Notes
-
[1]
Helen Ingram, Anne Schneider, « The Choice of Target Populations », Administration & Society, 23 (3), 1991, p. 333-356.
-
[2]
Néologisme qui a pour objet de traduire en français la distinction anglo-saxonne conformity/compliance. En anglais, la notion de compliance est plus large que la notion de conformity. Compliance désigne un acquiescement à des attentes qui peuvent être de formes multiples : règles, normes, propositions, prières, injonctions, suggestions, etc. Au contraire, conformity (comme le français « conformité ») désigne une identification à une « forme » précise : un standard, une règle, une loi, une norme sociale. De telle sorte que l’on peut définir conformity comme « compliance with standards, rules, or laws ». De plus, la notion de « conformité » évoque assez fréquemment l’idée de normes sociales partagées, alors que l’influence de celles-ci n’est qu’un élément parmi d’autres dans la réponse aux sollicitations publiques. Enfin, la notion de conformation ne doit pas être confondue avec la notion d’obéissance. La conformation n’est pas que l’obéissance, elle inclut également le consentement, et consentement et obéissance sont deux choses différentes, comme souligné par Hannah Arendt (Responsibility and Judgment, New York, Schocken, 2003, p. 42-43). Cf. également G. Pyrcz, « Obedience, Support, and Authority : The Limits of Political Obligation in a Democracy », Canadian Journal of Political Science, 14(2), 1981, p.337-352.
-
[3]
Voir Frank Baumgartner Bryan D. Jones, Agendas and Instability in American Politics, Chicago, University of Chicago Press, 1993 ; Bruno Jobert, Pierre Muller, L’État en action. Politiques publiques et corporatismes, Paris, PUF, 1987 ; John W. Kingdon, Agendas, Alternatives and Public Policies, New York, Longman, 1984 ; Giandomenico Majone, Evidence, Argument, & Persuasion in the Policy Process, New Haven, Yale University Press, 1989 ; Anne Schneider, Helen Ingram, Policy Design for Democracy, Studies in Government and Public Policy, Lawrence, University Press of Kansas, 1997.
-
[4]
Wayne Parsons, Public Policy, Cheltenham, Edward Elgar, 1995, p. 457 et suiv.
-
[5]
Dietmar Braun, Olivier Giraud, « Politikinstrumente im Kontext von Staat, Markt und Governance », dans Klaus Schubert, Nils C. Bandelow (Hrsg.), Lehrbuch der Politikfeldanalyse 2.0., Munich, Oldenburg Verlag, 2009, p. 159-190 ; Pearl Eliadis, Margaret M. Hill, Michael Howlett, « Introduction », dans Pearl Eliadis, Margaret M. Hill, Michael Howlett (eds), Designing Government. From Instruments to Governance, Montreal & Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2005, p. 1-18 ; Christopher Hood, The Tools of Government, Chatham, Chatham House, 1986 ; Pierre Lascoumes, Patrick Le Galès, Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, 2004 ; Lester M. Salamon (ed.), The Tools of Government. A Guide to the New Governance, Oxford, Oxford University Press, 2002.
-
[6]
Pascale Laborier, Dany Trom (dir.), Historicités de l’action publique, Paris, PUF, 2003 ; Renaud Payre, Gilles Pollet, « Analyse des politiques publiques et sciences historiques : quel(s) tournant(s) socio-historique(s) ? », Revue française de science politique, 55 (1), février 2005, p. 133-154.
-
[7]
P. Eliadis et al., « Introduction », cité, p. 7.
-
[8]
Joe Soss a initié un questionnement sur les effets du policy design sur les destinataires : « To gauge its overall effects, we must think more broadly about how policy designs affect status, belief, and action in the citizenry » (Joe Soss, « Making Clients and Citizens : Welfare Policy as a Source of Status, Belief, and Action », dans Anne Schneider, H. Ingram (eds), Deserving and Entitled : Social Constructions and Public Policy, New York, State University of New York Press, 2005, p. 292). Le policy design est analysé comme une cause et non plus comme un effet : « policy designs construct contexts of transaction and subject positions for citizens who enter the welfare system » (ibid., p. 302). Il est aussi désormais étudié au niveau microsociologique, et non plus strictement macrosociologique, comme fait jusqu’alors par Schneider et Ingram (Policy Design for Democracy…, op. cit.).
-
[9]
« […] A practice and a way of thinking about rule […] » : Mitchell Dean, Governmentality, Londres, Sage, 1999, p. 78.
-
[10]
En particulier les travaux de Gibbs, Tittle et Jensen, puis ceux de Grasmick et Green, Silberman, Meier et Johson. Voir notamment Harold G. Grasmick, Donald E. Green, « Legal Punishment, Social Disapproval and Internalization as Inhibitors of Illegal Behavior », The Journal of Criminal Law and Criminology, 71 (3), 1980, p. 325-335.
-
[11]
Gary S. Becker, « Crime and Punishment : An Economic Approach », Journal of Political Economy, 76, mars-avril 1968, p. 169-217 ; Gary S. Becker, George J. Stigler, « Law Enforcement, Malfeasance, and Compensation of Enforcers », The Journal of Legal Studies, 3 (1), 1974, p. 1-18 ; George J. Stigler, « The Optimum Enforcement of Laws », Journal of Political Economy, 78 (3), 1970, p. 526-536.
-
[12]
G. S. Becker, G. J. Stigler, ibid.
-
[13]
Par exemple, Sam Peltzman, « The Effects of Automobile Safety Regulation », Journal of Political Economy, 83 (4), 1975, p. 677-725 ; G. J. Stigler, « The Optimum Enforcement… », op. cit.
-
[14]
Entre autres H. G. Grasmick, D. E. Green, « Legal Punishment, Social Disapproval… », art. cité ; Raymond Paternoster, Linda E. Saltzman, Gordon P. Waldo, Theodore G. Chiricos. « Perceived Risk and Social Control : Do Sanctions Really Deter ? », Law & Society Review, 17 (3), 1983, p. 457-480 ; Raymond Paternoster, Sally Simpson, « Sanction Threats and Appeals to Morality : Testing a Rational Choice Model of Corporate Crime », Law & Society Review, 30 (3), 1996, p. 549-583 ; Lawrence W. Sherman, « Defiance, Deterrence, and Irrelevance : A Theory of the Criminal Sanction », Journal of Research in Crime and Delequency, 30 (4), 1993, p. 445-473 ; plus généralement : Diane Vaughan, « Rational Choice, Situated Action, and the Social Control of Organizations », Law and Society Review, 32 (1), 1998, p. 23-61.
-
[15]
La théorie de la décision a néanmoins fourni des propositions plus fines que ses détracteurs oublient parfois. On y trouve très tôt l’idée d’une pluralité de motivations dans les comportements individuels. Peltzman, dans une étude classique sur les effets de la régulation sur la sécurité routière (S. Peltzman, « The Effects of Automobile… », art. cité) a identifié un effet contre-intuitif des régulations publiques, qu’il a appelé « offsetting effect ». Il a supposé que les destinataires des règles sur la sécurité routière ont compensé la contrainte de la ceinture de sécurité par une conduite plus dangereuse, laquelle leur permettait de retirer de la conduite la stimulation que la ceinture avait brimée.
-
[16]
George Tsebelis, « The Effects of Fines on Regulated Industries », Journal of Theoretical Politics, 3 (1), 1991, p. 81-101 ; et « Penalty and Crime : Further Theoretical Considerations and Empirical Evidence », Journal of Theoretical Politics, 5 (3), 1993, p. 349-374.
-
[17]
Laura I. Langbein, Cornelius M. Kerwin, « Implementation, Negotiation and Compliance in Environmental and Safety Regulation », The Journal of Politics, 47 (3), 1985, p. 854-880.
-
[18]
Ian Ayres, John Braithwaite, Responsive Regulation, New York/Oxford, Oxford University Press, 1992 ; John T. Scholz, « Enforcement Policy and Corporate Misconduct : The Changing Perspective of Deterrence Theory », Law & Contemporary Problems, 60 (3), 1997, p. 253-268.
-
[19]
Ian Ayres, John Braithwaite, « Tripartism : Regulatory Capture and Empowerment », Law and Social Inquiry, 16 (3), 1991, p. 435-496.
-
[20]
Cf. G. Tsebelis, « The Effects of Fines… », art. cité.
-
[21]
Valerie Braithwaite, John Braithwaite, Diane Gibson, Toni Makkai, « Regulatory Styles, Motivational Postures and Nursing Home Compliance », Law & Policy, 16 (4), 1994, p. 363.
-
[22]
James G. March, Johan P. Olsen, Rediscovering Institutions. The Organizational Basis of Politics, New York, Free Press, 1989 ; et « The Logic of Appropriateness », dans Michael Moran, Martin Rein et Robert E. Goodin (eds), The Oxford Handbook of Public Policy, Oxford, Oxford University Press, 2006, p. 689-708.
-
[23]
I. Ayres, J. Braithwaite, Responsive Regulation, op. cit.
-
[24]
Ibid., p. 96.
-
[25]
Voir notamment Neil Gunningham, Peter Grabosky, Smart Regulation. Designing Environmental Policy, Oxford, Oxford University Press, 1998 ; Neil Gunningham, Dorothy Thornton, Robert A. Kagan, « Motivating Management : Corporate Compliance in Environmental Protection », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 289-316 ; Ch. Hood, The Tools…, op. cit. ; Robert A. Kagan, John T. Scholz, « The Criminology of the Corporation and Regulatory Enforcement Strategies », dans Keith O. Hawkins, John M. Thomas (eds), Enforcing Regulation, Hingham, Kluwer-Nijhoff, 1984, p. 67-96 ; Ronald B. Mitchell, « Compliance Theory : Compliance, Effectiveness, and Behaviour Change in International Environmental Law », dans Jutta Brunee, Daniel Bodansky, Ellen Hey (eds), Oxford Handbook of International Environmental Law, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 893-921 ; John T. Scholz, « Cooperation, Deterrence, and the Ecology of Regulatory Enforcement », Law & Society Review, 18 (2), 1984, p. 179-224 ; L. W. Sherman, « Defiance, Deterrence, and Irrelevance… », art. cité ; Ton van Snellenberg, Rob van de Peppel, « Perspectives on Compliance : Non-Compliance with Environmental Licences in the Netherlands », European Environment, 12, 2002, p. 131-148 ; Dorothy Thornton, Neil Gunningham, Robert A. Kagan, « General Deterrence and Corporate Environmental Behavior », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 262-288.
-
[26]
R. A. Kagan, J. T. Scholz, « The Criminology… », cité.
-
[27]
Eugene Bardach, Robert A. Kagan, Going by the Book. The Problem of Regulatory Unreasonableness, New Brunswick/Londres, Transaction Publishers, 2e éd., 2002.
-
[28]
Ch. Hood, The Tools…, op. cit.
-
[29]
Voir Kathleen M. McGraw, John T. Scholz, « Appeals to Civic Virtue Versus Attention to Self-Interest : Effects on Tax Compliance », Law & Society Review, 25 (3), 1991, p. 471-498.
-
[30]
Voir notamment James Alm, Isabel Sanchez, Ana De Juan, « Economic and Noneconomic Factors in Tax Compliance », Kyklos, 48 (1), 1995, p. 3-18 ; Sebastian Bamberg, Peter Schmidt, « Regulating Transport : Behavioural Changes in the Field », Journal of Consumer Policy, 22, 1999, p. 479-509, dont p. 505 ; Ray Fisman, Edward Miguel, « Corruption, Norms and Legal Enforcement : Evidence from Diplomatic Parking Tickets », Journal of Political Economy, 115 (6), 2007, p. 1020-1048 ; Stig S. Gezelius, « Do Norms Count ? State Regulation and Compliance in a Norwegian Fishing Community », Acta Sociologica, 45 (4), 2002, p. 305-314, et Regulation and Compliance in the Atlantic Fisheries, Dordrecht, Kluwer Academic Publishers, 2003 ; Fiona Haines, David Gurney, « The Shadows of the Law : Contemporary Approaches to Regulation and the Problem of Regulatory Conflict », Law & Policy, 25 (4), 2003, p. 353-380 ; Siegwart Lindenberg, Linda Steg, « Normative, Gain and Hedonic Goal Frames Guiding Environmental Behavior », Journal of Social Issues, 63 (1), 2007, p. 117-137 ; Peter J. May, « Regulation and Compliance Motivations : Examining Different Approaches », Public Administration Review, 65 (1), 2005, p. 31-44, et « Compliance Motivations : Perspectives of Farmers, Homebuilders, and Marine Facilities », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 317-347 ; J. T. Scholz, « Enforcement Policy and… » ; Michael Wenzel, « Motivation or Rationalisation ? Causal Relations between Ethics, Norms and Tax Compliance », Journal of Economic Psychology, 26, 2005, p. 491-508. On trouve une évolution similaire dans la théorie économique des années 1990 : cf. John G. Cullis, Alan Lewis, « Why People Pay Taxes : From a Conventional Economic Model to a Model of Social Convention », Journal of Economic Psychology, 18, 1997, p. 305-321, dont p. 312.
-
[31]
Par exemple : John Braithwaite, Toni Makkai, « Testing an Expected Utility Model of Corporate Deterrence », Law & Society Review, 25 (1), 1991, p. 7-40 ; V. Braithwaite, J. Braithwaite, D. Gibson, T. Makkai, « Regulatory Styles… », art. cité.
-
[32]
Ronald B. Mitchell, Intentional Oil Pollution at Sea, Cambridge, MIT Press, 1994.
-
[33]
Lars P. Feld, Bruno S. Frey, « Tax Compliance as the Result of a Psychological Tax Contract : The Role of Incentives and Responsive Regulation », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 102-120 ; R. Paternoster, S. Simpson, « Sanction Threats… », art. cité ; John T. Scholz, « Contractual Compliance and The Federal Income Tax System », Journal of Law & Policy, 13, 2003, p. 139-203.
-
[34]
Fiona Haines, Corporate Regulation. Beyond « Punish or Persuade », Oxford, Clarendon Press, 1997, p. 234. Dans le même sens : S. Bamberg, P. Schmidt, « Regulating Transport… », art. cité, p. 480 ; S. Lindenberg, L. Steg, « Normative, Gain and Hedonic Goal Frames… », art. cité ; Paul C. Stern, « Information, Incentives, and Proenvironmental Consumer Behavior », Journal of Consumer Policy, 22 (4), 1999, p. 461-478.
-
[35]
Cf. P. J. May, « Regulation and Compliance Motivations… », art. cité ; et « Compliance Motivations… », art. cité.
-
[36]
Walter W. Powell, Paul J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism in Organizational Analysis, Chicago, Chicago University Press, 1991 ; J. G. March, J. P. Olsen, Rediscovering Institutions…, op. cit. ; Douglass C. North, Institutions, Institutional Change and Economic Performance, Cambridge, Cambridge University Press, 1990.
-
[37]
Julia Black, « New Institutionalism and Naturalism in Socio-Legal Analysis : Institutionalist Approaches to Regulatory Decision Making », Law & Policy, 19 (1), 1997, p. 51-93 ; Mark C. Suchman, Lauren B. Edelman, « Legal Rational Myths : The New Institutionalism and the Law and Society Tradition », Law and Social Inquiry, 21 (4), 1997, p. 903-941 ; John R. Sutton, « Rethinking Social Control », Law & Social Inquiry, 21 (4), 1996, p. 943-958.
-
[38]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 66.
-
[39]
Cf. D. C. North, Institutions, Institutional Change…, op. cit.
-
[40]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 67.
-
[41]
Ibid., p. 68.
-
[42]
Roger Friedland, Robert R. Alford, « Bringing Society Back In : Symbols, Practices, and Institutional Contradictions », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism in Organizational Analysis, op. cit., p. 232-266.
-
[43]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 70.
-
[44]
Paul J. DiMaggio, Walter W. Powell, « The Iron Cage Revisited : Institutional Isomorphism and Collective Rationality in Organizational Fields », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 63-82.
-
[45]
M. C. Suchman, L. B. Edelman, « Legal Rational Myths… », art. cité, p. 922-923.
-
[46]
John M. Meyer, Brian Rowan, « Institutionalized Organizations : Formal Structure as Myth and Ceremony », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 41-62.
-
[47]
Andrew Hopkins, « Compliance with What ? The Fundamental Regulatory Question », British Journal of Criminology, 34 (4), 1994, p. 431-443.
-
[48]
Également Nils Brunsson, The Organization of Hypocrisy, Copenhague, Copenhagen Business School Press, 2002.
-
[49]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 82.
-
[50]
C’est notamment le cas en ce qui concerne les sanctions, qui tiennent un rôle central dans la littérature sur la conformation. Comme l’écrivent DiMaggio et Powell, la théorisation du rapport entre sanctions et institutions n’est pas cohérente à l’intérieur du courant néo-institutionnaliste : Paul J.DiMaggio, Walter W. Powell, « Introduction », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 37, note 23.
-
[51]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 81.
-
[52]
Ibid., p. 81-82 ; M. C. Suchman, L. B. Edelman, « Legal Rational Myths… », art. cité, p. 905. L’article de Jepperson et Meyer dans l’ouvrage dirigé par Powell et DiMaggio en est une bonne illustration.
-
[53]
M. C. Suchman, L. B. Edelman, ibid., p. 907-908 ; cf. aussi F. Haines, D. Gurney, « The Shadows of the Law… », art. cité.
-
[54]
Voir Vibeke Lehmann Nielsen, « Dialogue, Differential Treatment and Public Regulation : Why the very Character of Social Interaction is Important », dans 2003 Annual Meeting of the Law and Society Association (LSA), Pittsburgh, Pennsylvania, USA, 2003 ; Christine Parker, « How to Win Hearts and Minds : Corporate Compliance Policies for Sexual Harassment », Law & Policy, 21 (1), 1999, p. 21-48, et The Open Corporation. Effective Selfregulation and Democracy, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
-
[55]
Edward J. Bird, « Can Welfare Policy Make Use of Social Norms ? », Rationality and Society, 11 (3), 1999, p. 343-365 ; S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité ; et, Regulation and Compliance…, op. cit. ; Christine Horne, « The Enforcement of Norms : Group Cohesion and Meta-Norms », Social Psychology Quarterly, 64 (3), 2001, p. 253-266 ; « Collective Benefits, Exchange Interests, and Norm Enforcement », Social Forces, 82 (3), 2004, p. 1037-1062 ; et « Explaining Norm Enforcement », Rationality and Society, 19 (2), 2007, p. 139-170.
-
[56]
Lawrence Lessig, « The Regulation of Social Meaning », The University of Chicago Law Review, 62 (3), 1995, p. 943-1045 ; Michael P. Vandenbergh, « Beyond Elegance : A Testable Typology of Social Norms in Corporate Environmental Compliance », Stanford Environmental Law Journal, 22, 2003, p. 55-144.
-
[57]
James S. Coleman, Foundations of Social Theory, Cambridge, Harvard University Press, 1990.
-
[58]
Voir Mark Granovetter, « Economic Action and Social Structure : The Problem of Embeddedness », American Journal of Sociology, 91 (3), 1985, p. 481-510.
-
[59]
S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, et Regulation and Compliance…, op. cit. ; Lawrence Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité ; Michael Wenzel, « The Social Side of Sanctions : Personal and Social Norms as Moderators of Deterrence », Law and Human Behavior, 28 (5), 2004, p. 547-567, « Motivation or Rationalization ?… », art. cité, « The Multiplicity of Taxpayer Identities and Their Implications for Tax Ethics », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 31-50.
-
[60]
L’auteur a proposé une théorie de la conformation qui peut aussi être associée à ce troisième courant : Julien Étienne, « L’impact de l’action publique sur les comportements privés : une approche de goal framing theory », thèse pour le doctorat de science politique, Amiens, Université de Picardie-Jules Verne, 2009.
-
[61]
V. Braithwaite, J. Braithwaite, D. Gibson, T. Makkai, « Regulatory Styles… », art. cité ; Valerie Braithwaite, Kristina Murphy, Monika Reinhart, « Taxation Threat, Motivational Postures, and Responsive Regulation », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 137-158.
-
[62]
Sharon S. Brehm, Jack W. Brehm, Pscychological Reactance : A Theory of Freedom and Control, New York, Academic Press, 1981.
-
[63]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, « Taxation Threat… », art. cité.
-
[64]
Ibid., p. 138.
-
[65]
« Motivational postures […] summarize many forces that individuals perceive in their environment, internal and external, some created by the specific actions of a regulatory authority, others existing independently of that authority. Among the relevant variables are identities […], notions of duty and of fear […], rationalization […], ideological preferences, and feelings of trust […] » (ibid., p. 139-140).
-
[66]
Voir Tom R. Tyler, Why People Obey the Law, Princeton, Princeton University Press, 2006.
-
[67]
Uwe Schimank, Handeln und Strukturen. Einführung in die akteurtheorische Soziologie, Weinheim, Juventa, 2000. L’homme émotionnel, d’abord motivé par la recherche du bien-être individuel immédiat, reste le moins exploré de ces paradigmes (Jon Elster, Nuts and Bolts for the Social Sciences, Cambridge, Cambridge University Press, 1989, p. 61-70 ; « Emotions and Economic Theory », Journal of Economic Literature, 36 (1), 1998, p. 47-74), même si les émotions font l’objet d’une attention croissante, notamment en économie (cf. Astrid Hopfensitz, Ernesto Reuben, « The Importance of Emotions for the Effectiveness of Social Punishment », The Economic Journal, 119 (540), 2009, p. 1534-1559). L’homo sociologicus, motivé par le choix du comportement qui convient, évoque la logique de l’action normée des sociologues classiques et celle de l’action appropriée (logic of appropriateness). Quant à l’homo oeconomicus, il peut être associé aux variantes les plus classiques de la théorie économique et sociologique fondée sur l’hypothèse d’un individu utilitariste et maximisateur. C’est le paradigme qui fonde la théorie du choix rationnel.
-
[68]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, « Taxation Threat… », art. cité., p.140-141.
-
[69]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 140-141.
-
[70]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 153.
-
[71]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 151.
-
[72]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 151.
-
[73]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 152.
-
[74]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 152-153.
-
[75]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 140-141.
-
[76]
Cf. Ronald B. Mitchell, Intentional Oil Pollution at Sea, op. cit.
-
[77]
Cf. S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, Regulation and Compliance…, op. cit. ; L. Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité.
-
[78]
Ibid.
-
[79]
Voir Anne Schneider, Helen Ingram, « Behavioral Assumptions of Policy Tools », Journal of Politics, 52 (2), 1990, p. 510-529.
-
[80]
A. Schneider, H. Ingram (eds), Deserving and Entitled…, op. cit. ; J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité ; M. Dean, Governmentality, op. cit., p. 165.
-
[81]
Christian Steglich, The Framing of Decision Situations. Automatic Goal Selection and Rational Goal Pursuit, Groningen, Department of Behavioral and Social Sciences, ICS Disseration Series, University of Groningen, 2003.
-
[82]
Cf. William A. Edmundson, « Is Law Coercive ? », Legal Theory, 1, 1995, p. 81-111.
-
[83]
J. T. Scholz, « Cooperation, Deterrence, and the Ecology… », art. cité, et « Cooperative Regulatory Enforcement and the Politics of Administrative Effectiveness », American Political Science Review, 85 (1), 1991, p. 115-136.
-
[84]
J. T. Scholz, « Enforcement Policy… », art. cité.
-
[85]
Christine H. Roch, John T. Scholz, Kathleen M. McGraw, « Social Networks and Citizen Response to Legal Change », American Journal of Political Science, 44 (4), 2000, p. 777-791 ; John T. Scholz, Neil Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance : The Heuristic Basis of Citizenship Behavior », American Journal of Political Science, 39 (2), 1995, p. 490-512 ; Mark Lubell, John T. Scholz, « Adaptive Political Attitudes : Duty, Trust, and Fear as Monitors of Tax Policy », American Journal of Political Science, 42 (3), 1998, p. 903-920, « Trust and Taxpaying : Testing the Heuristic Approach to Collective Action », American Journal of Political Science, 42 (2), 1998, p. 398-417, et « Cooperation, Reciprocity, and the Collective Action Heuristic », American Journal of Political Science, 45, 2001, p. 160-178.
-
[86]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 166 ; Scholz est néanmoins très proche de ce dernier courant, et utilise nombre d’arguments développés par certains de ses principaux contributeurs (Levi, Ostrom, Weingast…)
-
[87]
Voir John T. Scholz, Wayne B. Gray, « Can Government Facilitate Cooperation ? An Informational Model of OSHA Enforcement », American Journal of Political Science, 41, 1997, p. 693-717.
-
[88]
En psychologie, les biais cognitifs désignent les tendances à faire des erreurs de jugement. Par exemple : sous-estimer ou surestimer la probabilité d’événements futurs, interpréter des informations nouvelles de manière à renforcer des croyances personnelles, accorder plus d’importance aux pertes qu’aux gains, etc.
-
[89]
Les heuristiques sont des stratégies ou des règles simples permettant aux individus de résoudre des problèmes et faire des choix, en particulier lorsqu’ils font face à des problèmes complexes ou disposent d’une information incomplète ou ambiguë. On parle souvent à leur sujet de « raccourcis » cognitifs.
-
[90]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 140.
-
[91]
J. T. Scholz, ibid., p. 139.
-
[92]
J. T. Scholz, N. Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance… », art. cité, p. 491.
-
[93]
J. T. Scholz, N. Pinney, ibid., p. 509.
-
[94]
Peter M. Blau, Exchange and Power in Social Life, Londres, Transaction Publishers, 1986.
-
[95]
J. T. Scholz, N. Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance… », art. cité, p. 509 ; John T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 172.
-
[96]
« Particularly when the expected costs and benefits associated with distributional justice are too difficult to track, procedural justice provides […] an additional contingency in deciding whether or not to fulfill related obligations » (J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 177).
-
[97]
J. T. Scholz, ibid., p. 178-179.
-
[98]
J. T. Scholz, ibid., p. 190.
-
[99]
J. T. Scholz, ibid., p. 192.
-
[100]
J. T. Scholz, ibid., p. 196.
-
[101]
J. T. Scholz, ibid., p. 199.
-
[102]
J. T. Scholz, ibid., p. 198.
-
[103]
J. T. Scholz, ibid., p. 151. Margaret Levi partage cette perspective : Margaret Levi, « Why We Need a New Theory of Government », Perspectives on Politics, 4 (1), 2006, p. 5-19.
-
[104]
Cela supposerait que tous les acteurs perçoivent l’action publique comme une action menée en leur nom. Or, Soss montre au contraire comment des destinataires d’une politique sociale aux États-Unis viennent à percevoir l’agence qui l’applique dans des termes tout à fait différents : « They come to understand the agency’s capacities for action as an autonomous power over them, rather than as the power to act on their behalf » (J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité, p. 301).
-
[105]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 191.
-
[106]
J. T. Scholz, ibid., p. 180.
-
[107]
J. T. Scholz, ibid., p. 178.
-
[108]
J. T. Scholz, ibid., p. 192.
-
[109]
Dietmar Braun, Olivier Giraud, « Models of Citizenship and Social Democratic Policies », dans Giuliano Bonoli, Martin Powell (eds), Social Democratic Party Policies in Contemporary Europe, Londres, Routledge, 2004, p. 149-176.
-
[110]
Hannah Arendt, Du mensonge à la violence, Paris, Calmann-Lévy, 1972.
-
[111]
Voir James S. Coleman, « Authority Systems », Public Opinion Quarterly, 44 (2), 1980, p. 147.
-
[112]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 191.
-
[113]
Bertrand de Jouvenel, Du pouvoir. Histoire naturelle de sa croissance, Paris, Hachette, 1998, p. 171.
-
[114]
Bruno S. Frey, Not Just for the Money : An Economic Theory of Personal Motivation, Cheltenham, Edward Elgar, 1997 ; Bruno S. Frey, Reto Jegen, « Motivation Crowding Theory », Journal of Economic Surveys, 15 (5), 2001, p. 589-611.
-
[115]
Lindenberg note que Frey a fait glisser la notion de « motivation intrinsèque » au-delà des limites que les psychologues avaient fixées. Pour ces derniers, la motivation intrinsèque ne pouvait correspondre à un sentiment d’obligation (Siegwart Lindenberg, « Intrinsic Motivation in a New Light », Kyklos, 54 (2-3), 2001, p. 317-342, dont p. 319).
-
[116]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. xii.
-
[117]
B. S. Frey, ibid., p. 10.
-
[118]
Jones et Cullis affirment qu’une telle reconnaissance peut être produite (« signalée ») par deux inputs principaux : une posture éthique (« ethical posturing ») et des transferts en nature (« in-kind transfers ») : Philip Jones, John Cullis, « Key Parameters in Policy Design : The Case of Intrinsic Motivation », Journal of Social Policy, 32 (4), 2003, p. 527-547, dont p. 531.
-
[119]
Un argumentaire proche est développé par J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité, p. 305-12.
-
[120]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 36-37.
-
[121]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité.
-
[122]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 115.
-
[123]
Nooteboom, cité par Andrew Goldsmith, « Police Reform and the Problem of Trust », Theoretical Criminology, 9 (4), 2005, p. 445 ; plus généralement Paul Slovic, « Perceived Risk, Trust and Democracy », Risk Analysis, 13, 1993, p. 675-682 ; Neil Gunningham, Darren Sinclair, « Regulation and the Role of Trust : Reflections from the Mining Industry », Working Paper 59, National Research Centre for OHS Regulation, The Australian National University, 2008, p. 27 ; Richard H. Pildes, « The Destruction of Social Capital through Law », University of Pennsylvania Law Review, 144 (5), 1996, p. 2055-2077.
-
[124]
Voir S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, et Regulation and Compliance…, op. cit. ; L. Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité.
-
[125]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 107.
-
[126]
« If tax administrations instead treat taxpayers as inferiors in a hierarchical relationship, the psychological contract is violated and citizens have good reason not to stick to their part of the contract and evade taxes » (L. P. Feld, B. S. Frey, ibid., p. 104).
-
[127]
L. P. Feld, B. S. Frey, ibid., p. 107.
-
[128]
W. Parsons, Public Policy, op. cit., p. 527, 529-532.
-
[129]
Cf. Jon Elster, The Cement of Society, Cambridge, Cambridge University Press, 1989 ; M. Lubell, J. T. Scholz, « Cooperation, Reciprocity, and the Collective Action Heuristic », art. cité.
-
[130]
Wolfgang Streeck, Kathleen Thelen, « Introduction : Institutional Change in Advanced Political Economies », dans Wolfgang Streeck, Kathleen Thelen (eds), Beyond Continuity : Institutional Change in Advanced Political Economies, Oxford, Oxford University Press, 2005, p. 1-39, dont p. 11.
-
[131]
En particulier B. S. Frey, R. Jegen, « Motivation Crowding Theory », art. cité, p. 597-604.
-
[132]
Issue de Masahiko Aoki, « Towards an Economic Model of the Japanese Firm », Journal of Economic Literature, 28 (1), 1990, p. 1-27 ; Frey fait apparemment référence à un passage situé page 13.
-
[133]
Feld et Frey font explicitement cette hypothèse (L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 105). La théorie de Frey est une théorie de la rationalité étendue plus qu’une théorie de la rationalité limitée (B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 118-125). Elle suppose en tout cas que les régulateurs (les « principals ») puissent rationnellement fixer le niveau optimal d’intervention compte tenu du crowding-out effect et du spill-over effect (ibid., p. 38) : n’étant pas sujets à intervention extérieure, le modèle est de peu d’intérêt pour expliquer leurs comportements à eux, et Frey leur attribue donc une rationalité héroïque.
-
[134]
B. S. Frey, Not just for the Money…, ibid., p. 52 ; B. S. Frey, R. Jegen, « Motivation Crowding Theory », art. cité, p.606.
-
[135]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 108.
-
[136]
Jean-Pierre Dupuy, Aux origines des sciences cognitives, Paris, La Découverte, 1999.
-
[137]
L’auteur tient à remercier Dimitra Angelaki, Vanessa Bernadou et Olivier Giraud pour leur relecture attentive de précédentes versions, leurs conseils et commentaires. Les erreurs et imprécisions qui demeurent sont de la seule responsabilité de l’auteur.
1Dans quelle mesure et pourquoi les acteurs destinataires de l’action publique, ou « publics cibles [1] », se conforment-ils ou ne se conforment-ils pas aux attentes de celle-ci ? En science politique, cette problématique de la « conformation [2] » (compliance) a été jusqu’alors largement ignorée, au profit de la production de l’action publique. Ce constat est valable par-delà les approches et les courants. Une majeure partie de l’analyse des politiques publiques porte sur la production des fins et des moyens de l’intervention [3], y compris les contributions qui portent spécifiquement sur la mise en œuvre (delivery analysis) [4]. La littérature sur les instruments d’action publique, déjà large en langue anglaise et en plein essor en français [5], ou le courant de la « socio-histoire » [6] s’inscrivent aussi plus ou moins dans ce programme, alors même que leurs conceptualisations pourraient aussi parfois s’appliquer à l’étude des comportements des destinataires de l’action publique. Les effets des instruments d’action publique sur les destinataires restent ainsi mal connus [7]. Plus généralement, toute la problématique du design des politiques publiques (policy design), qui domine les études sur les publics cibles reste, à quelques très rares exceptions [8], focalisée sur la production de l’action publique.
2La question de l’impact de l’action publique sur les comportements des destinataires n’a pas non plus trouvé beaucoup d’écho dans le courant interdisciplinaire des études de gouvernementalité. L’approche de la gouvernementalité interroge le « comment » de l’orientation des comportements : elle est donc a priori disposée à l’analyse de la structuration des champs d’action des individus au travers des politiques publiques. Pourtant, elle aussi se place du point de vue de ceux qui gouvernent, en étudiant les pratiques de gouvernement et les façons de penser celles-ci [9] plutôt que les pratiques des gouvernés. En fin de compte, seule une poignée de politologues s’est consacrée à l’étude de la conformation (Christopher Hood, Robert Kagan, Margaret Levi, Ron Mitchell, John Scholz, George Tsebelis).
Toutefois, dès que l’on s’aventure hors des carcans disciplinaires, un autre paysage apparaît : il devient possible d’identifier une multitude de contributions pluri- et interdisciplinaires s’inscrivant directement dans cette problématique. Il existait certes un regain d’intérêt pour la conformation dans la sociologie américaine des années 1960 et 1970 [10]. Cependant, c’est dans la foulée des premiers tâtonnements d’économistes dans le champ des politiques pénales (à l’instar des travaux de Gary Becker et George Stigler [11]) et en partie en réaction contre ceux-ci que des travaux interdisciplinaires ont vu le jour. Souvent rattachés au courant socio-légal, ils ont exploré la régulation des activités sociales autres que les comportements marchands, par ailleurs massivement étudiés par la science économique.
Conformation et logiques d’action
3Cette littérature présente une réflexion fournie sur la conformation, qui a emprunté successivement une grande variété de stratégies de théorisation. Deux grands types d’approches ont d’abord croisé le fer.
4Le premier est celui des théories de la décision, en particulier les propositions de Gary Becker et Georges Stigler [12]. La prémisse de ces contributions est l’hypothèse d’un acteur isolé, choisissant une alternative parmi plusieurs se présentant à lui, en fonction du meilleur gain/du moindre coût [13]. L’idée selon laquelle les destinataires de l’action publique sont des utilitaristes égoïstes et se contentent de décider une fois pour toutes de leur stratégie à l’égard d’un standard fixe a ainsi inspiré un certain nombre de travaux. Leur principale proposition tient en quelques mots : pour créer plus de conformité, rien ne vaut l’augmentation des amendes subies en cas d’infraction (en matière de lutte contre la criminalité principalement) ou la mise en œuvre de primes et autres incitations monétaires (argument fréquemment défendu dans les politiques environnementales). Ces prédictions se sont révélées d’une efficacité limitée. Diverses études empiriques ont montré que des punitions ou la menace de punitions expliquaient mal les comportements de (non-)conformation observés [14].
5La critique de ces travaux est notamment venue de la théorie des jeux, qui a introduit de la dynamique et de l’interaction dans l’analyse des comportements des destinataires de l’action publique, et pris en compte l’encastrement des choix individuels dans des structures de relations préexistantes. En d’autres termes, là où les approches décisionnistes à la Becker supposaient que les destinataires choisissent en fonction de contraintes fixes, les approches en termes de jeux ont pris en compte les variations, principalement endogènes, de ces contraintes : chaque acteur ajuste son comportement en fonction des choix d’autrui, ce qui peut générer des résultats contre-intuitifs [15]. Par exemple, il se peut qu’une augmentation des amendes infligées en cas de non-conformation n’ait aucun effet positif ou négatif sur la conformation [16]. On peut aussi s’attendre, dans certaines conditions, à un niveau de conformation plus important résultant d’une réduction des amendes [17].
6La théorie des jeux a produit un certain nombre de propositions prescriptives [18], comme le « tripartisme » [19], dont l’écho perdure dans les études sur la conformation et au sein des communautés de politiques publiques. L’intérêt de ces travaux a aussi été de montrer qu’il n’est pas nécessaire de supposer un raisonnement autre qu’utilitariste pour mettre à jour des phénomènes contre-intuitifs.
7Néanmoins, au-delà de la démonstration logique, la théorie des jeux a ses limites. Elle peut servir de point de référence dans une étude empirique mais elle ne peut tenir lieu de théorie explicative. Lorsqu’elle n’est pas utilisée afin de mettre en exergue l’absence de stratégie optimale [20], cette théorie sert généralement à produire des recommandations normatives, quitte à masquer la diversité des interactions réelles et de leurs trajectoires [21]. Surtout, ces contributions n’ont pas pu mettre à jour le « mix » de motivations pouvant se combiner dans chaque jeu particulier. Une hypothèse de base dans ces travaux, qu’ils relèvent des théories de la décision ou de la théorie des jeux, est celle d’acteurs cherchant à maximiser les gains/minimiser les pertes pour eux-mêmes, résultant de leurs choix, au moment où ils choisissent, ou à la fin du jeu. Toutes autres motivations que la maximisation de l’utilité individuelle sont ignorées.
8Il y a eu quelques tentatives de rapprocher une analyse de type choix rationnel et une approche distincte (comme par exemple la logic of appropriateness de March et Olsen [22]). Ces tentatives ont conduit à combiner ces logiques d’action, mais ont échoué à produire une nouvelle théorie intégrée. L’exemple le plus connu de cet accommodement est l’importante proposition théorique de Ayres et Braithwaite [23], laquelle combine une théorie utilitariste des comportements de conformation (dans une approche de théorie des jeux) et une théorie de la confiance apparentée aux théories de l’action appréciées des sociologues néo-institutionnalistes. La confiance, qui relève pour eux d’une théorie « idéaliste » des échanges régulateur-régulé, est alors la solution ad hoc au problème du maintien d’un équilibre coopératif entre les parties, problème soulevé par l’analyse utilitariste. Elle est un complément nécessaire à la simplicité des hypothèses que la théorie des jeux pose concernant les motivations des acteurs. La proposition de Ayres et Braithwaite consiste alors à réunir cette théorie « économique » (la théorie des jeux) et une théorie « idéaliste » (qu’ils nomment théorie de l’empowerment). Le résultat est un compromis sérieux entre deux approches qui, prises isolément, sont cohérentes mais ainsi superposées forment un ensemble contradictoire [24].
9Ce compromis de modèles hétérogènes est représentatif d’une part écrasante de la littérature sur la conformation des années 1980, 1990 et du début des années 2000. Nombre de contributeurs ont ainsi empilé l’une sur l’autre diverses théories de l’action, une pour chacun des groupes cibles idéal-typiques qu’ils voyaient ou construisaient au sein de l’ensemble de la population cible d’une politique publique [25]. Schématiquement, aux « calculateurs amoraux » [26], « mauvaises pommes » [27], ou « opportunistes » [28], on applique une théorie de l’action utilitariste : leur motivation est strictement la minimisation des coûts ou la maximisation des gains. En revanche, aux acteurs « vertueux », « citoyens » ou « bonnes pommes, » on applique une théorie de l’action normée ou appropriée. On suppose qu’ils agissent selon ce qui leur semble juste ou ce que leur commandent des normes sociales intériorisées. La principale faiblesse de ces cadres d’analyse est l’explication de la dynamique des comportements. Souvent, ils supposent qu’un acteur puisse évoluer et passer schématiquement d’un groupe à l’autre, et donc d’une logique d’action à une autre. Ce passage est analytiquement brusque, pour le moins, et il est souvent bien difficile de savoir par quels mécanismes il s’opère.
10Confrontés à la pluralité des motivations possibles mais n’utilisant que des théories de l’action univoques, certains supposent parfois que divers motifs – comme par exemple l’intérêt individuel et le devoir moral – constituent des logiques d’action opposées et incompatibles [29]. Ainsi, pour Ayres et Braithwaite, l’un cherche son intérêt individuel ou bien agit par confiance, mais il ne peut poursuivre ces deux motivations en même temps.
11Des travaux empiriques divers, la plupart récents, ont contribué à fragiliser ces constructions hétéroclites. Ils montrent que, souvent, plusieurs motifs différents expliquent ensemble les réponses des acteurs aux sollicitations publiques [30]. Parce qu’ils supposent l’inverse, la plupart des modèles théoriques disponibles sont simplistes et leur applicabilité pratique est souvent limitée. C’est notamment le cas lorsque les activités régulées dépassent un certain degré de complexité [31], comme lors d’un dilemme social : un intérêt commun à un groupe social qui s’oppose à l’intérêt individuel de chaque membre de ce groupe (par exemple, l’utilisation d’une ressource naturelle commune). Ça l’est moins lorsqu’il s’agit d’analyser des comportements dans des situations où la recherche du profit domine très clairement (tel un marché très compétitif). À titre d’exemple, le cadre d’analyse strictement utilitariste que Mitchell utilise pour expliquer le degré de (non-)conformation aux règles internationales proscrivant les dégazages en mer permet de rendre compte des observations et données collectées [32]. A contrario, les approches purement utilitaristes des comportements de conformation et d’évasion fiscales ne parviennent pas à rendre compte des observations empiriques [33].
Ces écueils théoriques ne sont pas sans rapports avec le problème plus général de systématisation que connaît ce champ de recherches. En dépit d’une multitude d’études empiriques et de propositions théoriques, cette littérature a bien du mal à être cumulative. Elle reste à ce jour incapable de faire entrer en dialogue ses résultats portant sur le rôle d’une multitude de facteurs différents de (non-)conformation : l’environnement social, politique ou économique des destinataires, leurs pairs et le rôle que ceux-ci exercent pour encourager ou décourager la conformation, le style des contrôleurs dans leurs interactions avec les destinataires, les instruments d’action publique utilisés par les agents de mise en œuvre, les institutions politiques, leur légitimité, la sévérité et la probabilité de sanctions en cas de non-conformation, les valeurs et le sens du devoir civique, le rapport à l’autorité, etc.
Aucune formalisation n’est encore parvenue à intégrer la richesse des situations et des facteurs, et encore moins à proposer un cadre commun pour penser la conformation. Le constat posé par Fiona Haines il y a onze ans demeure valide.
L’un des principaux enjeux de ce courant de recherche est par conséquent de produire un cadre d’analyse cohérent qui intègre les acquis de la littérature et qui permette d’éclairer les débats en présence. Du point de vue des théories de l’action, la multiplicité des causes des comportements de (non-)conformation s’exprime dans les motivations diverses et multiples qui opèrent simultanément dans les réponses des destinataires [35] : le rapport aux normes sociales, la peur de la sanction, la recherche d’un avantage personnel, la défense et la réalisation de valeurs, les émotions (le plaisir, la colère, l’envie, la honte, la culpabilité, la fierté), etc. Rendre compte de cette complexité suppose de théoriser l’action individuelle comme le résultat d’une pluralité de motivations opérant simultanément. Or, comme on vient de le voir, l’immense majorité des auteurs du champ n’ont utilisé qu’un modèle univoque de l’action individuelle qu’ils empruntaient à la gamme des théories de l’action les plus classiques.« I would argue that what is lacking the current debate [on regulation] is the jump from grounded theory to formal theory […]. The tendency is for each study to simply add to the list of empirical research, a list which simply grows longer, more complex, and packed ever more densely with insights that are unable to be accessed easily. Unless this growing list of research touches base with some formal theoretical base, repetition of insight is likely to characterize the regulation debate for some time to come [Je soutiendrais que ce qui manque au débat actuel [sur la régulation] est le saut de la théorie ancrée à la théorie formelle […]. Chaque étude tend simplement à s’ajouter à la liste des recherches empiriques, une liste qui devient juste de plus en plus longue, plus complexe et plus que jamais densément saturée d’observations difficilement accessibles. À moins que cette liste grandissante de recherches n’accède à une certaine base théorique formelle, la répétition des observations va probablement caractériser le débat sur la régulation pour quelque temps encore]. » [34]
Quelles pistes pour théoriser la conformation ?
12Pour rendre compte de la complexité des facteurs et des mécanismes de la conformation, les théoriciens explorent depuis quelques années trois pistes principales. La première est l’emprunt de plus en plus fréquent à la littérature néo-institutionnaliste. La seconde est l’entrée par les normes sociales, notamment privilégiée par les tenants des théories du choix rationnel. Enfin, la troisième vise explicitement à reconstruire un modèle plus complexe et plus réaliste de l’acteur destinataire, et emprunte pour cela à la psychologie.
La piste neo-institutionnaliste
13Le courant socio-légal a découvert le néo-institutionnalisme [36] à la fin des années 1990 [37]. Il en a retenu un récit cohérent sur l’incertitude qui préside aux choix organisationnels et leur caractère chaotique, l’importance des institutions dans la structuration des processus de décision, et l’objectif général de légitimation qui pousse les organisations à développer ou se conformer à des institutions. L’un des atouts du néo-institutionnalisme pour les études de la conformation est l’effort mis en œuvre pour réconcilier les différentes dimensions du choix : la cognition (percevoir, savoir), l’affect (les sentiments, l’engagement moral) et l’évaluation (le calcul). Toutefois, comme le note Black [38], le courant néo-institutionnaliste offre plusieurs solutions au problème de l’intégration de ces logiques plurielles.
14Les économistes (mais aussi quelques politologues) néo-institutionnalistes ont conservé l’idée d’un individu rationnel, cherchant à maximiser son intérêt individuel. Ils ont cependant intégré les limites de la rationalité et le rôle des normes sociales au travers des institutions, lesquelles contraignent les choix des acteurs. Autrement dit, les acteurs maximisent leur utilité à l’intérieur des limites posées par des institutions [39]. March et Olsen, par contraste, supposent la domination de la logic of appropriateness, insistent sur l’importance des routines dans l’action et sur le rôle des rapports de confiance dans le maintien des règles et des comportements qu’elles commandent, tout en affirmant que des comportements d’anticipation, conséquentialistes, sont également possibles. La réponse de March et Olsen à la question de la part respective de l’une ou l’autre de ces logiques est pragmatique : « ça dépend » [40]. Stinchcombe et quelques autres vont plus loin et affirment que les institutions définissent les préférences des acteurs, et constituent ainsi le lien entre une logique conséquentialiste et une logique de l’approprié. Ainsi, même la poursuite de l’intérêt individuel est institutionnellement contingente [41]. Dès lors, les actions et les relations sociales peuvent avoir à la fois une dimension instrumentale et une dimension symbolique. La coexistence de plusieurs ordres institutionnels en compétition pour structurer les comportements des acteurs [42] peut servir à rendre compte de la diversité des observations. Ainsi émerge l’acteur « institutionnellement rationnel » [43].
15Le principal intérêt du courant néo-institutionnaliste pour l’étude de la conformation est de conceptualiser l’influence des institutions sur les comportements. Il est possible de penser la conformation comme le résultat d’un isomorphisme institutionnel [44], en particulier lorsque les exigences légales sont ambiguës ou contradictoires [45]. Un autre élément utile pour comprendre la conformation est le rôle des mythes et des symboles dans les décisions et les comportements. Meyer et Rowan [46] soulignent la fréquence des découplages entre structures formelles et pratiques. Ils montrent également l’importance de la conformité cérémonielle (ceremonial conformity), qui fait écho à la conformation rituelle bien connue du courant socio-légal (ritualistic compliance) [47] : il s’agit du cas où les destinataires se conforment formellement tout en ayant des pratiques non conformes [48]. L’importance accordée aux relations interpersonnelles et à la confiance dans les interactions permet aussi d’introduire des argumentaires nouveaux pour rendre compte des variations dans la mise en œuvre des politiques : les interactions entre régulateurs et régulés peuvent être influencées par l’enjeu de la préservation de la confiance [49].
16Néanmoins, il n’y a pas dans le néo-institutionnalisme sociologique un cadre théorique stable et précis pour rendre compte des comportements des acteurs. Il s’agit plutôt d’une littérature plurielle qui n’est logiquement cohérente que dans ses propositions générales [50] et qui est utile strictement à l’interprétation des observations empiriques après coup. De plus, il n’existe que peu ou pas d’éléments pour dire quand une décision sera susceptible d’être structurée par des institutions ou au contraire laissée aux contingences de la temporalité, que le modèle du garbage can prédit [51]. Enfin, les auteurs du courant néo-institutionnaliste ont une vision de la loi qui contredit la fluidité qu’ils supposent par ailleurs : pour beaucoup d’entre eux, la loi est le producteur de routines et de conformité par excellence [52]. En ce sens, le néoinstitutionnalisme ignore la problématique des conflits de règles, par exemple entre règle légale et norme sociale, voire entre plusieurs règles légales. C’est en revanche une thématique centrale du courant socio-légal [53].
Les emprunts au néo-institutionnalisme dans la littérature sur la conformation n’ont pas rectifié tous les maux [54]. Ils n’ont pas permis de produire une théorie qui intègre les motivations des acteurs destinataires et qui soit en mesure de mieux expliquer ou même prédire leurs comportements.
Le rôle des normes sociales
17Une seconde piste de recherche récemment explorée concerne le rôle des normes sociales, entendues classiquement comme règles non écrites partagées au sein d’un groupe et dont le respect est sanctionné positivement et négativement par ses membres. Divers travaux récents, souvent théoriques, parfois empiriques, ont eu pour objet de mesurer la pertinence des normes sociales en tant que déterminant supplémentaire (par rapport à l’intérêt individuel) de la conformation. Bon nombre d’entre eux sont l’œuvre de sociologues, politologues [55] et juristes [56].
18La plupart constituent un moyen indirect d’explorer la problématique de la conformation. Le but poursuivi par Bird ou Horne, par exemple, est d’abord la prolongation de l’intégration des normes sociales dans une théorie du choix rationnel, à la Coleman [57]. Ces auteurs s’attachent à inclure le rôle de tiers ou d’émotions comme la culpabilité ou la honte dans un raisonnement utilitariste, supposant que ces aspects s’ajoutent aux considérations de coûts/avantages. Ils cherchent avant tout à produire un cadre théorique logique et cohérent, plutôt qu’à proposer des mécanismes causaux réalistes. Les résultats sont parfois décevants. Par exemple, les études expérimentales de Horne portant sur des jeux coopératifs concluent à l’importance de la dimension relationnelle et de la confiance pour les sujets, et semblent ainsi reformuler les conclusions d’études et de modèles plus anciens, sans les éclaircir [58]. Surtout, ces travaux ne portent souvent qu’incidemment sur la conformation à la régulation publique et n’ont pas vocation à intégrer la diversité des observations empiriques correspondantes.
Il existe néanmoins d’autres travaux qui ne présentent pas ces caractéristiques et qui sont parfois plus largement applicables à la question des motivations des destinataires [59]. L’un des contributeurs les plus intéressants est Stig Gezelius, un sociologue norvégien. Il a tenté de reconstruire une théorie de la conformation à l’action publique dans une approche d’inspiration durkheimienne, sur la base d’une étude très approfondie de deux communautés de pêcheurs dans l’Atlantique nord-ouest. Son travail, d’une grande finesse, a pour objet d’identifier empiriquement les rapports stratégiques (instrumentaux) aux normes sociales et de les distinguer des comportements normés. Le résultat n’est pas une théorie intégrée des motivations de la conformation proprement dite, mais une démonstration fine des mécanismes d’arrangements avec les normes dans des communautés de taille réduite, quasiment fermées, et dépendantes d’une ressource commune. Une faiblesse inhérente tient à son terrain, qui présente des traits (interconnaissance forte entre les destinataires, dépendance à l’égard d’une ressource commune, appartenance à un groupe clairement identifié, homogène et de taille réduite) rarement observables. Le (grand) intérêt de son travail est donc limité aux situations de régulation où la population cible présente de telles caractéristiques.
Les théories psycho-économiques
19Le troisième courant de théorisation de la conformation propose une complexification des modèles de la rationalité individuelle qui passe par des emprunts à la psychologie. Ses principaux contributeurs intègrent dans une armature conceptuelle cohérente les principales motivations individuelles isolées dans les études empiriques. Ils opèrent un travail de traduction pour inclure ces motivations hétérogènes dans des théories de l’action améliorées, à la fois dans leur capacité explicative et dans leur réalisme. Les nombreux concepts psychologiques utilisés (motivation, attitude, biais, heuristique) situent ces propositions dans le prolongement de divers travaux sur les limites de la rationalité, en particulier les écrits d’Herbert Simon, Daniel Kahneman et Amos Tversky. Pour en rendre compte, on discute plus longuement ici trois modèles récents, qui matérialisent des stratégies distinctes sur la conformation [60].
La théorie des postures motivationnelles de Braithwaite et al.
20La théorie des « postures motivationnelles » (motivational posturing theory) constitue l’une des approches intégrées de la conformation dans le courant socio-légal [61]. Elle est fondée sur certains travaux de psychologie portant sur la contrainte et la manière dont les individus gèrent et répondent à celle-ci. Ces travaux ont notamment produit la théorie de la reactance de Brehm et Brehm [62], laquelle prédit que toute tentative de contrôler un acteur par des récompenses, des sanctions, ou une surveillance particulière peut générer une réaction opposée. La reactance constitue alors une motivation forte orientée dans le sens contraire du contrôle externe.
21Bien qu’ébauchée d’abord pour isoler le rôle des interactions sociales des autres variables déterminant les comportements des destinataires, la théorie des postures motivationnelles a pris un tournant très inspiré de la théorie de la reactance dans sa dernière mouture [63]. La régulation publique y est pensée comme une intrusion dans la liberté de l’individu. La demande de conformation et le pouvoir coercitif de l’État sont analysés comme une menace (threat) pour l’acteur destinataire. Les postures motivationnelles constituent la manière dont celui-ci gère cette menace et maintient la puissance publique à distance. Elles sont définies comme « assemblages de croyances, attitudes, préférences, intérêts et sentiments qui ensemble communiquent le degré auquel un individu accepte l’agenda du régulateur, en principe, et déclare son approbation pour la façon dont la régulation opère et remplit ses obligations au quotidien » [64]. C’est parce que les postures motivationnelles sont ainsi supposées résumer les effets combinés d’un ensemble de facteurs que la théorie intègre un certain nombre d’acquis empiriques et de propositions théoriques issues de la littérature existante [65]. De plus, la théorie intègre de manière ad hoc les travaux sur la « justice procédurale », mettant ceux-ci à profit comme « cure » aux enjeux que la conceptualisation de la loi comme « menace » peut soulever dans un contexte démocratique. Elle peut ainsi plus largement faire écho à la thématique de la légitimité du contrôle [66], qui est un paramètre d’équilibre important dans la théorie de la reactance.
22Sur la base de travaux empiriques, cinq postures motivationnelles ont été isolées, correspondant peu ou prou à des stratégies de réponse aux sollicitations publiques : commitment, resistance, capitulation, disengagement, game playing. Celles-ci s’articulent plus généralement en deux « supra-postures » : resistance/coopération (chapeautant les trois premières postures) et dédain (dismissiveness), traduisant la perte de légitimité de la puissance publique (chapeautant les deux dernières). Les auteurs affirment, de manière attendue, une corrélation entre résistance, dédain et non-conformation, et une autre entre coopération et conformation. Les supra-postures sont elles-mêmes associées à (et analytiquement causées par) des « sensibilités de survie » (coping sensibilities), c’est-à-dire des styles de réponse à la « menace » que constitue la régulation publique. Ces sensibilités présentent de très nettes ressemblances avec nombre de logiques décrites dans d’autres théories, et notamment les trois paradigmes de la théorie de l’action identifiés par Schimank : l’homme émotionnel, l’homo œconomicus et l’homo sociologicus [67]. Les coping sensibilities sont en effet distinguées selon qu’elles relevant d’abord d’une gestion émotionnelle (« feeling oppressed »), d’une gestion orientée vers les problèmes (« problem-focused approach »), ou bien d’une attitude d’acceptation et de rationalisation associée à une attitude morale (« thinking morally ») [68].
Ces sensibilités coexistent parmi les contribuables. Comme les postures, elles constituent des récits (narratives) largement partagés. Toutefois, l’une d’elles vient dominer les autres, sans que la théorie ne précise par quels mécanismes, ni comment se fait l’articulation entre la sensibilité dominante et les sensibilités dominées [69]. Lorsque l’une ou l’autre de ces sensibilités devient dominante, elle renforce l’une des « supra-postures ». Le modèle est suffisamment simple pour associer terme à terme sensibilités et supra-postures. Ainsi, une gestion émotionnelle renforce la supra-posture de la résistance et affaiblit celle de la coopération. La gestion orientée vers les problèmes renforce la supra-posture du dédain. Et la gestion morale renforce la supra-posture de la coopération et affaiblit celle du dédain.
Représentation schématique du modèle des postures motivationnelles
Représentation schématique du modèle des postures motivationnelles
23On pourrait s’attendre alors à la formulation d’hypothèses relativement discriminantes, mais les auteurs s’en gardent. Ils privilégient au contraire une hypothèse générale, selon laquelle les sensibilités de survie seront exacerbées chez les contribuables en conflit avec l’autorité de contrôle.
24Les résultats d’un test mené en Australie sont pour le moins décevants. Deux populations distinctes de contribuables construites pour mener le test, lesquelles présentent des patterns de conformation avec la réglementation fiscale tout à fait différents, présentent grosso modo la même structure de sensibilités [70]. La seule différence est qu’elles s’expriment plus fortement dans le groupe en conflit avec le fisc. Les auteurs y voient la confirmation de leur hypothèse générale [71]. Ils n’envisagent pas une autre explication, qui tiendrait par exemple compte du degré relatif de mobilisation et d’information d’un groupe par rapport à l’autre (le groupe « en conflit » est défini par le recours à des conseillers fiscaux).
25Aucune des autres hypothèses qui pourraient être tirées du modèle n’est testée. D’autres résultats de l’analyse sont plus convaincants mais tout à fait triviaux. Ainsi, la supra-posture du dédain s’affaiblit quand la puissance publique poursuit les fraudeurs et la probabilité des poursuites est également perçue comme plus importante dans cette situation [72]. Surtout, le test ne peut pas montrer si les sensibilités ou les postures sont effectivement des configurations causales ou des indicateurs d’une configuration causale pouvant expliquer le comportement observé (conformation ou non-conformation). Il n’est donc pas possible de savoir si les concepts proposés sont des causes ou des effets d’autres causes. À cette critique qu’ils anticipent [73], les auteurs bottent en touche, abandonnent toute défense d’un modèle jusque-là très déterministe et s’affirment convaincus de l’absence de rapports de causalité simples et unidirectionnels et du perpétuel mouvement itératif par lequel les acteurs font sens de leur environnement et de leur position [74].
26Les a priori de la théorisation peuvent également être critiqués. D’une part, les auteurs supposent que seule une posture morale est associée à des comportements de conformation. Symétriquement, ils supposent qu’une attitude stratégique ou émotionnelle nourrit des comportements de défiance [75]. Ce faisant, ils négligent les comportements de conformation pouvant résulter de raisonnements opportunistes [76]. De plus, une attitude morale n’est pas nécessairement corrélée à des comportements de conformation si les normes ou valeurs soutenues par les acteurs sont incompatibles avec celles dont se prévalent les autorités publiques. Là encore, des études empiriques solides contredisent les hypothèses des auteurs [77].
27Une autre position théoriquement discutable consiste à définir l’action publique comme une « menace ». Or, l’action publique peut également contribuer à construire les sensibilités au travers desquelles les sollicitations publiques sont perçues : par des efforts de cadrage [78], divers instruments symboliques ou d’information [79], et plus généralement un ensemble de pratiques de gouvernement [80]. Ainsi, au sujet de la taxation, Steglich note que l’on peut s’attendre à des réactions différentes à une taxe selon que celle-ci est définie comme un racket ou comme une contribution au bien commun. Les expériences qu’il a menées sur ce point tendent d’ailleurs à prouver l’efficacité du cadrage sur les comportements des destinataires [81]. La prémisse « régulation = menace » est donc problématique dans sa généralité. Cette construction s’expose de plein fouet à une critique forte de l’identification entre loi et contrainte, ou entre loi et coercition, telle qu’elle a notamment été développée en philosophie légale [82]. Plus généralement, comment concevoir et décrire avec nuance des styles de mise en œuvre différents (comme un style « adversarial » et un style « négocié ») s’il y a toujours menace ? La régulation publique ne semble alors être qu’un continuum allant de la menace faible ou déguisée à la menace ouverte et au conflit.
En somme, le modèle des postures motivationnelles dénote par son ambition, sa parcimonie et ses multiples écueils.
Le modèle du contractant adaptif (adaptative contractarian) de Scholz
28Un modèle beaucoup plus convaincant est celui du « contractant adaptif » du politologue John Scholz. Scholz a utilisé la théorie des jeux afin de comprendre les interactions régulateurrégulé. Ce faisant, il a proposé une version particulièrement aboutie des jeux de régulation [83] et une analyse fine de leurs limites [84]. Il a développé dans d’autres publications la question de la conformation dans une perspective de psychologie behavioriste [85]. Son but a été de formuler une explication des comportements de conformation qui s’affranchisse des hypothèses de rationalité « héroïques » de l’économie politique et de l’institutionnalisme du choix rationnel [86]. À quelques rares exceptions près [87], Scholz n’a travaillé que sur les politiques fiscales.
29Il a d’abord cherché à mettre à jour un ensemble d’heuristiques à l’aide desquelles il pourrait expliquer les écarts entre les pratiques observables et les prédictions d’un modèle d’acteurs utilitaristes disposant d’une information parfaite. En d’autres termes, les mots-clés de son analyse sont « rationalité limitée », « biais » [88], « raccourcis cognitifs » et « heuristiques » [89]. Les premiers écrits de Scholz sur ce point ne sont pas les plus convaincants, mais ils témoignent de sa volonté, plus tard explicite et mieux argumentée, de proposer une « perspective intégrée » [90] des motivations pouvant expliquer la conformation ou la non-conformation des individus aux sollicitations de la régulation publique.
30Scholz s’inscrit dans le modèle du consentement contingent (contingent consent) de Margaret Levi. Ce modèle suppose que les acteurs se conforment aux obligations légales à condition que l’État soit digne de confiance et que les autres acteurs soumis aux mêmes obligations s’y conforment eux aussi. Comme Levi, Scholz construit ses raisonnements sur l’hypothèse d’un contrat implicite entre régulateur et régulé [91] portant sur la production de biens publics. C’est dans le cadre d’un tel contrat, par lequel l’État constitue une solution institutionnelle à un problème d’action collective, que l’acteur destinataire est situé. Les comportements de l’acteur sont alors analysés comme ceux d’un « contractant adaptif ».
31Le « contractant adaptif » est utilitariste. Il cherche à maximiser ses avantages et limiter ses coûts. Toutefois, sa rationalité étant limitée, sa capacité à décider quand il est sujet à une régulation publique est dépendante de certaines capacités cognitives. Il possède en particulier des heuristiques minimisant l’effort nécessaire aux décisions dans les situations routinières [92]. Scholz a proposé de définir une heuristique du devoir (duty heuristic) et une heuristique de la confiance (trust heuristic). Ces heuristiques sont supposées permettre aux individus d’évaluer les situations dans lesquelles l’action publique les saisit et de choisir de se conformer ou non aux obligations qu’elle leur impose.
32Les heuristiques émergent dans les échanges interpersonnels, où les acteurs acquièrent un ensemble de savoirs ou de réflexes leur permettant d’identifier facilement des partenaires fiables et d’échanger avec eux [93]. Certains de ces savoirs (et en particulier les émotions) ont pour objet de signaler à l’acteur si autrui est digne de confiance ou non, et donc de reconnaître, honorer ou sanctionner la réciprocité. Cette heuristique de la confiance (trust heuristic) est un équivalent fonctionnel aux institutions, parce qu’elle permet la coopération en réduisant les problèmes de hasard moral. Il s’agit en quelque sorte du pendant behavioriste à la norme de réciprocité que Blau considère comme nécessaire et consubstantielle à tout échange social [94]. En fonction de la biographie de chacun, ce bagage cognitif de base peut s’enrichir d’autres heuristiques (notamment l’heuristique du devoir, duty) et se généraliser aux échanges avec d’autres acteurs ou institutions au-delà de l’entourage immédiat de l’acteur. Le processus historique par lequel une société se développe définit le répertoire des heuristiques dont ses citoyens disposent afin de gérer les éventuels conflits entre rationalité individuelle et rationalité collective [95]. L’évaluation de la justice procédurale est un autre de ces raccourcis [96].
Scholz affirme que son modèle intègre ce sur quoi se focalisent les théories plus classiques de la dissuasion (deterrence) et du devoir (duty) : respectivement, la peur de la sanction et le sentiment normatif de devoir se conformer aux obligations légales. Il considère que certains destinataires ont besoin de coercition pour remplir leurs obligations. Il estime également que la conformation est d’abord motivée par un engagement moral, mais ajoute que cet engagement est contingent aux performances de l’État et des autres destinataires [98]. L’ensemble de ces motifs s’articule alors dans un ordre hiérarchique, fonction de leur pertinence et de leur accessibilité. Dans le domaine des politiques fiscales, partant du principe que la conformation est d’abord un engagement moral, Scholz estime qu’une variation dans les comportements des destinataires sera d’abord liée aux changements en termes de procédure et de justice procédurale, suivis des changements dans la politique fiscale (ce qui suppose un raisonnement en termes de coûts) et, en troisième position, des changements dans les gains retirés des politiques financées par la fiscalité [99].« The model of the citizen as an adaptive contractarian suggests that people fulfill obligations to institutions that provide long-term benefits in excess of the short-term costs. As with individual exchanges, the adaptive contractarian monitors the exchange relationship through adaptive attitudes toward the institution and the obligations it imposes. […] These attitudes, in turn, affect the likelihood that the individual will fulfill his or her obligations to the organization. Attitude monitors produce a contingency strategy in which the fulfillment of obligations depends on how well the institution upholds the individual’s rights and produces the expected benefits [Le modèle du citoyen comme contractant adaptatif suggère que les gens se conforment aux obligations vis-à-vis des institutions qui offrent plus d’avantages à long terme que de coûts à court terme. Comme dans les échanges individuels, le contractant adaptatif contrôle la relation d’échange par des attitudes adaptatives envers l’institution et les obligations qu’elle impose. […] Ces attitudes, à leur tour, affectent la probabilité que l’individu accomplira ses obligations vis-à-vis de l’organisation. Les types d’attitude produisent une stratégie contextuelle dans laquelle la conformation dépend de la façon dont l’institution soutient bien les droits de l’individu et produit les avantages attendus]. » [97]
Représentation schématique du modèle du contractant adaptif
Représentation schématique du modèle du contractant adaptif
33Scholz est l’un des rares théoriciens dans le champ à prolonger son raisonnement au niveau macrosociologique et à prendre en compte les effets d’agrégation. Mais il est aussi très explicite sur les limites de la théorisation d’un tel objet.
« It is not clear […] how quickly an individual’s sense of obligation responds to positive and negative experiences and information about the government [on ne sait pas clairement […] à quelle vitesse le sentiment d’obligation d’un individu évolue en fonction d’expériences positives et négatives et d’informations sur le gouvernement] » [100]. « At present, our theoretical tools and empirical analyses can only warn us of the kinds of conditions that might induce failure [Aujourd’hui, nos outils théoriques et nos analyses empiriques peuvent seulement nous avertir des types de conditions qui peuvent mener à l’échec]. » [101]
35Malgré ces limites, que partagent toutes les propositions existantes, le cadre d’analyse de Scholz est probablement le plus abouti à l’heure actuelle en ce qui concerne la conformation en matière fiscale. On peut néanmoins lui adresser un certain nombre de critiques.
36Premièrement, Scholz ne précise pas quels sont les mécanismes par lesquels les caractéristiques de l’action publique affectent les attitudes des destinataires. Il s’agit plutôt de corrélations empiriques généralisées. Au lieu de préciser des liens causaux allant des unes aux autres, Scholz énonce les raisons pour lesquelles il est nécessaire que les coûts et avantages des politiques publiques, les questions de justice procédurale et les comportements des autres destinataires soient des variables indépendantes de la conformation. Il s’agit soit de garantir les principaux éléments de la démocratie en protégeant les droits des citoyens et le bien-être de la collectivité (raisons normatives), soit de garantir l’efficacité de l’État comme producteur de biens publics et principale arme contre les passagers clandestins (raisons fonctionnelles). Par exemple, les comportements des autres destinataires de la politique fiscale sont d’importance pour le modèle surtout dans la mesure où une part croissante d’évasion fiscale signifie l’échec de l’institution étatique comme solution à un problème d’action collective.
37Deuxièmement, Scholz prétend intégrer à son modèle la peur de la sanction comme motif de conformation ou non-conformation. Pourtant, ce motif est absent du modèle du contractant adaptif lui-même : il n’a de pertinence que s’il est rapporté à ceux parmi les destinataires qui ne peuvent remplir leurs obligations sans la menace de sanctions. En d’autres termes, l’appareil coercitif de l’État a pour rôle d’assurer les contractants adaptifs que les autres citoyens vont remplir leurs obligations. Il n’a pas de rôle direct dans les motivations de contractants adaptifs. Bien qu’il annonce vouloir intégrer la variété des motivations dans un modèle unique, Scholz continue à diviser la population des destinataires en sous-populations dotées de logiques distinctes. À plusieurs reprises [102], il reprend des catégories très univoques, comme celles des contribuables « honnêtes » et de ceux qui ne le sont pas.
38Troisièmement, si pour Scholz les contractants adaptifs semblent bien constituer la très grande majorité d’une population dans un État démocratique, force est de constater que certaines de leurs qualités et missions trahissent l’idéal normatif [103] qui préside à l’élaboration du modèle. En effet, le contractant adaptif est attentif à la production de biens publics ; il évalue la capacité de l’institution étatique à résoudre le problème d’action collective lié à la production de biens publics [104]. Toutefois, il est plus encore réactif à des changements de justice procédurale [105]. Il est notamment un surveillant attentif des pratiques étatiques et il « pilote » ses relations avec les institutions publiques [106]. Il tient les agences pour responsables de leurs pratiques, suspendant sa conformation en cas d’insatisfaction, ce que les agences peuvent anticiper [107].
39Pour Scholz, il est essentiel que les contractants adaptifs puissent réagir adéquatement aux dérives de l’institution étatique sans faire s’effondrer le système tout entier [108]. Scholz conçoit ainsi les contractants adaptifs comme des « citoyens actifs » [109], dans une perspective qui n’est pas sans affinités avec les raisonnements d’Arendt sur le pouvoir et la désobéissance civile [110].
40Sur le fond, Scholz peut s’accorder avec Arendt ou Coleman [111] : la situation des destinataires de l’action publique est plus factuelle que contractuelle, mais leur conformation peut être quand même appelée « consentement », dans la mesure où le désaccord est admis, ce qui est l’indicateur d’une société libre (Arendt parle de « dissent », et Coleman de « disvesting authority »). L’enjeu normatif pour Scholz est de faire de cette capacité des destinataires de l’action publique à entrer en désaccord et en résistance « une seconde ligne de défense, après les élections, pour réduire le problème de l’exploitation étatique et pour accroître les politiques productrices de richesses » [112]. En d’autres termes, Scholz abandonne avec profit une théorie de la rationalité héroïque pour proposer une théorie de la citoyenneté elle aussi héroïque : ses contractants adaptifs ont une importance critique pour l’équilibre et l’existence du système tout entier. Scholz fait plus qu’analyser le pouvoir des gouvernants sur les gouvernés, il pose les principes qui doivent le limiter, et renonce donc à l’analyser aussi lorsqu’il s’est affranchi des buts qu’on lui attribue (démocratie, droits individuels, production de biens publics…). Or, comme le rappelait de Jouvenel, on ne peut ignorer cet aspect.
L’entreprise de théorisation menée par Scholz est en somme intéressante et tout à fait cohérente. Mais il s’agit plus d’une théorie normative que d’une théorie scientifique qui expliquerait de manière réaliste les comportements observables des destinataires de l’action publique.« Il n’est pas vrai que le Pouvoir s’évanouisse lorsqu’il renie la source de droit dont il est issu, lorsqu’il agit à l’encontre de la fonction qui lui est assignée. Il continue de commander et d’être obéi : ce qui est la condition nécessaire pour qu’il y ait Pouvoir ; et la condition suffisante. » [113]
Motivation crowding theory (Frey)
41Une autre théorie a été proposée par Bruno S. Frey il y a une dizaine années [114]. Cet économiste a élaboré et présenté une théorie des choix individuels qui se présente explicitement comme une extension et une critique du modèle utilitariste de base utilisé en science économique. Dans des écrits plus récents, et à l’instar de Scholz, Frey a proposé d’analyser la conformation aux politiques publiques dans le cadre d’une théorie contractualiste des rapports État-destinataires.
42Frey emprunte à un courant de la psychologie expérimentale l’idée selon laquelle il existe deux grands types de motivation : la motivation extrinsèque, que l’on peut identifier à tout ce qui est extérieur à l’acteur, et la motivation intrinsèque, qui est en revanche déjà là et ne dépend pas d’un levier extérieur pour faire agir l’acteur. La motivation extrinsèque correspond notamment aux avantages reçus et aux coûts imposés. Parce qu’elle s’intéresse d’abord à la dimension économique dans les choix individuels, Frey affirme que la science économique a totalement ignoré la motivation intrinsèque. Or, cette dernière n’est pas seulement une motivation supplémentaire qui s’ajouterait à la motivation extrinsèque (sinon, son effet serait aisément intégrable dans la théorie utilitariste classique) : l’une et l’autre interagissent. De nombreux psychologues (en particulier Deci) ont montré expérimentalement qu’en développant la motivation extrinsèque dans une activité sociale, on pouvait faire disparaître la motivation intrinsèque. L’exemple habituellement donné est celui d’un fils tondant la pelouse à la demande de son père, sans contrepartie. Il agit ainsi parce que cette activité lui procure du plaisir, soit par elle-même, soit parce qu’elle produit de la reconnaissance chez son père, ou par sens du devoir, obéissance à l’autorité, ou désir de rendre service. Tout cela pour Frey [115] peut correspondre à une motivation intrinsèque. Puis, un jour, le père décide de payer son fils pour tondre la pelouse : il lui verse une contrepartie, sous forme d’argent de poche. Sur la foi de résultats expérimentaux, les psychologues peuvent affirmer qu’à partir de ce moment, le fils ne tondra probablement plus la pelouse sans contrepartie : l’argent a évincé la motivation intrinsèque.
Frey généralise ce résultat : il existe deux effets complémentaires d’une intervention extérieure sur les comportements individuels. Le premier est l’effet prix, classique, par lequel l’acteur ajuste sa conduite en fonction des coûts et avantages induits par les diverses alternatives qui se présentent à lui. Cet effet est tout à fait compatible avec la théorie utilitariste classique. Frey théorise un second effet, dit d’éviction (« crowding out »), qui opère exactement dans la direction opposée à l’effet prix et correspond à la substitution d’une motivation extrinsèque à une motivation intrinsèque [116]. En d’autres termes, quand le premier effet peut encourager un acteur à adopter une certaine conduite, le second peut le décourager de le faire. En payant un acteur pour réaliser une tâche particulière, on active l’effet prix, qui rend le comportement attendu plus probable, mais on active aussi l’effet d’éviction, qui le rend moins probable. On renforce donc une motivation (extrinsèque) et on en affaiblit une autre (intrinsèque). L’enjeu de la prédiction des comportements devient alors celui de la force relative d’un effet par rapport à l’autre.
Représentation schématique du modèle de Frey
Représentation schématique du modèle de Frey
43Ainsi construit, le modèle est parcimonieux et clair. Il suppose que la motivation intrinsèque et la motivation extrinsèque puissent produire les comportements attendus dès lors qu’elles sont suffisamment fortes, soit isolément, soit ensemble. Toutefois, la théorie ne dit pas quelles résistances ces motivations doivent dépasser, et ne précise donc pas ce qui constitue le « seuil » entre non-conformation et conformation. Dans le cas où la motivation intrinsèque est forte et la motivation extrinsèque faible, une intervention extérieure risque d’avoir des effets négatifs sur les performances des acteurs si elle réduit considérablement la motivation intrinsèque (si l’effet d’éviction est fort) et si elle n’augmente pas suffisamment la motivation extrinsèque en compensation (si l’effet prix est insuffisant). Les motivations combinées pour produire le comportement attendu sont donc moins fortes après l’intervention extérieure qu’avant. Le principal message de Frey se résume ainsi : la motivation intrinsèque est un ressort puissant des comportements de conformation, qu’une intervention extérieure peut détruire ou considérablement affaiblir. À cause de l’existence de cette autre motivation, et par le mécanisme d’éviction, une intervention régulatrice extérieure (qu’il s’agisse d’une régulation publique ou d’une régulation privée, comme dans un rapport employeur-employé) peut avoir un effet contraire à celui qui est attendu : elle peut produire moins de comportements attendus que pas d’intervention extérieure du tout.
44Frey n’ignore pas que la complexité de son objet rend impossible toute analyse déterministe [117]. Il s’attelle donc à préciser les conditions dans lesquelles les mécanismes produiront l’effet prédit. Il utilise abondamment la littérature empirique disponible dans une variété de disciplines différentes, ainsi que quelques petites études empiriques qu’il a lui même menées ou auxquelles il a participé.
Frey pose que l’effet d’éviction est d’autant plus fort que :
- le régulateur et le régulé sont proches et leurs interactions sont « encastrées » dans une relation ;
- l’activité visée est intéressante pour le régulé ;
- le régulé participe à l’élaboration des régulations ;
- le régulateur n’adapte pas ses interventions au mérite de chacun des régulés ;
- les interventions externes privilégient la régulation prescriptive à des récompenses (l’effet d’éviction généré par une régulation prescriptive est supposé toujours plus fort que celui généré par une récompense) ;
- les récompenses sont contingentes à l’observation par le régulé du comportement attendu par le régulateur ;
- la régulation est « dure » (i.e. inclut des menaces crédibles de punition en cas de non-conformation) ;
- l’intervention externe n’implique pas une reconnaissance de la motivation intrinsèque de l’agent [118].
48En intégrant l’ensemble de ces conditions à sa théorie, Frey englobe une littérature très large, qui va de la psychologie expérimentale aux études de mise en œuvre des politiques publiques en passant par l’économie de la régulation. À l’aide du cadre théorique ainsi défini, il entend pouvoir rendre compte de l’impact des interventions externes sur les motivations et les comportements dans des domaines très divers : les comportements « civiques » (vote, déclaration de revenus et paiement des impôts), la politique environnementale, les choix de sites pour des installations à problèmes (centrale nucléaire, décharge, site d’enfouissement de matières dangereuses, prison, hôpital psychiatrique) et le phénomène NIMBY (not in my backyard), les politiques sociales et organisationnelles (lutte contre la criminalité, dons de sang, etc.), la motivation des employés dans une entreprise. Pour Frey, l’effet d’éviction est d’importance cruciale car il peut se répandre à d’autres domaines d’activités, ou d’autres acteurs [119]. Ainsi, un acteur dont la motivation intrinsèque a été affaiblie ou évincée par une incitation monétaire dans un domaine donné pourrait conditionner ses comportements dans d’autres domaines à la présence de motivations extrinsèques (d’autres incitations). Il pourrait également inspirer un même déplacement de motivations à son entourage le plus proche [120].
49Dans une publication beaucoup plus récente, Frey et Feld ont proposé un cadre d’analyse plus spécifiquement adapté à la question de la conformation dans le cadre des politiques fiscales [121]. Ils partent du principe selon lequel autorités publiques et citoyens échangent impôts contre biens publics dans le cadre d’un « contrat psychologique ». Feld et Frey définissent ce dernier comme un concept intégrant à la fois les notions classiques de dissuasion et le sens du devoir. Ce contrat tient en fonction d’incitations positives et négatives, mais aussi de loyautés et de liens émotionnels. Ces derniers constituent le cœur d’une « tax morale », une morale commandant à chacun d’honorer ses obligations fiscales. Cette motivation intrinsèque interagit avec les autres motivations (extrinsèques) des contribuables, celles-là mêmes auxquelles s’adressent les incitations précitées. Ces interactions suivent les mécanismes théorisés par Frey et décrits ci-dessus. De plus, la conformation des contribuables aux obligations fiscales est contingente à la performance de l’État en termes de justice distributive (production de biens publics), de justice procédurale et de justice « interactionnelle » (qui suppose une forme d’égalité dans les rapports entre les parties au contrat, ou en tout cas l’exclusion de tout rapport hiérarchique, et renvoie à la personnalisation des interactions entre régulateur et régulé). Dans ce cadre, la principale influence sur la tax morale des contribuables est leur degré de satisfaction à l’égard de ce qu’ils reçoivent des autorités publiques.
50Par ces ajouts relativement simples au modèle, Feld et Frey cherchent à intégrer un ensemble de résultats empiriques accumulés depuis une dizaine d’années, notamment dans le domaine des politiques fiscales. Sur le fond, néanmoins, le modèle reste le même. Les éléments du « contrat psychologique » sont en quelque sorte intégrés dans la relation entre intervention publique et motivation intrinsèque (cf. figure 3).
51Le modèle de base de Frey est très parcimonieux. Les ajouts progressifs rendent le modèle plus complexe mais toujours praticable. On peut lui adresser toutefois un certain nombre de critiques.
52D’abord, on pourrait reprocher à Frey un certain excès d’optimisme. Il n’existe pas de théorie explicite sur la production de la motivation intrinsèque dans ses écrits, mais il semble néanmoins convaincu que l’on peut « produire » de la motivation intrinsèque non seulement par la socialisation (bien qu’il n’emploie pas ce terme), mais plus encore par l’intervention publique, les institutions politiques et la discussion [122]. Dans ses écrits, les effets de crowding-in semblent aussi rapides et aisés à manipuler que les effets de crowding-out. Pourtant, l’autorité ou la confiance – qui, dans les termes de la théorie de Frey, sont toutes deux fondées sur la motivation intrinsèque – si elles sont perdues ou trahies, sont extrêmement difficiles et longues à recréer. « La confiance arrive à pied et repart à cheval » [123]. Cela ne veut pas dire que l’effet de crowding-in est dans l’absolu improbable, mais il l’est sans doute pour certains types de motivation intrinsèque et dans certaines conditions. Sur ce point, le modèle manque de spécifications.
53Alors que Frey suppose que la motivation intrinsèque est toujours productrice de conformation, il peut y avoir aussi plusieurs sources de motivation intrinsèque pointant dans des directions différentes. Il existe des normes locales, entretenues et sanctionnées dans des groupes sociaux, qui peuvent s’opposer à la conformation parce qu’elles commandent des comportements qui ne s’accordent pas avec ceux que le régulateur demande [124]. Celles-ci, d’après la définition de Frey, sont également de l’ordre de la motivation intrinsèque. Si l’on suit Frey dans ses recommandations, ne devrait-on pas alors intervenir pour évincer ces motivations-là afin de produire de la conformation ? Mais alors pourquoi celles-là et pas d’autres motivations intrinsèques, celles-là mêmes que Frey enjoint ses lecteurs de ne pas mettre en péril ? Ici, la théorisation glisse clairement dans la normativité, et l’on pourrait mettre Frey au défi de séparer la « bonne » motivation intrinsèque de la « mauvaise ».
54Une autre simplification remet en question le réalisme du modèle tel qu’inscrit dans le cadre d’un « contrat psychologique ». Feld et Frey supposent que la non-conformation est un signe de désapprobation à l’égard de la conduite de l’autre partie au contrat (la puissance publique). « Bien évidemment, il sera difficile de parler de contrat psychologique fiscal dans des régimes autocratiques » [125], écrivent-ils. Or, comme ils le remarquent eux-mêmes, toutes les politiques publiques prescriptives et en particulier les politiques fiscales qu’ils étudient prévoient un dispositif de sanctions en cas de non-conformation. Dans ces conditions, si le contribuable désapprouvait la conduite de la puissance publique et considérait sérieusement l’évasion fiscale, la dissuasion et le risque de sanction ne deviendraient-ils pas un élément permettant d’expliquer les comportements de l’individu/du contribuable ? On observerait alors une forme de conformation ou de non-conformation qui n’est pas seulement, voire même pas principalement le signe d’une désapprobation. Leur conceptualisation est-elle alors adaptée aux démocraties imparfaites dans lesquelles nous vivons et où il existe une plus ou moins grande sujétion du citoyen à l’égard de l’État ? Frey et Feld, tout comme Scholz, ignorent la question de la conformation sans contrepartie, de l’obéissance à l’autorité. Elle est en effet incompatible avec la vision contractualiste entre égaux qu’ils veulent apposer sur les rapports État-citoyen [126]. Leur détermination à faire coller la réalité au modèle du marché est claire.
« If you can purchase a product from different suppliers, would you choose that who is more friendly and respectfully treating customers ? For sure, if the price differential is not too high. In a similar fashion, the way the tax office treats taxpayers plays a role [Quand vous pouvez acheter un produit auprès de différents fournisseurs, le choisissez-vous chez le plus amical et le plus respectueux envers les clients ? À coup sûr, si le différentiel de prix n’est pas trop fort. De même, la façon dont le percepteur traite les contribuables joue un rôle]. » [127]
56Existe-t-il réellement un tel choix sans contraintes de sortie ? Tout bien public produit par l’État existe généralement sans équivalent et sans possibilité d’opt out, à moins d’être prêt et capable d’émigrer dans un autre pays [128]. L’exemple de Thoreau peut être rappelé : lorsqu’on ne paye pas ses impôts parce que l’on est en désaccord avec l’usage qui est fait de cet argent dans les États-Unis de 1846, on se retrouve en prison…
57On pourrait donc appliquer au modèle de Frey la critique que Streeck et Thelen adressent aux approches de la conformation comme résolution d’un problème d’action collective entre un groupe d’égaux [129] : comme ils l’affirment, cette approche tend à masquer les relations d’autorité, la problématique des obligations et de leur mise en œuvre [130].
58Plus généralement, Frey peut laisser le lecteur sur sa faim quand il s’agit d’appuyer sa théorie par des résultats empiriques. Ce n’est pas le cas pour les effets des paiements monétaires, pour lesquels il propose un certain nombre de résultats, principalement expérimentaux, tout à fait convaincants. Il trouve également dans plusieurs autres études empiriques des illustrations de processus d’éviction dont son modèle peut rendre compte avec une grande efficacité [131]. Toutefois, dès qu’il aborde d’autres formes d’interventions extérieures que les incitations ou désincitations monétaires, l’argumentation faiblit. Frey tend à voir dans une situation purement institutionnelle la confirmation de sa théorie. Pourtant, celle-ci est un état de fait qui pourrait être expliqué autrement, d’autant plus que la théorie de Frey ne dit presque rien sur les effets d’agrégation. Par exemple, l’auteur suppose que le degré de participation des individus à la production des décisions est inversement corrélé à la force de l’effet d’éviction en cas d’intervention externe. Pour défendre cette hypothèse, il ne fait référence qu’à des comparaisons institutionnelles entre des formes distinctes de régulation, en particulier dans les organisations productives. Plus précisément, il évoque les modes de régulation quotidienne très décentralisés et sans pilotage hiérarchique explicite caractéristiques des entreprises japonaises, qu’il oppose aux modes de prise de décision et de régulation explicites et hiérarchiques qui sont en usage dans les entreprises américaines. Or, cette comparaison [132] ne confirme en rien l’effet sur lequel la théorie prend position. Elle ne fait que décrire des formes d’organisation contrastées qui ne disent rien sur la véracité de la théorie, à moins de supposer que les organisations anticipent les effets que Frey théorise et s’institutionnalisent parfaitement pour équilibrer effet d’éviction et effet de prix [133].
59Frey est le moins convaincant lorsqu’il cherche à appuyer sa théorie, qui est microsociologique, sur des exemples macrosociologiques. Le fait que les taux d’intérêt des obligations d’État pour financer l’emprunt soient généralement plus bas dans les États démocratiques serait ainsi un test positif pour la crowding-out theory [134] ! Frey élude les hypothèses alternatives pouvant expliquer ce résultat. Feld et Frey vont même jusqu’à affirmer que l’équivocité des résultats de nombreuses études empiriques sur la conformation est en faveur de leur théorie [135]. Celle-ci n’étant pas déterministe puisqu’elle combine deux mécanismes très généraux et en relation dynamique, elle peut donc produire des prédictions variables ; or, les résultats empiriques des études de conformation sont équivoques ; donc c’est un élément supplémentaire pour affirmer que leur théorie est probablement juste. Cet argument peut appuyer n’importe quelle théorie non déterministe des comportements de conformation, et pas seulement celle qu’ils proposent.
60À défaut de mieux spécifier son modèle (ce qui suppose de le complexifier), Frey se trouve donc sérieusement handicapé pour en faire mieux qu’un outil logique permettant de démontrer la possibilité de situations contre-intuitives, de même que la théorie des jeux ou les simulations multi-agents [136] permettent de mettre en forme des dynamiques d’interactions (et surtout les résultats de ces dynamiques) qui ressemblent à celles que l’on observe dans la réalité.
*
* *
Cette revue de littérature a mis en évidence la vive activité théorique entourant la question de la conformation. Cet objet intéresse directement la science politique, en particulier l’analyse des politiques publiques ; pourtant, les politologues l’ont jusqu’alors largement ignoré. Confrontés aux limites de leurs cadres d’analyse pour rendre compte d’un objet complexe, les contributeurs actuels à ce champ de recherche mettent à profit une longue pratique de l’interdisciplinarité pour piocher ici ou là sans complexe, empruntant des théories déjà anciennes (comme les néo-institutionnalismes) ou proposant des constructions nouvelles croisant concepts et résultats issus de disciplines distinctes (comme l’économie et la psychologie).
Ces tentatives souvent audacieuses ont évidemment de nombreuses limites. Elles révèlent parfois les a priori normatifs de leurs auteurs. Comme souvent pour la théorisation d’objets à la causalité complexe, on y trouve aussi des concepts synthétiques (comme les « motivational postures » de Braithwaite et al.) définis de manière à englober des facteurs et mécanismes nombreux et contradictoires. On l’a vu, ces stratégies ne sont pas les plus convaincantes. En revanche, les approches qui entendent rendre compte de la complexité des comportements de conformation à l’aide de théories de l’action elles-mêmes plus complexes – et qui, ce faisant, distinguent variables et mécanismes au lieu de les confondre dans des catégories extensives – apparaissent plus prometteuses. Elles annoncent souvent un vaste programme empirique (c’est notamment le cas pour les théories de Scholz et Frey) et si elles ne permettent pas de synthétiser toute la littérature existante, elles sont en mesure d’en reprendre quelques-uns des principaux résultats.
Ainsi, le champ des études de la conformation, s’il est faiblement cumulatif sur le plan empirique, fait montre d’une vigueur rare sur le plan théorique. Nombre des stratégies choisies sont sans doute vouées à l’échec. Néanmoins, leur évidente intention de construire sur les acquis des cadres théoriques passés tout en dépassant les limites de ceux-ci laisse envisager des retombées prochaines sur le plan empirique. Les politologues ont donc toutes les raisons de s’investir dans ce débat, qui les concerne directement [137].
Notes
-
[1]
Helen Ingram, Anne Schneider, « The Choice of Target Populations », Administration & Society, 23 (3), 1991, p. 333-356.
-
[2]
Néologisme qui a pour objet de traduire en français la distinction anglo-saxonne conformity/compliance. En anglais, la notion de compliance est plus large que la notion de conformity. Compliance désigne un acquiescement à des attentes qui peuvent être de formes multiples : règles, normes, propositions, prières, injonctions, suggestions, etc. Au contraire, conformity (comme le français « conformité ») désigne une identification à une « forme » précise : un standard, une règle, une loi, une norme sociale. De telle sorte que l’on peut définir conformity comme « compliance with standards, rules, or laws ». De plus, la notion de « conformité » évoque assez fréquemment l’idée de normes sociales partagées, alors que l’influence de celles-ci n’est qu’un élément parmi d’autres dans la réponse aux sollicitations publiques. Enfin, la notion de conformation ne doit pas être confondue avec la notion d’obéissance. La conformation n’est pas que l’obéissance, elle inclut également le consentement, et consentement et obéissance sont deux choses différentes, comme souligné par Hannah Arendt (Responsibility and Judgment, New York, Schocken, 2003, p. 42-43). Cf. également G. Pyrcz, « Obedience, Support, and Authority : The Limits of Political Obligation in a Democracy », Canadian Journal of Political Science, 14(2), 1981, p.337-352.
-
[3]
Voir Frank Baumgartner Bryan D. Jones, Agendas and Instability in American Politics, Chicago, University of Chicago Press, 1993 ; Bruno Jobert, Pierre Muller, L’État en action. Politiques publiques et corporatismes, Paris, PUF, 1987 ; John W. Kingdon, Agendas, Alternatives and Public Policies, New York, Longman, 1984 ; Giandomenico Majone, Evidence, Argument, & Persuasion in the Policy Process, New Haven, Yale University Press, 1989 ; Anne Schneider, Helen Ingram, Policy Design for Democracy, Studies in Government and Public Policy, Lawrence, University Press of Kansas, 1997.
-
[4]
Wayne Parsons, Public Policy, Cheltenham, Edward Elgar, 1995, p. 457 et suiv.
-
[5]
Dietmar Braun, Olivier Giraud, « Politikinstrumente im Kontext von Staat, Markt und Governance », dans Klaus Schubert, Nils C. Bandelow (Hrsg.), Lehrbuch der Politikfeldanalyse 2.0., Munich, Oldenburg Verlag, 2009, p. 159-190 ; Pearl Eliadis, Margaret M. Hill, Michael Howlett, « Introduction », dans Pearl Eliadis, Margaret M. Hill, Michael Howlett (eds), Designing Government. From Instruments to Governance, Montreal & Kingston, McGill-Queen’s University Press, 2005, p. 1-18 ; Christopher Hood, The Tools of Government, Chatham, Chatham House, 1986 ; Pierre Lascoumes, Patrick Le Galès, Gouverner par les instruments, Paris, Presses de Sciences Po, 2004 ; Lester M. Salamon (ed.), The Tools of Government. A Guide to the New Governance, Oxford, Oxford University Press, 2002.
-
[6]
Pascale Laborier, Dany Trom (dir.), Historicités de l’action publique, Paris, PUF, 2003 ; Renaud Payre, Gilles Pollet, « Analyse des politiques publiques et sciences historiques : quel(s) tournant(s) socio-historique(s) ? », Revue française de science politique, 55 (1), février 2005, p. 133-154.
-
[7]
P. Eliadis et al., « Introduction », cité, p. 7.
-
[8]
Joe Soss a initié un questionnement sur les effets du policy design sur les destinataires : « To gauge its overall effects, we must think more broadly about how policy designs affect status, belief, and action in the citizenry » (Joe Soss, « Making Clients and Citizens : Welfare Policy as a Source of Status, Belief, and Action », dans Anne Schneider, H. Ingram (eds), Deserving and Entitled : Social Constructions and Public Policy, New York, State University of New York Press, 2005, p. 292). Le policy design est analysé comme une cause et non plus comme un effet : « policy designs construct contexts of transaction and subject positions for citizens who enter the welfare system » (ibid., p. 302). Il est aussi désormais étudié au niveau microsociologique, et non plus strictement macrosociologique, comme fait jusqu’alors par Schneider et Ingram (Policy Design for Democracy…, op. cit.).
-
[9]
« […] A practice and a way of thinking about rule […] » : Mitchell Dean, Governmentality, Londres, Sage, 1999, p. 78.
-
[10]
En particulier les travaux de Gibbs, Tittle et Jensen, puis ceux de Grasmick et Green, Silberman, Meier et Johson. Voir notamment Harold G. Grasmick, Donald E. Green, « Legal Punishment, Social Disapproval and Internalization as Inhibitors of Illegal Behavior », The Journal of Criminal Law and Criminology, 71 (3), 1980, p. 325-335.
-
[11]
Gary S. Becker, « Crime and Punishment : An Economic Approach », Journal of Political Economy, 76, mars-avril 1968, p. 169-217 ; Gary S. Becker, George J. Stigler, « Law Enforcement, Malfeasance, and Compensation of Enforcers », The Journal of Legal Studies, 3 (1), 1974, p. 1-18 ; George J. Stigler, « The Optimum Enforcement of Laws », Journal of Political Economy, 78 (3), 1970, p. 526-536.
-
[12]
G. S. Becker, G. J. Stigler, ibid.
-
[13]
Par exemple, Sam Peltzman, « The Effects of Automobile Safety Regulation », Journal of Political Economy, 83 (4), 1975, p. 677-725 ; G. J. Stigler, « The Optimum Enforcement… », op. cit.
-
[14]
Entre autres H. G. Grasmick, D. E. Green, « Legal Punishment, Social Disapproval… », art. cité ; Raymond Paternoster, Linda E. Saltzman, Gordon P. Waldo, Theodore G. Chiricos. « Perceived Risk and Social Control : Do Sanctions Really Deter ? », Law & Society Review, 17 (3), 1983, p. 457-480 ; Raymond Paternoster, Sally Simpson, « Sanction Threats and Appeals to Morality : Testing a Rational Choice Model of Corporate Crime », Law & Society Review, 30 (3), 1996, p. 549-583 ; Lawrence W. Sherman, « Defiance, Deterrence, and Irrelevance : A Theory of the Criminal Sanction », Journal of Research in Crime and Delequency, 30 (4), 1993, p. 445-473 ; plus généralement : Diane Vaughan, « Rational Choice, Situated Action, and the Social Control of Organizations », Law and Society Review, 32 (1), 1998, p. 23-61.
-
[15]
La théorie de la décision a néanmoins fourni des propositions plus fines que ses détracteurs oublient parfois. On y trouve très tôt l’idée d’une pluralité de motivations dans les comportements individuels. Peltzman, dans une étude classique sur les effets de la régulation sur la sécurité routière (S. Peltzman, « The Effects of Automobile… », art. cité) a identifié un effet contre-intuitif des régulations publiques, qu’il a appelé « offsetting effect ». Il a supposé que les destinataires des règles sur la sécurité routière ont compensé la contrainte de la ceinture de sécurité par une conduite plus dangereuse, laquelle leur permettait de retirer de la conduite la stimulation que la ceinture avait brimée.
-
[16]
George Tsebelis, « The Effects of Fines on Regulated Industries », Journal of Theoretical Politics, 3 (1), 1991, p. 81-101 ; et « Penalty and Crime : Further Theoretical Considerations and Empirical Evidence », Journal of Theoretical Politics, 5 (3), 1993, p. 349-374.
-
[17]
Laura I. Langbein, Cornelius M. Kerwin, « Implementation, Negotiation and Compliance in Environmental and Safety Regulation », The Journal of Politics, 47 (3), 1985, p. 854-880.
-
[18]
Ian Ayres, John Braithwaite, Responsive Regulation, New York/Oxford, Oxford University Press, 1992 ; John T. Scholz, « Enforcement Policy and Corporate Misconduct : The Changing Perspective of Deterrence Theory », Law & Contemporary Problems, 60 (3), 1997, p. 253-268.
-
[19]
Ian Ayres, John Braithwaite, « Tripartism : Regulatory Capture and Empowerment », Law and Social Inquiry, 16 (3), 1991, p. 435-496.
-
[20]
Cf. G. Tsebelis, « The Effects of Fines… », art. cité.
-
[21]
Valerie Braithwaite, John Braithwaite, Diane Gibson, Toni Makkai, « Regulatory Styles, Motivational Postures and Nursing Home Compliance », Law & Policy, 16 (4), 1994, p. 363.
-
[22]
James G. March, Johan P. Olsen, Rediscovering Institutions. The Organizational Basis of Politics, New York, Free Press, 1989 ; et « The Logic of Appropriateness », dans Michael Moran, Martin Rein et Robert E. Goodin (eds), The Oxford Handbook of Public Policy, Oxford, Oxford University Press, 2006, p. 689-708.
-
[23]
I. Ayres, J. Braithwaite, Responsive Regulation, op. cit.
-
[24]
Ibid., p. 96.
-
[25]
Voir notamment Neil Gunningham, Peter Grabosky, Smart Regulation. Designing Environmental Policy, Oxford, Oxford University Press, 1998 ; Neil Gunningham, Dorothy Thornton, Robert A. Kagan, « Motivating Management : Corporate Compliance in Environmental Protection », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 289-316 ; Ch. Hood, The Tools…, op. cit. ; Robert A. Kagan, John T. Scholz, « The Criminology of the Corporation and Regulatory Enforcement Strategies », dans Keith O. Hawkins, John M. Thomas (eds), Enforcing Regulation, Hingham, Kluwer-Nijhoff, 1984, p. 67-96 ; Ronald B. Mitchell, « Compliance Theory : Compliance, Effectiveness, and Behaviour Change in International Environmental Law », dans Jutta Brunee, Daniel Bodansky, Ellen Hey (eds), Oxford Handbook of International Environmental Law, Oxford, Oxford University Press, 2007, p. 893-921 ; John T. Scholz, « Cooperation, Deterrence, and the Ecology of Regulatory Enforcement », Law & Society Review, 18 (2), 1984, p. 179-224 ; L. W. Sherman, « Defiance, Deterrence, and Irrelevance… », art. cité ; Ton van Snellenberg, Rob van de Peppel, « Perspectives on Compliance : Non-Compliance with Environmental Licences in the Netherlands », European Environment, 12, 2002, p. 131-148 ; Dorothy Thornton, Neil Gunningham, Robert A. Kagan, « General Deterrence and Corporate Environmental Behavior », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 262-288.
-
[26]
R. A. Kagan, J. T. Scholz, « The Criminology… », cité.
-
[27]
Eugene Bardach, Robert A. Kagan, Going by the Book. The Problem of Regulatory Unreasonableness, New Brunswick/Londres, Transaction Publishers, 2e éd., 2002.
-
[28]
Ch. Hood, The Tools…, op. cit.
-
[29]
Voir Kathleen M. McGraw, John T. Scholz, « Appeals to Civic Virtue Versus Attention to Self-Interest : Effects on Tax Compliance », Law & Society Review, 25 (3), 1991, p. 471-498.
-
[30]
Voir notamment James Alm, Isabel Sanchez, Ana De Juan, « Economic and Noneconomic Factors in Tax Compliance », Kyklos, 48 (1), 1995, p. 3-18 ; Sebastian Bamberg, Peter Schmidt, « Regulating Transport : Behavioural Changes in the Field », Journal of Consumer Policy, 22, 1999, p. 479-509, dont p. 505 ; Ray Fisman, Edward Miguel, « Corruption, Norms and Legal Enforcement : Evidence from Diplomatic Parking Tickets », Journal of Political Economy, 115 (6), 2007, p. 1020-1048 ; Stig S. Gezelius, « Do Norms Count ? State Regulation and Compliance in a Norwegian Fishing Community », Acta Sociologica, 45 (4), 2002, p. 305-314, et Regulation and Compliance in the Atlantic Fisheries, Dordrecht, Kluwer Academic Publishers, 2003 ; Fiona Haines, David Gurney, « The Shadows of the Law : Contemporary Approaches to Regulation and the Problem of Regulatory Conflict », Law & Policy, 25 (4), 2003, p. 353-380 ; Siegwart Lindenberg, Linda Steg, « Normative, Gain and Hedonic Goal Frames Guiding Environmental Behavior », Journal of Social Issues, 63 (1), 2007, p. 117-137 ; Peter J. May, « Regulation and Compliance Motivations : Examining Different Approaches », Public Administration Review, 65 (1), 2005, p. 31-44, et « Compliance Motivations : Perspectives of Farmers, Homebuilders, and Marine Facilities », Law & Policy, 27 (2), 2005, p. 317-347 ; J. T. Scholz, « Enforcement Policy and… » ; Michael Wenzel, « Motivation or Rationalisation ? Causal Relations between Ethics, Norms and Tax Compliance », Journal of Economic Psychology, 26, 2005, p. 491-508. On trouve une évolution similaire dans la théorie économique des années 1990 : cf. John G. Cullis, Alan Lewis, « Why People Pay Taxes : From a Conventional Economic Model to a Model of Social Convention », Journal of Economic Psychology, 18, 1997, p. 305-321, dont p. 312.
-
[31]
Par exemple : John Braithwaite, Toni Makkai, « Testing an Expected Utility Model of Corporate Deterrence », Law & Society Review, 25 (1), 1991, p. 7-40 ; V. Braithwaite, J. Braithwaite, D. Gibson, T. Makkai, « Regulatory Styles… », art. cité.
-
[32]
Ronald B. Mitchell, Intentional Oil Pollution at Sea, Cambridge, MIT Press, 1994.
-
[33]
Lars P. Feld, Bruno S. Frey, « Tax Compliance as the Result of a Psychological Tax Contract : The Role of Incentives and Responsive Regulation », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 102-120 ; R. Paternoster, S. Simpson, « Sanction Threats… », art. cité ; John T. Scholz, « Contractual Compliance and The Federal Income Tax System », Journal of Law & Policy, 13, 2003, p. 139-203.
-
[34]
Fiona Haines, Corporate Regulation. Beyond « Punish or Persuade », Oxford, Clarendon Press, 1997, p. 234. Dans le même sens : S. Bamberg, P. Schmidt, « Regulating Transport… », art. cité, p. 480 ; S. Lindenberg, L. Steg, « Normative, Gain and Hedonic Goal Frames… », art. cité ; Paul C. Stern, « Information, Incentives, and Proenvironmental Consumer Behavior », Journal of Consumer Policy, 22 (4), 1999, p. 461-478.
-
[35]
Cf. P. J. May, « Regulation and Compliance Motivations… », art. cité ; et « Compliance Motivations… », art. cité.
-
[36]
Walter W. Powell, Paul J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism in Organizational Analysis, Chicago, Chicago University Press, 1991 ; J. G. March, J. P. Olsen, Rediscovering Institutions…, op. cit. ; Douglass C. North, Institutions, Institutional Change and Economic Performance, Cambridge, Cambridge University Press, 1990.
-
[37]
Julia Black, « New Institutionalism and Naturalism in Socio-Legal Analysis : Institutionalist Approaches to Regulatory Decision Making », Law & Policy, 19 (1), 1997, p. 51-93 ; Mark C. Suchman, Lauren B. Edelman, « Legal Rational Myths : The New Institutionalism and the Law and Society Tradition », Law and Social Inquiry, 21 (4), 1997, p. 903-941 ; John R. Sutton, « Rethinking Social Control », Law & Social Inquiry, 21 (4), 1996, p. 943-958.
-
[38]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 66.
-
[39]
Cf. D. C. North, Institutions, Institutional Change…, op. cit.
-
[40]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 67.
-
[41]
Ibid., p. 68.
-
[42]
Roger Friedland, Robert R. Alford, « Bringing Society Back In : Symbols, Practices, and Institutional Contradictions », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism in Organizational Analysis, op. cit., p. 232-266.
-
[43]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 70.
-
[44]
Paul J. DiMaggio, Walter W. Powell, « The Iron Cage Revisited : Institutional Isomorphism and Collective Rationality in Organizational Fields », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 63-82.
-
[45]
M. C. Suchman, L. B. Edelman, « Legal Rational Myths… », art. cité, p. 922-923.
-
[46]
John M. Meyer, Brian Rowan, « Institutionalized Organizations : Formal Structure as Myth and Ceremony », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 41-62.
-
[47]
Andrew Hopkins, « Compliance with What ? The Fundamental Regulatory Question », British Journal of Criminology, 34 (4), 1994, p. 431-443.
-
[48]
Également Nils Brunsson, The Organization of Hypocrisy, Copenhague, Copenhagen Business School Press, 2002.
-
[49]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 82.
-
[50]
C’est notamment le cas en ce qui concerne les sanctions, qui tiennent un rôle central dans la littérature sur la conformation. Comme l’écrivent DiMaggio et Powell, la théorisation du rapport entre sanctions et institutions n’est pas cohérente à l’intérieur du courant néo-institutionnaliste : Paul J.DiMaggio, Walter W. Powell, « Introduction », dans W. W. Powell, P. J. DiMaggio (eds), The New Institutionalism…, op. cit., p. 37, note 23.
-
[51]
J. Black, « New Institutionalism… », art. cité, p. 81.
-
[52]
Ibid., p. 81-82 ; M. C. Suchman, L. B. Edelman, « Legal Rational Myths… », art. cité, p. 905. L’article de Jepperson et Meyer dans l’ouvrage dirigé par Powell et DiMaggio en est une bonne illustration.
-
[53]
M. C. Suchman, L. B. Edelman, ibid., p. 907-908 ; cf. aussi F. Haines, D. Gurney, « The Shadows of the Law… », art. cité.
-
[54]
Voir Vibeke Lehmann Nielsen, « Dialogue, Differential Treatment and Public Regulation : Why the very Character of Social Interaction is Important », dans 2003 Annual Meeting of the Law and Society Association (LSA), Pittsburgh, Pennsylvania, USA, 2003 ; Christine Parker, « How to Win Hearts and Minds : Corporate Compliance Policies for Sexual Harassment », Law & Policy, 21 (1), 1999, p. 21-48, et The Open Corporation. Effective Selfregulation and Democracy, Cambridge, Cambridge University Press, 2002.
-
[55]
Edward J. Bird, « Can Welfare Policy Make Use of Social Norms ? », Rationality and Society, 11 (3), 1999, p. 343-365 ; S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité ; et, Regulation and Compliance…, op. cit. ; Christine Horne, « The Enforcement of Norms : Group Cohesion and Meta-Norms », Social Psychology Quarterly, 64 (3), 2001, p. 253-266 ; « Collective Benefits, Exchange Interests, and Norm Enforcement », Social Forces, 82 (3), 2004, p. 1037-1062 ; et « Explaining Norm Enforcement », Rationality and Society, 19 (2), 2007, p. 139-170.
-
[56]
Lawrence Lessig, « The Regulation of Social Meaning », The University of Chicago Law Review, 62 (3), 1995, p. 943-1045 ; Michael P. Vandenbergh, « Beyond Elegance : A Testable Typology of Social Norms in Corporate Environmental Compliance », Stanford Environmental Law Journal, 22, 2003, p. 55-144.
-
[57]
James S. Coleman, Foundations of Social Theory, Cambridge, Harvard University Press, 1990.
-
[58]
Voir Mark Granovetter, « Economic Action and Social Structure : The Problem of Embeddedness », American Journal of Sociology, 91 (3), 1985, p. 481-510.
-
[59]
S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, et Regulation and Compliance…, op. cit. ; Lawrence Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité ; Michael Wenzel, « The Social Side of Sanctions : Personal and Social Norms as Moderators of Deterrence », Law and Human Behavior, 28 (5), 2004, p. 547-567, « Motivation or Rationalization ?… », art. cité, « The Multiplicity of Taxpayer Identities and Their Implications for Tax Ethics », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 31-50.
-
[60]
L’auteur a proposé une théorie de la conformation qui peut aussi être associée à ce troisième courant : Julien Étienne, « L’impact de l’action publique sur les comportements privés : une approche de goal framing theory », thèse pour le doctorat de science politique, Amiens, Université de Picardie-Jules Verne, 2009.
-
[61]
V. Braithwaite, J. Braithwaite, D. Gibson, T. Makkai, « Regulatory Styles… », art. cité ; Valerie Braithwaite, Kristina Murphy, Monika Reinhart, « Taxation Threat, Motivational Postures, and Responsive Regulation », Law & Policy, 29 (1), 2007, p. 137-158.
-
[62]
Sharon S. Brehm, Jack W. Brehm, Pscychological Reactance : A Theory of Freedom and Control, New York, Academic Press, 1981.
-
[63]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, « Taxation Threat… », art. cité.
-
[64]
Ibid., p. 138.
-
[65]
« Motivational postures […] summarize many forces that individuals perceive in their environment, internal and external, some created by the specific actions of a regulatory authority, others existing independently of that authority. Among the relevant variables are identities […], notions of duty and of fear […], rationalization […], ideological preferences, and feelings of trust […] » (ibid., p. 139-140).
-
[66]
Voir Tom R. Tyler, Why People Obey the Law, Princeton, Princeton University Press, 2006.
-
[67]
Uwe Schimank, Handeln und Strukturen. Einführung in die akteurtheorische Soziologie, Weinheim, Juventa, 2000. L’homme émotionnel, d’abord motivé par la recherche du bien-être individuel immédiat, reste le moins exploré de ces paradigmes (Jon Elster, Nuts and Bolts for the Social Sciences, Cambridge, Cambridge University Press, 1989, p. 61-70 ; « Emotions and Economic Theory », Journal of Economic Literature, 36 (1), 1998, p. 47-74), même si les émotions font l’objet d’une attention croissante, notamment en économie (cf. Astrid Hopfensitz, Ernesto Reuben, « The Importance of Emotions for the Effectiveness of Social Punishment », The Economic Journal, 119 (540), 2009, p. 1534-1559). L’homo sociologicus, motivé par le choix du comportement qui convient, évoque la logique de l’action normée des sociologues classiques et celle de l’action appropriée (logic of appropriateness). Quant à l’homo oeconomicus, il peut être associé aux variantes les plus classiques de la théorie économique et sociologique fondée sur l’hypothèse d’un individu utilitariste et maximisateur. C’est le paradigme qui fonde la théorie du choix rationnel.
-
[68]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, « Taxation Threat… », art. cité., p.140-141.
-
[69]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 140-141.
-
[70]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 153.
-
[71]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 151.
-
[72]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 151.
-
[73]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 152.
-
[74]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 152-153.
-
[75]
V. Braithwaite, K. Murphy, M. Reinhart, ibid., p. 140-141.
-
[76]
Cf. Ronald B. Mitchell, Intentional Oil Pollution at Sea, op. cit.
-
[77]
Cf. S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, Regulation and Compliance…, op. cit. ; L. Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité.
-
[78]
Ibid.
-
[79]
Voir Anne Schneider, Helen Ingram, « Behavioral Assumptions of Policy Tools », Journal of Politics, 52 (2), 1990, p. 510-529.
-
[80]
A. Schneider, H. Ingram (eds), Deserving and Entitled…, op. cit. ; J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité ; M. Dean, Governmentality, op. cit., p. 165.
-
[81]
Christian Steglich, The Framing of Decision Situations. Automatic Goal Selection and Rational Goal Pursuit, Groningen, Department of Behavioral and Social Sciences, ICS Disseration Series, University of Groningen, 2003.
-
[82]
Cf. William A. Edmundson, « Is Law Coercive ? », Legal Theory, 1, 1995, p. 81-111.
-
[83]
J. T. Scholz, « Cooperation, Deterrence, and the Ecology… », art. cité, et « Cooperative Regulatory Enforcement and the Politics of Administrative Effectiveness », American Political Science Review, 85 (1), 1991, p. 115-136.
-
[84]
J. T. Scholz, « Enforcement Policy… », art. cité.
-
[85]
Christine H. Roch, John T. Scholz, Kathleen M. McGraw, « Social Networks and Citizen Response to Legal Change », American Journal of Political Science, 44 (4), 2000, p. 777-791 ; John T. Scholz, Neil Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance : The Heuristic Basis of Citizenship Behavior », American Journal of Political Science, 39 (2), 1995, p. 490-512 ; Mark Lubell, John T. Scholz, « Adaptive Political Attitudes : Duty, Trust, and Fear as Monitors of Tax Policy », American Journal of Political Science, 42 (3), 1998, p. 903-920, « Trust and Taxpaying : Testing the Heuristic Approach to Collective Action », American Journal of Political Science, 42 (2), 1998, p. 398-417, et « Cooperation, Reciprocity, and the Collective Action Heuristic », American Journal of Political Science, 45, 2001, p. 160-178.
-
[86]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 166 ; Scholz est néanmoins très proche de ce dernier courant, et utilise nombre d’arguments développés par certains de ses principaux contributeurs (Levi, Ostrom, Weingast…)
-
[87]
Voir John T. Scholz, Wayne B. Gray, « Can Government Facilitate Cooperation ? An Informational Model of OSHA Enforcement », American Journal of Political Science, 41, 1997, p. 693-717.
-
[88]
En psychologie, les biais cognitifs désignent les tendances à faire des erreurs de jugement. Par exemple : sous-estimer ou surestimer la probabilité d’événements futurs, interpréter des informations nouvelles de manière à renforcer des croyances personnelles, accorder plus d’importance aux pertes qu’aux gains, etc.
-
[89]
Les heuristiques sont des stratégies ou des règles simples permettant aux individus de résoudre des problèmes et faire des choix, en particulier lorsqu’ils font face à des problèmes complexes ou disposent d’une information incomplète ou ambiguë. On parle souvent à leur sujet de « raccourcis » cognitifs.
-
[90]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 140.
-
[91]
J. T. Scholz, ibid., p. 139.
-
[92]
J. T. Scholz, N. Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance… », art. cité, p. 491.
-
[93]
J. T. Scholz, N. Pinney, ibid., p. 509.
-
[94]
Peter M. Blau, Exchange and Power in Social Life, Londres, Transaction Publishers, 1986.
-
[95]
J. T. Scholz, N. Pinney, « Duty, Fear, and Tax Compliance… », art. cité, p. 509 ; John T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 172.
-
[96]
« Particularly when the expected costs and benefits associated with distributional justice are too difficult to track, procedural justice provides […] an additional contingency in deciding whether or not to fulfill related obligations » (J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 177).
-
[97]
J. T. Scholz, ibid., p. 178-179.
-
[98]
J. T. Scholz, ibid., p. 190.
-
[99]
J. T. Scholz, ibid., p. 192.
-
[100]
J. T. Scholz, ibid., p. 196.
-
[101]
J. T. Scholz, ibid., p. 199.
-
[102]
J. T. Scholz, ibid., p. 198.
-
[103]
J. T. Scholz, ibid., p. 151. Margaret Levi partage cette perspective : Margaret Levi, « Why We Need a New Theory of Government », Perspectives on Politics, 4 (1), 2006, p. 5-19.
-
[104]
Cela supposerait que tous les acteurs perçoivent l’action publique comme une action menée en leur nom. Or, Soss montre au contraire comment des destinataires d’une politique sociale aux États-Unis viennent à percevoir l’agence qui l’applique dans des termes tout à fait différents : « They come to understand the agency’s capacities for action as an autonomous power over them, rather than as the power to act on their behalf » (J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité, p. 301).
-
[105]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 191.
-
[106]
J. T. Scholz, ibid., p. 180.
-
[107]
J. T. Scholz, ibid., p. 178.
-
[108]
J. T. Scholz, ibid., p. 192.
-
[109]
Dietmar Braun, Olivier Giraud, « Models of Citizenship and Social Democratic Policies », dans Giuliano Bonoli, Martin Powell (eds), Social Democratic Party Policies in Contemporary Europe, Londres, Routledge, 2004, p. 149-176.
-
[110]
Hannah Arendt, Du mensonge à la violence, Paris, Calmann-Lévy, 1972.
-
[111]
Voir James S. Coleman, « Authority Systems », Public Opinion Quarterly, 44 (2), 1980, p. 147.
-
[112]
J. T. Scholz, « Contractual Compliance… », art. cité, p. 191.
-
[113]
Bertrand de Jouvenel, Du pouvoir. Histoire naturelle de sa croissance, Paris, Hachette, 1998, p. 171.
-
[114]
Bruno S. Frey, Not Just for the Money : An Economic Theory of Personal Motivation, Cheltenham, Edward Elgar, 1997 ; Bruno S. Frey, Reto Jegen, « Motivation Crowding Theory », Journal of Economic Surveys, 15 (5), 2001, p. 589-611.
-
[115]
Lindenberg note que Frey a fait glisser la notion de « motivation intrinsèque » au-delà des limites que les psychologues avaient fixées. Pour ces derniers, la motivation intrinsèque ne pouvait correspondre à un sentiment d’obligation (Siegwart Lindenberg, « Intrinsic Motivation in a New Light », Kyklos, 54 (2-3), 2001, p. 317-342, dont p. 319).
-
[116]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. xii.
-
[117]
B. S. Frey, ibid., p. 10.
-
[118]
Jones et Cullis affirment qu’une telle reconnaissance peut être produite (« signalée ») par deux inputs principaux : une posture éthique (« ethical posturing ») et des transferts en nature (« in-kind transfers ») : Philip Jones, John Cullis, « Key Parameters in Policy Design : The Case of Intrinsic Motivation », Journal of Social Policy, 32 (4), 2003, p. 527-547, dont p. 531.
-
[119]
Un argumentaire proche est développé par J. Soss, « Making Clients and Citizens… », cité, p. 305-12.
-
[120]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 36-37.
-
[121]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité.
-
[122]
B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 115.
-
[123]
Nooteboom, cité par Andrew Goldsmith, « Police Reform and the Problem of Trust », Theoretical Criminology, 9 (4), 2005, p. 445 ; plus généralement Paul Slovic, « Perceived Risk, Trust and Democracy », Risk Analysis, 13, 1993, p. 675-682 ; Neil Gunningham, Darren Sinclair, « Regulation and the Role of Trust : Reflections from the Mining Industry », Working Paper 59, National Research Centre for OHS Regulation, The Australian National University, 2008, p. 27 ; Richard H. Pildes, « The Destruction of Social Capital through Law », University of Pennsylvania Law Review, 144 (5), 1996, p. 2055-2077.
-
[124]
Voir S. S. Gezelius, « Do Norms Count ?… », art. cité, et Regulation and Compliance…, op. cit. ; L. Lessig, « The Regulation of Social Meaning », art. cité.
-
[125]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 107.
-
[126]
« If tax administrations instead treat taxpayers as inferiors in a hierarchical relationship, the psychological contract is violated and citizens have good reason not to stick to their part of the contract and evade taxes » (L. P. Feld, B. S. Frey, ibid., p. 104).
-
[127]
L. P. Feld, B. S. Frey, ibid., p. 107.
-
[128]
W. Parsons, Public Policy, op. cit., p. 527, 529-532.
-
[129]
Cf. Jon Elster, The Cement of Society, Cambridge, Cambridge University Press, 1989 ; M. Lubell, J. T. Scholz, « Cooperation, Reciprocity, and the Collective Action Heuristic », art. cité.
-
[130]
Wolfgang Streeck, Kathleen Thelen, « Introduction : Institutional Change in Advanced Political Economies », dans Wolfgang Streeck, Kathleen Thelen (eds), Beyond Continuity : Institutional Change in Advanced Political Economies, Oxford, Oxford University Press, 2005, p. 1-39, dont p. 11.
-
[131]
En particulier B. S. Frey, R. Jegen, « Motivation Crowding Theory », art. cité, p. 597-604.
-
[132]
Issue de Masahiko Aoki, « Towards an Economic Model of the Japanese Firm », Journal of Economic Literature, 28 (1), 1990, p. 1-27 ; Frey fait apparemment référence à un passage situé page 13.
-
[133]
Feld et Frey font explicitement cette hypothèse (L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 105). La théorie de Frey est une théorie de la rationalité étendue plus qu’une théorie de la rationalité limitée (B. S. Frey, Not Just for the Money…, op. cit., p. 118-125). Elle suppose en tout cas que les régulateurs (les « principals ») puissent rationnellement fixer le niveau optimal d’intervention compte tenu du crowding-out effect et du spill-over effect (ibid., p. 38) : n’étant pas sujets à intervention extérieure, le modèle est de peu d’intérêt pour expliquer leurs comportements à eux, et Frey leur attribue donc une rationalité héroïque.
-
[134]
B. S. Frey, Not just for the Money…, ibid., p. 52 ; B. S. Frey, R. Jegen, « Motivation Crowding Theory », art. cité, p.606.
-
[135]
L. P. Feld, B. S. Frey, « Tax Compliance as the Result… », art. cité, p. 108.
-
[136]
Jean-Pierre Dupuy, Aux origines des sciences cognitives, Paris, La Découverte, 1999.
-
[137]
L’auteur tient à remercier Dimitra Angelaki, Vanessa Bernadou et Olivier Giraud pour leur relecture attentive de précédentes versions, leurs conseils et commentaires. Les erreurs et imprécisions qui demeurent sont de la seule responsabilité de l’auteur.