Le propos de cet exposé est de faire apparaître, et si possible admettre, l’existence d’un phénomène spécifique constituant un « objet scientifiquement séparé » et donc justiciable d’une histoire propre. Phénomène qui s’offre d’abord comme une manière singulière d’en user avec les livres. Manière singulière, dis-je, et c’est cette singularité qu’il nous faut considérer. Précisons : pratique socioculturelle, ce qui nous autorise à l’approcher armé de ce que Paul Veyne appelle les concepts des sciences morales et politiques, c’est-à-dire ceux de la sociologie, et plus précisément, pour ce qui nous concerne, de la sociologie de l’art. L’un des représentants les plus éminents de celle-ci, Howard S. Becker, va nous mettre sur la voie : « La production de toute œuvre d’art, écrit-il, […] doit être considérée comme une action collective, une chaîne de coopération liant tous ceux qui, à des titres divers, concourent à l’existence de cet art. » Et Becker nous convie à considérer ce qu’il appelle un « monde de l’art ».
Voici où je cherche à en venir : l’histoire de la bibliophilie ne peut – en aucun cas – se borner à être celle des bibliophiles. Elle doit s’ouvrir à tous ceux qui, à des titres évidemment divers, y contribuent. Il nous faut donc repeupler cette histoire de tous les intervenants constituant le petit monde du livre rare, à savoir les bibliophiles proprement dits, les marchands plus ou moins experts et plus ou moins spécialisés, et ceux que j’appelle les clercs bibliologues…
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