Notes
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[1]
Je tiens à exprimer mes remerciements à Anne Lhuissier, Séverine Gojard et Eve Brenel pour leur lecture et leurs critiques concernant une première version de cet article. Je remercie également les lecteurs anonymes pour leurs remarques.
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[2]
On entend par habitudes alimentaires les modes d’approvisionnement et le régime alimentaire (façons de cuisiner et contenu des repas).
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[3]
Les mobilités résidentielles après 60 ans se réalisent à deux moments différents des cycles de vie : au moment de la retraite (entre 60 et 70 ans) et après 85 ans (émergence du veuvage, souvent féminin). Cf. Jean-Claude DRIANT, « La mobilité des personnes âgées dans le marché du logement : une approche dynamique », in Catherine BONVALET, Férial DROSSO, Francine BENGUIGUI, Phuong HUYNH, Vieillissement de la population et logement. Les stratégies résidentielles et patrimoniales, Paris, La Documentation française, 2007, pp. 247-266.
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[4]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, « Jardins, jardinage et autoconsommation alimentaire », INRA Sciences Sociales, n° 2/95, 1995.
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[5]
Philippe CARDON, « Vieillissement et délégation alimentaire aux aides à domicile : entre subordination, complémentarité et substitution », Cahiers d’économie et de sociologie rurales, n° 82-83, 2007, pp. 139-166.
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[6]
Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, « Monotonie ou diversité de l’alimentation : l’effet du vieillissement », INRA Sciences Sociales, n° 5/02, 2003.
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[7]
Nous reprenons à notre compte la typologie développée par Louis CHAUVEL, Les classes moyennes à la dérive, Paris, Seuil, 2006.
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[8]
Vincent CARADEC, Françoise LEBORGNE, « Les nouvelles technologies dans l’aménagement de l’habitat », in Françoise LE BORGNE-UGUEN, Simone PENNEC (dir.), Technologies urbaines, vieillissements et handicaps, Rennes, ENSP, pp. 29- 47, 2005, p. 29.
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[9]
Geneviève COUDIN, Geneviève PAICHELER, Santé et vieillissement. Approche psychosociale, Paris, Armand Colin, 2002. L’effet de la CPS est d’autant plus important pour les classes populaires que, toutes catégories sociales confondues, la mobilité résidentielle liée à la maladie est en moyenne plus tardive et émerge généralement après 80 ans : elle correspond à la seconde phase du cycle de vie liée à la transformation de la structure du ménage et l’émergence du veuvage (Catherine BONVALET et alii, Vieillissement de la population et logement..., op. cit., p. 16. En ce sens, la mobilité résidentielle liée à la maladie émerge plus tôt dans les catégories populaires.
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[10]
Les problèmes de surpoids et d’obésité qui concernent davantage les femmes des milieux populaires (Faustine REGNIER, « Obésité, corpulence et statut social : une comparaison France/États-Unis (1970-2000) », INRA Sciences Sociales, n° 1/05, 2005) n’épargnent pas les femmes de plus de 60 ans de ces milieux.
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[11]
Ségolène PETITE, Les règles de l’entraide : sociologie d’une pratique sociale, Rennes, PUR, 2005.
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[12]
Christian DELBES, Joëlle GAYMU, La retraite quinze après, Paris, Les Cahiers de l’INED, n° 154, 2003.
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[13]
La mobilité de retour s’accompagne souvent d’un mouvement géographique allant des grandes villes vers de petites villes ou des communes rurales, notre échantillon, loin d’être marginal, correspondant à la tendance nationale, les ex-Franciliens représentant « 43 % des retraités qui ont changé de région de résidence entre 1990 et 1999 » (Catherine BONVALET, « Histoire résidentielle des Franciliens nées entre 1930 et 1950 », in Catherine BONVALET et alii, Vieillissement de la population et logement..., op. cit., pp. 283-302).
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[14]
Faustine REGNIER, Anne LHUISSIER, Séverine GOJARD, Sociologie de l’alimentation, Paris, La Découverte, Coll. Repères, 2006.
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[15]
On entend par « diversité » le nombre de produits alimentaires utilisés par un ménage. Elle peut être étudiée soit à partir du panier alimentaire dans le cadre d’enquêtes par questionnaire tel que classiquement dans les enquêtes de consommation de type INSEE (voir Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, « Monotonie ou diversité..., art. cit.), soit sur la base de la Liste des repas dans le cadre de l’enquête qualitative : chaque ménage rédige pendant une quinzaine de jours le contenu des repas quotidiens, liste ensuite commentée par les personnes lors d’un entretien afin de rendre compte des pratiques alimentaires (dont produits consommés) et de leurs transformations (voir Philippe CARDON, « Vieillissement et alimentation : les effets de la prise en charge à domicile », INRA Sciences sociales, n° 2, mai 2008 ; « Vieillissement et délégation alimentaire aux aides à domicile..., art. cit.).
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[16]
Florence WEBER, L’honneur des jardiniers. Les potagers dans la France du XXIe siècle, Paris, Belin, 1998.
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[17]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, « Jardins, jardinage... », art. cit.
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[18]
Ibid.
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[19]
Vincent CARADEC, « Être vieux ou ne pas l’être », L’Homme et la Société, n° 147-148, 2003, pp. 151-167.
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[20]
Ces messages et recommandations émanent tout à la fois des campagnes prônées par le Programme National Nutrition Santé et également des acteurs rencontrés au quotidien par les personnes âgées (membres de la famille, aide à domicile, médecins, pharmaciens, etc.). Sur le rôle des aides à domicile dans l’appropriation ou non des messages de santé, voir Philippe CARDON, art. cit.
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[21]
Jean-Claude DRIANT, art. cit. Si, pour cette génération née avant guerre, la majorité des couples a « largement bénéficié de la diffusion de la propriété qui s’est opérée durant les Trente Glorieuses » (Catherine BONVALET, art. cit.) accédant ainsi à la propriété de leur logement, les couples des catégories populaires étudiés (qu’ils aient été propriétaires ou non de leur logement : appartement ou maison) se sont installés préférentiellement dans un logement locatif, en appartement ou en maison, dont la taille est généralement à la baisse.
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[22]
On retrouve ici une tendance plus générale liée aux effets de la délégation de l’approvisionnement : la diversité alimentaire tend à diminuer dès lors que l’approvisionnement alimentaire est délégué en dehors du ménage (Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, art. cit.).
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[23]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, art. cit.
1 Dans cet article [1], on se propose d’analyser les effets de la mobilité résidentielle de couples de retraités sur leurs habitudes alimentaires [2]. On se centre spécifiquement sur la mobilité résidentielle des personnes âgées entre 60 et 70 ans [3]de couples nés avant guerre, de différentes catégories socioprofessionnelles et ayant emménagé dans une commune du littoral finistérien (voir la méthode en encadré). Le déménagement modifie le cadre de vie des personnes, particulièrement au niveau de l’organisation de l’approvisionnement qui joue un rôle prépondérant dans la composition du panier alimentaire des ménages. Comment, dans le contexte de la mobilité résidentielle, les retraités s’adaptent-ils à leur nouvelle situation en matière d’approvisionnement alimentaire ? Quel est l’impact sur les types de produits consommés ? On accorde tout d’abord une attention particulière au jardin potager qui joue un rôle important dans l’approvisionnement en produits frais pour ces générations. Les enquêtes montrent du reste qu’une des principales motivations au jardinage potager est « d’avoir des produits frais » [4]. Quelle place occupe le jardin potager dans les situations de mobilité résidentielle ? Sont étudiés par ailleurs les types et la localisation des commerces ainsi que les modalités d’approvisionnement (« qui » réalise les courses, modes de déplacement). On s’intéresse notamment à la délégation des courses à un tiers (parent, enfant, ami, voisin, professionnel) qui peut émerger avec l’avancée en âge et avoir une incidence sur le régime alimentaire [5]. Dans le contexte de la mobilité résidentielle, quelle place occupent les réseaux d’aide dans l’approvisionnement alimentaire des couples ?
2 L’objectif de cet article est ainsi de rendre compte de l’impact des transformations des modes d’approvisionnement liées à la mobilité résidentielle sur le régime alimentaire de générations qui ont été habituées à consommer principalement des produits frais (fruits, légumes, viande, poisson) et très peu de produits transformés (plats préparés, surgelés) [6].
Méthode
Mobilité contrainte versus mobilité élective : la retraite à l’épreuve des inégalités sociales de santé
3 La mobilité résidentielle après la retraite prend sens dans le parcours de vie et la situation socioprofessionnelle des couples de retraités. L’étude des parcours de vie, abordés tout à la fois dans leur dimension professionnelle et géographique, permet de mettre à jour deux groupes de retraités qui se sont installés dans la commune étudiée : on distingue les couples issus des classes populaires (ouvriers, employés, indépendants) des couples issus des classes moyennes intermédiaires, voire supérieures [7], tant au niveau des motivations que du type de mobilité résidentielle. Les couples issus des catégories populaires (ouvriers, employés), voire de certains indépendants (commerçants, artisans, agriculteurs) ont déménagé pour des raisons de santé et pour faire face notamment aux difficultés d’approvisionnement qui en découlaient. Ces couples habitaient dans des communes rurales pauvres, parfois exemptes de commerces et de services, ce qui nécessitait de nombreux déplacements en voiture. Des problèmes physiques (mal de dos, phlébites, etc.) rendaient plus difficiles les déplacements et les ont conduit au déménagement. Plus que des transformations de l’habitat pour faire face à l’inadéquation entre le logement et les difficultés physiques émergeantes [8], c’est bien le changement d’habitat qui est envisagé comme solution. On parlera ici de mobilité contrainte. Les problèmes de santé qui lui sont inhérents émergent du reste plus tôt chez les classes populaires et se manifestent sous forme de maladies chroniques et d’incapacités [9]. En ce sens, la mobilité géographique (résidentielle) des classes populaires apparaît comme réponse nécessaire à leur immobilité physique.
4 Quels objectifs visaient ces couples des classes populaires dans le déménagement ? On en retiendra ici essentiellement deux, longuement abordés lors des entretiens. En premier lieu, un des objectifs de la mobilité résidentielle a été de se rapprocher d’un centre d’une commune ou d’une ville où les soins et les biens de consommation sont plus accessibles. La proximité des services (pharmacie, médecin, dentiste, commerces alimentaires) est essentielle, car l’approvisionnement alimentaire est intégré à tout un ensemble de services autour de la santé. Le rapprochement vers les centres commerciaux et les services prend d’autant plus sens que les femmes, au moment du déménagement, souffraient de surpoids, voire d’obésité impliquant de grandes difficultés de mobilité et de déplacement [10]. S’y cumulent généralement d’autres handicaps (problèmes de vue, arthrose) limitant en particulier les déplacements. Ces contraintes physiques ont un impact important sur la gestion des activités quotidiennes, l’approvisionnement alimentaire et la préparation des repas (qui nécessitent déplacements et portage) étant essentiellement des activités féminines pour ces générations.
5 Un second objectif du déménagement était de se rapprocher des membres de la famille, généralement un ou des enfants (parfois, il peut s’agir d’un neveu, d’une nièce), dont on sait combien ces derniers jouent un rôle central dans l’aide apportée aux personnes âgées [11]. Ceci est très fortement marqué chez les classes populaires [12], en particulier pour les activités liées à l’alimentation. La mobilité résidentielle des couples des classes populaires est ainsi une mobilité de proximité : les couples ne viennent pas « de bien loin », le bourg où ils habitaient se situant dans un rayon de 25 km autour de la commune étudiée.
6 Les couples issus des classes moyennes intermédiaires, voire supérieures, habitaient quant à eux dans une grande ville, voire dans une grande agglomération. Il s’agit ici de couples qui vivaient majoritairement à Paris ou en région parisienne. Ils ont emménagé dans la commune étudiée après leur retraite. Plus précisément, cette mobilité résidentielle est une mobilité de retour : il s’agit de couples dont au moins l’un des deux conjoints, originaire de la commune, a migré pour des raisons professionnelles en région parisienne. Cette première mobilité géographique se couple donc d’une mobilité professionnelle ascendante (soit par le mariage pour des femmes issues des catégories populaires qui ont épousé un homme des catégories intermédiaires ou supérieures, soit par les études et l’accès à une profession moyenne et supérieure pour des hommes issus des catégories populaires). Le couple est ensuite revenu s’installer, au moment de la retraite, dans la commune d’origine d’un de ses membres [13].
7 À la différence des couples des catégories populaires, ces couples ne souffraient pas au moment de leur déménagement de problèmes physiques ou de maladies particulières, impliquant par exemple des problèmes de déplacement. Ils cherchaient, en venant s’installer dans la commune, une meilleure « qualité de vie en bord de mer », loin « de la grande ville » et de l’éparpillement des lieux de travail, de loisirs et des commerces. Il s’agit ici d’un choix de mobilité résidentielle visant à améliorer le confort de vie qui s’inscrit dans un parcours de vie caractérisée par la mobilité sociale et professionnelle. C’est à ce titre qu’on parlera de mobilité élective. Leur mobilité géographique marque ainsi une rupture avec leur surmobilité physique parisienne.
8 Comparativement, si la retraite comme événement biographique marque le moment choisi par les couples issus des classes moyennes pour déménager, ce n’est pas le cas pour les couples des catégories populaires : c’est davantage la précocité des problèmes de santé dans le parcours biographique, plus marquée chez les classes populaires, qui détermine le choix du déménagement au moment de la retraite. La mobilité résidentielle n’a donc pas la même signification selon le parcours biographique des couples retraités : on observe ici les effets de structure liés à la PCS et aux inégalités sociales de santé.
Les habitudes alimentaires à l’épreuve de la mobilité résidentielle
9 Quelles sont les conséquences de ces mobilités résidentielles sur l’alimentation des couples de retraités ? On analyse ici les évolutions des modes d’approvisionnement, dont on sait qu’ils ont un impact sur le régime alimentaire [14], tant au niveau de la fraîcheur que de la diversité [15]des produits consommés.
L’approvisionnement alimentaire des retraités en mobilité contrainte : vers une moindre diversité et fraîcheur des aliments ?
10 Les couples des milieux populaires tentent de maintenir leurs habitudes alimentaires. Mais, pour ce faire, ils doivent s’adapter aux transformations de leur cadre de vie liées au déménagement, notamment en matière d’approvisionnement alimentaire.
11 Le déménagement a en effet conduit dans la majorité des cas à la fin de l’activité potagère qui occupe une place importante dans l’approvisionnement des ménages populaires, notamment ruraux [16]. Le jardin potager, en garantissant un approvisionnement important en légumes frais et variés, avait un impact direct sur le budget alimentaire des ménages. On sait en effet que le jardin potager joue un rôle central dans l’économie des ménages populaires, « la part du potager dans la surface du jardin (étant) inversement proportionnelle au revenu » [17]. Dans les cas étudiés, la taille importante du potager permettait un apport constant de légumes toute l’année : des légumes frais de saison (haricots verts, salade, betteraves, choux, poireaux, pommes de terre, carottes, oignons, etc.) généralement stockés ensuite en bocaux ou congelés (notamment les poireaux « pour la soupe en hiver »). Les légumes du jardin pouvaient être complétés par des légumes achetés dans le commerce, selon les saisons, mais d’une manière générale, le jardin potager garantissait diversité et fraîcheur des légumes. Parfois, le couple possédait un verger qui complétait l’apport en légumes. Par ailleurs, outre que les produits du jardin potager représentent des substituts des produits marchands, le jardin potager est un élément important pour le maintien et la création d’une estime de soi en milieu populaire. Il joue un rôle symbolique fort, au-delà du strict apport de biens alimentaires [18].
12 De fait, la perte du jardin potager entraîne une moindre consommation de produits frais (notamment de légumes) et, a contrario, le recours de plus en plus fréquent aux produits préparés sont fortement associés, par les personnes rencontrées, au vieillissement, à la perte des capacités et d’une manière plus générale au sentiment « d’être vieux » [19]. L’arrêt du jardin potager est ainsi un marqueur de transition dans le parcours de vieillissement. Chercher à le compenser, c’est se jouer de l’inéluctable, c’est maintenir une forme de contrôle sur son existence, en cherchant à conserver ses habitudes alimentaires, notamment à travers une certaine fraîcheur des biens alimentaires consommés. D’autant que le légume occupe une place de premier choix dans la composition des repas, soit comme ingrédient principal (pour la soupe par exemple), soit comme aliment d’accompagnement de la viande ou du poisson. Ce souci de conserver ces habitudes alimentaires (notamment par la consommation de légumes) peut se voir renforcé par le poids des messages et des recommandations de santé autour de l’alimentation [20]. On se demande donc ici comment les couples ont compensé la perte de leur jardin potager lié au déménagement. On peut, a priori, supposer, au regard du projet idéal d’emménagement mis en avant dans la première partie, que la compensation peut résulter de la complémentarité entre aide du réseau familial (par exemple, sous forme de légumes donnés) et proximité de commerces. Pour autant, les types de compensation observables sont liés à la possibilité des couples de satisfaire ou non tout à la fois « proximité des commerces » et « proximité des enfants » en fonction des « contraintes du marché immobilier ». Le choix du logement dépend en effet de la disponibilité de logements sur ce marché et du pouvoir immobilier qui est moindre pour les catégories des classes populaires [21]. Trois configurations de compensation ont pu être dégagées.
• L’investissement dans le réseau d’aide familial descendant : maintenir la variété et la fraîcheur des aliments ?
13 Dans certaines situations, la perte du jardin potager a pu en partie être compensée par un apport de légumes donnés par un enfant (ou un autre membre de la famille : une sœur, un cousin, une nièce) qui habite dans la commune d’emménagement et qui possède lui-même un jardin potager ; enfant auprès duquel le couple a précisément cherché à se rapprocher. Par exemple, Monsieur et Madame C. ont cessé leur jardin potager. Une fois installés dans leur nouveau logement, leur fille leur a donné des légumes de son propre jardin, « surtout quand elle en a trop », explique Madame. Mais il ne s’agit pas ici de la même quantité, ni de la même diversité de légumes : elle leur donne certains légumes (salade, poireaux, carottes, betteraves rouges, « un peu des haricots, des fois ») que Madame C. peut compléter par l’achat de légumes de saison (« mais pas trop non plus, parce que c’est cher ») en allant faire « quelques courses » à l’épicerie en bas de chez elle. En revanche, certains légumes que Madame C. cultivait avant ne sont pas donnés par sa fille (petits pois, haricots verts, choux, persil par exemple), soit parce que cette dernière ne les cultive pas, soit parce que « elle en a tout juste pour eux » (dixit Madame C). La pomme de terre, qui constitue un aliment central de l’alimentation des milieux populaires, est achetée « en gros, trois sacs de 25 kg » avec la sœur de Madame (qui habite dans la commune) au moment de la récolte et qu’elle stocke ensuite chez cette dernière. Il en va de même pour les fruits utilisés pour faire de la confiture ou des fruits au sirop : les fruits du jardin (mirabelle, poires, pommes) ont laissé place aux fruits achetés, mais cela dépend des prix selon les années (« cette année, j’en ai pas fait parce que les fruits étaient trop chers »), auquel cas, sa fille leur donne quelques pots de « confiture maison ». Du reste, Madame C. ne fait plus de bocaux, ni de conserves (petits pois, haricots verts, carotte). Elle achète davantage des conserves, voire des produits surgelés. Dans ce type de configuration, si la fraîcheur des légumes est assurée, leur diversité et leur quantité tendent à diminuer. Pour autant, compenser la perte de son jardin par celui d’un ou plusieurs enfants n’est pas toujours possible. Mobiliser son réseau d’aide familial est conditionné en partie par la possibilité des couples à s’installer là où ils le souhaitaient, à proximité d’un enfant notamment, le choix du logement dépendant des contraintes du marché.
• Proche des commerces, loin des enfants : vers une moindre diversité ?
14 Ainsi, parfois, le couple n’a pas trouvé de logement dans la commune où habite un de ses enfants et a emménagé dans une commune éloignée. C’est le cas de Monsieur et Madame P., anciens ouvriers qui habitaient une petite commune. Madame P., au moment de la retraite, souffrait d’arthrose et de polyarthrite, impliquant des difficultés de déplacement. Son mari s’occupait de faire les courses et du jardin, mais les déplacements fréquents en voiture et des problèmes de dos importants les ont contraints à changer de domicile. Bien qu’ils aient cherché à se rapprocher de leur fille habitant dans une commune riche en commerces (cette dernière possédant également un jardin potager), ils n’ont pas trouvé et ont alors emménagé en location dans une petite maison dans la commune étudiée. Le choix pour cette maison est lié à une raison spatiale : la proximité d’un supermarché situé juste en face de la maison (« on a juste la rue à traverser ! »). De fait, ils ont décidé de s’y installer, car le supermarché est d’accès facile pour que le mari fasse les courses, tous les jours, à pied.
15 Madame P. explique qu’ils mangent moins de légumes, surtout la variété est beaucoup moins importante. Cela tient en grande partie aux prix des légumes et des fruits jugés « trop chers ». Madame P. (qui prépare la liste des courses pour son mari) est ainsi attentive aux « promos » et « publicités ». Il n’est pas rare qu’ils achètent « en promo » une quantité importante d’un légume, telles que, par exemple, des endives (5 kg) comme on a pu le constater lors de l’entretien. Mais dans ce cas, ils n’achètent pas ou peu d’autres légumes (« C’est sûr, c’est moins varié pour les légumes maintenant »). Par exemple, ils achètent rarement des « haricots verts, je trouve qu’ils sont chers. On en prend, mais pas souvent ». Dans ce type de configuration, c’est la proximité des commerces qui permet de compenser la perte du jardin, mais elle ne garantit pas pour autant le maintien de la variété des légumes consommés, notamment à cause des prix.
• Loin... de tout : la perte de la diversité et de la fraîcheur
16 Dans certains cas, le couple ne peut satisfaire à la fois proximité des enfants et proximité des commerces. C’est le cas de Monsieur et Madame U. Le choix d’un nouveau logement par Monsieur et Madame U. était conditionné par deux choses : trouver un appartement, d’une part, au rez-de-chaussée d’un immeuble dans un quartier proche de commerces et de services permettant à Madame U. (obèse) de sortir (pour faire des « petites courses et marcher un peu »), d’autre part, à proximité du lieu de travail de leur fils (qui habite dans une commune en dehors de la ville), afin que ce dernier puisse assurer des courses occasionnelles en complément de celles réalisées par Madame U. (son mari ne pouvant plus conduire à cause de problèmes de hanches). Pourtant, s’ils ont réussi à trouver un appartement situé en rez-de-chaussée et à proximité du travail de leur fils, il est très éloigné des commerces. Madame U. ne peut pas « aller faire quelques courses, du coup, je suis coincée ici ». Son fils prend aujourd’hui en charge les courses, mais il y va seul (elle ne l’accompagne pas), une seule fois par semaine, voire une fois tous les 15 jours (selon ses disponibilités). Elle considère du reste qu’il ne sait pas choisir les fruits et les légumes (« c’est souvent pas assez mûr et en général, il ne sait pas les légumes de saison, alors il prend n’importe comment. L’autre jour, il a pris des tomates, alors qu’on est en hiver ! »). De fait, il achète peu de légumes frais, mais davantage de légumes congelés ou en boîte. Madame U. a arrêté de faire des conserves ou de congeler des légumes. Peu à peu, les produits frais sont remplacés par des produits surgelés. Il en va de même également au niveau de la consommation de poisson et de viande : le couple a plus facilement recours à des plats préparés et à du poisson congelé [22]. Comme elle le reconnaît elle-même, « c’est vrai, je me force un peu pour cuisiner, pour faire à manger... bon, on ne peut pas dire que c’est de la cuisine maintenant ». Ainsi, dans ce type de configuration, on observe une perte de la fraîcheur et de la diversité des aliments et des repas qui deviennent moins diversifiés.
17 En définitive, si le déménagement des couples des milieux populaires a conduit à modifier l’approvisionnement, le maintien ou non des produits consommés dans leur régime alimentaire dépend des conditions de relogement, c’est-à-dire des possibilités des couples, dans le choix d’un nouveau logement, à trouver un juste équilibre entre « proximité des commerces », « proximité des enfants » (la conserver ou se rapprocher) et positionnement sur le marché immobilier. Ici, les modifications de l’approvisionnement dans le contexte de la mobilité résidentielle ont conduit à la fin de l’activité d’autoproduction, à un investissement plus ou moins prononcé dans les réseaux familiaux. On observe une tendance à la diminution, voire à la perte de la variété et de la fraîcheur des produits (notamment des légumes), plus ou moins marquée selon le contexte d’emménagement. Ce dernier dépend très largement de la possibilité de mobiliser son réseau familial descendant (variable selon sa proximité) et de la proximité ou non des commerces.
L’approvisionnement alimentaire des retraités en mobilité élective : entre maintien de la variété et de la fraîcheur et évolution du régime alimentaire
18 La situation des couples retraités en mobilité élective est tout autre. L’évolution du régime alimentaire s’inscrit dans le processus biographique et la recherche d’une meilleure qualité de vie.
• Du marché quotidien à l’émergence de nouvelles pratiques d’approvisionnement
19 Quels sont les modes d’approvisionnement observables dans le cas des couples en mobilité de retour ? Premier constat : dans tous les cas observés, l’emménagement s’est fait au cœur de la commune, dans les quartiers résidentiels, à proximité des commerces, du marché et du port de pêche. Ce retour « aux sources » a été facilité par la détention d’un patrimoine immobilier, soit individuel (construction d’une maison dans les années qui ont précédé la retraite ; vente d’un bien immobilier parisien ayant permis l’achat d’une maison dans la commune), soit par l’héritage d’une maison familiale (celle des parents de l’épouse ou de l’époux, maison qui a été pendant longtemps la maison secondaire, celle des vacances). Dans la mesure où ces couples n’avaient pas de problèmes de santé particuliers au moment de leur déménagement, tous se sont achalandés en produits frais au marché (qu’il s’agisse de légumes, de poisson ou de viande), permettant dans biens des cas, de faire les courses au jour le jour et « d’acheter des produits frais ».
20 À cette nouvelle proximité des commerces se juxtaposent de nouvelles pratiques d’approvisionnement : le « retour aux sources » se conjugue avec de nouvelles pratiques d’autoconsommation. Tout d’abord, à travers la culture d’un jardin potager dont l’entretien est assuré par la conjointe, par le mari ou par les deux. Le jardin potager a pu être installé dans le jardin de la maison ou à l’extérieur. Il est alors source d’une importante production de légumes variés. C’est le cas par exemple de Monsieur et Madame F. : tous deux originaires de la commune étudiée, ils se sont installés après leur retraite dans un petit pavillon qu’ils ont construit dans les années antérieures. Ils ont cultivé un jardin potager à côté de leur maison. Le recours au jardin potager leur assure un approvisionnement important en légumes frais : « J’ai tout fait, vous savez : haricots verts, petits pois, endives, poireaux, haricots, fraises, melons, courges, potirons », explique Monsieur F., bien qu’ils s’en occupent tous les deux. Cette production de légumes donne lieu à des bocaux et à des conserves familiales. Mais, outre l’intérêt d’un approvisionnement varié en légumes frais toute l’année, cultiver un jardin potager est valorisé comme une forme d’épanouissement personnel et s’apparente ainsi également à un loisir qui permet de « s’entretenir » [23].
21 De fait, ce sont aussi d’autres activités d’autoconsommation, vécues comme des loisirs, qui émergent telle que la pêche : pêche à pied, pêche en mer. Dans certains cas, l’installation dans la commune a conduit le mari à se lancer dans la pêche, parfois de manière assidue et importante, poissons et crustacés occupant désormais une place importante dans le régime alimentaire du couple. C’est le cas par exemple de Monsieur G. qui s’est mis à la pratique de la pêche à pied (coquillages, crustacés) et de la pêche en mer (poissons), qu’il s’agisse de poissons dits « nobles » (sole, lotte, dorade, rouget) ou moins « nobles » (sardines, maquereaux, par exemple). Le couple a ainsi développé de nouvelles pratiques alimentaires autour du poisson : stockage par congélation des fruits de mer, poissons préparés et congelés qu’ils peuvent ainsi consommer tous les jours et tout au long de l’année. Ces nouvelles pratiques alimentaires contrastent fortement avec leur régime alimentaire parisien dans lequel la viande occupait une place de premier choix.
• Les activités de pêche comme facteur de maintien des réseaux de sociabilité
22 Le poisson occupe une nouvelle place dans le régime alimentaire des couples des classes moyennes étudiées, notamment parce que les couples se sont investis dans la pêche. Comment interpréter l’apparition de la pêche ? Pour les couples de retour, la pêche (à pied ou en mer) est vécue comme un « loisir intégrateur ». Tout d’abord, elle n’a pas émergé au hasard : le mari n’allait pas seul à la pêche, mais partageait cette activité avec quelqu’un d’autre, qu’il s’agisse d’un beau-frère, d’un ami de longue date ou d’un voisin. La pêche, outre qu’elle est une activité d’autoconsommation, est donc également une activité sociale de loisir partagée avec des membres de ses réseaux familiaux et/ou amicaux. Elle est aussi une activité qui s’inscrit dans des réseaux d’échange important : pêcher, c’est consommer du poisson, mais aussi en donner. Le poisson est non seulement consommé par les couples, mais il est aussi offert aux membres de la famille (généralement les collatéraux : des frères et sœurs, des cousins et cousines qui habitent dans le secteur) mais également à des amis, des voisins. La pêche participe aux réseaux d’échange qui se matérialisent dans les circulations de biens, notamment alimentaires, entre proches familiaux ou amis qui maintiennent les liens sociaux dans leur réciprocité. Les couples racontent volontiers pendant les entretiens ces dons en poisson, entre le maquereau ou la sardine donné aux voisins, ou la dorade donnée à un membre de la famille. La pêche, lorsqu’elle a été fructueuse, peut donner lieu à des invitations (d’amis, de voisins, de familiaux) à venir « manger les sardines grillées ! C’était le truc de mon mari, ça ! ». Et lorsque, l’âge avançant et la fatigue aidant, le mari a arrêté de « courir en mer », le couple continue de se voir offrir aujourd’hui encore du poisson par des personnes de leur entourage, à l’image de Monsieur et Madame L. :
23 « Mon mari allait à la pêche, donc, quand il pêchait, c’était du calamar et quand on faisait du calamar, on se débrouillait pour en avoir pas mal et en mettre au congélateur. Après, on faisait une sauce à l’armoricaine et c’était parti pour faire plusieurs repas avec. Le thon, c’était pareil. (...). Certaines fois, quand vous pêchez cinquante maquereaux, c’est sûr, vous n’allez pas les congeler, le maquereau congelé, c’est pas bon, alors vous le distribuez. Non seulement, vous en distribuez, mais les gens viennent vous en donner ! À cette époque, par exemple, c’est le crabe. Quand c’est l’époque du crabe, les gars, ils vont chercher leur crabe et on mange les araignées. Les mousses, c’est maintenant. Là, notre voisin, en ce moment, c’est lui qui passe de temps en temps avec des araignées. » (Madame L., 78 ans)
24 La pêche, outre l’apport important en produits de la mer, a permis aux couples, avec le « retour aux sources » (comme aiment à le dire certains couples rencontrés) de maintenir des réseaux de sociabilité (familiaux, amicaux) qu’ils ont côtoyés tout au long de leur vie dans la mesure où, bien souvent, la commune était déjà leur lieu de vacances ; l’installation définitive dans la commune permettant de pérenniser leurs relations sociales.
25 D’une manière générale, le régime alimentaire des couples des classes moyennes rencontrés se trouve modifié : les couples ont intégré le poisson dans leur régime alimentaire, bien souvent au détriment de la viande dont la consommation a tendance à diminuer. Mais, si globalement, le poisson est venu se substituer à la viande, cela n’a pas remis en cause les façons de cuisiner : le couple a conservé une cuisine « élaborée ». Ce sont donc les produits consommés qui évoluent plus que les modes de préparation.
Conclusion
26 La mobilité résidentielle de couples de retraités conduit à modifier leur alimentation, mais les évolutions observables varient selon leur origine socioprofessionnelle. Elles renvoient aux inégalités sociales de santé, notamment celles relatives à la mobilité/immobilité physique telle qu’on a pu l’observer à travers l’exemple de l’approvisionnement alimentaire. Compenser la perte de l’autoproduction dans le cas des couples des classes populaires et donc maintenir fraîcheur et diversité des aliments dépend en partie des possibilités d’emménager à proximité du réseau familial ascendant comme support de l’aide et à proximité de commerces. La mobilité résidentielle de proximité est ici envisagée comme une adaptation à l’immobilité physique liée à l’émergence des incapacités. A contrario, l’apparition de nouvelles activités d’autoconsommation (jardin potager, pêche) chez les couples retraités des classes moyennes garantit diversité et fraîcheur des aliments et modifie leur régime alimentaire (substitution de la viande par le poisson) : elle s’inscrit dans un parcours biographique caractérisé par la mobilité sociale et dans la recherche d’une qualité de vie à travers la mobilité résidentielle interrégionale et l’intégration, non dans les réseaux familiaux, mais davantage dans les réseaux de sociabilité extrafamiliaux. En ce sens, mobilité résidentielle, évolutions des réseaux sociaux (familiaux, amicaux) et évolutions du régime alimentaire avec l’avancée en âge sont fortement imbriquées. L’étude de la mobilité résidentielle des couples de retraités montre qu’elle affecte l’ensemble des relations familiales par le rapprochement ou l’éloignement géographique qu’elle provoque, mais elle prédéfinit également les configurations de l’aide potentielle à venir (notamment autour des activités alimentaires) dès lors qu’avec le temps, des incapacités vont se développer ou s’accentuer. Par exemple, si la mobilité élective conduit à un surinvestissement dans les réseaux de sociabilité, elle tend à éloigner les couples retraités de leurs enfants (ces derniers habitant généralement l’agglomération parisienne). Cette distance spatiale prise avec les enfants pose question dans la mesure où les enfants jouent un rôle dans la prise en charge d’un parent, notamment au niveau des courses tel qu’on l’observe dans les situations de mobilité contrainte. Cela ouvre sur de nouvelles perspectives de recherche portant sur les effets de la mobilité résidentielle de couples de retraités dix, quinze, voire vingt ans après le déménagement, notamment au regard de la prise en charge des incapacités et de leurs effets sur le régime alimentaire.
Notes
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[1]
Je tiens à exprimer mes remerciements à Anne Lhuissier, Séverine Gojard et Eve Brenel pour leur lecture et leurs critiques concernant une première version de cet article. Je remercie également les lecteurs anonymes pour leurs remarques.
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[2]
On entend par habitudes alimentaires les modes d’approvisionnement et le régime alimentaire (façons de cuisiner et contenu des repas).
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[3]
Les mobilités résidentielles après 60 ans se réalisent à deux moments différents des cycles de vie : au moment de la retraite (entre 60 et 70 ans) et après 85 ans (émergence du veuvage, souvent féminin). Cf. Jean-Claude DRIANT, « La mobilité des personnes âgées dans le marché du logement : une approche dynamique », in Catherine BONVALET, Férial DROSSO, Francine BENGUIGUI, Phuong HUYNH, Vieillissement de la population et logement. Les stratégies résidentielles et patrimoniales, Paris, La Documentation française, 2007, pp. 247-266.
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[4]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, « Jardins, jardinage et autoconsommation alimentaire », INRA Sciences Sociales, n° 2/95, 1995.
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[5]
Philippe CARDON, « Vieillissement et délégation alimentaire aux aides à domicile : entre subordination, complémentarité et substitution », Cahiers d’économie et de sociologie rurales, n° 82-83, 2007, pp. 139-166.
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[6]
Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, « Monotonie ou diversité de l’alimentation : l’effet du vieillissement », INRA Sciences Sociales, n° 5/02, 2003.
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[7]
Nous reprenons à notre compte la typologie développée par Louis CHAUVEL, Les classes moyennes à la dérive, Paris, Seuil, 2006.
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[8]
Vincent CARADEC, Françoise LEBORGNE, « Les nouvelles technologies dans l’aménagement de l’habitat », in Françoise LE BORGNE-UGUEN, Simone PENNEC (dir.), Technologies urbaines, vieillissements et handicaps, Rennes, ENSP, pp. 29- 47, 2005, p. 29.
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[9]
Geneviève COUDIN, Geneviève PAICHELER, Santé et vieillissement. Approche psychosociale, Paris, Armand Colin, 2002. L’effet de la CPS est d’autant plus important pour les classes populaires que, toutes catégories sociales confondues, la mobilité résidentielle liée à la maladie est en moyenne plus tardive et émerge généralement après 80 ans : elle correspond à la seconde phase du cycle de vie liée à la transformation de la structure du ménage et l’émergence du veuvage (Catherine BONVALET et alii, Vieillissement de la population et logement..., op. cit., p. 16. En ce sens, la mobilité résidentielle liée à la maladie émerge plus tôt dans les catégories populaires.
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[10]
Les problèmes de surpoids et d’obésité qui concernent davantage les femmes des milieux populaires (Faustine REGNIER, « Obésité, corpulence et statut social : une comparaison France/États-Unis (1970-2000) », INRA Sciences Sociales, n° 1/05, 2005) n’épargnent pas les femmes de plus de 60 ans de ces milieux.
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[11]
Ségolène PETITE, Les règles de l’entraide : sociologie d’une pratique sociale, Rennes, PUR, 2005.
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[12]
Christian DELBES, Joëlle GAYMU, La retraite quinze après, Paris, Les Cahiers de l’INED, n° 154, 2003.
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[13]
La mobilité de retour s’accompagne souvent d’un mouvement géographique allant des grandes villes vers de petites villes ou des communes rurales, notre échantillon, loin d’être marginal, correspondant à la tendance nationale, les ex-Franciliens représentant « 43 % des retraités qui ont changé de région de résidence entre 1990 et 1999 » (Catherine BONVALET, « Histoire résidentielle des Franciliens nées entre 1930 et 1950 », in Catherine BONVALET et alii, Vieillissement de la population et logement..., op. cit., pp. 283-302).
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[14]
Faustine REGNIER, Anne LHUISSIER, Séverine GOJARD, Sociologie de l’alimentation, Paris, La Découverte, Coll. Repères, 2006.
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[15]
On entend par « diversité » le nombre de produits alimentaires utilisés par un ménage. Elle peut être étudiée soit à partir du panier alimentaire dans le cadre d’enquêtes par questionnaire tel que classiquement dans les enquêtes de consommation de type INSEE (voir Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, « Monotonie ou diversité..., art. cit.), soit sur la base de la Liste des repas dans le cadre de l’enquête qualitative : chaque ménage rédige pendant une quinzaine de jours le contenu des repas quotidiens, liste ensuite commentée par les personnes lors d’un entretien afin de rendre compte des pratiques alimentaires (dont produits consommés) et de leurs transformations (voir Philippe CARDON, « Vieillissement et alimentation : les effets de la prise en charge à domicile », INRA Sciences sociales, n° 2, mai 2008 ; « Vieillissement et délégation alimentaire aux aides à domicile..., art. cit.).
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[16]
Florence WEBER, L’honneur des jardiniers. Les potagers dans la France du XXIe siècle, Paris, Belin, 1998.
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[17]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, « Jardins, jardinage... », art. cit.
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[18]
Ibid.
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[19]
Vincent CARADEC, « Être vieux ou ne pas l’être », L’Homme et la Société, n° 147-148, 2003, pp. 151-167.
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[20]
Ces messages et recommandations émanent tout à la fois des campagnes prônées par le Programme National Nutrition Santé et également des acteurs rencontrés au quotidien par les personnes âgées (membres de la famille, aide à domicile, médecins, pharmaciens, etc.). Sur le rôle des aides à domicile dans l’appropriation ou non des messages de santé, voir Philippe CARDON, art. cit.
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[21]
Jean-Claude DRIANT, art. cit. Si, pour cette génération née avant guerre, la majorité des couples a « largement bénéficié de la diffusion de la propriété qui s’est opérée durant les Trente Glorieuses » (Catherine BONVALET, art. cit.) accédant ainsi à la propriété de leur logement, les couples des catégories populaires étudiés (qu’ils aient été propriétaires ou non de leur logement : appartement ou maison) se sont installés préférentiellement dans un logement locatif, en appartement ou en maison, dont la taille est généralement à la baisse.
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[22]
On retrouve ici une tendance plus générale liée aux effets de la délégation de l’approvisionnement : la diversité alimentaire tend à diminuer dès lors que l’approvisionnement alimentaire est délégué en dehors du ménage (Séverine GOJARD, Anne LHUISSIER, art. cit.).
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[23]
Séverine GOJARD, Florence WEBER, art. cit.