die Zunftverfassung. Ausgewählte Aktenstücke zu den Verfassungsänderungen in den oberdeutschen Reichsstädte (1547-1556), Stuttgart, Kohlhammer (Veröffentlichungen der Kommission für geschichtliche Landeskunde in Baden Württemberg. Quellen 36), 1985, p. 93 : « mehr in Geprauch, dan in ordentlichen Verfassungen ».
-
[61]
Éditée par Carl Hegel, Die Chroniken der deutschen Städte 12, Leipzig, Hirzel, 1874, p. 785-804.
-
[62]
Hans Rosenplüt, Reimpaarsprüche und Lieder, hg. von Jörn Reichel, Tübingen, Niemeyer (Altdeutsche Textbibliothek 105), 1990, p. 233.
-
[63]
Karl S. Bader, Gerhard Dilcher, Deutsche Rechtsgeschichte. Land und Stadt – Bürger und Bauer im Alten Europa, Berlin, Springer, 1999, p. 396-400.
-
[64]
Stadtarchiv Augsburg, Schätze 81 , fol. 90d (1365).
-
[65]
Charte du 13 décembre 1430 : Philipp Ruppert (Hg.), Die Chroniken der Stadt Konstanz, Konstanz, chez l’auteur, 1891 , p. 361-368 ; description du régime écrite sans doute peu après pour Fribourg, Otto Feger (Hg.), Vom Richtebrief zum Roten Buch. Die älteste Konstanzer Gesetzgebung, Konstanz, Thorbecke (Konstanzer Geschichts- und Rechtsquellen 7), 1955, p. 126-130. Cf. la notion de patientia imperatoris, par laquelle Balde fonde en droit les régimes politiques des villes italiennes, dès lors que le souverain les tolère en connaissance de cause, Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 159.
-
[66]
Dietrich Kerler (Hg.) Deutsche Reichstagakten unter Kaiser Sigmund, t. 3, Gotha, Perthes, 1887, p. 633-634 ; cf. Evamaria Engel, « und den alten rat wider in ire stule, huser, er und gut setzen‘‘. Bürgerkämpfe in der Regierungszeit Sigmunds von Luxemburg », dans Helmut Bräuer, Elke Schlenkrich (Hg.), Die Stadt als Kommunikationsraum. Beiträge zur Stadtgeschichte vom Mittelalter bis ins 20. Jahrhundert, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2001 , p. 281-309.
-
[67]
Cycle de sermons à Augsbourg vers 1250, pour l’essentiel en allemand, cf. Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 35-47.
Écrire la politique : miroirs et traités savants
1La dizaine de textes relatifs au bon gouvernement de la ville en langue allemande ne peut se comparer à la vaste masse des miroirs princiers, y compris en raison de leur diffusion limitée. Mais ces quelques textes, désormais mieux connus et mieux étudiés [1] , qui vont du traité juridique au poème didactique et répondent à des ambitions conceptuelles diverses, apportent une première vision de la place que les citadins eux-mêmes accordent aux questions politiques dans leur vision de la ville – leurs auteurs, en dehors du clerc strasbourgeois Johann Wimpfeling, sont souvent des employés de la ville, tel le médecin Johann von Soest, ou plus encore les secrétaires municipaux Johannes Rothe et Nikolaus Wurm. Produits à partir des dernières années du XIVe siècle dans des villes de statut et de gouvernement différents, à l’origine en partie sous l’influence de textes néerlandais antérieurs, ces traités répartis sur toute la surface de l’Empire – avec une forte concentration dans le Nord – se contentent souvent de dresser un portrait moral du bon gouvernant, dont les vertus individuelles sont le critère fondamental de la légitimité d’un gouvernement. La forme concrète de ce gouvernement, elle, n’est pas commentée et apparaît non comme une contingence, mais presque comme un fait de nature.
2 Outre le court traité versifié de Johann von Soest récemment étudié par Pierre Monnet [2], c’est notamment le cas dans un poème des années 1450, rédigé par un certain Heinrich von Rang qui se dit secrétaire municipal d’Aalen, petite ville d’Empire de Souabe [3]. Ce qui frappe surtout dans ce poème est l’étroite coïncidence entre son vocabulaire et celui des chancelleries urbaines de son temps. Quand il écrit que le conseiller doit se préoccuper nuit et jour « du bien et de l’utilité de la ville, s’il veut en tirer de l’honneur et en écarter les torts » [4], il utilise le style même des attendus topiques de maint décret municipal, de mainte charte d’engagement d’employés municipaux. S’il recourt volontiers à des autorités savantes, de Sénèque à saint Thomas d’Aquin [5], ces références jamais précisées semblent relever plus d’une stratégie artificielle de légitimation que d’une inspiration réelle : cette position alliant sensibilisation aux valeurs de la culture savante et relation très distante avec cette culture est sans doute une caractéristique commune des milieux politiques du paysage urbain dont il est issu, élus et professionnels de l’administration confondus.
3 Des échos plus concrets des préoccupations de ces milieux se font cependant jour, autour du coût des constructions municipales, sujet sensible dans les moments fréquents de contestation des politiques fiscales (v. 211-218), de la question du secret des délibérations (v. 187- 194), mais aussi d’autres thèmes moins communs comme la circulation de la parole au sein d’un Conseil (v. 173), condition du déroulement pacifique des débats et donc de l’efficacité du Conseil comme instance d’arbitrage entre forces sociales, ou la présence d’« avocats » choisis par les requérants au sein du Conseil pour présenter leur requête dans les formes requises et lui donner les meilleures chances d’aboutir (v. 91-98). Pour autant, comme ses collègues septentrionaux, l’auteur ne prend pas la peine de mettre en perspective ou de justifier l’organisation du gouvernement et des institutions qui le constituent, simple cadre naturel dans lequel les conseillers, jeunes et vieux, se doivent d’exercer au mieux les devoirs de leur charge.
4 Cela ne signifie pas pour autant que de tels textes soient nécessairement étrangers aux réalités du gouvernement urbain. Quand, vers 1400, Johannes Rothe, secrétaire municipal d’Eisenach (Thuringe) écrit ses poèmes didactiques [6], sa ville vient de connaître une période de troubles politiques : dans une de ses chroniques [7], il raconte comment, par le versement d’une forte somme, de riches bourgeois ambitieux avaient obtenu l’introduction de 12 nouveaux conseillers aux côtés des 24 conseillers en place, quitte à promettre en échange de gérer la ville avec assez d’habileté pour la libérer de ses dettes ; cette entrée au Conseil d’une représentation minoritaire des métiers suscite une telle hostilité chez les conseillers en poste que la mesure est annulée au bout de quelques années. L’antique métaphore du corps humain [8] est utilisée par Rothe dans ce contexte pour évacuer toute forme de conflictualité, et d’une certaine façon toute forme de réelle vie politique des instances municipales. Il fait un usage généreux de lieux communs, mais ces lieux communs sont porteurs de sens : réduire la sphère politique à un fonctionnement organique revient en effet à inscrire la suprématie du Conseil, et de manière générale de l’autorité existante, dans la loi naturelle. Il défend ainsi en homme de terrain un modèle politique menacé par la concurrence, un moment victorieuse, du principe de représentativité. De ce fait même, ici comme dans le poème sur les devoirs des conseillers et des officiers municipaux, ce n’est pas un hasard si rien n’est dit sur l’architecture du pouvoir, sur les forces contradictoires dont le Conseil a pour mission fondatrice de contrebalancer les poussées : il est d’autant plus nécessaire de présenter, même implicitement, cette construction politique comme un fait de nature qu’elle a été remise en cause dans ses fondements mêmes.
5 Même écrits en allemand et versifiés pour favoriser leur mémorisation, ces textes n’ont pas connu une grande diffusion : est-ce à dire que les généralités qu’ils alignent ne suscitaient pas l’intérêt de leurs contemporains ? Eux aussi écrits en allemand, eux aussi peu diffusés, le grand traité juridique de Rothe, conservé seulement dans une compilation réalisée vers 1500 par son lointain successeur Johannes Purgoldt [9], et celui de son contemporain Nikolaus Wurm [10] développent du moins une vision beaucoup plus complexe de la ville en tant qu’organisme politique, dans un contexte qui n’est pas, ou pas directement, celui de la culture universitaire. Aucun de ces deux traités n’accorde véritablement de place à la question des constructions institutionnelles, mais leurs ambitions conceptuelles, beaucoup plus vastes, méritent qu’on s’y arrête.
6 Pour tenter de fonder en droit les principes qu’il développe, Rothe s’appuie sur un éventail de sources allant de la Bible au droit romain en passant par Sénèque ou Averroès, à travers des références certes réelles, mais faisant plus penser aux mentions de complaisance utilisées par les poètes de son temps pour légitimer leurs récits qu’à une réelle argumentation juridique. La connotation morale de ses poèmes politiques y est présente, mais son expérience concrète de praticien y est beaucoup plus visible. Il s’attarde ainsi particulièrement à distinguer les sources du droit propres à chaque ville et réfléchit à la manière de les concilier [11] . Sa perspective résolument évolutionniste ne saurait surprendre à une époque où le fantasme d’un droit immuable a laissé la place à une vision plus dynamique et plus réaliste des évolutions juridiques, mais ses formulations sont d’une rare netteté : s’il faut bien se garder de multiplier les lois, il faut les adapter « d’après la convenance des villes et aussi des temps » [12] et « la dernière loi annule la précédente » [13]. Plus encore, Rothe refuse que l’« ancienne coutume » (« altes herkomen ») suffise à légitimer une règle de droit : la coutume ne vaut que tant qu’elle n’enfreint pas le droit naturel, et dans le cas contraire elle doit être abolie avec d’autant plus de célérité qu’elle est ancienne [14].
7 Ce souci de sécurité juridique s’accompagne d’une grande attention à l’écrit : « les livres de droit mettent bien vite les conseillers d’accord » [15], et ceux qui disent le droit sont invités non seulement à motiver leurs verdicts, mais aussi à les « démontrer et prouver » [16] – la distinction entre loi écrite et coutume est clairement posée [17], et en matière de coutume celle qui a une valeur générale l’emporte sur la coutume particulière à chaque ville. Il est alors crucial de disposer de conseillers « instruits », instruction qui ne passe pas nécessairement par le cursus universitaire : s’il faut établir des écoles dans une ville, dit Rothe, ce n’est pas pour former des clercs, mais pour fournir à ses enfants une culture scolaire, sinon savante, dont elle a le plus grand besoin [18]. Rothe, ici aussi, souligne à loisir les exigences de pureté morale et de sagesse des conseillers qui rendent la ville agréable à Dieu, mais la sagesse du prud’homme ne suffit plus face à la complexité croissante du gouvernement municipal – à l’occasion, tout comme les gouvernements princiers, on recourra à de véritables spécialistes, connaissant « le droit canon et le droit civil ».
8 Dans le monde urbain de Rothe, les institutions politiques sont, beaucoup plus que dans le sud de l’Empire où elles sont souvent en débat et souvent remodelées, un monopole patricien, et le Conseil consacre une bonne partie de ses activités à sa fonction de tribunal : Rothe accorde donc une large place au tribunal, alors que la question des équilibres institutionnels, qui sont à la fois le produit de la tradition et une sorte de cadre mental indépassable, n’y est traitée qu’en passant – ce qu’il dit par exemple des radtsmeyster [19], magistrats placés à la tête du Conseil, n’est justifié que par la coutume, parce que cela ne regarde au fond que le Conseil lui-même, et il n’est alors pas utile de fonder en droit des règles qui ne sont pas juridiquement opposables. Quant au recrutement des conseillers, la cooptation est la règle, si bien qu’il n’est pas besoin de s’attarder sur les modalités de dévolution du pouvoir et sur les équilibres entre institutions – la Bible n’est-elle pas là pour fixer sans ambiguïté le nombre idéal de conseillers [20] ? L’essentiel est alors d’organiser le fonctionnement intérieur du Conseil pour éviter qu’il ne soit affaibli ou paralysé par des dissensions internes. Cela suppose notamment de définir des règles pour la circulation de la parole en son sein, de façon à en pacifier le déroulement et à assurer une liberté de parole suffisante pour que le Conseil puisse être le lieu où se tient le débat sur les grands enjeux du moment [21]. Le Conseil apparaît ainsi bien un lieu de formation du compromis social, du moins au niveau des élites, dont les conflits internes sont sans doute le plus grand danger que courent les gouvernements patriciens. Pour autant Rothe reconnaît qu’il peut être nécessaire, au nom du Quod omnes tangit aristotélicien, de consulter de manière plus ou moins formalisée le commun, à condition de bien circonscrire les sujets traités et de prévenir tout risque de débordement. Cette concession modérée est en réalité plus large qu’il n’y paraît. Certes, le gouvernement des affaires communes revient avant tout aux élites de la naissance et de la fortune, mais elle est nécessaire « afin que les métiers artisanaux restent toujours en harmonie avec le Conseil » [22]. La rhétorique unitaire masque mal le poids de nouvelles réalités sociales : la concurrence des nouvelles élites de l’argent est un défi auquel, par exemple, les patriciats d’Allemagne du Sud peinent à résister. Quant à faire entrer des membres des métiers au Conseil, Rothe ne l’envisage que dans le cas où les candidats patriciens adéquats manquent – ce n’est pas qu’un cas d’école, puisque le renouvellement des patriciats n’est pas toujours aussi fluide qu’il le faudrait [23].
9 Dès lors que l’exclusivité politique du patriciat est considérée comme indépassable, la question de la légitimité du Conseil et des magistrats devient un enjeu essentiel, au-delà des considérations morales sur la naissance légitime, l’honneur et le bon comportement des magistrats. Parmi les sept causes de discorde internes évoquées par Rothe, deux portent sur ce thème :
« La cinquième, parce que les magistrats et les dirigeants de la ville enfreignent les lois et n’en sont pas punis, alors que les autres issus du Commun sont seuls à être punis.
La sixième, en raison de questions de préséance, quand on humilie les puissants, les riches, ou quand on humilie certains du Commun en ne les élisant pas à des offices ou à des honneurs » [24].
11 Pas plus que dans ses poèmes, il ne s’abstrait ici de son milieu social et politique : la neutralité de l’observateur soucieux du bien commun et du salut de tous qui est le propre du genre ne peut faire oublier le regard du professionnel impliqué ; avoir choisi la forme du traité juridique n’efface pas la présence en arrière-plan des conflits sociaux et politiques qui mettent en péril l’image du bon gouvernement dessinée par Rothe. Ce choix de rédaction est sans doute une évidence pour le juriste émérite qu’il est, mais il n’est pas seulement dû aux hasards de son éducation ou à une stratégie de dissimulation des tensions. Ce qui distingue Rothe de l’idéalisme et de la relative superficialité des miroirs urbains précédemment commentés, c’est sa vive conscience des défis auxquels les municipalités sont confrontées. Le droit est pour le Conseil comme pour les bourgeois la garantie du respect de ces deux valeurs civiques essentielles que sont la paix et l’unité : l’autorité du Conseil s’en trouve à la fois assurée et limitée par des règles juridiques comme par des impératifs moraux, qui en retour en fondent la légitimité et tentent d’écarter tout risque de contestation justifiée.
12 La célébration des noces du droit et de la ville est plus nette encore chez un collègue de Rothe, Nikolaus Wurm, comme lui au service de la ville (Görlitz en Silésie) en même temps que du prince, qui écrit vers 1400 un long traité dans un monde urbain très proche de celui de Rothe ; sa manière d’aborder la sphère politique urbaine est pourtant très différente. Monument ambigu de la réception du droit romain en même temps que de l’honneur du droit urbain médiéval, le travail de Wurm n’a pas pour fonction de servir de manuel aux praticiens de la politique urbaine [25], mais de réaliser la concorde entre la pratique juridique issue du droit de Magdebourg et l’héritage du droit romain ; la pertinence de la comparaison entre règle du droit urbain et référence précise à une source romaine est parfois discutable, mais les centaines de renvois de ce genre montrent une familiarité très étroite avec les monuments juridiques antiques. Deux vastes chapitres de ce texte écrit sous la forme antiquisante d’un dialogue entre maître et élève sont consacrés, en bonne place, à la sphère politique [26] : juste après le chapitre liminaire qui établit l’origine divine du droit et définit quelques notions juridiques essentielles (la loi, la coutume), l’un traite des principes généraux du droit urbain (définition de la notion de ville, principes légitimant le pouvoir urbain), tandis que l’autre est consacré aux détenteurs du pouvoir et à leur domaine de compétence. Wurm possède un sens certain de la formule, décrivant par exemple le secrétaire municipal comme « l’œil et la bouche du Conseil » [27], ou réalisant l’assimilation entre les dignités de la ville médiévale et celles de la République romaine, destinée à devenir un topos : les maires sont des proconsuls, les conseillers des consuls – d’ailleurs les élections au Conseil de Magdebourg se déroulent « selon les anciennes lois des Romains » [28].
13 Son travail est soutenu par une véritable réflexion sur le pouvoir politique dans la ville, dans laquelle la clef de voûte est le rôle du seigneur, seul capable de lui donner une légitimité. Cette apparente soumission pleine et entière à un pouvoir extra-urbain [29] est indispensable pour assurer l’insertion du pouvoir municipal dans la société féodale, mais elle n’est mise en avant que pour être aussitôt détournée au profit de la ville. Là où droits urbains, chartes de franchise ou Stadtbücher détaillent avec minutie la répartition des droits entre seigneur et communauté, Wurm se contente de remarquer que le seigneur ne peut qu’agir pour le bien de la ville et de ses habitants : le pouvoir municipal et le seigneur poursuivent ainsi le même but, ce qui suffit à écarter tout risque de conflit. Ce qui compte alors est la manière dont le seigneur délègue son pouvoir aux instances municipales, qui conduit à assimiler le pouvoir de celles-ci au sien : les décisions qu’elles prennent sont « à respecter comme si le seigneur lui-même les avait faites, puisqu’elles sont prises en son nom » [30]. Au sommet de l’édifice municipal, Wurm place le maire, équivalent au temporel de ce qu’est le curé au spirituel [31] , « tuteur désigné de sa communauté » [32]. Au nom du seigneur, il nomme les officiers municipaux, garantit les poids et mesures, perçoit les amendes ; lorsqu’on lit qu’il juge « en son Conseil », on ne peut manquer d’y voir les prémices des monarchies absolues de l’époque moderne, le maire faisant d’autant mieux office de souverain que la question de son élection n’est pas immédiatement abordée. Sans doute cette position du maire au sommet de la hiérarchie des pouvoirs n’est-elle pas étonnante, mais une telle essentialisation de son pouvoir correspond mal à la pratique essentiellement collégiale du pouvoir dans les villes allemandes, où le Conseil est l’instance politique originelle, au sens chronologique (le Conseil apparaît souvent bien avant le maire et son renouvellement annuel est un préalable à l’élection du maire) comme au sens hiérarchique.
14 Dès la description des pouvoirs du maire, des limitations essentielles à cet apparent absolutisme apparaissent. D’autres corps légitimes sont en effet à ses côtés pour renforcer la légitimité de ses décisions, prises « avec l’accord de ses anciens, de sa commune et de ses conjurés » [33] : même subsidiaire, la collégialité n’est donc ici pas absente. Reste à comprendre ce que Wurm entend par ces trois mots. Le terme le plus curieux est sans aucun doute le dernier : qui sont ces « conjurés », collègues du maire ayant prêté un serment spécifique au titre de leur fonction ou communauté des bourgeois réunis par la conjuratio qui la fonde ? Le second sens semble mieux attesté dans l’ensemble du traité, même si on ne peut exclure la coexistence des deux acceptions. Dans la ville allemande de l’époque de Wurm, le serment prêté chaque année au moment du renouvellement des instances municipales reste un fondement essentiel de la cohésion sociale par le réseau d’obéissances qu’il assure, mais il est plus souvent invoqué dans le domaine judiciaire que dans le domaine politique, où le statut individuel défini par le droit de bourgeoisie est bien plus déterminant que l’idée d’une communauté fondée sur le serment.
15 Le terme de « gemeyne » est lui beaucoup plus commun, même si sa fréquence et son périmètre précis varie beaucoup de ville en ville : presque absent du vocabulaire politique à Augsbourg, il recouvre le plus souvent l’ensemble de ceux qui disposent des droits civiques, ou parfois ceux d’entre eux qui ne font pas partie du patriciat (« le Commun »), mais il peut aussi prendre un sens plus précis, comme à Rottweil où le Conseil décide en 1400 qu’on appellera désormais « commune » un Grand Conseil élargi à l’ensemble des représentants des métiers, sans s’interdire pour autant de convoquer si besoin tout le corps civique [34]. Ici en tout cas, son rôle semble se limiter à approuver les décisions du maire ; toujours est-il que sa mention en arrière-plan du pouvoir supérieur assure une présence discrète de l’idée de représentation. Wurm traduit d’ailleurs le précepte Quod omnes tangit debet ab omnibus approbari par « toute chose qui concerne la commune doit être approuvé par la commune » [35] : sans aller jusqu’à définir les modalités de cette consultation, il transforme le très neutre omnes latin en une instance concrète, quitte à évoquer un peu plus loin la major pars (« das mer teil der stat »), soit l’ensemble des « eldisten und witczigisten » (« plus anciens et plus sages »), puisque dix sages valent bien mieux que cent sots [36] ; il souligne aussi l’importance d’une convocation en bonne et due forme du Conseil dès lors qu’il s’agit de produire du droit nouveau [37].
16 Le passage consacré aux pouvoirs du maire se clôt significativement par quelques lignes sur les usages de l’écrit et la vérification annuelle des comptes [38], thèmes indissociablement liés au souci d’assurer la légitimation du pouvoir en le rendant irréprochable – on le voit, la légitimité absolutiste issue de la captation des pouvoirs seigneuriaux cède vite la place à un indispensable travail continu de légitimation du pouvoir, dont l’une des modalités essentielles est la communication à destination du corps civique. L’usage de l’écrit est, cela dit, loin d’atteindre des dimensions proprement administratives : ce sont d’abord les noms des maires et conseillers et la date de leur élection qui doivent être conservés ; l’écrit y est encore un bien commun stratégique, soumis à des règles de sécurité et de communication drastiques, ce qui correspond aux pratiques restrictives des villes à Conseil patricien qui sont l’horizon naturel de Wurm.
17 Le chapitre sur les conseillers laisse quant à lui l’impression d’une logique inachevée : il commence étrangement par un développement sur l’impôt annuel, geschoss ou tributum. Le lecteur s’attend à un rapprochement étymologique entre tributum et tribunus, qui paraîtrait logique si on considère que c’est le Conseil qui est amené à voter les impôts, mais Wurm change de direction pour rapprocher les « tribuns » des 10 tribus romaines [39]. Là encore, la traduction fait son office assimilateur : tribus devient geslecht, soit le terme fréquemment utilisé pour désigner les lignages patriciens de son temps ; les Romains, écrit-il, nommaient aux côtés des 10 tribuns 18 conseillers et 6 juges, ce qui laisse entendre qu’il pourrait mettre en scène un Conseil composé de membres aux droits et aux fonctions différents, entre patriciens du Conseil et du tribunal et membres issus du Commun, comme dans de nombreuses villes allemandes de la fin du Moyen Âge – il n’en tire pourtant pas véritablement de conclusion. Les limites de l’assimilation entre le droit de son temps et le droit romain sont alors mises en évidence par l’affirmation paradoxale qu’ils doivent être appelés plutôt assessores que consules, sur la foi d’un passage du Digeste où sont décrites les fonctions de ces « assesseurs » : entre l’assimilation légitimatrice des structures de pouvoir et les réalités fonctionnelles des institutions de son temps, Wurm se retrouve ainsi piégé par sa propre logique.
18 À propos du choix du maire et des conseillers, Wurm retrouve les couleurs morales des traités de bon gouvernement contemporains, de la naissance légitime aux bonnes mœurs. Mais s’il souligne aussi qu’un bon maire doit posséder une voix bien placée, un visage riant et des gestes maîtrisés [40], c’est bien qu’il y voit aussi un enjeu essentiel de communication politique. De la même façon, s’il ne décrit pas le déroulement du processus électoral, fût-il réduit à une cooptation, il s’attarde sur la cérémonie où le Conseil sortant transmet ses pouvoirs à son successeur, et notamment sur les serments prêtés alors : l’essentiel n’est pas ici le texte des serments, mais la nature et le rôle que leur donne Wurm [41] . On retrouve d’une part son souci d’intégrer la ville dans la hiérarchie féodale, puisqu’il compare ces serments à ceux qu’« un vassal jure à son seigneur féodal ». D’autre part, la ville en tire une légitimité impériale inattendue dans le monde de villes territoriales où travaille Wurm : elle devient ainsi le lieutenant du prince, lui-même lieutenant de l’Empereur, qui ne peut être présent partout à la fois ; et le prince comme l’Empereur sont eux-mêmes tenus par serment d’agir pour le bien commun.
19 La singularité du travail de Wurm, outre l’usage massif du droit romain, est que les considérations morales qui font le cœur des autres traités sont chez lui une condition d’efficacité du gouvernement urbain ; il les soumet à une logique plus déterminante, celle de la hiérarchie des pouvoirs, qui se double de façon indispensable d’une chaîne de transmission de la légitimité. L’usage légitimant du droit romain et son recours aux textes du Corpus sont sans doute souvent artificiels, mais c’est que Wurm n’est pas un réformateur du droit, à la manière des « réformations » de villes allemandes de la fin du XVe – début XVIe siècle : il ne s’agit pas de remplacer un droit par un autre, mais bien au contraire de souligner la majesté et l’antiquité du droit de Magdebourg en établissant sa conformité avec l’héritage du « droit impérial » qu’est le droit romain. Pas plus que Rothe, il n’a alors besoin de réfléchir à l’organisation des institutions, qui n’est pas dans leur monde l’enjeu politique sensible qu’il est alors dans les villes d’Empire méridionales ; Wurm est cependant plus sensible que Rothe aux conditions qui rendent le système politique hérité efficace et conditionnent son acceptation par ceux qu’il gouverne.
Écrire la politique : écrire la pratique
20 L’absence d’une telle littérature dans le sud de l’Empire, qui s’apparente à un refus de la théorie, conduit à revenir sur une question classique soulevée par la comparaison avec Wurm ou Rothe, celle de la pénétration plus tardive dans ces villes du droit romain, dont les historiens du droit présentent souvent la réception comme le début d’une nouvelle ère.
21 Mais peut-on, pour comprendre la pensée politique urbaine, se limiter à de tels projets d’ambition universelle dépassant largement les besoins concrets des gouvernements urbains ? Il est frappant de constater qu’aucun de ces textes, malgré les connaissances aristotéliciennes qu’ils montrent à des degrés divers, ne tient compte de la théorie des systèmes politiques. Celle-ci, pourtant, joue un grand rôle aussi bien chez Aristote lui-même que chez ses commentateurs universitaires, tel le juriste Bartolo di Sassoferrato dont le court traité De regimine civitatis [42], sorte de compendium a minima de la philosophie politique aristotélicienne, assimile sans ambiguïté la civitas [43] au monde des villes contemporaines et recourt à cette perspective classificatoire absente en Allemagne, y compris dans les traités septentrionaux évoqués plus haut. Le traité de Bartolo y était pourtant présent [44] : si la culture universitaire n’est pas prise en compte sur ce point dans les villes méridionales, si l’on assiste à une véritable non-réception d’Aristote, c’est bien que pour leurs gouvernements et leurs élites l’essentiel était ailleurs, hors des catégories aristotéliciennes.
22 Le droit savant est d’autant moins hors de portée des villes que certaines d’entre elles emploient à la fin du Moyen Âge des juristes professionnels, notamment, de façon massive, à Nuremberg [45], où la bibliothèque du Conseil contient de nombreux traités de droit romain [46]. Mais Nuremberg, première ville allemande à réformer son droit selon le droit romain [47], est aussi la ville qui résiste le plus fermement à la mise par écrit de ses institutions politiques, ce qui montre bien la distinction stricte établie dans cet univers urbain méridional entre le domaine du droit et celui de la politique. De même, l’humanisme italien aurait pu livrer des modèles, des thèmes de débat, des incitations à se pencher sur les pratiques politiques : Niklas von Wyle, qui traduit en allemand le Pogge, Boccace ou Enea Silvio Piccolomini [48], était après tout secrétaire municipal d’Esslingen ; les textes politiques de l’humanisme civique florentin qui accorde une place essentielle aux institutions municipales [49] auraient pu l’intéresser, mais ce ne sont pas ces textes-là qu’il transmet à ses lecteurs germanophones, que ce soit faute de les connaître ou par choix.
23 Cette grande faiblesse de la théorisation explicite de leurs systèmes politiques, particulièrement prononcée dans les villes d’Allemagne du Sud [50], est d’autant plus significative qu’elle contraste de façon saisissante avec les nécessités concrètes à laquelle leurs gouvernants sont fréquemment soumis. Il n’y a pas entre Alsace et Franconie d’organisation des institutions municipales qui puisse passer pour le modèle en quelque sorte naturel et incontestable de tout gouvernement urbain, si bien que chaque ville doit organiser son régime selon les contingences du moment, les traditions locales, la réception variable de modèles extérieurs, en particulier en fonction de la place que tendent à prendre à partir des années 1330 les bourgeois n’appartenant pas au patriciat, souvent par l’intermédiaire de corps de métier (Zünfte) organisés. Les attentes très concrètes qui sous-tendent le jeu de construction institutionnel ne sont nulle part aussi patentes qu’à Fribourg-en-Brisgau en 1476 : sur ordre du Conseil, le secrétaire municipal parcourt une quinzaine de villes en un peu plus d’un mois [51] en quête de solutions aussi concrètes que possible à la crise économique et démographique que subit la ville depuis plusieurs décennies, pour éviter la perte de ses larges privilèges, proches de ceux des villes d’Empire. À plusieurs reprises est évoqué le coût de l’expédition, d’autant plus douloureux qu’il pèse sur des finances déjà éprouvées : autant dire qu’on en attendait un retour sur investissement.
24 Le champ des interrogations est vaste : il y est question de fiscalité, mais aussi de l’organisation du Conseil et du tribunal, y compris dans des détails très concrets, des procédures d’élection des conseillers aux modalités de circulation de la parole en passant par des dispositions somptuaires. Les réponses dessinent un autoportrait des différentes villes, puisque chacune, en outrepassant le canevas commun, met en avant ce qui paraît au moins à ses gouvernants la clef de sa prospérité. Cet espoir réformateur aboutit à un résultat modeste par rapport aux ambitions affichées, puisque les décrets pris alors se limitent à améliorer le fonctionnement du Conseil en s’assurant de la disponibilité des magistrats élus, du bon comportement et surtout de la présence des conseillers lors des séances [52], règles comparables à celles des Conseils des villes gouvernées par le patriciat ; mais la marge de manœuvre des Fribourgeois, face au poids de la tradition qui fait l’irréductible individualité de ces architectures, face aussi au poids de leur seigneur, n’était peut-être pas si grande. Il n’en reste pas moins que pour Fribourg la réforme des institutions a pu être considérée comme un outil permettant de répondre à une crise existentielle.
25 Dans un contexte où ces questions ne semblaient pas posséder un caractère particulièrement actuel, un court traité augsbourgeois écrit sans doute au milieu du XVe siècle vient montrer l’intérêt suscité par des détails institutionnels concrets au-delà même des principaux responsables politiques [53]. L’auteur anonyme décrit d’abord minutieusement les procédures électorales, non par souci informatif mais pour en démontrer les faiblesses exigeant une réforme en profondeur. Sa description critique, qui atteste de connaissances empiriques en l’absence d’une mise par écrit antérieure, l’amène en effet à faire une proposition radicale qui revient à réduire drastiquement le rôle politique des métiers. Réalisé sans doute avant la période troublée qui s’ouvre en 1456 par une contestation virulente des impôts indirects pour s’achever plus de deux décennies plus tard par la fermeture oligarchique du système politique, le texte n’est pas une prise de position directe dans un débat actuel. Il n’en est que plus intéressant, en ce qu’il témoigne de l’intérêt spontané d’un bourgeois « conservateur » – pas nécessairement patricien – pour la construction institutionnelle propre à sa ville. La qualité de la copie laisse entendre que ce texte, s’il n’était pas destiné à une large diffusion, avait vocation à être montré, donc à influencer l’évolution du système politique de sa ville, dans un domaine qui, comme souvent, n’est pas régi à Augsbourg par une codification écrite.
26 Rares sont les villes d’Allemagne du Sud qui n’ont pas eu une ou plusieurs fois à redéfinir l’architecture de leur système institutionnel, à l’occasion d’une révolte victorieuse ou écrasée, d’une intervention seigneuriale ou royale, d’un déclin économique ou démographique qui rendait indispensables des restrictions dans le périmètre du monde politique. Il est particulièrement frappant de constater que toutes ces villes, de la décapole alsacienne à la Franconie en passant par les nombreuses villes d’Empire souabes, ont su faire ce travail non seulement sans disposer de théories générales de la ville à la façon des traités septentrionaux, mais aussi sans jamais mettre par écrit, de façon officielle ou non, les principes soutenant leurs choix. Parfois, ces redéfinitions n’ont pas eu de traduction écrite. Seule l’interprétation des sources de la pratique permet alors de reconstituer le fonctionnement du Conseil, notamment pour quelques petites villes d’Empire souabes ayant mis en place de façon précoce, avant 1350, un régime où les métiers (Zünfte) jouent un rôle essentiel. Mais si les contestataires fribourgeois de 1388 n’ont pas immortalisé par écrit les changements politiques imposés aux patriciens c’est sans doute par crainte que le seigneur ne s’y oppose – à juste titre, puisqu’il les annule dès 1392 [54]. L’établissement d’une charte reste cependant le cas le plus fréquent, en particulier dans la seconde moitié du XIVe siècle. Cet ensemble de plusieurs dizaines de textes [55], divers par la variété des thèmes qu’ils abordent, par leur longueur, par la manière dont ils justifient leur rédaction, par les circonstances de leur rédaction, n’accorde certes guère de place à la réflexion théorique ; pourtant, ils méritent une place dans une histoire de la pensée politique urbaine comme reflets d’un artisanat empirique de la construction institutionnelle, dont le trait le plus saillant est l’ingéniosité mise en œuvre pour résoudre de complexes problèmes politiques et sociaux.
27 Ce dont il s’agit ici, c’est en effet de mettre en relation l’objectif à atteindre – construire un système politique pérenne et efficace répondant à un contexte donné tout en tenant compte des héritages particuliers de la ville – et la boîte à outils politique existante. Il ne suffit pas pour cela de fixer le nombre de conseillers ou les modalités de leur élection : il faut surtout mettre en échec les facteurs contingents de discorde, quitte d’ailleurs à sortir à l’occasion du champ institutionnel. Tantôt il s’agit d’assurer au plus grand nombre que les comptes de la ville seront vérifiés avec le plus grand soin, de façon à éviter tout risque de contestation quant à la manière dont sont gérés les deniers publics ; tantôt l’essentiel est de fixer le partage des postes entre patriciens et métiers, au point de prévoir les modalités de remplacement d’un conseiller décédé en cours de mandat ou élu à d’autres fonctions [56] ; tantôt enfin il faut étroitement départager les compétences des différents Conseils.
28 Alors que la plupart des chartes sont rédigées par le seigneur ou par les instances municipales elles-mêmes, celle écrite à Dinkelsbühl en 1387 raconte que le soin de définir le régime politique de cette petite ville d’Empire souabe a été délégué à « neuf hommes sages », dont on ne sait ni comment ils ont été désignés, ni comment s’est déroulé leur travail [57]. On ne sent peut-être nulle part aussi clairement que dans ce court texte les miracles de diplomatie nécessaires pour trouver un équilibre pérenne entre les forces sociales : s’il affirme la compétence universelle du Petit Conseil, c’est en la restreignant par toute une série de cas où le recours au Grand Conseil est obligatoire ; mais ce dernier ne risque-t-il pas d’être le relais d’une opposition sociale trop radicale ? On limite donc la participation aux conseils aux citadins possédant au moins 100 florins – avec une dernière concession : si une Zunft tenait à se faire représenter par un homme moins riche, il lui est loisible de demander une exception au Conseil.
29 Si ce type de documents se multiplie dès le XIVe siècle, au fur et à mesure que les évolutions sociales rendent caduque la fermeture des conseils patriciens dans de nombreuses villes d’Empire, le mouvement de mise par écrit des pratiques institutionnelles des conseils urbains atteint au cours du XVe siècle même les villes les plus éloignées de ce type d’évolutions : à Bayreuth, ville territoriale bavaroise, le code juridique de 1464 consacre ainsi de longs passages aux modalités d’élection du Conseil [58] ; à Straubing, autre ville territoriale, ce n’est pas le mode de désignation – intangible – du Conseil qui est mis par écrit, mais le déroulement des cérémonies qui accompagnent son élection [59] : sans prendre aucune part dans l’élection, le commun est convoqué pour entendre le rapport du trésorier et du Conseil sur la gestion des deniers publics, le trésorier rendant symboliquement son office en déposant le sceau et les clefs des coffres sur une table. De la sorte, et même si le rituel n’offre aucune marge de manœuvre réelle aux bourgeois, on maintient la fiction selon laquelle le pouvoir municipal vient de la communauté civique : l’effort de communication politique tend à jouer ici un rôle similaire à celui que tient ailleurs l’organisation des institutions pour asseoir la stabilité sociale de la ville.
30 Ce passage à l’écrit est d’autant plus significatif qu’il rompt avec une longue tradition de culture du secret sur les équilibres institutionnels : lors de l’enquête fribourgeoise de 1476, le maire de Nuremberg, contrairement à ses collègues des autres villes, n’ose pas prendre la responsabilité de répondre de lui-même et prend la peine de convoquer le Conseil. En 1548 encore, quand une délégation augsbourgeoise chargée par Charles Quint de recréer un système patricien l’interroge sur son fonctionnement, le Conseil est embarrassé pour répondre, car le gouvernement municipal est fondé « plus sur l’usage que sur des dispositions à proprement parler » [60]. Pourtant, trois décennies plus tôt, en 1516, ces mêmes principes avaient été décrits en détail par un éminent patricien nurembergeois, le jurisconsulte Christoph Scheuerl, dans une érudite lettre latine rapidement traduite en allemand [61] et même en italien. Exalter la ville en faisant l’éloge de son Conseil n’est pas une nouveauté, et à Nuremberg même le poète artisan Hans Rosenplüt, au milieu du siècle précédent, avait fait du Conseil un « sage berger qui n’a jamais fait le fier avec le troupeau » et l’a protégé de la vermine qui frappe partout « où sont des Zünfte ignorantes » [62]. Scheuerl, lui, ne se contente pas de morale : c’est le mécanisme des institutions qu’il place au centre de son attention, sans s’embarrasser de justifications ou de référence à une théorie savante. Le caractère très concret du texte est d’autant plus frappant que Scheuerl, en tant qu’employé du Conseil, était de jure exclu de l’exercice direct du pouvoir. Sans doute le texte n’a-t-il aucune valeur officielle, mais il n’en témoigne que mieux de l’intérêt pour ces questions au-delà même du cercle des praticiens de la politique – le destinataire de la lettre n’était pas un conseiller de Nuremberg ou d’ailleurs, mais un moine augustin.
31 L’ensemble de ces textes politiques voit le jour dans un contexte d’intenses relations entre villes d’un bout à l’autre de ce vaste espace méridional, qui n’entraîne pas la mise en place de régimes interchangeables, mais peut aider à comprendre le contexte dans lequel chaque ville constitue en un tout cohérent et équilibré les éléments fondant son système politique. Même sans que leurs évolutions internes ne soient soumises à un contrôle comparable à celui de la Hanse sur ses membres, une culture commune existe, dont témoignent un vocabulaire politique et juridique partagé, mais aussi des processus d’imitation ou de contagion qui touchent aussi bien les événements que les textes. L’évolution parallèle des régimes de la fin du Moyen Âge est d’ailleurs dans la pleine continuité des évolutions antérieures, quand les villes avaient conquis leur autonomie au fil d’un cursus honorum aux rythmes différents, mais aux étapes communes (première apparition du Conseil, privilèges juridiques...) [63]. Les canaux de diffusion sont connus : dans l’entourage du souverain, dans les ligues urbaines, par les relations personnelles et commerciales de leurs élites, les contacts sont permanents. Parfois, pourtant, elles prennent la peine de mener de véritables missions d’information. Outre le cas de Fribourg, il en est ainsi lors de la mise en place du nouveau régime des métiers à Augsbourg en 1368 : la plupart des villes consultées font partie du cercle relationnel habituel d’Augsbourg, mais on interroge aussi Worms, plus lointaine, dont l’organisation politique venait d’être modifiée. L’influence extérieure est ici d’autant moins contestable que, quelques années plus tôt, un artisan augsbourgeois avait été condamné par le Conseil patricien pour avoir souhaité à haute voix que soient mises en place des « Zünfte, telles qu’il y en a eu d’abord à Strasbourg » [64] : non seulement cet artisan a au moins une idée de la situation strasbourgeoise, mais encore il sait comparer les régimes de Strasbourg et d’Augsbourg, les classer dans deux catégories différentes et en tirer des conclusions.
32 En outre, les villes d’Empire, même si le seigneur-souverain est moins présent que celui des villes territoriales, doivent tenir compte de ses conceptions et de son regard, ce qui n’est pas sans influence sur les limites acceptables en matière d’organisation politique, donc sur la définition d’une norme commune qui facilite une lecture comparée des régimes politiques. L’hostilité aux régimes de métiers est en quelque sorte la base continue de l’action des souverains, mais cela n’empêche pas Charles IV d’accepter, après six ans de résistance, d’entériner la révolution augsbourgeoise de 1368, « puisque le Conseil de la ville ou sa majorité s’est mis d’accord à ce sujet ». Si Sigismond intervient en 1430 pour mettre un terme à la domination de plus en plus exclusive des métiers à Constance [65], c’est moins par esprit de système que parce que le conflit continu entre patriciens et métiers avaient privé la ville de stabilité politique depuis plusieurs décennies. En outre, s’il sape les bases de leur domination, Sigismond maintient la participation politique des métiers, alors que Charles Quint la supprimera en 1548 dans de nombreuses villes. La lettre que Sigismond adresse en 1431 aux villes d’Empire [66], par laquelle il les enjoint à l’unité et interdit à cet effet aux métiers de tenir des réunions séparées comme ils le faisaient à Constance, montre bien que la politique du souverain en la matière est avant tout pragmatique et n’entame pas la très large domination des régimes de métiers dans la région.
33 L’écriture du politique, que ce soit sous forme de traités politiques ou par la description des institutions existantes, est dans les villes de la fin du Moyen Âge non seulement une nécessité pratique, mais aussi la preuve de l’intérêt considérable que le thème pourtant technique de l’organisation des pouvoirs suscite dans des couches diverses de la population, proches ou non du pouvoir. La littérature ainsi produite ne se livre pas facilement, tant est grande la diversité des textes qui rend leur repérage difficile : ils ne sont pas de ceux qui ont connu la diffusion la plus large, et les textes de la pratique, nonobstant enquêtes et consultations, étaient trop soigneusement ajustés aux situations locales pour être immédiatement utilisables ailleurs. Le fait que la charte augsbourgeoise de 1368 a été copiée dans plusieurs registres de métiers et l’usage de certaines autres comme support du serment annuel (Ulm, Strasbourg...) ont pu faire de tels textes un vecteur essentiel des vertus civiques, ce qui montre à sa façon le succès de la pacification politique et sociale qui était leur objectif premier. Reste la question des conditions de leur écriture, et en particulier des influences qui ont marqué leur gestation. Chez Rothe comme chez Wurm, l’influence de la culture savante est une évidence qui ne rend que plus intrigante leur obstination à légitimer par elle des constructions politiques qui lui sont profondément étrangères. Chez les auteurs des chartes urbaines, de même, malgré les contacts diplomatiques avec les administrations princières et le nombre de citadins passant par les universités italiennes, les influences extra-urbaines restent encore à démontrer, quand bien même Albert le Grand avait commenté pour un public urbain [67] les relations entre groupes sociaux à l’intérieur de la ville et leur conséquence pour le maintien de la paix et de l’unité urbaine. Non seulement il est douteux que sa réflexion, dont la diffusion semble limitée au monde savant, ait pu exercer une influence sur le monde urbain sur un si long terme, mais encore il faut bien constater que ces réflexions taillées sur mesure pour les villes du XIIIe siècle en pleine conquête de leur autonomie politique ne sont pas d’un grand secours pour penser les équilibres politiques délicats, ouverts à des groupes sociaux toujours plus divers, auxquels les chartes constitutionnelles des villes doivent apporter une réponse.
Notes
-
[*]
Université de Lorraine/SAPRAT (EA 4116, EPHE) Cet article a été largement écrit lors d’un séjour de recherche à l’invitation du Centre de recherches sur le Moyen Âge et la Renaissance de l’université de Munich, dirigé par Claudia Märtl, que je remercie, ainsi que les collaborateurs du Centre pour ce précieux soutien.
-
[1]
Eberhard Isenmann, « Ratsliteratur und städtische Ratsordnungen des späten Mittelalters und der frühen Neuzeit », dans Pierre Monnet, Otto-Gerhard Oexle (Hg.), Stadt und Recht im Mittelalter, Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht (Veröffentlichungen des Max-Planck-Instituts für Geschichte 174), 2003, p. 215-421 , résumé plus qu’analyse de nombreux traités ; Heike Bierschwale, Jacqueline van Leeuwen, Wie man eine Stadt regieren soll. Deutsche und niederländische Stadtregimentslehren des Mittelalters, Frankfurt am Main, Lang (Kultureller Wandel vom Mittelalter zur frühen Neuzeit 8), 2005, concentré sur leur analyse littéraire.
-
[2]
« Bien commun et bon gouvernement : le traité politique de Johann von Soest sur la manière de bien gouverner une ville (Wye men eyn statt regyrn soll, 1495) », dans Élodie Lecuppre-Desjardins, Anne-Laure van Bruaene (sous la direction de), De bono communi. Discours et pratiques du Bien Commun dans les villes d’Europe (XIIIe au XVe siècle), Turnhout, Brepols, 2010, p. 89-106.
-
[3]
Heinrich von Rang, hg. von Kurt Gärtner, « Das Stadtratgedicht Heinrichs von Rang », Aalener Jahrbuch, 1978, p. 45-74.
-
[4]
Ibidem, v. 79-80 : « ainer stat nutz und fromen, / ist das er will zu eren komen und iren schaden wenden ».
-
[5]
Ibid., v. 1 .
-
[6]
Ratsgedichte, hg. von Herbert Wolf, Berlin, E. Schmidt (Texte des späten Mittelalters und der frühen Neuzeit 25), 1971 (cité ci-après Rothe RG). Son œuvre protéiforme (chroniques, traités juridiques, poèmes religieux, traités didactiques en vers) qui défie l’esprit de synthèse n’a pas encore suscité de vision d’ensemble, malgré de nombreuses éditions et études de détail.
-
[7]
Düringische Chronik des Johann Rothe, hg. von Rochus von Liliencron, Jena, Frommann (Thüringische Geschichtsquellen 3), 1859, §. 736, p. 637. Rothe RG n’évoque jamais directement les événements, mais ils apparaissent par exemple p. 88. Il y évoque le cas de conseillers occupés à piller en s’attirant les bonnes grâces du prince à force de pots-de-vin – ce qui montre d’ailleurs qu’il peut exister des intérêts communs entre le pouvoir seigneurial et les contestataires.
-
[8]
Rothe RG, p. 59 : « Yn glicher wyß daz den stet, / Also der vff dem heubt get, / Dem vorkeret sich mach, leber vnd lungen » (« De la même façon que ce qui arrive à celui qui marche sur la tête, qui en a l’estomac, le foie et les poumons retournés »).
-
[9]
Friedrich Ortloff, Sammlung deutscher Rechstquellen, t. 2 : Das Rechtsbuch Johannes Purgoldts nebst statuarischen Rechten von Gotha und Eisenach, Jena, Frommann, 1860 [cité ci-après Rothe], surtout livres IX et X, p. 257-316.
-
[10]
Hans-Jörg Leuchte, Das Liegnitzer Stadtrechtsbuch des Nikolaus Wurm. Hintergrund, Überlieferung und Edition eines schlesischen Rechtsdenkmals, Sigmaringen, Thorbecke (Quellen und Darstellungen zur schlesischen Geschichte 25), 1990 [cité ci-après Wurm].
-
[11]
Rothe, p. 271-272.
-
[12]
Rothe, p. 273 : « nach der gelegenheyt der sthete undt auch der zceyt ».
-
[13]
Rothe, p. 272 : « das leczte geseccze wyderruffet das forderste ».
-
[14]
Rothe, p. 272.
-
[15]
Rothe, p. 288-289 : « dye rechtbücher machen dye radtslewthe snell eyne » ; voir aussi le bref développement sur les activités et les qualités du secrétaire municipal, en guise d’autoportrait déguisé, p. 317.
-
[16]
Rothe, p. 270.
-
[17]
Rothe, p. 271-272.
-
[18]
Rothe, p. 288.
-
[19]
Rothe, p. 306-307.
-
[20]
Rothe, p. 260-261 , d’après Exode 15-16.
-
[21]
De fait, les Conseils urbains patriciens produisent fréquemment des dispositions correspondant à ce que dit Rothe. Voir pour Nuremberg les textes publiés dans Eberhard Isenmann, « Ratsliteratur... », op. cit., p. 460-479, datant de 1461 à 1515.
-
[22]
Rothe, p. 263 : « umb deswyllen das dy handtwerge mit deme radt allezceydt eyntrechttig bleyben ».
-
[23]
Rothe, p. 273-274, p. 294.
-
[24]
Rothe, p. 313 : « Dye fünffte, wanne dye amptleuthe und der stadt furmunden ader radtsmann der stadt geseccze ubertrethen, und dye nyemandt buset, und dy andern auss der gemeyn alleyn gebuset werdenn. Dye sechste ist das vorsmehenyss, also wann mann dye mechtigen, dye reychen, und dy gefrundten smeht, ader das man etzliche aus der gemeyn smehet, und sye nicht zu ampten und zcu wirdigkeytt kewset. »
-
[25]
Trois manuscrits sont conservés aujourd’hui. Voir aussi la réception de son travail par Konrad Popplau, patricien et membre du tribunal de Breslau/Wrocaw, à la fin du siècle : Friedrich Ebel (Hg.), Der Rechte Weg. Ein Breslauer Rechtsbuch des 15. Jahrhunderts, Köln u. a., Böhlau, 2000, qui cite de nombreux extraits non politiques « du petit livre que le duc Ruprecht, seigneur de Liegnitz, a fait faire au docteur Nicolaus en l’an 1399 » (p. 1141).
-
[26]
Wurm, p. 23-63. Sont conservés 30 de ces « articles » sur les 66 annoncés dans le registre (p. 5-16).
-
[27]
Wurm, p. 45.
-
[28]
Wurm, p. 55 : « nach aldin satczunge der Romer ».
-
[29]
Voir pour comparaison Ulrich Meier, Mensch und Bürger. Die Stadt im Denken spätmittelalterlicher Theologen, Philosophen und Juristen, München, Oldenbourg, 1994, p. 159-164 ; mais la perspective de Wurm est bien différente de celle des théoriciens italiens qui fondent l’autonomie urbaine sur l’absence pérenne du souverain ; en outre, si ceux-ci accordent une grande place à la justification de cette délégation générale du pouvoir supérieur, Wurm ne fait qu’en constater l’existence, avec sans doute une préoccupation d’efficacité administrative plus que de formes juridiques, alors même que les villes autour de lui avaient moins encore de fondement juridique à se considérer autonomes.
-
[30]
Wurm, p. 25 : « zuhalden, als ab is der hirre selbir getan hette, synt sie is in seinem namen thun »
-
[31]
Wurm, p. 39.
-
[32]
Wurm, p. 40 : « gesactzer vormund seynir gemeyne »
-
[33]
Wurm, p. 41 : « mit volwort seyner eldisten und gemeyne und seyner eydgenossen ».
-
[34]
Hans Greiner, Das ältere Recht der Reichsstadt Rottweil, Stuttgart, Kohlhammer, 1900, p. 194.
-
[35]
Wurm, p. 41 : « allerhande sache, die do antreffende ist eyne gemeyne, das sal von der gemeyne gevolbort werden ».
-
[36]
Wurm, p. 57.
-
[37]
Wurm, p. 59.
-
[38]
Wurm, p. 42.
-
[39]
Wurm, p. 43, fait dériver tributum du verbe tribuo, sans percevoir que ce dernier est apparenté à tribus.
-
[40]
Wurm, p. 46.
-
[41]
Wurm, p. 50. Citation : « ein lehnman hulde sweret seinen lehnherren ».
-
[42]
Édité dans Diego Quaglioni, Politica e diritto nel Trecento italiano. Il De tyranno di Bartolo da Sassoferrato (1314-1357) s. l., Olschki (Il Pensiero politico. Biblioteca 11), 1983, p. 149-170 ; Voir Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 195-202, et Walter Ullmann, « De Bartoli sententia : Concilium repraesentat mentem populi », dans Bartolo da Sassoferrato. Studi e documenti per il VI centenario, Milano, Giuffrè, 1962, t. 2, p. 705-733 : la structure des relations de pouvoir développée par Bartolo coïncide sur de très nombreux points avec ce qu’on peut observer dans les villes allemandes, mais ces principes généraux qui sont le fondement du consensus politique ne décrivent précisément pas ce qui est au cœur des conflits dans les villes allemandes de la fin du Moyen Âge.
-
[43]
Dans la réflexion politique de la fin du Moyen Âge qui traite des monarchies au moins autant que des villes, le terme civitas peut prêter à confusion et peut souvent être traduit par « État » plutôt que par « ville » ; mais les exemples cités par Bartolo (outre Rome et son regimen monstruosum contemporain, Venise, Sienne, Florence) renvoient bien au monde des cités-États italiennes. Notons aussi que Rothe évoque la Politique comme « les livres d’Aristote sur les villes » (« Aristotiles bucher van den stethen », par exemple p. 263).
-
[44]
Il est copié à Heidelberg en milieu universitaire, puis à Ulm par le notaire impérial Ulrich Lochner en 1461 , et l’humaniste Albrecht von Eyb en ramène un exemplaire d’Italie (cf. description des manuscrits dans Diego Quaglioni, Politica e diritto..., op. cit.).
-
[45]
Voir notamment Hartmut Boockmann et alii (Hg.), Recht und Verfassung im Übergang vom Mittelalter und Neuzeit 2 t., Göttingen, Vandenhoeck & Ruprecht (Abhandlungen der Akademie der Wissenschaften in Göttingen 234 et 239), 1998-2001 : articles de Boockmann, « Gelehrte Juristen im spätmittelalterlichen Nürnberg », t. I, p. 199-214, Helmut G. Walther, « Italienisches gelehrtes Recht im Nürnberg des 15. Jahrhunderts », t. I, p. 215-229, et Eberhard Isenmann, « Recht, Verfassung und Politik in Rechtsgutachten spätmittelalterlicher deutscher und italienischer Juristen, vornehmlich des 15. Jahrhunderts », t. II, p. 47-245 (cf. p. 123-127 quelques thèmes traités par les juristes nurembergeois ; rien de surprenant, dans la perspective du gouvernement patricien de la ville, à ce qu’il ne soit pas question de l’organisation institutionnelle de la municipalité). L’influence des juristes italiens est perceptible dans la justification de l’autonomie juridique de la ville (Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 173-175), mais pas dans celle de la forme des institutions.
-
[46]
Mittelalterliche Bibliothekskataloge Deutschlands und der Schweiz, München, Beck, 1918-, t. III/3 : Bistum Bamberg, hg. von Paul Ruf, 1939, p. 772-795, où manque une liste d’ouvrages empruntés en 1370 par un jurisconsulte municipal (Paul Kaegbein, Deutsche Ratsbüchereien bis zur Reformation, Leipzig, Harrassowitz [Zentralblatt für Bibliothekswesen. Beiheft 77] 1950, p. 9). Cf. aussi t. IV/1 : Bistümer Passau und Regensburg, hg. von Christine Elisabeth Ineichen-Eder, 1977, p. 471-480 : bibliothèque du Conseil de Ratisbonne, connue depuis 1396 et possédant des manuscrits juridiques au moins depuis 1430 ; t. I : Die Bistümer Konstanz und Chur, hg. von P. Lehmann, 1918, p. 303-387 : bibliothèque privée des Neithart, mais au moins partiellement accessible au public, cas unique pour le sud de l’Allemagne de dynastie de secrétaires municipaux. Elle fut rassemblée pour l’essentiel par Heinrich II (1439) et gérée en commun par ses frères et neveux ; dans l’inventaire établi en 1465, le droit romain occupe une place non négligeable. Reste à étudier l’influence de ces bibliothèques sur la pratique politique : celle des Neithart pouvait assurer l’accès de l’élite administrative des villes au droit romain, mais dans quelle mesure s’en servait-elle réellement ?
-
[47]
Fac-similé de l’édition de 1484, qui indique qu’il a été rédigé en 1479 : Gerhard Köbler, Reformation der Stadt Nürnberg, Giessen, Arbeiten-zur-Rechts-und-Sprachwissenschafts-Verlag (Arbeiten zur Rechts- und Sprachwissenschaft 25), 1984.
-
[48]
Franz Josef Worstbrock dans Die deutsche Literatur des Mittelalters. Verfasserlexikon, t. 6, Berlin-New York, de Gruyter, 1987, col. 1016-1035.
-
[49]
John Najemy, A History of Florence 1200-1575, Oxford, Blackwell, 2006, p. 200-218.
-
[50]
Outre la faible diffusion de ces traités dans leur zone de production elle-même, les relations entre les aires septentrionale et méridionale de l’espace germanique n’étaient pas rares, mais trop peu riches et complexes pour assurer leur diffusion, cf. Ulf Dirlmeier, « Zu den Beziehungen zwischen oberdeutschen und norddeutschen Städten im Spätmittelalter », dans Werner Paravicini (Hg.), Nord und Süd in der deutschen Geschichte des Mittelalters, Sigmaringen, Thorbecke (Kieler Historische Studien 34), 1990, p. 203-217.
-
[51]
Tom Scott (Hg.), Die Freiburger Enquete von 1476. Quellen zur Wirtschafts- und Verwaltungsgeschichte der Stadt Freiburg im Breisgau im fünfzehnten Jahrhundert, Freiburg im Breisgau, Stadtarchiv (Veröffentlichungen aus dem Archiv der Stadt Freiburg im Breisgau 20), 1986.
-
[52]
Ibidem, p. 56-63.
-
[53]
Staats- und Stadtbibliothek Augsburg, 4o Cod. Aug. 408, inédit.
-
[54]
Heinrich Schreiber (Hg.), Urkundenbuch der Stadt Freiburg im Breisgau, Freiburg im Breisgau, Herder, 1828, t. 2, p. 88-89.
-
[55]
Bernd Kannowski, Bürgerkämpfe und Friedebriefe. Rechtliche Streitbelegung in spätmittelalterlichen Städten, Köln, Böhlau (Forschungen zur deutschen Rechtsgeschichte 19), 2001 et les remarques d’Eberhard Isenmann, Die deutsche Stadt im Mittelalter 1150-1250, Köln/Wien, Böhlau, 2012, p. 229-244, chapitre sans précédent dans la 1re édition du livre, ce qui montre bien l’actualité du thème.
-
[56]
Ainsi à Esslingen en 1392 et 1401 : Adolf Diehl, Eßlinger Urkundenbuch, Stuttgart, Kohlhammer (Württembergische Geschichtsquellen 4 et 7), 1899-1905, t. 2, p. 339.
-
[57]
Staatsarchiv Augsburg, Reichsstadt Dinkelsbühl, Urkunden 23.
-
[58]
Christian Meyer, Quellen zur Geschichte der Stadt Baireuth, Leipzig, Friesenhahn, 1895, p. 4.
-
[59]
« Livre rouge », 1472-1481 , cité par Friedrich Keutgen, Urkunden zur städtischen Verfassungsgeschichte, Berlin, Felber, 1901 , p. 230-234.
-
[60]
Eberhard Naujoks, Karl V. und die Zunftverfassung. Ausgewählte Aktenstücke zu den Verfassungsänderungen in den oberdeutschen Reichsstädte (1547-1556), Stuttgart, Kohlhammer (Veröffentlichungen der Kommission für geschichtliche Landeskunde in Baden Württemberg. Quellen 36), 1985, p. 93 : « mehr in Geprauch, dan in ordentlichen Verfassungen ».
-
[61]
Éditée par Carl Hegel, Die Chroniken der deutschen Städte 12, Leipzig, Hirzel, 1874, p. 785-804.
-
[62]
Hans Rosenplüt, Reimpaarsprüche und Lieder, hg. von Jörn Reichel, Tübingen, Niemeyer (Altdeutsche Textbibliothek 105), 1990, p. 233.
-
[63]
Karl S. Bader, Gerhard Dilcher, Deutsche Rechtsgeschichte. Land und Stadt – Bürger und Bauer im Alten Europa, Berlin, Springer, 1999, p. 396-400.
-
[64]
Stadtarchiv Augsburg, Schätze 81 , fol. 90d (1365).
-
[65]
Charte du 13 décembre 1430 : Philipp Ruppert (Hg.), Die Chroniken der Stadt Konstanz, Konstanz, chez l’auteur, 1891 , p. 361-368 ; description du régime écrite sans doute peu après pour Fribourg, Otto Feger (Hg.), Vom Richtebrief zum Roten Buch. Die älteste Konstanzer Gesetzgebung, Konstanz, Thorbecke (Konstanzer Geschichts- und Rechtsquellen 7), 1955, p. 126-130. Cf. la notion de patientia imperatoris, par laquelle Balde fonde en droit les régimes politiques des villes italiennes, dès lors que le souverain les tolère en connaissance de cause, Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 159.
-
[66]
Dietrich Kerler (Hg.) Deutsche Reichstagakten unter Kaiser Sigmund, t. 3, Gotha, Perthes, 1887, p. 633-634 ; cf. Evamaria Engel, « und den alten rat wider in ire stule, huser, er und gut setzen‘‘. Bürgerkämpfe in der Regierungszeit Sigmunds von Luxemburg », dans Helmut Bräuer, Elke Schlenkrich (Hg.), Die Stadt als Kommunikationsraum. Beiträge zur Stadtgeschichte vom Mittelalter bis ins 20. Jahrhundert, Leipzig, Leipziger Universitätsverlag, 2001 , p. 281-309.
-
[67]
Cycle de sermons à Augsbourg vers 1250, pour l’essentiel en allemand, cf. Ulrich Meier, Mensch und Bürger..., op. cit., p. 35-47.