Notes
-
[1]
Les Messaches, 1989.
-
[2]
Groupe Chadule, 1974.
-
[3]
Ciceri, Marchand, Rimbert, 1977.
-
[4]
Merlin, 1973.
-
[5]
Pumain, Saint-Julien, 1984b.
-
[6]
Pumain, Saint-Julien, Vigouroux, 1983.
-
[7]
Cf., par exemple, George, 1972.
-
[8]
Cf. Vigouroux, 1978 ; Chamussy, 2000 ; Vingt-cinquième anniversaire. Groupe Dupont, 1999.
-
[9]
Les effectifs de l’enseignement supérieur ont triplé de 1963 à 1972.
-
[10]
Bourdieu, 1984.
-
[11]
Pumain, 1988b.
-
[12]
Meynier, 1969.
-
[13]
Robic, 1999.
-
[14]
Cf. Burton, 1963 ; Bunge, 1962.
-
[15]
Haggett, 1965.
-
[16]
Berry, Marble, 1968 ; Abler, Adams, Gould, 1971.
-
[17]
Berry, Horton, 1970.
-
[18]
Haggett, Chorley, 1967.
-
[19]
Harvey, 1969.
-
[20]
Berry, 1971.
-
[21]
Gould, 1969.
-
[22]
Racine, Reymond, 1973.
-
[23]
Cf. Le plan du cours donné à Paris I en 1970-1971, qui démarre par une Introduction au raisonnement formel en géographie, puis balaie les principaux modèles spatiaux et leur discussion : Les concepts fondamentaux en géographie théorique, La théorie de la localisation agricole, La théorie des lieux centraux et la règle rang-taille, Le modèle de gravité, Les modèles de densité urbaine, L’analyse des semis de points, Les modèles de diffusion, Le comportement spatial, La perception (P. Gould et les cartes mentales). Elle a aussi participé au Séminaire de géographie théorique organisé par P. Claval à Besançon la même année, où elle a discuté des modèles de comportement.
-
[24]
Vigouroux, 1978.
-
[25]
Chamussy, 1978.
-
[26]
Rey, Robic, 1983.
-
[27]
Pumain, Saint-Julien, Vigouroux, 1983.
-
[28]
Pumain, Saint-Julien, 1984a.
-
[29]
Allen, 1997 ; Pumain et al., 1989.
-
[30]
Sanders, 1992 ; Haag, Pumain, 1991.
-
[31]
Cf. infra.
-
[32]
Cliff, Ord, 1973.
-
[33]
Charre, 1995.
-
[34]
Chesnais, 1991.
-
[35]
L’Hostis, 1997.
-
[36]
Cauvin, 1997.
-
[37]
Dauphiné, 1995.
-
[38]
Frankhauser, 1993.
-
[39]
Voiron-Canico, 1995.
-
[40]
Pumain et al., 1989 ; Sanders, 1992.
-
[41]
Sanders, 2001.
-
[42]
Brunet, 1980.
-
[43]
Pumain, 1998 ; Aschan-Leygonie, 2000.
1 L’introduction des mathématiques en géographie participe d’un renouvellement de la discipline au cours de la seconde moitié du XXème siècle, qui s’est produit partout, et d’abord aux États-Unis et en Suède, en parallèle avec la diffusion d’un modèle de scientifisation des sciences sociales. Mais la mathématisation du champ n’est qu’un aspect d’une révolution scientifique, à partir d’un ensemble de mises en cause de la discipline qui s’était élaborée depuis la fin du XIXème siècle.
2 Tardivement par rapport à des disciplines voisines telle l’économie et sans s’y vouer de manière aussi exclusive et aussi abstraite, la géographie contemporaine a adopté depuis plus de trente ans, en France, des procédures mathématiques relativement sophistiquées qui ont vivement transformé ses pratiques. « Géographie quantitative » ? À cette expression qui désigne parfois ce mouvement, pour le stigmatiser, les géographes partisans d’une mathématisation de leur démarche préfèrent celle de « géographie théorique et quantitative », qui marque mieux leur ambition scientifique.
3 Comment cette innovation s’est-elle produite, dans un domaine marqué par une orthodoxie disciplinaire ancienne rétive à l’abstraction, quelle qu’en soit la forme ? Quelles modalités particulières cette mathématisation du champ a-t-elle adoptées ? Dans un premier temps, on situera le moment de cette ouverture de la géographie française aux mathématiques, au début des années soixante-dix, en rappelant quelques actions qui ont traduit ce changement, en termes de formation et de publications, et en mentionnant au passage quelques-uns des acteurs du mouvement. On précisera ensuite le contenu épistémologique de cette « révolution » et son articulation à différentes sensibilités de la géographie. Dans un second temps, on présentera les aspects particuliers de l’usage des mathématiques par les géographes français, en relation avec la problématique spatiale puis spatio-temporelle qui a fait la spécificité de la nouvelle matrice disciplinaire alors développée. On y évoquera les types de collaborations de recherche qui se sont produits au cours de ces trois décennies en dehors de la géographie et quelques-uns des déplacements conceptuels qui ont affecté la représentation de l’espace du géographe.
4 D’aucuns pourraient suspecter ici un texte à simple valeur de témoignage. Toutefois, cette histoire s’appuie sur un dépouillement systématique des revues de géographie (y compris la littérature grise), des colloques spécialisés, des ouvrages de référence, des bilans et rétrospectives existants, sur une étude des controverses et sur des comparaisons avec les mouvements contemporains dans d’autres pays européens. Sans prétendre à l’exhaustivité, et en ayant renoncé à tenter une évaluation de la situation actuelle, nous avons souhaité faire connaître certaines des transformations considérables intervenues en géographie au cours des trente dernières années, qui sont assez mal connues en dehors de la discipline. Notre ambition est de donner un aperçu des conditions institutionnelles et des contenus de la « révolution » théorique et quantitative, et d’en souligner les aspects qui nous paraissent sortir de la banalité.
I – Les années 1970 : un tournant complexe de la géographie française
5 Si l’usage du nombre n’a jamais été absent de la géographie, malgré de sérieuses critiques engagées contre la statistique (en ce qu’elle a de réducteur de la richesse des faits humains), il n’a longtemps été utilisé que sous forme de tableaux de valeurs brutes ou de pourcentages (superficies et population des pays, densités de population, accroissements démographiques, volumes de productions…), attestant simplement, pour ainsi dire, de la réalité d’un « fait géographique », comme le faisaient de leur côté les photographies ou autres documents censés témoigner de la véracité d’une assertion relative à un pays ou à un paysage. En géographie physique, des essais de morphométrie, des analyses sédimentologiques, des recherches en climatologie, feraient exception. Appuyée sur la production statistique abondante de l’après-guerre, la vogue de la géographie démographique et de la géographie économique a accru la présence du tableau de données chiffrées sans altérer cet usage géographique strictement descriptif du nombre, qui se transcrivait aussi en cartes analytiques de plus en plus nombreuses. La France de demain, une collection des années soixante dirigée par le géographe P. George et par F.L. Closon, un administrateur de l’INSEE, est représentative de cette alliance faible du géographe et du statisticien qui ne fait qu’enregistrer l’inflation statistique.
Géographie et mathématiques : se former et produire
6 Un ensemble d’événements convergents permet de dater des années 1970-1972 un tournant significatif dans la géographie française. Démarre alors, et alors seulement, cette « rencontre de deux cultures jusque-là à peu près séparées » que des historiens des relations entre mathématiques et sciences humaines ont suivies dans l’après-guerre français pour toutes les disciplines, psychologie, économie, linguistique, histoire et géographie [1].
7 Pour se concentrer sur les relations entre mathématiques et géographie, et sans vouloir viser à l’exhaustivité, on rappellera d’abord brièvement l’ampleur de l’investissement de jeunes géographes dans la formation mathématique, statistique et informatique, à partir de ces années-charnière, qui se marque par l’organisation de sessions de formation continue, par des rencontres avec des mathématiciens ou des informaticiens dans des stages et dans des équipes pluridisciplinaires, et par la multiplication de travaux de recherche utilisant le nombre et la mesure de manière renouvelée.
8 Au premier stage long (trois semaines) suivi par des géographes français, organisé par l’ORSTOM à Aix-en-Provence en septembre 1971 et encadré par les mathématiciens du Centre de mathématique sociale de l’EPHE, ont succédé pendant une quinzaine d’années des stages nationaux de formation tenus tous les deux à trois ans avec l’appui du CNRS (tableau 1). Plusieurs équipes spécialisées dans l’application des mathématiques aux sciences sociales ont encadré régulièrement des universités d’été (citons parmi les organisateurs M. Barbut, G.Th. Guilbaud, C. Deniau, B. Montjardet…) où analyse des données, processus spatio-temporels, théorie des graphes, dynamique des systèmes, etc., ont été abordés successivement et complétés éventuellement par la participation à des écoles thématiques organisées au niveau européen par l’OTAN. En parallèle, mais avec une certaine lenteur et beaucoup d’inégalités entre les départements de géographie, la formation des étudiants aux statistiques, à l’analyse des données et à la géographie quantitative a été proposée, et les premiers manuels de statistiques destinés à cet enseignement sont parus en 1974 [2], suivis par des manuels plus nettement orientés vers l’analyse spatiale [3], et accompagnés de manuels plus spécialisés d’analyse quantitative [4].
Stages de formation
Année | Lieu | Thème |
---|---|---|
1971 | Aix-en-Provence | Statistiques et probabilités |
1972 | Paris | Analyse des données 1 |
1974 | Paris | Analyse des données 2 |
1975 | Avignon | Théorie des graphes |
1976 | Strasbourg | Modèles statistiques |
1977 | Strasbourg | Probabilités |
1979 | Montpellier | Autocorrélation spatiale |
1982 | Rouen | Modèles dynamiques |
1984 | Marseille | Théorie de la mesure |
1989 | Grenoble | Systèmes experts |
1994 | Garchy | Modèles dynamiques |
1998 | Montpellier | Analyse spatiale |
2001 | Montpellier | Outils de simulations |
Stages de formation
9 La production de géographie quantitative change de nature durant cette décennie, depuis les premières gammes (les premières analyses factorielles, qui paraissent en 1971 dans la littérature grise et dans un numéro du classique Bulletin de l’Association de géographes français) jusqu’aux premières thèses à forte assise mathématique, qui ont mobilisé des moyens de calcul importants tout en s’attaquant à des problèmes géographiques clairement identifiés, et qui sont soutenues à partir de 1979. Cette production est suffisamment abondante et variée pour que, au début des années quatre-vingt, trois recueils esquissent des bilans : exposé dans L’espace géographique des recherches les plus pointues, tant par leur instrumentation mathématique que par leur thème [5] ; sous le titre « Géographie et informatique » [6], évaluation des apports des nouvelles approches en géographie rurale et urbaine (un volume des Annales de géographie, une revue désormais tenue pour traditionnelle) ; publication d’une Géoscopie de la France qui, signée de l’auteur collectif Théo Quant, se veut la vitrine d’une géographie capable de produire des visions neuves d’un territoire national. L’occasion – la tenue en France du Congrès international de géographie, en 1984 – a mobilisé l’énergie du mouvement « théorique et quantitatif » et d’autres tendances de la géographie française, d’expression plus récente, tel un « groupe de géographie sociale », que la conjoncture politique a activées. L’enjeu : afficher sur la scène internationale la vitalité de la géographie française (voire francophone), et, face à un establishment qui a opposé une vigoureuse résistance à la vague « théorique et quantitative » [7], la fécondité des nouvelles démarches de recherche.
10
Inégalement représenté dans le champ universitaire français, ce mouvement repose avant tout sur des enseignants-chercheurs engagés en masse à l’Université à la fin des années 1960 et au tout début des années 1970. Depuis 1971, il s’est structuré en un vaste réseau informel de personnes, de groupes, et progressivement de laboratoires, qui organisent tour à tour les universités d’été, suscitent des recherches coopératives, créent de nouveaux lieux de débat, tissent des liens avec les géographes étrangers. Ainsi, sont nées en 1971 des associations nouvelles – le Groupe d’analyse géographique (GAG), plutôt parisien, de vie éphémère, créé à la fin du stage d’Aix-en-Provence, le Groupe Dupont, créé entre juin et décembre 1971 à Avignon, qui rassemble notamment des enseignants du grand Sud-Est [8]. Une littérature grise : Brouillons Dupont (Avignon, à partir de 1977), Analyse spatiale quantitative et appliquée (publié à Nice, à partir de 1974) par exemple, accompagne le mouvement. En 1975, la création d’une commission de travail intitulée Géographie théorique et quantitative l’officialise dans l’« institution » géographique constituée par le Comité national français de géographie (par comparaison, une telle commission a été créée en 1964 en Grande-Bretagne sous le nom de Quantitative Methods Study Group). Des rencontres périodiques sont organisées, d’abord sur un plan national : un colloque de géographie quantitative démarre à Besançon en 1972, et, à l’initiative des géographes strasbourgeois, un colloque européen de géographie théorique et quantitative est mis sur pied à partir de 1978. Sans programme préétabli, il vise à confronter tous les deux ans des pratiques qui étaient à l’origine fortement empreintes d’idiosyncrasies nationales (tableau 2).
Colloques européens de géographie théorique et quantitative
Année | Lieu | Pays | Nombre de participants |
---|---|---|---|
1978 | Strasbourg | France | 49 |
1980 | Cambridge | Royaume-Uni | 120 |
1982 | Augsburg | Allemagne | 82 |
1985 | Veldhoven | Pays-Bas | 83 |
1987 | Bardonecchia | Italie | 124 |
1989 | Chantilly | France | 165 |
1991 | Stockholm | Suède | 90 |
1993 | Budapest | Hongrie | 78 |
1995 | Spa | Belgique | 80 |
1997 | Rostock | Allemagne | 111 |
1999 | Durham | Royaume-Uni | 95 |
2001 | Saint-Valéry-en-Caux | France | 120 |
Colloques européens de géographie théorique et quantitative
11 Importance de la composante provinciale, jeunesse des participants, appartenance aux catégories les plus basses de la hiérarchie universitaire, féminisation, définissent globalement un groupe qui a intérêt à la « subversion » de la géographie classique en cette période qui suit un recrutement en masse d’enseignants [9], – si l’on se réfère au modèle de Bourdieu [10]. Au vu des modèles selon lesquels l’innovation se diffuse à partir du sommet de la hiérarchie, la qualité des « adoptants » de la géographie théorique et quantitative suggère bien qu’elle a été le fait des marges : « "pénétration à la marge et par le bas" de la nouvelle géographie [puisque] les provinciaux y ont dans l’ensemble plus mordu que les Parisiens, que l’Université y a largement précédé le CNRS, que la géographie humaine s’y est ouverte bien avant la géographie physique, et que les femmes y ont pris une part importante, sans aucune commune mesure avec leur taux de représentation dans le corps des géographes… » [11]. Ils ont accepté d’en subir le coût : lourdeur d’une formation aux mathématiques, à l’analyse des données et à l’informatique, et conversion intellectuelle, immédiatement ou très vite après l’achèvement de leur cursus géographique (la plupart des nouveaux recrutés de l’enseignement supérieur sont agrégés de géographie, beaucoup ont enseigné dans le secondaire ; la voie DEA puis thèse de troisième cycle débute à peine dans les années 1970).
12 Ce mouvement s’appuie aussi sur des universitaires d’une génération plus ancienne, des jeunes « quadras » déjà installés comme professeurs et qui se rassemblent notamment dans la revue L’espace géographique, fondée en 1972. Cette revue, dont l’éditorial diagnostique une situation positive de « crise » devient la revue moderniste qui soutient d’emblée les « nouvelles tendances » (un surtitre fréquent dans la revue à cette époque) de la géographie française et qui organisera régulièrement des débats entre géographes et des rencontres avec d’autres disciplines des sciences de l’homme. Plusieurs de ses articles inauguraux se consacrent peu ou prou à la question de la mathématisation de la géographie. Dans leur variété, ils sont révélateurs de la richesse des réflexions qui agitent alors la géographie française. À bien des égards, les pistes qu’ils lancent, telle la modélisation graphique, se révèleront aussi représentatives de la diversité des voies suivies par la suite.
Une mise en cause complexe de l’héritage
13 Malgré un sentiment de malaise diffus apparu immédiatement après la guerre, et que reflètent des constats récurrents de « malaise », de « crise », ou de « craquements » [12], aucune mise à jour radicale de la géographie française ne s’est réellement opérée durant les années 1950-1960 [13]. Aussi, l’accumulation de tensions rendait le terrain mûr pour une mise en cause en profondeur. Pour les membres du futur réseau théorique et quantitatif, c’est la découverte d’un nouveau continent – l’état des recherches anglo-saxonnes – qui a catalysé les énergies, provoquant une sorte de défi intellectuel et social (le sentiment d’un retard inadmissible par rapport aux États-Unis) à relever.
14 Mais, à cette date relativement tardive (par rapport aux autres disciplines et par rapport aux géographes américains et britanniques) où de nombreux géographes français se mettent à aspirer à une scientifisation de la discipline, se croisent de multiples facteurs de déstabilisation des pratiques. Innovations techniques d’envergure, avec la diffusion de l’informatique, permettant de manier des moyens de calculs et des sources d’information inédits telle l’imagerie satellitale ; sollicitations vers la recherche appliquée, sans commune mesure avec les premiers pas dans l’aménagement du territoire des années 1960, donc aussi éloignement de la fonction principale de formation aux concours d’enseignement qui était dévolue à la géographie depuis les débuts de la Troisième République ; débats épistémologiques et politiques sur la science qui, durant toute la décennie soixante-dix, opposent avec virulence les tenants d’un « positivisme » jugé réactionnaire et les « radicaux » de divers bords (figure 1). Dans ce contexte où les modèles intellectuels et les pratiques de la discipline se réorientent et où les valeurs scientifiques s’opposent, la mathématisation du champ n’est qu’un élément dans une vaste entreprise collective de reconstruction de la discipline.
Polémiques des années 1976-1977 dans la géographie française
Polémiques des années 1976-1977 dans la géographie française
Note explicative : Ce graphe est bâti à partir de polémiques entrecroisées apparues dans diverses revues de géographie et journaux en 1976-77 (notamment : Annales de géographie, Attila, Espaces Temps, Hérodote, L’Espace géographique). On a figuré par une flèche différenciée le type de lien existant entre auteurs (exceptionnellement, on a subsumé un auteur ou un groupe d’auteurs par le nom de sa revue de référence). On a résumé par un bref qualificatif la critique contenue, en général explicitement, dans les textes repérés.15 L’aspiration diffuse des jeunes générations à une discipline plus scientifique se heurtait, dans la tradition géographique, à la valorisation de l’unique et de la compréhension intime d’un « complexe géographique » traduit par le langage naturel et par la cartographie. La cristallisation des esprits sur une nécessaire mathématisation s’est faite en un temps très bref grâce à la révélation brutale de la New Geography en 1970 et 1971. Ce faisant, au delà de la mathématisation, la découverte des manuels anglo-saxons en 1970 introduisait à une science différente car, assis sur une « révolution quantitative » déjà ancienne de 15 ans et sur une expérience de « géographie théorique » [14] ils allaient au delà de l’initiation technique. Ils proposaient d’une part des mises en ordre inédites de la matière géographique, telles la formalisation « point-ligne-surface » du manuel de P. Haggett [15], la synthèse didactique de deux décennies de recherche sur l’organisation spatiale [16] ou encore l’ouverture à l’étude des systèmes urbains [17], et, d’autre part, des mises en forme épistémologique structurées, d’inspiration positiviste, où dominaient la modélisation [18] et le modèle explicatif nomologique [19].
16 Quantification, modélisation, approche systémique, analyse spatiale ont alors constitué les mots-clés des premiers travaux, avec un accent sur le systémisme et l’étude de globalités qui distingue encore les géographes français de leurs collègues européens. Leurs analyses se réfèrent très largement à la littérature anglo-saxonne. Le pas de la traduction a même été franchi, avec la publication chez A. Colin de deux auteurs phares de la New Geography, B. Berry [20] et P. Haggett. Le responsable de collection, P. Pinchemel, a contribué lui-même à la diffusion de leurs analyses, présentant par exemple au stage de statistiques d’Aix-en-Provence (Pinchemel en 1971) les conclusions tirées par un autre Américain, P. Gould [21], sur les avancées décisives de la Nouvelle Géographie. Pour nombre d’individus, par le livre [22] ou par le témoignage sur la révolution anglo-saxonne (telle l’intervention de Bernard Marchand lors des Journées Géographiques de 1970), la médiation de géographes ayant transité par le Canada ou par les États-Unis a créé le déclic pour entrer en conversion. D’autres passeurs, telle W. Herzog, un « visiting professor » en France durant l’année 1970-1971, ont joué le même rôle d’initiateur en donnant des recherches en cours dans la géographie américaine une vision extrêmement large [23], qui débordait de la question de la mathématisation, tout en la supposant et en l’intégrant dans une représentation du « raisonnement formel en géographie ».
17 L’un des traits de cette histoire disciplinaire française est toutefois aussi le brassage d’idées et de générations qui s’est produit dans des lieux nouveaux de confrontation : les revues, avec leurs débats, telles L’espace Géographique (1972-), Hérodote (1976-), Espaces Temps (1976-) et la littérature grise ; les colloques, conçus comme des forums, tels les « Géopoints » organisés tous les deux ans à partir de 1976. Discussions et polémiques constituent un espace commun de débat qui a contribué à la formulation sinon d’un paradigme unique, du moins d’une réorientation d’ensemble de la géographie française, qui est acquise au début des années 1980. Par rapport à la géographie classique, on peut distinguer d’une part le déplacement de la problématique des « lieux » vers la notion d’« espace » et, en parallèle, la substitution d’une interrogation sur l’organisation sociale de l’espace à la question de la relation entre groupes humains et milieu ; d’autre part, une recherche des régularités, voire des lois de l’espace géographique, qui s’oppose à la démarche idiographique ancienne. La géographie s’est par là rapprochée des sciences sociales en rompant avec sa représentation classique de discipline charnière entre sciences de la nature et sciences de l’homme.
18 La gamme des positions épistémologiques affichées et celle des pratiques de recherche restent toutefois largement ouvertes. C’est d’abord, de 1971 à 1975, une période d’acquisition des techniques statistiques de base, suivie par un temps où se combinent réflexion sur la méthodologie, sur la théorie et discussion de l’ « idéologie », rappellent ainsi M. Vigouroux [24] ou H. Chamussy [25]. Entre-temps, dans le Groupe Dupont par exemple, dès le milieu de la décennie, invitations de conférenciers extérieurs et organisation de débats se sont ajoutées à l’éclatement de polémiques internes à une discipline déstabilisée, pour ouvrir les références et les perspectives épistémologiques. Les discussions du Géopoint 76 et du Géopoint 78, consacrés respectivement à « Théorie et Géographie » et aux « Concepts et construits dans la géographie contemporaine » mettent à jour par exemple les tensions épistémologiques sous-jacentes à l’entreprise de rénovation de la discipline (et l’immaturité de la réflexion dans ce domaine). Ceci reste vrai parmi les groupes et les individus qui se sont rassemblés dans les diverses entreprises éditoriales manifestant, dès le début de la décennie 1980, l’émergence d’une géographie française moins enclavée et capable de proposer au grand public cultivé une nouvelle synthèse (telle une Géographie universelle), aux étudiants et aux autres spécialistes une version actualisée de sa contribution propre dans le champ des savoirs (telle une Encyclopédie de géographie), et aux commanditaires de recherche des méthodologies centrées sur la dynamique spatiale et sur la prospective territoriale.
19 Nouant une partie des forces qui avaient propulsé la rénovation de la géographie française, en particulier les travaux des membres du groupe théorique et quantitatif, la constitution d’un réseau national de recherches sous l’égide de R. Brunet, le GIP RECLUS, mobilise à partir de 1982, sans la créer, cette accumulation intellectuelle qui s’est produite durant les années 1970.
20 Les bilans du mouvement théorique et quantitatif établis au début des années 1980 faisaient explicitement état de transformations dans le champ de la géographie. Ce sont des transformations inégales selon les secteurs : « raffinement de la tradition » et ouvertures thématiques mineures en géographie rurale [26], contre un fort renouvellement de la géographie urbaine, à la rencontre d’une tendance engagée dès les années soixante au développement de grandes études comparatives des structures urbaines et d’une théorisation du système urbain [27]. Mais dans tous les cas, l’usage de l’outil informatique pour l’analyse quantitative avait permis de développer une maîtrise collective nouvelle de la recherche, par la justification du choix des données au regard des notions mises en jeu, par l’explicitation des hypothèses de recherche, par la possibilité d’un contrôle des conclusions (à l’époque, les résultats intermédiaires d’une analyse factorielle ou d’une classification automatique étaient publiés, ainsi que la liste des données initiales) ; elle avait permis aussi d’approfondir la théorie dans les cas où la formalisation mathématique était la plus développée. Enfin, mais sans que les techniques mathématiques idoines aient toutes été mobilisées et sans que des questions d’analyse spatiale aient été systématiquement mises en œuvre, l’analyse des distributions spatiales, des formes, des réseaux, ou encore de l’effet de la distance, inscrivaient aussi du nouveau dans les recherches, en procédant soit à des descriptions systématiques de territoires soit à la confrontation de leur dessin avec des modèles d’organisation de l’espace. Des perspectives fécondes s’ouvraient à l’étude des systèmes, en direction des modèles dynamiques aux interactions non linéaires [28].
21 Le bond technologique en informatique est depuis considérable, les techniques de modélisation se sont perfectionnées, les possibilités de simulation se sont accrues, les jeunes chercheurs y sont préparés dès leur formation initiale. Quel bilan des pratiques, des transferts entre disciplines et des spécificités de la géographie peut-on faire trente ans après ces débuts ?
II – Des usages spécifiques des mathématiques
22 Qu’il s’agisse de leurs réseaux de contacts disciplinaires, ou encore des choix qu’ils ont effectués parmi les outils mathématiques, les géographes français se distinguent des autres spécialistes des sciences sociales, voire de leurs collègues européens. Sans prétendre à une impossible exhaustivité, c’est sur quelques-unes de ces spécificités que nous mettons l’accent, en essayant de les expliquer.
Des informateurs non mathématiciens
23 Dans les années 1970 et 1980, les principaux formateurs des géographes aux notions et techniques mathématiques ont été le plus souvent d’authentiques mathématiciens, qui ont donc joué principalement pour les géographes le rôle de maîtres de stage. En revanche, dans le domaine de la recherche, les collaborations directes entre mathématiciens et géographes ont été rares, peu suivies. Les spécialistes qui ont véritablement assuré pour les géographes le transfert d’outils mathématiques nouveaux sont surtout des physiciens. Cela n’est pas propre à la France ; par exemple, la réinterprétation des modèles d’interaction spatiale à partir d’un principe de maximisation de l’entropie, par un physicien anglais devenu géographe, Alan Wilson, a profondément transformé l’approche des matrices de flux (migrations, échanges, communications entre des unités spatiales) traitées par les géographes. En France, la plupart des modèles dynamiques non linéaires constitués d’équations différentielles qui ont reçu des applications en géographie urbaine et régionale, pour l’étude des transformations internes d’une ville ou d’une région, ou des évolutions de plusieurs villes ou régions interdépendantes, sont issus de collaborations directes et de longue durée avec des chimistes-physiciens de l’école de Prigogine à l’Université Libre de Bruxelles par exemple [29], ou des physiciens de l’école de Haken à Stuttgart [30]. Le souci commun de l’applicabilité des modèles et l’usage de la simulation comme substitut à l’expérimentation pourraient être à l’origine de ces transferts de concepts et de modèles mathématiques, via l’adaptation de modèles physiques.
24 Les informaticiens, formés à la statistique ou aux mathématiques appliquées, ont été les autres interlocuteurs privilégiés des géographes lorsqu’il s’est agi de collaborations de recherche. Les membres de l’équipe de Benzecri qui rédigèrent les programmes d’analyse multivariée et en assurèrent la diffusion ne ménagèrent pas leur temps dans le « service après-vente » et la formation continue, les géographes étant peut-être avec les archéologues leurs meilleurs clients – en ce temps-là, cela voulait dire une fréquentation assidue des centres de calcul de la part des uns et des autres et une assistance, informatique d’abord mais aussi statistique, vigilante et organisée, toujours gracieuse, dans les centres de calcul des Universités ou du CNRS. Ce type de collaboration a aussi prévalu dans les équipes qui ont entrepris le traitement des images produites par télédétection (à l’ENS, à l’EPHE et l’EHESS, à Strasbourg, puis à Besançon, Nice, Rennes, Rouen…). L’efficacité des méthodes d’analyse de données de type « exploratoire », dans leur version peu exigeante quant aux hypothèses faites sur la structure mathématique des données, mais très riches en aides à l’interprétation, que proposait l’école française de statisticiens-informaticiens, jointe à la qualité et à la continuité de l’assistance et de la formation, ont probablement contribué à l’originalité d’emprunts aux mathématiques, d’abord moins rigoureusement orientés par le modèle linéaire, plus ouvertes ensuite aux investigations systémiques [31]. Les collaborations plus spécifiques, sur des questions de modélisation notamment (conduisant parfois certains informaticiens à s’intégrer dans des laboratoires de géographie), sont intervenues lorsque des langages de programmation particuliers étaient nécessaires, que ce soit pour l’analyse des systèmes à la Forrester, ou pour des applications de type système expert (à Grenoble notamment), ou encore pour l’introduction d’outils d’analyse spatiale ou de simulation (automates cellulaires, systèmes multiagents) dans les systèmes d’information géographique.
Des outils privilégiés
25 Ce n’est pas tant le statut de la géographie universitaire, considérée d’abord, au XIXème siècle et par certains jusqu’au milieu du XXème, comme une science naturelle, puis comme une science charnière entre sciences de la nature et les sciences de l’homme, qui explique l’emploi spécifique des mathématiques qu’ont pu faire les géographes. Curieusement, les applications les plus nombreuses et les plus nouvelles sont venues à partir du moment où le questionnement de la géographie a été une problématique de sciences sociales, et pour résoudre des questions de géographie humaine.
Des analyses multivariées cartographiées à la statistique spatiale
26 Les outils mathématiques dont les géographes ont fait un usage plus fréquent, ou plus spécifique, sont liés à la nature de l’information qu’ils ont à traiter. De très nombreuses bases de données géographiques comportent, pour toute une série de lieux (villes, unités administratives, États, etc.), des descripteurs en grand nombre (relatifs aussi bien à des caractéristiques physiques qu’à des variables sociales, démographiques ou économiques). Cette information a été traitée moins souvent par des ajustements à des modèles d’inférence ou à des modèles à visée explicative ou prédictive comme la régression multiple, qu’à des traitements multivariés telles l’analyse factorielle ou la classification ascendante hiérarchique. L’information dont disposent les géographes étant souvent exhaustive et rarement issue de sondages, les axes factoriels ou les groupes d’une typologie sont susceptibles d’identifier, au mieux des structures latentes, au moins des résumés descriptifs efficaces, du domaine d’étude choisi. Surtout, ces résultats apportent une information nouvelle lorsqu’ils sont cartographiés, car alors ils mettent en évidence les arrangements dans l’espace de variables corrélées entre elles, et donc peuvent révéler des structures spatiales, comme des variations latitudinales, ou des discontinuités créées par des frontières, ou encore une disposition en auréoles concentriques caractéristique d’une structure centre-périphérie. C’est cette intelligibilité supplémentaire apportée par la cartographie des résultats qui sans doute explique le succès persistant en géographie de ces lectures de l’information par les techniques d’analyse multivariée, bien au delà de l’effet de « mode » des années 1970. D’autres techniques statistiques comme les analyses de variance permettent ensuite de tester la pertinence des agrégats formés ou la signification statistique d’une discontinuité.
27 Mais très vite la nécessité de prendre en compte le caractère non statistiquement indépendant des données géographiques, leur auto-corrélation spatiale, a conduit des géographes à s’associer à des statisticiens pour adapter les modèles statistiques que ce non respect d’une hypothèse fondamentale à leur application risque d’invalider. Ainsi, outre des mesures du degré d’autocorrélation spatiale (indices de Moran, de Geary), ont été produits des modèles d’inférence permettant de conclure, en dépit de ce biais, à la validité d’un calcul de corrélation ou sur la qualité d’un ajustement par exemple [32]. Les géographes français n’ont fait jusqu’ici qu’un usage modéré de ces méthodes qui deviennent vite assez compliquées [33].
Formes, structures spatiales, topologie et géométrie
28 Il existe un lien fort entre le mouvement dans l’espace et la géométrie, qui passe par la règle anthropologique de « la loi du moindre effort ». Celle-ci traduit la pénibilité, ou le coût, du franchissement de la distance, mais aussi la difficulté d’acquérir des informations sur des destinations lointaines, tout autant que la réduction des probabilités d’interaction avec la distance du fait de l’accroissement concomitant des localisations ou des interlocuteurs possibles… Les structures spatiales auxquelles s’intéressent les géographes sont repérables lorsque les interactions qui les engendrent se réitèrent assez longtemps. Rien d’étonnant donc à ce que les formes de base des aires de marchés ou des zones d’influence des villes, qui intègrent le fonctionnement d’interactions très dépendantes de la distance (au point qu’on les résume volontiers par un modèle gravitaire à la Newton) se réfèrent à des formes géométriques comme le cercle ou l’hexagone.
29 Non seulement la géométrie, mais la topologie aussi est sollicitée pour l’étude des formes spatiales. Ainsi, les graphes sont naturellement la référence pour l’étude des réseaux, qu’ils soient hydrographiques (mais ce sont alors des graphes simples, des arbres) ou de communication [34]. Les applications à la géographie des transports se sont parfois contentées d’une approche topologique des réseaux, mais ont le plus souvent employé des graphes valués, intégrant la mesure de longueur des arêtes du graphe, et parfois leur orientation. Les applications conduisent non seulement à décrire la morphologie des réseaux, leur connexité, leur connectivité, globale ou locale, par des indices, mais aussi à optimiser des tracés d’itinéraires (algorithme du plus court chemin), ou des localisations (recherche du sommet central ou du sommet médian). Plus récemment ont été proposées des représentations en trois dimensions qui tiennent compte de l’existence d’arcs à plusieurs vitesses dans un réseau de communication (par exemple le réseau routier) et qui proposent de le visualiser selon divers plans, d’autant plus profonds que la vitesse est lente [35].
30 Des outils d’analyse spatiale plus anciennement employés en géographie, mais qui avaient été abandonnés à quelques spécialistes, sont revenus sur le devant de la scène. Ainsi des projections, très discutées au siècle dernier dans les réunions de « géographie mathématique » des congrès internationaux, et laissées aux ingénieurs fabricants de cartes de l’IGN (en dehors de brefs débats comme celui qui a surgi à propos de la représentation de Peter, défendue par un discours militant des droits du Tiers-monde car restituant une image des surfaces continentales moins « favorable » aux régions septentrionales que celle de Mercator). Or la localisation sur la sphère, que restituent avec une certaine approximation les cartographies planes grâce à ces systèmes de projection, n’est qu’une des représentations possibles de la séparation entre les lieux. Celle-ci dépend souvent bien plus des moyens de communication réalisés par les sociétés que de la distance exprimée en kilomètres. Ainsi, les distances mesurées en temps de parcours, ou en coûts, sont souvent bien plus expressives des situations géographiques, du point de vue de leur signification sociale. Ces nouvelles distances sont utilisées pour calculer des projections des lieux, qui, comparées aux projections topographiques usuelles, font ressortir par des « déformations », les couloirs privilégiés par la grande vitesse, en quelque sorte rétrécis, ou au contraire les zones enclavées qui apparaissent dilatées. Les transformations cartographiques, par anamorphose ou par d’autres procédés faisant appel à des géométries complexes, sont ainsi très employées en géographie des transports ou pour des cartes cognitives [36].
31 La géométrie fractale, pour laquelle B. Mandelbrot avait pris comme exemple la longueur des côtes de Bretagne, a aussi beaucoup intéressé les géographes [37]. Le problème de la généralisation des contours des cartes dans les logiciels demeure encore mal résolu en pratique. En revanche, beaucoup d’objets géographiques présentent des structures auto-similaires dans une hiérarchie de niveaux (réseaux hydrographiques, tissus urbains, réseaux techniques ou de transport, systèmes de villes), et des géographes français ont été pionniers dans la recherche de mesures caractéristiques de ces structures [38].
32 L’analyse des images, qu’elles soient issues de la télédétection ou simplement des cartes numérisées, fait appel à de nombreux outils de la morphologie mathématique [39]. Toutes sortes d’opérateurs spatiaux sont mis en œuvre pour effectuer des lissages de données spatialisées, filtrer diverses composantes d’échelle, identifier et mesurer des ruptures et des discontinuités.
Modélisation des systèmes et simulation
33 Dans ses choix de modélisation, la géographie se distingue de l’économie, car ses modèles refusent généralement l’idée d’optimisation : faut-il y voir l’archaïsme d’une recherche de la globalité, ou la précocité de la pensée systémique ? Parmi l’ensemble des sciences sociales, la géographie est en tout cas l’une des premières à s’être intéressée aux différentes formes de modélisation de la dynamique des systèmes, au moyen d’équations aux différences ou d’équations différentielles, et la géographie française eut même l’initiative de certains de ces transferts. Il peut ainsi paraître significatif que ce soit lors d’un colloque européen organisé en France, à Chantilly en 1989, que se soient rencontrés pour la première fois des spécialistes de la transposition aux sciences humaines des modèles inspirés des structures dissipatives, d’une part (P. Allen) et de la synergétique, d’autre part (W. Weidlich et G. Haag), une même équipe de géographes ayant réalisé les premières applications [40].
34 Les outils mathématiques pour la modélisation des systèmes dynamiques en géographie manquent cependant de souplesse pour le traitement des données spatialisées. Deux directions sont donc suivies pour progresser : d’une part, le couplage de ces modèles avec des systèmes d’information géographiques, d’autre part, l’adoption de modèles de simulation informatique, automates cellulaires et surtout systèmes multiagents, pour des applications à une très grande variété de problèmes, qu’il s’agisse de cheminements en milieu urbain, de distribution de véhicules sur un réseau autoroutier, d’amélioration des classifications d’images issues de télédétection, de conflits entre acteurs pour l’utilisation du sol, ou du développement de systèmes de villes [41].
35 Dans l’ensemble, ces modèles fonctionnent pour les chercheurs, même si dans leurs objectifs ils traitent de questions pouvant intéresser l’aménagement du territoire ou s’ils sont susceptibles d’applications pour la pédagogie. La modélisation sert d’appui à des simulations, elle est effectuée pour tester des hypothèses, pour établir des scénarios plutôt que pour calculer des solutions. C’est en ce sens que les géographes considèrent la simulation comme un substitut à l’expérimentation, avec cependant des difficultés à bien s’assurer de la validation de leurs modèles. Une dérive possible vers des modèles ad hoc, éloignés de la formalisation, se trouve renforcée par l’usage des systèmes d’information géographique, pour lesquels les outils d’analyse spatiale comportant des opérateurs locaux se sont multipliés depuis dix ans.
Des effets en retour sur les pratiques de la géographie ?
36 Du frottement accru avec la mathématique, les géographes ont peut-être acquis un peu plus de rigueur, ou d’assurance, parfois de scrupule, dans le maniement des nombres. S’ils ne s’interrogent pas encore systématiquement sur la vraisemblance statistique des résultats qu’ils énoncent, ils sont devenus plus sensibles aux conditions de possibilité des comparaisons, par exemple dans leurs représentations cartographiques. Les méthodes de discrétisation des séries en vue de la réalisation de cartes se sont relativement standardisées, avec indication de la forme de la distribution et de ses paramètres caractéristiques. Les géographes s’agacent volontiers du non-respect par des cartographes amateurs des correspondances élémentaires entre modèle mathématique des données et formes de représentations, naguère préconisées par J. Bertin avec parfois peu d’échos, aujourd’hui universellement adoptées.
37 Sans une diffusion suffisante des travaux des géographes, le malentendu risque de s’installer entre certaines sciences sociales, souvent pressées par le politique de prendre position dans les « territoires », et parfois tentées de n’y voir qu’une simple surface, cadre immuable pour la localisation de réseaux sociaux. La confusion entretenue par l’usage désinvolte ou soigneusement distingué, mais sans consensus, par les géographes eux-mêmes des vocables étendue, espace et territoire, permet difficilement la prise en compte par d’autres du savoir accumulé sur les formes récurrentes de la spatialisation des sociétés, ou sur les interactions multiples et les médiations qui conduisent à la formation de territoires. Quel que soit le vocabulaire qu’ils emploient, il n’y a plus un seul géographe qui considère que l’espace dont il s’occupe se réduit à une surface une fois pour toutes délimitée, dotée d’attributs (localisation, dimension, ressources…) qui seraient intemporels. L’espace des géographes est relatif, ses propriétés sont définies aux échelles humaines, variables dans le temps et selon les capacités techniques des sociétés, ou encore d’après les représentations que s’en font les individus. C’est à l’aune du temps du parcours, ou de ses coûts, ou encore, par exemple pour évaluer les probabilités de migration d’un individu, en fonction du niveau d’information sur les contrées plus ou moins lointaines, que l’on juge de son étendue. L’isotropie est rarement la règle, et l’espace géographique au contraire s’aimante autour de pôles attractifs, se courbe à l’approche de grands centres, s’oriente selon des itinéraires privilégiés. Des explorations ont été lancées du côté de la géométrie riemanienne (J.C. Muller) pour rendre compte de cette texture irrégulière. En dépit du choc éprouvé par certains (parfois même géographes, tel P. Pinchemel, dans un humoristique : « j’ai mal à ma carte ») à la vue de nouvelles projections ou des anamorphoses, l’idée que l’espace géographique est un espace relatif, dont les propriétés sont à analyser à partir des relations qui le constituent à un moment donné ou pour tel ou tel type d’acteur ou d’observateur, tend cependant à s’imposer de plus en plus au sein de la discipline.
38 Plus subtile et sans doute beaucoup moins partagée est l’évolution que l’usage de certains modèles mathématiques a suscitée en termes de construction des objets géographiques. Le maître mot de la géographie des années 1950 est celui de combinaison (on le trouvait déjà chez Vidal de la Blache). Le terme est repris par certains partisans de la « modélisation » iconique, pour qui une région particulière se décrit au moyen d’une combinaison de structures spatiales élémentaires, les « chorèmes » [42]. L’utilisation des mathématiques du « chaos », théorie des catastrophes, mais surtout théories de l’auto-organisation, amène à sortir la représentation du « réel » de cette combinatoire. À la différence d’une analyse structurale, chaque objet n’est plus vu comme la combinaison locale unique de modèles généraux ; à la différence d’une interprétation génétique, cet objet n’est plus conçu comme l’aboutissement d’une succession d’événements historiques. L’objet géographique se construit comme l’une des issues possibles, le résultat porté par une trajectoire particulière, d’un modèle dynamique qui aurait pu en produire bien d’autres, si les circonstances avaient été différentes.
39 Non seulement les formalisations mathématiques associées au développement des théories systémiques modifient la représentation des objets géographiques, mais elles permettent de renouveler la question de la causalité en géographie. À la représentation de la rencontre fortuite de séries indépendantes en un lieu, qui rend compte d’une combinaison locale spécifique d’éléments, se substitue celle d’une cohérence évolutive, soumise certes à la contingence selon les bifurcations qui jalonnent la formation d’un objet géographique. L’image parfois pesante de l’« inertie » attribuée aux structures héritées de l’espace géographique est remplacée par la notion d’adaptabilité, induisant des ajustements permanents de ces structures au changement, selon une conception évolutive de la résilience [43]. Le rôle des acteurs, ou des agents, peut alors être introduit, dans des modèles dynamiques multiniveaux qui traduisent, par des formalismes mathématiques ou informatiques, les intuitions depuis longtemps énoncées en géographie à propos des effets d’échelle. Cette nouvelle ambition, qui paraît prometteuse, n’en est qu’à ses débuts, elle implique une plus grande ouverture de la géographie vers les sciences sociales qui s’attachent à l’observation des processus individuels.
Conclusion
40 Cinq aspects essentiels de la « révolution » associée à l’appel aux mathématiques en géographie ont été soulignés : la brusquerie de la prise de conscience collective qu’une réforme de la géographie était nécessaire, si bien que les années 1970-1972 font événement dans la discipline ; le rôle de référence que jouent initialement les développements de la « New Geography » née aux États-Unis et en Suède vers le milieu des années 1950 ; l’ampleur de l’effort de formation qui a mobilisé un réseau informel de jeunes enseignants-chercheurs à partir de la décennie 1970 ; la conjugaison d’une réflexion sur la quantification et sur la théorisation en géographie ; l’accent mis sur l’intérêt de la modélisation, sur le besoin de méthodologies d’analyse spatiale et sur la notion de système.
41 On a ainsi laissé de côté tout ce qui relève de transformations relativement banales, pour mettre en exergue ce qui apparaît comme plus particulier à la géographie, où les emprunts aux mathématiques ont coïncidé avec le déplacement de sa question centrale (la relation homme-milieu et la question de la région) vers les notions d’espace, de système, de dynamique. Au total, il serait difficile de dresser un bilan de cette aventure, car, « si tous n’en moururent pas, tous furent atteints », autrement dit, certaines méthodes ont été largement adoptées, même par des courants réfutant l’intérêt ou la possibilité d’une formalisation par les mathématiques en géographie. On ne peut pas affirmer non plus que les géographes qui pratiquent, à divers degrés, ces formalismes, représentent un courant de pensée cohérent et bien identifié. Il n’est pas plus avéré, comme certains l’ont un peu vite décrété, que ces pratiques ne représentent qu’un moment dans l’histoire de la discipline, qu’il serait urgent de dépasser. L’impulsion qui a été donnée demeure vivante, même si certains domaines ou certains groupes de la géographie demeurent résolument à l’écart de la mathématisation.
42 Par ailleurs, même si le moment de l’introduction d’un usage raisonné des mathématiques en géographie coïncide bien, au début de la décennie 1970, avec un renouvellement de génération et s’inscrit dans un mouvement de légitimation partagé par d’autres disciplines, il faut aussi reconnaître aux acteurs de cette « révolution quantitative » une exigence interne, le souci de disposer d’un savoir plus organisé, mieux formalisé et explicité, qui permette un enseignement plus systématique, moins élitiste peut-être, au moment où l’université s’ouvrait à la masse des étudiants et où s’inventaient les travaux dirigés. En effet, dans le même temps, la discipline s’est affirmée, non plus tant comme un « art » enseigné par un maître transmettant son propre « sens géographique » (qu’est-ce qui est géographique et qu’est-ce qui ne l’est pas ?) à quelques disciples, mais comme une science de laboratoire, de travail en équipe, d’accumulation et de confrontation du savoir. L’explicitation et la formalisation propres au langage et aux outils mathématiques y ont apporté une contribution essentielle, même si elles ne suffisent pas à résoudre tous les problèmes…
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Notes
-
[1]
Les Messaches, 1989.
-
[2]
Groupe Chadule, 1974.
-
[3]
Ciceri, Marchand, Rimbert, 1977.
-
[4]
Merlin, 1973.
-
[5]
Pumain, Saint-Julien, 1984b.
-
[6]
Pumain, Saint-Julien, Vigouroux, 1983.
-
[7]
Cf., par exemple, George, 1972.
-
[8]
Cf. Vigouroux, 1978 ; Chamussy, 2000 ; Vingt-cinquième anniversaire. Groupe Dupont, 1999.
-
[9]
Les effectifs de l’enseignement supérieur ont triplé de 1963 à 1972.
-
[10]
Bourdieu, 1984.
-
[11]
Pumain, 1988b.
-
[12]
Meynier, 1969.
-
[13]
Robic, 1999.
-
[14]
Cf. Burton, 1963 ; Bunge, 1962.
-
[15]
Haggett, 1965.
-
[16]
Berry, Marble, 1968 ; Abler, Adams, Gould, 1971.
-
[17]
Berry, Horton, 1970.
-
[18]
Haggett, Chorley, 1967.
-
[19]
Harvey, 1969.
-
[20]
Berry, 1971.
-
[21]
Gould, 1969.
-
[22]
Racine, Reymond, 1973.
-
[23]
Cf. Le plan du cours donné à Paris I en 1970-1971, qui démarre par une Introduction au raisonnement formel en géographie, puis balaie les principaux modèles spatiaux et leur discussion : Les concepts fondamentaux en géographie théorique, La théorie de la localisation agricole, La théorie des lieux centraux et la règle rang-taille, Le modèle de gravité, Les modèles de densité urbaine, L’analyse des semis de points, Les modèles de diffusion, Le comportement spatial, La perception (P. Gould et les cartes mentales). Elle a aussi participé au Séminaire de géographie théorique organisé par P. Claval à Besançon la même année, où elle a discuté des modèles de comportement.
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[24]
Vigouroux, 1978.
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[25]
Chamussy, 1978.
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[26]
Rey, Robic, 1983.
-
[27]
Pumain, Saint-Julien, Vigouroux, 1983.
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[28]
Pumain, Saint-Julien, 1984a.
-
[29]
Allen, 1997 ; Pumain et al., 1989.
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[30]
Sanders, 1992 ; Haag, Pumain, 1991.
-
[31]
Cf. infra.
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[32]
Cliff, Ord, 1973.
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[33]
Charre, 1995.
-
[34]
Chesnais, 1991.
-
[35]
L’Hostis, 1997.
-
[36]
Cauvin, 1997.
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[37]
Dauphiné, 1995.
-
[38]
Frankhauser, 1993.
-
[39]
Voiron-Canico, 1995.
-
[40]
Pumain et al., 1989 ; Sanders, 1992.
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[41]
Sanders, 2001.
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[42]
Brunet, 1980.
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[43]
Pumain, 1998 ; Aschan-Leygonie, 2000.