Notes
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[*]
Muriel Guedj, IUFM, 2, place Marcel-Godechot, BP 4152, 34092 Montpellier Cedex 5. Cet article constitue une partie de mon travail de thèse de doctorat (université Paris-7, février 2000), « L’émergence du principe de conservation de l’énergie et la construction de la thermodynamique », préparée au sein du REHSEIS (CNRS), sous la direction de Michel Paty. Je tiens à remercier Olivier Darrigol de m’avoir aidée par ses remarques pertinentes à approfondir certains points du texte.
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[1]
Se reporter à l’annexe qui souligne la distinction entre énergie mécanique et énergie totale.
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[2]
Pour ces différents éléments, voir Thomas Kuhn, Energy conservation as an example of simultaneous discovery (1959), in The Essential tension : Selected studies in scientific tradition and change (Chicago, 1977), trad. française de Michel Biezunski, Pierre Jacob, Andrée Lyotard-May et Gilbert Voyat : Un exemple de découverte simultanée : La conservation de l’énergie (Paris : Gallimard, 1990), 321-356 ; Donald Cardwell, Some factors in the early development of the concepts of power, work and energy, The British Journal for the history of science, 3 (1967), 209-224 ; Id., FromWatt to Clausius : The rise of thermodynamics in the early industrial age (Londres : Heinemann, 1971) ; Peter Heimann, Conservation of force and the conservation of energy, Centaurus, 18 (1974), 147-164 ; Peter Harman, Energy, force and matter : The conceptual development of nineteenth century physics (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1982), 33-44 ; Balfour Stewart, La Conservation de l’énergie (Paris : G. Baillière, 1875).
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[3]
Olivier Darrigol, God, waterwheels, and molecules : Saint-Venant’s anticipation of energy conservation, Historical studies in the physical sciences, 31/2 (2001), 285-353. Dans ce texte, Olivier Darrigol indique que la mécanique de d’Alembert, Lagrange et Newton n’est pas conservative. La réduction à une mécanique conservative ne va donc pas de soi. Notre présentation de l’analyse par Thomson des travaux de Newton va dans ce sens ; voir la dernière partie de cet article.
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[4]
Les douze auteurs cités sont : Julius Robert Mayer, James P. Joule, Ludwig August Colding, Hermann von Helmholtz, Sadi Carnot, Marc Séguin, Karl Holtzmann, Gustave-Adolphe Hirn, Carl Friedrich Mohr,William Robert Grove, Michael Faraday et Justus von Liebig ; voir Kuhn, op. cit. in n. 2, 111-156.
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[5]
Isaac Newton, Les Principes mathématiques de la philosophie naturelle (1687), trad. et rééd. critique de Marie-Françoise Biarnais (Paris : Christian Bourgois, 1985).
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[6]
La force vive est notée mv2 par Laplace.
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[7]
Voir par exemple Ernst Mach, La Mécanique : Exposé historique et critique de son développement, rééd. (Paris : Éd. Jacques Gabay, 1987 ; 1re éd., 1904).
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[8]
NortonWise,William Thomson‘s mathematical route to energy conservation : A case study of the role of mathematics in concept formation, Historical studies in the physical sciences, 10 (1979), 49-83.
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[9]
Crosbie Smith, Energy, in Companion to the history of modern science (Routledge : Ed. Olby, Cantor, Christie & Hodge, 1990), 326-341. Voir page 327.
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[10]
Navier est professeur adjoint à l’École des ponts et chaussées, Coriolis répétiteur à l’École polytechnique pour les cours d’analyse et de mécanique d’Augustin Cauchy et André-Marie Ampère. Voir pages 13 et 27 d’Ivor Grattan-Guinness, Work for the workers : Advances in engineering mechanics and instruction in France, 1800-1830, Annals of science, 41 (1984), 1-33.
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[11]
Pour l’expression de cette équation, voir Ernst Mach, La Mécanique : Exposé historique et critique de son développement (1904) (Paris : J. Gabay, 1987), 327.
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[12]
Sadi Carnot indique qu’une machine qui fournit du travail au cours d’un cycle échange nécessairement de la chaleur avec deux sources de températures différentes.
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[13]
Sadi Carnot, Réflexions sur la puissance motrice du feu (1824), éd. critique par Robert Fox (Paris : Vrin, 1978).
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[14]
Maurice Crosland, Crosbie Smith, The Transmission of physics from France to Britain, Historical studies in the physical and biological sciences, 9 (1978), 1-61 ; A new chart for British natural philosophy, the development of energy physics in the 19th century, History of science, 16 (1978), 251-279.
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[15]
Smith, op. cit. in n. 9, 326.
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[16]
La force vive s’exprime comme le demi-produit de la masse par le carré de la vitesse (énergie cinétique). Le théorème de la force vive établit une égalité entre le travail et la force vive (le théorème de l’énergie cinétique). Selon Ernst Mach, ce théorème a été utilisé pour la première fois par Christiaan Huygens, il s’est ensuite généralisé. Voir Mach, op. cit. in n. 11, 327.
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[17]
Smith, op. cit. in n. 9, 329-330.
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[18]
Lewis Gordon est professeur à l’université de Glasgow, où Thomson étudie.
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[19]
Smith, op. cit. in n. 9, 330 ; Crosbie Smith et Norton Wise, Energy and Empire : A biographical study of Lord Kelvin (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1989).
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[20]
Grattan-Guinness, op. cit. in n. 10.
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[21]
Smith, op. cit. in n. 9, 326 et 330.
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[22]
Il faut ici souligner que c’est la multiplication de ces conversions qui incite Kuhn à introduire la notion de « réseau ». Ce terme nous semble illustrer l’ensemble des processus qui conduisent à la conservation de l’énergie et pas seulement les processus de conversion. Kuhn, op. cit. in n. 2, 127
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[23]
Ibid., voir pour cette question la page 121.
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[24]
« On the dynamical theory of heat, with numerical results deduced from Mr Joule’s equivalent of a thermal unit, and M. Regnault’s observations on steam » ; ce texte en plusieurs parties est publié durant l’année 1852 dans la revue Philosophical magazine, voir la note 27 infra.
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[25]
L’importance d’une théorie dynamique dans la philosophie écossaise est soulignée dans Smith etWise, op. cit. in n. 19 ; pour ce qui concerne le point de vue de Thomson, voir plus particulièrement le chapitre intitulé « The dynamics of field theory », pages 237 à 281. Voir également Stephen G. Brush, The Kind of motion we call heat, 2 vol. (Amsterdam : North-Holland, 1976) ainsi que Donald F. Moyer, Energy, dynamics, hidden machinery : Rankine, Thomson and Tait, Maxwell, Studies in history and philosophy of science, 8/3 (1977), 251-268.
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[26]
Cette expression, rarement utilisée par Thomson, semble ici volontairement empruntée à Carnot.
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[27]
William Thomson, On the dynamical theory of heat, with numerical results deduced from Mr Joule’s equivalent of a thermal unit, and M. Regnault’s observations on steam, Philosophical magazine, série 4, 4/23 (1852), 8-21, 105-117, 168-176, 424-434. Voir la page 11.
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[28]
Traduction de : « Heat is not a substance but a state of motion. » (Ibid., 9.)
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[29]
« The temperature of a substance can only be raised by working upon it in some way so as to produce increased thermal motions within it. » (Ibid., 12.)
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[30]
La notion de système est sous-jacente (le corps étudié constitue le système et les grandeurs sont qualifiées d’intérieures ou d’extérieures relativement à ce dernier) mais pas explicitée dans cette partie du travail de Thomson.
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[31]
Cette absence de précision concernant les termes de « travail » et « effet mécanique » concerne non seulement le domaine d’étude de la chaleur mais aussi tous les domaines abordés par Thomson.
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[32]
« The sole effect to be contemplated in investigating the motive power of heat is resistance overcome, or, as it is frequently called, “work performed” or “mechanical effect”. »William Thomson, An account of Carnot’s theory on the motive power of heat, with numerical results deduced from Regnault’s experiments on steam, Proceedings of the Royal Society of Edinburgh, lu le 2 janvier 1849 ; Id., Mathematical and physical papers, vol. 1 (Cambridge, 1849), 113-155. Voir la page 114.
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[33]
Voir Thomson, op. cit. in n. 32, 124-125.
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[34]
Thomson, op. cit. in n. 27, 12.
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[35]
Ibid.
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[36]
WF ext. = travail de forces extérieures sur le corps,Wf int. = travail des forces internes au corps, est une variation qui traduit les mouvements thermiques internes aux corps.
Cette traduction résulte de : « Now, according to the dynamical theory of heat, the temperature of a substance can only be raised by working upon it in some way so as to produce increased thermal motions within it, besides effecting any modifications in the mutual distances or arrangements of its particles which may accompany a change of temperature. » (Ibid., 12.) -
[37]
Il obtient alors effectivement M. E. = WF ext.. L’importance de cet aspect est analysé en
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[38]
Voir les notes 11 et 16.
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[39]
William Thomson, On the theory of electro-magnetic (sic) induction (1848), in Id., Mathematical and physical papers (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1882), 91.
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[40]
William Thomson, Applications of the principle of mechanical effect to the measurement of electro-motive (sic) forces, and of galvanic resistances, in absolute units (1851), in Id., Mathematical and physical papers (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1882), 490-502.
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[41]
Ibid., 490.
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[42]
Pour Carnot, la chaleur est une fonction d’état qui se conserve sur un cycle d’opérations.
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[43]
L’importance de ce point sera détaillée ultérieurement.
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[44]
Thomson, op. cit. in n. 27, 18.
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[45]
Dans ses deux textes « An account of Carnot’s theory of heat… » et « On the dynamical theory of heat… », Thomson utilise l’expression de « differential of a function », et non celle de « différentielle exacte ou totale ». Cependant, le sens qu’il donne à ces expressions permet de conclure qu’il s’agit de différentielle totale. Cette remarque est par ailleurs confirmée dans une note rectificative qu’il apporte, en 1881, au texte de 1849 et pour laquelle il écrit : « In the correct theory it is (M ? Jp ) dv + Ndt, that is a complete differential, not Mdv + Ndt », (il convient de noter que Thomson aurait dû écrire son expression ( JM ? p ) dv + JNdt). Voir Thomson, op. cit. in n. 32, 129.
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[46]
Thomson, op. cit. in n. 27, 19.
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[47]
Thomson, op. cit. in n. 32, 118.
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[48]
William Thomson, « Preliminary draft for the “dynamical theory of heat” », PA 128, Kelvin papers, Cambridge university library, in Crosbie Smith,William Thomson and the creation of the thermodynamics : 1840-1855, Archives for history of exact sciences, 16/3 (1976), 231-288. Voir ce « draft », page IV. Ce point de vue est à rapprocher de celui de Joule, qui critique la théorie de Carnot (voir la note 51 infra).
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[49]
Thomson, op. cit. in n. 48 et Smith, op. cit. in n. 9.
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[50]
Smith, op. cit. in n. 9, 333.
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[51]
Smith, op. cit. in n. 41, 264. Dans son texte de 1990, Smith suggère que c’est en adoptant le point de vue de Joule que Thomson adopte également le point de vue métaphysique de ce dernier : « Believing that the power to destroy belongs to the Creator alone, I entirely coincide […] in the opinion that any theory which, when carried out, demands the annihilation of force is necessarily erroneous. » (Page 332.) Nous n’approuvons pas ce point de vue, étant donné qu’en 1849, Thomson évoque l’énergie dans le cadre d’un principe métaphysique et qu’il n’a pas à ce moment-là encore véritablement accepté les travaux de Joule. L’étude précédente a montré que Thomson introduit dans son texte de 1849 une traduction analytique du principe fondamental qui sous-tend le travail de Carnot. Cependant, ce principe fondamental ne concerne pas la conservation de l’énergie mais celle de la chaleur et il semble difficile, dans ces conditions, d’interpréter l’énergie comme un concept de la physique.
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[52]
L’équivalent apporte également une solution à un problème analogue et sur lequel Thomson s’est interrogé avant d’étudier la chaleur, il s’agit des pertes dues aux frottements des fluides en mouvement.
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[53]
Les réticences de Thomson pour accepter l’équivalent mécanique de la chaleur résultent de ce problème.
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[54]
Thomson, op. cit. in n. 2, 20.
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[55]
William Thomson, On a universal tendency in nature to the dissipation of mechanical energy, Proceedings of the Royal Society of Edinburgh, lu le 19 avril 1852 ; Philosophical magazine, IV (octobre 1852), 304-306.
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[56]
L’irréversibilité chez Thomson a été commentée à plusieurs reprises ; ce que nous tentons de montrer ici concerne le lien entre l’irréversibilité telle qu’elle est dégagée par Thomson et l’émergence du principe de conservation de l’énergie.
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[57]
Thomson, op. cit. in n. 55, 304.
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[58]
Bernard Brunhes (1909), La Dégradation de l’énergie (Paris : Flammarion, 1991).
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[59]
C’est en ce sens que le fait de disposer de processus de conversion ne nous semble pas équivalent à la conservation de l’énergie. La conservation de la force vive ou celle du travail n’implique pas de définir une grandeur commune à toutes les conversions. Voir par exemple Mach, op. cit. in n. 11, 324.
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[60]
Thomson, op. cit. in n. 27, 19.
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[61]
William Thomson évoque la difficulté à aborder ce point étant donné « … our present state of ignorance regarding perfect cold and the nature of molecular force… » ; il indique que, dans ces conditions, la détermination de ce qu’il nomme encore énergie mécanique totale est impossible.
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[62]
Ce choix résulte du rôle joué par l’effet mécanique dans la théorie de Thomson (voir la première partie de cet article). Ainsi et c’est une particularité, les deux expressions énergie mécanique et effet mécanique cohabitent dans ce texte.
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[63]
Le terme « inachevée » se justifie par l’absence d’explicitation du concept d’énergie interne.
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[64]
Rudolph Clausius (1868), Théorie mécanique de la chaleur, 2 vol., trad. française par François Folie, Eugène Lacroix (Paris, 1968) ; fac-similé (Paris : J. Gabay, 1991).
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[65]
Au mémoire I publié en 1850, Clausius ajoute en 1864, à l’occasion de l’édition française, un certain nombre de notes et compléments théoriques. Le texte de 1850 est toutefois réédité à l’identique et les notes et additions se distinguent nettement du texte permettant ainsi au lecteur d’apprécier l’évolution de la pensée de Clausius. Le mémoire I est particulièrement intéressant pour une analyse comparative des travaux de Thomson et de Clausius. (Guedj, op. cit. in n. *.)
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[66]
« … en y réfléchissant de plus près, on trouve que ce n’est pas le principe fondamental même de Carnot, mais l’assertion qu’il ajoute qu’il n’y a pas de chaleur perdue, qui est en contradiction avec la nouvelle manière de voir ; car dans la production du travail il peut bien se faire en même temps qu’une certaine quantité de chaleur soit consommée et qu’une autre soit transportée d’un corps chaud à un corps froid, et les deux quantités de chaleur peuvent se trouver dans un rapport déterminé avec le travail produit… » (Clausius, op. cit. in n. 64, 21.)
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[67]
Ibid., 35. v désigne le volume et t la température. Dans la suite du mémoire, Clausius montre que seule la température intervient dans l’expression de U.
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[68]
Ibid., 93.
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[69]
Thomson, op. cit. in n. 55, 304.
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[70]
Thomson, op. cit. in n. 27, 13 et op. cit. in n. 55, 304.
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[71]
« I. When heat is created by reversible process (so that the mechanical energy thus spent may be restored to its primitive condition), there is also a transference from a cold body to a hot body of a quantity of heat bearing to the quantity created a definite proportion depending on the temperatures of the two bodies. II. When heat is created by any unreversible process (such as friction), there is a dissipation of mechanical energy, and a full restoration of it to its primitive condition is impossible. III. When heat is diffused by conduction, there is a dissipation of mechanical energy, and perfect restoration is impossible. IV. When radiant heat or light is absorbed, otherwise than in vegetation, or in chemical action, there is a dissipation of mechanical energy, and perfect restoration is impossible. » (Thomson, op. cit. in n. 55, 304-305.)
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[72]
William Thomson and Peter G. Tait, Treatise on natural philosophy (1867) (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1879). Cet ouvrage, écrit avec Peter Tait en 1867, consacre le principe de conservation de l’énergie. Seule la mécanique est abordée, les autres domaines de la physique qui devaient initialement être traités ne le sont pas. (Les différentes notes relatives au Treatise on natural philosophy renvoient à des numéros de paragraphes et non à une pagination.)
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[73]
« In what precedes we have given some of Newton’s Definitiones nearly in his own words. » (Ibid., 242.)
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[74]
Thomson traduit cette loi ainsi : « To every action there is always an equal and contrary reaction : or, the mutual actions of any two bodies are always equal and oppositely directed. » (Ibid., 261.)
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[75]
Ibid., 269.
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[76]
Même critique vis-à-vis de Carnot.
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[77]
Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 275.
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[78]
Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 278.
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[79]
« But it is only when the inscrutably minute motions among small parts, possibly the ultimate molecules of matter, which constitute light, heat, and magnetism, and the intermolecular forces of chemical affinity are taken into account, along with the palpable motions and measurable forces of which we become cognizant by direct observation, that we can recognize the universally conservative character of all natural dynamic action… » (Ibid., 278.)
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[80]
La dynamique abstraite constitue le cadre de la formalisation développée dans la suite du Treatise on natural philosophy. Thomson précise les forces non conservatives dont il tiendra compte (voir à ce propos, Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 286).
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[81]
Ibid., 287.
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[82]
Ryogo Kubo, Thermodynamics (Amsterdam : North-Holland publishing company, 1968).
1L’émergence historique du principe de conservation de l’énergie totale [1] présente quelques points encore non élucidés et cet article est consacré à l’examen de l’un d’entre eux. Les historiens ont avancé plusieurs éléments afin de justifier l’élaboration du principe, sans qu’il ne soit véritablement possible de séparer ces éléments, ni d’analyser précisément le rôle à attribuer à chacun d’eux. Parmi les principaux éléments, il convient de citer notamment les processus de conversion, la théorie cinétique de la chaleur, l’intérêt porté par les ingénieurs aux machines, la progression de la Naturphilosophie (dont un des objectifs est la recherche d’un principe unificateur commun à tous les phénomènes naturels [2], ainsi que l’idée selon laquelle tous les phénomènes physiques peuvent se ramener à une mécanique conservative [3]. Des liens souvent étroits unissent ces éléments en un vaste réseau dont certains maillages ont été éclairés. Par exemple, Thomas Kuhn qualifie de « simultanée » la découverte du principe de conservation de l’énergie en soulignant que plusieurs auteurs [4] parviennent, sur une même période, indépendamment les uns des autres et de façon différente, à dégager les composantes essentielles du principe. Or William Thomson ne figure pas dans cette liste. En effet, ses travaux relatifs à l’énergie sont le plus souvent analysés par les historiens en regard de ceux de Sadi Carnot, James P. Joule ou Rudolf E. Clausius.
2Dans la préface à son ouvrage Les Principes mathématiques de la philosophie naturelle [5], Isaac Newton indique que l’objet de la philosophie consiste à ramener tous les phénomènes physiques à l’action de forces attractives ou répulsives. C’est dans la même démarche que s’inscrit Pierre-Simon de Laplace lorsqu’il entreprend de réduire l’étude de tous les phénomènes physiques à celle des forces centrales inversement proportionnelles au carré de la distance séparant les masses, ces dernières pouvant être considérées comme des points matériels. Si les phénomènes célestes résultent de la gravitation universelle et se justifient à l’aide de forces attractives, Laplace précise que ce sont des forces répulsives qui interviennent lorsque les distances mises en jeu deviennent très faibles, les atomes tenant alors lieu d’astres pour l’infiniment petit. Ainsi, contrairement au modèle newtonien, les atomes de Laplace ne peuvent entrer en collision et, dans cette configuration, le mouvement total, exprimé par la force vive [6], se conserve.
3Avec son Traité de mécanique analytique (Paris, 1788), Joseph-Louis de Lagrange marque l’un des temps forts de l’histoire de la mécanique. Ainsi, en se basant sur le principe de d’Alembert, selon lequel toute étude du mouvement peut se réduire à un problème d’équilibre, il fait le choix de ramener l’étude de la dynamique à la statique. Cette approche constitue le point culminant d’une théorie physique unifiée grâce à la mécanique [7].
4Denis Poisson, en développant une Théorie mécanique de la chaleur (Paris, 1835), fait partie des héritiers français de Laplace. Sa méthode pour l’obtention de l’équation de la conduction de la chaleur nécessite d’élaborer un modèle complexe et spéculatif rendant compte des relations entre le calorique et les molécules du solide. L’équation obtenue rend compte de méthodes mathématiques rigoureuses mais laborieuses [8].
5Ensuite, en se démarquant nettement de la physique des forces centrales, l’approche de Joseph Fourier contraste avec les précédentes. Ce dernier traite le phénomène de la conduction de la chaleur comme s’il s’agissait d’un flux continu et ne s’interroge donc pas sur la nature physique de la chaleur. En accord avec Laplace, Fourier privilégie l’analyse mathématique, mais contrairement à lui, son approche exclut tout modèle microscopique : « This theory of heat was essentially macroscopic, geometrical and practical [9]. »
6La révolution industrielle de la fin du xviiie siècle et du début du xixe siècle est à l’origine d’une mutation profonde qui correspond notamment à l’utilisation de la puissance des machines à vapeur ainsi qu’à la progression de la mécanisation dans de nombreuses industries (métallurgies, transport, textile…). Cette mutation résultant d’importantes modifications techniques repose sur une réorganisation de l’enseignement scientifique et technologique. Ainsi aux écoles créées sous l’Ancien Régime, l’École des ponts et chaussées (1747), l’École des mines (1783)… succèdent l’École polytechnique (1794), le Conservatoire national des arts et métiers (1794), l’École centrale (1829)… C’est dans un tel cadre qu’il convient de prendre en compte l’importance des travaux des « ingénieurs théoriciens », dont Henri Navier, Gustave G. Coriolis et Jean-Victor Poncelet sont des représentants. Ainsi, après Gaspard Monge et Jean-Nicolas-Pierre Hachette, qui sont à l’origine d’un cours à l’École polytechnique concernant la théorie des machines, Navier, Coriolis et Poncelet, tous anciens étudiants de l’École polytechnique, influencent la mécanique par leurs enseignements au sein des grandes écoles et par le nombre important de traités et de cours publiés [10].
7Le développement de cette ingénierie théorique renforce le changement d’orientation pris par rapport à la physique des forces centrales.
8Ainsi, Lazare Carnot, dans son Essai sur les machines en général (Bâle, 1797), souligne déjà l’intérêt du concept de travail par rapport à celui de force ; le travail mesurant directement l’effet obtenu par une machine. Cependant, chez cet auteur, le travail n’apparaît pas encore comme un concept indépendant, la conservation de la force vive (exprimée par mv2) jouant le rôle principal. Les écrits de Navier, Coriolis et Poncelet confirment ce glissement de la force vers le travail : la force vive est définie comme le travail accompli et l’équation entre ces grandeurs est explicitement formulée [11]. Cette génération d’ingénieurs théoriciens français plus concernés par l’établissement d’une théorie pratique et générale des machines que par la mécanique rationnelle, oriente davantage ses travaux vers la physique mathématique de Fourier plutôt que vers la force abstraite de Laplace.
9La physique des forces centrales subit d’autres ébranlements.
10L’approche de la formulation du second principe de la thermodynamique [12] contenu dans Les Réflexions sur la puissance motrice du feu et sur les machines propres à développer cette puissance [13] de Sadi Carnot ainsi que la destruction de la théorie du calorique apparaissent comme des éléments non réductibles aux lois de la mécanique classique.
11La réception des travaux de Carnot et le développement d’une physique du travail en Grande-Bretagne s’appréhendent également dans un contexte industriel [14]. Il convient de résoudre les questions de rentabilité des machines en appréhendant les principes physiques généraux qui régissent le fonctionnement de ces dernières. En Grande-Bretagne comme en France, les cours de mécanique pour l’ingénieur se développent et les publications de traités se multiplient.
12« Between Isaac Newton and Albert Einstein no development in physics is more significant than the replacement of the concept of force by the concept of work [15]. » Ce glissement du concept de force vers celui de travail résulte du développement et de la professionnalisation des ingénieurs théoriciens qui trouvent avec le travail un concept rendant compte de ce que produit réellement une machine. Par ailleurs, l’égalité qui lie le travail à la force vive [16] permet une écriture formelle du travail qui devient alors un concept central.
13Smith [17] souligne la diversité des termes existant pour désigner le travail et il cite un certain nombre d’auteurs français, anglais ou allemands qui utilisent ce concept. Ainsi, William Whewell adopte le terme de « labouring force », Lewis Gordon celui de « mechanical effect », traduction selon Smith de l’allemand « mechanische Wirkung » ; James Watt utilise le terme « effect », John Smeaton « mechanical effect », Gustave-Gaspard Coriolis « quantité de travail » et Jean-Victor Poncelet « travail mécanique ».
14Smith indique que cette approche diversifiée du concept de travail séduit Thomson tout autant concerné par les aspects pratiques que théoriques. Il note que ce dernier emprunte dans un premier temps à Gordon [18] l’expression mechanical effect pour désigner le travail avant d’employer plus systématiquement le terme d’énergie [19].
15Si l’utilisation du concept de travail [20] se généralise au détriment du concept de force et constitue une étape majeure vers la formulation du principe de la conservation de l’énergie, l’étape qui mène du travail vers l’énergie est négligée par les auteurs. Smith, qui commente succinctement cette étape, semble indiquer que seule une question de vocabulaire est à l’origine du choix [21] de Thomson.
16C’est un cheminement un peu différent que suit Thomas Kuhn lorsqu’il prétend à propos de « la disponibilité des processus de conversion » : « Nous avons là le concept de convertibilité universelle entre puissances naturelles ; il n’est pas, soyons clairs, identique à la notion de conservation. Mais la plupart des étapes restantes s’avèrent petites et assez évidentes [22]. » Kuhn illustre son propos à l’aide d’exemples de conversion qui mettent en jeu des phénomènes chimiques, thermiques, électriques, magnétiques, optiques… visant ici à souligner la portée générale de ces conversions [23]. En notant que ces échanges s’expriment tous à l’aide du concept de travail, afin d’apporter un point de vue quantitatif à la conversion, c’est encore une fois le passage du travail vers l’énergie qui n’est pas détaillé.
17Pour notre part, l’apport de William Thomson sur ce dernier point semble pertinent. Cet article vise donc à éclairer cette étape qui conduit ce dernier vers une formulation de la conservation de l’énergie.
18Dans « On the dynamical theory of heat [24]… », Thomson, rallié à la nature dynamique de la chaleur [25], exprime un principe de conservation qu’il qualifie de conservation de l’énergie mécanique marquant ainsi un tournant radical par rapport à ses précédents textes. Quel sens donner à ce principe ? L’identification des grandeurs qui participent à ce principe et l’examen des relations entretenues entre ces grandeurs apporteront des éléments de réponse. L’analyse des propositions fondamentales qui sous-tendent l’ensemble de la théorie, les démonstrations présentées pour prouver la validité de ces propositions et l’importance accordée aux pertes lors des processus irréversibles permettront également de préciser le sens de ce principe.
19Notre argumentation repose notamment sur le fait que la transition du concept de travail vers celui d’énergie doit prendre en compte l’effet mécanique qui constitue un concept intermédiaire central dans l’établissement de la théorie de Thomson. Après une analyse permettant de souligner l’importance de l’effet mécanique, le rôle joué par les pertes et celui attribué aux grandeurs internes, c’est l’étape qui conduit Thomson vers le concept d’énergie qui sera détaillée.
La distinction entre le travail et l’effet mécanique
20Dans l’introduction de « On the dynamical theory of heat… », Thomson, rallié à la nature dynamique de la chaleur, énonce la proposition fondamentale sur laquelle repose la « theory of the motive power [26] » : « When equal quantities of mechanical effect are produced by any means whatever from purely thermal sources, or lost in purely thermal effects, equal quantities of heat are put out of existence or are generated [27]. » Cet énoncé peu novateur s’accompagne toutefois d’une démonstration qui informe sur l’évolution de la pensée de Thomson depuis « An account of Carnot’s theory of heat… ». Les points suivants en témoignent.
21La chaleur n’est pas de nature substantielle mais elle correspond à un état du mouvement [28] ; l’augmentation de la température d’un corps ou l’apport de chaleur résulte du travail exercé par une force extérieure s’appliquant sur le corps étudié. Les notions de température et de travail sont désormais liées [29]. Thomson précise que le travail a pour effet d’augmenter les mouvements internes des corps et de modifier les distances ou les arrangements entre les particules. Ainsi, la considération des grandeurs intérieures [30] permet d’appréhender le lien qui unit deux grandeurs macroscopiques appartenant à des domaines différents de la physique (respectivement la mécanique et les sciences de la chaleur). En identifiant la chaleur à du mouvement, cette dernière trouve naturellement une place dans l’élaboration de la théorie dynamique.
22Le deuxième élément concerne la distinction que Thomson établit entre le travail et l’effet mécanique. Comme cela a été précédemment évoqué dans l’introduction, les termes utilisés pour désigner le travail varient d’un auteur à l’autre, la quantité de travail, l’effet, la puissance motrice, l’effet mécanique… désignant tous un travail [31]. Le terme de « mechanical effect » apparaît pour la première fois dans le texte de 1849. En effet, dans « An account of Carnot’s theory of heat… », l’effet mécanique est équivalent au travail développé (« work performed ») [32] et exprime la puissance motrice de la chaleur ; au cours du texte, une distinction entre les deux termes semble s’opérer, et l’utilisation de l’effet mécanique se préciser. La description du cycle de Clapeyron [33] par Thomson illustre cet aspect. Ainsi, alors que pour chaque étape du cycle, il utilise indifféremment les deux termes, c’est celui d’effet mécanique qui est systématiquement réservé lorsque son objectif est d’établir un bilan sur l’ensemble du cycle.
23Dans « On the dynamical theory of heat… », cette tendance s’accentue fortement. Le bilan obtenu pour une machine s’exprime en terme d’effet mécanique et la proposition fondamentale rappelée plus haut s’inscrit, selon Thomson, dans le cadre d’un principe général qu’il qualifie de « general principle of mechanical effect [34] ». Si le terme d’effet mécanique est réservé à l’établissement d’un bilan en terme de travail, le travail (« work ») désigne l’action d’une force exercée sur le corps. La démonstration que donne Thomson de sa proposition est significative de cette distinction. Il effectue le bilan pour un corps soumis au travail d’une force extérieure. Ce bilan rend compte de l’effet mécanique obtenu :
« … the work which any external forces do upon it, the work done by its own molecular forces, and the amount by which the half vis viva of the thermal motions of all its parts is diminished, must together be equal to the mechanical effect produced from it ; and consequently, to the mechanical equivalent of the heat which it emits (which will be positive or negative, according as the some of those terms is positive or negative) [35]… »
25Si Thomson ne donne pas de traduction algébrique pour ce bilan, il nous a semblé cependant intéressant, par souci de lisibilité, d’en apporter une. Ainsi, en remplaçant « … the work which any external forces… » par WF ext. puis « … the work done by the its own molecular forces … » par Wf int. et « … the amount by which the half vis viva of the thermal motions of all its parts is diminished… » par , le bilan s’exprime selon l’équation suivante :
27avec : M. E. = effet mécanique [36].
28Remarque : C’est en notant que la variation des grandeurs internes est nulle sur un cycle d’opérations, que Thomson démontre sa proposition [37].
29En remarquant que le théorème de la force vive permet d’associer la force vive à un travail [38], ce bilan effectué par Thomson confirme que chez lui l’effet mécanique exprime la somme des travaux mis en œuvre.
30Cette distinction entre travail et effet mécanique apparaît dans d’autres domaines que celui de la chaleur. Dans un article consacré à l’induction électromagnétique, Thomson, qui cherche à exprimer l’intensité d’un courant induit dans un conducteur soumis à l’influence d’un aimant en mouvement, propose la solution suivante :
« It has appeared to me that a very simple a priori demonstration of this theorem may be founded on the axiom that the amount of work expended in producing the relative motion on which the electromagnetic induction depends must be equivalent to the mechanical effect lost by the current induced in the wire [39]. »
32Cet extrait confirme l’absence de distinction entre travail et effet mécanique, en 1848 ; il indique que l’effet mécanique n’intervient pas comme un bilan, et il ne mentionne pas la nécessité de définir une grandeur commune à tous les processus de conversion. Finalement, cet exemple significatif du travail de Thomson illustre l’un des nombreux processus de conversion tels qu’ils sont présentés par Kuhn. Ce texte est commenté et largement complété en 1851 [40].
33Ainsi, en 1851, Thomson indique que ses travaux de 1848 interviennent comme « … an immediate consequence of the general principle of mechanical effect [41] ». Plusieurs éléments doivent être mis en avant afin d’appréhender cette étape dans la pensée de Thomson.
34L’expression « general principle of mechanical effect » apparaît en 1851, elle supplante un principe implicite de conversion du travail (principe pour lequel perdurent les confusions entre travail, effet mécanique…) et elle indique une distinction de vocable et une distinction de sens entre travail et effet mécanique. L’effet mécanique devient une entité commune à tous les processus de conversion, il exprime un bilan en terme de travail.
35Finalement, l’effet mécanique se différencie du travail avec l’introduction de grandeurs intérieures au système, il généralise le travail et la chaleur et s’exprime véritablement comme un bilan.
36Il convient désormais de détailler l’étape déterminante qui conduit Thomson de l’effet mécanique vers l’énergie.
De l’effet mécanique vers l’énergie
37L’une des avancées importantes de Thomson relativement aux résultats de Carnot réside dans la formalisation analytique des principes fondamentaux. Dans « An account of Carnot’s theory of heat… », il vise à exprimer analytiquement la variation de la chaleur qu’il considère comme l’axiome fondamental de la théorie de Carnot [42]. Ainsi, en exprimant pour un gaz les variations de chaleur pour chacune des opérations du cycle de Carnot en fonction du volume et de la température, l’expression analytique à laquelle Thomson parvient s’écrit sous la forme : Mdv + Ndt (Mdv correspond à l’augmentation du volume de gaz, la température étant constante ; Ndt correspond à l’augmentation de la température, le volume étant constant).
38L’acceptation des résultats de Carnot, c’est-à-dire l’acceptation de la conservation de la chaleur pour un cycle d’opérations, amène Thomson à considérer que cette expression a une différentielle totale [43]. La prise en compte de l’existence d’un équivalent mécanique pour la chaleur le conduit, dans « On the dynamical theory of heat… », à modifier l’expression analytique obtenue pour la chaleur puisque cette dernière ne se conserve pas sur un cycle d’opérations. Ainsi, avec un système de coordonnées (p, v) identique à celui utilisé dans l’article de 1849, et avec les mêmes notations, il écrit : si Mdv + Ndt est la quantité de chaleur fournie au corps étudié lors d’augmentations dv du volume et dt de la température, J(Mdv + Ndt) correspond à l’équivalent mécanique de la chaleur, et si pdv est le travail obtenu pour cette quantité de chaleur, alors p dv ? J(Mdv + Ndt), soit (p ? JM) dv ? JNdt exprime le bilan.
39Thomson précise que cette expression correspond à celle de la mesure mécanique de l’effet total extérieur (« mechanical measure of the total external effect ») [44]. Le terme de mécanique correspond à la référence sur laquelle s’élabore la théorie de la chaleur ; l’accession à la mesure est un élément indispensable à toute théorie, elle rend compte de l’expérience et la qualification d’« extérieur » concernant l’effet total est significative de la nécessité de distinguer les paramètres intérieurs (prise en compte des données microscopiques) des paramètres extérieurs préfigurant ainsi la notion de « système ».
40De la même manière que la traduction analytique de la conservation de la chaleur est corrigée dans « On the dynamical theory of heat… » pour tenir compte de l’existence d’un équivalent de la chaleur, l’étape suivante du travail de Thomson réside dans la détermination d’une différentielle totale qui rende compte d’une conservation au cours d’un cycle d’opérations. Puisque dans le texte de 1849 la chaleur jouait ce rôle, il semble « naturel » que l’effet total puisse la remplacer : l’effet mécanique doit constituer une différentielle totale [45].
41Il existe donc une fonction dont (p ? JM) dv ? JNdt est la différentielle totale et pour laquelle la variation sur un cycle d’opérations est nulle. Bien que cette fonction corresponde à l’effet mécanique total, Thomson prend soin, dans une note de bas de page, de préciser cet effet :
« The integral function {(JM ? p ) dv ? JNdt} may obviously be called the mechanical energy of the fluid mass ; as (when the constant of integration is properly assigned) it expresses the whole work the fluid has in it to produce [46]. »
43Cet extrait pour lequel Thomson emploie pour la première fois l’expression énergie mécanique appelle plusieurs commentaires.
44L’énergie mécanique, comme l’effet mécanique, s’exprime cette fois encore comme la somme des travaux. Elle rend compte de tous les travaux mis en œuvre lors d’un cycle de Carnot et désigne, à ce titre, l’énergie totale et non une énergie particulière. Le terme de « mécanique » dans l’expression « énergie mécanique » est significatif de la démarche de Thomson, qui situe l’ensemble de sa théorie dans le cadre de la mécanique (la nécessité d’exprimer tous les paramètres significatifs en terme de travail relève de cette démarche). Le terme de « mécanique », s’il souligne celui d’« énergie », ne le précise pas ; Thomson ne conçoit pas une énergie hors du contexte de la mécanique.
45En résumé, l’établissement de la première proposition de Thomson repose sur l’acceptation de l’existence d’un équivalent mécanique pour la chaleur qui permet de quantifier la chaleur grâce au travail. De plus, l’effet mécanique permet de préciser que c’est un bilan en terme de travail qui est dressé. Enfin, c’est avec la formalisation analytique de ce bilan que Thomson semble achever son travail. Cette impression d’achèvement de la théorie dynamique de la chaleur entraîne l’interrogation suivante : pourquoi Thomson abandonne-t-il le terme d’effet mécanique pour celui d’énergie ? Cette question est d’autant plus délicate que l’effet est également qualifié de mécanique et qu’il exprime, comme l’énergie, la somme des travaux.
46Deux éléments contribueront à éclairer cette question. Le premier concerne l’introduction du vocable « énergie » dans des textes antérieurs à « On the dynamical theory of heat… », alors que le second concerne les pertes d’effet observées lors du fonctionnement des machines.
L’introduction de l’énergie dans les textes antérieurs à « On the dynamical theory of heat… »
47L’une des principales critiques que Thomson, dès 1849, formule à l’encontre des travaux de Carnot et Joule concerne les pertes d’effet mécanique systématiquement observées lors du fonctionnement des machines. Cette critique a pour origine l’existence chez Thomson d’un principe de conservation invalidant toute hypothèse de perte d’effet. Ce principe de conservation introduit le terme d’énergie qui est utilisé à deux reprises dans des circonstances identiques. Ainsi, dans « An account of Carnot’s theory of heat… », Thomson s’interroge sur ce que devient l’effet perdu dans les machines : « … what becomes of the mechanical effect […] nothing can be lost in the operations of nature – no energy can be destroyed [47]. »
48La seconde utilisation figure dans le « draft », texte préparatoire à « On the dynamical theory of heat… ». Ce sont toujours les mêmes préoccupations relatives à la perte d’effet pour lesquelles Thomson s’interroge : « … no destruction of energy can take place in the material world without an act of power possessed by the supreme rule [48]… »
49Il convient de noter que le terme de « mécanique » n’est pas associé à celui d’« énergie » dans les deux exemples cités. D’autre part et c’est l’élément déterminant qui résulte de l’analyse de ces deux extraits, l’énergie ainsi introduite par Thomson n’est pas associée à un concept de la physique. L’énergie apparaît comme un a priori métaphysique auquel les lois de la physique doivent se soumettre.
50Cette conclusion diffère de celle proposée par Smith [49], qui suggère que le terme d’énergie introduit dans « An account of Carnot’s theory of heat… » appartient au contexte de la physique mathématique, laissant ainsi supposer que, dès 1849, l’énergie est considérée par Thomson comme un véritable concept de la physique [50]. Smith suppose que c’est pour souligner l’importance de la force vive (importance du théorème de la conservation de la force vive ou importance de la conversion entre la force vive et le travail) que Thomson introduit le terme énergie ; la force vive désignant dans un premier temps la chaleur uniquement : « Thomson therefore goes on to employ the name “energy” in the draft to avoid terminalogical confusion [51]… » Si l’importance de la force vive est indéniable chez Thomson, nous montrerons dans la partie suivante que le terme d’énergie ne souligne pas celui de force vive.
51Finalement, dans les textes antérieurs à « On the dynamical theory of heat… », Thomson exprime à travers la conservation de l’énergie un principe métaphysique fondamental mais, si ce principe prévaut quant à l’élaboration des lois de la physique, il ne s’exprime pas dans ces textes comme un principe de la physique.
Le problème des pertes
52Le deuxième élément permettant de justifier l’émergence de la conservation de l’énergie dans les travaux de Thomson réside dans la réponse que ce dernier apporte aux problèmes des pertes. Ainsi, dans « An account of Carnot’s theory of heat… », c’est à propos de la conduction de la chaleur et des pertes d’effet qui en résultent que Thomson s’interroge. Si l’existence d’un équivalent mécanique pour la chaleur semble résoudre le problème des pertes d’effet qui correspondent à une production de la chaleur [52], il ne constitue cependant pas une réponse satisfaisante à un problème économique majeur : la perte d’effet systématiquement observée lors du fonctionnement des machines. Comment interpréter l’équivalent mécanique de la chaleur et accepter simultanément le fait que la transformation de la chaleur en travail soit limitée ? Thomson est confronté à un paradoxe : comme Carnot, il pense que le rendement des machines est limité, mais contrairement à ce dernier, il rejette la perte absolue de puissance motrice et comme Joule, il accepte la nature dynamique de la chaleur, mais contrairement à ce dernier, il pense que la transformation de la chaleur en travail est limitée [53].
53Bien qu’il n’argumente pas son point de vue, les contradictions auxquelles Thomson est confronté semblent déjà partiellement résolues à la fin de la première partie de « On the dynamical theory of heat… » :
« Also, we see that Carnot’s expression for the mechanical effect derivable from a given quantity of heat by means of a perfect engine in which the range of temperatures is infinitely small, expresses truly the greatest effect which can possibly be obtained in the circumstances ; although it is in reality only an infinitely small fraction of the whole mechanical equivalent of the heat supplied ; the remainder being irrecoverably lost to man, and therefore “wasted”, although not annihilated [54]. »
55La réponse apportée par Thomson à l’incompréhension de la transformation de la chaleur en travail réside entièrement dans l’utilisation du terme « wasted », à la place de « annihilated ». Ainsi lors du fonctionnement des machines, de l’effet mécanique n’est pas perdu comme le pense Carnot, il est gaspillé, impropre au fonctionnement d’une machine.
56En 1852, dans « On the universal tendency in nature to the dissipation of mechanical energy [55] », Thomson justifie ses choix et apporte les réponses à ses contradictions. Comme il l’avait déjà indiqué, il exclut la possibilité d’une perte absolue d’effet mécanique, ce dernier étant gaspillé. L’aspect novateur du texte de 1852 par rapport aux textes antérieurs réside dans l’importance accordée aux phénomènes irréversibles [56].
57Ainsi, une machine qui ne suit pas le critère de « perfect thermodynamic engine [57] » est irréversible, et l’effet obtenu est nécessairement inférieur à l’effet maximal décrit par Carnot. Ce critère et l’indestructibilité de l’effet mécanique à laquelle il est associé constituent un paradoxe dont la réponse réside dans les notions de transformation et de dissipation. Il y a transformation, conservation et dissipation. L’effet mécanique dans les machines ou lors de la conduction n’est pas réellement perdu, il se transforme et se dissipe.
58L’idée de transformation n’est pas innovante, l’équivalence proposée par Joule et la généralisation des processus de conversion en rendent compte. Cependant Thomson va plus loin puisqu’il précise la nature de la transformation qui correspond, lors des phénomènes irréversibles, à une certaine dissipation. Ainsi, la transformation de chaleur en travail coïncide avec une certaine dissipation d’énergie mécanique. Cette dernière devient impropre au fonctionnement d’une machine, c’est une énergie inutile [58]. L’utilisation du terme « wasted » est ainsi justifiée.
59La prise en compte des deux aspects précédemment étudiés (la distinction entre le travail et l’effet mécanique ainsi que les caractéristiques propres à l’énergie) permet d’apporter un élément de réponse à l’introduction de l’expression « énergie mécanique » que Thomson substitue à « effet mécanique » dans « On the dynamical theory of heat… ».
60Si l’effet mécanique et le travail se confondent souvent dans les travaux des contemporains de Thomson, ce dernier, quant à lui, distingue les deux termes. L’effet mécanique permet d’établir un bilan de tous les travaux, la chaleur étant considérée comme une forme de travail. Cependant, l’effet mécanique tel qu’il est introduit dans « On the dynamical theory of heat… » ne prend pas véritablement en compte la notion de transformation, encore moins celle de dissipation : il exprime un bilan en terme de travail. Dans « On the universal tendency in nature to the dissipation of mechanical energy », Thomson souhaite préciser que les grandeurs du bilan sont significatives d’une transformation, d’une certaine dissipation mais que globalement le bilan reste conservatif. Par conséquent, ces grandeurs sont les formes d’expression d’une même entité et c’est pour exprimer cette particularité que Thomson doit utiliser un terme commun à toutes et qui se distingue de l’effet mécanique [59].
61Comme cela a été souligné précédemment, Thomson dispose déjà d’un « principe de conservation métaphysique » qui stipule que quelque chose doit rester constant. Ainsi, les lois de la physique doivent implicitement en rendre compte, même si la superposition des domaines d’application de ces lois et de ce principe n’est pas encore élucidée.
62Finalement, l’énergie, sorte de principe universel dans « An account of Carnot’s theory of heat… », devient le concept idéal qui satisfait à la contrainte de rendre compte des transformations et qui unit ces transformations grâce à un dénominateur commun. L’énergie est la donnée commune et unificatrice de toutes les transformations envisageables.
63Il convient de souligner à nouveau que Thomson, entre 1849 et 1851, passe du vocable « énergie » à celui d’« énergie mécanique ». C’est donc en s’ancrant dans la mécanique que le principe général de conservation exprimé par Thomson dans « An account of Carnot’s theory of heat… » devient un véritable concept de la physique.
64En résumé, l’introduction du concept d’énergie dans la théorie dynamique de Thomson associe à un a priori métaphysique un concept précis qui rend compte de la transformation, de la conservation et de la dissipation de l’énergie. Dans « On the dynamical theory of heat… », cette énergie est qualifiée d’énergie mécanique, indiquant ainsi l’introduction du concept d’énergie dans un domaine central de la physique.
65La formalisation de l’énergie mécanique et les grandeurs associées à cette expression, la chaleur et le travail, invitent à s’interroger sur l’interprétation qu’il convient de donner à l’énergie mécanique chez Thomson, en 1852. Cette question renvoie notamment au lien qui semble apparaître chez cet auteur entre l’énergie et deux principes fondamentaux de la thermodynamique. Il ne s’agit pas, dans la partie suivante, d’interpréter le point de vue de Thomson en regard des deux premiers principes de la thermodynamique mais de souligner l’originalité de cet auteur qui appréhende le concept d’énergie dans un cadre novateur.
La conservation de l’énergie mécanique et les deux premiers principes de la thermodynamique
66L’expression analytique de l’effet mécanique (p – JM)dv – JNdt établie par Thomson dans « On the dynamical theory of heat… » constitue finalement une synthèse des résultats obtenus. Elle rend compte d’un bilan en sommant le travail et la chaleur et elle annonce l’interconversion quantitative et qualitative entre ces deux grandeurs. Plus encore, elle précise le sens de cette somme en affirmant que le travail et la chaleur sont des grandeurs significatives d’une donnée commune que Thomson qualifie d’énergie mécanique. C’est parce que la somme constituée par le travail et la chaleur est une différentielle totale, qu’il s’agit d’une fonction d’état.
67D’autre part, l’énergie mécanique qui est introduite pour préciser l’effet mécanique tient compte de toutes les variations internes et externes du système : l’énergie mécanique est en fait une énergie totale. Ces différents éléments permettent d’effectuer un bilan relativement à « On the dynamical theory of heat… ».
68Thomson donne une définition de l’énergie proche de celle que l’on peut trouver aujourd’hui : « … the mechanical energy […] expresses the whole work the fluid has in it to produce [60]. »
69Dans la Ve partie de ce texte, il s’interroge sur « the quantities of mechanical energy contained in a fluid in different states, as to temperature and density » et apporte des précisions sur les liens entretenus entre grandeurs internes et externes. Thomson souligne que l’émission de chaleur par un fluide correspond à un travail exercé par ce fluide sur le milieu extérieur ; il effectue un bilan, et indique que la production d’effet mécanique résulte d’une transformation du fluide « … so as to contain a less store of work within it by an amount precisely equal to the aggregate value of the mechanical effect produced… ». Ainsi, le principe de la conservation de l’effet mécanique (ou le principe de conservation de l’énergie) le conduit à justifier la production d’un effet mécanique macroscopique à l’aide de la consommation d’une grandeur interne au fluide. Il poursuit en définissant l’énergie mécanique totale contenue dans un fluide comme étant l’équivalent mécanique de la chaleur totale qu’un corps est susceptible de produire en étant refroidi à l’extrême [61]. Cette énergie mécanique prend en compte les données intérieures au corps, la transformation d’une grandeur intérieure en grandeur extérieure et la conservation de l’effet mécanique. D’autre part, cette énergie mécanique ne dépend que de l’état initial et de l’état final du corps ; c’est une fonction d’état qui s’apparente dans ce cas à l’énergie interne U.
70Remarques :
711/ Thomson n’utilise pas littéralement l’expression d’énergie interne et dans ce texte, les données intérieures se réduisent à celles d’un potentiel intérieur (« … store of work… »).
722/ La clarification des concepts au début des années 1850 ne correspond pas systématiquement à une précision accrue du vocabulaire. Ainsi l’expression énergie mécanique indique ici une énergie interne et non une énergie totale et cet usage oblige Thomson à exprimer son bilan à l’aide d’une expression différente ; il choisit l’effet mécanique [62] qui exprime un bilan. Par ailleurs, puisque l’énergie mécanique de Thomson tient compte des variations des travaux et de la chaleur mis en jeu et que cette énergie mécanique évoque implicitement l’énergie interne, l’expression analytique de l’effet mécanique peut être interprétée comme une expression inachevée [63] du premier principe de la thermodynamique.
733/ Il convient de souligner que l’approche par Thomson du concept d’énergie interne n’est pas novatrice ; c’est la nécessité pour ce dernier d’appréhender globalement la théorie que cette analyse vise. La question de l’énergie interne renvoie aux travaux de Clausius, notamment à sa Théorie mécanique de la chaleur [64], qui est constituée d’un ensemble de mémoires publiés entre 1850 et 1862 [65]. Dans ce texte, Clausius apporte une réponse à la contradiction résultant d’une part des travaux de Carnot (conservation de la chaleur) et d’autre part de ceux de Joule (existence d’un équivalent mécanique de la chaleur) [66]. Cette approche le conduit à préciser l’expression de la chaleur en fonction du travail en distinguant pour ces deux grandeurs ce qui relève des actions extérieures et intérieures au système étudié. Cette distinction joue un rôle essentiel dans la théorie de Clausius puisque seules les grandeurs internes se conserveront lors d’un cycle d’opérations.
74Par ailleurs, le recours à l’analyse permet à Clausius de conclure que ni la chaleur ni le travail ne sont des fonctions d’état. Ainsi, en s’interrogeant sur ce qui distingue la chaleur d’une fonction d’état, Clausius est amené à introduire « … U qui est une fonction arbitraire de v et de t [67]… ». La fonction U regroupe les grandeurs du système étudié, elle est déterminée par l’état initial et l’état final de ce système ; c’est une fonction d’état.
75Si, dans le mémoire de 1850, l’introduction de la fonction U n’est pas explicitée (elle sera nommée en 1864 par Clausius), son rôle en revanche confirme la nécessité, pour Clausius, de reconsidérer, en la précisant, la notion de chaleur afin d’établir une expression qui lie cette grandeur avec le travail. C’est seulement dans l’un de ses commentaires de 1864 que Clausius indique, à propos de la fonction U : « … cette fonction, dis-je, est d’une grande importance dans la théorie de la chaleur, et il en sera beaucoup question dans les Mémoires suivants [68]. » Cet ajout confirme les orientations de Clausius en 1850, plus attaché à expliciter la chaleur en fonction du travail afin de rendre compte de la synthèse qu’il a établie entre les travaux de Carnot et de Joule qu’à interpréter la fonction U.
76Relativement à l’irréversibilité, comme cela a déjà été souligné, c’est dans le texte qu’il consacre à la dissipation de l’énergie que Thomson exprime clairement son point de vue : « As it is most certain that Creative Power alone can either call into existence or annihilate mechanical energy, the “waste” referred to cannot be annihilation, but must be some transformation of energy [69]. » Si l’arrière-plan reste celui d’un principe de conservation qui, depuis 1849, s’est affirmé comme étant la conservation d’un concept de la physique et non plus celle d’un concept métaphysique, le point détaillé ici par Thomson est celui de la transformation qualitative et de la dissipation de l’énergie mécanique. La difficulté était d’appréhender la dissipation de l’énergie dans le contexte de sa conservation.
77C’est en reprenant dans son article relatif à la dissipation une proposition déjà citée dans « On the dynamical theory of heat… », et qui sert de support à la démonstration de la seconde proposition de la théorie de la chaleur, que Thomson règle la question des pertes : « It is impossible, by means of inanimate material agency, to derive mechanical effect from any portion of matter by cooling it below the temperature of the coldest of the surrounding objects [70]. » Finalement, en énonçant une des formulations du second principe, Thomson résout définitivement le problème des pertes qui interviennent lors des processus irréversibles [71] : cette résolution est fondamentale car elle lui permet désormais d’appréhender le concept d’énergie dans sa globalité. Ainsi, et cet aspect est significatif du style de Thomson, la conservation de l’énergie ne se conçoit qu’en tenant compte de la dissipation, qui relève du second principe de la thermodynamique, et d’une approche de l’énergie interne, qui permet une formulation du premier principe de la thermodynamique. Bien que le vocabulaire de Thomson manque encore de précision, la distinction entre énergie mécanique, énergie interne et énergie totale participe à l’appréhension du concept.
78C’est la même approche que Thomson développe dans Treatise on natural philosophy [72] pour présenter le principe de conservation de l’énergie dans le cadre de la mécanique. Dans le chapitre intitulé « Dynamical laws and principles », il affirme emprunter à Newton les principales définitions (masse, force, inertie…) qui permettent d’établir la dynamique [73]. Il indique que la troisième loi de Newton [74] fonde le principe de conservation de l’énergie :
« Work done on any system of bodies […] has its equivalent in work done against friction, molecular forces, or gravity, if there be no acceleration, but if there be acceleration, part of the work is expended in overcoming the resistance to acceleration, and the additional kinetic energy developed is equivalent to the work so spent […] When part of the work is done against molecular forces, as in bending a spring ; or against gravity, as in raising a weight ; the recoil of the spring, and the fall of the weight, are capable at any future time, of reproducing the work originally expended [75]. »
80Ainsi, en assimilant l’action à un travail exercé sur un corps et en associant à la réaction un travail intérieur nécessairement égal et opposé au travail exercé, Thomson établit un bilan conservatif qui prend en compte les grandeurs extérieures et intérieures.
81Cependant, il limite la contribution de Newton en soulignant qu’une théorie moderne de l’énergie ne peut considérer la perte de travail observée comme étant une perte absolue [76]. Si le problème des pertes était central dans les textes témoignant de l’élaboration de la théorie dynamique de la chaleur, la partie consacrée à la conservation de l’énergie dans Treatise on natural philosophy indique clairement que les pertes sont « constitutives » de la théorie. Ainsi, à propos des conditions nécessaires à l’obtention d’un système conservatif, Thomson indique : « In nature the hypothetical condition […] is apparently violated in all circumstances of motion [77]. » Cette violation réside notamment dans l’omniprésence des frottements qui entraînent une dépense de travail non compensée, mais cette violation n’est qu’apparente car la perte supposée correspond à la production d’une quantité équivalente de chaleur. Thomson introduit ainsi son exposé sur le principe de conservation de l’énergie. Il poursuit en indiquant qu’une théorie complète doit prendre en compte toutes les transformations de l’énergie et il énonce le principe de la conservation de l’énergie mécanique (en termes contemporains) :
« Thus we shall conclude, that if any limited portion of the material universe could be perfectly isolated, so as to be prevented from either giving energy to, or taken energy from, matter external to it, the sum of its potential and kinetic energies would be the same at all times [78]. »
83Il est significatif que Thomson achève ce volet consacré à la conservation de l’énergie en revenant une fois encore sur le caractère universel du principe qui s’exprime véritablement lorsque tous les mouvements intérieurs sont pris en compte [79]. Finalement, lorsqu’elle n’a pas ce caractère général, la conservation de l’énergie mécanique doit être considérée comme un cas particulier de ce principe universel.
84Thomson formule enfin « the law of energy » dans le cadre de la « dynamique abstraite [80] » : « The whole work done in any time, on any limited material system, by applied forces, is equal to the all effect in the form of potential and kinetic energy produced in the system, together with the work lost in friction [81]. » Cet énoncé nous suggère les remarques suivantes. Les variations des énergies cinétique et potentielle s’accompagnent de pertes ; cet aspect constitue l’aspect universel du principe qui précise la conservation de l’énergie mécanique.
85La difficulté à exprimer les grandeurs intérieures (l’énergie interne reste implicite) et l’imprécision des qualificatifs de l’énergie (les énergies totale ou interne sont, selon le contexte, qualifiées d’énergie mécanique, alors que le sens de chacune de ces expressions est clairement identifié) justifient, dans l’extrait cité ci-dessus, l’utilisation du terme de travail pour désigner l’énergie.
86Finalement, si l’étape qui conduit de la force vers le travail demeure une donnée essentielle pour accéder à la conservation de l’énergie, l’étape restant à parcourir entre le travail et l’énergie ne doit pas être négligée. Ainsi, l’importance de l’effet mécanique et l’explicitation des concepts (approche de l’énergie interne) sont des éléments qui permettent également de mieux appréhender le principe de conservation de l’énergie. À ce titre, les travaux de Thomson sont novateurs. L’aspect novateur réside dans l’appréhension globale des phénomènes que Thomson étudie, et, si cette approche est source de contradiction, et d’incompréhension, c’est cette vision globale qui lui permet d’aborder le principe de conservation de l’énergie dans toute sa généralité.
La conservation de l’énergie mécanique n’est pas la conservation de l’énergie
87Il est usuel d’associer le principe de la conservation de l’énergie au principe de conservation de l’énergie mécanique et par conséquent de confondre le théorème de l’énergie mécanique avec la conservation de l’énergie. S’il est vrai que la conservation de l’énergie mécanique constitue un cas fréquent, il n’en demeure pas moins que cette conservation n’intervient que dans des circonstances précises qui n’autorisent aucune généralisation. Ainsi, pour que l’énergie mécanique se conserve, deux conditions doivent être respectées [82].
88La première condition indique que les systèmes concernés doivent être isolés (les forces extérieures sont inexistantes) ou pseudo-isolés (systèmes pour lesquels la contribution globale des forces extérieures est nulle).
89Si cette première condition est couramment évoquée, la seconde est plus rarement citée. Celle-ci stipule que la puissance des forces intérieures qui ne dérivent pas d’un potentiel doit être nulle.
90Ces conditions appellent deux commentaires :
- L’énergie mécanique n’est pas généralement une grandeur conservative, sa conservation intervient comme un cas particulier (même si ce cas est fréquent).
- La seconde condition évoquée ci-dessus souligne l’importance qu’il convient d’accorder aux grandeurs intérieures du système. En effet, la confusion fréquente qui s’installe entre le théorème de l’énergie mécanique et la conservation de l’énergie provient généralement de la négligence des grandeurs intérieures.
Mots-clés éditeurs : thermodynamique, effet mécanique, chaleur, William Thomson, travail, principe de conservation de l'énergie
Date de mise en ligne : 01/01/2010.
https://doi.org/10.3917/rhs.591.0029Notes
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[*]
Muriel Guedj, IUFM, 2, place Marcel-Godechot, BP 4152, 34092 Montpellier Cedex 5. Cet article constitue une partie de mon travail de thèse de doctorat (université Paris-7, février 2000), « L’émergence du principe de conservation de l’énergie et la construction de la thermodynamique », préparée au sein du REHSEIS (CNRS), sous la direction de Michel Paty. Je tiens à remercier Olivier Darrigol de m’avoir aidée par ses remarques pertinentes à approfondir certains points du texte.
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[1]
Se reporter à l’annexe qui souligne la distinction entre énergie mécanique et énergie totale.
-
[2]
Pour ces différents éléments, voir Thomas Kuhn, Energy conservation as an example of simultaneous discovery (1959), in The Essential tension : Selected studies in scientific tradition and change (Chicago, 1977), trad. française de Michel Biezunski, Pierre Jacob, Andrée Lyotard-May et Gilbert Voyat : Un exemple de découverte simultanée : La conservation de l’énergie (Paris : Gallimard, 1990), 321-356 ; Donald Cardwell, Some factors in the early development of the concepts of power, work and energy, The British Journal for the history of science, 3 (1967), 209-224 ; Id., FromWatt to Clausius : The rise of thermodynamics in the early industrial age (Londres : Heinemann, 1971) ; Peter Heimann, Conservation of force and the conservation of energy, Centaurus, 18 (1974), 147-164 ; Peter Harman, Energy, force and matter : The conceptual development of nineteenth century physics (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1982), 33-44 ; Balfour Stewart, La Conservation de l’énergie (Paris : G. Baillière, 1875).
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[3]
Olivier Darrigol, God, waterwheels, and molecules : Saint-Venant’s anticipation of energy conservation, Historical studies in the physical sciences, 31/2 (2001), 285-353. Dans ce texte, Olivier Darrigol indique que la mécanique de d’Alembert, Lagrange et Newton n’est pas conservative. La réduction à une mécanique conservative ne va donc pas de soi. Notre présentation de l’analyse par Thomson des travaux de Newton va dans ce sens ; voir la dernière partie de cet article.
-
[4]
Les douze auteurs cités sont : Julius Robert Mayer, James P. Joule, Ludwig August Colding, Hermann von Helmholtz, Sadi Carnot, Marc Séguin, Karl Holtzmann, Gustave-Adolphe Hirn, Carl Friedrich Mohr,William Robert Grove, Michael Faraday et Justus von Liebig ; voir Kuhn, op. cit. in n. 2, 111-156.
-
[5]
Isaac Newton, Les Principes mathématiques de la philosophie naturelle (1687), trad. et rééd. critique de Marie-Françoise Biarnais (Paris : Christian Bourgois, 1985).
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[6]
La force vive est notée mv2 par Laplace.
-
[7]
Voir par exemple Ernst Mach, La Mécanique : Exposé historique et critique de son développement, rééd. (Paris : Éd. Jacques Gabay, 1987 ; 1re éd., 1904).
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[8]
NortonWise,William Thomson‘s mathematical route to energy conservation : A case study of the role of mathematics in concept formation, Historical studies in the physical sciences, 10 (1979), 49-83.
-
[9]
Crosbie Smith, Energy, in Companion to the history of modern science (Routledge : Ed. Olby, Cantor, Christie & Hodge, 1990), 326-341. Voir page 327.
-
[10]
Navier est professeur adjoint à l’École des ponts et chaussées, Coriolis répétiteur à l’École polytechnique pour les cours d’analyse et de mécanique d’Augustin Cauchy et André-Marie Ampère. Voir pages 13 et 27 d’Ivor Grattan-Guinness, Work for the workers : Advances in engineering mechanics and instruction in France, 1800-1830, Annals of science, 41 (1984), 1-33.
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[11]
Pour l’expression de cette équation, voir Ernst Mach, La Mécanique : Exposé historique et critique de son développement (1904) (Paris : J. Gabay, 1987), 327.
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[12]
Sadi Carnot indique qu’une machine qui fournit du travail au cours d’un cycle échange nécessairement de la chaleur avec deux sources de températures différentes.
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[13]
Sadi Carnot, Réflexions sur la puissance motrice du feu (1824), éd. critique par Robert Fox (Paris : Vrin, 1978).
-
[14]
Maurice Crosland, Crosbie Smith, The Transmission of physics from France to Britain, Historical studies in the physical and biological sciences, 9 (1978), 1-61 ; A new chart for British natural philosophy, the development of energy physics in the 19th century, History of science, 16 (1978), 251-279.
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[15]
Smith, op. cit. in n. 9, 326.
-
[16]
La force vive s’exprime comme le demi-produit de la masse par le carré de la vitesse (énergie cinétique). Le théorème de la force vive établit une égalité entre le travail et la force vive (le théorème de l’énergie cinétique). Selon Ernst Mach, ce théorème a été utilisé pour la première fois par Christiaan Huygens, il s’est ensuite généralisé. Voir Mach, op. cit. in n. 11, 327.
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[17]
Smith, op. cit. in n. 9, 329-330.
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[18]
Lewis Gordon est professeur à l’université de Glasgow, où Thomson étudie.
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[19]
Smith, op. cit. in n. 9, 330 ; Crosbie Smith et Norton Wise, Energy and Empire : A biographical study of Lord Kelvin (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1989).
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[20]
Grattan-Guinness, op. cit. in n. 10.
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[21]
Smith, op. cit. in n. 9, 326 et 330.
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[22]
Il faut ici souligner que c’est la multiplication de ces conversions qui incite Kuhn à introduire la notion de « réseau ». Ce terme nous semble illustrer l’ensemble des processus qui conduisent à la conservation de l’énergie et pas seulement les processus de conversion. Kuhn, op. cit. in n. 2, 127
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[23]
Ibid., voir pour cette question la page 121.
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[24]
« On the dynamical theory of heat, with numerical results deduced from Mr Joule’s equivalent of a thermal unit, and M. Regnault’s observations on steam » ; ce texte en plusieurs parties est publié durant l’année 1852 dans la revue Philosophical magazine, voir la note 27 infra.
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[25]
L’importance d’une théorie dynamique dans la philosophie écossaise est soulignée dans Smith etWise, op. cit. in n. 19 ; pour ce qui concerne le point de vue de Thomson, voir plus particulièrement le chapitre intitulé « The dynamics of field theory », pages 237 à 281. Voir également Stephen G. Brush, The Kind of motion we call heat, 2 vol. (Amsterdam : North-Holland, 1976) ainsi que Donald F. Moyer, Energy, dynamics, hidden machinery : Rankine, Thomson and Tait, Maxwell, Studies in history and philosophy of science, 8/3 (1977), 251-268.
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[26]
Cette expression, rarement utilisée par Thomson, semble ici volontairement empruntée à Carnot.
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[27]
William Thomson, On the dynamical theory of heat, with numerical results deduced from Mr Joule’s equivalent of a thermal unit, and M. Regnault’s observations on steam, Philosophical magazine, série 4, 4/23 (1852), 8-21, 105-117, 168-176, 424-434. Voir la page 11.
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[28]
Traduction de : « Heat is not a substance but a state of motion. » (Ibid., 9.)
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[29]
« The temperature of a substance can only be raised by working upon it in some way so as to produce increased thermal motions within it. » (Ibid., 12.)
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[30]
La notion de système est sous-jacente (le corps étudié constitue le système et les grandeurs sont qualifiées d’intérieures ou d’extérieures relativement à ce dernier) mais pas explicitée dans cette partie du travail de Thomson.
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[31]
Cette absence de précision concernant les termes de « travail » et « effet mécanique » concerne non seulement le domaine d’étude de la chaleur mais aussi tous les domaines abordés par Thomson.
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[32]
« The sole effect to be contemplated in investigating the motive power of heat is resistance overcome, or, as it is frequently called, “work performed” or “mechanical effect”. »William Thomson, An account of Carnot’s theory on the motive power of heat, with numerical results deduced from Regnault’s experiments on steam, Proceedings of the Royal Society of Edinburgh, lu le 2 janvier 1849 ; Id., Mathematical and physical papers, vol. 1 (Cambridge, 1849), 113-155. Voir la page 114.
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[33]
Voir Thomson, op. cit. in n. 32, 124-125.
-
[34]
Thomson, op. cit. in n. 27, 12.
-
[35]
Ibid.
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[36]
WF ext. = travail de forces extérieures sur le corps,Wf int. = travail des forces internes au corps, est une variation qui traduit les mouvements thermiques internes aux corps.
Cette traduction résulte de : « Now, according to the dynamical theory of heat, the temperature of a substance can only be raised by working upon it in some way so as to produce increased thermal motions within it, besides effecting any modifications in the mutual distances or arrangements of its particles which may accompany a change of temperature. » (Ibid., 12.) -
[37]
Il obtient alors effectivement M. E. = WF ext.. L’importance de cet aspect est analysé en
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[38]
Voir les notes 11 et 16.
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[39]
William Thomson, On the theory of electro-magnetic (sic) induction (1848), in Id., Mathematical and physical papers (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1882), 91.
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[40]
William Thomson, Applications of the principle of mechanical effect to the measurement of electro-motive (sic) forces, and of galvanic resistances, in absolute units (1851), in Id., Mathematical and physical papers (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1882), 490-502.
-
[41]
Ibid., 490.
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[42]
Pour Carnot, la chaleur est une fonction d’état qui se conserve sur un cycle d’opérations.
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[43]
L’importance de ce point sera détaillée ultérieurement.
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[44]
Thomson, op. cit. in n. 27, 18.
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[45]
Dans ses deux textes « An account of Carnot’s theory of heat… » et « On the dynamical theory of heat… », Thomson utilise l’expression de « differential of a function », et non celle de « différentielle exacte ou totale ». Cependant, le sens qu’il donne à ces expressions permet de conclure qu’il s’agit de différentielle totale. Cette remarque est par ailleurs confirmée dans une note rectificative qu’il apporte, en 1881, au texte de 1849 et pour laquelle il écrit : « In the correct theory it is (M ? Jp ) dv + Ndt, that is a complete differential, not Mdv + Ndt », (il convient de noter que Thomson aurait dû écrire son expression ( JM ? p ) dv + JNdt). Voir Thomson, op. cit. in n. 32, 129.
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[46]
Thomson, op. cit. in n. 27, 19.
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[47]
Thomson, op. cit. in n. 32, 118.
-
[48]
William Thomson, « Preliminary draft for the “dynamical theory of heat” », PA 128, Kelvin papers, Cambridge university library, in Crosbie Smith,William Thomson and the creation of the thermodynamics : 1840-1855, Archives for history of exact sciences, 16/3 (1976), 231-288. Voir ce « draft », page IV. Ce point de vue est à rapprocher de celui de Joule, qui critique la théorie de Carnot (voir la note 51 infra).
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[49]
Thomson, op. cit. in n. 48 et Smith, op. cit. in n. 9.
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[50]
Smith, op. cit. in n. 9, 333.
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[51]
Smith, op. cit. in n. 41, 264. Dans son texte de 1990, Smith suggère que c’est en adoptant le point de vue de Joule que Thomson adopte également le point de vue métaphysique de ce dernier : « Believing that the power to destroy belongs to the Creator alone, I entirely coincide […] in the opinion that any theory which, when carried out, demands the annihilation of force is necessarily erroneous. » (Page 332.) Nous n’approuvons pas ce point de vue, étant donné qu’en 1849, Thomson évoque l’énergie dans le cadre d’un principe métaphysique et qu’il n’a pas à ce moment-là encore véritablement accepté les travaux de Joule. L’étude précédente a montré que Thomson introduit dans son texte de 1849 une traduction analytique du principe fondamental qui sous-tend le travail de Carnot. Cependant, ce principe fondamental ne concerne pas la conservation de l’énergie mais celle de la chaleur et il semble difficile, dans ces conditions, d’interpréter l’énergie comme un concept de la physique.
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[52]
L’équivalent apporte également une solution à un problème analogue et sur lequel Thomson s’est interrogé avant d’étudier la chaleur, il s’agit des pertes dues aux frottements des fluides en mouvement.
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[53]
Les réticences de Thomson pour accepter l’équivalent mécanique de la chaleur résultent de ce problème.
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[54]
Thomson, op. cit. in n. 2, 20.
-
[55]
William Thomson, On a universal tendency in nature to the dissipation of mechanical energy, Proceedings of the Royal Society of Edinburgh, lu le 19 avril 1852 ; Philosophical magazine, IV (octobre 1852), 304-306.
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[56]
L’irréversibilité chez Thomson a été commentée à plusieurs reprises ; ce que nous tentons de montrer ici concerne le lien entre l’irréversibilité telle qu’elle est dégagée par Thomson et l’émergence du principe de conservation de l’énergie.
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[57]
Thomson, op. cit. in n. 55, 304.
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[58]
Bernard Brunhes (1909), La Dégradation de l’énergie (Paris : Flammarion, 1991).
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[59]
C’est en ce sens que le fait de disposer de processus de conversion ne nous semble pas équivalent à la conservation de l’énergie. La conservation de la force vive ou celle du travail n’implique pas de définir une grandeur commune à toutes les conversions. Voir par exemple Mach, op. cit. in n. 11, 324.
-
[60]
Thomson, op. cit. in n. 27, 19.
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[61]
William Thomson évoque la difficulté à aborder ce point étant donné « … our present state of ignorance regarding perfect cold and the nature of molecular force… » ; il indique que, dans ces conditions, la détermination de ce qu’il nomme encore énergie mécanique totale est impossible.
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[62]
Ce choix résulte du rôle joué par l’effet mécanique dans la théorie de Thomson (voir la première partie de cet article). Ainsi et c’est une particularité, les deux expressions énergie mécanique et effet mécanique cohabitent dans ce texte.
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[63]
Le terme « inachevée » se justifie par l’absence d’explicitation du concept d’énergie interne.
-
[64]
Rudolph Clausius (1868), Théorie mécanique de la chaleur, 2 vol., trad. française par François Folie, Eugène Lacroix (Paris, 1968) ; fac-similé (Paris : J. Gabay, 1991).
-
[65]
Au mémoire I publié en 1850, Clausius ajoute en 1864, à l’occasion de l’édition française, un certain nombre de notes et compléments théoriques. Le texte de 1850 est toutefois réédité à l’identique et les notes et additions se distinguent nettement du texte permettant ainsi au lecteur d’apprécier l’évolution de la pensée de Clausius. Le mémoire I est particulièrement intéressant pour une analyse comparative des travaux de Thomson et de Clausius. (Guedj, op. cit. in n. *.)
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[66]
« … en y réfléchissant de plus près, on trouve que ce n’est pas le principe fondamental même de Carnot, mais l’assertion qu’il ajoute qu’il n’y a pas de chaleur perdue, qui est en contradiction avec la nouvelle manière de voir ; car dans la production du travail il peut bien se faire en même temps qu’une certaine quantité de chaleur soit consommée et qu’une autre soit transportée d’un corps chaud à un corps froid, et les deux quantités de chaleur peuvent se trouver dans un rapport déterminé avec le travail produit… » (Clausius, op. cit. in n. 64, 21.)
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[67]
Ibid., 35. v désigne le volume et t la température. Dans la suite du mémoire, Clausius montre que seule la température intervient dans l’expression de U.
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[68]
Ibid., 93.
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[69]
Thomson, op. cit. in n. 55, 304.
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[70]
Thomson, op. cit. in n. 27, 13 et op. cit. in n. 55, 304.
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[71]
« I. When heat is created by reversible process (so that the mechanical energy thus spent may be restored to its primitive condition), there is also a transference from a cold body to a hot body of a quantity of heat bearing to the quantity created a definite proportion depending on the temperatures of the two bodies. II. When heat is created by any unreversible process (such as friction), there is a dissipation of mechanical energy, and a full restoration of it to its primitive condition is impossible. III. When heat is diffused by conduction, there is a dissipation of mechanical energy, and perfect restoration is impossible. IV. When radiant heat or light is absorbed, otherwise than in vegetation, or in chemical action, there is a dissipation of mechanical energy, and perfect restoration is impossible. » (Thomson, op. cit. in n. 55, 304-305.)
-
[72]
William Thomson and Peter G. Tait, Treatise on natural philosophy (1867) (Cambridge : Cambridge Univ. Press, 1879). Cet ouvrage, écrit avec Peter Tait en 1867, consacre le principe de conservation de l’énergie. Seule la mécanique est abordée, les autres domaines de la physique qui devaient initialement être traités ne le sont pas. (Les différentes notes relatives au Treatise on natural philosophy renvoient à des numéros de paragraphes et non à une pagination.)
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[73]
« In what precedes we have given some of Newton’s Definitiones nearly in his own words. » (Ibid., 242.)
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[74]
Thomson traduit cette loi ainsi : « To every action there is always an equal and contrary reaction : or, the mutual actions of any two bodies are always equal and oppositely directed. » (Ibid., 261.)
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[75]
Ibid., 269.
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[76]
Même critique vis-à-vis de Carnot.
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[77]
Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 275.
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[78]
Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 278.
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[79]
« But it is only when the inscrutably minute motions among small parts, possibly the ultimate molecules of matter, which constitute light, heat, and magnetism, and the intermolecular forces of chemical affinity are taken into account, along with the palpable motions and measurable forces of which we become cognizant by direct observation, that we can recognize the universally conservative character of all natural dynamic action… » (Ibid., 278.)
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[80]
La dynamique abstraite constitue le cadre de la formalisation développée dans la suite du Treatise on natural philosophy. Thomson précise les forces non conservatives dont il tiendra compte (voir à ce propos, Thomson et Tait, op. cit. in n. 72, 286).
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[81]
Ibid., 287.
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[82]
Ryogo Kubo, Thermodynamics (Amsterdam : North-Holland publishing company, 1968).