Notes
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[1]
Elle est à nouveau présente, non dans l’ordonnance relative à l’enfance délinquante, mais dans l’article 122-8 du Code pénal.
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[2]
L’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante sera introduite dans le Code pénal dans ce même livre II.
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[3]
Archives Parlementaires de 1787 à 1860. Recueil complet des débats législatifs & politiques des chambres françaises, Paris, Paul Dupont, 1887, tome 27, p. 5.
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[4]
Ibid., p. 5.
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[5]
Ibid. p. 5. Cette proposition est faite par Pierre Victor MALOUET.
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[6]
Pierre LASCOUMES, « Les mineurs et l’ordre pénal dans les codes de 1791 et 1810 » in Michel CHAUVIERE, Pierre LENOËL, Éric PIERRE, (dir), Protéger l’enfant. Raison juridique et pratiques socio-judiciaires (XIXe-XXe siècles), Rennes, Presse Universitaires de Rennes, 1996, p. 40.
-
[7]
Archives Parlementaires..., op. cit., p. 5.
-
[8]
Article 2 du Titre V du Code pénal de 1791.
-
[9]
Article 66 du Code pénal de 1810. Il est ainsi rédigé : « Lorsque l’accusé aura moins de seize ans, s’il est décidé qu’il a agi sans discernement, il sera acquitté ; mais il sera, selon les circonstances, remis à ses parents, ou conduit dans une maison de correction pour y être élevé et détenu pendant tel nombre d’années que le jugement déterminera, et qui toutefois ne pourra excéder l’époque à laquelle il aura accompli sa vingtième année. »
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[10]
Sur les lieux du crime voir Dominique KALIFA, L’encre et le sang. Récits de crimes et société à la Belle Époque, Paris, Fayard, 1995, pp. 111-117 ; Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, chapitre premier et chapitre 5 ; Frédéric CHAUVAUD, De Pierre Rivière à Landru. La violence apprivoisée au XIXe siècle, Belgique, Brepols, 1991, chapitre 6.
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[11]
Dominique KALIFA, Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, p. 115
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[12]
Voir bien sûr l’ouvrage fondamental de Louis CHEVALIER, Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle, Paris, Plon, 1958.
-
[13]
Jean-Jacques YVOREL, « De Delacroix à Poulbot, l’image du gamin de Paris », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière », n° 4, 2002, pp. 39-72.
-
[14]
Jean-Jacques YVOREL, « L’enfermement des mineurs de justice au XIXe siècle, d’après le Compte général de la justice criminelle », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière ». Le temps de l’histoire, n° 7, décembre 2005, p. 100.
-
[15]
Inusité jusqu’en 1840, cantonné généralement sous les 10 % jusqu’en 1871, le recours au non-discernement dans les jugements des contraventions atteint les 21 % en 1872 et les 43 % en moyenne quinquennale pour les années 1900-1904.
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[16]
Le taux d’incarcération mesure le nombre de peines de prison par rapport au nombre de personnes jugées par les tribunaux. Il faut le distinguer du taux de détention qui mesure le nombre de personnes privées de liberté au regard de la population générale. Le taux d’incarcération est donc indépendant du nombre de personnes arrêtées et jugées et de la durée des peines, deux facteurs qui influent sur le taux de détention.
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[17]
Sur ce point notre article « La famille, l’enfant et la justice au XIXe siècle », Dialogue, n° 194, décembre 2011, pp. 9-20.
-
[18]
Dominique KALIFA, « La fin des “classes dangereuses” ? Ouvriers et délinquants dans la série des “Fantômas” (1911-1913) » in Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, pp. 115-128.
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[19]
Agnès THIERCE, Histoire de l’adolescence, Paris, Belin, p. 144.
-
[20]
Loi du 12 avril 1906 modifiant les articles 66, 67 du Code pénal, 340 du Code d’instruction criminelle et fixant la majorité pénale à l’âge de dix-huit ans, JO, lois et décrets, 14 avril 1906, p. 2449 ; Duvergier, tome 106, 1906, p. 143. Pour une analyse plus complète de cette loi Pascale Quincy-Lefebvre, « Droit, régulation et jeunesse. Réforme de la majorité pénale et naissance des 16-18 ans à la Belle Époque » in Ludivine BANTIGNY, Ivan JABLONKA, Jeunesse oblige. Histoire des jeunes en France XIXe-XXe siècle, Paris, PUF, 2009, pp. 95-108.
-
[21]
L’essentiel de ces débats a été publié dans « Abolir la peine de mort. Le débat parlementaire de 1908 », Jean Jaurès. Bulletin de la société des études jaurésiennes, n° 126, 1992 ; voir aussi Jean-Claude FARCY (avec la collaboration de Marc RENEVILLE), La peine de mort en France de la Révolution à l’abolition, exposition virtuelle : www.criminocorpus.cnrs.fr
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[22]
Rapport de M. Cruppi à la chambre des députés le 10 avril 1906, cité par Duvergier, tome 106, 1906, p. 144.
-
[23]
Sur « L’énervement de la répression » voir Dominique KALIFA, « Magistrature et “crise de la répression” à la veille de la Grande guerre (1911-1912) », Vingtième siècle, n° 67, juillet-septembre 2000, pp. 43-59.
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[24]
Rapport de M. Cruppi, op. cit., p. 144.
-
[25]
Alain CORBIN, Les filles de noce, misère sexuelle et prostitution (XIXe siècle), Paris, Aubier, 1978, rééd. Flammarion 1982, pp. 478-480.
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[26]
Émile GARÇON, « Discours de M. Garçon », Revue pénitentiaire, 1905, p. 753.
-
[27]
Par exemple le Bureau central des sociétés de patronage qui dénonce dans les années 1880-1890 les colonies pénitentiaires, adresse en 1903 une pétition aux membres de la magistrature qui est un vibrant plaidoyer pour les maisons de corrections qui « ressemblent à des écoles ». Éric PIERRE, « Les colonies pénitentiaires pour jeunes détenus : des établissements irréformables (1850-1914) », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière ». Le temps de l’histoire, n° 5, septembre 2003, p. 58.
-
[28]
Tribunaux pour enfants et adolescents. – Application de la loi du 22 juillet 1912 Circulaire de la Chancellerie du 30 janvier 1914, Journal des parquets, 1914, n° 4-5, p. 39.
-
[29]
René GARRAUD, Précis de droit criminel, contenant l’explication élémentaire de la partie générale du Code pénal, du Code d’instruction criminelle et des lois qui ont modifié ces deux codes, 15e édition, refondue et mise au courant par Pierre GARRAUD, Bordeaux, J. Bière & Paris, Sirey, 1934, p. 269.
-
[30]
Pierre GARRAUD, Marcel LABORDE-LACOSTE, Précis élémentaire de droit pénal, Paris, Sirey, 1936, cité par Philippe ROBERT, Le droit des mineurs. Sa place et son rôle dans l’évolution du droit français contemporain, dact., sd, p. 179
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[31]
Pour une illustration locale de cette politique voir Éric PIERRE, Samuel BOUSSION, Delphine GRUAU, David NIGET, Analyse de la délinquance et de la violence en Maine-et-Loire : approches historique et archivistique (1870-années 1950), Rapport remis à la Direction de Protection judiciaire de la jeunesse, octobre 2002, pp. 180-199 et 319-322.
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[32]
Nouveau nom donné aux colonies correctionnelles à partir de 1927.
-
[33]
Henry GAILLAC, Les maisons de correction, 1830-1945, Paris, Cujas, 1991 [1970], pp. 261-302.
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[34]
] « Loi du 27 juillet 1942 relative à l’enfance délinquante. Rapport au maréchal de France, chef de l’État français », JO de l’État français, 13 août 1942, p. 2778.
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[35]
L’auteur renvoie aux deux conceptions que nous avons évoquées plus haut.
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[36]
Henri DONNEDIEU DE VABRES, Traité de droit criminel et de législation pénale comparée, Paris, Librairie du recueil Sirey, 1947, p. 184.
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[37]
Henry MICHEL, Daniel PICAl, La protection judiciaire de la jeunesse, Vaucresson, CFEES, Service études, 1984, p. 67.
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[38]
Bulletin criminel de la Cour de cassation, 1957, n° 840, cité par François TOURET de COUCY, Enfance délinquante, Paris, Répertoire pénal Dalloz, novembre 2005, p. 14.
-
[39]
Dans de nombreux jugements, le magistrat se contente d’écrire, « attendu la personnalité du mineur » sans préciser à quelles caractéristiques de la personnalité il fait allusion.
1« La distinction entre les mineurs de treize ans et les mineurs de dix-huit ans disparaît comme aussi la notion de discernement, qui ne correspond plus à une réalité véritable. » Cette affirmation de l’exposé des motifs de l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante a, depuis, été contestée à la suite, notamment, de certains arrêts de la Cour de cassation. Pour autant, la disparition de cette notion ne fait aucun doute pour les juristes et les magistrats de la Libération. Comment cette notion, pilier de toutes les politiques pénales diligentées à l’égard des mineurs pendant un siècle et demi, disparaît-elle, au moins provisoirement [1], du paysage juridique et judiciaire français ? Pour comprendre pourquoi les réformateurs de la justice des mineurs militent, dès la fin des années trente, pour la suppression du discernement, il convient de voir comment cette notion a été construite, quelle place elle occupe dans le droit pénal et surtout quels usages judiciaires on va en faire durant un siècle et demi.
Construction de la notion de discernement
2 La question de la responsabilité est centrale dans le droit des mineurs. Rappelons que dans le Code pénal de 1810, les articles concernant le plus spécifiquement cette population (articles 66 à 69) sont contenus dans le livre II qui a pour titre Des personnes punissables, excusables ou responsables, pour crimes ou pour délits [2]. La singularité de la justice pénale des mineurs a toujours à voir avec la question de la responsabilité.
3 Les députés de la Constituante n’ont pas retenu l’idée d’une irresponsabilité absolue du mineur quel que soit son âge, mais celle d’une irresponsabilité au cas par cas fondée sur la notion de discernement. Ce critère est retenu malgré quelques oppositions comme celles de Pierre Victor Malouet ou de Dominique Joseph Garat. « Alors la preuve vous l’abandonnez aux jurés. Et où chercheront-ils la preuve du discernement ? Dans l’âme du coupable reconnu : elle est fermée à leurs yeux. Quoi de plus arbitraire, quoi de moins raisonnable. Je demande que cet article soit écarté » [3], s’exclame Joseph Garat, le futur ministre de la Justice. L’avocat du tiers-état, Jérôme Legrand, rappelle alors que « les jurés jugent, non par la masse calculée des preuves, mais par leur conscience si l’accusé est coupable ou non » avant d’ajouter à l’adresse de Garat « le préopinant veut toujours oublier que le juré peut dire que tel coupable est excusable. D’après cela, il y a parité de raison à ce que, dans le cas proposé par votre article, le juré décide si tel coupable peut être excusé par défaut de discernement » [4]. Le royaliste Pierre Victor Malouet, par ailleurs ardent défenseur de l’esclavage, réplique que le jury pourra être abusé « par l’astuce d’un jeune homme » et être ainsi conduit à prononcer une « absolution » à l’égard « d’un très mauvais sujet ». Il se demande alors pourquoi les membres de la commission n’ont « pas adopté, pour l’instruction du juré l’enquête préalable sur la vie et les mœurs de l’accusé » [5]. L’idée est rejetée par le rapporteur, Le Pelletier de Saint-Fargeau, qui considère que la notion de discernement peut être appréciée dans les circonstances de fait. Il est suivi par l’assemblée. Peut-on dire qu’avec la notion de discernement « l’articulation du psychologique avec le juridique est déjà posée » [6] ? C’est, nous semble-t-il, quelque peu anachronique, la notion même de psychologie n’a pas au XVIIIe siècle le sens qu’elle prendra au XIXe et a fortiori au XXe siècle. Sauf peut-être chez Joseph Garat qui invoque « l’âme », le discernement, pour autant qu’on puisse l’appréhender au regard du caractère succinct des débats du 6 juin 1791, renvoie plus à un jugement moral fondé sur l’acte transgressif qu’à un degré de maturité psychologique. L’exemple donné par Le Pelletier de Saint-Fargeau plaide en ce sens : « Voici un fait dont malheureusement j’ai été juge. Un enfant âgé de 11 ans, fils d’un boucher, étant en querelle avec sa sœur, elle lui donna un soufflet. [...]. Le jeune homme de 11 ans dissimule, quitte sa sœur sans apparence de dépit. Il s’en va à la boutique de son père, prend un couteau de boucher, revient trouver sa sœur et lui dit : “Regarde le poisson qui passe dans l’eau.” Dans l’instant où sa sœur se baisse, il lui enfonce dans la poitrine le couteau. Il retire le couteau, jette sa sœur la tête la première dans l’eau, avec le plus grand sang-froid, lave le couteau et s’en retourne tranquillement dans la maison de son père. Il est certain que quand bien même l’enfant aurait joué l’imbécillité la plus marquée, les témoins qui auraient rendu compte aux jurés de ces circonstances atroces, n’auraient pas pu laisser de doute au juré sur cette triste certitude que l’enfant avait commis avec discernement un grand crime. » [7] L’analyse n’a rien de psychologique ou même de mental pour rester dans le vocabulaire de l’époque. Elle est bien factuelle et morale et c’est finalement l’intention coupable qui est recherchée dans les faits.
4 Les jurisconsultes de l’Empire conservent le même principe d’une réponse au cas par cas fondé sur le discernement, dont le contour n’est pas mieux défini en 1810 qu’en 1791. Par la suite, de loin en loin, dans quelques précis de droit, on cherche encore à définir le discernement, hésitant entre une simple conscience d’accomplir un acte illicite perceptible dans la forme même d’accomplissement de la transgression (le plus souvent c’est la préméditation qui est la marque du discernement) et une conception plus large mi-psychologique (développement suffisant des facultés mentales), mi-sociologique (condition d’éducation), comme élément constitutif du discernement.
5 Mais au-delà des discours de doctrine sur la définition du discernement, pour l’historien du social, c’est l’usage juridique puis judiciaire que l’on va en faire qui, en dernière analyse, importe.
Usage juridique de la notion
6 Sitôt ce principe intégré au droit français, les députés de la Constituante définissent les conséquences de sa mise en œuvre : « Si les jurés décident que le coupable a commis le crime sans discernement, il sera acquitté du crime ; mais le tribunal criminel pourra suivant les circonstances, ordonner que le coupable sera rendu à ses parents, ou qu’il sera conduit dans une maison de correction pour y être élevé et détenu pendant tel nombre d’années que le jugement déterminera, et qui toutefois ne pourra excéder l’époque à laquelle il aura atteint l’âge de 20 ans. »
7 Cet article [8] est adopté sans débat et repris quasi à l’identique dans le Code pénal de 1810 [9]. La maison de correction n’étant rien d’autre qu’une prison, la mise en œuvre de la notion de discernement aboutit à la construction d’un curieux objet juridique : le mineur virtuellement acquitté et concrètement incarcéré. Les magistrats de l’Empire et de la Restauration ont-ils conscience de l’iniquité du dispositif ? Toujours est-il, pour autant qu’on puisse le saisir en l’absence de statistiques nationales, qu’ils utilisent peu l’article 66 du Code pénal et l’envoi en correction.
8 En fait, c’est avec la monarchie de Juillet et la mise en place des premières réponses pénales spécifiques à destination des mineurs, colonie agricole et prison de la petite Roquette à Paris que la notion de discernement devient le principal levier de la politique pénale menée à l’égard des mineurs.
Discernement et pratiques judiciaires au temps des « classes dangereuses »
9 Les années qui suivent la chute du premier Empire voient la perception et la description des menaces criminelles changer radicalement. Tout d’abord le péril criminel s’urbanise et la « sombre ruelle » remplace le « grand chemin » [10]. Cette migration « précipite l’identification de la menace criminelle sous les traits des nouvelles couches de migrants prolétarisés et entassés dans les quartiers paupérisés des cités » [11]. Bref, la délinquance est l’affaire de « classes dangereuses » largement confondues avec les « classes laborieuses » [12]. Les enfants sont inclus dans cette lecture de la délinquance. Le gamin de Paris, enfant issu des classes dangereuses, devient alors l’archétype du délinquant juvénile [13]. Cette « sociologie » de la délinquance guide les politiques pénales jusqu’à l’installation de la République.
10 La croissance de l’utilisation de l’article 66 commence en 1839. Alors que, en 1838, seuls 13 % des mineurs jugés par les tribunaux correctionnels sont considérés avoir agi sans discernement, en 1839, la proportion est de 23 %. La barre des 50 %, atteinte une première fois en 1854, est définitivement dépassée en 1861. À la fin du XIXe siècle, nous franchissons le seuil de 70 % puisque la moyenne quinquennale s’établit à 71 % [14]. Le recours à la notion de discernement finit même par concerner la matière « contraventionnelle » [15]. Rapidement, c’est l’article 66 qui détermine le taux d’incarcération [16].
11 Au début de la Monarchie de Juillet, 78 % des mineurs sont incarcérés à la suite d’une condamnation « classique » et 22 % après un acquittement et un envoi en correction. Dès 1843, les corrections l’emportent sur les condamnations, lesquelles, après 1850, représentent rarement plus de 40 % des incarcérations.
12 Il y a en fait une véritable instrumentalisation du discernement. Ce n’est pas la maturité du mineur qui fonde le choix entre discernement et non discernement, mais la décision que le magistrat entend prendre. Un mineur jugé une première fois responsable et condamné à une courte peine peut très bien, en cas de récidive, être considéré « sans discernement » et envoyé en correction jusqu’à sa vingtième année. Le cas est fréquent, notamment dans les affaires de délinquance villageoise (on éloigne ainsi un perturbateur que la communauté ne supporte plus).
13 L’article 66 et le détournement de la notion de discernement sont les instruments d’une politique pénale qui entend gérer cette population juvénile « à risque » par l’envoi en correction, loin d’une famille nocive [17] et de ses pairs, de ces enfants des rues « amis de tous les désordres ». Ils deviennent alors le moteur de ce qu’il faut bien considérer comme une sur pénalisation des mineurs au XIXe siècle. Elle se traduit notamment par une croissance très marquée des incarcérations de mineurs qui, au 31 décembre 1857 sont près de 10 000 (9 896) à être détenus dans les prisons ou surtout dans les colonies agricoles et par des durées d’incarcération bien supérieures à celles subies par les majeurs comme le montre ce tableau que nous avons établi d’après les jugements de l’année 1854.
Durée des peines privatives de liberté prononcées en 1854 selon l’âge et le sexe
Nombre Nombre de Âge d’individus peinesdeprison jugés prononcées |
Durée des peines 1à 6jours 1à 6mois 1à 2ans 5à 1an 5ans 10ans 6jours à1mois 6mois à1an 2ans à5ans 10ans |
Hommes 6947 3809 - de16ans 100% 54,8% Hommes 15993 10027 [16à21ans] 100% 62,7% Hommes 106814 56178 ? 21 ans 100 % 52,6 % Femmes 1591 977 - de16ans 100% 61,4% Femmes 3349 2594 [16à21ans] 100% 61,4% Femmes 25424 17907 ? 21 ans 100 % 71,1 % |
257 440 353 67 52 190 911 393 1037 109
3,6% 6,3% 5,1% 0,9% 0,7% 2,7% 13,1% 5,6% 14,9% 1,5% 842 2775 4226 1040 299 737 78 28 1 1 5,3% 17,3% 26,4% 6,5% 1,8% 4,6% 0,5% 0,2% 0,01% 0,01% 4873 17239 21248 5454 1422 4637 597 617 55 34 4,6% 16,1% 19,9% 5,1% 1,3% 4,3% 0,6% 0,6% 0,05% 0,03% 95 176 102 15 5 41 210 109 209 15 6% 11,1% 6,4% 0,9% 0,3% 2,6% 13,2% 6,9% 13,1% 0,9% 223 669 1164 292 70 148 26 2 0 0 6,7 % 20 % 34,8 % 8,7 % 2,1 % 4,4 % 0,8 % 0,06 % 0 % 0 % 2248 5409 6542 1738 444 1265 149 99 6 7 8,8% 21,3% 25,7% 6,8% 1,7% 5% 0,6% 0,4% 0,02% 0,02% |
Durée des peines privatives de liberté prononcées en 1854 selon l’âge et le sexe
Discernement et politique pénale républicaine
14 L’article 66 et la notion de discernement sont également, et même doublement, l’instrument de la politique pénale républicaine un peu moins répressive que celle des régimes précédents.
15 Les transformations politiques remettent en cause l’équation classes laborieuses/classes dangereuses [18]. Le crime est décrypté autrement : il est à la fois naturalisé, « biologisé », professionnalisé. L’ouvrier-électeur perd sa proximité avec le malfaiteur et il s’agit désormais d’intégrer les classes populaires. Un nouveau pacte est élaboré entre les parents des classes populaires et l’État. Les décisions de justice illustrent bien cette transformation. Si nous comparons les jugements des années 1857 et 1897, les transformations sont flagrantes. La justice utilise toujours l’article 66 et la notion de discernement mais pour rendre les enfants à des parents que l’on cherche plus à soutenir qu’à stigmatiser. Dès lors, les effectifs des mineurs détenus baissent (de plus de 9 000 à 3 000 à la veille de la guerre de 1914).
Mineurs prévenus de délits et jugés : Comparaison des décisions de justice pour les années 1857 et 1897
Année Total |
Peines Envois en Remises Incarcération Condamnations Acquittements Autres correction à parents « classiques » « classiques » peines (art. 66) (art. 66) |
6 406
1857 100 % 6 482 1897 100 % |
1 398 2 065 1 408 678 857 3 463 22% 32% 22% 11% 13% 54% 514 1327 3208 443 990 1851 8% 20,50% 49,50% 7% 15% 28,50% |
16 L’autre usage du discernement est lié aussi aux transformations qui touchent les représentations de la délinquance et de la dangerosité, non plus en terme social mais en termes de classes d’âge. Ce ne sont plus les enfants des rues, les gamins, les frères de Gavroche qui sont perçus comme potentiellement dangereux et délinquants d’autant que l’intégration des classes populaires passe notamment par l’école, c’est-à-dire par les enfants. L’attention se porte alors sur la situation de ceux qui ne sont plus soumis à l’obligation scolaire. La découverte du nouveau problème social que constitue la situation de l’adolescent des classes populaires « est d’abord celle du vide entre deux encadrements, l’école et l’armée, que ne comble ni l’enseignement secondaire réservé à la bourgeoisie, ni l’apprentissage alors en décadence » [19]. Abandonnés à leurs instincts, les adolescents des classes populaires deviennent comme l’écrit Henry Bérenger dans la Revue Bleue, les héros de l’anarchie sociale. La misère de l’enfant laisse place à la culpabilité et à la dangerosité de l’adolescent. Montparnasse remplace Gavroche. Bientôt, sous la dénomination d’apaches, les jeunes réfractaires à la discipline de l’usine ou de l’atelier, incarneront ce danger. La loi pénale va prendre acte de cette transformation.
17 En effet en 1906, le seuil de la minorité pénale est relevé de 16 à 18 ans [20]. Cette réforme est votée alors que la France traverse une de ces périodes où les débats sur l’insécurité alimentent les gazettes et nourrissent les joutes oratoires parlementaires sur un registre que l’on peut souvent qualifier de démagogique. C’est dans ce climat sécuritaire qu’en 1908 l’abolition de la peine de mort est rejetée par un Parlement qui était initialement favorable à cette mesure [21]. La campagne contre les « apaches » bat son plein. Ce n’est qu’en apparence que cette loi est « libérale », en fait elle concourt au renforcement de la répression des « grands adolescents ».
18 Une première disposition de la loi prolonge la période d’envoi en correction des mineurs acquittés pour avoir agi sans discernement : « Tout le monde est d’accord pour reconnaître que lorsque a été fait l’article 66 en 1810, son rédacteur a commis une confusion : il a cru que vingt ans accomplis signifiait vingt et un ans, tandis que ce n’est que le commencement de la vingt et unième année. Cette erreur a toujours été regrettée ; il est absolument désirable que l’éducation correctionnelle soit continuée jusqu’à la majorité légale. » [22]
19 Une seconde disposition exclut du dispositif de l’excuse atténuante de minorité les mineurs de 16 à 18 ans reconnus discernants. Ils encourent les mêmes peines que les adultes, y compris la peine de mort. Le député radical de la Haute-Garonne et ancien avocat général près la Cour de cassation, Cruppi, explique ce choix : « La Chambre des députés n’avait pas proposé de changement à l’article 67, car dans sa pensée, la modification apportée à l’article 66 ne devait pas entraîner la modification de l’article 67 ; il lui avait paru qu’il importait de ne pas énerver la répression [23]des infractions commises par des adultes de 16 à 18 ans ayant agi en pleine connaissance de cause et que les peines ordinaires prévues par le Code devaient leur être appliquées. Le Sénat a admis le principe qui a guidé la Chambre, mais il a eu soin de le préciser, en disant que l’article 67 ne s’applique qu’au mineur de 16 ans. » [24]
20 Reste le dernier point de la loi : l’application aux mineurs de 16 à 18 ans de la notion de non-discernement. Cette disposition peut faire penser à un progrès de l’idée d’éducabilité du mineur de justice. Il n’est pas exclu que cette pensée réformatrice et progressiste ait animé certains protagonistes de la réforme. Cependant, en pratique, le mineur de 16 à 18 ans, auteur d’une petite infraction, qui ne risquait que quelques mois, voire quelques jours de prison, notamment en cas de vagabondage ou de mendicité, peut désormais être envoyé en correction jusqu’à 21 ans. Cette disposition va notamment engendrer un mouvement de révolte chez des jeunes prostituées qui s’attendaient à passer quelques jours de détention administrative et sanitaire à Saint-Lazare et qui se voient envoyées en correction jusqu’à 21 ans [25]. Une fois encore, la notion de discernement est instrumentalisée.
21 L’assimilation que nous faisons entre incarcération et envoi en correction dans une colonie pénitentiaire agricole ou industrielle, peut être considérée comme abusive ou du moins comme anachronique. Elle serait induite par ce que nous savons aujourd’hui sur le fonctionnement effectif de ces institutions. En effet, au XIXe siècle, l’envoi en correction peut être pensé comme une mesure éducative. C’est la position défendue par Émile Garçon devant le premier congrès international de droit pénal en 1905 : « La fatalité du milieu social n’apparaît nulle part avec plus de clarté que pour l’enfant délinquant. Que peut devenir, je le demande à tous, un pauvre petit être né de quelque union de hasard, qui porte toutes les tares héréditaires du vice, qui n’a sous les yeux que l’exemple de la débauche, qu’on dresse à la mendicité dès qu’il peut tendre la main, auquel on n’a jamais parlé de devoir et qui pour toute instruction a appris à voler adroitement ? Par quel prodige veut-on qu’il devienne honnête homme ? N’est-il pas voué à la prison et au bagne ? Mais qui osera prétendre qu’en le laissant grandir dans ce milieu pervers, la Société remplit tout son devoir ? Sur ce point l’accord est unanime et on peut dire que l’enfant est sorti du droit pénal. Pour lui, du moins, on ne parle plus d’expiation et de responsabilité morale. On a compris que la peine n’était pas faite pour lui, puisqu’il existe un moyen meilleur et plus efficace de le ramener à la discipline sociale. Sans doute il faudra peut-être le priver de sa liberté pour de longues années ; mais qu’importe, si la régénération est à ce prix. Aucun pays ne peut se vanter d’avoir pour l’enfance de meilleures lois que les nôtres : les magistrats sont armés de tous les pouvoirs. Nous voudrions seulement qu’ils en usent plus souvent et qu’ils perdent quelques préjugés contre les colonies pénitentiaires qu’on juge si mal parce qu’on les connaît si peu. » [26] De leur création à la guerre de 1914, l’opinion des experts sur les colonies pénitentiaires, comme celle des médias ou du « grand public » a souvent varié [27], même si la vision critique à l’égard de ces institutions tend à se renforcer. Pour autant ce n’est pas le caractère répressif des colonies pénitentiaires qui justifie l’assimilation entre peine et envois en correction mais bien les pratiques pénales elles-mêmes. En effet, les mineurs condamnés et les mineurs acquittés subissent le même sort et sont enfermés dans les mêmes institutions. La seule différence est que le condamné y passe généralement moins de temps que l’acquitté. D’ailleurs les responsables du Compte général de l’administration de la justice criminelle quand ils présentent « le résultat des poursuites pour les prévenus de chaque âge et de chaque sexe avec indication des peines prononcées » ne manquent pas de préciser dans une note de bas de page qu’ils « ont classé les enfants envoyés en correction parmi les condamnés à l’emprisonnement ».
? Le discernement remis en question
22 Ce pilier de la politique pénale se fissure une première fois en 1912. En effet, même si la lecture officielle de la loi du 22 juillet 1912 affirme que les mineurs de 13 ans sont non pas « irresponsables », mais bénéficient d’une « présomption légale et irréfragable de défaut de discernement » [28], les juristes de l’entre-deux-guerres et ceux de l’après-guerre parlent bien d’irresponsabilité pénale rendant caduque la question du discernement. Pour autant, cette notion conserve toute sa vigueur comme instrument de politique pénale dans le traitement des délinquants de 13 à 18 ans. Les commentateurs prennent désormais acte du détournement de la notion. Si dans son Précis de droit criminel, le juriste René Garraud s’efforçait encore de définir le discernement [29], dans un Précis élémentaire de droit pénal auquel collabore son fils, on peut lire : « Ce n’est pas un problème de psychologie pour le juge, mais bien un moyen de politique criminelle, c’est-à-dire que la réponse à la question du discernement permet au juge d’accepter ou d’écarter pour le mineur les mesures de rééducation que la loi met à sa disposition. En d’autres termes, on ne se préoccupe pas de rechercher le degré de responsabilité du jeune délinquant, mais bien s’il est ou non susceptible d’amendement par des mesures de rééducation. » [30]
23 Ces propos de Pierre Garraud et Marcel Laborde-Lacoste méritent d’être contextualisés. L’absence de discernement permet surtout de choisir entre une remise du mineur à ses parents (décision la plus fréquente) ou son envoi en correction pour de longues années. L’existence du discernement permet au juge de condamner le mineur à une peine de prison (avec ou sans sursis) ou à une amende. Les autres « mesures de rééducation que la loi met à sa disposition », pour reprendre l’expression de nos auteurs, sont rarement employées [31]. Nous sommes en 1936, et les autorités reconnaissent, pour partie, le bien-fondé des critiques formulées durant la campagne contre les bagnes d’enfants et s’engagent dans un mouvement de réforme. Il est difficile de voir dans les Maisons d’éducation surveillée [32] autre chose que des institutions punitives [33]. Un long séjour dans un établissement de ce type ne peut être considéré que comme une lourde peine. La reconnaissance du manque de discernement couvre donc à la fois la sentence la plus clémente (la remise aux parents) et la plus sévère (l’envoi en correction) ; preuve s’il en était besoin du détournement total de la notion de discernement.
24 C’est au nom de ce constat que la loi du 27 juillet 1942 relative à l’enfance délinquante supprime la question du discernement : « Les tribunaux ont fait de la notion de discernement un usage prétorien : pour appliquer au plus grand nombre de mineurs délinquants des mesures éducatives, ils les ont déclarés irresponsables. C’est ainsi que pendant la période de 1930 à 1935, 70 p. 100 d’entre eux ont été acquittés comme ayant agi sans discernement. La question du discernement paraît donc inutile ; le projet la supprime. Désormais, la loi sera en harmonie avec les réalités. » [34] On ne saurait être plus pragmatique : la loi s’adapte aux pratiques judiciaires. La même analyse et le même pragmatisme semblent de mise à la Libération : « La difficulté de pénétrer la psychologie du mineur a fait prévaloir dans la pratique une méthode indépendante de ces deux interprétations [35]. Depuis longtemps, les juges et les jurés s’affranchissent de la notion de discernement. Ils se demandent d’un point de vue utilitaire, s’il faut mieux, dans le cas concret, frapper l’enfant d’une peine ou le soumettre à des mesures d’éducation. » [36]
25 Cet effacement de la question du discernement va de pair, en 1945, avec l’idée formulée dans l’exposé des motifs, d’une présomption générale « d’irresponsabilité pénale qui n’est susceptible de dérogation qu’à titre exceptionnel et par décision motivée ». Si cette lecture du texte a pu être contestée, elle est longtemps dominante. « Ce principe, lit-on en 1984 sous la plume de deux magistrats en poste à l’Éducation surveillée, est général sans égard pour la nature et la gravité de l’infraction. Il est objectif sans référence à la notion de discernement. Il est absolu pour les mineurs de moins de 13 ans qui en aucun cas ne pourront faire l’objet d’une condamnation. La voie éducative est donc la règle pour tous, la condamnation l’exception. » [37] L’assertion s’appuie sur plusieurs arrêts de la Cour de cassation notamment celui du 13 décembre 1956 [38].
Conclusion
26 Si le mot de discernement n’apparaît pas, en dehors de l’exposé des motifs, dans l’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante, le tribunal peut s’appuyer sur « les circonstances et la personnalité du délinquant » pour entrer dans la voie de la condamnation pénale et donc considérer sans ambiguïté le mineur âgé de plus de 13 ans comme pénalement responsable. À la lecture des attendus de jugements, on s’aperçoit que le terme « circonstances » renvoie à la manière dont l’acte transgressif a été commis, autrement dit aux « circonstances de fait » sur lesquelles Le Pelletier de Saint-Fargeau entendait fonder le discernement. Quant à la « personnalité », toujours appréhendée à travers l’usage qui en est fait dans les attendus de jugements, quand le magistrat la qualifie [39], c’est toujours sur un registre psychologique, soit qu’il mesure la maturité/immaturité, soit qu’il évoque un dérèglement mental. Les circonstances et la personnalité du délinquant de l’ordonnance du 2 février 1945 ressemblent beaucoup au discernement même si on cherche désormais à évaluer les possibilités d’évolution du mineur. La transformation de la justice des mineurs dans la seconde moitié du XXe siècle et notamment la prééminence de « l’éducatif », repose beaucoup plus sur l’évolution des pratiques judiciaires, c’est-à-dire sur le juge des enfants, seule véritable innovation du texte de la Libération, et sur la transformation des établissements et des pratiques éducatives que sur la disparition d’une notion « qui ne correspond plus à une réalité véritable ».
Notes
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[1]
Elle est à nouveau présente, non dans l’ordonnance relative à l’enfance délinquante, mais dans l’article 122-8 du Code pénal.
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[2]
L’ordonnance du 2 février 1945 relative à l’enfance délinquante sera introduite dans le Code pénal dans ce même livre II.
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[3]
Archives Parlementaires de 1787 à 1860. Recueil complet des débats législatifs & politiques des chambres françaises, Paris, Paul Dupont, 1887, tome 27, p. 5.
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[4]
Ibid., p. 5.
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[5]
Ibid. p. 5. Cette proposition est faite par Pierre Victor MALOUET.
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[6]
Pierre LASCOUMES, « Les mineurs et l’ordre pénal dans les codes de 1791 et 1810 » in Michel CHAUVIERE, Pierre LENOËL, Éric PIERRE, (dir), Protéger l’enfant. Raison juridique et pratiques socio-judiciaires (XIXe-XXe siècles), Rennes, Presse Universitaires de Rennes, 1996, p. 40.
-
[7]
Archives Parlementaires..., op. cit., p. 5.
-
[8]
Article 2 du Titre V du Code pénal de 1791.
-
[9]
Article 66 du Code pénal de 1810. Il est ainsi rédigé : « Lorsque l’accusé aura moins de seize ans, s’il est décidé qu’il a agi sans discernement, il sera acquitté ; mais il sera, selon les circonstances, remis à ses parents, ou conduit dans une maison de correction pour y être élevé et détenu pendant tel nombre d’années que le jugement déterminera, et qui toutefois ne pourra excéder l’époque à laquelle il aura accompli sa vingtième année. »
-
[10]
Sur les lieux du crime voir Dominique KALIFA, L’encre et le sang. Récits de crimes et société à la Belle Époque, Paris, Fayard, 1995, pp. 111-117 ; Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, chapitre premier et chapitre 5 ; Frédéric CHAUVAUD, De Pierre Rivière à Landru. La violence apprivoisée au XIXe siècle, Belgique, Brepols, 1991, chapitre 6.
-
[11]
Dominique KALIFA, Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, p. 115
-
[12]
Voir bien sûr l’ouvrage fondamental de Louis CHEVALIER, Classes laborieuses et classes dangereuses à Paris pendant la première moitié du XIXe siècle, Paris, Plon, 1958.
-
[13]
Jean-Jacques YVOREL, « De Delacroix à Poulbot, l’image du gamin de Paris », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière », n° 4, 2002, pp. 39-72.
-
[14]
Jean-Jacques YVOREL, « L’enfermement des mineurs de justice au XIXe siècle, d’après le Compte général de la justice criminelle », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière ». Le temps de l’histoire, n° 7, décembre 2005, p. 100.
-
[15]
Inusité jusqu’en 1840, cantonné généralement sous les 10 % jusqu’en 1871, le recours au non-discernement dans les jugements des contraventions atteint les 21 % en 1872 et les 43 % en moyenne quinquennale pour les années 1900-1904.
-
[16]
Le taux d’incarcération mesure le nombre de peines de prison par rapport au nombre de personnes jugées par les tribunaux. Il faut le distinguer du taux de détention qui mesure le nombre de personnes privées de liberté au regard de la population générale. Le taux d’incarcération est donc indépendant du nombre de personnes arrêtées et jugées et de la durée des peines, deux facteurs qui influent sur le taux de détention.
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[17]
Sur ce point notre article « La famille, l’enfant et la justice au XIXe siècle », Dialogue, n° 194, décembre 2011, pp. 9-20.
-
[18]
Dominique KALIFA, « La fin des “classes dangereuses” ? Ouvriers et délinquants dans la série des “Fantômas” (1911-1913) » in Crime et culture au XIXe siècle, Paris, Perrin, 2005, pp. 115-128.
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[19]
Agnès THIERCE, Histoire de l’adolescence, Paris, Belin, p. 144.
-
[20]
Loi du 12 avril 1906 modifiant les articles 66, 67 du Code pénal, 340 du Code d’instruction criminelle et fixant la majorité pénale à l’âge de dix-huit ans, JO, lois et décrets, 14 avril 1906, p. 2449 ; Duvergier, tome 106, 1906, p. 143. Pour une analyse plus complète de cette loi Pascale Quincy-Lefebvre, « Droit, régulation et jeunesse. Réforme de la majorité pénale et naissance des 16-18 ans à la Belle Époque » in Ludivine BANTIGNY, Ivan JABLONKA, Jeunesse oblige. Histoire des jeunes en France XIXe-XXe siècle, Paris, PUF, 2009, pp. 95-108.
-
[21]
L’essentiel de ces débats a été publié dans « Abolir la peine de mort. Le débat parlementaire de 1908 », Jean Jaurès. Bulletin de la société des études jaurésiennes, n° 126, 1992 ; voir aussi Jean-Claude FARCY (avec la collaboration de Marc RENEVILLE), La peine de mort en France de la Révolution à l’abolition, exposition virtuelle : www.criminocorpus.cnrs.fr
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[22]
Rapport de M. Cruppi à la chambre des députés le 10 avril 1906, cité par Duvergier, tome 106, 1906, p. 144.
-
[23]
Sur « L’énervement de la répression » voir Dominique KALIFA, « Magistrature et “crise de la répression” à la veille de la Grande guerre (1911-1912) », Vingtième siècle, n° 67, juillet-septembre 2000, pp. 43-59.
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[24]
Rapport de M. Cruppi, op. cit., p. 144.
-
[25]
Alain CORBIN, Les filles de noce, misère sexuelle et prostitution (XIXe siècle), Paris, Aubier, 1978, rééd. Flammarion 1982, pp. 478-480.
-
[26]
Émile GARÇON, « Discours de M. Garçon », Revue pénitentiaire, 1905, p. 753.
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[27]
Par exemple le Bureau central des sociétés de patronage qui dénonce dans les années 1880-1890 les colonies pénitentiaires, adresse en 1903 une pétition aux membres de la magistrature qui est un vibrant plaidoyer pour les maisons de corrections qui « ressemblent à des écoles ». Éric PIERRE, « Les colonies pénitentiaires pour jeunes détenus : des établissements irréformables (1850-1914) », Revue d’histoire de l’enfance « irrégulière ». Le temps de l’histoire, n° 5, septembre 2003, p. 58.
-
[28]
Tribunaux pour enfants et adolescents. – Application de la loi du 22 juillet 1912 Circulaire de la Chancellerie du 30 janvier 1914, Journal des parquets, 1914, n° 4-5, p. 39.
-
[29]
René GARRAUD, Précis de droit criminel, contenant l’explication élémentaire de la partie générale du Code pénal, du Code d’instruction criminelle et des lois qui ont modifié ces deux codes, 15e édition, refondue et mise au courant par Pierre GARRAUD, Bordeaux, J. Bière & Paris, Sirey, 1934, p. 269.
-
[30]
Pierre GARRAUD, Marcel LABORDE-LACOSTE, Précis élémentaire de droit pénal, Paris, Sirey, 1936, cité par Philippe ROBERT, Le droit des mineurs. Sa place et son rôle dans l’évolution du droit français contemporain, dact., sd, p. 179
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[31]
Pour une illustration locale de cette politique voir Éric PIERRE, Samuel BOUSSION, Delphine GRUAU, David NIGET, Analyse de la délinquance et de la violence en Maine-et-Loire : approches historique et archivistique (1870-années 1950), Rapport remis à la Direction de Protection judiciaire de la jeunesse, octobre 2002, pp. 180-199 et 319-322.
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[32]
Nouveau nom donné aux colonies correctionnelles à partir de 1927.
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[33]
Henry GAILLAC, Les maisons de correction, 1830-1945, Paris, Cujas, 1991 [1970], pp. 261-302.
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[34]
] « Loi du 27 juillet 1942 relative à l’enfance délinquante. Rapport au maréchal de France, chef de l’État français », JO de l’État français, 13 août 1942, p. 2778.
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[35]
L’auteur renvoie aux deux conceptions que nous avons évoquées plus haut.
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[36]
Henri DONNEDIEU DE VABRES, Traité de droit criminel et de législation pénale comparée, Paris, Librairie du recueil Sirey, 1947, p. 184.
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[37]
Henry MICHEL, Daniel PICAl, La protection judiciaire de la jeunesse, Vaucresson, CFEES, Service études, 1984, p. 67.
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[38]
Bulletin criminel de la Cour de cassation, 1957, n° 840, cité par François TOURET de COUCY, Enfance délinquante, Paris, Répertoire pénal Dalloz, novembre 2005, p. 14.
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[39]
Dans de nombreux jugements, le magistrat se contente d’écrire, « attendu la personnalité du mineur » sans préciser à quelles caractéristiques de la personnalité il fait allusion.