Notes
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[1]
AD Eure-et-Loir?: 2E 15/336, mn. P.-Ch. Raimbault, Châteaudun, 29 prairial 7 (17 juin 1799).
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[2]
État civil Châteaudun, 4 fructidor 3 (21 août 1795).
-
[3]
Menée sous la responsabilité de Bernard Dompnier (chec, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand), cette enquête, à laquelle sont associés les trois auteurs du présent article, est intégrée au projet muséfrem (Musiques d’Église en France à l’Époque moderne), soutenu par l’anr sur 2009-2012. Elle a déjà donné lieu à diverses publications, en particulier?: «?Les musiciens d’Église en 1790. Premier état d’une enquête sur un groupe professionnel?», ahrf, no 340, 2005, p. 57-82, et un numéro spécial de la Revue de musicologie, t. 94/2, 2008, p. 271-573.
-
[4]
Pour beaucoup d’entre eux, il faut se reconvertir ou accepter une maigre pension, renoncer à des projets comme le sacerdoce ou le mariage. Seule, une minorité retrouvera ultérieurement un emploi musical dans les nouvelles structures postconcordataires aux effectifs allégés et aux moyens financiers fortement réduits.
-
[5]
Cette masse documentaire issue des séries Dxix et F19 aux Archives nationales a été complétée par des dépouillements dans les séries, G, H, L et Q des archives départementales. L’ensemble a permis de constituer une base de données prosopographiques sur les musiciens d’Église dans la seconde moitié du xviiie?siècle, qui facilite la reconstitution de leurs carrières et itinéraires, mais aussi de leurs origines sociales et géographiques, de leurs modes de formation, de recrutement, de gestion au sein de corps hiérarchisés aux identités bien marquées, y compris musicalement parlant. Cette enquête a également facilité la redécouverte des esthétiques musicales, et de leurs mutations au rythme de la pénétration des répertoires au plus profond des territoires. Tout un monde oublié a retrouvé ses couleurs?: cela affine le regard porté sur une période charnière de l’histoire et rend la parole à ceux qui ont été parmi les premiers à subir le choc des mutations.
-
[6]
François Caillou, «?Les musiciens des églises collégiales de Châteaudun à la fin du xviiie?siècle?», Bulletin de la Société dunoise?: archéologie, histoire, sciences et arts, XXIV/300, 2010, p. 36-53.
-
[7]
Malgré la perte des registres capitulaires antérieurs à 1724, la date de réception de Maurice Dobet est connue grâce aux relevés effectués dans les années 1730 par l’abbé Brillon (ad Eure-et-Loir?: G338). Clerval n’indique rien de plus à ce sujet (J.-Alexandre Clerval, L’Ancienne Maîtrise de Notre-Dame de Chartres du ve?siècle à la Révolution, Paris, 1899, réimpression Minkoff, Genève, 1972, 366 pages, p. 303).
-
[8]
Nicole Goldine, «?Les heuriers-matiniers de la cathédrale de Chartres jusqu’au xvie?siècle. Organisation liturgique et musicale?», Revue de musicologie, 54/2, 1968, p. 161-175.
-
[9]
Benoît Garnot, «?Le logement populaire au xviiie?siècle?: l’exemple de Chartres?», rhmc, 36, 1989, p. 185-210.
-
[10]
J.-Alexandre Clerval, L’Ancienne Maîtrise…, op. cit. (n. 7), p. 300.
-
[11]
Ibid., p. 92.
-
[12]
Ibid., p. 93.
-
[13]
ad Eure-et-Loir?: G298, 29 avril 1724.
-
[14]
Ibid., 19 juillet 1724, 14 avril et 9 juillet 1725.
-
[15]
Ibid., 26 mai 1725.
-
[16]
ad Eure-et-Loir?: G338, relevés Brillon.
-
[17]
ad Eure-et-Loir?: G338.
-
[18]
En 1790, Dobet déclare cinquante-cinq ans de service, ce qui implique un recrutement vers 1736, mais éventuellement en un autre lieu. ad Eure-et-Loir?: L438/a2, district de Châteaudun, 26 août 1791.
-
[19]
Bernard Robreau (dir.), Histoire du Pays dunois, t. II, De l’an mil au déclin de l’Ancien Régime, Châteaudun, Société dunoise ahsa, 2009, p. 183-184.
-
[20]
Simon Robert et Évelyne Grunberg, Châteaudun, de l’incendie à la Belle Époque. Deux siècles d’urbanisme, 1723-1914, Châteaudun, Corlet, 2007, p. 60-75.
-
[21]
En 1789, le revenu annuel total de l’abbaye s’élève à environ 20?000 livres (an?: F19/602, 15 mai 1790).
-
[22]
bm Châteaudun?: ms 12, Alexandre Courgibet, Essai de l’histoire de la religion des Dunois, vol. 2, 1re partie, 587 pages, p. 45.
-
[23]
Le règlement de sa succession en 1771 fait apparaître un total de 25?000 livres en avoirs mobiliers et immobiliers (ad Eure-et-Loir?: 2E 1/40 et 1/41, mn. Cl. Pitou, Châteaudun, 1er-2 mars et 26 juillet 1771).
-
[24]
Louis et Claude Foucault sont petits-fils d’un «?officier de feue sar Mademoiselle?» et fils d’un avocat en parlement, dit en 1703 «?lieutenant de maire de cette ville?» [Châteaudun].
-
[25]
En 1785, Jacques Raux fait imprimer à Orléans des «?Discours et réflexions sur différens sujets de morale?» qui «?roulent sur le bonheur, la conversion de saint Paul, sur la douceur?», Année littéraire ou Suite des lettres sur quelques écrits…, 1786, p. 164-165.
-
[26]
ad Eure-et-Loir?: 2E 15/161, mn. N. Thiercelin, Châteaudun, 13 mai 1741.
-
[27]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/41, mn. Cl. Pitou, Châteaudun, 26 juillet 1771.
-
[28]
ad Eure-et-Loir?: G3386, inventaire de Saint-André, 4 octobre 1790.
-
[29]
Ibid., examen des déclarations du chapitre Saint-André par le district, 4 janvier 1791.
-
[30]
Description de la maison faite à partir de l’acte de vente de 1811 (ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811).
-
[31]
Seul le couvent des Cordeliers était nanti d’un orgue, mais aucune source ne permet d’affirmer que les religieux ont employé Maurice Dobet comme organiste.
-
[32]
Les Orgues d’Eure-et-Loir. Inventaire national des orgues, Région Centre, Chambéry, Comp’Act, 1996, p. 285.
-
[33]
Alexandre Courgibet, op. cit.(note 22), p. 42.
-
[34]
Ibid., p. 241.
-
[35]
Marcel Couturier, «?Le carnet de Jean Yvon, vigneron à Châteaudun?», bsa Eure-et-Loir, 25, 1990, p. 30.
-
[36]
ad Eure-et-Loir?: L438/a2, district de Châteaudun, 4 mai 1792. Il est possible que les deux compétences de Dobet aient fait l’objet d’engagements chronologiquement dissociés.
-
[37]
À Saint-Denis-lès-Ponts, 3 km à l’ouest de Châteaudun.
-
[38]
ad Eure-et-Loir?: H4239, comptes de l’abbaye de Saint-Avit, 1774-1785.
-
[39]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 novembre 1790.
-
[40]
ad Eure-et-Loir?: G312, 14 décembre 1751.
-
[41]
On ignore tout de celui qui a précédé Maurice Dobet à ce poste (avant 1764).
-
[42]
Sylvie Granger, «?Les musiciennes de 1790, aperçus sur l’invisibilité?», Revue de musicologie, t. 94/2, 2008, p. 289-308.
-
[43]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 janvier 1791.
-
[44]
Deux beaux exemples?: Érik Kosevar, «?Cécile-Louise Calvière et Marie-Geneviève Nicole Noblet?: deux femmes organistes aux destins semblables?», Histoire, humanisme et hymnologie. Mélanges offerts au professeur Édith Weber, pups, 1997, p. 131-140.
-
[45]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 janvier 1791.
-
[46]
ad Eure-et-Loir?: L427, 20 août 1792, fol. 135.
-
[47]
Mercure de France, septembre 1764, p. 105?: «?Viens dans ce boccage, Tendre & cher Amant, Sous ce beau feuillage, Rends-toi promptement, L’écho dans ces bois, Te porte la voix, D’une bergère qui t’adore, Mais son cœur te dit mieux encore, Viens &?». Une partition d’une page précède.
-
[48]
Des chapitres cathédraux limitrophes, celui de Blois, l’un des plus récents du royaume (1697), apparaît comme le moins bien doté (an?: G*8516/8532, Pouillé de 1760).
-
[49]
Jules Brosset, «?Le Grand’Orgue, les maîtres de chapelle et musiciens du chœur, les organistes de la cathédrale de Blois?» [1907], dans La Vie musicale dans les provinces françaises, réimpression Minkoff, Genève, 1972, p. 59.
-
[50]
ad Loir-et-Cher?: L1174-1179, pochette non classée, no 3?924.
-
[51]
En 1790, on y trouve, outre les quatre enfants de chœur, un maître de musique, un organiste, sept chapelains musiciens et chanteurs et trois chantres gagistes laïcs.
-
[52]
ad Loir-et-Cher, 3H 82, comptes de Bourgmoyen, 1770-1780.
-
[53]
Mercure de France, 1771, février, p. 195 (annonces reprises en 1772 dans le «?Tableau annuel des progrès de la physique, de l’histoire naturelle et des arts?», p. 428).
-
[54]
François Turellier, «?Christophe Moyreau (1700-1774)?: organiste, claveciniste et compositeur orléanais?», Bulletin de la société archéologique et historique de l’Orléanais, XIX/161, 2009, p. 5-40?; du même, «?Les Orgues et les organistes de la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans?», L’Orgue, no 291/III, 2010, p. 3-33.
-
[55]
Paris, Ballard, 1753.
-
[56]
Isnard signe pour ses 30 livres d’entretien annuel des orgues de Bourgmoyen d’avril 1771 à juin 1772 (ad Loir-et-Cher?: 3 H 82). François Sabatier, «?Les dynasties de facteurs d’orgues en Provence de la fin du xviie?siècle à la fin du xviiie?siècle?», L’Orgue, no 247-248/III-IV, 1998, 224 p.
-
[57]
Annonces, Affiches et Avis divers de l’Orléanois, 17 août 1767.
-
[58]
Jules Brosset, «?Le Grand’Orgue…?», op. cit. (n. 49), p. 59-60. Brosset, repris plus tard par Norbert Dufourcq, a recopié l’erreur de transcription des mémoires de Cheverny édités en 1886.
-
[59]
Mémoires sur les règnes des rois Louis xv et Louis xvi et sur la Révolution, par M. Dufort, comte de Cheverny (1731-1802), publiés par Robert de Crèvecœur, Paris, Plon, 1886, 2 vol. t. 1, p. 442. Le statut de Jean-Maurice Dobet est supérieur à celui d’un simple domestique. Ch.-B. Duranton, Le Droit civil français, suivant l’ordre du code, 1838, Livre III, t. 8, «?Du contrat de louage?»?: Dobet se trouverait dans la première catégorie de domestiques (soumis à l’autorité du maître et en recevant des gages), dont les «?fonctions n’ont rien d’avilissant et même sont honorables… avec les bibliothécaires, les précepteurs, les secrétaires, les intendants de maison?». D’où sa signature au mariage Gauvilliers.
-
[60]
Dans ses mémoires, Dufort de Cheverny mentionne Dobet pour la première fois peu après le mariage du Dauphin en 1770 et avant le décès d’une amie en 1772. À le lire, on comprend que le musicien est déjà «?fixé?» près de lui. Il aurait donc émargé quelque temps à Cheverny tout en tenant l’orgue de Bourgmoyen.
-
[61]
Sur les Cheverny?: La Chesnaye des Bois, Dictionnaire de la noblesse…, vol. 5, 1772, p. 9?675.
-
[62]
Mémoires sur les règnes…, op. cit. (n. 59), t. 1, p. 384.
-
[63]
Ibid., p. 384.
-
[64]
Né le 20 avril 1765, dit le chevalier de Dufort. Mémoires sur les règnes…, op. cit. (n. 59), t. 1, p. 442.
-
[65]
Ibid., p. 442. Dans un grand registre écrit de sa plume, Dufort dresse la liste de son répertoire, recense ses 96 marionnettes et 46 figures.
-
[66]
Ibid., t. 1, p. 334, 353 et 384.
-
[67]
Ibid., p. 359 et 439.
-
[68]
Ibid., t. II, p. 147. Le tome II débute en 1787.
-
[69]
ad Loir-et-Cher?: L10611, recensement des habitants d’Herbault, brumaire III (oct-nov 1794).
-
[70]
Terme désignant les gouverneurs des enfants de bonne maison (Dictionnaire de Trévoux, 1762, vol. 2, p. 381). ad Eure-et-Loir 3Q9 ACP/103, Contrôle des actes, 23 frimaire et 8 nivôse IV, p. 105vo et 111vo.
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[71]
ad Loir-et-Cher?: L1132, offrandes civiques des citoyens d’Herbault, 10-12 floréal II.
-
[72]
Dans Histoire de ma vie, Sand évoque ce «?charmant poète inédit, sensible et gai vieillard qui avait toujours des roses dans l’esprit et jamais d’épines dans le cœur?». Il s’agit de Charles Devezeau.
-
[73]
Joseph Guyot, Chronique d’une ancienne ville royale, Dourdan, capitale du Hurepoix, Paris, Aubry, 1869.
-
[74]
bms, Saint-Germain de Dourdan, 5 janvier 1765.
-
[75]
Arch. diocèse Évry?: K 07-51, boîte 51, délibération de la fabrique paroissiale Saint-Germain de Dourdan, 6 janvier 1765.
-
[76]
Joseph Guyot, Chronique…, op. cit. (n. 73), p. 204?: dont un maître des enfants de chœur et un chantre.
-
[77]
Arch. diocèse Évry, K07-51, boîte 51. Exemple?: «?Je reconnais avoir reçu de mr Lequeux marguillier comptable de la paroisse st germain de Dourdan la somme de cent vingt cinq livres pour le quart echu le 1er janvier 1781, à Dourdan, le 3 janvier 1781, Dobet?».
-
[78]
Musée Dourdan?: Fonds Joseph Guyot, boîte fg 33, ba 56.
-
[79]
ad Essonne?: G1125, pièces justificatives des comptes, no 124-129. Jean-Marc Baffert, «?L’orgue d’Adrien Bunel à Saint-Germain de Dourdan?», Connaissance de l’orgue, 1996, no 98, p. 47-56, et no 99, p. 62-70.
-
[80]
ad Yvelines?: 1L 47. Musée Dourdan?: Fonds Joseph Guyot, boîtes fg 53 et 57.
-
[81]
ad Eure-et-Loir?: L 438, 29 novembre 1792.
-
[82]
ad Eure-et-Loir?: 1Q P-V62, 31 janvier 1791.
-
[83]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811.
-
[84]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 2, fol. 3, 26 avril 1793.
-
[85]
ad Eure-et-Loir?: 1Q 2482, 14 germinal III (3 avril 1795).
-
[86]
Alfred Rabouin, Châteaudun pendant la Révolution, Châteaudun, 1904, p. 365, 381, 385-386.
-
[87]
an?: W459, no 182, «?Affaire Raux et fille Marchand?». Simon Robert et Évelyne Grunberg, Châteaudun…, op. cit., (note 20), p. 88.
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[88]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 6, fol. 54, 3 vendémiaire VII (24 septembre 1798).
-
[89]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 5, 6 et 7, 22 septembre 1796 à 25 mars 1800.
-
[90]
ad Eure-et-Loir?: 3M P 35, tableau des fonctionnaires de l’arrondissement de Châteaudun, 25 mai 1804. En cette qualité, il fait partie de la commission chargée de dresser la liste des citoyens en état de voter (am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 8, 2 et 9 avril 1801).
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[91]
ad Eure-et-Loir?: 3M 4, liste des noms sortis des boîtes aux scrutins pour l’arrondissement de Châteaudun, 6 août 1801.
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[92]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 7, fol. 78, 30 nivôse VIII (20 janvier 1800).
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[93]
Le 14 brumaire 12 (6 novembre 1803) Huet réclame à la fabrique 118 livres «?qui lui restent dûs par la dite fabrique pour réparation de l’orgue?».
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[94]
Arch. diocèse Chartres?: fabrique La Madeleine de Châteaudun, reg. 1, 30 frimaire 12 (22 décembre 1803).
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[95]
Ibid., 1er ventôse 12 (21 février 1804).
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[96]
Arch. diocèse Chartres?: reg. 2, 6 mars 1815.
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[97]
ad Eure-et-Loir?: 2E 15/375, mn. Ch. Raimbault, Châteaudun, 18 décembre 1811. Ces terres sont pour l’essentiel celles achetées en l’an 7 (voir n. 1), et pour une petite part un héritage venu de la famille Raux.
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[98]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811.
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[99]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/184, mn. J.-N. Biard, Châteaudun, 17 et 18 avril 1829, inventaire après décès de «?demoiselle Marie-Louise Dobet célibataire majeure?».
-
[100]
Les effets inventoriés valent au total 1?592 francs.
1Le 17 juin 1799, un notaire de Châteaudun enregistre l’achat de terres par une fratrie de la ville : « Citoyens Jean-Maurice Dobet, François-Maurice Dobet, organistes, et citoyenne Marie-Louise Dobet fille majeure et aussy organiste, frères et sœur, demeurant tous trois ensemble en cettedite commune de Châteaudun rue Dodun. » [1] L’enquête montre vite que leur père avait lui aussi fait métier de la musique : le 21 août 1795 est enregistré à Châteaudun le décès de « Morice Dobet, organiste », 82 ans six mois [2]. Autour du défunt sont rassemblés ses enfants : l’aîné, Jean-Maurice, 53 ans, domicilié dans le Blésois, sans profession indiquée ; le puîné, François-Maurice, 50 ans, « organiste en cette commune » ; enfin Marie-Louise, 49 ans, « aussy demeurante » à Châteaudun. Il s’agit donc d’une de ces familles où la musique se transmet d’une génération à l’autre comme dans les cas incomparablement plus célèbres des Bach ou des Couperin.
2Par quels mécanismes une telle amorce de dynastie a-t-elle pu naître dans une ville de la taille de Châteaudun (6 000 habitants en 1789) ? Comment cette famille a‑t‑elle franchi la Révolution, et que devient-elle ensuite ? Les musiciens ordinaires des provinces sont restés jusqu’à une période récente parents pauvres de la recherche, tant historique que musicologique. Les investigations sur la famille Dobet s’insèrent dans une vaste enquête prosopographique qui vise à reconstituer les effectifs musicaux employés par l’Église partout en France à la fin de l’Ancien Régime, corpus riche de plusieurs milliers d’individus [3]. En effet, la suppression des institutions ecclésiastiques, chapitres, abbayes et monastères dès 1790, puis des églises paroissiales en 1793, laisse dans l’expectative les musiciens qu’elles employaient [4]. Les centaines de suppliques collectives ou individuelles envoyées, via les directoires de département, au Comité ecclésiastique de l’Assemblée nationale expriment le désarroi et l’angoisse face à la décomposition d’un univers jugé protecteur en dépit de fortes contraintes. C’est une véritable manne de témoignages glanés sur le terrain [5]. Ainsi sont sortis de l’ombre les musiciens des collégiales de Châteaudun [6]. Mais les itinéraires des quatre organistes de la famille Dobet restaient un mystère. Or fouiller dans le détail quelques cas particuliers permet, d’une part, de donner de la chair au squelette prosopographique et, d’autre part, d’affiner et de nuancer la compréhension des processus à l’œuvre.
Maurice Dobet, le fondateur : de la psallette chartraine à l’établissement à Châteaudun
3L’histoire musicale de la famille Dobet débute le 23 mars 1720, jour où Maurice est reçu enfant de chœur à Notre-Dame de Chartres [7]. Partout, les chanoines entendent donner au service divin solennité et éclat. Ils entretiennent pour ce faire un bas chœur, plus ou moins étoffé selon la richesse de la compagnie, composé de clercs et de laïcs, de tous âges et aux fonctions diverses. Plus les revenus sont solides, plus la présence musicale s’affirme. À Chartres, les musiciens, appelés heuriers matiniers [8], sont alors une douzaine de chantres, soutenus par deux serpents, et relayés par un organiste. Les chapitres financent aussi des structures de formation en amont, appelées psallettes ou maîtrises. En nombre variable selon la puissance des églises, des garçons y reçoivent une éducation à la fois générale (lecture, écriture, latin), liturgique (cérémonies) et musicale. En échange, ils participent activement à la liturgie quotidienne, servant la messe et assurant les parties supérieures du chant. Fondé essentiellement sur la qualité vocale, le recrutement pouvait concerner tous les milieux sociaux, y compris les plus humbles. Après dix à douze ans dans cet internat où du matin au soir alternent leçons théoriques et mise en pratique, les meilleurs sortent dotés d’un haut niveau musical.
4C’est à la psallette de sa ville natale que Maurice Dobet a appris le métier de musicien. Il avait été baptisé le 20 février 1713 à Saint-Hilaire de Chartres, paroisse de la ville basse, au bord de l’Eure, dominée par l’artisanat du textile et du cuir [9]. Au gré des actes et au fil de leur existence, son père, ses grands-pères, ses oncles, ses cousins sont désignés comme peigneurs, cardeurs, sergers… Aux baptêmes de ses onze enfants, le père de Maurice est donné neuf fois comme peigneur et deux fois comme serger. Les trois quarts des parrains et marraines choisis sont des travailleurs du textile, un sur deux seulement sait signer. Tous les indices vont dans le même sens : il s’agit d’une famille modeste du petit artisanat urbain, où l’alphabétisation est fragile, et où l’on a sans doute peu de lien avec les pratiques culturelles savantes.
5On remarque d’autant plus le seul baptême qui échappe à cette coloration prédominante. C’est le premier qui suit l’entrée de Maurice à la psallette : moins de deux ans après, le 3 janvier 1722, une petite sœur est portée sur les fonts baptismaux par « Claude Robert, musicien de l’église Nostre-Dame Catédralle de Chartres ». Claude Robert était sorti de la psallette à Pâques 1720, précisément au moment où Maurice y était reçu, mais il est resté au chœur comme musicien [10].
Onze ans de formation musicale intensive
6En ce début de xviiie siècle, la psallette chartraine compte dix « enfants d’aube », échelonnés comme il est de règle entre 7 et 17 ou 19 ans. Lors de sa réception le 23 mars 1720, Maurice Dobet était âgé de 7 ans et un mois, ce qui en fait un exemple parfait de l’âge usuel d’entrée. Le maître de musique est alors Pierre Chenu, en poste depuis 1707. C’est lui qui démarre la formation du petit Dobet durant une trentaine de mois, jusqu’à ce qu’il devienne chanoine fin novembre 1722 [11]. Charles Leschenault, précédemment en poste aux Saints-Innocents à Paris, le remplace le 14 décembre 1722 [12]. Seize mois plus tard, il part précipitamment : du jour au lendemain les enfants se retrouvent sans magister [13]. Maurice Dobet a onze ans.
7Le recrutement d’un nouveau maître est laborieux. Pendant quatorze mois, la maîtrise reste sans direction. Les musiciens en place assurent vaille que vaille les tâches essentielles et sont défrayés pour avoir « fait chanter dans l’église » [14]. La discipline se relâche : l’aîné des enfants de chœur s’enivre lors des fêtes de Pentecôte 1725 [15]… À la Saint-Jean suivante, le Normand René-Louis Le Gras entre en fonction. Il est donc le troisième maître de Maurice.
8Quatre ans plus tard, le 24 mars 1729, « Dobet fait chanter une messe ». [16] Selon l’usage établi, il s’agit de faire exécuter une œuvre de sa composition propre, exercice offert aux enfants de chœur arrivant en fin de parcours et jugés capables. Maurice Dobet, tout juste âgé de 16 ans, domine donc déjà les bases de la composition, et ce, sur le format ambitieux d’une messe entière. Il reste encore près de deux ans à la maîtrise. C’est alors qu’il apprend à toucher l’orgue, probablement sous la direction de Colesse l’organiste de la cathédrale. Il était habituel en fin de cursus d’orienter les meilleurs des maîtrisiens vers l’orgue ou le serpent. Cela enrichit leur formation et permet de les conserver quelque temps au chœur, où ils peuvent encore être précieux même s’ils ont perdu leur voix d’ange. Sans doute parfait-il aussi son apprentissage de la composition sous la direction de Le Gras.
9Celui-ci meurt le 1er mars 1731. Maurice ne travaillera pas avec son successeur, Louis Homet, d’Orléans : il quitte la psallette le 13 mars 1731, et le chapitre lui accorde 150 livres « plus 50 # pour habits » [17]. Les ex-enfants de chœur recevaient en effet une rétribution de leurs années de service, pour financer la suite des études de ceux qui poursuivaient dans la voie cléricale, ou l’apprentissage d’un métier pour ceux qui ne se destinaient ni à l’Église ni à la musique. Dans le cas de Maurice Dobet, la disparition du registre capitulaire correspondant à sa sortie nous interdit de savoir ce qu’a été son choix à ce moment-là. Quand commence le suivant, en novembre 1731, il n’est plus question de lui. Il n’est donc pas resté comme musicien à la cathédrale de Chartres.
10S’ouvrent alors dix ans dont on ignore tout à l’heure actuelle. Ce qui est le plus vraisemblable, au vu de la pratique normale, est que durant une partie de ces années, le jeune homme se soit déplacé d’église en église, au gré des grandes fêtes ou des postes vacants, recherchant l’orgue ou le chœur qui sauraient lui offrir de bonnes conditions d’existence.
Épicier et organiste dans une petite ville active
11On retrouve sa trace en 1741 : il est alors épicier et organiste à Châteaudun, à 45 km au sud de Chartres. Depuis quand [18] ? Du moins peut-on affirmer que l’année 1741 correspond pour lui à un solide ancrage professionnel et social.
12Maurice Dobet s’établit dans une ville dont la reconstruction s’achève, après l’incendie de 1723. Ce sinistre a paradoxalement eu des retombées bénéfiques : secteur du bâtiment dynamisé, économie locale stimulée par l’afflux d’ouvriers et d’artisans qualifiés [19], et la ville présente désormais un visage moderne, conforme aux codes esthétiques des Lumières. La cité beauceronne, capitale du Dunois, continue à être un important centre commercial et un actif grenier à blé. Entourée d’une ceinture de vignes et de jardins, elle reste tournée vers l’agriculture qui mobilise vers 1750, quatre habitants sur dix [20]. C’est aussi un centre administratif abritant des juridictions royales, seigneuriales et ecclésiastiques. Une élite laïque, qui tire la majeure partie de sa richesse de la rente foncière, a fait construire des demeures élégantes et participe à une certaine vie culturelle (librairie, collège municipal réputé), où la musique a sa place.
13Toutefois, Maurice Dobet est avant tout non pas un musicien profane, mais un employé laïc du clergé local (85 personnes en 1790, soit 1,4 % des habitants). Lors de son mariage, il occupe le poste d’organiste du couvent de La Madeleine. C’est l’établissement le plus prestigieux de la cité [21]. Les chanoines réguliers de Saint-Augustin qui y assurent le culte « ont le pas et tiennent la droite » dans toutes les processions générales [22]. Plus d’une vingtaine de prêtres desservent les sept églises paroissiales. Il a fallu douze ans (1724-1735) pour rebâtir l’église Saint-Pierre, détruite en 1723. Tous les autres édifices ont fait l’objet d’améliorations et d’aménagements au cours du siècle. En outre, la ville compte deux chapitres. Le plus secret, mais non le moins prestigieux, installé à l’intérieur de la forteresse dominant le Loir, est celui de la Sainte-Chapelle, fondé par Jean de Dunois au xve siècle. Sous le règne de Louis XV, on y célèbre encore chaque jour l’office. Au cœur de la cité, près de la place Royale, siège le chapitre de Saint-André. L’église, réédifiée de 1724 à 1731, « est fort frequentée de la ville », note Courgibet, et « l’office s’y fait régulièrement tous les jours. Autrefois, on y chantait tous les jours matine et laudes. Depuis 1731, on ne fait plus que les psalmodier, mais on chante les petittes heures, la grande Messe et vespres ». Saint-André est un authentique lieu de musique, pourvu d’un maître et de quatre enfants de chœur institués par une fondation ancienne, mais aucun orgue n’y fonctionne lorsque Dobet s’installe à Châteaudun. De leur côté, les chanoines de la Sainte-Chapelle emploient au moins deux choristes et deux enfants de chœur ; d’organiste, point. Pourtant, Maurice Dobet à la veille de la Révolution travaillera pour chacune des trois principales églises de la ville.
Un beau mariage
14En ce 4 mai 1741, une dizaine de personnes sont réunies chez le notaire pour le contrat de mariage de Marie Raux, 20 ans, avec Maurice Dobet. Le jeune homme de 28 ans est étranger à la ville : aucun des présents ne lui est apparenté. Le seul lien avec sa patrie chartraine est la procuration stipulant le consentement de ses parents. Elle est portée par un avocat en parlement dunois, Louis Foucault, frère du curé de Saint-Pierre, également présent. Le marié est accompagné de Jean-Baptiste Chassevant, sacristain de la Sainte-Chapelle, mais c’est sur la paroisse de la Madeleine qu’il réside, sans doute depuis peu. Trois semaines plus tard pour la célébration religieuse en l’église Saint-Pierre, cet aréopage se retrouve, augmenté d’une forte présence de la famille Foucault.
15Marchand cordonnier, Jean Raux le père de la mariée est doté d’un statut social supérieur à celui du simple cordonnier qui travaille à façon dans son échoppe ; il a accès au crédit, possède boutique et connaît une certaine prospérité [23]. Toute la famille sait signer. Son premier fils, Jean-François, lui succédera dans le métier ; le suivant, Jean-Jacques, sera maître perruquier ; il fera du dernier fils survivant, Jacques, un homme d’Église. Quant à Marie, deuxième de ses filles et seule à convoler, il a accepté de la marier à ce Chartrain au statut hybride de marchand épicier et organiste. Sans doute est-il mieux renseigné que nous sur le parcours antérieur de Maurice. Le futur fait compter par son ami Chassevant 400 livres « en espèces d’or et d’argent », dont l’origine reste indéterminée : gages de musicien ou épargne liée à une activité commerciale ? « La future est prise » par son époux pour la somme de 1 200 livres dont 300 en meubles. C’est un bel apport, qui servira à lancer le jeune ménage dans sa vie active et à monter la boutique. L’établissement de quatre des neuf enfants identifiés des parents Raux (dot de Marie, financement des maîtrises de Jean-François et Jean-Jacques, et du titre clérical de Jacques) prouve la solidité financière de la famille Raux. Il est toutefois probable que dans le renforcement de la position de Maurice Dobet, comme dans l’ascension de Jacques Raux vers une stalle capitulaire, a pu jouer l’appui de protecteurs sachant activer au moment opportun des réseaux efficaces. La famille Foucault pourrait avoir joué ce rôle. Déjà en 1724, Louis Foucault, avocat au bailliage de Châteaudun, et son épouse avaient été parrain et marraine d’un frère de Marie, puis quelques années plus tard, le curé Claude Foucault parrain d’un autre frère. Ce petit garçon meurt rapidement et c’est Jacques, né en 1730, qui va profiter des leçons du curé de Saint-Pierre. Celui-ci peut écrire fièrement dans son registre à la date du 24 décembre 1754 : « A été chantée solemnellement en cette Église la première messe de ladite feste par maître Jacques Raux, prestre du samedy vingt et un du présent mois, icelle messe precedée du Veni Creator, ledit sieur Raux notre disciple pendant dix-sept ans. » Si aucun indice n’éclaire la genèse des liens entre les Raux et les Foucault, il faut retenir le prestige de cette famille au sein de la ville de Châteaudun, gagné au service de la maison d’Orléans [24].
16Marie Raux reste liée à ses frères : elle, son époux, puis leurs enfants seront parrains et marraines de plusieurs neveux et nièces. La famille Dobet entretient surtout des contacts étroits avec l’abbé Jacques Raux, personnage qui mérite quelques mots de biographie. Après l’obtention des ordres majeurs fin 1754, il assure un service de vicaire dans la petite paroisse de Neuvy-en-Dunois jusqu’en avril 1756. On le retrouve de 1757 à 1769 à l’hôtel-Dieu de Châteaudun. Il est « frère condonné et bénéficier du chapitre de saint Nicolas » qui dessert cet établissement, pour 300 livres par an de revenus. En 1771, lors des obsèques de son père, il est devenu chanoine de la Sainte-Chapelle-du-Dunois, avec un revenu de 400 livres par an. Il le restera jusqu’en 1790. Jacques Raux est un lettré qui publie chansons et poèmes, tout en conservant une stricte orthodoxie en matière religieuse [25].
17L’entrée de Maurice Dobet dans la famille Raux semble lui avoir ouvert des portes dans le milieu ecclésiastique, et dans les premières familles de Châteaudun. Les baptêmes de ses huit enfants affichent sa réussite socioprofessionnelle. L’ascension est toutefois progressive : ce n’est qu’au quatrième baptême, en 1745, que Maurice fait appel à un parrain n’appartenant pas à sa belle- famille. Il réitère en 1746 et 1748 avec un huissier et l’épouse du receveur des tailles. C’est lors du baptême du 18 février 1748 qu’on trouve la plus belle signature : celle du fils du subdélégué de l’intendant d’Orléans, Jean-Baptiste Rossard de Crépainville, écuyer et avocat du Roi au bureau des finances d’Orléans. Bras droit de l’intendant, il résida à Châteaudun jusqu’à sa mort en 1762. Ce parrainage marque la considération accordée à la famille Dobet et signale de façon éclatante l’insertion réussie de Maurice dans sa patrie d’adoption.
Quatre itinéraires musicaux distincts
Maurice Dobet, le père : de la pluriactivité à l’hégémonie musicale
18Le curé de La Madeleine qui de 1742 à 1746 baptise ses premiers enfants donne toujours Maurice Dobet pour épicier ou marchand, jamais pour organiste, alors que durant les mêmes années il touche l’orgue de La Madeleine. C’est que son activité de commerçant constitue sa véritable raison sociale et sa principale source de revenus, ses gages de musicien ne constituant encore qu’un appoint. Depuis 1741, il loue pour 110 livres par an à ses employeurs une maison à « l’encognure de la rue de Chaulne[s] et de la rüe de la Madeleine ». Au-dessus d’une cave, elle comporte « une boutique ayant ouverture sur les deux rues, une cuisine derrière, une allée entre deux », à l’étage, une grande chambre avec cabinet attenant, et une petite chambre haute [26].
19Le bail avait une durée de neuf ans, mais n’alla pas jusqu’à son terme. En effet, vers 1747 la famille Dobet change de paroisse : lors du baptême de Marie-Jeanne, le 18 février 1748 à Saint-Pierre, son père est dit organiste et marchand épicier « de cette paroisse ». Ce déménagement sanctionne une certaine réussite matérielle et permet au musicien de se rapprocher de ses meilleurs clients, officiers, ecclésiastiques, marchands, nombreux dans ce quartier entièrement rénové. Une adresse précise n’est connue qu’à partir de 1771, lorsqu’est réglée la succession du père Raux [27], et elle est toujours la même à la veille de la Révolution : à l’extrémité de la rue Dodun qui débouche sur la place de Saint-André. Cette place et son voisinage forment une sorte de quartier canonial ouvert, largement occupé par les chanoines et les clercs au service de la collégiale. Un inventaire établi en 1790 fait état, sans toutefois le localiser, « du ménage des enfans de cœur », qui comporte un grand lit pour le maître et quatre lits pour les enfants [28]. Peu après, le district précise que « le logement du sacristin et [celui] du maître des enfans de chœur [font] partie de leur traitement » et que chacun d’eux occupe l’une des neuf maisons canoniales [29]. On peut donc penser que le chapitre avait établi sa maîtrise dans le logement de fonction dévolu à Maurice Dobet, alors organiste et maître des enfants de chœur de Saint-André. Plus question de boutique, cette maison comporte quatre pièces d’habitation : au rez-de-chaussée une cuisine sur la rue et une grande chambre à feu derrière, nantie d’une alcôve et d’un cabinet avec porte vitrée, à l’étage deux chambres « en capucine », dont l’une froide, grenier sur le tout, caves sous la cuisine et sous la cour. Un corridor latéral permet d’accéder à l’arrière : une cour, close par un bûcher et les latrines, une terrasse, puis un vaste terrain en pente qui descend vers la rivière [30].
20La disparition des archives des chapitres dunois rend ardue la reconstitution de la carrière de Maurice Dobet. Grâce aux documents administratifs révolutionnaires et à diverses sources relatives aux orgues, des certitudes existent cependant. Pendant une dizaine d’années, son unique lieu de travail musical fut sans doute l’orgue de La Madeleine, aucun des chapitres séculiers de la ville n’en possédant alors [31]. L’abbaye était déjà pourvue d’un orgue au xviie siècle, mais celui que toucha Maurice Dobet avait été conçu de 1710 à 1719 par le chantre et organiste François Billault, religieux de la maison. Il comportait 52 jeux répartis sur cinq claviers manuels et un pédalier [32]. Courgibet rapporte que Billault, qui avait « beaucoup de génie », mourut en 1731 ; « c’est luy qui a fait l’orgue qui subsiste aujourd’huy et que les connoisseurs admirent » [33].
21Le recrutement de Maurice Dobet à Saint-André et à la Sainte-Chapelle ne saurait en toute logique être antérieur à l’installation d’orgues en ces lieux. Dans la compétition feutrée que se livraient les trois chapitres de la ville, La Madeleine avait pris de l’avance en matière musicale grâce à son organiste. Courgibet, bien informé, livre une date précise pour la Sainte-Chapelle : « Enfin le 17 fev. 1751 M. René Michaux de la Burtière chantre en dignité de la Ste Chapelle, très zêlé ecclesiastique, et riche de patrimoine, aimant la decoration de L’Église et la Solemnité de l’office divin, fit present au Chapitre d’un grand orgue qu’il avoit achepté 3 000 # des PP. Cordeliers [34]. »
22Concernant Saint-André, la chronologie est plus floue. Le vigneron Jean Yvon donne une date : « L’an 1740, les messieurs de Saint-André ont fait possé un bufet d’orgue dans leur église. » [35] Pour Courgibet, l’embellissement de l’église est à mettre à l’actif du dernier doyen Henri-Louis de Trémault, après 1750 : « Sous ce Doyen, le Chapitre a fait accom[m]oder Son église très proprement, l’a pourvue d’ornemens très beaux, d’un buffet d’orgue et d’un bel autel. » Et c’est la date du 4 juin 1764 qui figure dans les dossiers établis au début de la Révolution comme étant celle à laquelle Maurice Dobet, organiste et maître des enfants de chœur, avait été recruté à Saint-André [36].
23En 1767, l’abbaye bénédictine de Saint-Avit, toute proche [37], fait réaliser par Picard-Lépine, facteur parisien, un orgue de quatre pieds bouché à deux soufflets. On voit ensuite les religieuses rémunérer fréquemment Maurice Dobet, qualifié d’organiste et de maître de musique, pour « accord ordinaire » de l’orgue ou « pour les services qu’il rend à la maison en montrant l’orgue » (16 avril 1781) [38].
24Tout indique que Maurice Dobet a joué un rôle moteur dans le développement de la musique à Châteaudun et alentours dans la seconde moitié du xviiie siècle, en tant qu’enseignant, mais aussi en tant que musicien talentueux, et peut-être en tant que compositeur de musique sacrée. À l’instar de nombreux maîtres des provinces, il a pu écrire des motets ou d’autres pièces, qui n’ont pas traversé le temps. Sa messe chantée en 1729 à Chartres témoigne de ses aptitudes en ce domaine.
25Ses émoluments sont en revanche connus, du moins pour la fin de l’Ancien Régime. Du chapitre de Saint-André, son principal employeur, il recevait 720 livres de traitement, dont 200 comme organiste, plus 730 livres d’avantages en nature (logement, gages d’une domestique, six chapons…). Il touchait 240 livres de l’abbaye de La Madeleine et 150 livres de la Sainte-Chapelle en qualité d’organiste de ces lieux, soit au total 1 840 livres [39] – et peut-être travaillait-il encore pour les religieuses de Saint-Avit. En 1789, Maurice Dobet est l’un des rares musiciens dunois capable de vivre uniquement de son art – il a depuis longtemps délaissé l’épicerie. Si l’on ajoute à ses salaires les revenus – difficiles à estimer – d’origine terrienne provenant d’héritages et d’investissements réalisés après 1741, il en ressort qu’il était parvenu à mettre les siens à l’abri du besoin et même à se hisser au niveau de la petite bourgeoisie locale.
« La fille Dobet » : dans l’ombre paternelle
26Durant les cinq premières années de son mariage, Marie Raux donne le jour à cinq enfants. Les trois qui parviendront à l’âge adulte seront musiciens. Neuf mois à peine après l’union de ses parents, le premier-né est un fils, Jean-Maurice, baptisé le 24 février 1742. Deux ans plus tard, le 12 janvier 1744, naît François-Maurice, et le 10 avril 1746 est baptisée Marie-Louise, tous dans la même église de La Madeleine. On imagine les jeunes enfants descendant dans la boutique, apprenant à marcher entre les armoires et le comptoir et découvrant le monde à travers le riche univers olfactif créé par les épices, sirops, drogues ou autres produits d’apothicairerie entreposés. Après l’installation paroisse Saint-Pierre, les garçons retrouvent-ils la clientèle aisée de l’épicerie lors des cérémonies en la collégiale Saint-André toute proche, revêtus du surplis blanc et de la robe rouge ? Les fils Dobet y ont probablement été enfants de chœur dans les années 1750. Fort de sa jeunesse passée à la maîtrise de Chartres, le père a dû souhaiter pareille formation pour ses fils. Les sources dunoises sont trop lacunaires pour obtenir une certitude mais les investigations menées à Chartres montrent un chanoine chargé de la maîtrise cathédrale proposant au chapitre fin 1751 de recevoir « deux enfants de chœur de Châteaudun desja instruits dans la musique », proposition non suivie d’effet [40]. Ces deux garçons pourraient bien être les frères Dobet, qui ont alors presque 8 et 10 ans, et ont pu être « instruits dans la musique » sous l’autorité tutélaire de leur père ajoutée à celle du maître de Saint-André [41].
27Comme dans d’autres cas documentés, le père a sans doute enseigné tant à ses fils qu’à sa fille l’orgue, l’épinette, le clavecin, ainsi que, peut-être, la composition, permettant à ses enfants d’être à même de gagner leur vie grâce à la musique. La tribune de La Madeleine, ou une autre, a pu accueillir les deux garçons et leur sœur pour leurs premières années d’initiation. La thèse de la formation paternelle prend du corps avec une mention trouvée dans un registre paroissial dunois à la date du 12 juin 1756 : Jean-Maurice, qui vient d’avoir 14 ans, est parrain de son dernier frère. On précise à son égard « aussy organiste », c’est-à-dire comme son père également présent. Cela ne signifie pas que le jeune garçon soit déjà titulaire d’une tribune mais que son aptitude à toucher l’orgue est reconnue, sans doute parce qu’il épaule son père sur divers orgues de la ville.
28Sa petite sœur fera de même très vite après. L’enquête prosopographique a révélé dans les églises de 1790 plus d’une centaine de musiciennes inconnues antérieurement, la plupart organistes, en plus forte densité dans la moitié nord du royaume [42]. Il est usuel de dire que cet effectif ne représente qu’une faible part des musiciennes réelles, dont la majeure partie nous demeure invisible. La famille Dobet illustre la réalité de ce topos de l’histoire des femmes. Fin 1790, les trois chapitres dunois dissouts, La Madeleine devenue simple église paroissiale, Maurice Dobet a obtenu de l’administration nouvelle la promesse d’une pension viagère à laquelle lui donnent droit son âge (bientôt 78 ans) et ses longues années de service. Il songe à l’avenir de sa fille, qui a 44 ans et ne s’est pas mariée. Au début de 1791, il adresse un mémoire au district de Châteaudun dans lequel « il demande que le traitement qu’il a appris que le Directoire avoit estimé devoir luy être assigné, soit partagé entre luy et sa fille qui depuis 32 ans touche avec luy les orgues qu’il ne pouvoit toucher seul » [43]. Les archives capitulaires dunoises ayant disparu, c’est cette réclamation de son père qui a donné à Marie-Louise Dobet une visibilité à nos yeux d’historiens. Sans cela, son activité propre, bien réelle pourtant, aurait été difficile à prouver. C’est le cas de très nombreuses filles, sœurs et épouses, dont nulle archive professionnelle n’a conservé trace puisque leur fonction d’organiste résulte d’arrangements combinés au sein de la sphère familiale [44].
29Sauf exagération paternelle, l’indication « depuis 32 ans » début 1791 signifie que Marie-Louise aurait commencé à toucher l’orgue en public dès l’âge de 13 ans. Ce n’est pas invraisemblable puisque d’autres exemples offrent le même ordre de grandeur. Le district reconnaît d’ailleurs volontiers que « sans sa fille le sieur Dobet n’auroit pu toucher les trois orgues » et admet que « s’il y eut [eu] un autre organiste, il eut obtenu un traitement » [45]. Peu après, le directoire départemental considère « que la d[emoise]lle Dobet a bien trente-deux années de Service » mais les ramène à vingt-huit, au motif que les services ne peuvent être pris en compte qu’à partir de l’âge de 18 ans – ce qui confirme sa précocité. Ce calcul lui vaut à compter du 1er janvier 1791 une petite pension annuelle de 100 livres, qui correspond à la moitié de ses appointements antérieurs, lesquels semblent bel et bien reconnus officiellement [46]. La « fille Dobet » figure ensuite sur les états de paiement du district, sans prénom, mais clairement en tant qu’organiste.
Jean-Maurice, le fils aîné : des tribunes aux salons
30Huit ans après le baptême de 1756, Jean-Maurice émerge à nouveau des sources. En 1764, le Mercure de France publie une chanson dont « la musique est de M. Dobet fils, organiste à Châteaudun » et les paroles de « M. R., de la même ville » [47]. Ce monsieur R. est le cousin du fils Dobet, l’abbé Jacques Raux, futur chanoine. La pièce s’inscrit dans le goût du temps, bergeries et bois ombreux propices aux scènes galantes. Publier, même une petite pastourelle, dans cette revue n’est pas anecdotique. Le Mercure est une publication prestigieuse, qu’on trouve fréquemment dans les bibliothèques des élites urbaines. Jean-Maurice Dobet a 22 ans passés et réside toujours chez ses parents. Sa titulature de 1764 (« organiste à Châteaudun ») confirme celle de 1756. Le jeune homme rêve sûrement de montrer son talent à d’autres publics. Il lui faut partir afin de gagner son pain et aussi pour rencontrer ceux qui enrichiront son bagage musical, son père lui ayant transmis tout ce qu’il savait. Toutefois, il sait raison garder et ne se précipite pas à Paris, si proche. Peut-être son père, qui s’était frotté au vaste monde, a-t-il imposé un plan de carrière moins risqué.
31Entre février et juin 1765, Jean-Maurice Dobet s’élance enfin sur les routes royales, en direction de Blois. Il vient dans cette petite ville des bords de Loire, peuplée d’une dizaine de milliers d’habitants, prendre son premier poste d’organiste titulaire, à la cathédrale Saint-Louis [48], poste ouvert par le décès de l’organiste Guillaume Bernard le 16 février [49]. Le 28 juin 1765, il prend possession de la chapelle Saint-Jean « par portion », ce qui consacre son installation : ce bénéfice assurera sa subsistance de façon très correcte pour un débutant [50]. L’acte précise qu’il est clerc du diocèse de Chartres, ce qui confirme un passé d’enfant de chœur. C’est à un bas chœur de 15 personnes que s’agrège le jeune homme [51].
32Jean-Maurice Dobet quitte la tribune de la cathédrale dès le 12 janvier 1767, sans qu’on sache rien des raisons de son départ. On le retrouve plus tard à l’orgue de l’abbaye Notre-Dame de Bourgmoyen, toujours à Blois : « Monsieur d’Obé » apparaît dans un registre de comptes ouvert à Noël 1770, et son dernier semestre lui est payé le 28 juin 1772 [52]. Il recevait 240 livres par an, nettement moins qu’à la cathédrale : l’orgue de Bourgmoyen ne peut pas avoir été son seul revenu.
33En réalité, sa jeune carrière a opéré une mutation importante. Peut-être est-il enfin « monté » à Paris, où il a pu rencontrer d’autres musiciens. Il se sent désormais de taille à proposer ses compositions au public. Ce ne sont pas des pièces pour orgue mais pour le clavecin, marché plus porteur, avec une dimension pédagogique importante. Le Mercure de France fait à nouveau écho à son travail. En février 1771 – il a alors 29 ans – paraissent, toujours dans le registre bucolique, « Le Printemps, Ariette, avec accompagnement de clavecin, violon et basse ad libitum, par M. Dobet, maître de clavecin à Blois ; 1 L. 16 s. aux adresses ordinaires de musique » ; ainsi qu’une « Sonate en symphonie pour le clavecin, faite pour être exécutée par deux personnes sur le même instrument » que l’on aura pour trois livres « chez la dame Bereau, marchande de musique, rue de la Comédie Françoise ». Une intéressante précision éclaire ce second ouvrage : « Cette pièce a été composée dans la vue d’encourager les jeunes élèves à se faire entendre et à n’être pas intimidées lorsqu’elles exécutent des solos ou des pièces accompagnées par des personnes qui ne connoissent pas leur jeu… » [53] Maître de clavecin en ville, voilà désormais la fonction principale du musicien. La publication à Paris de ses compositions a sans aucun doute accéléré sa percée professionnelle à Blois ; par ailleurs, son passage à la cathédrale et le rôle conservé aux orgues de Bourgmoyen ont permis de tisser des liens avec les élites de la ville en quête d’une éducation musicale pour leurs enfants.
34Pourtant, Jean-Maurice Dobet quitte Blois au cours de l’année 1772 pour s’établir dans la grande ville voisine d’Orléans, quatre fois plus peuplée. Autre surprise, on le retrouve à la tribune de la cathédrale Sainte-Croix. Le poste est d’importance, c’est un bond évident dans la hiérarchie subtile et non codifiée des organistes du royaume. Jean-Maurice succède à Christophe Moyreau, organiste, claveciniste et compositeur, qui vient de résigner ses fonctions. Figure du monde musical orléanais, ce dernier a été membre de l’académie de musique de la ville rétablie en 1757 par François Giroust [54]. Il a laissé des compositions parmi lesquelles six livres de pièces pour clavecin dédiés au duc d’Orléans, ainsi qu’un « Petit abrégé des principes de musique, par demandes et par réponses ; qui peuvent être enseignez par les peres et meres ; Précepteurs, Maîtres d’Écoles & même par des domestiques, aux Enfans les plus jeunes… » [55]. La parenté entre les profils des deux artistes est frappante. Se connaissaient-ils antérieurement ? Par la Loire, la liaison Blois-Orléans est facile, et les informations comme les hommes circulent intensément. Il se peut que Moyreau ait été amené à juger le jeune musicien digne de lui succéder. Les contacts entre Dobet et le chapitre orléanais ont également pu être facilités par le facteur d’orgues Jean-Baptiste Isnard, installé à Orléans et qui travaille alors aux orgues de Sainte-Croix. Or, la même année, Isnard mène aussi des chantiers à Blois, notamment à Bourgmoyen, où il côtoie Dobet [56].
35La disparition des archives de Sainte-Croix oblitère la reconstitution de la carrière orléanaise de Dobet fils. Probablement installé dans le courant de l’été 1772, il serait resté en poste jusqu’en 1775. Seule certitude, il est parti avant le 4 décembre 1775, date de l’arrivée de son successeur Nicolas-Augustin Carré. Il a poursuivi son activité enseignante, bénéficiant du carnet d’adresses de Moyreau et de la permission explicite du chapitre : « Les offices sont disposés de manière que les musiciens peuvent donner en ville des leçons de musique. » [57] Les Étrennes orléanaises pour 1775 indiquent dans la liste des maîtres de musique instrumentale « Daubet, organiste de Sainte-Croix, place du Martroi, pour le clavessin ».
36Une parenthèse de trois années de mystère vient s’intercaler dans la carrière de Jean-Maurice après son départ de Sainte-Croix. Est-il resté à Orléans, est-il reparti à Blois, a-t-il tenté fortune ailleurs ? À ce stade de l’enquête, l’espoir de retrouver sa trace semblait mince. Pourtant, une lecture plus réfléchie des sources a permis de le repérer sous une dénomination erronée : Brosset évoque alors à Blois un sieur Dobel, « organiste de la cathédrale, compositeur et professeur » [58]. S’il est effectivement revenu à Blois, Dobet n’a pas pu retrouver longtemps l’orgue de la cathédrale, où Léonard Mathieu est en place dès janvier 1776. Il serait donc plutôt maître de clavecin : « Ses leçons données à Blois étaient très suivies par la bonne société. Il était aussi appelé dans les châteaux des environs et donnait notamment des leçons à la fille du comte de Dufort qui habitait le château de Cheverny » écrit Jules Brosset. Ce Dobel-là était-il vraiment Jean-Maurice Dobet ? Le patronyme presque identique, les termes organiste, professeur, leçons… permettaient de le supposer. La confirmation en a été apportée par les registres paroissiaux de Cheverny. Le 11 septembre 1778, on reconnaît sa signature « Maurice Dobet » tout en bas de l’acte de mariage de M. de Gauvilliers, contrôleur ambulant et receveur général des domaines du roi, avec la fille d’un bourgeois orléanais. Cheverny parle de Dobet dans ses mémoires comme « gouverneur de mes enfants, ensuite musicien chez moi », mais l’édition de 1886 a écorché son nom en Dobel [59].
37À une date restée indéterminée [60], Jean-Maurice Dobet est donc passé du statut de maître de clavecin indépendant à celui de gouverneur chez une puissante famille de la région. Jean-Nicolas Dufort, issu d’un milieu de parlementaires et de fermiers généraux, s’est retiré depuis 1764 dans ses terres de Cheverny, à trois heures de route de Blois, en bordure de Sologne. Mais il a fréquenté la Cour, comme introducteur des ambassadeurs, il a ses entrées chez les ministres, est apparenté à Amelot et fréquente les Grands comme Choiseul et les Polignac [61]. La réputation de Dobet comme maître de clavecin a dû sourdre des conversations de salon de toutes ces sociétés à la fois enracinées dans un périmètre restreint et ayant ou ayant eu des activités et des relations à l’échelle du royaume. Dufort dit de Dobet qu’il était « un compositeur et homme singulièrement instruit » [62]. C’est pour la jeune Edmée-Antoinette, née en 1759, qu’il a été engagé : la demoiselle profite de « la ressource d’un maître excellent sous tous les rapports » écrit son père [63]. Après le mariage de sa fille en 1778, Dufort conserve Dobet, car il a l’intention de faire de son plus jeune fils, 13 ans, un ecclésiastique [64]. Le gouverneur l’accompagne les années nécessaires à son épanouissement, qui débouchera sur le mariage et non sur la prêtrise. Puis il continue à servir en tant que musicien, mais pas seulement. Le comte raconte :
« J’ai toujours aimé à m’occuper. Il y avait alors à Paris un spectacle en vogue, c’étaient les Fantoccini. […] Je me mis à faire des pièces d’après les canevas italiens qu’on me fournit et j’eus en un an quatre-vingt-quinze pièces toutes dialoguées. M. Dobet, gouverneur de mes enfants, ensuite musicien chez moi, se chargea d’en faire des doubles, écrits sur de grands volumes. Des ballets ingénieux y furent introduits. » [65]
39Les talents de Jean-Maurice sont donc mis à contribution de diverses manières. Compose-t-il pour son maître ? C’est probable. Le comte a fait aménager une salle de spectacle « délicieuse. […] Il y avait des amateurs très forts dans la province. Je fis les frais de politesse, et ils s’empressèrent de me former un orchestre capable de jouer les opéras comiques les plus à la mode ». Dobet joue du clavecin, peut-être avec la femme du fermier général La Valette, « femme d’esprit, grande claveciniste » ou du violon certains soirs pour les invités, sans doute un fameux soir d’août, jour de la fête de la comtesse. Chacun se costume comme au Sérail, « tous les musiciens sont habillés en Turcs » et le beau-frère de Dufort, monsieur de Salaberry, « chante un air », puis « l’on se mit à danser des contredanses ordinaires, des ballets et des danses de muet [sic] » [66]. Le comte est lié à Jelyotte, célébrissime haute-contre qui triompha dans les Indes Galantes et qui, vétéran de la musique du roi, est assidu à Cheverny [67]. Ainsi, mutatis mutandis, le statut de Jean-Maurice Dobet s’apparente-t-il à celui d’un Léopold Mozart à Salzbourg ou d’un Joseph Haydn chez le prince Esterházy.
40Cette vie à Cheverny a toutefois une fin pour Jean-Maurice. En 1787 probablement, il entre au service d’une autre famille, installée au château d’Herbault, au nord-ouest de Blois. Ami du comte de Cheverny, ancien militaire, Charles-François Devezeau de Rancongne connaît la valeur de sa recrue : « Lorsque Dobet grand musicien claveciniste me quitta pour entrer chez mon ami le marquis de Rancogne, j’écrivis à M. Sedaine le priant de me chercher un musicien qui pût le remplacer. » [68] Ce compliment n’est pas médiocre sous la plume de qui avait entendu Mozart à Versailles.
41Le marquis n’émigre pas lors de la Révolution. D’après un recensement de l’an III, sa maison se compose d’un homme adulte (lui-même), de deux femmes (son épouse et sans doute sa mère), de quatre fils et une fille, et de cinq « aides mâles » et huit « femelles » (domestiques) [69]. Les cinq enfants furent les élèves de Jean-Maurice Dobet de 1787 à 1794-1795. Son nom ne figure pas alors sur la liste des chefs de feu d’Herbault : soit il est compris parmi les cinq aides mâles, soit il vient de partir pour Châteaudun, où l’on sait qu’il se trouve en août 1795, à la mort de son père. Dans deux actes notariés de décembre 1795, il est donné comme « instituteur » à Herbault [70]. Sa présence en ce bourg est antérieurement attestée par une autre source. Le 10 floréal II (29 avril 1794), « Daubet » fait un don de 50 livres à la commune, ce qui fait de lui le quatrième contributeur local [71]. Dans la liste des donateurs, son nom apparaît – ce n’est pas un hasard – juste après celui de « Devezeaux », qui de son côté a offert 1 500 livres. Tous deux sont classés dans la catégorie des « dons généreux », celle qui permet d’éviter les ennuis. Jean-Maurice conserva-t-il des liens avec ses anciens écoliers ? Célibataire, il s’était consacré corps et âme à sa tâche ; de surcroît, dans ces temps incertains, sa fidélité à son employeur est indéfectible. On aime à penser que celui de ses élèves qui sut plaire à George Sand par sa sensibilité et sa poésie avait un caractère façonné à l’image de celui de son gouverneur [72].
François-Maurice : la stabilité silencieuse
42Les premières années du second fils Dobet ressemblent à celles de son frère, entre boutique et musique. Il est dit « organiste demeurant à Châteaudun », d’où il semble arriver tout droit, lorsqu’en janvier 1765 il se présente aux fabriciers de Saint-Germain de Dourdan. Âgé de presque 21 ans, le jeune homme s’envole ainsi le premier du nid familial. Peu éloignée de Châteaudun (70 km à vol d’oiseau), à proximité de la grande route de Chartres à Paris, Dourdan (2 000 habitants) est alors la toute petite capitale du Hurepoix [73]. François-Maurice y arrive la veille des obsèques de l’organiste Antoine-Jacques Houssu, 66 ans, qui était en poste depuis 43 ans [74]. Ni hasard ni coïncidence, Dobet à l’évidence a été prévenu, mais il doit respecter les procédures de nomination du nouveau titulaire des orgues paroissiales :
« […] Mrs lesdits marguilliers ont representé qu’estant necessaire de recevoir un organiste au lieu du sr Houssu qui est décédé ; ils ont prié le sr Colliot pretre vicaire de cette paroisse en etat de juger de la capacité de celui qui doit le remplacer d’en faire venir un, ce qu’aiant fait, il s’est presenté au bureau le sr François Maurice Dobet organiste demt à Chateaudun qu’aiant commencé hier a vespres et aujourd’huy a toucher l’orgue a tous les offices dont les habitans connaisseurs paroissent etre tres satisfaits ce qui fait juger que le sr Dobet s’acquittera bien et dument des fonctions d’organiste pourquoi les soussignés ont consenti que ledit sr Dobet fasse les fonctions d’organiste a la charge pour lui de se rendre assidu aux offices et autres ceremonies accoutumées et moyennant la somme de cinq cent livres par an d’appointements qui lui seront paiés de trois mois en trois mois qui ont commencé a courir ce jourd’huy. Et sur ce qui a été représenté par le sr Dobet que l’orgue dans differentes parties n’est pas d’accord et qu’il seroit necessaire de faire venir un facteur pour y remedier et y faire les reparations […]. » [75]
44Ce texte confirme la rapidité de circulation des informations dans le petit monde de l’orgue : François-Maurice monte à la tribune alors que le corps d’Houssu repose encore sur sa paillasse. Il montre que dans une petite cité de la taille de Dourdan, il y a des amateurs de musique et même des « connaisseurs », qui savent évaluer les prétendants lors de ce qui ressemble fort à un examen public, voire à un concours – même si, ici, aucun concurrent ne semble s’être proposé, preuve supplémentaire que l’arrivée du Dunois a été préparée en amont. Enfin, il indique que le jeune organiste maîtrise bien son art : ses compétences semblent satisfaire l’auditoire. En à peine deux jours, il a dressé un état de ce qui ne va pas dans l’instrument. La fabrique d’ailleurs ne discute pas et appelle le célèbre facteur Lépine. Le 12 juin 1768, François-Maurice Dobet appose sa signature dans le registre au sujet de ces réparations. Puis c’est le « silence ». Cet homme-là était-il misanthrope ? Nulle trace de lui dans les registres paroissiaux au titre de témoin de noces ou d’un parrainage. Pourtant, il n’est pas le seul intervenant dans la vie liturgique et musicale de la paroisse [76]. Heureusement, dans la comptabilité de la fabrique conservée, nombre de quittances de paiement sont paraphées par lui pour la période 1775-1781 [77] et son nom figure sur les registres des années 1781-1786 [78]. Il est encore en place le 1er octobre 1792, soit près de trente années au service de la même église : une carrière à l’opposé de celle de son frère, qui dans le même temps a connu au moins cinq postes successifs, dans deux univers très contrastés.
45Une ressemblance cependant les réunit : comme son frère et sa sœur, François-Maurice ne s’est pas marié. Pourtant, dès son recrutement, il est payé 500 livres par an, soit 200 de plus que son prédécesseur, marié et père de famille [79]. La somme reste fixe pendant tout le reste de sa carrière, jusqu’en 1791 où il ne reçoit plus que 400 livres, puis 200 en 1792 [80].
La Révolution bouleverse la vie des quatre musiciens
46La suppression des chapitres et des abbayes fait perdre ses places à Maurice Dobet, le père. Le district de Châteaudun prévoit d’abord de lui accorder une pension compensatoire de 800 livres, puis d’en soustraire un huitième pour sa fille. Les décrets des 26 août 1791 et 1er juillet 1792 stipulant qu’aucune pension attribuée aux anciens salariés des chapitres et abbayes n’excèdera 400 livres, le directoire d’Eure-et-Loir lui accorde cette somme par arrêté du 20 août 1792. Marie-Louise Dobet voit de son côté se confirmer sa pension de 100 livres [81]. Simple employé paroissial, son frère François-Maurice n’eut droit à rien à son départ de Dourdan. Malgré des revenus amputés, la famille ne semble pas avoir souffert financièrement, sans doute parce qu’elle disposait d’autres ressources, leçons de musique, mais aussi fermages et intérêts de rentes, difficiles à estimer. Entre 1741 et 1790, en effet, Maurice Dobet et les siens ont hérité de divers biens immobiliers et ont investi dans la terre et la rente les quelques profits réalisés dans le commerce et la musique. Ainsi conservent-ils la capacité de faire face, même à des dépenses exceptionnelles.
47En janvier 1791, la maison du ci-devant chapitre Saint-André occupée par la famille Dobet rue Dodun est vendue en tant que bien national et mise à prix 480 livres. Au quatrième feu, Maurice Dobet, via un intermédiaire, l’achète pour 2 625 livres aux enchères [82]. Ainsi passe-t-il du statut d’employé capitulaire doté d’un logement de fonction à celui de propriétaire. Il s’acquittera de sa dette en six versements dont le dernier intervient en mai 1794 [83].
48Cette évidente aisance financière amène à s’interroger sur un point particulier : pourquoi aucun des enfants Dobet n’a-t-il contracté mariage ? La situation de dépendance supportée par chacun des trois à la veille de la Révolution pourrait fournir un élément d’explication, une forte « imprégnation cléricale » également. Toutefois rien dans les sources ne permet d’apporter une réponse décisive à cette question.
Sauver l’orgue
49Jusqu’à la fin de l’année 1792, Maurice Dobet et sa fille ont pu poursuivre leur service d’organiste à La Madeleine, devenue simple église paroissiale. Le 17 février 1793, par décret de la Convention, le nombre des paroisses de Châteaudun est réduit de sept à une – La Madeleine. Le 26 avril, la municipalité fixe le traitement des employés, musiciens compris. Aucun organiste n’est prévu. Pourtant, la question a été débattue : « Il seroit bien à désirer qu’on pût avoir un organiste ; mais son traitement devrait être tel qu’il fût possible d’en faire venir un en cette ville… » [84] Maurice Dobet, trop âgé, et sa fille, trop timide peut-être pour faire entendre sa voix, semblent tous deux hors jeu. Ses fils, encore retenus loin de Châteaudun, ne peuvent poser leur candidature. Le 30 novembre suivant, La Madeleine devient temple de la Raison. En mai 1794, la question de l’orgue est à nouveau soulevée. Évoquant sa dégradation, un officier municipal estime « que les réparations […] seront un peu coûteuses », mais il argumente sur l’avantage qu’il y aura de conserver « à cette commune un monument ancien » tant au nom de « la décoration » que « pour l’accompagnement des himnes qui pourront être chantés en ce temple ». Financés par une souscription, ces travaux semblent avoir eu lieu. En effet, lorsqu’en avril 1795, la municipalité accepte la mise en vente de « la ci-devant église de La Madeleine, connue aujourd’hui sous le nom de salle décadaire », elle rappelle qu’elle « vient de faire rétablir l’orgue, ce qui en a plus que doublé la valeur, qu’il seroit juste en le vendant d’en partager le prix entre la commune et la Nation » [85]. La vente, en définitive, ne se fit pas.
50Si l’orgue de La Madeleine a traversé la période révolutionnaire sans encombre, c’est en partie parce qu’il a servi dans le cadre du culte décadaire et des fêtes civiques. La première mention d’un tel usage date du 21 janvier 1795, commémoration de la « juste punition du dernier roi de France ». Après un parcours en ville au son des tambours, le cortège se rend à la « salle décadaire » pour écouter l’organiste jouer des « airs patriotiques » [86]. Selon toute vraisemblance, c’est François-Maurice Dobet, de retour de Dourdan, qui est à la tribune : en août suivant, lors du décès de son père, il sera qualifié d’« organiste en cette ville » [de Châteaudun]. La décision de toucher l’orgue dans ce contexte particulier n’a pas dû être facile à prendre. Dans leur parenté proche, les Dobet comptent un ecclésiastique, Jacques Raux, ci-devant chanoine de la Sainte-Chapelle, avec lequel Jean-Maurice s’était autrefois essayé à la chanson. Prêtre réfractaire, il est arrêté le 28 septembre 1793 pour avoir tenu « des conciliabules fanatiques » et célébré un mariage en toute illégalité, puis le 27 juillet 1794 envoyé par le comité de surveillance de « Dun-sur-Loir » au tribunal révolutionnaire à Paris avec 11 codétenus. Il fut le seul à être guillotiné, le 3 octobre 1794 [87]. Le ressort de François-Maurice ne peut être l’argent, puisqu’en 1795 il n’est pas encore question de salaire. La seule explication plausible réside dans la volonté d’assurer la préservation de l’orgue, en l’attente de jours meilleurs.
51Le culte décadaire dunois est connu par un arrêté municipal tardif (1798) qui officialise peut-être une pratique antérieure [88]. Les cérémonies se déroulent en la ci-devant église de La Madeleine chaque décadi à 10 heures du matin. L’arrêté précise qui doit y assister, ce qu’on y lira et célèbrera. Il spécifie que des airs patriotiques seront exécutés à l’orgue, et confirme que le poste d’organiste municipal est bien entre les mains de la maison Dobet : « Les citoyens Daubet frères, musiciens, toucheront l’orgue ; il leur sera accordé à cet effet la somme de 150 F ; il leur sera remis pendant la décade la note des airs patriotiques qu’ils exécuteront au décadi prochain, et l’indication de l’ordre dans lequel ils seront joués. » Chaque séance s’achèvera par l’Hymne à la liberté.
52Quant aux fêtes civiques dunoises, d’abord en plein air, elles passent en 1797-1798 par le temple de La Madeleine où sont prononcés des discours entrecoupés de chants et d’airs joués à l’orgue ; après quoi, le cortège reprend le chemin de la mairie. Du 6 janvier 1798 au 2 octobre 1799, l’organiste a été sollicité 20 fois dans le cadre d’une fête officielle [89]. Lorsque hommage est rendu aux héros de la République défunts, l’orgue joue des « airs lugubres ». Lorsque l’atmosphère est à la réjouissance, il joue des « airs patriotiques » ou les « airs chéris de la liberté ». En une seule occasion, la paix de Campoformio le 9 janvier 1798, le programme musical complet est donné : à l’arrivée du cortège, l’orgue a joué l’Hymne à la liberté, dont les couplets ont été repris par le public, puis Veillons au salut de l’Empire, L’Amitié franche et pure et Où peut-on être mieux qu’au sein de sa famille ? Pour la sortie, le Chant du départ de Méhul et Chénier, l’un des plus pratiqués à Châteaudun, avec l’incontournable Marseillaise.
La fratrie de la rue Dodun
53L’arrivée au pouvoir de Bonaparte ouvre aux frères Dobet des perspectives nouvelles, et tout d’abord dans le domaine de la vie publique. Le 25 août 1800, Jean-Maurice est nommé membre du conseil municipal de Châteaudun [90]. L’année suivante, il manque de peu l’élection au conseil d’arrondissement [91]. Par ailleurs, la politique religieuse du Premier Consul leur offre pour la dernière fois l’occasion d’exercer la fonction qui leur est chère. Avant même la signature du Concordat, l’église de La Madeleine est officiellement rendue au culte catholique (20 janvier 1800). L’orgue constitue l’un de ses atouts : c’est le seul qui subsiste à Châteaudun [92]. La fabrique confie sa réparation au facteur Dominique Huet [93]. Fin 1803, des gratifications sont distribuées au personnel paroissial, sauf… « à MM. Dobet organistes au moyen de ce qu’ils ont déclaré n’exiger aucune chose pour avoir touché l’orgue pendant le cours de cette année » [94]. Deux mois plus tard, un contrat est établi avec les deux frères, qui signent l’un en dessous de l’autre « Dobet aîné » et « Dobet le jeune » [95]. Manifestement, leur sœur n’est pas concernée. Une liste des occasions où ils devront toucher l’orgue est établie : les jours de fêtes, certains dimanches et lors des « cérémonies publiques qui pourront avoir lieu à l’église ». Le traitement convenu est de 200 livres par an ou 150 livres si le budget est serré : la bonne volonté des frères Dobet est utilisée comme variable d’ajustement par des fabriciens financièrement sur le fil du rasoir.
54Le 16 novembre 1811 disparaît l’aîné des Dobet, Jean-Maurice, l’ancien musicien de salon. Après une courte interruption, son cadet âgé de plus de 70 ans poursuit le service à la tribune. Il alerte la fabrique sur l’état de l’instrument : « Les soufflets sont hors de service et il n’existe pas un seul jeu en état. » Il négocie avec le facteur Huet, de passage, pour faire baisser son devis de moitié puis vérifie les travaux. Le rôle clé de François-Maurice se confirme, même s’il n’est pas question cette fois d’un contrat en bonne et due forme, mais d’un arrangement de courtoisie avec « M. Daubet ancien organiste et qui veut bien toucher cet orgue gratuitement » [96].
55De quoi vit alors la fratrie ? Immédiatement après le décès de leur aîné, les deux survivants ont vendu quatre lots de terre, au total environ 28 hectares [97], ainsi que leur maison de la rue Dodun [98], afin de se créer des rentes viagères, 600 francs pour les terres et 200 pour la maison, maison qu’ils continuent bien entendu à occuper. Ils s’assurent ainsi des revenus réguliers pour la fin de leur vie « sans aucune réduction au décès du prémourant ». Ces décisions rapides pourraient indiquer que l’aîné jouait antérieurement un rôle clé dans l’équilibre économique familial : par des reliquats bien placés du temps de ses succès ? Par des leçons de musique qu’il trouvait à dispenser plus facilement eu égard à son prestige passé ?
56Quoi qu’il en soit, le frère et la sœur entendent conserver le style de vie confortable dont témoigne leur logement. La chambre du rez-de-chaussée a des allures de salon : murs tapissés de papier peint, comme l’alcôve et le cabinet, « boisure » de cheminée peinte en gris, miroir enchâssé au milieu. La chambre principale de l’étage est garnie de « papier à losange fond bleu », sa cheminée est surmontée d’un trumeau peint en gris. Quant à la chambre haute sans feu, elle est aménagée en bibliothèque avec huit rayonnages, mais sert aussi de garde-robe, avec une armoire et deux grands placards muraux dont l’un garni de planches et de portemanteaux.
57Au décès du second frère, le 10 septembre 1818, personne ne semble envisager que Marie-Louise, 72 ans, puisse reprendre du service à l’orgue de La Madeleine, et la fabrique engage pour organiste un tout jeune homme venu de Tours. Durant près de onze ans, l’ancienne organiste va donc achever de vieillir loin de tout orgue. Se dégourdit-elle les doigts parfois sur l’épinette « en bois plaqué et peint, prisée dix francs » du salon [99] ? Nulle autre trace musicale dans la maison, si ce n’est deux pupitres à musique relégués au grenier. Du moins Marie-Louise n’est-elle pas dans le besoin sur le plan matériel. Elle est en mesure de prêter des sommes importantes, à 5 %, sur des durées plus ou moins longues. Au moment de son décès, les sommes ainsi placées forment un total de 4 000 francs, soit 2,5 fois plus que la valeur de tout ce que contient la maison, pourtant confortablement garnie [100]. Le chercheur habitué à rencontrer à longueur d’inventaires des mentions dépréciatives (mauvais, fort usé…), surtout chez les défunts âgés, ne peut manquer de remarquer leur quasi-absence dans la maison Dobet en 1829. À l’inverse, l’ensemble donne une impression d’aisance cossue (beaucoup de vaisselle et de linge, 32 draps valant 252 francs, 240 francs d’argenterie), assortie d’une certaine recherche de raffinement (la courtepointe du lit de repos du salon assortie aux rideaux de l’alcôve) et de divers signes de modernité (commode à dessus de marbre, bois de lit à roulettes, pendule en marbre et cuivre, fontaine en faïence fleurie…). La décoration du logis est suggérée par « deux carafes à fleurs en verre bleu », des petits cadres et « neuf figures en plâtre en bas-relief ». Sans oublier dans le salon un élément précisément décrit, plus éclairant sur la spiritualité de la dernière des Dobet que sur son sens esthétique : « Deux reliquaires contenant l’un des os de saint Nicolas, saint Justin, saint Candide et saint Eugène, l’autre de saint Laurent, saint Innocent, saint Faust et saint Loup, une croix en carton, doublée en verre, contenant deux morceaux d’os sculptés, l’un représentant le Christ en croix, l’autre la Sainte Vierge tenant l’enfant Jésus, […] avec un bénitier en verre blanc […] et un Capucin-baromètre. »
58Rien de tel dans la chambre de la vieille dame, à l’étage, où n’est pas même mentionné un crucifix : un lit très confortable, une commode et un secrétaire en noyer, une table à jouer et un trictrac, cinq chaises. La garde-robe ne respire pas non plus l’austérité : 50 chemises, 32 paires de bas en coton ou en soie, 7 robes en basin, indienne, mousseline et deux autres en soie, 13 jupons dont certains aussi en soie, 4 mantelets de soie noire… Sobriété en revanche dans les bijoux : le notaire ne mentionne qu’une bague et deux petites boucles en or, estimées 2,50 francs. C’est peu en comparaison de la valeur des deux montres en or héritées de ses frères (48 et 30 francs).
59Le 14 avril 1829, à 8 heures du matin, s’éteint « demoiselle Marie-Louise Dobet, fille du sieur Maurice Dobet organiste, et de dame Marie Raux », âgée de 83 ans. Aucun état professionnel n’est précisé en ce qui la concerne. Nul ne semble se souvenir du temps lointain où elle aidait son père à desservir « les orgues qu’il ne pouvoit toucher seul ».
60*
61*?*
62Les innombrables données réunies pour l’enquête prosopographique sur la « génération 1790 » permettent d’affirmer, au terme de cette étude, la représentativité des cas ici examinés. Ce qui est remarquable, c’est qu’au sein d’une même famille on se trouve finalement en présence de quatre profils différents qui résument ce que fut la situation des professionnels de la musique à l’époque moderne. Le père est l’archétype du musicien d’Église, au service de la liturgie depuis la psallette jusqu’à la retraite, parcours classique de plus de soixante-dix ans, sur lequel la Révolution intervenue alors qu’il est déjà âgé n’a guère eu d’impact. Une carrière telle qu’il s’en est déroulé des milliers, avec la particularité de régner sur la vie musicale d’une petite ville dont il tient les principaux leviers musicaux et où il joue un rôle évident dans le développement de l’orgue au cours de la seconde moitié du xviiie siècle. Dans l’ombre de ce père, nécessairement formée par ses soins, la fille mène elle aussi une vie d’organiste au service de l’Église, dans la discrétion et sans quitter le foyer parental, à l’instar de la plupart des cheminements musicaux féminins d’alors qui restent peu visibles… Le fils aîné, après une formation familiale et sans doute maîtrisienne, est promis à un destin copié sur celui de son père. Mais après quelques années à plusieurs tribunes d’orgues différentes, il opère une bifurcation radicale vers la musique profane et mène finalement une carrière de musicien de salon, appuyée sur une participation active à la vie culturelle des élites d’une petite région : il compose, joue et enseigne. À partir de la même formation mixte, le fils puiné choisit, à l’inverse, de valoriser ses compétences d’organiste dans une seule et même église, avec une très grande stabilité qui rappelle plutôt le profil paternel. Stabilité que la Révolution vient évidemment casser, comme elle interrompt les activités mondaines de l’aîné. L’un et l’autre retrouvent l’orgue de leur enfance au cœur de la Révolution et le touchent jusqu’à leur mort, participant ainsi activement à la reconstruction cultuelle post-concordataire. Les quatre musiciens de la famille Dobet déclinent donc presque toute la gamme des profils possibles, offrant par surcroît un bel exemple d’ascension sociale en deux générations, depuis un modeste milieu ouvrier, vers la petite bourgeoisie urbaine confortable, grâce à la musique.
Mots-clés éditeurs : musiciens, xviiie siècle, famille, orgue, France
Date de mise en ligne : 22/06/2012.
https://doi.org/10.3917/rhis.122.0391Notes
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[1]
AD Eure-et-Loir?: 2E 15/336, mn. P.-Ch. Raimbault, Châteaudun, 29 prairial 7 (17 juin 1799).
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[2]
État civil Châteaudun, 4 fructidor 3 (21 août 1795).
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[3]
Menée sous la responsabilité de Bernard Dompnier (chec, Université Blaise-Pascal, Clermont-Ferrand), cette enquête, à laquelle sont associés les trois auteurs du présent article, est intégrée au projet muséfrem (Musiques d’Église en France à l’Époque moderne), soutenu par l’anr sur 2009-2012. Elle a déjà donné lieu à diverses publications, en particulier?: «?Les musiciens d’Église en 1790. Premier état d’une enquête sur un groupe professionnel?», ahrf, no 340, 2005, p. 57-82, et un numéro spécial de la Revue de musicologie, t. 94/2, 2008, p. 271-573.
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[4]
Pour beaucoup d’entre eux, il faut se reconvertir ou accepter une maigre pension, renoncer à des projets comme le sacerdoce ou le mariage. Seule, une minorité retrouvera ultérieurement un emploi musical dans les nouvelles structures postconcordataires aux effectifs allégés et aux moyens financiers fortement réduits.
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[5]
Cette masse documentaire issue des séries Dxix et F19 aux Archives nationales a été complétée par des dépouillements dans les séries, G, H, L et Q des archives départementales. L’ensemble a permis de constituer une base de données prosopographiques sur les musiciens d’Église dans la seconde moitié du xviiie?siècle, qui facilite la reconstitution de leurs carrières et itinéraires, mais aussi de leurs origines sociales et géographiques, de leurs modes de formation, de recrutement, de gestion au sein de corps hiérarchisés aux identités bien marquées, y compris musicalement parlant. Cette enquête a également facilité la redécouverte des esthétiques musicales, et de leurs mutations au rythme de la pénétration des répertoires au plus profond des territoires. Tout un monde oublié a retrouvé ses couleurs?: cela affine le regard porté sur une période charnière de l’histoire et rend la parole à ceux qui ont été parmi les premiers à subir le choc des mutations.
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[6]
François Caillou, «?Les musiciens des églises collégiales de Châteaudun à la fin du xviiie?siècle?», Bulletin de la Société dunoise?: archéologie, histoire, sciences et arts, XXIV/300, 2010, p. 36-53.
-
[7]
Malgré la perte des registres capitulaires antérieurs à 1724, la date de réception de Maurice Dobet est connue grâce aux relevés effectués dans les années 1730 par l’abbé Brillon (ad Eure-et-Loir?: G338). Clerval n’indique rien de plus à ce sujet (J.-Alexandre Clerval, L’Ancienne Maîtrise de Notre-Dame de Chartres du ve?siècle à la Révolution, Paris, 1899, réimpression Minkoff, Genève, 1972, 366 pages, p. 303).
-
[8]
Nicole Goldine, «?Les heuriers-matiniers de la cathédrale de Chartres jusqu’au xvie?siècle. Organisation liturgique et musicale?», Revue de musicologie, 54/2, 1968, p. 161-175.
-
[9]
Benoît Garnot, «?Le logement populaire au xviiie?siècle?: l’exemple de Chartres?», rhmc, 36, 1989, p. 185-210.
-
[10]
J.-Alexandre Clerval, L’Ancienne Maîtrise…, op. cit. (n. 7), p. 300.
-
[11]
Ibid., p. 92.
-
[12]
Ibid., p. 93.
-
[13]
ad Eure-et-Loir?: G298, 29 avril 1724.
-
[14]
Ibid., 19 juillet 1724, 14 avril et 9 juillet 1725.
-
[15]
Ibid., 26 mai 1725.
-
[16]
ad Eure-et-Loir?: G338, relevés Brillon.
-
[17]
ad Eure-et-Loir?: G338.
-
[18]
En 1790, Dobet déclare cinquante-cinq ans de service, ce qui implique un recrutement vers 1736, mais éventuellement en un autre lieu. ad Eure-et-Loir?: L438/a2, district de Châteaudun, 26 août 1791.
-
[19]
Bernard Robreau (dir.), Histoire du Pays dunois, t. II, De l’an mil au déclin de l’Ancien Régime, Châteaudun, Société dunoise ahsa, 2009, p. 183-184.
-
[20]
Simon Robert et Évelyne Grunberg, Châteaudun, de l’incendie à la Belle Époque. Deux siècles d’urbanisme, 1723-1914, Châteaudun, Corlet, 2007, p. 60-75.
-
[21]
En 1789, le revenu annuel total de l’abbaye s’élève à environ 20?000 livres (an?: F19/602, 15 mai 1790).
-
[22]
bm Châteaudun?: ms 12, Alexandre Courgibet, Essai de l’histoire de la religion des Dunois, vol. 2, 1re partie, 587 pages, p. 45.
-
[23]
Le règlement de sa succession en 1771 fait apparaître un total de 25?000 livres en avoirs mobiliers et immobiliers (ad Eure-et-Loir?: 2E 1/40 et 1/41, mn. Cl. Pitou, Châteaudun, 1er-2 mars et 26 juillet 1771).
-
[24]
Louis et Claude Foucault sont petits-fils d’un «?officier de feue sar Mademoiselle?» et fils d’un avocat en parlement, dit en 1703 «?lieutenant de maire de cette ville?» [Châteaudun].
-
[25]
En 1785, Jacques Raux fait imprimer à Orléans des «?Discours et réflexions sur différens sujets de morale?» qui «?roulent sur le bonheur, la conversion de saint Paul, sur la douceur?», Année littéraire ou Suite des lettres sur quelques écrits…, 1786, p. 164-165.
-
[26]
ad Eure-et-Loir?: 2E 15/161, mn. N. Thiercelin, Châteaudun, 13 mai 1741.
-
[27]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/41, mn. Cl. Pitou, Châteaudun, 26 juillet 1771.
-
[28]
ad Eure-et-Loir?: G3386, inventaire de Saint-André, 4 octobre 1790.
-
[29]
Ibid., examen des déclarations du chapitre Saint-André par le district, 4 janvier 1791.
-
[30]
Description de la maison faite à partir de l’acte de vente de 1811 (ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811).
-
[31]
Seul le couvent des Cordeliers était nanti d’un orgue, mais aucune source ne permet d’affirmer que les religieux ont employé Maurice Dobet comme organiste.
-
[32]
Les Orgues d’Eure-et-Loir. Inventaire national des orgues, Région Centre, Chambéry, Comp’Act, 1996, p. 285.
-
[33]
Alexandre Courgibet, op. cit.(note 22), p. 42.
-
[34]
Ibid., p. 241.
-
[35]
Marcel Couturier, «?Le carnet de Jean Yvon, vigneron à Châteaudun?», bsa Eure-et-Loir, 25, 1990, p. 30.
-
[36]
ad Eure-et-Loir?: L438/a2, district de Châteaudun, 4 mai 1792. Il est possible que les deux compétences de Dobet aient fait l’objet d’engagements chronologiquement dissociés.
-
[37]
À Saint-Denis-lès-Ponts, 3 km à l’ouest de Châteaudun.
-
[38]
ad Eure-et-Loir?: H4239, comptes de l’abbaye de Saint-Avit, 1774-1785.
-
[39]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 novembre 1790.
-
[40]
ad Eure-et-Loir?: G312, 14 décembre 1751.
-
[41]
On ignore tout de celui qui a précédé Maurice Dobet à ce poste (avant 1764).
-
[42]
Sylvie Granger, «?Les musiciennes de 1790, aperçus sur l’invisibilité?», Revue de musicologie, t. 94/2, 2008, p. 289-308.
-
[43]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 janvier 1791.
-
[44]
Deux beaux exemples?: Érik Kosevar, «?Cécile-Louise Calvière et Marie-Geneviève Nicole Noblet?: deux femmes organistes aux destins semblables?», Histoire, humanisme et hymnologie. Mélanges offerts au professeur Édith Weber, pups, 1997, p. 131-140.
-
[45]
ad Eure-et-Loir?: L428, 13 janvier 1791.
-
[46]
ad Eure-et-Loir?: L427, 20 août 1792, fol. 135.
-
[47]
Mercure de France, septembre 1764, p. 105?: «?Viens dans ce boccage, Tendre & cher Amant, Sous ce beau feuillage, Rends-toi promptement, L’écho dans ces bois, Te porte la voix, D’une bergère qui t’adore, Mais son cœur te dit mieux encore, Viens &?». Une partition d’une page précède.
-
[48]
Des chapitres cathédraux limitrophes, celui de Blois, l’un des plus récents du royaume (1697), apparaît comme le moins bien doté (an?: G*8516/8532, Pouillé de 1760).
-
[49]
Jules Brosset, «?Le Grand’Orgue, les maîtres de chapelle et musiciens du chœur, les organistes de la cathédrale de Blois?» [1907], dans La Vie musicale dans les provinces françaises, réimpression Minkoff, Genève, 1972, p. 59.
-
[50]
ad Loir-et-Cher?: L1174-1179, pochette non classée, no 3?924.
-
[51]
En 1790, on y trouve, outre les quatre enfants de chœur, un maître de musique, un organiste, sept chapelains musiciens et chanteurs et trois chantres gagistes laïcs.
-
[52]
ad Loir-et-Cher, 3H 82, comptes de Bourgmoyen, 1770-1780.
-
[53]
Mercure de France, 1771, février, p. 195 (annonces reprises en 1772 dans le «?Tableau annuel des progrès de la physique, de l’histoire naturelle et des arts?», p. 428).
-
[54]
François Turellier, «?Christophe Moyreau (1700-1774)?: organiste, claveciniste et compositeur orléanais?», Bulletin de la société archéologique et historique de l’Orléanais, XIX/161, 2009, p. 5-40?; du même, «?Les Orgues et les organistes de la cathédrale Sainte-Croix d’Orléans?», L’Orgue, no 291/III, 2010, p. 3-33.
-
[55]
Paris, Ballard, 1753.
-
[56]
Isnard signe pour ses 30 livres d’entretien annuel des orgues de Bourgmoyen d’avril 1771 à juin 1772 (ad Loir-et-Cher?: 3 H 82). François Sabatier, «?Les dynasties de facteurs d’orgues en Provence de la fin du xviie?siècle à la fin du xviiie?siècle?», L’Orgue, no 247-248/III-IV, 1998, 224 p.
-
[57]
Annonces, Affiches et Avis divers de l’Orléanois, 17 août 1767.
-
[58]
Jules Brosset, «?Le Grand’Orgue…?», op. cit. (n. 49), p. 59-60. Brosset, repris plus tard par Norbert Dufourcq, a recopié l’erreur de transcription des mémoires de Cheverny édités en 1886.
-
[59]
Mémoires sur les règnes des rois Louis xv et Louis xvi et sur la Révolution, par M. Dufort, comte de Cheverny (1731-1802), publiés par Robert de Crèvecœur, Paris, Plon, 1886, 2 vol. t. 1, p. 442. Le statut de Jean-Maurice Dobet est supérieur à celui d’un simple domestique. Ch.-B. Duranton, Le Droit civil français, suivant l’ordre du code, 1838, Livre III, t. 8, «?Du contrat de louage?»?: Dobet se trouverait dans la première catégorie de domestiques (soumis à l’autorité du maître et en recevant des gages), dont les «?fonctions n’ont rien d’avilissant et même sont honorables… avec les bibliothécaires, les précepteurs, les secrétaires, les intendants de maison?». D’où sa signature au mariage Gauvilliers.
-
[60]
Dans ses mémoires, Dufort de Cheverny mentionne Dobet pour la première fois peu après le mariage du Dauphin en 1770 et avant le décès d’une amie en 1772. À le lire, on comprend que le musicien est déjà «?fixé?» près de lui. Il aurait donc émargé quelque temps à Cheverny tout en tenant l’orgue de Bourgmoyen.
-
[61]
Sur les Cheverny?: La Chesnaye des Bois, Dictionnaire de la noblesse…, vol. 5, 1772, p. 9?675.
-
[62]
Mémoires sur les règnes…, op. cit. (n. 59), t. 1, p. 384.
-
[63]
Ibid., p. 384.
-
[64]
Né le 20 avril 1765, dit le chevalier de Dufort. Mémoires sur les règnes…, op. cit. (n. 59), t. 1, p. 442.
-
[65]
Ibid., p. 442. Dans un grand registre écrit de sa plume, Dufort dresse la liste de son répertoire, recense ses 96 marionnettes et 46 figures.
-
[66]
Ibid., t. 1, p. 334, 353 et 384.
-
[67]
Ibid., p. 359 et 439.
-
[68]
Ibid., t. II, p. 147. Le tome II débute en 1787.
-
[69]
ad Loir-et-Cher?: L10611, recensement des habitants d’Herbault, brumaire III (oct-nov 1794).
-
[70]
Terme désignant les gouverneurs des enfants de bonne maison (Dictionnaire de Trévoux, 1762, vol. 2, p. 381). ad Eure-et-Loir 3Q9 ACP/103, Contrôle des actes, 23 frimaire et 8 nivôse IV, p. 105vo et 111vo.
-
[71]
ad Loir-et-Cher?: L1132, offrandes civiques des citoyens d’Herbault, 10-12 floréal II.
-
[72]
Dans Histoire de ma vie, Sand évoque ce «?charmant poète inédit, sensible et gai vieillard qui avait toujours des roses dans l’esprit et jamais d’épines dans le cœur?». Il s’agit de Charles Devezeau.
-
[73]
Joseph Guyot, Chronique d’une ancienne ville royale, Dourdan, capitale du Hurepoix, Paris, Aubry, 1869.
-
[74]
bms, Saint-Germain de Dourdan, 5 janvier 1765.
-
[75]
Arch. diocèse Évry?: K 07-51, boîte 51, délibération de la fabrique paroissiale Saint-Germain de Dourdan, 6 janvier 1765.
-
[76]
Joseph Guyot, Chronique…, op. cit. (n. 73), p. 204?: dont un maître des enfants de chœur et un chantre.
-
[77]
Arch. diocèse Évry, K07-51, boîte 51. Exemple?: «?Je reconnais avoir reçu de mr Lequeux marguillier comptable de la paroisse st germain de Dourdan la somme de cent vingt cinq livres pour le quart echu le 1er janvier 1781, à Dourdan, le 3 janvier 1781, Dobet?».
-
[78]
Musée Dourdan?: Fonds Joseph Guyot, boîte fg 33, ba 56.
-
[79]
ad Essonne?: G1125, pièces justificatives des comptes, no 124-129. Jean-Marc Baffert, «?L’orgue d’Adrien Bunel à Saint-Germain de Dourdan?», Connaissance de l’orgue, 1996, no 98, p. 47-56, et no 99, p. 62-70.
-
[80]
ad Yvelines?: 1L 47. Musée Dourdan?: Fonds Joseph Guyot, boîtes fg 53 et 57.
-
[81]
ad Eure-et-Loir?: L 438, 29 novembre 1792.
-
[82]
ad Eure-et-Loir?: 1Q P-V62, 31 janvier 1791.
-
[83]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811.
-
[84]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 2, fol. 3, 26 avril 1793.
-
[85]
ad Eure-et-Loir?: 1Q 2482, 14 germinal III (3 avril 1795).
-
[86]
Alfred Rabouin, Châteaudun pendant la Révolution, Châteaudun, 1904, p. 365, 381, 385-386.
-
[87]
an?: W459, no 182, «?Affaire Raux et fille Marchand?». Simon Robert et Évelyne Grunberg, Châteaudun…, op. cit., (note 20), p. 88.
-
[88]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 6, fol. 54, 3 vendémiaire VII (24 septembre 1798).
-
[89]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 5, 6 et 7, 22 septembre 1796 à 25 mars 1800.
-
[90]
ad Eure-et-Loir?: 3M P 35, tableau des fonctionnaires de l’arrondissement de Châteaudun, 25 mai 1804. En cette qualité, il fait partie de la commission chargée de dresser la liste des citoyens en état de voter (am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 8, 2 et 9 avril 1801).
-
[91]
ad Eure-et-Loir?: 3M 4, liste des noms sortis des boîtes aux scrutins pour l’arrondissement de Châteaudun, 6 août 1801.
-
[92]
am Châteaudun?: délibérations municipales, reg. 7, fol. 78, 30 nivôse VIII (20 janvier 1800).
-
[93]
Le 14 brumaire 12 (6 novembre 1803) Huet réclame à la fabrique 118 livres «?qui lui restent dûs par la dite fabrique pour réparation de l’orgue?».
-
[94]
Arch. diocèse Chartres?: fabrique La Madeleine de Châteaudun, reg. 1, 30 frimaire 12 (22 décembre 1803).
-
[95]
Ibid., 1er ventôse 12 (21 février 1804).
-
[96]
Arch. diocèse Chartres?: reg. 2, 6 mars 1815.
-
[97]
ad Eure-et-Loir?: 2E 15/375, mn. Ch. Raimbault, Châteaudun, 18 décembre 1811. Ces terres sont pour l’essentiel celles achetées en l’an 7 (voir n. 1), et pour une petite part un héritage venu de la famille Raux.
-
[98]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/142, mn. L. Davézé, Châteaudun, 26 décembre 1811.
-
[99]
ad Eure-et-Loir?: 2E 1/184, mn. J.-N. Biard, Châteaudun, 17 et 18 avril 1829, inventaire après décès de «?demoiselle Marie-Louise Dobet célibataire majeure?».
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[100]
Les effets inventoriés valent au total 1?592 francs.