Notes
-
[1]
Voir par exemple : « Le web, nouveau canal pour le militantisme et l’engagement citoyen », Le Point, 6 décembre 2011.
-
[2]
Remi Lefebvre, « Le militantisme socialiste n’est plus ce qu’il n’a jamais été. Modèle de l’engagement distancié et transformations du militantisme au parti socialiste », à paraître en 2013.
-
[3]
Helen Margetts parle de « cyber-parti », au sens où le parti tendrait à se détacher des structures traditionnelles et des modes de communication en face-à-face et privilégierait la machine sans intermédiaire humain (Helen Margetts, « Cyber Parties », dans Richard, Katz, William, Crotty (eds), Handbook of Party Politics, Londres, Sage, 2006, p. 528-535). Je reprends ici sa formule en l’adossant cette fois-ci aux militants, mais dans une acception plus large : le cyber-militant serait un adhérent qui milite activement sur Internet. Nous préférons employer l’expression « cyber-militant » et non « cyber-adhérent » car cette dernière fait davantage allusion à l’adhésion en ligne – les cyber-adhérents socialistes à 20 euros.
-
[4]
Frédéric Sawicki, Johanna Siméant, « Décloisonner la sociologie de l’engagement militant. Note critique sur quelques tendances récentes des travaux français », Sociologie du travail, 51 (1), 2009, p. 97-125, dont p. 108.
-
[5]
Patrice Flichy, « Internet et le débat démocratique », Réseaux, 150, 2008, p. 159-185.
-
[6]
Stéphanie Wojcik, « Compétence et citoyenneté. Esquisse d’une analyse critique des travaux sur les dispositifs participatifs en face-à-face et en ligne », communication au Congrès de la Société québécoise de science politique, Montréal, 2008.
-
[7]
Stéphanie Wojcik, « Délibération électronique et démocratie locale. Le cas des forums municipaux des régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées », thèse de doctorat de science politique, Toulouse, Université Toulouse I, 2005.
-
[8]
Scott Wright, John Street, « Democracy, Deliberation and Design : The Case of Online Discussion Forum », New Media and Society, 9 (5), 2007, p. 849-869.
-
[9]
Gersende Blanchard, « La communication politique partisane sur Internet : des pratiques et des stratégies nouvelles ? », thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, Grenoble, Université Stendhal-Grenoble 3, 2007.
-
[10]
Lincoln Dahlberg, « Computer-Mediated Communication and the Public Sphere : A Critical Analysis », Journal of Computer-Mediated Communication, 7 (1), 2001, <http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1083-6101.2001.tb00137.x/full> ; Michel Marcoccia, « Les Webforums des partis politiques français : quels modèles de discussion politique ? », dans « La politique mise au Net », Mots. Les langages du politique, 80, 2006, p. 49-60.
-
[11]
Nicolas Desquinabo, « Polémique ou délibération ? Les usages des forums partisans pendant la campagne 2007 », dans Fabienne Greffet (dir.), Continuerlalutte.com. Les partis politiques sur le Web, Paris, Presses de Sciences Po, 2011, p. 249-254.
-
[12]
Godefroy Beauvallet, Maurice Ronai, « Vivre à Temps réels », Réseaux, 129-130, 2005, p. 275-309.
-
[13]
Raphaël Kies, « Forum en ligne et partis politiques », Réseaux, 150, 2008, p. 133-158.
-
[14]
Thierry Vedel, Karolina Koc Michalska, « The Internet and French Political Communication in the Aftermath of the 2007 Presidential Election », communication au 5th ECPR General Conference Panel sur « Parties, campaigns and Media Technologies », Potsdam, 2009.
-
[15]
Stephen J. Ward, Wainer Lusoli, Rachel K. Gibson, « Virtually Participating : A Survey of On-line Party Members », Information Polity, 7 (4), 2002, p. 199-215.
-
[16]
Autrement dit, ces militants n’optent pas pour un engagement participatif : organisation d’événements, recrutement de nouveaux adhérents sur Internet, mise en réseau des militants… Ils préfèrent s’investir de façon plus « passive », dans un militantisme plus individuel, nécessitant moins d’investissements (en termes de temps, notamment), tels que des donations au parti ou des diffusions/relectures d’argumentaires.
-
[17]
Rachel K. Gibson, Stephen J. Ward, « Renouveler le parti ? Les stratégies de campagnes et d’organisation en ligne des partis britanniques », dans F. Greffet (dir.), Continuerlalutte.com…, op. cit., p. 109-123, dont p. 111.
-
[18]
Il est nécessaire ici de préciser que cette enquête ne prétend nullement atteindre la représentativité de la totalité de la population adhérente à l’UMP et au PS.
-
[19]
Nom donné au réseau social socialiste, créé le 12 janvier 2010. Pour plus de précisions : Anaïs Theviot, « Militer tout en critiquant publiquement son parti. Le cas du réseau social socialiste, La Coopol », Cahiers du Centre Émile Durkheim, 12, 2012, p. 1-44.
-
[20]
Question no 21 de notre enquête quantitative : « a- Vous sentez-vous un(e) “cyber-militant(e)” ? Oui/Non ; b- Pourquoi ? »
-
[21]
En suivant Kaplan et Haenlein, le web 2.0 est entendu comme un regroupement d’applications en ligne qui permettent la création et l’échange de contenu généré par les utilisateurs. (Andreas H. Kaplan, Michael Haenlein, « Users of the World, Unite ! The Challenges and Opportunities of Social Media », Business Horizons, 53 (1), 2010, p. 59-68 ; definition p. 61).
-
[22]
La nécessité de fonder une réflexion spécifique sur les méthodes à mobiliser sur des terrains web a été soulignée à travers la publication de l’ouvrage : Christine Barats (dir.), Manuel d’analyse du web en sciences sociales, Paris, Armand Colin, 2013. En ce qui concerne la diffusion d’un questionnaire en ligne, se référer plus spécifiquement à : Gersende Blanchard, Simon Gadras, Stéphanie Wojcik, « Analyser la participation politique en ligne : des traces numériques aux pratiques sociales », dans C. Barats (dir.), ibid., p. 166-178.
-
[23]
Olivier Donnat, Les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique : enquête 2008, Paris, La Découverte/Ministère de la Culture et de la Communication, 2009 ; Daniel Peraya, Gabriela Florescu, Ion Vicovan, Nicolae Chifar, « Enquête sur les usages d’Internet et des applications standards réalisée auprès des étudiants à fréquence réduite inscrits pour 2001-2002 de la faculté de théologie orthodoxe roumaine de l’Université Al. I Cuza Iasi », International Journal Annals of the University Al. I. Cuza Iasi, 2003, p. 287-316, <http://www.tecfa.unige.ch/~peraya/homepage/publi/03_enquete_sur_les_usagesl.pdf>.
-
[24]
Lucie Bargel, « Aux avant-postes. La socialisation au métier politique dans deux organisations de jeunesse de parti. Jeunes populaires (UMP) et Mouvement des jeunes socialistes (PS) », thèse de doctorat en science politique, Paris, Université Paris I-Panthéon Sorbonne, 2008.
-
[25]
Je tiens à remercier Viviane Le Hay pour son aide précieuse dans l’élaboration de mon questionnaire et sa formation au logiciel Stata ; Agnès Alexandre-Collier, Matthieu Béra, Florence Haegel, Cindy Morillas, Antoine Roger et Stéphanie Wojcik pour leurs relectures actives ; ainsi que Gérard Loiseau et Laurence Monnoyer-Smith pour leurs conseils.
-
[26]
Cette enquête s’inscrit dans une recherche plus large dans le cadre de ma thèse de doctorat de science politique : « Militer sur Internet. Reconfigurations des stratégies partisanes et du militantisme au Parti socialiste et à l’Union pour un mouvement populaire », Sciences Po Bordeaux (en cours d’écriture).
-
[27]
Mounia Bennani-Chraïbi, « Quand négocier l’ouverture du terrain c’est déjà enquêter. Obtenir la passation de questionnaires aux congressistes de partis marocains », Revue internationale de politique comparée, 17 (4), 2010, p. 93-108.
-
[28]
Myriam Aït-Aoudia, Carole Bachelot, Lucie Bargel, Hélène Combes, Stéphanie Dechezelles, Nathalie Ethuin, Florence Haegel, Catherine Leclercq, Élise Massicard, Anne-Sophie Petitfils, « Enquêter dans les partis politiques. Perspectives comparées », Revue internationale de politique comparée, ibid., p. 7-13, dont p. 11.
-
[29]
Je remercie également toutes les personnes qui m’ont aidée à diffuser ce questionnaire.
-
[30]
Roland Cayrol, Colette Ysmal, « Les militants du PS originalité et diversité », Projet, 165, 1982, p. 572-586, dont p. 572.
-
[31]
R. Cayrol, C. Ysmal, ibid., p. 572.
-
[32]
Un « mur » (« wall », en anglais) est la dénomination employée sur le réseau social Facebook pour désigner la page où les amis et l’utilisateur peuvent écrire des messages de façon publique, c’est-à-dire que tous les internautes peuvent les lire (cela dépend encore des paramètres de confidentialité choisi par l’utilisateur qui, le plus souvent, réserve cette fonction uniquement à ses amis). Il était donc nécessaire d’établir cette amitié virtuelle car la plupart des « murs » sont fermés, c’est-à-dire qu’on ne peut y avoir accès si l’on ne fait pas partie des « amis ».
-
[33]
J’ai noté une méfiance plus forte des militants UMP, qui me contactaient souvent pour me demander si j’étais bien encartée à l’UMP, s’ils pouvaient avoir plus de précisions sur ma recherche avant de devenir ami.
-
[34]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 28 octobre 2011.
-
[35]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 7 septembre 2011.
-
[36]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 27 septembre 2011.
-
[37]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent de l’UMP, le 29 septembre 2011.
-
[38]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent de l’UMP, le 2 octobre 2011.
-
[39]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 28 octobre 2011.
-
[40]
Certains adhérents ont refusé de répondre à l’enquête, en raison des questions portant sur le profil sociodémographique, les considérant comme trop personnelles : « Salut Camarade, je voulais répondre avec plaisir ! mais les questions sont trop perso ! Respect de la vie privée avant tout ! Amitiés ! » (Message privé posté par un adhérent du PS sur mon compte Facebook le 2 septembre 2011).
-
[41]
Anaïs Theviot, « Un silence numérique bavard – Anticipations et stratégies de contournement du silence numérique pendant la campagne pour l’élection présidentielle française de 2012 », dans « Le silence en politique » Mots, à paraître.
-
[42]
Il s’agit en majorité soit de militants du Front national dont le but est de « casser » du PS notamment, soit d’anciens adhérents qui n’ont pas (souvent volontairement) renouvelé leur adhésion.
-
[43]
Par exemple pour la campagne numérique pour l’élection présidentielle française de 2012, l’UMP a fait appel à une agence spécialisée dans le numérique (Emakina), alors que le PS a souhaité développer ses outils web en interne.
-
[44]
Suite à quelques « ratés », l’UMP a une image défavorable sur le web – certains considérant même ce parti comme « anti-Internet » avec la loi Hadopi (qui cherche à contrôler les téléchargements allant à l’encontre des droits d’auteur). Parmi les tentatives avortées, on peut citer les Créateurs du possible, réseau social de l’UMP contraint de fermer un an après sa création en janvier 2010 alors que le parti y a investi près de 500 000 euros.
-
[45]
Rémi Rousseau, chargé de mission à la Netscouad (agence spécialisée dans la communication web, dirigée par Benoît Thieulin), entretien du 27 janvier 2012.
-
[46]
Lucie Bargel, Anne-Sophie Petitfils, « Appropriations d’Internet et trajectoires militantes “dans” et “en dehors” de l’Union pour un mouvement populaire », dans F. Greffet (dir.), Continuerlalutte.com…, op. cit., p. 187-199, dont p. 188.
-
[47]
Jean-François Copé dans sa lettre aux militants UMP.
-
[48]
Au sens où Internet semble d’une appropriation plus « naturelle » aux adhérents du PS qu’à ceux de l’UMP car plus proche de la culture partisane de ce parti, tournée vers les discussions et la délibération – le profil du cyber-militant PS ne se limiterait donc pas aux jeunes « geeks ».
-
[49]
Dans une approche comparative, j’ai indiqué dans ce tableau les données les plus récentes que j’ai trouvées sur les adhérents « traditionnels » du PS et de l’UMP. Pour le PS, l’enquête a été menée par téléphone par ISL (Institut de sondage Lavialle) auprès de 1 100 adhérents socialistes issus des fichiers de 2008, 2009, 2010. Le questionnaire proposé au téléphone a ensuite été envoyé par courriel lors d’une seconde vague d’enquête ; 10 185 adhérents en 2010 y ont alors répondu. Les résultats sont analysés dans l’article suivant : Henri Rey, « Les adhérents socialistes : permanences et changements », Revue socialiste, 42, 2011, p. 125-135.
-
[50]
L’enquête réalisée au Cevipof par Florence Haegel, Florence Faucher-King et Nicolas Sauger me sert de base de comparaison. Il s’agit d’un questionnaire diffusé auprès des adhérents lors du congrès du 28 novembre 2004, date de l’investiture de Nicolas Sarkozy comme président du parti. Une partie des résultats de cette enquête est présentée dans un article de F. Haegel qui tente de saisir les logiques partisanes et sociales d’adhésion à l’UMP : Florence Haegel, « La mobilisation partisane de droite. Les logiques organisationnelles et sociales d’adhésion à l’UMP », Revue française de science politique, 59 (1), février 2009, p. 7-27.
-
[51]
Insee, estimations de population (résultats provisoires arrêtés fin 2010), <http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=bilan-demo®_id=0&page=donnees-detaillees/bilan-demo/pop_age2b.htm>.
-
[52]
Eszter Hargittai, Steven Shafer, « Differences in Actual and Perceived Online Skills : The Role of Gender », Social Science Quarterly, 87, 2006, p. 432-448.
-
[53]
Par « populaire », je désigne, dans cet article, les militants UMP.
-
[54]
Eurostat, enquête sur les forces de travail dans l’Union européenne, 2009, <http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPTEF07251>.
-
[55]
J’ai remarqué que les enquêtés chefs d’entreprise avaient tendance à s’inscrire dans le groupe « cadres, professions intellectuelles supérieures », certainement plus valorisante en termes d’ego, et ne se reconnaissaient pas dans le groupe « artisans, commerçants ». J’ai donc pensé qu’il serait plus pertinent de créer une variable à part pour éviter ces confusions.
-
[56]
F. Haegel, « La mobilisation partisane de droite… », art. cité, p. 16.
-
[57]
Cette différence est développée dans la partie suivante intitulée « une catégorie fantôme ».
-
[58]
F. Haegel, « La mobilisation partisane de droite… », art. cité, p. 21.
-
[59]
F. Haegel, ibid.
-
[60]
H. Rey, « Les adhérents socialistes… », art. cité.
-
[61]
Par population agricole, les auteurs entendent, outre les agriculteurs exploitants et co-exploitants, les aides familiaux, les ouvriers agricoles et les anciens agriculteurs exploitants en retraite.
-
[62]
Bertrand Hervieu, François Purseigle, « Les électorats sociologiques. Les mondes agricoles : une minorité éclatée, ancrée à droite », Élections 2012, 13, Paris, Cevipof, 2012, <http://www.cevipof.com/rtefiles/File/AtlasEl3/NotePURSEIGLEHERVIEU.pdf>.
-
[63]
Il s’agit du chiffre indiqué dans l’enquête de Florence Haegel (« La mobilisation partisane de droite… », art. cité).
-
[64]
Nonna Mayer, « Le vote des agriculteurs en 1988 : facteurs individuels, facteurs contextuels », dans Bertrand Hervieu (dir.), Les agriculteurs français aux urnes, Paris, L’Harmattan, 1992, p. 47-65 ; Daniel Boy, Élisabeth Dupoirier, « La stabilité du vote de droite des agriculteurs : facteurs d’explication », dans Pierre Coulomb, Hélène Delorme, Bertrand Hervieu (dir.), Les agriculteurs et la politique, Paris, Presses de Sciences Po, 1990, p. 578-585.
-
[65]
Sur la Toile, on parle de « troll » ou « trolleur » quand un internaute tente de créer des polémiques pour perturber l’équilibre d’une discussion en ligne. Je reprends ici ce terme pour souligner la « perturbation » volontaire de certains répondants non adhérents qui souhaitaient visiblement « perturber » notre enquête en répondant aux questions ouvertes par des suites de lettres (« luviodfmkjh ») ou des éléments inappropriés et déconcertants (Connaissez-vous des outils numériques mis en place par le PS ? – Réponse : « sodomie.com » !!).
-
[66]
S. J. Ward, W. Lusoli, R. K. Gibson, « Virtually Participating … », art. cité.
-
[67]
Karina Pedersen, Joe Saglie, « New technology in Ageing Parties. Internet Use in Danish and Norwegian Parties », Party Politics, 11 (3), 2005, p. 359-377.
1La référence au militantisme de gauche, voire communiste structure les recherches françaises sur l’engagement au sein de partis politiques et a vu apparaître une opposition entre la figure « classique » de l’ouvrier militant et les supposés « nouveaux » militants. La place grandissante prise par Internet dans les campagnes électorales françaises vient a priori conforter cette dichotomie très présente dans les représentations véhiculées par les médias [1] et par certains militants nostalgiques d’une période qu’ils décrivent comme un « âge d’or » [2]. Internet permet-il d’élargir une sociologie de l’engagement partisan très rétrécie historiquement en France ? Le « cyber-militant » [3] est-il, de ce point de vue aussi, un « nouveau » militant ?
2Les travaux qui répondent par l’affirmative s’attachent aux formes d’action, mais « négligent les propriétés sociales des militants » [4]. Peu de travaux s’intéressent, en effet, aux profils sociologiques du cyber-militant car celui-ci est difficile à repérer, caché derrière son écran, souvent sous couvert d’anonymat [5]. Stéphanie Wojcik constate ainsi « la méconnaissance des trajectoires des individus prenant part aux dispositifs participatifs, qu’ils soient en ligne ou hors ligne » [6]. Dans le cadre de sa thèse, elle n’a d’ailleurs pas pu interroger les utilisateurs des forums municipaux étudiés : « Il n’a pas été possible d’effectuer des entretiens auprès des internautes, la parole qui leur est donnée […] provient donc exclusivement de messages écrits postés sur les forums de discussion » [7]. Leur profil socio-démographique n’est pas identifié de manière précise et c’est le dispositif technique et son « design » [8] qui est le point d’entrée de plusieurs recherches, notamment en science de l’information et de la communication. Cette méthode de recherche se place dans tout un courant actuel de la recherche française sur la participation politique qui se concentre sur les usages des dispositifs participatifs par « le haut » (institutions à l’origine de l’outil) plutôt qu’ils ne livrent des éclairages par « le bas » (les usagers directs). La thèse de Gersende Blanchard s’inscrit dans cette optique en axant la recherche sur les sites Internet des partis politiques français hors période de campagne : sur cette base, « les usagers n’ont donc été perçus qu’au travers de leurs productions discursives, et de la médiation de celles-ci, exercée par les modérateurs des forums, ou au travers de la représentation qu’en ont les acteurs de la mise en œuvre de la communication des partis » [9]. Lorsque les chercheurs se penchent sur les usagers des dispositifs numériques, c’est essentiellement à travers leurs mots, c’est-à-dire l’analyse des discussions en ligne, en adoptant une méthodologie d’analyse de contenu [10], tout en se référant souvent au modèle habermassien [11]. Les analyses en termes de « design » ou de contenu esquissent donc le profil du cyber-militant, mais n’apportent pas de données précises. Quelques travaux récents, optant pour une analyse quantitative, fournissent toutefois des pistes, mais uniquement pour le PS (et non pour l’UMP). C’est le cas des enquêtes de Godefroy Beauvallet et Maurice Ronai qui apportent des informations sur le profil des participants à Temps réels [12] – section virtuelle du PS – ou de l’étude de Raphael Kies [13], consacrée au profil des internautes (qui ne sont pas forcément encartés) participant au forum des Radicaux italiens. On peut encore mentionner les analyses de Thierry Vedel et Karolina Koc Michalska sur le profil des visiteurs de sites politiques à l’occasion de la campagne électorale [14]. Dans ces études, il s’agit plutôt de définir le profil de l’internaute s’intéressant aux questions politiques ou utilisant certains espaces numériques politisés – mais pas forcément adhérent à un parti politique. Aucune recherche en France, à notre connaissance, ne porte sur le profil sociodémographique du cyber-militant dans un parti politique. Pour des données plus précises sur ce plan, il faut mobiliser des travaux étrangers. La distinction entre le profil classique du militant (hors ligne) et celui du militant en ligne, déjà établie par G. Beauvallet et M. Ronai, se retrouve dans les travaux de Rachel Gibson et Stephen Ward [15]. Au sein du parti libéral démocrate britannique, les militants en ligne sont plus jeunes et adoptent des formes de militantisme plus « passives » [16] : « Les internautes politiques tendent à être plus urbains, de classe moyenne et plus souvent des hommes » [17].
3Pour compléter ces résultats, je propose de dresser le portrait sociologique du militant en ligne et de le comparer au militant hors-ligne. Pour identifier le profil du cyber-militant au PS et à l’UMP, j’ai mené une enquête quantitative [18], par le biais d’un questionnaire diffusé de main à main (version papier), mais aussi en ligne – Facebook, Coopol [19], forums politiques, sites d’actualité politique – auprès des adhérents UMP (n = 332) et PS (n = 489) des fédérations de Paris, de la Gironde et des Alpes-Maritimes afin d’identifier plus précisément qui milite en ligne. En m’appuyant sur l’auto-évaluation des enquêtés [20], je parlerai de cybermilitant « déclaré » ou « autodéclaré ».
4Le questionnement qui a guidé ma démarche méthodologique est le suivant : comment enquêter sur ces militants d’un genre particulier ? Et dans quelle mesure une enquête en ligne fournit-elle au chercheur des données sur le profil social de ce type de militant ? Cette note de recherche a d’abord pour objectif d’exposer ma méthode d’enquête (dont l’originalité provient de l’utilisation de Facebook), puis d’analyser en quoi le cyber-militant – comparé au militant hors-ligne – est « toujours plus » : plus diplômé, plus masculin, plus haut dans la position professionnelle, etc.
Enquêter en ligne pour « capter les cyber-militants »
5Le web 2.0 [21] offre de nouvelles possibilités pour diffuser un questionnaire [22]. L’intérêt d’une passation par les réseaux sociaux est notamment de pouvoir cibler l’échantillon – dans cette enquête, il s’agit de s’adresser uniquement aux adhérents de l’UMP et du PS, et notamment les cyber-militants – et de toucher individuellement les possibles répondants de façon massive.
Une passation de questionnaires de façon « traditionnelle » difficile et peu appropriée pour une enquête sur l’activité en ligne
6Le questionnaire a été élaboré en mai 2011 en s’appuyant sur des exemples de questionnaires concernant l’usage d’Internet [23] ou le militantisme [24], tout en bénéficiant des conseils et appuis méthodologiques dispensés au sein du Centre Émile Durkheim [25]. Il comporte à la fois des questions fermées et des questions ouvertes et se compose de trois rubriques se reportant :
- aux caractéristiques sociodémographiques (sexe, âge, niveau d’études, CSP…) et positionnement politique (courants, fonctions) ;
- à la représentation de l’adhérent, du militant et aux pratiques du militantisme ;
- aux différentes dimensions de l’usage d’Internet, de façon globale et dans le cadre spécifique de leur activité militante.
7La passation s’est déroulée de juin à octobre 2011. Dans un premier temps, j’ai pris contact avec le directeur de la communication de la fédération de Paris du PS afin de diffuser le questionnaire auprès des adhérents connectés de cette fédération par le biais de leur liste de diffusion. Celui-ci n’a pas pu répondre positivement à ma demande, m’expliquant qu’une enquête avait déjà été diffusée, peu de temps auparavant, par Solferino auprès des nouveaux adhérents, sans passer par l’intermédiaire des secrétaires de section. Cet envoi massif, ne respectant pas les échelons partisans traditionnels, a été mal perçu par les bureaux de sections et il ne souhaitait donc pas répéter cette démarche. Tout comme Mounia Bennani-Chraïbi l’avait déjà remarquée dans son expérience de passation de questionnaires auprès des partis marocains [27], « la négociation préalable à l’enquête quantitative donne à voir des éléments originaux sur le fonctionnement concret des partis » [28] – ici l’importance de la structure pyramidale du PS et des enjeux d’échelle (national/fédéral/local). Dans un second temps, je me suis donc adressée aux secrétaires de circonscription/sections des fédérations étudiées afin de diffuser mon enquête [29]. À la fin des entretiens semi-directifs avec les secrétaires de circonscription/section, je leur soumettais mon questionnaire pour qu’ils le complètent et je leur proposais ensuite de venir distribuer la version papier (ou qu’ils la distribuent) dans leur section/circonscription. La plupart ont accepté de réaliser un envoi massif de mon questionnaire à la liste de diffusion des adhérents de leur section/circonscription. Ce protocole me permettait de toucher à la fois des adhérents non connectés (diffusion d’exemplaires papiers en réunion) et connectés (envoi par courriel avec un fichier attaché). Toutefois, le taux de retour a été assez faible (excepté quand j’étais présente lors des réunions de section/circonscription pour expliquer ma démarche et récupérer les questionnaires complétés à la fin de la séance), cela m’a donc poussé à imaginer d’autres manières de rentrer en contact avec des adhérents afin de leur faire compléter mon questionnaire en direct.
8Pour cibler une recherche sur les adhérents, il convient d’aller les chercher lors de moments solennels où seule cette population spécifique se trouve réunie, telle que les congrès des partis politiques, car ceux-ci « rassemblent, en un moment solennisé par la culture politique de l’organisation, tous les animateurs du parti, considérés à ses différents degrés d’activité : leaders nationaux et locaux, cadres intermédiaires et représentants actifs de la base » [30]. Le chercheur serait alors en contact avec la « chair militante de l’organisation, avec ceux qui la font vivre et agir à tous les niveaux » [31]. En 2011, je suis donc allée à la rencontre de cette « chair militante » : lors de la Convention sur le projet du PS le 28 mai ; de la Fête de la rose de la fédération de Paris du PS le 18 juin ; de la conférence « Les valeurs de l’UMP » à Bordeaux le 27 juin ; de l’Université d’été de La Rochelle du PS les 26, 27, 28 août ; de l’Université d’été de l’UMP à Marseille les 2, 3, 4 septembre ; du meeting de Ségolène Royal pour les primaires du PS à Parempuyre le 25 septembre (fédération Gironde) et à Paris le 7 octobre ; du meeting de Martine Aubry à Cenon (fédération Gironde) le 29 septembre ; du meeting de François Hollande à Paris le 13 octobre. J’ai pu ainsi distribuer, de main à main, mon questionnaire papier et noter quelques adresses électroniques pour procéder à des envois par ce vecteur. Plusieurs questionnaires ont été complétés et m’ont été rendus sur place ; quelques-uns retournés par voie postale. L’envoi par courrier du questionnaire-papier, une fois complété, est un frein évident à des retours importants.
Diffuser le questionnaire sur Facebook : des retours importants et un échantillon ciblé
9La passation papier du questionnaire ne permet pas de toucher les adhérents qui militent uniquement sur la Toile et ne se déplacent pas lors des réunions ou meetings. C’est la raison pour laquelle j’ai élaboré une version numérique de mon questionnaire, via la plateforme Google, qui se complète directement en ligne en quelques clics. Cette version permet de remplir le questionnaire beaucoup plus rapidement et la tâche paraît moins fastidieuse, ce qui explique certainement, en partie, les bons taux de retour pour ce format (comparé à la version papier). J’ai ensuite diffusé ce questionnaire numérique sur les forums de discussions des sites d’actualités, sur des forums politiques… Il m’est très vite apparu que Facebook pouvait être un moyen efficace pour accéder à tout un réseau de militance en ligne. Je suis donc devenue, en deux mois environ, « amie » avec plus de 2 000 militants UMP et plus de 2 000 militants PS afin de diffuser mon questionnaire sur leur « mur » [32]. J’ai rencontré de nombreuses difficultés que je souhaite ici expliciter afin d’éviter ces tâtonnements aux chercheurs qui voudraient expérimenter cette démarche pour leurs enquêtes.
10Dans un premier temps, j’ai demandé comme amis sur Facebook les adhérents que j’avais rencontrés au cours de ma recherche (entretiens semi-directifs) sans distinction de parti politique. Je me suis vite rendue compte qu’il était nécessaire de créer deux comptes Facebook différents pour contacter les membres de partis concurrents, au risque d’avoir sinon trop peu d’amis puisque même les personnes interrogées en entretien ne répondaient pas à ma demande, voyant que je n’avais que des amis PS (car les militants socialistes ont été les premiers à répondre à mon invitation à « devenir amis »). Les deux comptes, PS et UMP, créés sous ma véritable identité, m’ont par la suite posé d’autres difficultés. Plusieurs amis virtuels militants UMP [33], voyant que je possédais un autre compte Facebook comptabilisant une centaine d’amis virtuels militants PS, m’ont envoyé un message pour m’expliquer que, dans ce cas, ils « ne voulaient plus être mes amis ». Je leur ai, à chaque fois, répondu pour leur expliciter ma démarche de recherche, mais cela ne m’a pas toujours permis de redevenir « amie » avec eux.
11Cette première vague d’amitié (d’adhérents rencontrés en entretiens ou à responsabilités locales) s’est vite concrétisée, mais il me fallait l’amplifier pour obtenir un échantillon suffisant pour mon enquête quantitative. Dans un second temps, j’ai donc demandé « en ami » les amis de mes amis qui affichaient sur leurs profils leurs adhésions à un des partis étudiés. La période de campagne des primaires socialistes, durant laquelle s’est déroulée mon enquête, a facilité mon travail d’identification des adhérents puisque ces derniers mettaient alors en avant leur engagement en « customisant » leur profil, apposant notamment un badge sur leur photo, marquant un soutien ou un rejet vis-à-vis de telle personnalité (par exemple, MB pour les partisans de Martine Aubry…).
12Une fois ce réseau de militance en ligne constitué et accessible au chercheur, il s’agit de diffuser le questionnaire sur les murs. L’idée est en effet de ne pas se contenter d’une diffusion via des messages privés, mais bien plutôt de poster directement sur le mur (lorsque les paramètres de configuration des comptes de mes nouveaux amis le permettaient) mon questionnaire, accompagné d’un message de présentation de mon enquête. Cette technique permet de toucher tous les amis de mes amis qui consultent le mur de cette personne et d’afficher l’enquête dans le fil d’actualité de Facebook, ce qui amplifie encore sa visibilité. Ainsi, certains enquêtés que je n’avais pas moi-même sollicités ont pu répondre à mon questionnaire, s’étant sentis concernés du fait qu’ils étaient adhérents au PS ou à l’UMP : « Bonjour, j’ai trouvé par hasard votre questionnaire, j’ai essayé d’y répondre… bonne continuation ! Amicalement [anonymisé] » [34].
13Toutefois, cette démarche s’avère assez intrusive. En effet, je demande en ami une personne que j’ai identifiée comme étant adhérente au PS ou à l’UMP et dès que celle-ci a accepté mon invitation à devenir ami, je poste sur son mur mon enquête. J’ai donc enregistré plusieurs réticences de la part de mes « nouveaux amis » n’appréciant pas cette technique, en raison de la « nouveauté » de notre amitié ou des spécificités de leur compte Facebook (pas uniquement militant) : « J’y réponds ! mais je retire le message de mon mur, je préserve mon orientation politique » [35] ; « Bonsoir Anaïs. J’accepte de répondre à ton questionnaire mais je voudrais d’abord te signaler qu’il est bien plus agréable de recevoir le lien en message Perso plutôt que de publier sur le mur » [36]. Lorsque je recevais ce type de message, dans la continuité de ma volonté d’être la plus transparente possible, je m’excusais et leur expliquais les stratégies de cette technique de diffusion. En fait, j’ai recueilli très peu de retours négatifs et mes nouveaux « amis » me contactaient davantage pour me faire part d’informations sur la thématique de mes recherches. Certains m’envoyaient régulièrement des liens pointant vers des articles de journaux sur le militantisme en ligne ou m’écrivaient pour me décrire leurs actions, me donner leurs avis, leurs idées : « je me trompe peut être, est ce vous qui faites une tfese [sic] sur le militantisme ! ! ? si oui, j’ai qq idées ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ! ? Amicalement » [37]. J’ai été surprise de constater combien les personnes contactées sont ravies de répondre au questionnaire et me félicitent pour ma démarche d’enquête : « Bonjour Madame Theviot, J’ai remarqué votre questionnaire et ne manquerai pas d’y répondre. Si vous avez besoin de compléments pour votre thèse je reste à votre disposition. Bien à vous » [38]. Certains adhérents ont même diffusé auprès de leur réseau militant sur Facebook et Twitter mon enquête en ligne : « Salut, tu peux la mettre sur mon mur… [anonymisé] Conseiller Régional [anonymisé] je diffuse également… » [39]. Cet aval donné par un « camarade », notamment lorsque celui-ci a une légitimité au sein de l’institution partisane (par exemple, mon questionnaire a été diffusé en leur nom par un attaché parlementaire, un sénateur, un Premier secrétaire de fédération, un conseiller régional…), annule les réticences [40] que pouvaient encore avoir certains adhérents pour répondre à mon questionnaire.
14Une fois le questionnaire diffusé sur ce réseau social, ce processus d’amitié virtuelle avec mes enquêtés s’est révélé très utile dans d’autres dimensions de ma recherche puisque j’avais accès – bien que cela pose de nombreuses questions éthiques – à toutes leurs traces numériques laissées sur leurs murs pendant la campagne 2012 [41].
Analyse comparée du profil du cyber-militant à l’UMP et au PS
15Comparer le PS et l’UMP fait sens car ces deux partis ont des conceptions distinctes du web propres à leur culture militante – l’une faisant appel à une vision tentant de contrôler le réseau en ayant recours à des professionnels de la communication [43] et l’autre s’appuyant davantage sur ses ressources militantes et sa communauté virtuelle active (blogosphère de gauche) pour diffuser massivement des messages souvent sur le mode de l’humour – et ne véhiculent pas la même image sur le réseau [44]. Ainsi, nous pouvons supposer que ces différences se retrouvent dans le portrait du cyber-militant.
« L’UMP, c’est un parti qui est une base de données de ouf, qui est très doué pour faire du marketing, qui peut en trois clics envoyer un mail à des personnes qui ont moins de 30 ans et qui sont cadres supérieures et qui vivent à Paris. Mais après, ils ont beaucoup de mal à trouver le discours juste pour faire passer un message en ligne. » [45]
17L’UMP cherche à rattraper son retard et à galvaniser son image sur Internet en poussant ses militants à y avoir recours, à devenir des « cyber-militants ». Lucie Bargel et Anne-Sophie Petitfils soulignent que l’usage du web s’est intensifié en 2004, avec l’arrivée de Nicolas Sarkozy à la tête de l’UMP afin, tout d’abord, de recruter de « nouveaux adhérents » [46], puis de militer en ligne. Ainsi, en 2011, lors de l’émission « Paroles de Français » (où Nicolas Sarkozy dialoguait avec neuf citoyens) diffusée sur TF1 le 10 février, Jean-François Copé, secrétaire général de l’UMP, avait envoyé un courriel à l’ensemble des adhérents pour les inciter à « relayer les messages » du président.
« Nous serons unis pour faire face aux campagnes de désinformation et de démagogie orchestrées par l’opposition et relayées sans scrupule par certains médias. Je compte particulièrement sur vous pour faire part de vos réactions et commentaires sur les différents sites d’actualités disponibles sur Internet. » [47]
19Cette injonction à utiliser le web trouve-t-elle écho dans tout l’univers militant de l’UMP ou s’adresse-t-elle à un profil particulier d’adhérent ? Les visions différentes du web au PS et à l’UMP se retrouvent-elles dans le profil du cyber-militant de ces deux partis ? Autrement dit, le profil du cyber-militant au PS est-il plus « ouvert » [48] que celui du cyber-militant UMP ? En somme, qui milite sur Internet ?
Un cyber-militant masculin
20Le cyber-militant autodéclaré, que ce soit à l’UMP ou au PS, est plutôt un homme (73 % à l’UMP et au PS). Comparée au profil « traditionnel » (hors-ligne) des militants PS et UMP, la place des hommes est renforcée sur le Net militant. Pourtant, cela ne semble pas dû à un manque de femmes sur la Toile puisque le profil type de l’internaute français est assez équilibré concernant le genre. Selon ces données – se référer au tableau 2 –, les femmes, plus nombreuses que les hommes dans la population française, seraient quasiment autant présentes sur la Toile, mais moins investies dans le militantisme et encore plus distanciées dans le militantisme en ligne. Les travaux d’E. Hargittai soulignent d’ailleurs, sur cette question du genre, que les femmes ont un sentiment d’incompétence plus grand que les hommes, quant à la politique en général mais aussi la politique en ligne (par exemple, les femmes estiment être moins susceptibles que les hommes d’accéder aux services gouvernementaux sur le web ou de s’informer sur les candidats lors des élections [52]).
Un cyber-militant jeune
21Le cyber-militant UMP ou PS se rapproche davantage du profil de l’internaute que de celui du militant classique de ces deux formations. En effet, il est majoritairement beaucoup plus jeune (29 % des cyber-militants socialistes ont moins de 30 ans, 34 % pour les cyber-militants populaires [53]). Environ la moitié des cyber-militants socialistes et populaires ont moins de 40 ans, ce qui contraste fortement avec le profil type des militants « traditionnels » de l’UMP et du PS. Les cyber-militants âgés de plus de 70 ans sont très minoritaires (4 % au PS ; 2 % à l’UMP), en comparaison du pourcentage d’adhérent de cet âge au sein des deux partis étudiés (10 % au PS, 12 % à l’UMP). La jeunesse semble donc être une variable clé distinguant le cyber-militant du militant « traditionnel » au PS et à l’UMP. On aurait pu croire que les « papis-militants », ayant peut-être des soucis de santé ou des difficultés à se déplacer, auraient trouvé dans l’activisme sur Internet un moyen pratique pour prolonger leur militantisme. Encore faut-il être équipé (ordinateurs et connexion Internet) et avoir les compétences intellectuelles et techniques (créer une boîte mail, un profil Facebook…) – si ce n’est l’envie – pour militer sur Internet.
Structure des âges (en %)
Structure des âges (en %)
Un cyber-militant surdiplômé
22Les cyber-militants UMP/PS déclarés apparaissent très diplômés : 38 % sont titulaires d’une licence et/ou un master au PS, 39 % pour l’UMP, et 14 % au PS ont fait leur cursus au sein d’une Grande École et/ou ont fait une thèse, 13 % pour l’UMP. De façon plus globale, 70 % des cyber-militants socialistes sont diplômés du supérieur, 65 % des cyber-militants UMP. Comparé aux militants classiques de ces partis, on note que le cyber-militant est encore plus diplômé – alors que le militant classique s’avère déjà surdiplômé par rapport à la population française (28 % des Français sont diplômés du supérieur [54]). En effet, selon l’enquête de 2004, 55 % des militants UMP « traditionnels » ont un niveau supérieur au baccalauréat, contre 65 % des cyber-militants UMP selon nos données. Les résultats de l’enquête sur les adhérents socialistes de 2008, 2009 et 2010 d’Henri Rey montrent que 64 % ont un niveau supérieur au baccalauréat. Là encore, les cyber-militants socialistes sont davantage diplômés que les militants « traditionnels » de ce parti, puisqu’ils gagnent 6 points.
Le niveau d’étude (en %)
Le niveau d’étude (en %)
Un cyber-militant appartenant aux catégories socioprofessionnelles supérieures
23Au titre des éléments communs à l’UMP et au PS, on trouve la place prépondérante qu’occupent les professions dites supérieures, cadres et professions intellectuelles dans les deux organisations (52 % au PS, 47 % à l’UMP) et, à l’inverse, la quasi-absence des ouvriers (2 % au PS, 1 % à l’UMP). Sur ce point, on ne peut que constater, une fois encore, la force opératoire des logiques sociales inégalitaires structurant l’engagement politique, renforcé dans la militance en ligne (52 % des cyber-militants socialistes, contre 49 % des militants PS classiques appartiennent à la catégorie « cadres et professions sup »). À cet égard, la prise en compte de la profession des parents vient nuancer nos propos puisque le cyber-militant a majoritairement des parents ayant exercé des professions supérieures (PS : 37 % pour le père, 19 % pour la mère ; UMP : 30 % pour le père, 16 % pour la mère) mais la répartition entre les différentes catégories s’avère plus équilibrée, à tel point que 15 % des pères des cybermilitants socialistes étaient des ouvriers. J’ai choisi de légèrement modifier la nomenclature des groupes socioprofessionnels proposée par l’Insee, en sortant la catégorie « chef d’entreprise de 10 salariés et + » du groupe « artisans, commerçants, chefs d’entreprise » et en en faisant une variable à part [55]. L’objectif est ici de bien distinguer les chefs d’entreprise de plus de dix salariés des artisans/commerçants afin de tester l’idée selon laquelle les adhérents de l’UMP seraient fortement ancrés dans le monde de l’entreprise (« référence souvent faite au “modèle managérial”, ainsi qu’à la transformation de la figure traditionnelle du “chef politique” en “chef d’entreprise”, qu’engage, à sa façon, Nicolas Sarkozy » [56]). Cette légère modification explique certainement le renforcement du groupe « commerçant, artisans, chef d’entreprise » en 2011 pour l’UMP (14 % dont 6 % chef d’entreprise de 10 salariés et +) par rapport aux données de 2004 (10 %). Le profil professionnel du militant « traditionnel », comparé à celui du cyber-militant est assez similaire. Seule une catégorie est surreprésentée sur la Toile : les agriculteurs exploitants [57].
Professions (de la personne interrogée, de son père et de sa mère) et secteurs d’activité
Professions (de la personne interrogée, de son père et de sa mère) et secteurs d’activité
24S’agissant du secteur d’activité, les adhérents de l’UMP appartiennent classiquement au secteur privé (62 %), s’opposant ainsi au PS rattaché davantage au secteur public (59 %). « Encore faut-il préciser que la formation de droite surreprésente tout de même les salariés du public, situé autour des 30 % de la population active globale française » [58]. On ne retrouve pas cette distinction dans le profil du cyber-militant : le cyber-militant UMP est majoritairement issu du secteur public (49 %) tout comme le cyber-militant socialiste (58 %). Il faut toutefois noter que ma nomenclature prenait en compte les secteurs associatifs et indépendants, contrairement aux enquêtes de 2004 [59] et 2010 [60]. Mon hypothèse est que le secteur associatif a pu être assimilé au secteur public et le secteur indépendant au secteur privé. Si tel est le cas, nous aurions un ancrage moins affirmé du cyber-militant populaire dans le secteur public, mais plutôt un partage équilibré entre les deux secteurs (48 % secteur privé, 52 % secteur public). En suivant la même logique, le cyber-militant socialiste serait encore davantage ancré dans le secteur public (66 % secteur public, 34 % secteur privé). Comparé au militant UMP « traditionnel », le cyber-militant aurait un profil davantage tourné vers le secteur public tandis que le cyber-militant socialiste verrait son profil « traditionnel » ancré dans le secteur public davantage renforcé.
Une catégorie « fantôme »
2510 % des cyber-militants UMP exercent la profession d’agriculteurs exploitants alors que seuls 2 % des adhérents UMP exercent cette activité, selon l’enquête de Florence Haegel. Le mode de passation de mon questionnaire, à la fois en ligne et hors-ligne, a pu jouer un rôle déterminant : les agriculteurs exploitants semblent plus difficiles à toucher lors de rassemblements partisans. Or, l’enquête 2004 interrogeait uniquement les adhérents présents lors du congrès du 28 novembre 2004. Peu d’agriculteurs exploitants y ont assisté, selon les données de cette enquête ; mais cela ne signifie pas forcément que ces derniers ne sont pas adhérents à l’UMP. Les militants agriculteurs exploitants, ne pouvant militer de façon classique (tractage, réunions…) du fait de leur profession et de leur isolement géographique, militent beaucoup plus en ligne. Ainsi, le chercheur peut capter ces militants « fantômes » seulement sur la Toile puisque c’est là qu’ils exercent l’essentiel de leur activité militante. Cette hypothèse se trouve vérifiée lorsque qu’on distingue les deux modalités de passation de notre questionnaire (voir tableau 6). Les cyber-militants « populaires » et socialistes qui ont répondu au questionnaire hors-ligne, dans sa forme papier, diffusé en section/circonscription ou lors de rassemblements de militants (meeting, Université d’été, fêtes…) ne sont pas des agriculteurs (0 %). Cette catégorie se retrouve uniquement chez les répondants en ligne. Les militants exerçant la profession d’agriculteur exploitant seraient donc souvent sous-évalués dans les enquêtes hors-ligne car ils ne se déplacent pas dans les réunions ou congrès et ne sont pas actifs dans les formes « traditionnelles » de militantisme, mais bien plutôt en ligne ; et donc repérables que par une enquête diffusée sur Internet. Sachant qu’en 2007, au second tour, 63 % de la « population agricole » [61] aurait voté pour Nicolas Sarkozy [62], il n’est pas non plus étonnant que le taux d’agriculteurs adhérents à l’UMP dépasse 2 % [63].
Répartition des professions en fonction des modalités de passation du questionnaire (hors-ligne/en ligne)
Répartition des professions en fonction des modalités de passation du questionnaire (hors-ligne/en ligne)
26Non seulement cette population votent tendanciellement à droite [64], mais le taux d’adhésion à l’UMP chez les agriculteurs est plus élevé que ce que montrent les enquêtes précédentes et parmi eux il y a de nombreux cyber-militants (50 % des agriculteurs se disent cybermilitants, 35 % ne savent pas). L’accélération de la pénétration d’Internet dans les campagnes ces derniers années offre cette possibilité : 78 % des agriculteurs possédaient en 2011 un ordinateur et 70 % utilisaient Internet à domicile, (83 % pour les actifs toutes professions) d’après l’Insee.
28Cette note tente de combler certains manques dans les recherches sur le profil sociodémographique du cyber-militant à l’UMP et au PS, tout en proposant une méthode pour « capter » ces activistes d’un genre particulier.
29Les recherches précédentes ont mis au jour la difficulté à enquêter sur le profil de personnes ayant une activité militante sur Internet ; celles-ci protègent souvent leur identité (anonymat) et ne peuvent être approchées que sur leur terrain d’action, qui s’avère virtuel. De telles enquêtes demandent donc à reconsidérer les méthodologies traditionnelles pensées à l’origine pour des terrains hors-ligne. Cet article est donc l’occasion de révéler les nouvelles potentialités que l’essor des réseaux sociaux offre en termes de recherche scientifique. Diffuser mon questionnaire via Facebook a permis non seulement de récolter un nombre de données important – alors qu’avec la version papier du questionnaire, les retours étaient peu nombreux – mais aussi de pouvoir toucher les activistes en ligne. L’intérêt de cette méthode est d’avoir la possibilité de contacter individuellement (en passant par leur « mur ») mais de façon massive de possibles répondants ayant une activité en ligne, préalablement ciblés (dans le cas de notre enquête, il s’agit des adhérents UMP et PS). Ce contact individuel, ciblé, touchant presque à la sphère intime (quand les enquêtés ont peu d’amis sur Facebook), tout en étant accessible à l’ensemble des amis des amis, induit un rapport moins distant à l’enquête – les personnes contactées sont dans de meilleurs dispositions pour répondre au questionnaire puisque celui-ci provient d’un « ami », qui, même s’il n’est pas personnellement connu, dispose du même réseau de contacts militants et peut donc être considéré comme de confiance. Il s’agit ici d’utiliser la structure réticulaire du web qui permet des « effets boule de neige » en mettant en contact le chercheur avec tout un réseau de militance en ligne. Cela comporte néanmoins quelques difficultés puisque cette diffusion massive et ciblée demande en amont de se constituer un réseau important d’amis sur Facebook pour avoir accès à leur « mur » et confronte le chercheur aux logiques d’Internet, notamment aux agissements des « trolls » [65].
30Cette approche méthodologique m’a permis de compléter les résultats des enquêtes précédentes sur le profil sociologique des cyber-militants au PS et à l’UMP, en s’éloignant des préceptes des nouveautés supposément induits par le recours aux TIC. En effet, le militant en ligne ne peut être considéré comme un « nouveau » militant au sens où son profil sociodémographique diffère peu de celui du militant dit « traditionnel » : un homme, diplômé de l’enseignement supérieur (majoritairement une licence ou un master), exerçant une profession dite supérieure dans le secteur public. Focaliser le débat scientifique autour de la question de la nouveauté a pour effet de dissimuler les continuités. Le profil sociologique du cyber-adhérent correspond en fait à celui d’un militant « traditionnel » aux caractéristiques exacerbées : le cyber-militant est « toujours plus ». Toujours plus diplômé, plus masculin, plus haut dans la position professionnelle. Internet vient donc renforcer des traits existants et contribuerait à créer un « stéréotype » de l’adhérent. Une distinction néanmoins : alors que le militant classique populaire a autour de 50 ans, voire plus, notre cyber-militant a moins de 30 ans ! Ce travail vient donc confirmer les résultats des enquêtes effectuées dans d’autres pays sur le profil du cyber-militant [66]. Ceux qui militent en ligne sont en fait les membres les plus actifs, dont l’action en ligne s’ajoute à celle du terrain [67]. Distinguer les militants en ligne des militants hors-ligne conduit à accorder trop d’importance à la forme ou l’outil du militantisme, alors que la clé de compréhension est dans le degré d’implication du militant. Plus celui-ci s’engage de façon intensive, plus son activité militante s’étendra dans toutes les domaines/espaces d’action possibles.
31Pour prolonger cette enquête, il serait intéressant de comparer le profil du cyber-militant avec celui du « nouvel » adhérent au PS et à l’UMP. Le profil de ces derniers, de par leur adhésion en ligne, peut avoir des similitudes encore plus fortes avec celui du cyber-militant, notamment au niveau de l’âge.
32Enfin, les résultats de cette enquête montrent que 10 % des cyber-militants autodéclarés sont des agriculteurs exploitants. Ce pourcentage est important comparé à celui des militants « traditionnels » agriculteurs exploitants. Le taux d’agriculteurs adhérents à l’UMP est sous-évalué par les enquêtes papier diffusées de main à main, lors de congrès ou événements réunissant des militants. Seules des enquêtes en ligne permettent de capter cette catégorie de la population, souvent isolée géographiquement et ne se déplaçant pas aux événements solennels du parti, étant donné leur charge de travail quotidienne.
33Il serait intéressant de poursuivre cette analyse quantitative en comparant les résultats par fédération afin d’identifier l’importance ou non des configurations locales ; ainsi que de mener une enquête qualitative auprès de ces agriculteurs cyber-militants afin d’étudier leurs carrières militantes.
Notes
-
[1]
Voir par exemple : « Le web, nouveau canal pour le militantisme et l’engagement citoyen », Le Point, 6 décembre 2011.
-
[2]
Remi Lefebvre, « Le militantisme socialiste n’est plus ce qu’il n’a jamais été. Modèle de l’engagement distancié et transformations du militantisme au parti socialiste », à paraître en 2013.
-
[3]
Helen Margetts parle de « cyber-parti », au sens où le parti tendrait à se détacher des structures traditionnelles et des modes de communication en face-à-face et privilégierait la machine sans intermédiaire humain (Helen Margetts, « Cyber Parties », dans Richard, Katz, William, Crotty (eds), Handbook of Party Politics, Londres, Sage, 2006, p. 528-535). Je reprends ici sa formule en l’adossant cette fois-ci aux militants, mais dans une acception plus large : le cyber-militant serait un adhérent qui milite activement sur Internet. Nous préférons employer l’expression « cyber-militant » et non « cyber-adhérent » car cette dernière fait davantage allusion à l’adhésion en ligne – les cyber-adhérents socialistes à 20 euros.
-
[4]
Frédéric Sawicki, Johanna Siméant, « Décloisonner la sociologie de l’engagement militant. Note critique sur quelques tendances récentes des travaux français », Sociologie du travail, 51 (1), 2009, p. 97-125, dont p. 108.
-
[5]
Patrice Flichy, « Internet et le débat démocratique », Réseaux, 150, 2008, p. 159-185.
-
[6]
Stéphanie Wojcik, « Compétence et citoyenneté. Esquisse d’une analyse critique des travaux sur les dispositifs participatifs en face-à-face et en ligne », communication au Congrès de la Société québécoise de science politique, Montréal, 2008.
-
[7]
Stéphanie Wojcik, « Délibération électronique et démocratie locale. Le cas des forums municipaux des régions Aquitaine, Languedoc-Roussillon et Midi-Pyrénées », thèse de doctorat de science politique, Toulouse, Université Toulouse I, 2005.
-
[8]
Scott Wright, John Street, « Democracy, Deliberation and Design : The Case of Online Discussion Forum », New Media and Society, 9 (5), 2007, p. 849-869.
-
[9]
Gersende Blanchard, « La communication politique partisane sur Internet : des pratiques et des stratégies nouvelles ? », thèse de doctorat en sciences de l’information et de la communication, Grenoble, Université Stendhal-Grenoble 3, 2007.
-
[10]
Lincoln Dahlberg, « Computer-Mediated Communication and the Public Sphere : A Critical Analysis », Journal of Computer-Mediated Communication, 7 (1), 2001, <http://onlinelibrary.wiley.com/doi/10.1111/j.1083-6101.2001.tb00137.x/full> ; Michel Marcoccia, « Les Webforums des partis politiques français : quels modèles de discussion politique ? », dans « La politique mise au Net », Mots. Les langages du politique, 80, 2006, p. 49-60.
-
[11]
Nicolas Desquinabo, « Polémique ou délibération ? Les usages des forums partisans pendant la campagne 2007 », dans Fabienne Greffet (dir.), Continuerlalutte.com. Les partis politiques sur le Web, Paris, Presses de Sciences Po, 2011, p. 249-254.
-
[12]
Godefroy Beauvallet, Maurice Ronai, « Vivre à Temps réels », Réseaux, 129-130, 2005, p. 275-309.
-
[13]
Raphaël Kies, « Forum en ligne et partis politiques », Réseaux, 150, 2008, p. 133-158.
-
[14]
Thierry Vedel, Karolina Koc Michalska, « The Internet and French Political Communication in the Aftermath of the 2007 Presidential Election », communication au 5th ECPR General Conference Panel sur « Parties, campaigns and Media Technologies », Potsdam, 2009.
-
[15]
Stephen J. Ward, Wainer Lusoli, Rachel K. Gibson, « Virtually Participating : A Survey of On-line Party Members », Information Polity, 7 (4), 2002, p. 199-215.
-
[16]
Autrement dit, ces militants n’optent pas pour un engagement participatif : organisation d’événements, recrutement de nouveaux adhérents sur Internet, mise en réseau des militants… Ils préfèrent s’investir de façon plus « passive », dans un militantisme plus individuel, nécessitant moins d’investissements (en termes de temps, notamment), tels que des donations au parti ou des diffusions/relectures d’argumentaires.
-
[17]
Rachel K. Gibson, Stephen J. Ward, « Renouveler le parti ? Les stratégies de campagnes et d’organisation en ligne des partis britanniques », dans F. Greffet (dir.), Continuerlalutte.com…, op. cit., p. 109-123, dont p. 111.
-
[18]
Il est nécessaire ici de préciser que cette enquête ne prétend nullement atteindre la représentativité de la totalité de la population adhérente à l’UMP et au PS.
-
[19]
Nom donné au réseau social socialiste, créé le 12 janvier 2010. Pour plus de précisions : Anaïs Theviot, « Militer tout en critiquant publiquement son parti. Le cas du réseau social socialiste, La Coopol », Cahiers du Centre Émile Durkheim, 12, 2012, p. 1-44.
-
[20]
Question no 21 de notre enquête quantitative : « a- Vous sentez-vous un(e) “cyber-militant(e)” ? Oui/Non ; b- Pourquoi ? »
-
[21]
En suivant Kaplan et Haenlein, le web 2.0 est entendu comme un regroupement d’applications en ligne qui permettent la création et l’échange de contenu généré par les utilisateurs. (Andreas H. Kaplan, Michael Haenlein, « Users of the World, Unite ! The Challenges and Opportunities of Social Media », Business Horizons, 53 (1), 2010, p. 59-68 ; definition p. 61).
-
[22]
La nécessité de fonder une réflexion spécifique sur les méthodes à mobiliser sur des terrains web a été soulignée à travers la publication de l’ouvrage : Christine Barats (dir.), Manuel d’analyse du web en sciences sociales, Paris, Armand Colin, 2013. En ce qui concerne la diffusion d’un questionnaire en ligne, se référer plus spécifiquement à : Gersende Blanchard, Simon Gadras, Stéphanie Wojcik, « Analyser la participation politique en ligne : des traces numériques aux pratiques sociales », dans C. Barats (dir.), ibid., p. 166-178.
-
[23]
Olivier Donnat, Les pratiques culturelles des Français à l’ère numérique : enquête 2008, Paris, La Découverte/Ministère de la Culture et de la Communication, 2009 ; Daniel Peraya, Gabriela Florescu, Ion Vicovan, Nicolae Chifar, « Enquête sur les usages d’Internet et des applications standards réalisée auprès des étudiants à fréquence réduite inscrits pour 2001-2002 de la faculté de théologie orthodoxe roumaine de l’Université Al. I Cuza Iasi », International Journal Annals of the University Al. I. Cuza Iasi, 2003, p. 287-316, <http://www.tecfa.unige.ch/~peraya/homepage/publi/03_enquete_sur_les_usagesl.pdf>.
-
[24]
Lucie Bargel, « Aux avant-postes. La socialisation au métier politique dans deux organisations de jeunesse de parti. Jeunes populaires (UMP) et Mouvement des jeunes socialistes (PS) », thèse de doctorat en science politique, Paris, Université Paris I-Panthéon Sorbonne, 2008.
-
[25]
Je tiens à remercier Viviane Le Hay pour son aide précieuse dans l’élaboration de mon questionnaire et sa formation au logiciel Stata ; Agnès Alexandre-Collier, Matthieu Béra, Florence Haegel, Cindy Morillas, Antoine Roger et Stéphanie Wojcik pour leurs relectures actives ; ainsi que Gérard Loiseau et Laurence Monnoyer-Smith pour leurs conseils.
-
[26]
Cette enquête s’inscrit dans une recherche plus large dans le cadre de ma thèse de doctorat de science politique : « Militer sur Internet. Reconfigurations des stratégies partisanes et du militantisme au Parti socialiste et à l’Union pour un mouvement populaire », Sciences Po Bordeaux (en cours d’écriture).
-
[27]
Mounia Bennani-Chraïbi, « Quand négocier l’ouverture du terrain c’est déjà enquêter. Obtenir la passation de questionnaires aux congressistes de partis marocains », Revue internationale de politique comparée, 17 (4), 2010, p. 93-108.
-
[28]
Myriam Aït-Aoudia, Carole Bachelot, Lucie Bargel, Hélène Combes, Stéphanie Dechezelles, Nathalie Ethuin, Florence Haegel, Catherine Leclercq, Élise Massicard, Anne-Sophie Petitfils, « Enquêter dans les partis politiques. Perspectives comparées », Revue internationale de politique comparée, ibid., p. 7-13, dont p. 11.
-
[29]
Je remercie également toutes les personnes qui m’ont aidée à diffuser ce questionnaire.
-
[30]
Roland Cayrol, Colette Ysmal, « Les militants du PS originalité et diversité », Projet, 165, 1982, p. 572-586, dont p. 572.
-
[31]
R. Cayrol, C. Ysmal, ibid., p. 572.
-
[32]
Un « mur » (« wall », en anglais) est la dénomination employée sur le réseau social Facebook pour désigner la page où les amis et l’utilisateur peuvent écrire des messages de façon publique, c’est-à-dire que tous les internautes peuvent les lire (cela dépend encore des paramètres de confidentialité choisi par l’utilisateur qui, le plus souvent, réserve cette fonction uniquement à ses amis). Il était donc nécessaire d’établir cette amitié virtuelle car la plupart des « murs » sont fermés, c’est-à-dire qu’on ne peut y avoir accès si l’on ne fait pas partie des « amis ».
-
[33]
J’ai noté une méfiance plus forte des militants UMP, qui me contactaient souvent pour me demander si j’étais bien encartée à l’UMP, s’ils pouvaient avoir plus de précisions sur ma recherche avant de devenir ami.
-
[34]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 28 octobre 2011.
-
[35]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 7 septembre 2011.
-
[36]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 27 septembre 2011.
-
[37]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent de l’UMP, le 29 septembre 2011.
-
[38]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent de l’UMP, le 2 octobre 2011.
-
[39]
Message privé envoyé sur mon compte Facebook par un adhérent du PS, le 28 octobre 2011.
-
[40]
Certains adhérents ont refusé de répondre à l’enquête, en raison des questions portant sur le profil sociodémographique, les considérant comme trop personnelles : « Salut Camarade, je voulais répondre avec plaisir ! mais les questions sont trop perso ! Respect de la vie privée avant tout ! Amitiés ! » (Message privé posté par un adhérent du PS sur mon compte Facebook le 2 septembre 2011).
-
[41]
Anaïs Theviot, « Un silence numérique bavard – Anticipations et stratégies de contournement du silence numérique pendant la campagne pour l’élection présidentielle française de 2012 », dans « Le silence en politique » Mots, à paraître.
-
[42]
Il s’agit en majorité soit de militants du Front national dont le but est de « casser » du PS notamment, soit d’anciens adhérents qui n’ont pas (souvent volontairement) renouvelé leur adhésion.
-
[43]
Par exemple pour la campagne numérique pour l’élection présidentielle française de 2012, l’UMP a fait appel à une agence spécialisée dans le numérique (Emakina), alors que le PS a souhaité développer ses outils web en interne.
-
[44]
Suite à quelques « ratés », l’UMP a une image défavorable sur le web – certains considérant même ce parti comme « anti-Internet » avec la loi Hadopi (qui cherche à contrôler les téléchargements allant à l’encontre des droits d’auteur). Parmi les tentatives avortées, on peut citer les Créateurs du possible, réseau social de l’UMP contraint de fermer un an après sa création en janvier 2010 alors que le parti y a investi près de 500 000 euros.
-
[45]
Rémi Rousseau, chargé de mission à la Netscouad (agence spécialisée dans la communication web, dirigée par Benoît Thieulin), entretien du 27 janvier 2012.
-
[46]
Lucie Bargel, Anne-Sophie Petitfils, « Appropriations d’Internet et trajectoires militantes “dans” et “en dehors” de l’Union pour un mouvement populaire », dans F. Greffet (dir.), Continuerlalutte.com…, op. cit., p. 187-199, dont p. 188.
-
[47]
Jean-François Copé dans sa lettre aux militants UMP.
-
[48]
Au sens où Internet semble d’une appropriation plus « naturelle » aux adhérents du PS qu’à ceux de l’UMP car plus proche de la culture partisane de ce parti, tournée vers les discussions et la délibération – le profil du cyber-militant PS ne se limiterait donc pas aux jeunes « geeks ».
-
[49]
Dans une approche comparative, j’ai indiqué dans ce tableau les données les plus récentes que j’ai trouvées sur les adhérents « traditionnels » du PS et de l’UMP. Pour le PS, l’enquête a été menée par téléphone par ISL (Institut de sondage Lavialle) auprès de 1 100 adhérents socialistes issus des fichiers de 2008, 2009, 2010. Le questionnaire proposé au téléphone a ensuite été envoyé par courriel lors d’une seconde vague d’enquête ; 10 185 adhérents en 2010 y ont alors répondu. Les résultats sont analysés dans l’article suivant : Henri Rey, « Les adhérents socialistes : permanences et changements », Revue socialiste, 42, 2011, p. 125-135.
-
[50]
L’enquête réalisée au Cevipof par Florence Haegel, Florence Faucher-King et Nicolas Sauger me sert de base de comparaison. Il s’agit d’un questionnaire diffusé auprès des adhérents lors du congrès du 28 novembre 2004, date de l’investiture de Nicolas Sarkozy comme président du parti. Une partie des résultats de cette enquête est présentée dans un article de F. Haegel qui tente de saisir les logiques partisanes et sociales d’adhésion à l’UMP : Florence Haegel, « La mobilisation partisane de droite. Les logiques organisationnelles et sociales d’adhésion à l’UMP », Revue française de science politique, 59 (1), février 2009, p. 7-27.
-
[51]
Insee, estimations de population (résultats provisoires arrêtés fin 2010), <http://www.insee.fr/fr/themes/detail.asp?ref_id=bilan-demo®_id=0&page=donnees-detaillees/bilan-demo/pop_age2b.htm>.
-
[52]
Eszter Hargittai, Steven Shafer, « Differences in Actual and Perceived Online Skills : The Role of Gender », Social Science Quarterly, 87, 2006, p. 432-448.
-
[53]
Par « populaire », je désigne, dans cet article, les militants UMP.
-
[54]
Eurostat, enquête sur les forces de travail dans l’Union européenne, 2009, <http://www.insee.fr/fr/themes/tableau.asp?reg_id=98&ref_id=CMPTEF07251>.
-
[55]
J’ai remarqué que les enquêtés chefs d’entreprise avaient tendance à s’inscrire dans le groupe « cadres, professions intellectuelles supérieures », certainement plus valorisante en termes d’ego, et ne se reconnaissaient pas dans le groupe « artisans, commerçants ». J’ai donc pensé qu’il serait plus pertinent de créer une variable à part pour éviter ces confusions.
-
[56]
F. Haegel, « La mobilisation partisane de droite… », art. cité, p. 16.
-
[57]
Cette différence est développée dans la partie suivante intitulée « une catégorie fantôme ».
-
[58]
F. Haegel, « La mobilisation partisane de droite… », art. cité, p. 21.
-
[59]
F. Haegel, ibid.
-
[60]
H. Rey, « Les adhérents socialistes… », art. cité.
-
[61]
Par population agricole, les auteurs entendent, outre les agriculteurs exploitants et co-exploitants, les aides familiaux, les ouvriers agricoles et les anciens agriculteurs exploitants en retraite.
-
[62]
Bertrand Hervieu, François Purseigle, « Les électorats sociologiques. Les mondes agricoles : une minorité éclatée, ancrée à droite », Élections 2012, 13, Paris, Cevipof, 2012, <http://www.cevipof.com/rtefiles/File/AtlasEl3/NotePURSEIGLEHERVIEU.pdf>.
-
[63]
Il s’agit du chiffre indiqué dans l’enquête de Florence Haegel (« La mobilisation partisane de droite… », art. cité).
-
[64]
Nonna Mayer, « Le vote des agriculteurs en 1988 : facteurs individuels, facteurs contextuels », dans Bertrand Hervieu (dir.), Les agriculteurs français aux urnes, Paris, L’Harmattan, 1992, p. 47-65 ; Daniel Boy, Élisabeth Dupoirier, « La stabilité du vote de droite des agriculteurs : facteurs d’explication », dans Pierre Coulomb, Hélène Delorme, Bertrand Hervieu (dir.), Les agriculteurs et la politique, Paris, Presses de Sciences Po, 1990, p. 578-585.
-
[65]
Sur la Toile, on parle de « troll » ou « trolleur » quand un internaute tente de créer des polémiques pour perturber l’équilibre d’une discussion en ligne. Je reprends ici ce terme pour souligner la « perturbation » volontaire de certains répondants non adhérents qui souhaitaient visiblement « perturber » notre enquête en répondant aux questions ouvertes par des suites de lettres (« luviodfmkjh ») ou des éléments inappropriés et déconcertants (Connaissez-vous des outils numériques mis en place par le PS ? – Réponse : « sodomie.com » !!).
-
[66]
S. J. Ward, W. Lusoli, R. K. Gibson, « Virtually Participating … », art. cité.
-
[67]
Karina Pedersen, Joe Saglie, « New technology in Ageing Parties. Internet Use in Danish and Norwegian Parties », Party Politics, 11 (3), 2005, p. 359-377.