Notes
-
[1]
D’après une communication présentée au XLIIe congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011)?: Expertise et conseil au Moyen Âge.
-
[2]
La maladie est signalée pour la première fois au iie?siècle, puis elle s’installe de manière endémique en Francie occidentale du ve au viiie?siècle. Il faut ensuite attendre les xie et xiie?siècles pour voir réapparaître le mal. Jean-Noël Biraben, «?L’hygiène, la maladie, la mort?», dans Histoire de la population française. t. I, Des origines à la Renaissance, Jacques Dupâquier (dir.), Paris, puf, 1991, p. 453.
-
[3]
Françoise Bériac, «?Lépreux ou léproseries. Repérage critique et origine des maladreries en Aquitaine?», Santé, médecine et assistance au Moyen Âge. 110e congrès national des sociétés savantes, Montpellier 1985, Paris, Éd. du cths, 1987, p. 365-380. Id., «?Une minorité marginale du Sud-Ouest?: les Cagots?», Histoire, Économie et Société, 1987, vol. 6, no 1, p. 17-34. Id., Histoire des lépreux au Moyen Âge. Une société d’exclus, Paris, Imago, 1988. Id., Des lépreux aux cagots. Recherches sur les sociétés marginales en Aquitaine médiévale, Bordeaux, Fédération historique du Sud-Ouest, 1990.
-
[4]
Voir notamment François-Olivier Touati, Archives de la lèpre. Atlas des léproseries entre Loire et Marne au Moyen Âge, Paris, Éd. du cths, 1996. Id., Maladie et société au Moyen Âge. La lèpre, les lépreux et les léproseries dans la province ecclésiastique de Sens au milieu du xive?siècle, Bruxelles, De Boeck Université, 1998. Id. (dir.), Archéologie et architecture hospitalières, de l’Antiquité tardive à l’aube des Temps modernes, Paris, La Boutique de l’Histoire, 2004.
-
[5]
Bruno Tabuteau, Une léproserie normande au Moyen Âge?: le prieuré Saint-Nicolas d’Évreux du xiie au xvie?siècle, Rouen, thèse nouveau régime, 1996. Id. (dir.), Lépreux et sociabilité du Moyen Âge aux temps modernes, Paris, Publications de l’université de Rouen, Cahier du grhis, no 11, 2000. Id. (dir.), Étude des lépreux et des léproseries au Moyen Âge dans le Nord de la France. Histoire-Archéologie- Patrimoine, actes de la journée d’étude d’Aizier (avril 2005), Amiens, Publication du cahmer, vol. 20, 2007. Pascal Montaubin (dir.), Hôpitaux et maladreries au Moyen Âge. Espace et environnement, actes du colloque d’Amiens-Beauvais (2002), Amiens, Publication du cahmer, vol. 17, 2004.
-
[6]
Elma Brenner, Charity in Rouen in the Twelfth and Thirteenth Centuries (with Special Reference to Mont-aux-Malades), thèse de l’université de Cambridge, Emmanuel College, 2008. Damien Jeanne, Garder ou perdre la face?? La maladie et le sacré. Étude d’anthropologie historique sur la lèpre (Normandie centrale, occidentale et méridionale) du xie au xvie?siècle, thèse dactylographiée, Université Paris-Ouest-Nanterre La Défense, 2010.
-
[7]
Il est ainsi question des léproseries de Riom (1120-1121), Souvigny (ca 1137-1140), Brioude (1161), Cusset (ca 1170), Lavoûte-Chilhac (ca 1190-1195), Pessat (1192) et Montferrand (1195). Johan Picot, Atlas historique et archéologique des léproseries des anciens diocèses de Clermont et de Saint-Flour (xiie-xviie?siècles), dfs de prospection thématique annuelle, 2 vol., 2009, 461 p., archives du sra d’Auvergne.
-
[8]
Le sujet a été abordé une première fois dans le cadre d’un diplôme d’études supérieures d’histoire médiévale soutenu en 1959 et partiellement publié en 1962?: Albert Ilpide, La Lèpre en Auvergne. La léproserie d’Herbet, des de l’université de Clermont, 1959, 131 p. et Id., «?La lèpre en Auvergne au Moyen Âge et la léproserie d’Herbet à Montferrand?», Revue d’Auvergne, t. LXXVI, Clermont-Ferrand, 1962, p. 94-130.
-
[9]
Le nom de la cour varie dans le temps et en fonction de la langue employée (français, occitan et latin). Il est ainsi question de «?L’Espurge?» (1371), «?L’Espurgha?» (1383), «?La Espurga?» (1385), «?Espurge?» (1453), «?L’Expurge?» (1457), «?La Purge?» (1485), «?La Purgacion?» (1493), Judicium Purgie lepre (1540)… Toutefois, c’est bien le nom de «?Purge?» qui est le plus fréquent. Voir notamment ad Puy-de-Dôme, fonds de Montferrand (coté?: 3 E 113 dep II), bb 2, fol. 13-14?; cc 165, fol. 98v?; cc 170, fol. 126 et 164v?; cc 360, fol. 11?; ff 63, pièces 4 et 15 et ff 70, pièce 11. L’occitan «?espurgar?» désigne «?purger?» ou «?purifier?», ce qui traduit bien la vocation du tribunal de Montferrand?: Émil Lévy, Petit dictionnaire provençal-français, Heidelberg, Universitätsverlag, 1909, réédition, Nïmes, C. Lacour, 2005, p. 173.
-
[10]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 75, pièce 11 (1455).
-
[11]
Emmanuel Teilhard de Chardin, «?La première charte de coutumes de Montferrand?», Annales du Midi, t. III, 1891, p. 283-309. Pierre Charbonnier, «?La charte de Montferrand (traduction et explication)?», Montferrand 1196-1996. Conférences données pour le VIIIe centenaire de la charte de franchises. (Maison de l’éléphant, 1995-1996), Josiane Teyssot (dir.), Clermont-Ferrand, association Il était une fois Montferrand, 1996, p. 5-23.
-
[12]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 5, article no 157.
-
[13]
«?Item ung vidimus en parchemin fait soubz le seel es contractz a Montferrand le tiers jours de mars mil IIIC LXVIII d’une l’autre letre dedans inserée de l’an mil iiiC et cinq pour monstrer de l’antiquité du droit desdits consulz qu’ilz ont touchant la visitacion et Purge des entachez de lepre.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, FF 77, pièce 14.
-
[14]
Sur les lettres de 1292 voir an, J 270 A, no 4 et 5?; J 273, Auvergne II, no 9 (copie), J 832, no 24 (copie) et J 1145, no 4 (copie). Le roi avait déjà pu apprécier la ville lors d’un rapide séjour en novembre 1285. Ambroise Tardieu, Histoire de la ville de Montferrand et du bourg de Chamalières en Auvergne, Moulins, 1875?; réédition Marseille, Laffitte-Reprints, 1979, p. 21.
-
[15]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 6 et an, J 421, no 1. Josiane Teyssot, «?Le marc d’or de Montferrand?», Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne, t. C, no 740, Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, 1999, p. 66.
-
[16]
an, J 303, no 1?: Ludovicus Dei gratia Francorum rex universis baillivis suis ad quod presentes littere pervenerint, salutem. Mandantes vobis precipimus quatinus dilectos et fideles burgenses nostros de Montefferando permittatis salvo ire et redire per totam terram nostram, libere et quiete, cum suis marcandesiis reddendo suas rectas consuetudines, neque sustineatis eos vel res suas occasionari vel arrestari seu etiam inpediri pro aliquibus debitis, nisi exinde sint plegii vel debitores. Actum apus Vicenas, anno domini Mo CCo XXV?o mense marcio.
-
[17]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 8, pièce 1.
-
[18]
André Bossuat, Le bailliage royal de Montferrand (1425-1556), Paris, 1957?; réédition Clermont-Ferrand, Publications de la faculté des lettres et sciences humaines de Clermont-Ferrand, 1986. Éric Braure, Le bailliage royal de Montferrand d’après ses registres d’assises, de 1425 à 1456, Mémoire de IIe cycle, Université Jean-Moulin Lyon-III, 1998-1999.
-
[19]
C’est en 1361 que Jean le Bon a établi un bailliage qui porte le titre «?de Saint-Pierre-le-Moûtier et des exemptions de Berri et d’Auvergne?». Toutefois, cette ville étant trop éloignée de l’Auvergne, Charles V établit une lieutenance du bailliage à Cusset pour la juridiction des exempts d’Auvergne. André Bossuat, Le bailliage royal…, op. cit., p. 60 et 66. Pierre Durye, Le Bailliage de Saint-Pierre-le-Moûtier de sa création au milieu du xvie?siècle, thèse de l’École des chartes, 1943, t. I, p. 10-12 et 20-21.
-
[20]
Les diverses sessions des Grands Jours d’Auvergne tenus à Montferrand n’ont laissé que très peu d’archives. Il ne reste aujourd’hui qu’un seul registre, celui de 1481 (an, X1A 9213, septembre-octobre 1481). Les autres sessions auvergnates ne sont connues que par des mentions fortuites dans la masse documentaire?: ac Riom, cc 1 (1455)?; am Lyon, bb 5, fol. 242v (1454) et bb 7, fol. 53v (1456). René Fédou, Les hommes de lois lyonnais à la fin du Moyen Âge. Étude sur les origines de la classe de robe, Paris, Société d’édition «?Les Belles Lettres?», 1964, p. 107.
-
[21]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 58-77.
-
[22]
am Lyon, bb 5, fol. 242v et Marie Thouvenot, Les Délibérations consulaires de la ville de Lyon en 1455 (2 janvier-24 juillet. BB 5, fol. 245v-271v)?: transcription critique et synthèse, mémoire de Master 1, Université Jean-Moulin Lyon-III, 2010, p. 131-132.
-
[23]
Étude réalisée d’après 150 procès recensés entre le début du xive siècle et 1550.
-
[24]
En 1317, Jean XXII crée le diocèse de Saint-Flour, démembré de celui de Clermont, qui regroupe les archiprêtrés de Saint-Flour, Aurillac, Langeac, Brioude et Blesle?: Abel Poitrineau (dir.), Le diocèse de Clermont, Paris, Éd. Beauschesne, 1979 et Daniel Martin (dir.), L’identité de l’Auvergne (Auvergne, Bourbonnais, Velay), mythe ou réalité historique de l’Auvergne des origines à nos jours, Nonette, Créer, 2002, p. 423.
-
[25]
Branceilles et Curemonte (1447), Banassac (1493), Rougnat (1494) et La Mothe-Canilhac (1525). ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, FF 63, pièces 3, 27, 31?; ff 65, pièce 51 et ff 66, pièce 12.
-
[26]
ad Lot, 5 edp 055, cc 6, fol. 1-2 et 4v.
-
[27]
Hippolyte Dulac, «?Registre audiencier dans la justice de Couzan?», Bulletin de la Diana, t. IV, 1887-1888, p. 36.
-
[28]
Johan Picot, «?Juger les lépreux de haute Auvergne au Moyen Âge?», Revue de la haute Auvergne, t. LXXI?: «?Ladres, paouvres et folz?», juillet-septembre 2009, p. 277-292.
-
[29]
Plus de 245 pièces directement issues de la Purge recoupant 149 procédures (pour 168 sus-pects différents) dirigées entre le début du xive siècle et 1550 sont conservées (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63-66 et 70). À ces sources directes, il faut encore ajouter les très nombreux renseignements apportés par les registres de comptes et de délibérations municipaux de Montferrand (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, séries bb et cc). Enfin, il existe également un fonds considérable d’archives émises par la Purge entre 1569 et 1631 (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 58-62, 67-69, 71-74 et 76).
-
[30]
À titre d’exemple, voir les témoignages suivants?: «?Pierre Bougiere […] dit par son serement savoir cognoistre ladite Catherine Blenche […] pour ce que sont d’une mesme parroisse laquelle a oy tenir reputer puis troys ans oy estre souspecte de la maladie de lepre et tel est le commun bruyt en ladite parroisse pour ce qu’elle a le visaige plombeux, moche et rouge?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 60 (1496). «?Glaude Rousson […] dict et rappourte […] cognoistre ledit Jehan du Py […] lequel est suspectioné de la maladie de lepre et est le bruict, famée, commune voix a ladite parroisse et es lieulx circumvoisins?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 64, pièce 40 (1523).
-
[31]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 23 (1493).
-
[32]
Ces témoins répondent à un questionnaire «?formaté?», constitué des interrogations suivantes?: Connaissez-vous le suspect et sa famille?? Y a-t-il eu dans son lignage des personnes lépreuses?? Accepteriez-vous de manger, boire et dormir avec le suspect?? Accepteriez-vous d’allier vos deux familles par le mariage de l’un de vos enfants avec l’un des siens?? Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 3 (1447), 22 (1494), 23 (1493), 30 (1496), 43 (1510) et ff 64, pièces 3 (1516), 12 (1520), 14, 18, 23 et 28 (1521).
-
[33]
La Purge incarcère les suspects de lèpre dans une des tours du château ou de la muraille portant le nom de «?Tour des Ladres?».
-
[34]
Messire Léonard Mazuer, prêtre et curé d’Herment, est ainsi condamné à 500 l.t. d’amende en mai 1494 pour s’être une nouvelle fois «?absenté de ladite ville de Montferrand ou il s’estoit soubzmis tenir son arrest?». Pierre Mathieu, paroissien d’Égliseneuve-près-Billom, est condamné à 50 l.t. d’amende en mai 1496, puis à 100 l.t. dès le mois de juillet suivant, faute de comparution devant la Purge. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 24 (1494) et 32-37 (1496). Sur la famille «?Mazuer?», voir Josiane Teyssot, «?Hommes de loi et notaires au xve?siècle en basse Auvergne. Autour de Jean Mazuer, précurseur de la Coutume d’Auvergne?», La Coutume d’Auvergne. Formation et expression d’un patrimoine juridique, Florent Garnier (dir.), Revue d’Auvergne, 125, no 559 (2011), p. 19-40.
-
[35]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 64, pièce 24 (1521).
-
[36]
Le témoignage des proches est également un élément important dans la preuve de la folie dans les procédures judiciaires de la fin du Moyen Âge et compte même plus que l’expertise médicale. Maud Ternon, «?La folie entre sens commun et définition experte. La difficile émergence de l’expertise médicale parmi les preuves de la folie au xive?siècle?», Hypothèses 2010. Travaux de l’École doctorale d’histoire, Paris, Publications de la Sorbonne, 2010, p. 129.
-
[37]
Les documents de la pratique bolonais (xiiie et xive?siècles) prouvent aussi les limites de l’expertise médicale en justice puisque «?certains médecins n’hésitent pas à réserver leur jugement ou simplement à rappeler qu’il vaut pour le moment présent?». Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice (Bologne, xiiie-xive?siècles)?», Expertise et conseil au Moyen Âge, actes du XLIIe congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011), à paraître.
-
[38]
En 1490, Anthoine Adreit, habitant de Chandèze, paroisse de Besse, reconnu lépreux par la Purge paye des frais de procédure s’élevant à 6 l.t. et 15 s. Hugues Olaiguol, habitant de Treignac, paroisse Saint-Cirgues près de Lavoûte-Chilhac, accusé de lèpre en 1521, paye quant à lui 24 l.t. 12 s. et 8 d. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 19 et ff 64, pièce 22.
-
[39]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 24?; sentence de la Purge condamnant Lyonard Masuer, prêtre et curé d’Herment (2 mai 1494).
-
[40]
Il est ainsi question de «?Jehan Roux [qui] estoit si malade qu’il ne pourroit venir a pie ni a cheval sans grand dangiers de sa personne?» ou encore d’un nommé «?Jehan Maistre le Vieulx, habitant en ladite parroisse de Flat [qui] ne peult aller de sa maison jusques a l’eglise de parroisse si n’est qu’il se fasse porter sur une beste?». De même, Marie Valhorgue affirme «?qu’elle ny scauroit aller [= à la Purge] actendu sa malladie et lesdits luminiers luy ont dit et respondu […] que aussi bien pourroit aller audit Montferrand comme elle avoit esté au Puy et ladite Vallorgue leur a respondu que quant elle y alla elle estoit bien mallade et est encores de present plus mallade a cause des effortz qu’elle a faict a y aller et neantmoins qu’estoient deux hommes a la tenir et encores elle tumba du cheval troys ou quatre foys?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 42 (8 août 1500)?; ff 64, pièce 45 (6 février 1523 n. st.) et ff 70, pièce 4, fol. 4v (15 mars 1540 n. st.).
-
[41]
Plusieurs textes des xive et xve?siècles précisent que l’examen médical se déroule à Herbet. Il est ainsi question d’«?ung mandement donné par Jehan filz de roy de France donné a Clermont le XIe jour de janvier mil IIIC LXXIIII par lequel est mandé contraindre ceulx qui sont entachés de ladite maledie venir a le d’Erbers estre purgés et visités?». De même, le procès-verbal de la visite médicale effectuée par Antoine Laurent, maître ès arts et licencié en médecine, sur la personne de Marguerite, habitante de Contigny (Allier) se termine ainsi?: datum in loco de Herbes, XI de mense junii anno Domini Mo CCCCo XVII. En 1483, c’est encore dans la léproserie d’Herbet que les juges de la Purge rendent leur sentence contre Doynet, habitant de Maringues suspect de lèpre?: «?Donné a Herbiers soubz le seel de ladite Purge le lundi dernier jour de juing l’an mil IIIIC IIIIXX et troys?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 2 et 8 et II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 4.
-
[42]
La construction de l’auditoire débute en septembre 1497 et prend fin en 1511. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 372, pièce 1, fol. 16v, 18v, 19v, 20v, 22 et cc 373, pièce 1.
-
[43]
Le Conseil d’État affirme cependant en décembre 1614 que Montferrand possède «?une jurisdiction pour la purgacion des malades de lepre pour lesquelles jurisdicions il y a un pallais basty par les consulz, bourgeois et habitans en un recoing esloigné des principalles rues fort mal sain a cause des tanneries, imnondices et eaues croupissantes qui les voisines […]?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, dd 6, pièce 13.
-
[44]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 373, pièce 1?: «?Robin Desve, masson, a afermé par serment avoir mesuré les murailhes de la chambre et audictoire que on a fait pour l’essercité de la Purge et rapporte par sondit serment qu’il a trente neuf brasses de murailhes en la presence de Anthoine du Chatellar et Reymone Pigay, le VIIIe jour de janvier mil IIIIc IIIIxx dix et sept?»?; cc 386, pièce 1?: «?Anthoine de Moncodas de leur bon gré confesse avoir eu et receu par les mains que dessus la somme de cinq solz tournois a cause de la vante d’une table pour l’audictoire de la Purge […] le VIIIe jour de mars l’an mil Vc et neuf.?»
-
[45]
La population semble recourir aux mêmes sens comme le prouvent les dépositions suivantes?: Petrus Leymaria affirme en 1447 que Thomas de Grezas a des signes de la lèpre comme nasum quasi vastatum et vocem raucam. Glaudre Gigot déclare en 1496 que «?Feraud est rouge parmy le visage et […] a la vouex quassé et rauche comme s’il estoit pris de l’estomant (sic) et morfondu?». En 1510, Guillaume Challe dépose «?que il cognoit bien Gerauld Bonvallet lequel est suspectioné d’estre actaing du mal de lepre […] par ce qu’il est coullecteur des deniers royaulx en ladite ville de Billom et que plusieurs hommes et femes de ladite ville fault qu’il approche de son alenne pour conter l’argent con luy bailhe en poiement a cause de la tailhe et que ilz veullent voir mestre leur poiement sur ledit pappier et a cause de se faeult qu’ilz aprochent de la alene dudit Bonvallet?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 3, fol. 6v (1447), pièce 30 (1496) et pièce 43 (1510).
-
[46]
Brun sombre, noir.
-
[47]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18?; la sentence sert de couverture au registre de délibérations de 1569.
-
[48]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 31 et ff 77, pièce 20.
-
[49]
Cette pratique est attestée en Auvergne dès 1525. L’examen n’a cependant pas été encadré par un médecin de la Purge?: «?Me Glaude, cirurgien de Saint Bonnet, saigna ledit Levrauld et apres qu’il eust eu de son sang il le passa a ung drapt et se trouve audit drapt les signes de ladite maladie de lepre ainsi que ledit depposant vit.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 66, pièce 29. Il semble cependant que la Purge agisse de la même manière comme le suggèrent les achats de la cour en 1510?: «?Item, pour les […] euspices, seel, linge et autres chouses necesseres a fere ladite visitacion, XV sous?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 52.
-
[50]
Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18, couverture du registre et ff 63, pièces 16 et 31?: «?son sang gros et noir, pesant et adusté?» (1488)?; «?c’est une superfluité de san deu a de apostumes froides?» (1491)?; «?le sant gros et afutz et corrumpu a coleur de plom?» (1493)?; «?l’espesse de quoy il est actaint est Alopicia qui est de sangt corrumpu et hafust?» (1493).
-
[51]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 20.
-
[52]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 16 (1491).
-
[53]
Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 31 (1493)?: «?Et empres la requeste faicte par ledit procureur ledit Urban et Anne Mounneau ont volu prandre jugement par monsire mestre Anne Daniel, docteur en medecine et Gilbert Belon, Guillaume Bartalaix et Huguet Pollart, lesqueulx ont fait serement sur les Sainctes Esvangilles bien et lealment les purger et en dire leur advis ainsi qu’il sansuit?: Veu le cas par nous de Hurban Tixier enpres visitacion fecte par hault et bas ainsi qu’il est acoustumé fere en tel cas, disons tous emsenble et concordablement que ledit Tixier n’a aucun signe en luy par quoy doye estre separé d’antre les saimctz.?»?; ff 63, pièce 31 (1493)?: «?Veu le cas de Roubert Bertrand, dit Martinet, et enpres serement par nous fait […] disons que ledit Roubert Bertrand est actaint et infect de la maladie de lepre et l’espesse de quoy il est actaint est Alopicia qui est de sangt corrompu et hafust et pour ce disons tous concordablement que ledit Bertrand doit estre separé des autrez gens sains.?»
-
[54]
La consignation des conclusions de l’expertise peut causer débat quand les experts sont multiples. Voir Franck Collard, «?Secundum artem et peritiam medicine. Les expertises dans les affaires d’empoisonnement à la fin du Moyen Âge?», Expertise et conseil au Moyen Âge, actes du XLII?e congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011), à paraître. Voir également Chiara Crisciani, «?Éthique des consilia et de la consultation?: à propos de la cohésion morale de la profession médicale (xiiie-xive?siècles)?», Médiévales, no 46, Paris, puv, 2004, p. 23-44.
-
[55]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 18 (1491)?: «?Veu ledit rapport … avons dit et disons ladite Margarite non estre entaicher (sic) de ladite maladie de lepre et luy avons permys et permectons d’aler venir et converser avec les autres gens sains non entaichés de ladite maladie?» et ff 63, pièce 41 (1499)?: «?Veu le rapport des medecins et cirurgiens cy ampres nommez avons dit et declairé, disons et declairons, ledit maistre Anthoine Rochefort notaire estre entaché de ladite maledie de lepre par quoy en ensuivant l’avons condemné et declairé estre tel et ensuivant luy avons interdit la communication des sainctz mesmement les lieux comme l’esglise, fontaines, fours, molins, rivieres, place et autres lieux subiectz a ladite maledie et que sera contrainct aller demeurer es malederies avecques les entachés d’icelles.?»
-
[56]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 53.
-
[57]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 2, fol. 13v-14.
-
[58]
Il faut dire que les revenus de la Purge sont «?la moytié a appliqué au roy notresire et l’autre en euvres pitieuses et reparacion de la maison d’Erbers?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 24 (1494).
-
[59]
D’après l’étude d’au moins 45 experts différents officiant pour la Purge entre le début du xive siècle et 1542. Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63-ff 77.
-
[60]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 165, fol. 98v (1371) et ff 63, pièces 1-2 (1417). Le registre coté cc 165 dans Emmanuel Teilhard de Chardin, Inventaire des archives communales antérieures à 1790?: ville de Clermont-Ferrand?: fonds de Montferrand, t. I, Clermont-Ferrand, 1902, p. 189, déclaré perdu il y a plusieurs décennies, a été retrouvé par nos soins le 23 février 2011 (il était alors coté cc 544). Cet important registre, rédigé en occitan et couvrant la période 1355-1378, est en cour d’étude et sera publié en collaboration avec R. Anthony Lodge, professeur émérite à l’université de Saint-Andrews en Écosse, par l’École nationale des chartes.
-
[61]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 5.
-
[62]
R. Anthony Lodge, Le plus ancien registre de comptes des consuls de Montferrand en provençal auvergnat, 1259-1272, Clermont-Ferrand, Mémoires de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, no XLIX, 1985, p. 29.
-
[63]
Ibid., p. 31 (barber, 1273). ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 52?: «?Robert lo barbeir?» (sans date, début du xive?siècle), cc 174, pièce 8, fol. 3v?: «?Besoner lo barbeirs?» (sans date, début du xive?siècle), cc 165, fol. 28v et 30?: «?maystre P. lo barbeyr?» (1360), cc 171, fol. 9v?: «?Malahaura le barbier?» (1385) et cc 173, fol. 3v?: «?Pierre Guito lo barber?» (1400). Il est également fait mention d’un «?Rotgeir lo Barbeirs?», consul de Montferrand en 1288. Toutefois, rien n’indique que le patronyme soit révélateur d’une pratique médicale. R. Anthony Lodge, Les comptes des consuls de Montferrand (1273-1319), Paris, École des chartes, 2006, p. 39 et 68. Enfin, l’existence d’une «?soignante?» vivant au quartier de La Saunerie à Montferrand en août 1378 est attestée dans les arrérages de la taille?: aquela que ve las malaudias, IIII s. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 170, fol. 25.
-
[64]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 2, fol. 8. Nomination par les consuls de Montferrand de maître Philippe de Boulogne comme médecin de la maladrerie d’Herbet et de la Purge (27 décembre 1461).
-
[65]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 3v.
-
[66]
Il convient de préciser qu’à la fin du Moyen Âge la cité épiscopale possède au moins cinq hôpitaux et trois léproseries quand Montferrand ne compte qu’un établissement de chaque type. Voir Jean-Luc Fray, Grégory Goudot, Johan Picot et Annie Regond, «?Des origines hospitalières à la fondation de l’Hôtel-Dieu (1773)?», dans L’Hôtel-Dieu de Clermont. Histoire d’un établissement hospitalier, Bernard Dompnier (dir.), Clermont-Ferrand (à paraître) et Johan Picot, Atlas historique et archéologique…, op. cit. (n. 7), t. II, p. 171-253.
-
[67]
ad Puy-de-Dôme, 4 F 62, 28 J 64, 3 G, armoire 5, sac D, cote 13 et 3 G0?101, cote 7. Danielle Jacquart, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen Âge. Supplément, Genève, Droz, 1979 et Emmanuel Grélois, «?Du vir honestissimus au discretus vir?: critères et dynamiques de la différenciation sociale à Clermont et en Basse-Auvergne du xie au xive?siècle?», Distinction et supériorité sociale (Moyen Âge et époque moderne), actes du colloque de Cerisy-la-Salle des 27-30 septembre 2007, Laurence Jean-Marie et Christophe Maneuvrier (dir.), Publications du crahm, Caen, 2010, p. 215.
-
[68]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 4 (1453) et 5 (1443).
-
[69]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, II 1, pièce 2, fol. 23v?: «?Plus ung autre vidimus faict soubz ledict seel de certaines letres de Pierre Adam escuyer, commandeur de la maison et enfermerie d’Erbers par lesquelles oy le rapport des expertz il declera ung nommé Roubert Nonnes de Sainct Yvoine apres qu’il fust visité en la presance dudict visiteur par expertz et oy leur rapport icelluy Roubert n’estre ancunement actainct de ladicte malladie de leppre dacté de l’an mil troys cens soixante huict.?» Or, Pierre Adam est maître d’Herbet et de la Purge entre 1322/28 et 1346. La Purge d’Aurillac en haute Auvergne s’adjoint, quant à elle, le conseil d’experts dès 1298?: Quod si aliquis de villa Aureliaci dicatur suspectus de lepra, quod antequam de hiis sollempnis fiat inquisitio seu informatio ne contra sanum aliqua fiant quæ ad infamiam ejus cedant?; judex domini abbatis, vocatis consulibus aut duobus ex ipsis et aliis bonis viris qui de talibus habeant experientiam vel habere dicantur, se informet secrete cum eis an de lepra sit et presumatur suspectus… Johan Picot, «?Juger les lépreux de haute Auvergne…?», op. cit. (n. 28), p. 288.
-
[70]
Franck Collard, «?Secundum artem et peritiam medicine…?», op. cit. (n. 54). Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice…?», op. cit. (n. 37). C’est aussi l’Italie qui fournit les premières expertises médicales de la lèpre au xiiie?siècle (Sienne, 1250 – Castiglione del Lago, 1261 – Pistoia, 1288). Luke Demaitre, Leprosy in Premodern Medicine. A Malady of the Whole Body, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 2007, p. 37.
-
[71]
Joseph Shatzmiller, Médecine et justice en Provence médiévale?: documents de Manosque, 1262-1348, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 1989.
-
[72]
Danielle Jacquart, Le Milieu médical en France du xiie au xve?siècle, Genève, Droz, 1981, p. 189.
-
[73]
Olivia Faucher, Les Médecins experts à la fin du Moyen Âge entre pratiques médicales et pratiques judiciaires, Sarrebruck, Éditions universitaires européennes, 2010.
-
[74]
Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice…?», op. cit. (n. 37). Pour le royaume de France se reporter à l’exemple de la ville de Dijon où, au xve?siècle, les médecins entretiennent des relations particulières avec les autorités judiciaires et aident «?à l’élaboration de la sentence?». Nicole Gonthier, «?Les médecins et la justice au xve?siècle à travers l’exemple dijonnais?», Le Moyen Âge, t. CI, no 2, 1995, p. 277-295.
-
[75]
Sur le consulat de Montferrand et ses attributions voir Josiane Teyssot, Le Réseau urbain auvergnat à la fin du Moyen Âge. L’exemple de Montferrand, hdr en cours.
-
[76]
Yves Mausen, «?Ex scientia et arte sua testificatur. À propos de la spécificité du statut de l’expert dans la procédure judiciaire médiévale?», Rechtsgeschichte. Zeitschrist des Max-Planck-Instituts für europäische Rechtsgeschichte, no 10, 2007, p. 127.
-
[77]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 165, fol. 98v et ff 63, pièces 1, 2 (infra annexe 2), 4 et 5.
-
[78]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 41 (1499)?: «?Nous Pierre de Lovent, licencié en medecine a Paris, Guillaume Barthelay, Gilbert Bellon et Jehan Bohet, barbiers et ciurgiens, habitants de la ville de Montferrand, veu et visité maistre Anthoine Rochefort, notaire habitant de la ville d’Erment, pour les parties de son corps sellon l’art de medecine et cirurgie par lesquelles parties de son corps veuez et visitées disons tous d’un commun acord et consentement que ledit maistre Anthoine de Rochefort estre entaché de la maledie de lepre d’une espesse nommée Leonina a cause de quoy disons qu’il doit estre de separé de la communication des saimctz et estre mis entre les autres entachés de ladite maledie. En tesmoing de ce avons signé ces presentes de nozs seings manuelz cy mis.?»
-
[79]
André Brun (Andreas Bruni) s’établit à Montferrand dès 1509. Il est maître ès arts et docteur en médecine. Il s’est inscrit à la faculté de Montpellier le 3 octobre 1505 et a suivi les cours de Pierre Trémolet, docteur et professeur. Il exerce pour le compte de la Purge entre 1515 et 1523, date à laquelle il est officiellement «?armé medecin de la ville?» de Montferrand par les consuls (Délibération du 20 septembre 1523). Marcel Gouron, Matricule de l’université de médecine de Montpellier (1503-1599), Genève, Droz, 1957, p. 7 et 225 et ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 7, pièce 12.
-
[80]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 26 et 27 (17 et 23 avril 1494).
-
[81]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 4.
-
[82]
Ibid.
-
[83]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 8. Il convient de noter que le roi de France renvoie le procès devant son bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier (ou son lieutenant à Cusset) alors qu’un bailliage royal existe à Montferrand depuis 1425. Le roi craint-il un manque d’impartialité de la part des Montferrandais??
-
[84]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièces 4-7.
-
[85]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 5.
-
[86]
Le monopole de la Purge sur les experts ne semble concerner que la maladie de lèpre. En effet, en 1527, Jehan Bohet examine «?une femme qui avoit servy le serviteur de Pegot mort de peste?». En 1532, avec Léonard Doduyt et Pierre Richomme, il examine encore des hommes suspectés de peste à Montferrand. Dans les deux cas, les praticiens sont rémunérés par le consulat montferrandais et ne sont pas inquiétés par la Purge. En dehors de la lèpre, les experts demeurent donc libres d’exercer. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 241, fol. 26 (1526) et cc 246 (1532).
-
[87]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 66, pièce 33?: «?avons faict fere le serment esdit […] cirurgiens de bien et loyaulement proceder a ladite visitacion et nous en rapporter la verité […] ce qu’ilz ont promis et juré faire, lesquelz se sont retirez apart avec ladite Benoiste Merle et entour dymys heure apres sont revenuz par devant nous avec ladite Merle et nous ont faict leur rapport.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 70, pièce 10?: «?Lesdits medecin et cirurgiens se sont retirez apart avec ladite Vailhorgue au lieu acoustumé a faire telles visitacions et environ une heure et demye ou deux heures apres sont revenuz par devant nous.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 17?: «?Desdits expertz […] se sont mys et retirés apart avec ladite Freydefont au lieu acoustumé faire telles visitacions et envyron une heure après sont revenuz par devant nous.?»
-
[88]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 360, fol. 11?: «?Ont plus payé a ledit Levaix la somme de douze solz six deniers tournois pour donner a disner a cinq medecins et ausdits consulz quant furent a la Purge de Loys Bonhomme ainsi qu’il le a affermé. Fait le XXe jour d’aoust mil IIIIC IIIIXX et cinq.?»
-
[89]
Voir le tableau intitulé «?Prix et salaires à Montferrand (1260-1490)?», dans André-Georges Manry et Roger Sève, L’histoire vue de l’Auvergne, t. I, 1re partie, Clermont-Ferrand, De Bussac, 1959, p. 194-195.
-
[90]
Les crochets désignent l’origine supposée de l’expert.
-
[91]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 2.
-
[92]
Contigny?: ch.-l. de com., cant. Saint-Pourçain-sur-Sioule, arrond. Moulins (Allier).
-
[93]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18, acte servant de couverture au registre de délibérations de 1569.
-
[94]
Il s’agit de la léproserie communale installée à Herbet au sud-est de Montferrand sur l’actuelle commune de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).
-
[95]
Villosanges?: ch.-l. de com., cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[96]
Mallet?: l.-d., com. Miremont, cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[97]
Montel-de-Gelat?: ch.-l. de com., cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[98]
Me Durand Faugerat?: notaire de Montferrand et greffier de la Purge (21 juin 1486-31 octobre 1489).
1Dès le xie siècle, le royaume de France est témoin du retour d’un mal terrifiant et absent depuis plusieurs siècles : la lèpre [2]. La connaissance de la maladie et de sa réception par la population médiévale a bénéficié depuis les années 1980 de nombreux travaux, à commencer par ceux de Françoise Bériac sur les communautés lépreuses en Aquitaine [3]. Depuis, de nouvelles recherches ont enrichi l’historiographie « lépreuse ». Il faut ainsi citer la thèse de François-Olivier Touati sur La lèpre, les lépreux et les léproseries de la province ecclésiastique de Sens et les nombreux travaux de l’historien parus sur le sujet depuis celle-ci [4]. Il convient de rappeler ensuite les diverses études réalisées par les membres du collectif Historia leprosorum (depuis 1995) et du groupe Lazari (créé en 2008), avec notamment la publication de la table ronde de Rouen (2000) et des journées d’études d’Amiens (2002) et d’Aizier (2005) sous la direction de Bruno Tabuteau et de Pascal Montaubin [5]. Les thèses d’Elma Brenner et de Damien Jeanne traitant de la lèpre en Normandie sont venues, dernièrement, compléter l’état des connaissances sur le sujet (2008, 2010) [6]. Toutefois, si l’historiographie sur la lèpre médiévale est abondante, elle n’évite pas un certain déséquilibre géographique. L’Aquitaine, mais surtout le Nord du royaume de France ont fait l’objet des principales études. La partie centrale comme la partie méridionale du royaume ne bénéficient pas de grandes synthèses. Pourtant, la prise en charge de la maladie par la société est bien documentée dans ces dernières zones comme le prouve le cas de l’Auvergne.
2La région souffre de la maladie de lèpre dès le début du xiie siècle au moins. L’endémie frappe alors les populations et contraint les autorités locales à réagir pour enrayer la propagation du mal avec, notamment, l’installation de plusieurs léproseries [7]. Au sein du diocèse de Clermont, ce sont cependant les Montferrandais qui sont les plus organisés avec un tribunal atypique et unique en France : « la Purge [8] ». Les origines de cette juridiction sont obscures. L’historien n’en saisit l’existence et le fonctionnement qu’au début du xive siècle, quand elle est créée ou officialisée sous la forme d’un tribunal royal, utilisé ensuite jusqu’au xviie siècle.
3La Purge, détenue et présidée par les consuls de Montferrand, a pour but de convoquer, d’examiner, de juger puis d’écarter de la société saine les lépreux en Auvergne, mais aussi dans les pays voisins. Le bon fonctionnement de cet organe juridico-médical repose sur un organigramme précis au sein duquel chaque officier trouve sa place et son utilité. Sont ainsi nécessaires à la procédure des notaires, des huissiers, des greffiers, des sergents, des procureurs – et leurs substituts –, des juges, mais encore et surtout des « medecins, sirurgiens et autres gens sur ce expertz et cognoissans ». En effet, l’issue de la procédure repose sur un élément indispensable : le procès-verbal des experts en matière de lèpre, c’est-à-dire les médecins, chirurgiens et barbiers. Afin de comprendre la part que prend l’expertise médicale dans la résolution du sort des lépreux d’Auvergne, il faut connaître ce tribunal atypique et sa procédure. Il sera ainsi possible de voir à quel moment se place le rôle des médecins et d’apprécier la fiabilité de cette expertise.
L’« espurge » montferrandaise
Origine du tribunal
4Le tribunal dit de « la Purge [9] » de Montferrand est une institution singulière. Son rôle, comme son nom l’indique, est de « purger » l’Auvergne et les pays voisins « d’icelle piteuse maladie de lepre appellée ladrerie » [10]. La Purge des lépreux est sans doute, à l’origine, une tradition détenue par la commune de Montferrand dès les xiie et xiiie siècles, période d’apparition du mal dans la documentation écrite. La pratique qui consiste à écarter les malades de la société saine n’a alors ni ressort ni reconnaissance officiels. D’ailleurs, les premières chartes de franchises accordées à la commune – la première vers 1196-1198 (confirmée en 1249 n. st. et vidimée en 1273), la seconde en 1291 – n’abordent pas le sujet [11]. Ce n’est qu’en 1496, lorsque les libertés de la ville sont transcrites « de latin en francoys » qu’apparaît un article concernant cette juridiction : « Item ont aussi privilliege lesdictz consulz de Montferrand de cognoistre et estre juges pour le roy au faict de la Purge touchant la maladie de lepre sur tout le pays d’Auvergne, hault et bas, et autres pais circonvoisins tellement que la cognoissance de ladicte matiere leur a este autreffois ranvoyée par le chastellain dudict Montferrand et par plusieurs autres juges dudict pais duquel privilliege ilz ont tousiours joy par cy devant et font encores. » [12] Les consuls de Montferrand ont reçu, à une date inconnue, le privilège royal d’exercer en haute et basse Auvergne notamment. Il semble d’ailleurs que les Montferrandais soient les seuls habitants du royaume à posséder un tel pouvoir. Ils jouissent d’un avantage considérable et le font savoir. Pourtant, les origines de ce tribunal sont incertaines.
5Les sources concernant cette juridiction datent en majorité de la fin du Moyen Âge et de l’Époque moderne et ne renseignent pas sur la mise en fonction de l’institution. La date de création de ce tribunal demeure donc un mystère. Sa plus ancienne mention remonte à 1305 [13], alors que la maladie est présente en Auvergne au moins depuis deux siècles. Toutefois, l’absence de documents n’exclut pas une activité plus ancienne. D’ailleurs, la date de mise en place de l’institution royale, si elle n’est pas connue exactement, peut être estimée. Au xiiie siècle, la royauté intervient à deux reprises dans les affaires de la ville de Montferrand : en 1225/6 et en 1292. La première intervention est celle de Louis VIII, mais elle ne concerne pas la Purge. C’est donc dans le second épisode qu’il faut rechercher l’origine du tribunal. Le 25 juillet 1292, Louis de Beaujeu, criblé de dettes, vend à excellentissimo principi domino Philippo, Dei gracia, regi Francorum eius heredibus et successoribus villam, castrum, castellaniam de Monteferrandi cum omnibus et singulis pertinenciis dicte ville et castellanie [14]. La ville de Montferrand devient alors royale ainsi que toutes ses possessions. C’est certainement à cette époque et sous l’impulsion de Philippe IV que l’ancienne tradition communale de juger les lépreux devient un organe royal sous le nom de « Purge ».
6Cette juridiction reflète les liens qui unissent la ville de Montferrand à la royauté depuis le début du xiiie siècle. Parmi les événements marquants, il convient de citer la charte de février 1226 (n. st.) par laquelle Louis VIII prend les Montferrandais sous sa protection comme ses bourgeois et leur affirme que ni lui ni ses successeurs ne les sépareront du domaine immédiat de la couronne [15]. En mars 1226 (n. st.), le même roi leur adresse un sauf-conduit leur permettant de circuler librement avec leurs marchandises dans l’ensemble du domaine royal [16]. En juin 1311, Philippe IV confirme les lettres de Louis VIII relatives au privilège des habitants de Montferrand d’être immédiatement et inséparablement unis à la couronne [17]. Au xve siècle, le roi renforce encore ses appuis et dote la ville d’un bailliage royal (1425) [18], puis lui accorde le siège de la juridiction royale des exempts jusque-là détenue par le lieutenant du bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier à Cusset (édit de la Ferté-Hubert, novembre 1466) [19]. Enfin, Montferrand reçoit à plusieurs reprises les gens du Parlement de Paris pour la tenue des Grands Jours d’Auvergne (1454, 1455, 1456 et 1481), ce qui démontre encore l’importance de la ville aux yeux de la royauté [20].
7C’est dans ce contexte que la nouvelle juridiction consulaire se perfectionne (xive siècle) et atteint sa plénitude (xve siècle), comme l’atteste alors son fonctionnement tout à fait unique dans le royaume.
Le ressort de la cour
8Les interventions des experts en matière de lèpre s’appliquent à un vaste territoire. Il s’étend sur les pays de l’Auvergne (haute et basse), du Bourbonnais, du Velay, du Berry, du Nivernais, du Mâconnais, du Beaujolais, du Roannais, du Forez, du Lyonnais, du Gévaudan, du Rouergue, du Carladès, du Quercy, du Limousin, de la Combraille et de la Marche (Haute et Basse) [21]. Ce ressort n’est pas sans rappeler celui des Grands Jours d’Auvergne qui jugent les causes et procès « des pays d’Auvergne, Bourbonois, Forestz, Beaujolois, Nyvernais et Lionnois [22] ». Dans la pratique pourtant, les juges royaux de la Purge ne maîtrisent pas l’ensemble des pays annoncés et revendiqués. L’étude de la provenance des inculpés de lèpre examinés à Montferrand entre le milieu du xive siècle et le milieu du xvie siècle suppose un ressort bien différent [23]. Le ressort réel de la cour royale correspond à une zone géographique plus réduite, recoupant les limites du diocèse de Clermont dans sa configuration d’après 1317 [24]. Quelques entreprises sur les marges sont toutefois notables en Limousin, dans le Quercy et dans le Rouergue [25], mais ces pays apparaissent mal maîtrisés. Ainsi, en 1477, les habitants de la ville de Capdenac, entre Rouergue et Quercy, « tenia per sospechos Ramon Bodet, teysseyre habitan de Capdenac, de esser tocat de mal de lebrosia ». Les consuls de la ville souhaitant en savoir la vérité « per lo be public et per hostar la suspetio » ignorent la Purge de Montferrand et s’en remettent à deux experts « sufficien » de Figeac : « Me Gui lo metge, doctor en medicina » et « lo barbier que se apelans Lo Gasco Feyro », puis à « I metge de Viela Franca doctor en medicina » [26]. La justice de Couzan, en Forez, montre également les limites du ressort de la Purge dès 1468 lorsque Antoine Ferrand, tavernier de Sauvain, est mis en accusation super eo quod sine licencia examinare fecit Anthoniam ejus filiastram de morbo lepre suspicatam [27]. Les juges royaux de la Purge sont alors écartés de la procédure. Une absence se remarque, encore, dans ces territoires : celle de la haute Auvergne qui échappe complètement à l’organe montferrandais. L’explication s’en trouve dans l’existence d’une Purge complémentaire détenue par l’abbé d’Aurillac depuis 1298 et ayant ressort sur le haut pays [28]. En réalité, les juges n’opèrent pas dans l’ensemble des pays annoncés, mais demeurent maîtres d’une zone considérable pour exercer leur juridiction.
La procédure
9La lecture des sources archivistiques permet de reconstituer la procédure de la Purge [29]. La fama publica joue un rôle essentiel dans ce contexte [30]. Le tribunal des lépreux repose effectivement sur un élément indispensable : la dénonciation. Sans celle-ci la juridiction ne peut fonctionner. Ainsi, tout commence lorsqu’un individu est soupçonné d’être atteint de la maladie de lèpre au sein d’une paroisse. Les proches du suspect (parents, amis, voisins…) informent les personnes chargées de leur ville ou paroisse (consuls, commis ou luminiers) qui à leur tour s’en remettent au procureur royal de la Purge à Montferrand. Les autorités locales se justifient toujours en affirmant « qu’il seroit bon que la verité en feust sceue pour le proffit de la chose publique et pour oster la suspection des gens [31] ». Ainsi débute la procédure.
10Dans un premier temps, c’est le procureur royal qui intervient. Il se déplace dans la paroisse concernée et conduit, au nom de la cour royale, une « inquisition » ou « information » contenant l’audition de plusieurs témoins [32]. À l’issue de son enquête, le procureur rédige son requiro par lequel il demande la convocation du suspect devant la Purge. Ce réquisitoire est adressé aux juges du tribunal qui décernent un décret de « prise au corps ». L’acte, rédigé par le greffier de la cour, est remis à des notaires ou sergents royaux qui sont chargés d’interpeller le suspect et de le conduire à Montferrand où se trouvent les prisons royales [33]. Si l’accusé est absent lors de la venue des officiers, le décret est remis à l’un de ses proches. Le lépreux supposé dispose alors d’un délai de quelques jours pour se présenter à Montferrand et assister à son audience. Cette étape est consignée dans la « relation » du notaire ou du sergent royal puis envoyée à la Purge. Pourtant, certains suspects ne comparaissent pas et tentent d’éviter la visite médicale ainsi que le verdict des experts de Montferrand. Un nouveau décret peut alors être décerné avant qu’un ou plusieurs « deffaults », accompagnés d’amendes (50 à 500 l.t.), ne soient donnés à l’encontre des récalcitrants [34].
11Dans un second temps a lieu l’audience. Pour cela, l’accusé de ladrerie est conduit des prisons royales à l’auditoire de la Purge où il doit être examiné puis jugé. C’est alors qu’intervient le jury d’experts convoqué par le procureur et les juges. Ce jury « se retires apart au lieu acoustumé a faire telles visitacions et palpamens » et examine l’accusé [35]. À l’issue de la visite médicale, les experts rédigent un rapport mentionnant leur diagnostic. Dès lors, l’audience peut avoir lieu. Celle-ci se déroule en présence de l’accusé et de ses représentants (procureur et avocat), de témoins (luminiers, commis, parents…), du procureur royal et de tous les agents de la Purge (greffier, notaires, sergents et juges). Le procureur présente à la cour les charges retenues contre l’inculpé, le témoignage des proches [36], puis le rapport médical des experts. Les juges peuvent ensuite rendre leur sentence. Celle-ci peut conduire à diverses conclusions : l’accusé est déclaré sain, il peut rentrer chez lui ; s’il est reconnu lépreux, il doit gagner – sous huitaine – une léproserie. Si le suspect « n’est pas parfaictement formé de ladite maladie [il] luy doit estre donné temps d’uy en ung an pour comparoir par devant lesdits consulz pour estre plus amplement vizité ». Ce dernier cas, bien que rare, montre que les experts comme le tribunal sont scrupuleux, mais aussi que l’expertise médicale a ses limites [37]. Enfin, à l’issue de la procédure, une « taxation de frais » est dressée par le procureur et remise à l’accusé. Qu’il soit reconnu sain ou lépreux, l’inculpé doit assumer l’intégralité des frais de la procédure [38]…
12La Purge est organisée, hiérarchisée et « performante » puisqu’elle est fondée sur la dénonciation et sur un dépistage systématique des suspects de lèpre. Les magistrats royaux affirment même en 1494 qu’on « ne deveit [l’]empescher […] pour ce que telz accidens et maledies surviennent de jour et de heure en heure quant il plaist a Dieu de lepre » [39]. Cette procédure met également en évidence la place importante attribuée aux experts médicaux comme le poids de leur expertise. De cette dernière dépendent en effet l’issue du procès et l’avenir du suspect.
L’expertise médicale
Le lieu de l’examen
13L’expertise médicale constitue la principale étape de cette procédure atypique qu’est la Purge. La première particularité tient au fait que tous les malades, sans exception, sont examinés à Montferrand et non pas au sein de leur paroisse. Certaines personnes souffrent de leur état de santé et ne peuvent pas se déplacer aisément [40]. Mais cette pratique tient surtout à la nature de l’institution. La centralisation du pouvoir permet un meilleur contrôle du territoire et du déroulement de la procédure judiciaire. Pour cette raison, le tribunal siège toujours au même endroit et possède même un local officiel, destiné à l’examen médical. Jusqu’à la fin du xve siècle, c’est la léproserie communale située à Herbet, près de Montferrand, qui fait office de tribunal et de salle d’examen [41]. Puis, dès 1497, un espace spécifique est construit par le consulat au cœur de Montferrand, près de la maison du Saint-Esprit : l’« auditoire de la Purge » [42]. Il convient de noter une certaine évolution concernant le traitement des malades qui sont alors menés intra-muros et non plus relégués dans les faubourgs de la ville. L’édification d’un bâtiment spécifique en ville par les consuls démontre combien ces derniers espèrent matérialiser et faire reconnaître cette juridiction originale qu’est la Purge des lépreux [43]. La salle d’examen de l’auditoire, quant à elle, est décrite dans les registres de délibérations et dans les comptes consulaires : c’est une pièce de grande dimension contenant principalement une table destinée à la « visitacion » des malades [44].
14Les justiciers comme les médecins et chirurgiens-barbiers disposent donc de locaux adaptés aux besoins de l’exercice de la Purge : un « pallais » ou « oditouere » pour les audiences ainsi qu’une salle d’examen pour la « visite » des inquiétés.
« Palpacion » et « visitacion »
15L’examen médical (« palpacion » ou « visitacion ») pratiqué à Montferrand diffère de celui pratiqué dans le reste du royaume de France. En Auvergne, les médecins paraissent peu sensibles à la maladie. Malgré les risques encourus et les nombreuses superstitions qui entourent la lèpre, les praticiens n’hésitent pas à approcher le prétendu malade et à l’examiner de la tête aux pieds. Si, dans certaines régions, le personnel médical fonde encore son diagnostic sur une simple étude visuelle des mains et du visage, à Montferrand il n’en est rien. La Purge emploie des personnes d’un courage notable dont l’argumentation repose sur divers sens : la vue, l’odorat, le toucher et l’ouïe [45]. Le suspect est soumis à une visite complète de sa personne comme le supposent les signes tenus comme caractéristiques de la lèpre, décrits dans les rapports médicaux. Ces signes sont de deux types : les uns dits « équivoques » sont communs à plusieurs maladies, tandis que les autres, dits « univoques », sont spécifiques de la lèpre. Un rapport médical rédigé en août 1488 par les médecins et chirurgiens ayant « visité » messire Pierre Malsobroux, prêtre de Villosanges, présente les signes recherchés et le déroulement de la visite :
16« Nous […] avons veu, maigné, esprouvé et visité messire Pierre Malsobroux […] par hault et bas ainsi qu’il est acoustumé fere en telle matieres avons dit et rapporté par noz seremens […] ledit messire Pierre de Malsobroux estre infect et actainct de ladite maladie de lepre. Et premierement quant aux signes univoques trouvons que ses sursilz ou la plus grand partie, sont dépilés, gros et enflés et pubereux, les yeulx rous et n’est pas le blanc d’iceulx la vraye blancheur maiz tire a vue couleur fusque [46], les aureilhes asses rudes et tubereuses, le nes retrainct par dedans enflere et par dehors asses ouvert, gros et enflé, les bolievres grosses et tubereuses, mortes et fusques, le palaiz ulseré et alteré, la voix rauque, la veue asses orrible et espoventable, les cheveulx de sa teste ou la plus grand partie failhans de morrissement et de facille arrachement. Plusieurs autres signes y trouvons que appellons equivoques et premier trouvons qu’il est de dure cher insensible, comme apart quant on le picque, les espaules grasses et oincteuses, son cuyr asses retirant, a cuyr d’oye, son poux debille et doulx son sang gros et noir pesant et adusté l’aleyne puante que sont signes demonstrans ladite maladie de lepre pourquoy doit estre separé d’entre les gens sainctz. » [47]
17Les signes recherchés sont précis, variés et nombreux : étude du corps, de la tête, du sang et nécessitent des contacts rapprochés avec le suspect. Toutefois, ce sont ces symptômes qui permettent de déterminer de manière fiable la présence ou non du mal chez un individu. La visite médicale ne se limite donc pas à une simple étude visuelle. Des pratiques originales sont même exécutées. La recherche d’insensibilité sur les membres comme il est indiqué dans l’exemple précédent – un des signes tenus comme caractéristiques de la lèpre – nécessite même des instruments particuliers. En 1542, il est encore question d’une patiente qu’on « poiquoient aux jambes mais […] elle santoit bien lesdites poinctures » [48]. Pour compléter cette étude, un examen sanguin est pratiqué. C’est le rôle du barbier ou chirurgien-barbier. Après avoir saigné le suspect, les experts semblent filtrer le sang obtenu à l’aide d’un linge et observer le dépôt présent sur le drap [49]. Les signes retenus comme typiques de la lèpre sont la couleur et la texture ; les lépreux possèdent un sang sombre et épais [50]. Pour conclure l’expertise médicale, la Purge recourt à l’examen des urines. De la même manière, la texture et la couleur sont des indices de la maladie. Ces pratiques ne sont pas sans risques, des accidents arrivent même parfois. Il est ainsi question dans les sources d’une saignée abusive pratiquée en 1542 sans l’autorité de la Purge. Les praticiens avouent avoir « tir[é] du sang du bras grand quantité et ilz feirent la playe de la veyne si grande que a peyne peurent estancher ledit sang au moyen de quoy [la suspecte] demeura mervelheusement afoybliee et debilitée car ladite saignée estoit excessive » [51].
18L’examen médical permettant aux experts d’établir leur diagnostic paraît complet et laisse peu de doutes quant à la qualité du verdict rendu aux juges de la Purge. Les conclusions des savants sont ainsi consignées dans des procès-verbaux rédigés au nom de ceux qui ont œuvré « emsenble et concordablement » [52]. En effet, c’est toujours sous serment et sous la concorde que les médecins de la Purge révèlent leur diagnostic [53], ce qui n’est pas toujours le cas dans le reste du royaume de France [54]. De même, il faut souligner la valeur probatoire du consilium des experts de Montferrand. Ceux-ci n’apportent pas un simple témoignage, mais une expertise ayant valeur de jugement puisque les juges royaux s’y soumettent toujours lorsqu’ils prononcent leur sentence sur l’accusation de ladrerie [55]. Cette sentence est dite « définitive », mais elle connaît parfois des contestations.
Une sentence définitive… contestable !
19Les magistrats de la Purge rendent leurs sentences à l’encontre des inquiétés pour lèpre d’après les procès-verbaux des médecins et des chirurgiens-barbiers. Ces derniers, consultés par la cour en raison de leur qualité d’experts, permettent au tribunal de « profferer [une] sentence diffinitive ». Il existe pourtant des contestations. Celles-ci peuvent s’exprimer de deux manières différentes. Dans le premier cas, l’accusé peut nier la compétence des experts. Il obtient ainsi la permission de faire nommer un nouveau jury médical. Celui-ci est composé d’experts choisis (et rémunérés) par le suspect et a pour but de pratiquer une contre-expertise. À l’issue de ce second examen, le suspect doit néanmoins accepter la nouvelle et dernière sentence de la Purge. Geraud Bonvallet, marchand de Billom suspecté de lèpre en 1510, refuse ainsi les experts nommés par la cour : « lequel a dit qu’il ne vouloit point demeurer a leur rapport, maiz en vouloir nommer d’autres […] et peu ampres ledit Girault Bonvallet nous a faict scavoir qu’il vouloit prandre droit par maistre Pierre Palmyer et Anthoine Clavellin » [56]. Pour les plus récalcitrants, une autre démarche existe : il s’agit de l’appel auprès du Parlement de Paris. Cette démarche, fondée sur la remise en cause de la compétence de la juridiction, n’a pour but que de gagner du temps et de repousser l’entrée en léproserie, puisque le Parlement soutient presque toujours le tribunal royal de Montferrand. Le roi de France intervient même parfois en personne. Charles VIII soutient ainsi la Purge en 1493 contre « Gabrielle Cherpine, demeurent (sic) au lieu de Royat audit bas pays d’Auvergne ». Cette dernière, condamnée par la Purge et « cougnoissent (sic) que a veue d’eulh elle est actinte de ladite maladie », conteste la juridiction royale et en appelle au Parlement. La justice royale, informée de l’affaire, déclare que de « telles frivolles appellacions requiert scelerité » et déboute la plaignante [57].
20La Purge, cour royale parfois contestée, bénéficie toujours du soutien de la royauté [58]. Cette juridiction ne peut cependant fonctionner sans un maillon indispensable : les praticiens, véritables experts auprès du tribunal.
Les experts : de l’ars medica au monde judiciaire
21Quand les experts prennent une part si déterminante dans la sentence, il est permis de mettre en cause leur fiabilité. Les critères qui président à leur choix par la Purge, ainsi que leur lien avec ce tribunal éclairent cette question.
Un recrutement local ?
22L’étude de l’origine géographique des médecins, chirurgiens et barbiers officiant pour la cour de la Purge permet de dégager deux périodes différentes dans le recrutement des « gens expers » en matière de lèpre et d’illustrer les motivations de la cour royale [59].
23Dans un premier temps, Montferrand opère un recrutement exclusivement extérieur, en particulier dans la proche ville de Clermont. Du milieu du xive siècle au milieu du xve siècle, tous les praticiens œuvrant pour la Purge sont étrangers à la ville de Montferrand. Il est ainsi question de Guillaume lo Barbier (1371), d’Antonius Laurentii, in artibus magistro et in medicina licenciatus (1417) et de Stephanus Gregorii, bacalarius in medicina (1417), tous habitants de Clermont [60]. En 1443, la Purge s’en remet même à un nommé Dionisus Salavert, médecin du diocèse de Limoges [61] ! Aucun praticien Montferrandais n’apparaît alors. La Purge est sans doute désireuse de recruter des individus compétents en la matière. Or, la ville de Montferrand compte essentiellement parmi ses habitants des commerçants et des financiers [62]. Seuls six barbiers sont signalés au sein de la ville royale entre le milieu du xiiie siècle et le début du xve siècle, et il n’est fait mention d’aucun médecin [63]. Les consuls le confirment en 1461 : « En ladicte ville de Montferrand n’a aucun medicin. » [64] Ce fait explique sans doute pourquoi Jean de Berry, prince apanagiste de l’Auvergne, rappelle en 1375 (n. st.) que les « entachés de ladite maledie » doivent être visités par des « barbiers et medecins de Clermont et d’ailheurs » [65]. Faute de spécialistes locaux, les Montferrandais peuvent – et doivent – compter sur les praticiens de la proche cité épiscopale ; ces derniers étant visiblement plus présents qu’à Montferrand [66]. Il est ainsi question, entre autres, de maître Pierre Yspani, clerc et maître en médecine (1263-1299), de Pierre Jacobi, phisicus (1289), de Guillermus Vassali, phisicus (1316), de Johannes Saynerii, magister in medicina (1331), de Durandus Bordeulh, quondam phisicus (1354) [67]…
24La situation s’inverse cependant dès le milieu du xve siècle. Bien que la Purge recoure toujours aux médecins clermontois, des experts montferrandais apparaissent. Johannes de Chouriaco, barbitonsor de Montferrand codirige ainsi une enquête pour lèpre en 1443. De même, Jehan le Barbier alias Masse Bellon, chirurgien-barbier et habitant de Montferrand, examine seul un habitant de Riom suspect de ladrerie en 1453 [68]. Dès lors, les praticiens montferrandais au service de la Purge sont plus nombreux : Guillaume Berthelaix (chirurgien-barbier, 1484-1499), Taneguy Pollart (chirurgien-barbier, 1488-1493), Gilbert Bellon (chirurgien-barbier, 1488-1501), Anne Daniel (médecin, 1491), Jehan Bohet (chirurgien-barbier, 1494-1532) et Pierre Richomme (chirurgien-barbier, 1501-1542)… Il semble que le corps médical montferrandais augmente aux xve et xvie siècles. La juridiction royale de la Purge n’est sans doute pas étrangère à cette évolution. Cependant, les médecins, c’est-à-dire les gradués en médecine (bacheliers, licenciés, maîtres et docteurs), demeurent majoritairement clermontois.
25D’abord tournée vers les praticiens du siège épiscopal, la Purge n’hésite pas à attirer et suivre l’avis d’experts montferrandais dès le milieu du xve siècle. C’est justement à cette époque que s’opère un autre changement marqué par l’apparition de jurys professionnels.
Des jurys « professionnels » et « cognoissants »
26Des spécialistes de l’ars medica servent la cour royale de Montferrand dès le second quart du xive siècle, au moins [69]. En Occident, l’installation des physici au rang d’experts est ancienne. L’Italie du Nord fournit ainsi de nombreux témoignages attestant l’intervention de professionnels du domaine médical dans le champ social, politique ou judiciaire dès la seconde moitié du xiiie siècle [70]. Toutefois, le recours à l’expertise médicale dans le monde judiciaire s’opère progressivement et n’est répandu qu’à la fin du Moyen Âge. Au sein du royaume de France, les autorités judiciaires font également appel à des experts de la pratique médicale dès la fin du xiiie siècle, ce qui reflète l’essor des facultés de médecine de Paris et de Montpellier [71]. Néanmoins, le phénomène ne parait se généraliser qu’à partir des années 1350, après l’apparition et la diffusion des grandes épidémies [72]. Le medicus sapiens intervient alors dans des cas particuliers soulignant l’ignorance des juges, mais donnant une force probatoire indiscutable à son rapport d’expertise [73]. Ainsi, l’expert médical finit « parfois par apparaître comme un agent de l’État, au service de la justice ou des offices de santé » [74]. L’exemple de la Purge le confirme : ses magistrats ne sont ni des gens de justice ni des médecins, ce sont les consuls de Montferrand. Ces hommes, choisis parmi les « bourgeois, manans et habitans », demeurent en charge du consulat – et donc de la Purge – une seule année, ce qui ne leur permet pas d’acquérir de l’expérience en matière de lèpre [75]. La justice étant alors « confrontée à un savoir technique qui lui est étranger, elle doit s’informer dans des domaines dont seuls ceux qui ont les connaissances spécialisées nécessaires peuvent lui ouvrir l’accès » [76]. Le recours à des « savans experts » professionnels est alors inévitable.
27Jusqu’au milieu du xve siècle, les cliniciens examinant les suspects de lèpre à Montferrand paraissent peu nombreux et œuvrent sans être attachés à l’institution. Le 7 mai 1371, les juges royaux envoient « querir Guillaume lo Barbier de Clermont pour espurger un homme de Montmeraut ». En mai 1417, Antonius Laurentii et Stephanus Gregorii, médecins de Clermont, examinent ensemble le chanoine Johannes Serrarii. Le mois suivant, Marguerite, fille de Jehan Goury et paroissienne de Contigny, n’est déclarée saine de la maladie que par Antonius Laurentii. En juillet 1443, Guilhelmi Mazuerii alias Roberti, curé de Charmeil, est quant à lui lavé du soupçon de lèpre (suspectum et acusatum de morbo lepre) par un médecin et un barbier. En août 1453, Masse Bellon, « surgien expert et cognoissant en tieulx cas », examine seul Jehan Reynault dit Luglier, habitant de Riom [77]. Autant d’exemples démontrant que jusqu’au milieu du xve siècle les procès-verbaux adressés à la Purge ne sont le fruit que d’un ou deux experts. Les choses changent dans la seconde moitié du xve siècle.
28La fin du xve siècle est marquée par l’apparition de véritables « jurys professionnels ». Dès 1484, les suspects de ladrerie ne sont plus examinés par un ou deux praticiens, mais par une équipe. Il semble même qu’une certaine « norme » soit notable. Désormais, chaque épreuve médicale est conduite par un jury composé d’au moins un médecin et de plusieurs chirurgiens-barbiers. Le premier jury « professionnel » mentionné est celui composé des experts suivants officiant presque toujours ensemble :
- maître Pierre de Brioude, licencié en médecine (1484-1495, 11 mentions) ;
- maître Guillaume Berthelays, chirurgien-barbier de Montferrand (1484-1499, 12 mentions) ;
- Taneguy Pollart, chirurgien-barbier de Montferrand (1484-1493, 6 mentions) ;
- Jehan Gueydon dit Le Cathalan, chirurgien-barbier de Clermont (1488-1501, 9 mentions) ;
- maître Gilbert Bellon, chirurgien-barbier de Montferrand (1484-1501, 13 mentions) ;
- maître Jehan Bohet, chirurgien-barbier de Montferrand (1494-1532, 18 mentions).
- maître Pierre de Louvain, bachelier en médecine et habitant de Clermont (1510-1525, 19 mentions) ;
- maître André Brun, licencié puis docteur en médecine et habitant de Clermont (1515-1523, 6 mentions) ;
- maître Pierre Richomme, chirurgien-barbier de Montferrand (1501-1542, 27 mentions) ;
- maître Hugues Lamotte, chirurgien-barbier de Montferrand (1510-1525, 20 mentions) ;
- maître Léonard Doduyt, chirurgien-barbier de Montferrand (1522-1542, 8 mentions).
29Quant aux connaissances des experts, il apparaît que la Purge s’entoure de très bons spécialistes. Ainsi, Pierre de Louvain, bachelier en médecine, a été formé à la faculté de Paris [78]. André Brun, pour sa part, a fréquenté l’université de Montpellier [79]. Quant aux chirurgiens-barbiers, leur lieu de formation est ignoré. Ils portent tout de même le titre de magister ou « maistre », ce qui atteste certainement d’un savoir et d’une certaine expérience auprès des malades reconnus par tous. D’une manière générale, la Purge recourt à des experts « savants » et « connoissants ». La lecture des procès-verbaux dressés par les spécialistes de la lèpre prouve qu’ils connaissent la théorie humorale de Galien, mais aussi la Chirurgia Magna de Gui de Chauliac (xive siècle). Les experts se réfèrent même aux écrits d’Avicenne (Qânûn) à la fin du xve siècle : « ladite espesse Elephansia qu’est de colera nygra malencolica unde Advicena dicit tercia seu quarti tractatui tertio cappitulo primo quod lepra est mala infirmitas expersa in toto corpore procedens expersione nygre in toto corpore quare corrumpitur complectio membrorum forma et figura eorum. » [80]
30Les praticiens qui purgent l’Auvergne du « danger lépreux » à la fin du Moyen Âge sont instruits et experts en la matière. Toutefois, ces experts ne sont pas totalement libres d’exercer leur art en dehors de la juridiction de la Purge.
Des médecins sous tutelle
31Au printemps 1497, trois spécialistes de la maladie de lèpre sont invités par le procureur de Clermont à « visiter » un habitant suspecté de ladrerie. Cette visite paraît tout à fait ordinaire. Jehan Boschet, habitant de Clermont, demande à Pierre Dupré, procureur de la ville et son voisin, de convoquer un médecin et des chirurgiens- barbiers pour l’examiner. Un jury médico-chirurgical est composé ; la visite a lieu dans le jardin d’une tierce personne. À l’issue de celle- ci, les praticiens qui doutent de la nature du mal déclarent que le suspect « estoist grandement suspect d’estre entaché de ladite maladie de lepre et que dans la Sainct Jehan prochain venant se pourroit myelx cognoistre » [81]. Pour cette raison, ils lui enjoignent de se représenter plus tard afin de pouvoir le condamner ou l’absoudre du grief de lèpre. La visite exécutée par les praticiens semble « classique » : le jury est composé d’un médecin et de deux chirurgiens-barbiers qui sont spécialistes de la maladie de lèpre pour la Purge. L’examen se déroule comme de coutume : les praticiens « visitent et palpent tous ensemble ledit Jehan Boschet es parties de son corps ainssi qu’il est acoustumé fere et tirent du sangt d’ung de ses bras ». Le diagnostic est établi rigoureusement : « Iceulx barbiers et medecin se tirent appart et parlent ensemble de ce qu’ilz avoient veu et concluent entre eulx qu’il failhoit encoure actendre le temps chault pour en fere vray jugement. » [82] La « visitacion » subie par Jehan Boschet est typique de celles prodiguées par la Purge. Néanmoins, quelques faits diffèrent de la procédure habituelle. À aucun moment les praticiens n’affirment être les représentants de l’institution montferrandaise. Ils agissent à leur compte. De plus, la « visite » n’est pas effectuée dans l’auditoire de la Purge, mais dans un jardin de Clermont. Enfin, les spécialistes reçoivent une rémunération pour leur office : « C’est assavoir a chacun quatre solz et deux deniers tournois. » Cet événement n’échappe pas aux consuls de Montferrand, légitimes juges de la Purge qui ouvrent une enquête à l’encontre des praticiens en question.
32La visite effectuée par Pierre de Brioude, Jehan Gaydon et Bertrand Ludesse représente une menace pour la juridiction de la Purge. En agissant de la sorte, ces praticiens, habitués de la cour royale de Montferrand, démontrent que le tribunal n’est pas indispensable. En mars 1497 (n. st.), une procédure est donc conduite « en interne » par le procureur de la Purge et les consuls de Montferrand contre les « usurpateurs », tandis que les élus de la ville de Clermont sont poursuivis – à la demande de Charles VIII – par le bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier [83]. Le procès des experts est l’occasion de rappeler le privilège royal dont jouit Montferrand en matière de lèpre et de préciser que « lesdits deffendeurs avoyent entrepris sur [la] jurisdicion et Purge » [84]. Devant l’accusation, la défense est organisée. Les médecins et chirurgiens-barbiers inquiétés affirment notamment « n’avoir en riens mespris ne delinqué » et qu’ils « se sont bien et honnestement comportés ». Le plaidoyer des experts est long et structuré. Chaque point défendu tente de montrer l’inutilité du procès intenté par Montferrand. Cependant, les conclusions de la procédure opposant la Purge aux experts médicaux sont formelles : « Adce que de leur aucterité sans povoir ne commission ilz ont purgé, palpé et visité, en la ville de Clermont, Jehan Boschet homme suspect et malade de la maladie de lepre, que faire ne devoient ains appartient la visitacion aux consulz de la ville de Montferrand par privillege du roy […] parquoy conclud que chacun d’eulx soient condampnez et contrainctz a repparer l’abuz a la discrection de raison et chacun d’eulx en l’amande […] de cinquante livres. » [85]
33Finalement, ce sont les consuls de Montferrand et le procureur de la Purge qui obtiennent gain de cause. Toutefois, il convient de rappeler que dans cette affaire la Purge est à la fois juge et partie ! Les praticiens sont donc condamnés à cinquante livres d’amende pour « repparer l’abuz » par eux commis, c’est-à-dire pour avoir pratiqué de leur plein gré et sans l’autorisation des magistrats de la Purge une visite sur un suspect de lèpre. La « victoire » de la juridiction de Montferrand démontre le pouvoir de l’institution, mais surtout le monopole qu’elle exerce sur ces experts médicaux. Cette procédure est l’occasion de réaffirmer que le droit de statuer sur les personnes soupçonnées de lèpre n’appartient pas au corps médical, bien qu’expert en la matière, mais aux consuls de Montferrand, juges royaux de la Purge. Les médecins occupent donc une place particulière au sein de la cour : bien que spécialistes, ils demeurent les instruments de l’institution royale [86]. Pour asseoir son autorité et maintenir les experts médicaux à leur place, la Purge peut compter sur sa renommée, mais aussi sur d’importantes rémunérations. À l’issue de chaque visite médicale (une demi-heure à deux heures environ) [87], les experts sont invités à dîner par les magistrats de la Purge aux frais de la commune et reçoivent un confortable revenu : entre 10 et 40 sous [88]. À la même époque, un maçon perçoit en moyenne cinq sous pour une journée de labeur, tandis qu’un manœuvre n’en obtient que deux pour le même temps de travail [89] ; autant d’éléments permettant d’attacher les experts au tribunal de la Purge…
34La mise en place en Auvergne, et plus particulièrement à Montferrand, de la juridiction royale de la Purge vers la fin du xiiie siècle a pour but de lutter contre la maladie. Fondée sur des critères sanitaires adaptés à la lèpre, la Purge n’en demeure pas moins un tribunal utilisant une procédure juridico-médicale atypique et unique en France. Son fondement est inquisitoire comme dans l’ensemble des tribunaux royaux. Après dénonciation d’un suspect de lèpre ont lieu enquête et audition de témoins, prise au corps de l’accusé, convocation des représentants de paroisses et des témoins devant la cour. Mais, lors de l’audience, interviennent systématiquement les « gens savans, expers et cognoissant en tieulx cas ». C’est à eux que revient le soin de déterminer la présence ou non du mal de lèpre sur l’inculpé. Ce jury d’experts est indispensable aux juges qui ne peuvent rendre leurs sentences, et donc fonctionner, sans lui. Qu’en est-il alors de l’arbitrium des juges dans le rendu de leur sentence ? Comment pourraient-ils passer outre la décision médicale alors que le verdict de la maladie est irréversible et fait craindre le pire à la société ? Le rapport entre expertise et justice est ici particulièrement contraignant, aux dépens de la libre conscience des juges. Il l’est d’autant plus que certains experts font preuve d’une grande longévité professionnelle – parfois plus de quarante ans – et que la Purge veille à ce que ses experts ne lui échappent pas pour rester à son service exclusif. En échange, ces derniers reçoivent considération et rémunérations à hauteur des risques et de la responsabilité de la charge face à « icelle piteuse maladie de lepre ». Un système médico-légal s’est donc mis en place en Auvergne qui collabore avec la justice pour donner un résultat procédural hybride, et donne fictivement le dernier mot à la justice alors que la science est, de fait, toute puissante.
Les experts de la Purge (xive siècle-milieu xvie siècle) [90]
Rapport médical
11 juin 1417. Antoine Laurent, maître ès arts et licencié en médecine, déclare que Marguerite, fille de Jehan Goury et paroissienne de Contigny, est saine de la maladie de lèpre. Original sur simple feuillet papier, en latin ; 215 mm × 185 mm [91].
36Vobis dominis consulibus ville Montisferrandy ignotescat quod ego magister Antonius Laurentii expertam cum diligencia prout digvina (sic) Dey gracia dignata est ministrare Margaritam filiam quondam Johannis Goury parrochianam de Conteny [92] diocesi Claremontis cui inponebatur dictam Margaritam fore leprosam et a populo separandam ego igitur predictus facta expertacioni diligenti prout in isto casu fieri est consuetum et consideratum signis equivocis et univocis ipsam Margaritam judico non esse leprosam non obstante rubedine occulorum et ciliorum in hoc judico in conscientia mea fore verum salvo cum consilio saniori. Datum in loco de Herbes, XI die mense junii anno domino Mo CCCCo XVII.
37Antonius Laurentii, in artibus magistro et in medecina licenciatus.
Sentence de la Purge
27 août 1488. Grosse de sentence du tribunal de la Purge rendue contre messire Pierre Malsobroux, prêtre de Villosanges, déclaré lépreux par les experts (médecins et chirurgiens-barbiers) l’ayant « visité » ; le malade doit se retirer de la population saine et payer les frais de procédure. Contient le procès-verbal des médecins ayant examiné le suspect. Original sur parchemin, en français ; 475 mm × 320 mm, repli 35 mm. Sceau de la Purge sur queue de parchemin manquant [93].
39A tous ceux qui ces presentes lettres verront, les consulz de la ville de Monferrand, juges et maistres de la maison d’Erbers lez Montferrand [94] des gens entachés de la maladie de lepre es hault et bas pays d’Auvergne et autres pais circumvoisins et commissaires sur ce ordonné de par le roy notre sire, salut. Comme le procureur sur le fait de la Purge ampres ce qu’il luy estoit aparu par informacion messire Pierre Malsobroux, presbtre de la parroisse de Villousange [95], estre entaché de ladite maladie de lepre l’eust adjourné par devant nous audit Montferrand pour soy venir purger et estre examiné par gens espers assavoir mon s’il estoit entaché de ladite maladie et pour ce se soit comparu par devant nous ledit procureur, pour soy et ledit messire Pierre Malsobroux, pour soy d’autre partie, ampres proces fait par ledit procureur sur ce que dit est et oyer la deffence dudit Malsobroux tendent afin d’absolucion et d’avoir denonciateur a esté ordonné que sy ainsi estoit qu’il fust sain de ladite maladie ledit procureur seroit contrainct luy nommer denonciateur ensuyvant qu’il seroit esprouvé et purgé par maistres Francoix Charmolut, docteur en medecine, Pierre de Brioude, licencié en medecine, Reymond de Beyrieres, Taneguin Polard, Jehan Gueydon, Lauriens Ducoux, Gilbert Belon et Guillaume Barthelaiz, serorgiens, illec presents lesquelz en leur presence dudit Malsobroux et de messire George de Montreyros, curé de Villosange, Guillaume Beaufort, presbtre, Gervaix Secrestain et Gerauld Bonnel, luminiers dudit Vilosange, adjournés pour veoir fere ladite Purge iceulx medecins et serorgiens avons fait jurer aux Sainctes Euvangiles Notre Seigneur de bien et loyaulement esprouver ledit Malsobroux et nous raporter la verité du cas asavoir mon s’il estoit et est entaché de ladite maladie de lepre lesquelz ainsi l’ont promis et juré et nous ont fait leur rapport par escript comme sensuyt.
40Saichent tous qu’il apartiend que nous Francoix de Charmoluce, docteur en medecine, Pierre de Brioude, licencié en medecine, Reymond de Berrieres, Taneguin Polard, Lauriens Ducoux, Jehan Gueydon, Guillaume Berthelaiz, Gilbert Belon, sururgiens, par commandement des consulz de Montferrand, juges et maistres sur le fait de la Purge des gens entachés de la maladie de lepre, avons veu, maigné, esprouvé et visité messire Pierre Malsobroux presbtre demeurant au lieu de Melet [96] en la parroisse de Villesange pres du Montet de Gellat [97] et icelluy bien veu par hault et bas ainsi qu’il est acoustumé fere en telle matieres avons dit et rapporté par noz seremens sur ce faitz aux Sainctes Euvangiles Notre Seigneur ledit messire Pierre de Malsobroux estre infect et actainct de ladite maladie de lepre. Et premierement quant aux signes univoques trouvons que ses sursilz ou la plus grand partie, sont depilés, gros et enflés et pubereux, les yeulx rous et n’est pas le blanc d’iceulx la vraye blancheur maiz tire a vue couleur fusque, les aureilhes asses rudes et tubereuses, le nes retrainct, par dedans enflere et par dehors asses ouvert gros et enflé, les bolievres grosses et tubereuses mortes et fusques, le palaiz ulseré et alteré, la voix rauque, la veue asses orrible et espoventable, les cheveulx de sa teste ou la plus grand partie failhans de morrissement et de facille arrachement. Plusieurs autres signes y trouvons que appellons equivoques et premier trouvons qu’il est de dure cher insensible comme apart quant on le picque, les espaules grasses et oincteuses, son cuyr asses retirant a cuyr d’oye, son poux debille et doulx, son sang gros et noir pesant et adusté, l’aleyne puante que sont signes demonstrans ladite maladie de lepre pourquoy doit estre separé d’entre les gens sainctz. Ainsi signé : Chermolut, de Brioude, de Beyrierte, Polard, Gueydon, Belon et Faugerat par commandement desditz Berthelaiz et Ducoux.
41Veu lequel rapport ainsi a nous fait par lesdits medecins et sururgiens ensuyvant icellui avons dit et decleré que ledit de Malsobroux est infect et actainct de ladite maladie de lepre ensuyvant luy avons deffendu et deffendons la conversacion des gens sains ains sera mis et sequestré en une maladie (sic) apart comme les autres entachés de ladite maladie de lepre et en oultre l’avons condenné et condemnons envers lesdits curé et luminiers de ladite parroisse de Villosanges es despens et fraitz de la presente Purge qu’ilz ont payé es medecins, sururgiens et autres existens en ladite Purge. Si donnons en mandement au premier sergent sur ce requis que ces presentes en ce que requerent execucion mecte a execucion d’entre de point en point selon leur forme et teneur et neantmoings a la requeste desdits curé et luminiers adjourné a Montferrand par devant nous ledit Malsobroux pour venir veoir tauxer ou commectre a tauxer les despens et fraitz de ladite Purge car de ce fere audit sergent donnons pouvoir par vertu des pouvoir et auctorité a nous donné en ceste partie par le roy notre sire. Donné a Montferrand soubz le seel estably pour ladite Purge, le mecredi vingt septiesme jour d’aoust l’an mil quatre cens quatrevingtz et huyt.
42par commandement,
Mots-clés éditeurs : Purge, juridiction royale, Auvergne, expertise médicale, Moyen Âge, lèpre, Montferrand
Mise en ligne 22/06/2012
https://doi.org/10.3917/rhis.122.0292Notes
-
[1]
D’après une communication présentée au XLIIe congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011)?: Expertise et conseil au Moyen Âge.
-
[2]
La maladie est signalée pour la première fois au iie?siècle, puis elle s’installe de manière endémique en Francie occidentale du ve au viiie?siècle. Il faut ensuite attendre les xie et xiie?siècles pour voir réapparaître le mal. Jean-Noël Biraben, «?L’hygiène, la maladie, la mort?», dans Histoire de la population française. t. I, Des origines à la Renaissance, Jacques Dupâquier (dir.), Paris, puf, 1991, p. 453.
-
[3]
Françoise Bériac, «?Lépreux ou léproseries. Repérage critique et origine des maladreries en Aquitaine?», Santé, médecine et assistance au Moyen Âge. 110e congrès national des sociétés savantes, Montpellier 1985, Paris, Éd. du cths, 1987, p. 365-380. Id., «?Une minorité marginale du Sud-Ouest?: les Cagots?», Histoire, Économie et Société, 1987, vol. 6, no 1, p. 17-34. Id., Histoire des lépreux au Moyen Âge. Une société d’exclus, Paris, Imago, 1988. Id., Des lépreux aux cagots. Recherches sur les sociétés marginales en Aquitaine médiévale, Bordeaux, Fédération historique du Sud-Ouest, 1990.
-
[4]
Voir notamment François-Olivier Touati, Archives de la lèpre. Atlas des léproseries entre Loire et Marne au Moyen Âge, Paris, Éd. du cths, 1996. Id., Maladie et société au Moyen Âge. La lèpre, les lépreux et les léproseries dans la province ecclésiastique de Sens au milieu du xive?siècle, Bruxelles, De Boeck Université, 1998. Id. (dir.), Archéologie et architecture hospitalières, de l’Antiquité tardive à l’aube des Temps modernes, Paris, La Boutique de l’Histoire, 2004.
-
[5]
Bruno Tabuteau, Une léproserie normande au Moyen Âge?: le prieuré Saint-Nicolas d’Évreux du xiie au xvie?siècle, Rouen, thèse nouveau régime, 1996. Id. (dir.), Lépreux et sociabilité du Moyen Âge aux temps modernes, Paris, Publications de l’université de Rouen, Cahier du grhis, no 11, 2000. Id. (dir.), Étude des lépreux et des léproseries au Moyen Âge dans le Nord de la France. Histoire-Archéologie- Patrimoine, actes de la journée d’étude d’Aizier (avril 2005), Amiens, Publication du cahmer, vol. 20, 2007. Pascal Montaubin (dir.), Hôpitaux et maladreries au Moyen Âge. Espace et environnement, actes du colloque d’Amiens-Beauvais (2002), Amiens, Publication du cahmer, vol. 17, 2004.
-
[6]
Elma Brenner, Charity in Rouen in the Twelfth and Thirteenth Centuries (with Special Reference to Mont-aux-Malades), thèse de l’université de Cambridge, Emmanuel College, 2008. Damien Jeanne, Garder ou perdre la face?? La maladie et le sacré. Étude d’anthropologie historique sur la lèpre (Normandie centrale, occidentale et méridionale) du xie au xvie?siècle, thèse dactylographiée, Université Paris-Ouest-Nanterre La Défense, 2010.
-
[7]
Il est ainsi question des léproseries de Riom (1120-1121), Souvigny (ca 1137-1140), Brioude (1161), Cusset (ca 1170), Lavoûte-Chilhac (ca 1190-1195), Pessat (1192) et Montferrand (1195). Johan Picot, Atlas historique et archéologique des léproseries des anciens diocèses de Clermont et de Saint-Flour (xiie-xviie?siècles), dfs de prospection thématique annuelle, 2 vol., 2009, 461 p., archives du sra d’Auvergne.
-
[8]
Le sujet a été abordé une première fois dans le cadre d’un diplôme d’études supérieures d’histoire médiévale soutenu en 1959 et partiellement publié en 1962?: Albert Ilpide, La Lèpre en Auvergne. La léproserie d’Herbet, des de l’université de Clermont, 1959, 131 p. et Id., «?La lèpre en Auvergne au Moyen Âge et la léproserie d’Herbet à Montferrand?», Revue d’Auvergne, t. LXXVI, Clermont-Ferrand, 1962, p. 94-130.
-
[9]
Le nom de la cour varie dans le temps et en fonction de la langue employée (français, occitan et latin). Il est ainsi question de «?L’Espurge?» (1371), «?L’Espurgha?» (1383), «?La Espurga?» (1385), «?Espurge?» (1453), «?L’Expurge?» (1457), «?La Purge?» (1485), «?La Purgacion?» (1493), Judicium Purgie lepre (1540)… Toutefois, c’est bien le nom de «?Purge?» qui est le plus fréquent. Voir notamment ad Puy-de-Dôme, fonds de Montferrand (coté?: 3 E 113 dep II), bb 2, fol. 13-14?; cc 165, fol. 98v?; cc 170, fol. 126 et 164v?; cc 360, fol. 11?; ff 63, pièces 4 et 15 et ff 70, pièce 11. L’occitan «?espurgar?» désigne «?purger?» ou «?purifier?», ce qui traduit bien la vocation du tribunal de Montferrand?: Émil Lévy, Petit dictionnaire provençal-français, Heidelberg, Universitätsverlag, 1909, réédition, Nïmes, C. Lacour, 2005, p. 173.
-
[10]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 75, pièce 11 (1455).
-
[11]
Emmanuel Teilhard de Chardin, «?La première charte de coutumes de Montferrand?», Annales du Midi, t. III, 1891, p. 283-309. Pierre Charbonnier, «?La charte de Montferrand (traduction et explication)?», Montferrand 1196-1996. Conférences données pour le VIIIe centenaire de la charte de franchises. (Maison de l’éléphant, 1995-1996), Josiane Teyssot (dir.), Clermont-Ferrand, association Il était une fois Montferrand, 1996, p. 5-23.
-
[12]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 5, article no 157.
-
[13]
«?Item ung vidimus en parchemin fait soubz le seel es contractz a Montferrand le tiers jours de mars mil IIIC LXVIII d’une l’autre letre dedans inserée de l’an mil iiiC et cinq pour monstrer de l’antiquité du droit desdits consulz qu’ilz ont touchant la visitacion et Purge des entachez de lepre.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, FF 77, pièce 14.
-
[14]
Sur les lettres de 1292 voir an, J 270 A, no 4 et 5?; J 273, Auvergne II, no 9 (copie), J 832, no 24 (copie) et J 1145, no 4 (copie). Le roi avait déjà pu apprécier la ville lors d’un rapide séjour en novembre 1285. Ambroise Tardieu, Histoire de la ville de Montferrand et du bourg de Chamalières en Auvergne, Moulins, 1875?; réédition Marseille, Laffitte-Reprints, 1979, p. 21.
-
[15]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 6 et an, J 421, no 1. Josiane Teyssot, «?Le marc d’or de Montferrand?», Bulletin historique et scientifique de l’Auvergne, t. C, no 740, Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, 1999, p. 66.
-
[16]
an, J 303, no 1?: Ludovicus Dei gratia Francorum rex universis baillivis suis ad quod presentes littere pervenerint, salutem. Mandantes vobis precipimus quatinus dilectos et fideles burgenses nostros de Montefferando permittatis salvo ire et redire per totam terram nostram, libere et quiete, cum suis marcandesiis reddendo suas rectas consuetudines, neque sustineatis eos vel res suas occasionari vel arrestari seu etiam inpediri pro aliquibus debitis, nisi exinde sint plegii vel debitores. Actum apus Vicenas, anno domini Mo CCo XXV?o mense marcio.
-
[17]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, aa 8, pièce 1.
-
[18]
André Bossuat, Le bailliage royal de Montferrand (1425-1556), Paris, 1957?; réédition Clermont-Ferrand, Publications de la faculté des lettres et sciences humaines de Clermont-Ferrand, 1986. Éric Braure, Le bailliage royal de Montferrand d’après ses registres d’assises, de 1425 à 1456, Mémoire de IIe cycle, Université Jean-Moulin Lyon-III, 1998-1999.
-
[19]
C’est en 1361 que Jean le Bon a établi un bailliage qui porte le titre «?de Saint-Pierre-le-Moûtier et des exemptions de Berri et d’Auvergne?». Toutefois, cette ville étant trop éloignée de l’Auvergne, Charles V établit une lieutenance du bailliage à Cusset pour la juridiction des exempts d’Auvergne. André Bossuat, Le bailliage royal…, op. cit., p. 60 et 66. Pierre Durye, Le Bailliage de Saint-Pierre-le-Moûtier de sa création au milieu du xvie?siècle, thèse de l’École des chartes, 1943, t. I, p. 10-12 et 20-21.
-
[20]
Les diverses sessions des Grands Jours d’Auvergne tenus à Montferrand n’ont laissé que très peu d’archives. Il ne reste aujourd’hui qu’un seul registre, celui de 1481 (an, X1A 9213, septembre-octobre 1481). Les autres sessions auvergnates ne sont connues que par des mentions fortuites dans la masse documentaire?: ac Riom, cc 1 (1455)?; am Lyon, bb 5, fol. 242v (1454) et bb 7, fol. 53v (1456). René Fédou, Les hommes de lois lyonnais à la fin du Moyen Âge. Étude sur les origines de la classe de robe, Paris, Société d’édition «?Les Belles Lettres?», 1964, p. 107.
-
[21]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 58-77.
-
[22]
am Lyon, bb 5, fol. 242v et Marie Thouvenot, Les Délibérations consulaires de la ville de Lyon en 1455 (2 janvier-24 juillet. BB 5, fol. 245v-271v)?: transcription critique et synthèse, mémoire de Master 1, Université Jean-Moulin Lyon-III, 2010, p. 131-132.
-
[23]
Étude réalisée d’après 150 procès recensés entre le début du xive siècle et 1550.
-
[24]
En 1317, Jean XXII crée le diocèse de Saint-Flour, démembré de celui de Clermont, qui regroupe les archiprêtrés de Saint-Flour, Aurillac, Langeac, Brioude et Blesle?: Abel Poitrineau (dir.), Le diocèse de Clermont, Paris, Éd. Beauschesne, 1979 et Daniel Martin (dir.), L’identité de l’Auvergne (Auvergne, Bourbonnais, Velay), mythe ou réalité historique de l’Auvergne des origines à nos jours, Nonette, Créer, 2002, p. 423.
-
[25]
Branceilles et Curemonte (1447), Banassac (1493), Rougnat (1494) et La Mothe-Canilhac (1525). ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, FF 63, pièces 3, 27, 31?; ff 65, pièce 51 et ff 66, pièce 12.
-
[26]
ad Lot, 5 edp 055, cc 6, fol. 1-2 et 4v.
-
[27]
Hippolyte Dulac, «?Registre audiencier dans la justice de Couzan?», Bulletin de la Diana, t. IV, 1887-1888, p. 36.
-
[28]
Johan Picot, «?Juger les lépreux de haute Auvergne au Moyen Âge?», Revue de la haute Auvergne, t. LXXI?: «?Ladres, paouvres et folz?», juillet-septembre 2009, p. 277-292.
-
[29]
Plus de 245 pièces directement issues de la Purge recoupant 149 procédures (pour 168 sus-pects différents) dirigées entre le début du xive siècle et 1550 sont conservées (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63-66 et 70). À ces sources directes, il faut encore ajouter les très nombreux renseignements apportés par les registres de comptes et de délibérations municipaux de Montferrand (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, séries bb et cc). Enfin, il existe également un fonds considérable d’archives émises par la Purge entre 1569 et 1631 (ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 58-62, 67-69, 71-74 et 76).
-
[30]
À titre d’exemple, voir les témoignages suivants?: «?Pierre Bougiere […] dit par son serement savoir cognoistre ladite Catherine Blenche […] pour ce que sont d’une mesme parroisse laquelle a oy tenir reputer puis troys ans oy estre souspecte de la maladie de lepre et tel est le commun bruyt en ladite parroisse pour ce qu’elle a le visaige plombeux, moche et rouge?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 60 (1496). «?Glaude Rousson […] dict et rappourte […] cognoistre ledit Jehan du Py […] lequel est suspectioné de la maladie de lepre et est le bruict, famée, commune voix a ladite parroisse et es lieulx circumvoisins?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 64, pièce 40 (1523).
-
[31]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 23 (1493).
-
[32]
Ces témoins répondent à un questionnaire «?formaté?», constitué des interrogations suivantes?: Connaissez-vous le suspect et sa famille?? Y a-t-il eu dans son lignage des personnes lépreuses?? Accepteriez-vous de manger, boire et dormir avec le suspect?? Accepteriez-vous d’allier vos deux familles par le mariage de l’un de vos enfants avec l’un des siens?? Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 3 (1447), 22 (1494), 23 (1493), 30 (1496), 43 (1510) et ff 64, pièces 3 (1516), 12 (1520), 14, 18, 23 et 28 (1521).
-
[33]
La Purge incarcère les suspects de lèpre dans une des tours du château ou de la muraille portant le nom de «?Tour des Ladres?».
-
[34]
Messire Léonard Mazuer, prêtre et curé d’Herment, est ainsi condamné à 500 l.t. d’amende en mai 1494 pour s’être une nouvelle fois «?absenté de ladite ville de Montferrand ou il s’estoit soubzmis tenir son arrest?». Pierre Mathieu, paroissien d’Égliseneuve-près-Billom, est condamné à 50 l.t. d’amende en mai 1496, puis à 100 l.t. dès le mois de juillet suivant, faute de comparution devant la Purge. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 24 (1494) et 32-37 (1496). Sur la famille «?Mazuer?», voir Josiane Teyssot, «?Hommes de loi et notaires au xve?siècle en basse Auvergne. Autour de Jean Mazuer, précurseur de la Coutume d’Auvergne?», La Coutume d’Auvergne. Formation et expression d’un patrimoine juridique, Florent Garnier (dir.), Revue d’Auvergne, 125, no 559 (2011), p. 19-40.
-
[35]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 64, pièce 24 (1521).
-
[36]
Le témoignage des proches est également un élément important dans la preuve de la folie dans les procédures judiciaires de la fin du Moyen Âge et compte même plus que l’expertise médicale. Maud Ternon, «?La folie entre sens commun et définition experte. La difficile émergence de l’expertise médicale parmi les preuves de la folie au xive?siècle?», Hypothèses 2010. Travaux de l’École doctorale d’histoire, Paris, Publications de la Sorbonne, 2010, p. 129.
-
[37]
Les documents de la pratique bolonais (xiiie et xive?siècles) prouvent aussi les limites de l’expertise médicale en justice puisque «?certains médecins n’hésitent pas à réserver leur jugement ou simplement à rappeler qu’il vaut pour le moment présent?». Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice (Bologne, xiiie-xive?siècles)?», Expertise et conseil au Moyen Âge, actes du XLIIe congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011), à paraître.
-
[38]
En 1490, Anthoine Adreit, habitant de Chandèze, paroisse de Besse, reconnu lépreux par la Purge paye des frais de procédure s’élevant à 6 l.t. et 15 s. Hugues Olaiguol, habitant de Treignac, paroisse Saint-Cirgues près de Lavoûte-Chilhac, accusé de lèpre en 1521, paye quant à lui 24 l.t. 12 s. et 8 d. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 19 et ff 64, pièce 22.
-
[39]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 24?; sentence de la Purge condamnant Lyonard Masuer, prêtre et curé d’Herment (2 mai 1494).
-
[40]
Il est ainsi question de «?Jehan Roux [qui] estoit si malade qu’il ne pourroit venir a pie ni a cheval sans grand dangiers de sa personne?» ou encore d’un nommé «?Jehan Maistre le Vieulx, habitant en ladite parroisse de Flat [qui] ne peult aller de sa maison jusques a l’eglise de parroisse si n’est qu’il se fasse porter sur une beste?». De même, Marie Valhorgue affirme «?qu’elle ny scauroit aller [= à la Purge] actendu sa malladie et lesdits luminiers luy ont dit et respondu […] que aussi bien pourroit aller audit Montferrand comme elle avoit esté au Puy et ladite Vallorgue leur a respondu que quant elle y alla elle estoit bien mallade et est encores de present plus mallade a cause des effortz qu’elle a faict a y aller et neantmoins qu’estoient deux hommes a la tenir et encores elle tumba du cheval troys ou quatre foys?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 42 (8 août 1500)?; ff 64, pièce 45 (6 février 1523 n. st.) et ff 70, pièce 4, fol. 4v (15 mars 1540 n. st.).
-
[41]
Plusieurs textes des xive et xve?siècles précisent que l’examen médical se déroule à Herbet. Il est ainsi question d’«?ung mandement donné par Jehan filz de roy de France donné a Clermont le XIe jour de janvier mil IIIC LXXIIII par lequel est mandé contraindre ceulx qui sont entachés de ladite maledie venir a le d’Erbers estre purgés et visités?». De même, le procès-verbal de la visite médicale effectuée par Antoine Laurent, maître ès arts et licencié en médecine, sur la personne de Marguerite, habitante de Contigny (Allier) se termine ainsi?: datum in loco de Herbes, XI de mense junii anno Domini Mo CCCCo XVII. En 1483, c’est encore dans la léproserie d’Herbet que les juges de la Purge rendent leur sentence contre Doynet, habitant de Maringues suspect de lèpre?: «?Donné a Herbiers soubz le seel de ladite Purge le lundi dernier jour de juing l’an mil IIIIC IIIIXX et troys?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 2 et 8 et II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 4.
-
[42]
La construction de l’auditoire débute en septembre 1497 et prend fin en 1511. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 372, pièce 1, fol. 16v, 18v, 19v, 20v, 22 et cc 373, pièce 1.
-
[43]
Le Conseil d’État affirme cependant en décembre 1614 que Montferrand possède «?une jurisdiction pour la purgacion des malades de lepre pour lesquelles jurisdicions il y a un pallais basty par les consulz, bourgeois et habitans en un recoing esloigné des principalles rues fort mal sain a cause des tanneries, imnondices et eaues croupissantes qui les voisines […]?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, dd 6, pièce 13.
-
[44]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 373, pièce 1?: «?Robin Desve, masson, a afermé par serment avoir mesuré les murailhes de la chambre et audictoire que on a fait pour l’essercité de la Purge et rapporte par sondit serment qu’il a trente neuf brasses de murailhes en la presence de Anthoine du Chatellar et Reymone Pigay, le VIIIe jour de janvier mil IIIIc IIIIxx dix et sept?»?; cc 386, pièce 1?: «?Anthoine de Moncodas de leur bon gré confesse avoir eu et receu par les mains que dessus la somme de cinq solz tournois a cause de la vante d’une table pour l’audictoire de la Purge […] le VIIIe jour de mars l’an mil Vc et neuf.?»
-
[45]
La population semble recourir aux mêmes sens comme le prouvent les dépositions suivantes?: Petrus Leymaria affirme en 1447 que Thomas de Grezas a des signes de la lèpre comme nasum quasi vastatum et vocem raucam. Glaudre Gigot déclare en 1496 que «?Feraud est rouge parmy le visage et […] a la vouex quassé et rauche comme s’il estoit pris de l’estomant (sic) et morfondu?». En 1510, Guillaume Challe dépose «?que il cognoit bien Gerauld Bonvallet lequel est suspectioné d’estre actaing du mal de lepre […] par ce qu’il est coullecteur des deniers royaulx en ladite ville de Billom et que plusieurs hommes et femes de ladite ville fault qu’il approche de son alenne pour conter l’argent con luy bailhe en poiement a cause de la tailhe et que ilz veullent voir mestre leur poiement sur ledit pappier et a cause de se faeult qu’ilz aprochent de la alene dudit Bonvallet?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 3, fol. 6v (1447), pièce 30 (1496) et pièce 43 (1510).
-
[46]
Brun sombre, noir.
-
[47]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18?; la sentence sert de couverture au registre de délibérations de 1569.
-
[48]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 31 et ff 77, pièce 20.
-
[49]
Cette pratique est attestée en Auvergne dès 1525. L’examen n’a cependant pas été encadré par un médecin de la Purge?: «?Me Glaude, cirurgien de Saint Bonnet, saigna ledit Levrauld et apres qu’il eust eu de son sang il le passa a ung drapt et se trouve audit drapt les signes de ladite maladie de lepre ainsi que ledit depposant vit.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 66, pièce 29. Il semble cependant que la Purge agisse de la même manière comme le suggèrent les achats de la cour en 1510?: «?Item, pour les […] euspices, seel, linge et autres chouses necesseres a fere ladite visitacion, XV sous?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 52.
-
[50]
Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18, couverture du registre et ff 63, pièces 16 et 31?: «?son sang gros et noir, pesant et adusté?» (1488)?; «?c’est une superfluité de san deu a de apostumes froides?» (1491)?; «?le sant gros et afutz et corrumpu a coleur de plom?» (1493)?; «?l’espesse de quoy il est actaint est Alopicia qui est de sangt corrumpu et hafust?» (1493).
-
[51]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 20.
-
[52]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 16 (1491).
-
[53]
Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 31 (1493)?: «?Et empres la requeste faicte par ledit procureur ledit Urban et Anne Mounneau ont volu prandre jugement par monsire mestre Anne Daniel, docteur en medecine et Gilbert Belon, Guillaume Bartalaix et Huguet Pollart, lesqueulx ont fait serement sur les Sainctes Esvangilles bien et lealment les purger et en dire leur advis ainsi qu’il sansuit?: Veu le cas par nous de Hurban Tixier enpres visitacion fecte par hault et bas ainsi qu’il est acoustumé fere en tel cas, disons tous emsenble et concordablement que ledit Tixier n’a aucun signe en luy par quoy doye estre separé d’antre les saimctz.?»?; ff 63, pièce 31 (1493)?: «?Veu le cas de Roubert Bertrand, dit Martinet, et enpres serement par nous fait […] disons que ledit Roubert Bertrand est actaint et infect de la maladie de lepre et l’espesse de quoy il est actaint est Alopicia qui est de sangt corrompu et hafust et pour ce disons tous concordablement que ledit Bertrand doit estre separé des autrez gens sains.?»
-
[54]
La consignation des conclusions de l’expertise peut causer débat quand les experts sont multiples. Voir Franck Collard, «?Secundum artem et peritiam medicine. Les expertises dans les affaires d’empoisonnement à la fin du Moyen Âge?», Expertise et conseil au Moyen Âge, actes du XLII?e congrès de la shmesp (Oxford, 31 mars-2 avril 2011), à paraître. Voir également Chiara Crisciani, «?Éthique des consilia et de la consultation?: à propos de la cohésion morale de la profession médicale (xiiie-xive?siècles)?», Médiévales, no 46, Paris, puv, 2004, p. 23-44.
-
[55]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 18 (1491)?: «?Veu ledit rapport … avons dit et disons ladite Margarite non estre entaicher (sic) de ladite maladie de lepre et luy avons permys et permectons d’aler venir et converser avec les autres gens sains non entaichés de ladite maladie?» et ff 63, pièce 41 (1499)?: «?Veu le rapport des medecins et cirurgiens cy ampres nommez avons dit et declairé, disons et declairons, ledit maistre Anthoine Rochefort notaire estre entaché de ladite maledie de lepre par quoy en ensuivant l’avons condemné et declairé estre tel et ensuivant luy avons interdit la communication des sainctz mesmement les lieux comme l’esglise, fontaines, fours, molins, rivieres, place et autres lieux subiectz a ladite maledie et que sera contrainct aller demeurer es malederies avecques les entachés d’icelles.?»
-
[56]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 53.
-
[57]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 2, fol. 13v-14.
-
[58]
Il faut dire que les revenus de la Purge sont «?la moytié a appliqué au roy notresire et l’autre en euvres pitieuses et reparacion de la maison d’Erbers?». ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 24 (1494).
-
[59]
D’après l’étude d’au moins 45 experts différents officiant pour la Purge entre le début du xive siècle et 1542. Voir notamment ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63-ff 77.
-
[60]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 165, fol. 98v (1371) et ff 63, pièces 1-2 (1417). Le registre coté cc 165 dans Emmanuel Teilhard de Chardin, Inventaire des archives communales antérieures à 1790?: ville de Clermont-Ferrand?: fonds de Montferrand, t. I, Clermont-Ferrand, 1902, p. 189, déclaré perdu il y a plusieurs décennies, a été retrouvé par nos soins le 23 février 2011 (il était alors coté cc 544). Cet important registre, rédigé en occitan et couvrant la période 1355-1378, est en cour d’étude et sera publié en collaboration avec R. Anthony Lodge, professeur émérite à l’université de Saint-Andrews en Écosse, par l’École nationale des chartes.
-
[61]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 5.
-
[62]
R. Anthony Lodge, Le plus ancien registre de comptes des consuls de Montferrand en provençal auvergnat, 1259-1272, Clermont-Ferrand, Mémoires de l’Académie des sciences, belles-lettres et arts de Clermont-Ferrand, no XLIX, 1985, p. 29.
-
[63]
Ibid., p. 31 (barber, 1273). ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 52?: «?Robert lo barbeir?» (sans date, début du xive?siècle), cc 174, pièce 8, fol. 3v?: «?Besoner lo barbeirs?» (sans date, début du xive?siècle), cc 165, fol. 28v et 30?: «?maystre P. lo barbeyr?» (1360), cc 171, fol. 9v?: «?Malahaura le barbier?» (1385) et cc 173, fol. 3v?: «?Pierre Guito lo barber?» (1400). Il est également fait mention d’un «?Rotgeir lo Barbeirs?», consul de Montferrand en 1288. Toutefois, rien n’indique que le patronyme soit révélateur d’une pratique médicale. R. Anthony Lodge, Les comptes des consuls de Montferrand (1273-1319), Paris, École des chartes, 2006, p. 39 et 68. Enfin, l’existence d’une «?soignante?» vivant au quartier de La Saunerie à Montferrand en août 1378 est attestée dans les arrérages de la taille?: aquela que ve las malaudias, IIII s. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 170, fol. 25.
-
[64]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 2, fol. 8. Nomination par les consuls de Montferrand de maître Philippe de Boulogne comme médecin de la maladrerie d’Herbet et de la Purge (27 décembre 1461).
-
[65]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, II 1, liasse 3, pièce 2, fol. 3v.
-
[66]
Il convient de préciser qu’à la fin du Moyen Âge la cité épiscopale possède au moins cinq hôpitaux et trois léproseries quand Montferrand ne compte qu’un établissement de chaque type. Voir Jean-Luc Fray, Grégory Goudot, Johan Picot et Annie Regond, «?Des origines hospitalières à la fondation de l’Hôtel-Dieu (1773)?», dans L’Hôtel-Dieu de Clermont. Histoire d’un établissement hospitalier, Bernard Dompnier (dir.), Clermont-Ferrand (à paraître) et Johan Picot, Atlas historique et archéologique…, op. cit. (n. 7), t. II, p. 171-253.
-
[67]
ad Puy-de-Dôme, 4 F 62, 28 J 64, 3 G, armoire 5, sac D, cote 13 et 3 G0?101, cote 7. Danielle Jacquart, Dictionnaire biographique des médecins en France au Moyen Âge. Supplément, Genève, Droz, 1979 et Emmanuel Grélois, «?Du vir honestissimus au discretus vir?: critères et dynamiques de la différenciation sociale à Clermont et en Basse-Auvergne du xie au xive?siècle?», Distinction et supériorité sociale (Moyen Âge et époque moderne), actes du colloque de Cerisy-la-Salle des 27-30 septembre 2007, Laurence Jean-Marie et Christophe Maneuvrier (dir.), Publications du crahm, Caen, 2010, p. 215.
-
[68]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 4 (1453) et 5 (1443).
-
[69]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, II 1, pièce 2, fol. 23v?: «?Plus ung autre vidimus faict soubz ledict seel de certaines letres de Pierre Adam escuyer, commandeur de la maison et enfermerie d’Erbers par lesquelles oy le rapport des expertz il declera ung nommé Roubert Nonnes de Sainct Yvoine apres qu’il fust visité en la presance dudict visiteur par expertz et oy leur rapport icelluy Roubert n’estre ancunement actainct de ladicte malladie de leppre dacté de l’an mil troys cens soixante huict.?» Or, Pierre Adam est maître d’Herbet et de la Purge entre 1322/28 et 1346. La Purge d’Aurillac en haute Auvergne s’adjoint, quant à elle, le conseil d’experts dès 1298?: Quod si aliquis de villa Aureliaci dicatur suspectus de lepra, quod antequam de hiis sollempnis fiat inquisitio seu informatio ne contra sanum aliqua fiant quæ ad infamiam ejus cedant?; judex domini abbatis, vocatis consulibus aut duobus ex ipsis et aliis bonis viris qui de talibus habeant experientiam vel habere dicantur, se informet secrete cum eis an de lepra sit et presumatur suspectus… Johan Picot, «?Juger les lépreux de haute Auvergne…?», op. cit. (n. 28), p. 288.
-
[70]
Franck Collard, «?Secundum artem et peritiam medicine…?», op. cit. (n. 54). Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice…?», op. cit. (n. 37). C’est aussi l’Italie qui fournit les premières expertises médicales de la lèpre au xiiie?siècle (Sienne, 1250 – Castiglione del Lago, 1261 – Pistoia, 1288). Luke Demaitre, Leprosy in Premodern Medicine. A Malady of the Whole Body, Baltimore, The Johns Hopkins University Press, 2007, p. 37.
-
[71]
Joseph Shatzmiller, Médecine et justice en Provence médiévale?: documents de Manosque, 1262-1348, Aix-en-Provence, Publications de l’université de Provence, 1989.
-
[72]
Danielle Jacquart, Le Milieu médical en France du xiie au xve?siècle, Genève, Droz, 1981, p. 189.
-
[73]
Olivia Faucher, Les Médecins experts à la fin du Moyen Âge entre pratiques médicales et pratiques judiciaires, Sarrebruck, Éditions universitaires européennes, 2010.
-
[74]
Marilyn Nicoud et Joël Chandelier, «?Les médecins en justice…?», op. cit. (n. 37). Pour le royaume de France se reporter à l’exemple de la ville de Dijon où, au xve?siècle, les médecins entretiennent des relations particulières avec les autorités judiciaires et aident «?à l’élaboration de la sentence?». Nicole Gonthier, «?Les médecins et la justice au xve?siècle à travers l’exemple dijonnais?», Le Moyen Âge, t. CI, no 2, 1995, p. 277-295.
-
[75]
Sur le consulat de Montferrand et ses attributions voir Josiane Teyssot, Le Réseau urbain auvergnat à la fin du Moyen Âge. L’exemple de Montferrand, hdr en cours.
-
[76]
Yves Mausen, «?Ex scientia et arte sua testificatur. À propos de la spécificité du statut de l’expert dans la procédure judiciaire médiévale?», Rechtsgeschichte. Zeitschrist des Max-Planck-Instituts für europäische Rechtsgeschichte, no 10, 2007, p. 127.
-
[77]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 165, fol. 98v et ff 63, pièces 1, 2 (infra annexe 2), 4 et 5.
-
[78]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 41 (1499)?: «?Nous Pierre de Lovent, licencié en medecine a Paris, Guillaume Barthelay, Gilbert Bellon et Jehan Bohet, barbiers et ciurgiens, habitants de la ville de Montferrand, veu et visité maistre Anthoine Rochefort, notaire habitant de la ville d’Erment, pour les parties de son corps sellon l’art de medecine et cirurgie par lesquelles parties de son corps veuez et visitées disons tous d’un commun acord et consentement que ledit maistre Anthoine de Rochefort estre entaché de la maledie de lepre d’une espesse nommée Leonina a cause de quoy disons qu’il doit estre de separé de la communication des saimctz et estre mis entre les autres entachés de ladite maledie. En tesmoing de ce avons signé ces presentes de nozs seings manuelz cy mis.?»
-
[79]
André Brun (Andreas Bruni) s’établit à Montferrand dès 1509. Il est maître ès arts et docteur en médecine. Il s’est inscrit à la faculté de Montpellier le 3 octobre 1505 et a suivi les cours de Pierre Trémolet, docteur et professeur. Il exerce pour le compte de la Purge entre 1515 et 1523, date à laquelle il est officiellement «?armé medecin de la ville?» de Montferrand par les consuls (Délibération du 20 septembre 1523). Marcel Gouron, Matricule de l’université de médecine de Montpellier (1503-1599), Genève, Droz, 1957, p. 7 et 225 et ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 7, pièce 12.
-
[80]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièces 26 et 27 (17 et 23 avril 1494).
-
[81]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 4.
-
[82]
Ibid.
-
[83]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 8. Il convient de noter que le roi de France renvoie le procès devant son bailli de Saint-Pierre-le-Moûtier (ou son lieutenant à Cusset) alors qu’un bailliage royal existe à Montferrand depuis 1425. Le roi craint-il un manque d’impartialité de la part des Montferrandais??
-
[84]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièces 4-7.
-
[85]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 5.
-
[86]
Le monopole de la Purge sur les experts ne semble concerner que la maladie de lèpre. En effet, en 1527, Jehan Bohet examine «?une femme qui avoit servy le serviteur de Pegot mort de peste?». En 1532, avec Léonard Doduyt et Pierre Richomme, il examine encore des hommes suspectés de peste à Montferrand. Dans les deux cas, les praticiens sont rémunérés par le consulat montferrandais et ne sont pas inquiétés par la Purge. En dehors de la lèpre, les experts demeurent donc libres d’exercer. ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 241, fol. 26 (1526) et cc 246 (1532).
-
[87]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 66, pièce 33?: «?avons faict fere le serment esdit […] cirurgiens de bien et loyaulement proceder a ladite visitacion et nous en rapporter la verité […] ce qu’ilz ont promis et juré faire, lesquelz se sont retirez apart avec ladite Benoiste Merle et entour dymys heure apres sont revenuz par devant nous avec ladite Merle et nous ont faict leur rapport.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 70, pièce 10?: «?Lesdits medecin et cirurgiens se sont retirez apart avec ladite Vailhorgue au lieu acoustumé a faire telles visitacions et environ une heure et demye ou deux heures apres sont revenuz par devant nous.?» ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 77, pièce 17?: «?Desdits expertz […] se sont mys et retirés apart avec ladite Freydefont au lieu acoustumé faire telles visitacions et envyron une heure après sont revenuz par devant nous.?»
-
[88]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, cc 360, fol. 11?: «?Ont plus payé a ledit Levaix la somme de douze solz six deniers tournois pour donner a disner a cinq medecins et ausdits consulz quant furent a la Purge de Loys Bonhomme ainsi qu’il le a affermé. Fait le XXe jour d’aoust mil IIIIC IIIIXX et cinq.?»
-
[89]
Voir le tableau intitulé «?Prix et salaires à Montferrand (1260-1490)?», dans André-Georges Manry et Roger Sève, L’histoire vue de l’Auvergne, t. I, 1re partie, Clermont-Ferrand, De Bussac, 1959, p. 194-195.
-
[90]
Les crochets désignent l’origine supposée de l’expert.
-
[91]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, ff 63, pièce 2.
-
[92]
Contigny?: ch.-l. de com., cant. Saint-Pourçain-sur-Sioule, arrond. Moulins (Allier).
-
[93]
ad Puy-de-Dôme, 3 E 113 dép II, bb 18, acte servant de couverture au registre de délibérations de 1569.
-
[94]
Il s’agit de la léproserie communale installée à Herbet au sud-est de Montferrand sur l’actuelle commune de Clermont-Ferrand (Puy-de-Dôme).
-
[95]
Villosanges?: ch.-l. de com., cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[96]
Mallet?: l.-d., com. Miremont, cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[97]
Montel-de-Gelat?: ch.-l. de com., cant. Pontaumur, arrond. Riom (Puy-de-Dôme).
-
[98]
Me Durand Faugerat?: notaire de Montferrand et greffier de la Purge (21 juin 1486-31 octobre 1489).